What do you think?
Rate this book
484 pages, Hardcover
First published January 1, 1890
'C’était comme un grand corps, un être géant couché en travers de la terre, la tête à Paris, les vertèbres tout le long de la ligne, les membres s’élargissant avec les embranchements, les pieds et les mains au Havre et dans les autres villes d’arrivée. Et ça passait, ça passait, mécanique, triomphal, allant à l’avenir avec une rectitude mathématique, dans l’ignorance volontaire de ce qu’il restait de l’homme [...].'
'Le monde entier défilait, la foule humaine charriée à toute vapeur, sans qu’ils en connussent autre chose que des visages entrevus dans un éclair[...]. Et voilà que, dans la neige, un train débarquait à leur porte : l’ordre naturel était perverti, ils dévisageaient ce monde inconnu qu’un accident jetait sur la voie, [...] avec des yeux ronds de sauvages, accourus sur une côte où des Européens naufrageraient.'
'Pourtant, cette idée du flot de foule que les trains montants et descendants charriaient quotidiennement devant elle, au milieu du grand silence de sa solitude, la laissait pensive, les regards sur la voie, où tombait la nuit. Quand elle était valide, qu’elle allait et venait, se plantant devant la barrière, le drapeau au poing, elle ne songeait jamais à ces choses. Mais des rêveries confuses, à peine formulées, lui embarbouillaient la tête, depuis qu’elle demeurait les journées sur cette chaise, n’ayant à réfléchir à rien qu’à sa lutte sourde avec son homme. Cela lui semblait drôle, de vivre perdue au fond de ce désert, sans une âme à qui se confier, lorsque, de jour et de nuit, continuellement, il défilait tant d’hommes et de femmes, dans le coup de tempête des trains, secouant la maison, fuyant à toute vapeur. Bien sûr que la terre entière passait là, pas des Français seulement, des étrangers aussi, des gens venus des contrées les plus lointaines, puisque personne maintenant ne pouvait rester chez soi, et que tous les peuples, comme on disait, n’en feraient bientôt plus qu’un seul. Ça, c’était le progrès, tous frères, roulant tous ensemble, là-bas, vers un pays de cocagne. Elle essayait de les compter, en moyenne, à tant par wagon : il y en avait trop, elle n’y parvenait pas. Souvent, elle croyait reconnaître des visages, celui d’un monsieur à barbe blonde, un Anglais sans doute, qui faisait chaque semaine le voyage de Paris, celui d’une petite dame brune, passant régulièrement le mercredi et le samedi. Mais l’éclair les emportait, elle n’était pas bien sûre de les avoir vus, toutes les faces se noyaient, se confondaient, comme semblables, disparaissant les unes dans les autres. Le torrent coulait, en ne laissant rien de lui. Et ce qui la rendait triste, c’était, sous ce roulement continu, sous tant de bien-être et tant d’argent promenés, de sentir que cette foule toujours si haletante ignorait qu’elle fût là, en danger de mort, à ce point que, si son homme l’achevait un soir, les trains continueraient à se croiser près de son cadavre, sans se douter seulement du crime, au fond de la maison solitaire.
Phasie était restée les yeux sur la fenêtre, et elle résuma ce qu’elle éprouvait trop vaguement pour l’expliquer tout au long.
— Ah ! c’est une belle invention, il n’y a pas à dire. On va vite, on est plus savant… Mais les bêtes sauvages restent des bêtes sauvages, et on aura beau inventer des mécaniques meilleures encore, il y aura quand même des bêtes sauvages dessous.'
'Il y avait là un triomphe pour le juge d’instruction Denizet, car on ne tarissait pas d’éloges, dans le monde judiciaire, sur la façon dont il venait de mener à bien cette affaire compliquée et obscure : un chef-d’œuvre de fine analyse, disait-on, une reconstitution logique de la vérité, une création véritable, en un mot.'
'Le juge raffinait la psychologie de l’affaire, avec un véritable amour du métier. Jamais, disait-il, il n’était descendu si à fond de la nature humaine ; et c’était de la divination plus que de l’observation, car il se flattait d’être de l’école des juges voyeurs et fascinateurs, ceux qui d’un coup d’œil démontent un homme.'
'La famille n’était guère d’aplomb, beaucoup avaient une fêlure. Lui, à certaines heures, la sentait bien, cette fêlure héréditaire ; non pas qu’il fût d’une santé mauvaise [...] ; mais c’étaient, dans son être, de subites pertes d’équilibre, comme des cassures, des trous par lesquels son moi lui échappait, au milieu d’une sorte de grande fumée qui déformait tout.'
'Jacques fuyait dans la nuit mélancolique. Il monta au galop le sentier d’une côte, retomba au fond d’un étroit vallon. Des cailloux roulant sous ses pas l’effrayèrent, il se lança à gauche parmi des broussailles, fit un crochet qui le ramena à droite, sur un plateau vide. Brusquement, il dévala, il buta contre la haie du chemin de fer : un train arrivait, grondant, flambant ; et il ne comprit pas d’abord, terrifié. Ah ! oui, tout ce monde qui passait, le continuel flot, tandis que lui agonisait là ! Il repartit, grimpa, descendit encore. Toujours maintenant il rencontrait la voie, au fond de tranchées profondes qui creusaient des abîmes, sur des remblais qui fermaient l’horizon de barricades géantes. Ce pays désert, coupé de monticules, était comme un labyrinthe sans issue, où tournait sa folie, dans la morne désolation des terrains incultes. Et, depuis de longues minutes, il battait les pentes, lorsqu’il aperçut devant lui l’ouverture ronde, la gueule noire du tunnel. Un train montant s’y engouffrait, hurlant et sifflant, laissant, disparu, bu par la terre, une longue secousse dont le sol tremblait.'
'Il l’aimait donc en mâle reconnaissant, la Lison, qui partait et s’arrêtait vite, ainsi qu’une cavale vigoureuse et docile ; il l’aimait parce que, en dehors des appointements fixes, elle lui gagnait des sous, grâce aux primes de chauffage. Elle vaporisait si bien, qu’elle faisait en effet de grosses économies de charbon. Et il n’avait qu’un reproche à lui adresser, un trop grand besoin de graissage [...]'
'L’énorme masse, les dix-huit wagons, chargés, bondés de bétail humain, traversaient la campagne noire, dans un grondement continu. Et ces hommes qu’on charriait au massacre, chantaient, chantaient à tue-tête, d’une clameur si haute, qu’elle dominait le bruit des roues.
[...]
Qu’importaient les victimes que la machine écrasait en chemin ! N’allait-elle pas quand même à l’avenir, insoucieuse du sang répandu ? Sans conducteur, au milieu des ténèbres, en bête aveugle et sourde qu’on aurait lâchée parmi la mort, elle roulait, elle roulait, chargée de cette chair à canon, de ces soldats, déjà hébétés de fatigue, et ivres, qui chantaient.'
“often include uncouth or sordid subject matter... a frankness about sexuality along with a pervasive pessimism...exposed the dark harshness of life, including poverty, racism, sex, prejudice, disease, prostitution, and filth...as a result, naturalistic writers were frequently criticized for being too blunt...another characteristic of naturalism is determinism...basically the opposite of the notion of free will...a character's fate has been pre-determined, usually by environmental factors, and that he/she can do nothing about it...there tends to be in naturalist novels a strong sense that nature is indifferent to human struggle.”
While beating his wife: ”There was no abating Y___Y's fury. The moment it did seem to have begun to wane, it would flare up again, like a sort of intoxication, wave on wave of it, increasing and carrying him away in fits of dizziness. He was no longer master of himself fighting empty space, tossed by every gust of the hurricane of violence which lashed him, till he was reduced to the utter depths of all-absorbing need to assuage the howling beast deep within him. It was an immediate physical need, a starvation of a body which hungered for vengeance, a force contorting him and giving him no respite till he should satisfy his need. Still striding up and down, he began to thump his temples with his fists, crying in agonized tones: 'Oh, whatever shall I do, whatever shall I do?' Since he had not killed this woman at once, now he could not kill her at all. His poltroonery in letting her live made him itch with rage."
While fighting on the small engine platform of a speeding train: ”He had managed to catch hold of the side of the tender. They both slithered on their constricted deck, the steel plates dancing dangerously under their feet as they wrestled silently, their teeth grinding, each trying to heave the other through the narrow cab doorway, which as only protection had a single bar across. It was no easy task. Fed to the full, the locomotive rushed on and on. They swept through Barentin and plunged into Malaunay tunnel, still at death grips, backs straining against the coals, heads banging against the water-cistern, trying to avoid the red-hot firebox door, which scorched their legs every time they stretched out. For a moment, X___X thought he might be able to raise himself up enough to shut off steam, to bring help and get free from this lunatic, out of his mind through drink and jealousy. For, being the smaller man, he was beginning to lose strength, knew there was already no hope of throwing Z___Z off. He was already beaten. He felt his hair rise on his head as the fear of falling swept through him. But as he made a supreme effort, and felt out with one hand, the other guessed what he was at and with iron grip on X___X's haunches, suddenly lifted him off the ground as if he had been a little child. The locomotive rushed on and on. The train burst noisily out of the tunnel and swept through the grim, bleak countryside. They dashed through Malaunay station at such speed that the A.S.M on the platform there did not even see the two men destroying each other on the moving thunderbolt. Then, with a final effort, Z___Z flung X___X out, but, just as X___X felt space round him, in his desperation he succeeded in clutching at Z___Z's neck, so convulsively that he dragged his murderer down with him. A double wild cry, voices of murderer and murdered confused in one, broke against the wind and was dispersed into nothingness. They fell together and as these two men, who so long had been like two brothers, went down, the draught of the train drew them in under the wheels, to be cut up, chopped to pieces, still laced together in a terrible embrace. Their bodies were afterwards found headless, legless, two bleeding trunks, with arms still enlaced one about the other, in suffocating grasp.”