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Transfusion Clinique et Biologique 16 (2009) 218–232
SÉANCE ÉDUCATIONNELLE
Complications pulmonaires de la transfusion
(TACO–TRALI)
Pulmonary complications of transfusion: TACO and
TRALI, a review
P. Renaudier a,*, D. Rebibo b, C. Waller c, S. Schlanger d, M.-P. Vo Mai e,
N. Ounnoughene e, P. Breton f, S. Cheze g, A. Girard h, L. Hauser b, J.-F. Legras e,
A. Saillol i, B. Willaert e, C. Caldani e
a
Unité d’hémovigilance, hôpital de la Croix-Rousse, hospices civils de Lyon, 103, grande rue de la Croix-Rousse, 69317 Lyon cedex 04, France
b
EFS Siège, 20, avenue du Stade-de-France, 93218 La-Plaine-Saint-Denis cedex, France
c
EFS Alsace, 10, rue Spielman, BP 36, 67065 Strasbourg cedex, France
d
Drass Alsace, 14, rue du Maréchal-Juin, 67084 Strasbourg cedex, France
e
Afssaps, 143–147, boulevard Anatole-France, 93285 Saint-Denis cedex, France
f
Drass Normandie, rue Malouet, BP 2, 76040 Rouen cedex, France
g
Service d’hématologie, CHU de Caen, avenue de la Côte-de-Nacre, 14033 Caen cedex, France
h
i
EFS Normandie, 1, rue professeur Joseph-Rousselot, 14000 Caen, France
CTSA site de Toulon, HIA Sainte-Anne, boulevard Sainte-Anne, BP 600, 83800 Toulon cedex, France
Résumé
Les œdèmes pulmonaires survenant pendant ou après une transfusion figurent parmi les accidents graves les plus fréquents,
dans le système français d’hémovigilance. Ils comportent les œdèmes hémodynamiques (transfusion-associated circulatory
overload [TACO]) et les œdèmes lésionnels (transfusion-related acute lung injury [TRALI]). Les TACO représentent
actuellement une cause majeure de décès lors d’une transfusion en France. Les données d’hémovigilance sur le TRALI
montrent qu’ils sont de plus en plus notifiés. Dans la série française, aucun TRALI n’est survenu après transfusion de plasma
poolé SD. Un logigramme permettra de classer de manière plus reproductible les œdèmes pulmonaires dans la base e-fit.
ß 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Abstract
Pulmonary oedemas occurring during or after a blood transfusion appear as the most frequent serious immediate incidents
in the French hemovigilance database. They include transfusion-associated circulatory overload (TACO) and transfusionrelated acute lung injury (TRALI). TACO are a major cause of transfusion-related death in France. TRALI are more and
more recognized and notified. In no case, pooled fresh frozen plasma (100 donations) treated with solvent–detergent were
involved in French TRALI cases. A logigrame will allow hemovigilance officers to better classify pulmonary oedemas in e-fit,
the French hemovigilance database.
ß 2009 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Mots clés : TACO ; TRALI ; Œdème pulmonaire cardiogénique ; Œdème pulmonaire lésionnel ; Hémovigilance
Keywords: TACO; TRALI; Pulmonary Oedema; Acute lung injury; Hemovigilance
* Auteur correspondant.
Adresse e-mail :
[email protected] (P. Renaudier).
1246-7820/$ – see front matter ß 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.tracli.2009.04.008
219
1. INTRODUCTION
Les complications pulmonaires immédiates non infectieuses de
la transfusion sont les œdèmes pulmonaires. La définition d’un
œdème pulmonaire ne repose pas sur des signes cliniques ou
biologiques, mais sur un mécanisme physiopathologique :
l’accumulation extravasculaire de liquide en rapport avec une
anomalie de son équilibre de filtration–réabsorption [1–3]. Les
œdèmes pulmonaires sont classiquement divisés en œdèmes
hydrostatiques ou cardiogéniques (i.e. l’œdème aigu du poumon
[OAP]) et œdèmes lésionnels ou par trouble de perméabilité [4].
Là encore, ces définitions font référence à des mécanismes
physiopathologiques. Le liquide extravasculaire est un transudat
dans l’œdème cardiogénique et un exsudat dans l’œdème
lésionnel [4]. Lorsqu’un œdème pulmonaire survient dans les six
heures après une transfusion, l’imputabilité de la transfusion doit
être discutée [5]. Si l’œdème pulmonaire est lié à la transfusion, il
est appelé transfusion-associated circulatory overload (TACO) s’il
s’agit d’un œdème hémodynamique et transfusion-related acute
lung injury (TRALI) s’il s’agit d’un œdème lésionnel [4,6–8].
En clinique, la transposition de ces deux entités physiopathologiques pose le problème de leur diagnostic différentiel
[4,5,7]. Elle pose aussi le problème de leur diagnostic positif. En
hémovigilance, les conséquences de ces difficultés sont des
erreurs de classement des effets indésirables, qui rendent
difficiles la mise en place d’études cas–témoins ou d’études
biologiques.
Nous nous proposons dans ce travail de présenter une revue
générale des TACO et TRALI et d’étudier les limites de la
Conférence de consensus de Toronto sur le TRALI.
3. ŒDÈMES PULMONAIRES
HÉMODYNAMIQUES
2. ŒDÈMES PULMONAIRES
3.1. Corrélations anatomocliniques
La formation de l’œdème pulmonaire peut résulter de quatre
types principaux de mécanismes :
l’élévation de la pression hydrostatique intravasculaire ;
l’élévation de la perméabilité capillaire ;
la diminution du drainage lymphatique ;
l’abaissement de la pression oncotique intravasculaire.
Les deux derniers mécanismes entraı̂nent plus volontiers des
épanchements pleuraux mais ils peuvent contribuer également
à l’œdème pulmonaire [1].
La membrane alvéolocapillaire est constituée de l’endothélium, de l’espace interstitiel alvéolocapillaire et de l’épithélium
alvéolaire (Fig. 1). Des échanges liquidiens existent physiologiquement entre secteur interstitiel et secteur capillaire,
modélisés par l’équation de Starling :
Ils résultent d’une augmentation de la pression capillaire
pulmonaire (Fig. 2) [9,10]. Trois stades sont décrits [2]. Dans un
premier stade, la compliance pulmonaire augmente ainsi que la
résistance à l’écoulement de l’air dans les petites bronches. Le
flux lymphatique augmente alors afin de maintenir un volume de
liquide pulmonaire extravasculaire constant, probablement en
raison de la tachypnée. Cliniquement, il s’agit d’une simple
dyspnée d’effort avec manifestations radiologiques limitées à
une augmentation de la trame vasculaire et une redistribution
vasculaire vers les sommets.
Dans un deuxième stade, la résorption lymphatique n’est
plus suffisante et apparaı̂t un œdème interstitiel. Au plan
histologique, on note une ouverture des jonctions intercellulaires des cellules endothéliales, autorisant le passage de
macromolécules. Ce stade correspond à une dyspnée d’effort
avec toux, à l’apparition d’une hypoxie à la gazométrie, de
stries de Kerley B et réaction pleurale à la radiographie
pulmonaire.
Dans un troisième stade, apparaı̂t un œdème alvéolaire,
accompagnant la disjonction entre les cellules de l’épithélium
alvéolaire. Le liquide qui contient des macromolécules et des
hématies diffuse alors dans les alvéoles. Cliniquement, il s’agit
de l’œdème pulmonaire classique avec dyspnée permanente ou
paroxystique et râles crépitants aux bases. Radiologiquement,
Q ¼ KðPCP P1Þ ðP2 þ P3Þ:
Avec Q
K
PCP
P1
P2
P3
Flux liquidien intercapillaire et interstitium
Coefficient de perméabilité de la barrière alvéolocapillaire
Pression capillaire pulmonaire
Pression du liquide interstitiel
Pression de l’interstitium
Pression oncotique plasmatique.
En pratique, les œdèmes pulmonaires résultent d’une
modification du premier terme de l’équation : augmentation
Fig. 1. Membrane alvéolocapillaire. L’unité de base est l’acinus, groupement
d’alvéoles drainés par une bronchiole terminale et entourés par un lacis de
capillaires. La surface de l’alvéole est constituée des pneumocytes de type I.
L’ultrastructure de la membrane alvéolocapillaire est constituée de deux
pneumocyte de type I, cellule très fine
versants : alvéolaire et capillaire.
(0,3–0,5 mm) au travers de laquelle se font les échanges gazeux, régis par la loi
de Fick ; pneumocyte de type II, qui sécrète le surfactant ; macrophage
membrane basale
alvéolaire (autre dénomination = cellule à poussière) ;
alvéolaire ; membrane basale capillaire ; membrane basale de la jonction
alvéolocapillaire, qui résulte de la fusion des deux membranes basales
précédentes ; cellule endothéliale, avec les granulations de Weibel-Palade.
du facteur K (œdème lésionnel) ou de la PCP (œdème
hémodynamique).
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Tableau 1
Critères de validité d’une radiographie pulmonaire (RP) de face.
Symétrie
Adulte : les extrémités inférieures des clavicules doivent être
symétriques par rapport aux apophyses épineuses
Nourrisson : les arcs antérieurs des cotes doivent être symétriques
par rapport au rachis
Fig. 2. Physiopathologie des deux types d’œdèmes pulmonaires.
En inspiration
Adulte : l’arc postérieur de K7 doit se projeter au niveau de la
coupole diaphragmatique à droite
Petit enfant : la coupole diaphragmatique doit se projeter à droite au
niveau du septième arc postérieur en décubitus et du huitième
sur les clichés debout
D’après Capdeville R, Rémy J, Coussement A, Desmonts F. Le poumon
pathologique : atlas de séméiologie radiographique. 1990 Arnette ed.
on observe un œdème alvéolaire avec opacités périlobulaires
non systématisées parfois confluentes en ailes de papillon.
3.2. Diagnostic positif
Le début est souvent brutal ou rapidement progressif,
précédé de grésillement laryngé et de toux irritative.
Rapidement s’installe une polypnée qui contraint le malade à
s’asseoir (orthopnée). Cette dyspnée est vite très intense et
angoissante. Elle s’accompagne d’une toux quinteuse incessante, improductive au début puis ramenant en quelques
minutes à quelques dizaines de minutes une expectoration
mousseuse abondante ressemblant à du blanc d’œuf battu,
parfois teintée de sang et réalisant alors la classique
expectoration saumonée. À l’inspection, la polypnée est
intense avec mise en jeu des muscles respiratoires accessoires
(tirage sus-sternal), battement des ailes du nez. La cyanose est
inconstante, il existe des sueurs abondantes.
À l’examen, la pression artérielle n’est nettement élevée que
lorsque l’œdème pulmonaire survient chez un patient
préalablement hypertendu. L’auscultation cardiaque note
classiquement un galop (S3 des anglo-saxons) ; en pratique
elle est gênée par la dyspnée et les crépitants et ne permet le
plus souvent que de préciser le caractère régulier ou irrégulier
du cœur. L’auscultation pulmonaire retrouve des râles
crépitants (uniquement inspiratoires) ou plus rarement souscrépitants (inspiratoires et expiratoires) réalisant l’impression
de « marée montante ». L’examen clinique permet enfin de
rechercher des signes de gravité : marbrures et lividités des
membres orientant vers un bas débit, hypotension artérielle
orientant vers un choc cardiogénique.
La radiographie pulmonaire est souvent de qualité médiocre
car elle est pratiquée au lit et chez un malade qui ne peut
supporter l’inspiration bloquée (Tableau 1). Elle exclut avant
tout les autres causes de détresse respiratoire (pneumothorax
par exemple). Parfois, l’aspect d’œdème alvéolaire est net avec
images floconneuses confluentes de distribution périhilaire.
Souvent, il n’existe que des images d’œdème pulmonaire
interstitiel, particulièrement en cas d’OAP d’apparition brutale.
Les épanchements pleuraux de la grande cavité ou interlobaires
sont souvent observables. On note un élargissement de la
silhouette cardiaque.
L’électrocardiogramme est assez systématique mais ne
permet dans cette circonstance ni le diagnostic d’insuffisance
ventriculaire gauche, ni d’œdème pulmonaire. Il permet
éventuellement de rechercher une fibrillation auriculaire rapide
(à ralentir) ou un infarctus myocardique à la phase aiguë.
L’échodoppler est ici rarement d’une qualité optimale,
compte tenu de la mauvaise tolérance du malade au décubitus
dorsal ou latéral. C’est la raison pour laquelle cet examen est
habituellement pratiqué au décours de l’épisode aigu lorsque la
présentation clinique ne prête pas à discussion et au titre du
diagnostic étiologique. Une indication à sa réalisation précoce
est le diagnostic différentiel avec un œdème lésionnel.
Le peptide cérébral natriurétique (brain natriuretic peptide
[BNP]) est une neurohormone isolée initialement à partir du
cerveau de porc. Chez l’homme, le BNP est produit par le
myocarde en réponse et proportionnellement à sa dilatation et
à sa pression intracavitaire [11]. Il s’agit d’un peptide de
32 acides aminés qui stimule la diurèse et la natriurèse. Il a une
action vasodilatatrice et s’oppose à l’action du système rénine–
angiotensine–aldostérone [12]. Le BNP est l’un des trois
peptides natriurétiques, les deux autres étant les peptides
natriurétiques type A (ANP) et C (CNP) [13]. Ils partagent
17 acides aminés. Les 32 acides aminés constituant le BNP
proviennent d’un précurseur de 108 acides aminés : le pro-BNP
(Fig. 3). L’extrémité N-terminale restante (76 acides aminés)
est le NT-proBNP. Ces deux fragments de clivage présentent
trois différences :
le BNP est biologiquement actif et non le NT-proBNP ;
le BNP est rapidement dégradé par des endopeptidases alors
que le NT-proBNP est éliminé sans métabolisme par le rein ;
la demi-vie du BNP est de 22 minutes alors que celle du NTproBNP est de deux heures.
Chez les patients présentant un épisode de dyspnée aiguë,
l’élévation du BNP ou du NT-proBNP sérique est un argument
en faveur d’un œdème hémodynamique [14–16].
3.3. Diagnostic étiologique
Les étiologies des insuffisances ventriculaires gauches sont
regroupées dans le Tableau 2 [10]. Dans le logigramme en
cours de finalisation, il s’agira des « pathologies associées » que
221
Tableau 2
Étiologie des insuffisances ventriculaires gauches.
Fig. 3. Biochimie du peptide cérébral natriurétique (brain natriuretic peptide
[BNP]). N : extrémité N-terminale ; C : extrémité C-terminale.
la transfusion a pu faire décompenser. La phase initiale du
traitement à mettre en œuvre en urgence figure dans le Tableau
3.
3.4. TACO
Autant la littérature sur le TRALI est abondante [17], autant il
est surprenant de constater combien le TACO a peu retenu
l’attention (11 références dans PubMed avec TACO and
transfusion – consultation le 2 mars 2009). Les deux ouvrages
de référence en transfusion ne sont pas en reste : une demipage dans la deuxième édition du « Rossi » et 13 lignes dans la
12e édition du « Mollison », qui n’ont rien à envier aux 12 lignes
dans la 12e édition du « Harrison » [2,18,19].
Il nous semble aussi intéressant de noter que trois revues
générales cliniques sur les OAP ne mentionnent pas la
transfusion dans la liste des étiologies [10,20,21]. Côté
« transfuseurs », une revue générale sur le TACO ne
mentionne pas les vasodilatateurs comme traitement mais
préconise une saignée de 250 ml [22], proposition qui figure
également dans le « Rossi » [18]. La saignée disparaı̂t cependant
dans un éditorial de 2009 du même auteur [23]. Nous
déconseillons pour notre part une telle pratique et préconisons
l’utilisation des vasodilatateurs veineux (Tableau 3). La
prévention conseillée du TACO est une vitesse de transfusion
lente : 2–4 ml/kg par heure qui doit être réduite à 1 ml/kg par
heure pour les patients à risque [12,22]. Cette pratique n’a en
fait jamais été évaluée et nous semble être reproduite d’article
en article depuis une publication de 1946 [24]. Il en est de
même pour l’administration préventive de diurétiques pour
laquelle nous n’avons retrouvé aucune référence.
Deux raisons sont évoquées par Popovsky et al. pour
expliquer ce manque d’intérêt : l’absence de perception du
risque par les cliniciens et la notion qu’il s’agit toujours d’un
phénomène sans grandes conséquences [22–25]. Nous
pensons pour notre part que les notifications ne sont pas
toujours faites au correspondant d’hémovigilance car le TACO
n’implique pas la qualité du produit sanguin en tant que tel, mais
un dysfonctionnement potentiel d’une pratique de soins. À ce
titre, la notification des TACO est un élément qui entre dans le
Surcharges mécaniques du ventricule gauche
Surcharges de pression
Rétrécissement aortique
Hypertension artérielle systémique permanente
Coarctation aortique
Surcharges de volume
Insuffisance mitrale chronique
Insuffisance mitrale aiguë
Désinsertion de prothèse valvulaire
Rupture de cordages valvulaires
Insuffisance aortique chronique
Insuffisance aortique aiguë
Endocardite bactérienne
Traumatismes thoraciques
Dissection aortique
Communication interventriculaire
Hyperdébit chronique
Anémie (notamment hémolyses constitutionnelles)
Hyperthyroı̈die
Maladie de Paget
Fistule artérioveineuse
Avitaminose B1
Cardiopathies ischémiques
Cardiomyopathies
Dilatées
Hypertrophiques
Secondaires
Surcharge
Amylose
Hémochromatose
Toxiques
Éthylisme
Anthracyclines
Carentielles (Vit B1)
Myopathie (maladie de Steinert, de Duchenne. . .)
Aux « collagénoses »
Fibroélastoses et fibroses endomyocardiques
Exemple : syndrome hyperéosinophilique
Myocardites
Infectieuses (très rares)
Parasitaires (maladie de Chagas)
cadre de la gestion des risques à l’hôpital. Il nous semble
important de rappeler que l’hémovigilance inclut cette
dimension, ce qui n’est pas le cas de la pharmacovigilance. Il
existe en effet une obligation légale à notifier un TACO, mais
Tableau 3
Conduite à tenir d’urgence devant un œdème aigu du poumon.
Malade en position assise, jambes basses
Surveillance TA et SpO2
Oxygène = 6 l/min (débit initial)
Furosémide (Lasilix1) = 40 mg (2 ampoules) en intraveineuse directe
Dérivé nitré par voie sublinguale
Soit dinitrate d’isosorbide (Isocard1) : 1 pulvériation à répéter
Soit trinitrine (Natispray1) à 0,30 mg/dose : 1 pulvérisation à répéter
Les vasodilatateurs artériels type nifédipine (Adalate1) sont déconseillés en
raison de leur effet hypotenseur. Les vasodilatateurs veineux (dérivés nitrés)
réalisent l’équivalent d’une « saignée interne ». L’objectif de l’oxygénation est de
maintenir une SpO2 > 92 % au moins. Au-delà de 6 l/min, il convient d’utiliser
un masque à haute concentration.
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Tableau 4
Données épidémiologiques sur les TACO.
Type d’étude
Nombre de centres
Patients
Taux
d’incidence
Remarques
Période
d’étude
Référence
Rétrospective
Monocentrique (clinique Mayo)
Hospitalisés
1/708
20 % des patients ont reçu 1 seul CGR
1985
[18]
Rétrospective
Multicentrique
(5 centres du Massachussetts)
PTH
PTG
4/382
Les patients ont reçu 1 ou 2 CGR
1992–1993
[19]
Prospective
Multicentrique États-Unis
PTH
PTG
462/9327
Allo : 120/1499
TAP : 150/2837
No = 192/4991
1996–1997
[20]
Rétrospective
Multicentrique
(4 centres États-Unis)
USI
25/1351
Incidence = 1/356 unités transfusés
Nombre médian d’unités (*) :
TRALI = 6 [3–10]
TACO = 6 [4–10]
Te = 2 [2–4]
2003
[21]
PTH : prothèse totale de hanche ; PTG : prothèse totale de genou ; USI : unité de soins intensifs ; Allo : allo-transfusion ; TAP : transfusion autologue programmée ;
No : pas de transfusion ; (*) entre crochets : intervalle de confiance à 95 % de la médiane ; Te : témoins.
pas un OAP en rapport avec des perfusions trop abondantes.
On retrouve cette extension vers la gestion des risques pour la
notification des incompatibilités ABO et les hémochromatoses,
pour lesquelles la qualité intrinsèque du produit sanguin labile
(PSL) n’intervient pas.
Le taux d’incidence est diversement évalué selon les études
(Tableau 4). Un point à noter nous semble être le faible nombre
de produits sanguins transfusés ; le TACO n’est donc pas
l’apanage de la transfusion massive. Dans les études comparatives, des patients non transfusés ont aussi présenté un OAP, en
rapport avec les perfusions, mais à un taux toujours
significativement inférieur [26–28].
Les données d’hémovigilance apportent cependant une
dimension supplémentaire. En France, les surcharges volémiques sont la cause principale de décès en rapport avec la
transfusion de 2000 à 2006 (rapport Afssaps 2007). Au Québec
en 2006, la moitié des décès transfusionnels étaient liés à un
TACO (rapport Comité d’hémovigilance du Québec 2007). Au
Royaume-Uni, les TACO n’ont été déclarés qu’à partir de 2007,
où trois cas graves ont été rapportés. Il s’agit donc bien d’un
thème majeur en termes d’effets indésirables qui suscite depuis
peu un intérêt propre au plan international. En 2009, le TACO
est bien devenu une entité à part entière et ne doit plus être
considéré comme un « non-TRALI ».
4. ŒDÈMES PULMONAIRES LÉSIONNELS
Ils s’opposent en beaucoup de points aux œdèmes d’origine
hémodynamique, en particulier leur début classiquement plus
brutal et leur survenue dans un contexte d’affection sévère.
En pratique, la distinction n’est pas toujours aussi évidente.
4.1. Corrélations anatomocliniques
Ils résultent d’un trouble de perméabilité de la membrane
alvéolocapillaire (Fig. 2) [29,30]. On distingue deux phases :
exsudative et fibroproliférative.
La phase exsudative est caractérisée par un infiltrat alvéolaire
diffus par les neutrophiles avec accumulation d’un exsudat riche
en protéines [31]. Il s’agit donc d’un phénomène inflammatoire1
qui implique trois systèmes : la membrane alvéolocapillaire, les
neutrophiles et les cytokines de l’inflammation. La lésion initiale
porte sur les cellules bronchiques et les cellules de l’épithélium
alvéolaire, en particulier des pneumocytes de type I. Ces lésions
mettent à nu la membrane basale alvéolaire qui réagit par
formation d’une membrane hyaline riche en protéines.
L’ensemble conduit à une altération du système de drainage
du liquide alvéolaire, de la production de surfactant par les
pneumocytes de type II et de la barrière épithéliale qui devient
permissive au passage de germes de l’alvéole dans le capillaire
[32]. L’interaction neutrophile–endothélium se déroule en
quatre étapes consécutives (Fig. 4) [33] :
le contact réversible entre molécules membranaires des
deux types cellulaires, qui conduit au roulement des
leucocytes sur l’endothélium et à l’induction de signaux au
niveau de la cellule endothéliale. Cette étape implique
l’interaction entre sélectines et oligosaccharides ;
la libération de médiateurs chimiotactiques par la cellule
endothéliale et translocation sur la membrane endothéliale
de la sélectine P contenue dans les corps de Weibel-Palade ;
l’adhérence irréversible entre polynucléaires et endothélium,
par modification conformationnelle et augmentation d’affinité des intégrines leucocytaires (CD11/CD18, CD29/49d)
qui se lient aux molécules de la superfamille des immunoglobulines sur l’endothélium ;
la migration transendothéliale des polynucléaires (diapédèse).
Le rôle majeur des neutrophiles est étayé par des arguments
histologiques [34,35] et aussi par la plupart des modèles
animaux d’œdèmes pulmonaires lésionnels [36,37]. Cependant,
des œdèmes pulmonaires lésionnels ont été décrits chez des
patients au cours d’une neutropénie profonde [38]. Par ailleurs,
1
Inflammation : « terme général désignant des réactions caractérisées par
l’accumulation extravasculaire de protéines plasmatiques et de leucocytes
sanguins, à la suite d’une agression physique, infectieuse ou d’une réponse
immunitaire locale » [32].
223
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Fig. 4. Étapes de l’activation des polynucléaires neutrophiles : interactions séquentielles endothélium–polynucléaires (d’après [32]).
certains modèles animaux sont indépendants des neutrophiles
[29]. Le TNF-a est au centre du réseau de cytokines proinflammatoires et anti-inflammatoires, avec l’Il-1 [39] dont la
synthèse par les macrophages alvéolaires est induite par le
TNF-a.
La phase fibroproliférative fait suite chez certains patients,
durant laquelle l’inflammation chronique, la fibrose et les
phénomènes de néovascularisation interviennent [40].
4.2. Types cellulaires impliqués
La physiopathologie des œdèmes pulmonaires lésionnels fait
intervenir principalement deux types cellulaires : polynucléaires
neutrophiles (PN) et cellules endothéliales.
Les PN sont des cellules du sang de 10 à 12 mm de diamètre, à
noyau polylobé, dont le cytoplasme comporte de nombreuses
granulations azurophiles apparaissant brunes ou beiges après
coloration au May-Grünwald-Giemsa. Ils prennent naissance
dans la moelle à partir de la cellule souche hématopoı̈étique et
le stade de PN mature est atteint après quatre à cinq mitoses. Ils
séjournent alors dans la moelle, constituant un compartiment
de réserve intramédullaire rapidement mobilisable lors d’une
infection, ou immédiatement après une injection de G-CSF
(Neurogen1, Granocyte1, Neulasta1) [41]. Leur passage dans
le sang est bref puisque la demi-vie des PN ayant quitté la moelle
est de l’ordre de quatre à dix heures. Dans les capillaires et
surtout dans les veinules postcapillaires, les PN sont refoulés à
la périphérie de la lumière vasculaire par les globules rouges.
Cette répartition, associée au ralentissement circulatoire qui
survient dans les veinules postcapillaires, fait que les forces qui
propulsent les PN deviennent plus faibles que celles qui les
rattachent aux cellules endothéliales. Les conditions sont donc
favorables au phénomène du roulement réversible décrit
précédemment, dans lequel interviennent des liaisons moléculaires faibles et instables entre PN et cellules endothéliales.
Très peu de PN migrent dans le compartiment tissulaire à l’état
physiologique. Le compartiment sanguin périphérique et le
compartiment marginal ne représentent à l’état physiologique
qu’une très faible proportion des PN de l’organisme (quelques
pourcent) comparés aux réserves médullaires qui représentent
plus de 95 % de ces cellules (Fig. 5). Ainsi, en cas de besoin
(stress, infection), seuls deux compartiments peuvent être
mobilisés : le compartiment marginal et le compartiment de
Fig. 5. Compartiments des polynucléaires neutrophiles.
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Tableau 5
Contenu des granulations azurophiles et spécifiques des neutrophiles humains
[32].
Granulations
azurophiles
Granulations
spécifiques
Myéloperoxydase
Phosphatase acide
b-glucosaminidases
Élastase
Histonase
Lysozyme
50 -nucléotidase
a-mannosidase
Arylsulfatase
Protéines cationiques
BPI(*)
Défensines
a-fucosidase
Neuraminidase
Estérase
Cathepsines B, D, G
Glycosaminoglycanes
Chondroı̈tine sulfate
Héparine sulfate
(*)
Histaminase
Collagénase
Protéine de liaison de
la vitamine B12
Récepteur de la laminine
Récepteur du C3b
Récepteur des peptides
formylés
Cytochrome b 558
Lactoferrine
Flavoprotéines
Lysozyme
BPI : bacterial permeability increasing protein.
réserve médullaire [41]. Certaines des molécules membranaires du PN possèdent un polymorphisme au sein de l’espèce
humaine et ont de ce fait une activité antigénique. Il s’agit de
glycoprotéines dont la nomenclature est celle de l’International
Society for Blood Transfusion (ISBT). En pathologie, ces systèmes
antigéniques sont impliqués dans les neutropénies autoimmunes, les exceptionnelles neutropénies allo-immunes, et
les TRALI [42–45]. La fonction physiologique du PN est la
bactéricidie qui est une lyse intracellulaire des bactéries. Elle est
le fait des enzymes contenues dans les granulations azurophiles
des PN (Tableau 5). Le relargage extracellulaire de ces enzymes
peut léser les cellules présentes au voisinage du PN,
phénomène important dans la physiopathologie des œdèmes
pulmonaires lésionnels.
Les cellules endothéliales sont des cellules allongées, (10 à
50 mm, épaisseur 3 à 4 mm), nuclées, formant une surface de
plus de 6500 m2 [46]. Leur taux de renouvellement est très
faible. Les cellules endothéliales ont une durée de vie de
plusieurs mois à plusieurs années, sauf dans les réactions
inflammatoires (cas des œdèmes pulmonaires lésionnels), la
cicatrisation des plaies et les tumeurs, où elles se multiplient
rapidement. Elles contiennent dans leur cytoplasme les corps
de Weibel-Palade où se trouvent le facteur Willebrand et la
sélectine P (CD62). Elles sont hétérogènes au sein de l’arbre
vasculaire par leur morphologie, les médiateurs et récepteurs.
Les plus abondantes sont celles des capillaires (8 mm de
diamètre). Les cellules endothéliales sont associées entre elles
par des jonctions cellulaires impliquant quatre familles de
protéines : les occludines (jonctions serrées), les cadhérines
(a et b cadhérines, plakoglobine, vinculine, a-actine,
moésine. . .), les connexines et la desmoplakine. La paroi
capillaire est continue dans le système nerveux central, le
muscle, ainsi que dans les tissus lymphoı̈des où les veinules
postcapillaires ont un endothélium épais. L’endothélium est
fenêtré dans les glandes endocrines, le tractus intestinal et les
plexus choroı̈des ; il possède des pores dans les glomérules
rénaux et de larges orifices dans les sinus du foie, de la pulpe
rouge de la rate et de la moelle osseuse. Les fonctions des
cellules endothéliales sont multiples :
elles réalisent une barrière non thrombogène entre les
plaquettes sanguines et le collagène de type III du sousendothélium ;
elles contrôlent l’état de contraction/relaxation des fibres
musculaires lisses par la production de vasodilatateurs (PGI2,
ATP, monoxyde d’azote [NO]) et de vasoconstricteurs
(angiotensine II, endothélines ET1-2-3) ;
elles métabolisent ou inactivent un ensemble de médiateurs
vasoactifs (kallidine, bradykinine, angiotensine I et II. . .) ;
elles produisent un ensemble de médiateurs solubles et de
molécules membranaires qui contrôlent les fonctions de
territoires vasculaires particuliers.
4.3. Diagnostic positif
La première description remonte à 1967 et repose sur
l’observation de 12 patients ayant présenté une détresse
respiratoire aiguë, une cyanose, une diminution de la
compliance pulmonaire et des infiltrats diffus à la radiographie
pulmonaire, réfractaires à l’oxygénothérapie [47]. Initialement
dénommé adult respiratory distress syndrome, cette entité est
devenue l’acute respiratory distress syndrome (ARDS) puisqu’elle
peut survenir aussi chez l’enfant [29,48]. En 1988, a été publiée
une première définition consensuelle [49], suivie en 1994 par la
Fig. 6. Aspects radiologiques d’un œdème pulmonaire lésionnel (documents aimablement communiqués par le Pr Yves Berthezene, service de radiologie, hôpital de
la Croix-Rousse, Lyon).
définition de l’American-European Consensus Conference
Committee (AECC) [50]. Celle-ci comporte quatre éléments :
la détresse respiratoire aiguë dans un délai de sept jours
après l’événement déclenchant ;
l’hypoxémie ;
les infiltrats bilatéraux sur la radiographie pulmonaire (Fig. 6) ;
la pression capillaire bloquée inférieure ou égale à 18 mm Hg
ou pas de signes d’hypertension atriale gauche.
Ce dernier critère impose donc l’exclusion d’un œdème
hémodynamique dans la définition d’un œdème lésionnel
(Tableau 6).
Les limites de cette définition ont été longuement discutées
[29,30,51]. Par exemple les seuils du rapport de la PaO2/FiO2 ne
tiennent pas compte du fait qu’un malade ait ou non une pression
positive de fin d’expiration [30]. L’interprétation des radiographies pulmonaires, qui n’est que moyennement reproductible
entre les cliniciens, est un autre problème [52,53]. Malgré tout,
les avantages de cette définition l’emportent largement et elle
continue de rester la référence depuis 1994, en particulier pour
les essais thérapeutiques. Pour la gestion des patients au
quotidien, et plus encore pour les systèmes de gestion des
risques ou l’hémovigilance, elle peut être adaptée dans une
certaine mesure (voir le paragraphe TRALI).
4.4. Diagnostic différentiel
Parce que la définition des œdèmes pulmonaires repose sur
la physiopathologie et non sur des critères biologiques ou
radiographiques pathognomoniques, le diagnostic différentiel
comporte plus ou moins toutes les situations responsables
d’une hypoxémie. Néanmoins, celle qui pose le plus de
problèmes pratiques est l’OAP. Même la méthode de
référence, la mesure de la pression capillaire bloquée,
comporte ses limites. En particulier, la précision de sa mesure
dépend beaucoup de la rigueur d’application du mode
opératoire [54,55]. Par ailleurs, même en cas de pressions
basses, un œdème par transudat (type OAP) peut survenir
lorsque la pression oncotique est abaissée [56,57].
Parmi les autres pneumopathies interstitielles, celles qui
posent un problème de diagnostic différentiel sont celles qui
évoluent sur un mode aigu : pneumopathies d’hypersensibilité,
pneumopathie aiguë à éosinophiles, bronchiolite oblitérante
[30].
D’autres situations sont encore plus difficiles à appréhender :
maladie veino-occlusive du foie après greffe de cellules souches
hématopoı̈étiques, lymphangite carcinomateurse pulmonaire.
4.5. Épidémiologie
L’épidémiologie des œdèmes lésionnels a fait l’objet d’une
revue générale en 2007 dont s’inspire cette section [58]. Les
auteurs notent que la reproductibilité assez faible du diagnostic
d’acute lung injury (ALI)/SDRA et l’hétérogénéité des niveaux de
soins retentissent probablement beaucoup sur la précision des
résultats. Ce point est étayé par une étude mettant en évidence
la mauvaise cotation du diagnostic d’ALI sur les résumés de
séjours hospitaliers [59].
Tableau 6
Critères de diagnostic d’un œdème pulmonaire lésionnel selon l’AECC [50].
Survenue aiguë (< 7 jours)
Infiltrats pulmonaires à la RP de face
Diffus
Ou sous forme d’opacités multiples (« patchy »)
Accompagnés ou non de réation pleurale
Hypoxémie sévère
Si PaO2/FiO2 300 = « ALI »
Si PaO2/FiO2 200 = « ARDS »
Absence d’augmentation des pressions dans l’oreillette gauche
Soit PCP < 18 mm Hg si Swan-Ganz
Soit toute autre preuve, notamment échographique
ALI : acute lung injury ; ARDS : acute respiratory distress syndrome ; PCB : pression
capillaire bloquée.
Tableau 7
Étiologie des œdèmes pulmonaires lésionnels [7,29,30].
Lésion pulmonaire directe
Lésion indirecte
Pneumopathie
Inhalation de liquide gastrique
Noyade
Embolie graisseuse
Embolie de liquide amniotique
Contusion pulmonaire
Hémorragie intra-alvéolaire
Inhalation de toxique
Transplantation pulmonaire unilatérale
Sepsis sévère
Transfusion
Choc
Surdosage en salicylés
Toxicomanie intraveineuse
Pancréatite aiguë
Polytraumatisme
Circulation extracorporelle
Les données d’épidémiologie descriptive reposent sur trois
études en population. La méthodologie d’une quatrième étude
européenne n’était pas adaptée pour calculer correctement un
taux d’incidence [60]. Une étude monocentrique berlinoise, qui
porte sur un faible effectif, ne sera pas discutée [61]. Les trois
études sont comparables pour l’âge moyen (60,6 ans, 59,8 ans
et 62 ans) et le taux de mortalité (38,5 %, 41,4 % et 32 %). Les
taux d’incidence sont en revanche très variables (78,9 cas pour
100 000 personnes-années aux États-Unis, 17,9 en Scandinavie
et 34 en Australie) [62–64]. Trois pour cent des ALI étaient en
rapport avec la transfusion dans l’étude américaine [61]. L’une
des explications développées dans l’éditorial accompagnant
l’étude américaine est que l’ALI est majoritairement la
conséquence des traitements d’affections graves, comme les
sepsis sévères [65]. Le taux d’incidence de l’ALI est donc
proportionnel au nombre de lits de réanimation, qui est
hétérogène entre les pays [66].
L’analyse des données d’épidémiologie analytique est encore
plus délicate. Ces données servent de base au diagnostic
étiologique (Tableau 7). Parmi les nombreuses causes, trois
ressortent nettement des études de cohorte ou des essais
thérapeutiques : les pneumopathies, suivies par les sepsis
graves, puis les polytraumatismes [58]. La situation est parfois
moins univoque, notamment dans les cas les plus graves. Par
exemple, un polytraumatisé peut avoir une contusion
pulmonaire directe, des transfusions multiples et un sepsis
sévère. Dans une optique clinique, l’objectif est de déterminer
quelles situations nécessitent un traitement spécifique. Dans
formation information
225
P. Renaudier et al./Transfusion Clinique et Biologique 16 (2009) 218–232
formation information
226
P. Renaudier et al./Transfusion Clinique et Biologique 16 (2009) 218–232
une optique d’hémovigilance, l’objectif est centré sur le rôle de
la transfusion. Le logigramme de l’Afssaps intégrera cette
notion et modulera l’imputabilité en fonction des facteurs
associés. Le but est double : parvenir à des données
épidémiologiques reproductibles, sélectionner les cas de TRALI
« purs » = imputabilités 3 et 4, sur lesquels porteront les études
épidémiologiques et biologiques à venir. Il nous semble
essentiel de bien différencier ces deux objectifs, souvent –
mais pas toujours – convergents.
4.6. TRALI
4.6.1. Définition
La première description du TRALI apparaı̂t rétrospectivement être celle de Barnard en 1951, alors que le concept d’ALI
n’était pas encore établi [67]. D’autres publications rapportent
ensuite des manifestations pulmonaires sous des dénominations variées : infiltrats pulmonaires associés à la transfusion de
leukoagglutinines [68], hypersensibilité pulmonaire induite par
la transfusion d’agglutinines non-HLA [69], œdème pulmonaire
transfusionnel sans surcharge circulatoire [70], infiltrats
pulmonaires avec anti-HLA spécifiques [71], œdème pulmonaire non-cardiogénique fulminant au cours d’une chirurgie
cardiaque [72]. C’est Popovsky et al. qui individualisent le
TRALI en 1983 [73]. Ce même auteur publie en 1985 une série
de 36 cas observés de 1982 à 1984 à la clinique Mayo, 31 après
chirurgie et cinq survenus dans un contexte médical [74]. Les
critères d’inclusion des cas représentent la première définition
du TRALI : association d’une détresse respiratoire, d’une
hypoxémie et d’une hypotension, sans surcharge circulatoire.
Cette association était observée une à six heures après
transfusion. Soixante-douze pour cent des patients ont dû être
intubés. Le tableau s’est amendé dans les 96 heures. La
première description en France figure dans la thèse de
médecine de Di Mercurio en 1979 [17,75].
Tableau 8
Définition du TRALI selon la Conférence de consensus de Toronto [7].
TRALI
ALI
Début rapide
Hypoxémie
En dehors des travaux de recherche
PaO2/FiO2 300
Ou SpO2 < 90 % an air ambiant
Ou toute autre évidence clinique d’hypoxémie
En recherche clinique
PaO2/FiO2 300
Ou SpO2 < 90 % en air ambiant
Infiltrats bilatéraux sur la RP de face
Pas de signes évidents d’OAP
Pas d’ALI avant la transfusion
Pendant ou dans les 6 heures après une transfusion
Pas de relation temporelle avec un autre facteur de risque d’ALI
TRALI possible
ALI
Pas d’ALI avant la transfusion
Pendant ou dans les 6 heures après une transfusion
Relation temporelle claire avec un autre facteur de risque d’ALI
Tableau 9
Définition du TRALI selon le National Heart, Lung, and Blood Institute (NHLBI)
du National Institute of Health (NIH) (États-Unis) [6].
TRALI sans facteur(s) de risque d’ARDS chez un patient sans ALI
avant la transfusion, si :
Survenue d’un ALI, et
Début des signes dans les 6 heures après la fin de la transfusion d’un
ou plusieurs produits sanguins labiles, et
Pas d’autres facteurs d’ARDS chez le receveur
TRALI avec facteur(s) de risque d’ARDS chez un patient sans ALI
avant la transfusion, si :
Survenue d’un ALI, et
Début des signes dans les 6 heures après la fin de la transfusion
d’un ou plusieurs produits sanguins labiles, et
Le receveur a d’autres facteurs de risque d’ARDS ; l’ALI est en
rapport à la transfusion (TRALI) et/ou avec les facteurs de risque
Depuis la Conférence de consensus de Toronto en 2004, la
définition du TRALI est clinique et ne fait pas référence à un
mécanisme physiopathologique, notamment immunologique
(Tableau 8) [6,7]. Elle complète celle du NHLBI, basée sur la
définition AECC de l’ALI (Tableau 9) [6]. Deux autres
définitions du TRALI mais aussi du TACO ont été proposées
par l’ISBT (Tableau 10) et par l’European Hemovigilance Network
(Tableau 11). En France, le diagnostic de TRALI n’apparaı̂t
explicitement dans la FEIR que le 1er septembre 2001. Dans la
première étude rétrospective réalisée en 2004 portant sur la
période 1994–2003, les critères d’inclusion ont donc été pour
la période 1994–2001 la présence dans le commentaire libre de
l’une des expressions suivantes : TRALI, anticorps antigranulocytes, anticorps anti-HLA, œdème pulmonaire non cardiogénique, poumons blancs bilatéraux (http://www.afssaps.fr,
[76]). La définition retenue par l’Afssaps depuis 2006 est celle
de la Conférence de consensus de Toronto [7]. La définition de
Toronto marque donc une étape dans la connaissance du
TRALI.
4.6.2. Physiopathologie
L’interprétation initiale de Popovsky et Moore est dénommée one-hit hypothesis [74]. Elle stipule que des anticorps
antigranuleux présents dans le plasma du donneur, souvent des
femmes multipares, activent les PN du receveur dans les
capillaires pulmonaires et provoquent l’œdème lésionnel. Les
arguments sont les suivants :
dans le premier cas rapporté, il s’agissait d’une expérimentation et le receveur était un sujet non malade [67] ; l’injection
d’anticorps antigranuleux correspondant à l’antigène porté
par le receveur a provoqué une séquestration pulmonaire
des PN [77] ;
dans un modèle ex-vivo de poumon de lapin, les anticorps
antigranuleux induisent un ALI en présence de complément
[78] ;
chez une patiente ayant eu une transplantation pulmonaire, la
transfusion de deux CGR dont un contenait un anti-HLA-B44
a provoqué un TRALI unilatéral sur le poumon transplanté,
porteur de l’antigène HLA-B44 [79].
Initialement, cette hypothèse a été vérifiée pour les
antigranuleux et les anti-HLA classe I [80,81]. Les anti-HLA
Tableau 10
Définition des TRALI–TACO selon la Société internationale de transfusion
sanguine (ISBT).
TRALI
Chez un patient ne présentant pas d’ALI avant la transfusion
TRALI si :
Début aigu
Hypoxémie
PAO2 / FiO2 < 300 mmHg
Ou SpO2 < 90 % en air ambiant
Ou autre évidence clinique
Infiltrats bilatéraux à la RP de face
Pas d’évidence d’hyperpression des cavités gauches (i.e. OAP)
Pas de relation temporelle avec d’autres facteurs de risque d’ALI
Au cours ou dans les 6 heures après une transfusion
Facteurs de risque d’ALI
Agression pulmonaire droite
Inhalation
Pneumopathie
Inhalation de toxiques
Contusion pulmonaire
Noyade
Agression pulmonaire indirecte
Sepsis sévère
Choc
Polytraumatisme
Brûlure
Pancréatite aiguë
Circulation extracorporelle
Toxicomanie
Si association temporelle entre facteur de risque et alI et si
transfusion < 6 heures : « TRALI possible »
TACO
4 critères parmi les 5 ci-dessous ( BNP, non listé)
Détresse respiratoire aiguë
Tachycardie
Augmentation de la pression artérielle
Œdème ou augmentation de l’œdème sur RP de face
Balance entrées–sorties positives
Dans les 6 heures suivant la transfusion
Dyspnée associée à la transfusion
Détresse respiratoire dans les 24 heures suivant la transfusion
Pas de critères de TRALI, TACO ou réaction allergique
Pas d’explication par la pathologie sous-jacente du patient
classe II sont aussi considérés comme générateurs de TRALI
depuis la publication de Kopko [82]. Les antigènes classe II ne
sont pas exprimés à la surface des PN au repos [83]. Mais ils le
sont sur les monocytes et leur fixation induit la synthèse de
TNF-a, Il-1b et facteur tissulaire dans un délai de quatre heures
[83]. Ces cytokines possèdent la propriété d’activer les PN. La
responsabilité des anti-HLA classe II a été prouvée par au moins
une autre équipe [84].
Cependant, Silliman ne retrouvait ni antigranuleux, ni antiHLA classe I ou II dans 75 % des 81 TRALI d’une enquête cas–
témoin [84]. De plus, dans trois études, utilisant la méthode des
enquêtes ascendantes, le donneur impliqué dans un TRALI
n’avait pas provoqué de TRALI chez d’autres receveurs
exprimant pourtant l’antigène correspondant : anti-HNA-3a
[85], anti-HNA-2b [86] et anti-HLA classe II polyspécifiques
[87]. Une revue générale parue ultérieurement a par ailleurs
noté, sur des données compilée, que les allo-anticorps
227
Tableau 11
Définition des TRALI–TACO selon le réseau européen d’hémovigilance (EHN).
TRALI
Détresse respiratoire aiguë
Et infiltrats bilatéraux à la RP
Et pendant ou dans les 6 heures après la transfusion
Et pas de TACO
Sous-types (non nécessaires au diagnostic)
Immunologique
Anticorps anti-HLA ou HNA chez le donneur
Et :
Soit antigène correspondant chez le receveur
Soit cross-match positif
Non immunologique
Si pas d’anticorps détectables chez le receveur
TACO
Détresse respiratoire, tachycardie, augmentation de la pression
artérielle, image typique d’OAP à la RP de face, balance entrées–sorties
positive et/ou insuffisance cardiaque
Pendant ou dans les 12 heures après la transfusion
Pas de nombre de critères imposé
Dyspnée associée à la transfusion
Détresse respiratoire associée dans le temps à la transfusion
Pas de diagnostic de TRALI, TACO ou dyspnée d’origine allergique
précédemment mentionnés manquaient dans un cinquième
des TRALI [88]. Enfin, un TRALI a été décrit avec une
transfusion autologue programmée [89]. Ces constatations ont
conduit Silliman à proposer un modèle à deux étapes dénommé
two-hits hypothesis (Fig. 7) [90,91]. La première étape est liée à la
pathologie du patient (sepsis, chirurgie. . .) qui crée une
réaction inflammatoire systémique. Celle-ci induit le roulement
sur les cellules endothéliales des PN qui sont séquestrés dans le
poumon. La seconde étape est la transfusion d’un produit
sanguin labile contenant des anticorps anti-HNA ou HLA, qui
activent les PN.
Ultérieurement, cinq mécanismes activateurs des PN autres
que les auto-anticorps ont été ajoutés :
parallèlement aux TRALI immunologiques, des TRALI non
immunologiques sont liés à la capacité des lipides qui
s’accumulent dans les produits sanguins labiles cellulaires à
induire l’activation des PN [92–94]. Cette capacité est le fait
de lipides neutres et de lysophosphatidylcholines, que l’on
retrouve dans le plasma des CGR [95] et des concentrés
plaquettaires [96] ;
lors d’une hypoxie pulmonaire, les érythrocytes relargent des
radicaux libres oxygénés (reactive oxygen species [ROS]) qui
induisent une réaction inflammatoire et provoquent le
recrutement des PN [97,98]. Ce relargage de radicaux libres
oxygénés est encore plus net lorsqu’il s’agit de CGR, dont les
globules rouges ont une diminution de leur capacité antioxydante. Ce mécanisme est important car il montre que le
PSL peut aussi intervenir dans la première étape d’induction
d’un TRALI ;
des TRALI ont été décrits chez des patients neutropéniques
[80]. Deux mécanismes sont proposés : la présence de
vascular endothelial growth factor (VEGF) ou d’anti-HLA classe
II, qui provoquent une augmentation de la perméabilité de la
cellule endothéliale [80] ;
formation information
P. Renaudier et al./Transfusion Clinique et Biologique 16 (2009) 218–232
P. Renaudier et al./Transfusion Clinique et Biologique 16 (2009) 218–232
formation information
228
Fig. 7. Physiopathologie du TRALI (redessiné et complété d’après 79).
le ligand soluble du CD40 (sCD40L) est un médiateur
pro-inflammatoire libéré par les plaquettes et que l’on
retrouve dans les PSL. Sa cible est le CD40, présent sur les
PN. L’interaction sCD40L–CD40 est capable d’activer les
PN ;
le TRALI inversé doit surtout être évoqué en France après
transfusion de granulocytes en raison de la déleucocytation
des PSL [98,99].
4.6.3. Épidémiologie
Les données d’épidémiologie descriptive du TRALI rapportent des taux d’incidence très hétérogènes. On peut distinguer
les études ponctuelles, menées pendant un temps court et sur
une population restreinte, et les études d’hémovigilance. Les
premières donnent toujours un taux d’incidence plus élevé que
les secondes. Par exemple, dans une étude de Silliman, il est de
1/1120 [85]. On a donc pu penser que le taux de TRALI
pourrait être plus élevé en Amérique-du-Nord. Mais les
conditions de détection des cas dans ces études ad hoc sont
très différentes de celles d’un système d’hémovigilance et il n’en
est peut-être rien. Les données françaises illustrent par ailleurs
l’instabilité des taux d’incidence dans le temps : le taux de
TRALI pour tous les PSL est 1/255 000 de 1994 à 2006 [100]
mais 1/66 000 pour 2007 (rapport hémovigilance Afssaps 2007).
Cette instabilité traduit avant tout le fait que le nombre de cas
rapportés dépend du degré de connaissance des cliniciens.
L’augmentation apparente du taux d’incidence reflète donc
avant tout l’efficacité des actions de communication du réseau
français d’hémovigilance. Actuellement, il n’est donc pas
possible d’établir avec précision l’épidémiologie descriptive
du TRALI. Les deux obstacles sont :
la définition de la Conférence de Toronto n’est pas
systématiquement appliquée [99] ;
il existe une sous-déclaration [101].
Les données d’épidémiologie analytique sont en revanche
plus riches, notamment en France. Dans la période 2003 à 2006,
les taux par types de produit sont : 1/20 040 CPA, 1/
80 110 plasma frais congelé (PFC) (dont 0 pour le plasma viroatténué [PVA]), 1/128 550 MCP, 1/156 110 CGR. Ces taux sont
bien sûr à comparer entre les différents types de produits et
n’ont pas valeur d’estimation en raison de la sous-déclaration.
Les taux calculés pour la période 2005–2006 illustrent cette
remarque car ils sont différents, mais restent dans le même
rapport [17]. Le point important est qu’aucun TRALI n’a été
observé avec les PVA, ce qui confirme les données biologiques
attestant que l’on ne retrouve pas d’anticorps impliqués dans
les TRALI après poolage du plasma [102,103]. Les receveurs
ont un profil particulier, avec des pathologies lourdes : près de
la moitié ont une hémopathie maligne et un tiers une
intervention chirurgicale hémorragique. Trois patients avaient
une drépanocytose, pathologie rare en France ; ce dernier point
a déjà été souligné et pose un problème de diagnostic
différentiel avec les syndromes thoraciques aigus [104,105].
En termes d’épidémiologie, les points d’amélioration sont
doubles : informer les cliniciens, parvenir à une définition
reproductible des cas. Si la définition de Toronto a marqué un
progrès, elle ne permet pas d’atteindre ce dernier objectif
comme le montrent :
une étude de reproductibilité conduite par l’Afssaps
(données non publiées) ;
une étude américaine qui établit que la définition de Toronto
n’est pas systématiquement appliquée [99].
En effet, les investigateurs continuent de considérer la preuve
immunologique comme un critère de diagnostic. Afin de
prendre ce dernier point en compte, le logigramme attribuera
une imputabilité 4 en cas de preuve immunologique et 3 sinon.
Ces deux imputabilités étant toujours regroupées lors des
analyses, cela ne changera pas la définition de Toronto.
229
la rencontre d’un produit à risque et d’un receveur à risque
(Fig. 8). Les actions de prévention peuvent donc aussi être
dirigées vers le receveur, en reconnaissant plus rapidement les
signes de TRALI.
5. CONCLUSION
Fig. 8. Schéma possible pour le développement d’un TRALI.
4.6.4. Diagnostic différentiel
Il se pose avant tout avec le TACO et a fait l’objet d’une revue
générale où les sensibilités et spécificités des différents
examens sont discutés [106]. Parmi ceux-ci, on retiendra
l’échographie cardiaque précoce, et également la valeur du BNP
[106,107] et surtout du NT-proBNP [108] dans ce contexte.
4.6.5. Traitement
Le traitement d’un TRALI est celui d’un ALI, qui suscite luimême de nombreux travaux. On trouvera une discussion dans
[30].
4.6.6. Prévention
Les règles françaises figurent dans le document de l’Afssaps et
ont fait l’objet d’un forum international [109]. On notera que
l’utilisation au Royaume-Uni de plasma issu de donneurs
masculins a fait diminuer l’incidence du TRALI [110]. Une
politique d’exclusion des femmes multipares du don pour PFC
est aussi appliquée aux Pays-Bas (http://www.tripnet.nl).
Il nous semble important d’attirer l’attention sur le nombre
croissant de facteurs biologiques présents dans les PSL et
susceptibles de participer à l’instauration d’un TRALI. Il est clair
que l’attention reste principalement portée vers l’hypothèse
immunologique [99] pour son aspect historique, parce qu’elle
représente près de la moitié des cas français de 1994 à 2006
[17], mais aussi parce qu’elle a été très médiatisée par un
éditorial brillant de Popovsky et Davenport stigmatisant les
« femmes fatales » [111]. Mais ignorer les autres facteurs
reviendrait à se priver d’une réflexion qui pourrait être
fructueuse sur les modes de préparation des PSL. Enfin, l’un des
apports importants des données d’hémovigilance française est
d’être compatible avec un modèle à deux étapes. Les facteurs
liés au PSL sont clairement importants, mais le fait que les
TRALI surviennent chez des patients à risque l’est également.
Les données françaises laissent penser que le TRALI résulte de
TACO et TRALI sont actuellement des effets indésirables
transfusionnels beaucoup plus fréquents que les erreurs ABO
ou les contaminations virales. L’apport des résultats du réseau
français d’hémovigilance est le suivant : (i) les TACO
représentent l’une des premières causes de mortalité
transfusionnelle ; (ii) les receveurs ont généralement une
pathologie lourde ; (iii) dans un tiers des cas de TRALI, on ne
retrouve pas d’origine immunologique ; (iv) l’échelle de gravité
des TRALI va de l’hypoxémie sans conséquence au décès ; (v)
aucun TRALI n’a été observé avec du plasma viro-atténué par
solvent–détergent. Actuellement, les travaux du groupe
TRALI–TACO de l’Afssaps prolongent ces résultats et se
centrent sur la question de la classification épidémiologique des
complications pulmonaires de la transfusion et sur leurs
niveaux d’imputabilité. Un logigramme et une grille de critères
pour l’hémovigilance sont en cours de finalisation. La
déclaration des TRALI–TACO par le réseau d’hémovigilance
reste particulièrement importante et gagnera à s’intégrer aux
systèmes de gestion des risques hospitaliers pour les TACO. La
prise en compte des données actuelles sur les complications
pulmonaires de la transfusion peut aussi permettre aux
correspondants d’hémovigilance de faire évoluer les formations
dispensées aux acteurs de la transfusion, afin de plus les
sensibiliser à ce risque.
Remerciements
Aux professeurs Paul-Michel Mertes (Nancy), Jean-Yves
Muller (Nantes) et Yves Ozier (Paris-Cochin) pour la
stimulation intellectuelle qu’ils impriment au réseau français
d’hémovigilance et pour le plaisir du travail en commun.
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