Corela
Cognition, représentation, langage
4-1 | 2006
Vol. 4, n° 1
La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
Laurence Vincent-Durroux
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/corela/418
DOI : 10.4000/corela.418
ISSN : 1638-573X
Éditeur
Cercle linguistique du Centre et de l'Ouest - CerLICO
Référence électronique
Laurence Vincent-Durroux, « La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING », Corela [En ligne],
4-1 | 2006, mis en ligne le 28 juin 2006, consulté le 02 mai 2019. URL : http://journals.openedition.org/
corela/418 ; DOI : 10.4000/corela.418
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La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
La nature du procès dans les énoncés en
BE + -ING
Laurence Vincent-Durroux
1
Il est fréquent de considérer que BE + -ING connaît des restrictions à son emploi ; certains
verbes sont ainsi répertoriés comme étant difficilement compatibles voire non
compatibles avec BE + -ING. La nature du procès est souvent mise en avant et les procès de
type état figurent parmi les principales "exceptions" à l’emploi de BE + -ING. Toutefois, il
n’est guère satisfaisant de rendre compte des phénomènes en les présentant comme des
"exceptions".
2
C’est pourquoi nous proposons ici d’interroger la distinction état / processus et de
formuler une hypothèse sur la détermination dont BE + -ING est le marqueur, afin de
rendre compte de la moindre fréquence de certains procès avec BE + -ING, sans que ceuxci soient à considérer comme des "exceptions". Nos analyses s’appuient majoritairement
sur les théories de l’énonciation1.
1. Remarques liminaires et hypothèse
1.1. Sortir d’un "raisonnement circulaire"
3
Le fait d’exclure certains procès de l’emploi de BE + -ING pourrait relever d’un "
raisonnement circulaire" clairement explicité par Bouscaren et Deschamps (1991, pp. 9-10) :
La valeur des procès dans les énoncés dépend de deux paramètres distincts :
• d’un côté une typologie des notions qui reflète les propriétés physico-culturelles
("aktionsart"),
• de l’autre les opérations énonciatives qui permettent de construire des énoncés ancrés dans
une situation. Tous les opérateurs utilisés (temps, aspects, modalités, complémentation,
détermination) vont contribuer à l’interprétation de l’énoncé.
• La confusion entre les deux paramètres est souvent à la base de raisonnements circulaires 2
où l’on postule par exemple qu’un verbe statif en anglais est un verbe qui ne s’utilise pas à la
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1
La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
forme en be + ing, et que par ailleurs la forme en be + ing ne s’utilise pas avec les verbes
statifs. On ne peut à la fois définir un type de procès3 en référence à une structure
syntaxique et caractériser la structure syntaxique comme s’appliquant à ce type de procès.
4
Concernant BE + -ING, les deux paramètres pouvant être confondus sont la "typologie des
notions" (Aktionsart) et les "opérations énonciatives" portant sur l’aspect. Si nous retenons
les définitions de Palmer (citées par Furuli, 1997) : "Aktionsart describes a class of action.
Aspect describes a way of viewing an action", et de Furuli (1997) : "the way [an] action is
perceived by a language user" pour l’Aktionsart, et : "the way that language user decides to
portray that action" pour l’aspect, nous relevons que seul l’aspect se situe strictement au
plan de la représentation linguistique. Ce n’est pas le cas de l’Aktionsart, puisqu’il est
impossible de savoir avec certitude comment l’action est perçue, ainsi que le remarque
fort justement Furuli.
5
Or, à quels niveaux la catégorisation en procès de type état et procès de type processus
est-elle pertinente : au niveau de la perception (Aktionsart), de la représentation (aspect)
ou encore de la représentation de la représentation (niveau métalinguistique) ? Se pose
aussi la question de savoir si la détermination dont BE + -ING est le marqueur affecte la
distinction entre état et processus.
1.2. Quelques approches relevées dans la littérature
1.2.1. "Contextes" et "conditions précises d’utilisation"
6
Dans des grammaires dont la perspective est manifestement linguistique, telles que celle
de Larreya et Rivière (1999a, pp. 46, 51, 52), on trouve les remarques suivantes :
la forme BE + ING est d’un emploi difficile quand le sujet n’est pas agent, c’est-à-dire
avec les états. Elle n’est pourtant pas impossible (…) ; les états sont difficilement
compatibles avec la forme BE + ING, même dans une situation particulière (…) ; en
ce qui concerne les verbes exprimant un état, il faut se méfier. Voici des listes. Elles
ne peuvent pas être complètes mais elles contiennent la plupart des verbes d’état
courants non compatibles avec la forme BE + ING dans la plupart des contextes.
7
Les états constituent d’ailleurs pour ces auteurs les seuls "obstacles à l’emploi de la forme BE
+ ING" (p. 51 sq.). Cette approche est toutefois précisée dans Larreya (1999b, p. 145) :
un autre cas particulier est celui des verbes dits "non progressifs" (’know’, ’see’,
’understand’, etc.) On sait qu’il est inexact de dire que ces verbes sont
incompatibles avec BE + ING, mais il n’en reste pas moins que, dans la plupart des
contextes, ils ne peuvent être utilisés qu’à la forme simple. Cette incompatibilité
relative s’explique sans difficultés, du moins pour ce qui est de son principe
général, dans le cadre des analyses de BE + ING de type aspectuel : même s’ils se
situent dans le temps et peuvent avoir une durée, les états de type ’know the
answer’ ou ’weigh 10 tons’ constituent un tout homogène, et le découpage de ce
tout en "instants" qui se succèdent ne peut pas avoir grand sens. (…) quelles sont
les conditions précises dans lesquelles un verbe "non progressif" peut (ou ne peut
pas) être utilisé avec BE + ING ?
1.2.2. La recatégorisation
8
L’explication par la récatégorisation du "verbe d’état" en "verbe d’action" est proposée par
Bouscaren et Persec (1998, pp. 107-108), par exemple à propos de "I’m loving this" :
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2
La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
love, (…) est généralement classé parmi les procès statifs, lesquels sont d’ordinaire
réfractaires à la forme BE –ING. (…) Dans le cas d’un verbe d’état comme love,
l’emploi de cette forme a pour effet de le recatégoriser en verbe d’action.
9
Cette approche suppose la validité, qui ne va pas de soi, de l’interprétation
conventionnelle qui associe l’emploi de BE + -ING à une "action". De plus, Bouscaren et
Persec décrivent la recatégorisation du verbe seul (ici : "love"), sans envisager ce qui se
produit sur le sujet, dont on peut pourtant poser qu’il fait partie du procès (cf. note 3 et
3.1. et 3.2).
1.2.3. Énoncés métalinguistiques
10
Rappelons aussi l’apport décisif de la grammaire méta-opérationnelle, qui met en valeur,
par différentes approches, la nature "métalinguistique" des énoncés en BE + -ING.
Adamczewski rejette la valeur aspectuelle "progressive" de BE + -ING et conclut (1982,
p. 57) que, dans la forme BE + -ING, le marqueur –ING a pour rôle de
signaler le dépassement du stade purement verbal du prédicat et, conséquence
normale, la disparition du sujet grammatical.
11
Adamczewski n’en dit pas davantage sur la nature de ce "dépassement", mais pour ce qui
concerne le sujet, nous pourrons faire le rapprochement avec les analyses de Gauthier
(1991, p. 87) qui relève la perte fréquente du terme de départ dans les constructions
prépositionnelles en –ING (cf. 2.2.1).
12
Delmas (1993, p. 126) souligne quant à lui la "massification du prédicat" due à la présence de
-ING. Une relation aRb, associée à BE + -ING, pourrait se présenter schématiquement
ainsi : a // Rb, ce qui suggère également que la relation prime sur les éléments qui la
constituent.
13
Enfin, Lapaire et Rotgé (1991, p. 413), indiquent que dans un énoncé en BE + -ING, le
prédicat est transformé
en caractérisation (descriptive, qualitative, appréciative ou autre) du sujet
grammatical (…) ; le parallèle entre "my hands are cold" et "my hands are shaking"
est saisissant : dans un cas comme dans l’autre, ce qui vient à droite de BE est
présenté comme un état du sujet grammatical.
1.3. Hypothèse
14
Face au constat selon lequel certains verbes s’emploient difficilement avec BE + -ING,
plusieurs approches semblent possibles : faire des listes d’exceptions ; faire apparaître
que dans tous les énoncés en BE + -ING, les procès relèvent du type processus (Furmaniak,
2005), ou au contraire faire apparaître la nature stative des procès en BE + -ING, justifiant
ainsi la moindre fréquence de certains procès avec BE + -ING. C’est cette dernière
hypothèse que nous privilégions.
15
Pour cela, nous reprenons à notre compte la nature métalinguistique4 des énoncés en BE +
-ING, dont la conséquence est que le procès y a le statut d’objet de discours. Notre
hypothèse est que, dans un tel statut, les distinctions état / processus et agent / siège ne
sont pas pertinentes car elles relèvent d’un niveau linguistique (la sémantique), et non
pas métalinguistique. L’anaphorisation associée à BE + -ING (Adamczewski, 1982, pp. 58 sq.
, Girard, 2000, pp. 129-138) ferait passer à l’arrière-plan les propriétés primitives des
notions, au profit d’une stabilisation du procès, objet de discours. Il devient alors possible
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3
La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
de rendre compte du fait que les lexèmes prototypiquement associés à un état dans
l’Aktionsart se trouvent moins fréquemment employés avec BE + -ING.
16
Nous rassemblons ci-dessous des éléments qui pourraient permettre de valider cette
hypothèse.
2. Vers une uniformisation de la nature du procès dans
les énoncés en BE + -ING
2.1. Sortir d’une approche lexicale figée
17
Notre hypothèse favorise une valeur uniforme du procès dans les énoncés en BE + -ING,
celle d’un état. Elle suppose donc de sortir d’une approche lexicale figée pour adopter une
approche de type notionnel liée aux opérations énonciatives. L’hypothèse proposée
s’appuie en cela sur le fait qu’un même lexème puisse désigner plusieurs notions 5, selon
les opérations énonciatives effectuées.
2.1.1. Le cas des verbes
18
Relevant du mode énonciatif du commentaire, l’énoncé en BE + -ING engage un point de
vue de l’énonciateur, point de vue de nature souvent aspectuelle ; l’énoncé est donc
modalisé, au sens large du terme, ce qui permet notamment à l’énonciateur de jouer sur
la valeur référentielle du prédicat. Cela est en effet possible puisque dans la langue, les
notions différentes sous un même lexème ne sont pas rares. C’est fréquemment le cas de /
have/ et /be/ par exemple, qui figurent des notions différentes selon qu’on a "have a
house" ou "have a walk", "be mad" ou "be a fool". Pour Bjerre (1999) et Harley (2003), cela
est lié à leur capacité à être des verbes-supports ("light verbs"). Toutefois, d’autres
lexèmes ne présentant pas cette capacité peuvent figurer des notions différentes selon le
contexte et la situation repère ; on peut observer par exemple /think/ et /hope/ dans les
énoncés (1) à (3) :
Perhaps in the vegetarian future people will use adultery as an alibi for eating meat
(…) [in] seedy beef hotels that rent private dining rooms by the hour. How come I’m
thinking about beef? I was thinking about … about William James and
consciousness as a stream. (T, p. 3)
(1a) Perhaps in the vegetarian future people will use adultery as an alibi for eating
meat (…) [in] seedy beef hotels that rent private dining rooms by the hour.?How
come I think about beef? I thought about … about William James and consciousness
as a stream.
(2) (…) reporting what people say to each other but never telling the reader what
the characters are thinking. (T, p. 63)
(2a)?(…) reporting what people say to each other but never telling the reader what
the characters think.
(3) I was not a little dismayed to discover on my arrival that Russell Marsden had
already departed to the South of France, as I was hoping to get some tips from him
about how to run the course. (T, p. 12)
(3a)?I was not a little dismayed to discover on my arrival that Russell Marsden had
already departed to the South of France, as I hoped to get some tips from him about
how to run the course.
19
Si on supprime BE + -ING (énoncés (1a)-(3a)), la compatibilité avec les contextes devient
discutable : en (1a), la présence de "how come", qui marque une investigation des pensées
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4
La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
préalables du narrateur, n’est guère compatible avec l’aspect Ø du présent simple ; en
(2a), la forme -ING de "reporting" et de "telling what" ne s’accommode pas de l’aspect Ø
du présent simple ; enfin, le contexte de (3), notamment avec "on my arrival" et "as"
implique la présence d’un commentaire, rendu éventuellement par "as I had hoped", mais
non par "I hoped". Ces quelques remarques suggèrent que les notions /think/ et /hope/
ne sont pas les mêmes dans les deux séries d’énoncés.
20
La modification notionnelle n’est ainsi pas réservée aux verbes-supports ; elle n’est pas
non plus due à la présence de BE + -ING puisque par exemple, "swam", dans "John swam"
est signalé par Dowty (1979, p. 61) comme pouvant avoir deux interprétations relevant de
deux notions différentes : si on sait que John parcourt régulièrement à la nage une
distance fixe, il s’agit d’une notion à valeur télique, paraphrasable par (4) :
(4) John swam the distance he usually does.
21
Dans le cas où, au contraire, il n’y a pas de connaissance partagée concernant une
distance habituellement parcourue par John, la notion se distingue de la première par sa
valeur atélique. Les opérations énonciatives mises en œuvre sont un lieu de liberté pour
l’énonciateur, liberté exemplifiée par Bouscaren et al. (1993, p. 21) avec BE + -ING et les
procès téliques :
des procès téliques peuvent recevoir une interprétation purement qualitative où le
terme n’est pas pris en compte. Ici encore c’est la mise en œuvre des opérations
énonciatives qui permettra une interprétation qualitative non quantitative :
He was slowly recovering from his illness
He is repairing the car.
22
L’opération énonciative marquée par BE + -ING filtre la valeur télique notionnelle : elle
affecte ainsi la notion pour en sélectionner certaines caractéristiques.
23
De même, on trouve des exemples avec des procès habituellement considérés comme
statifs, donc a priori non bornés, qui, par opération énonciative marquée par HAVE -EN, se
trouvent affectés d’une borne de droite ; c’est le cas de /be happy/ dans l’exemple (5) :
(5) She’d been happy until she met him.
24
À l’inverse, on trouve des procès habituellement considérés comme processus qui, dans
les constructions en HAVE d’expérience, reçoivent une interprétation stative, ainsi que le
montre Harley (1998, p. 195) :
experiencer readings [of HAVE] with apparently eventive complements can in fact
be seen to necessarily have stative interpretations.
C’est par exemple le cas de /steal/ dans l’énoncé (6) :
(6) I had my bike stolen yesterday.
Selon Ritter et Rosen (1997, p. 318), il en est de même avec HAVE auxiliaire, qui peut
permettre de construire une interprétation stative de /read/ (énoncés 7-8) :
auxiliary have provides an additional association between the event or state and
the (derived) subject by making the event/state a property of the subject.
Ritter et Rosen appuient leur raisonnement sur les énoncés (7) et (8) :
(7a) John read the New York Times twice.
(7b) John has read the New York Times twice.
(8a) John read a book twice.
(8b) John has read a book twice.
25
En (7a) et (8a), l’objet réfère à un exemplaire unique du New York Times ou de livre, lu
deux fois par John. En (7b) et (8b), l’objet peut référer à deux exemplaires distincts ; dans
cette interprétation, les énoncés dénotent une propriété de John, paraphrasable par
"John is a two-time New York Times/book reader". Le sujet est siège d’une propriété : la
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5
La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
notion verbale /read/ n’est pas seule à être affectée, le sujet l’est également. Cet effet de
HAVE auxiliaire sur le sujet n’est pas sans rappeler la "relation statique" établie par HAVE
et décrite par Bouscaren et al. (1982, p. 58) dans des énoncés du type "this man has blue
eyes".
26
BE + -ING pourrait avoir un fonctionnement similaire, et affecter la nature du procès (cf.
note 3) jusqu’à la modifier.
2.1.2. Le cas des noms
27
De façon cohérente, nous observons un parallèle entre le groupe verbal et le groupe
nominal, pour ce qui concerne la notion. En effet, l’examen fait par Gauthier (1986) de
quelques emplois annoncés comme "marginaux" de l’indéfini A va dans le même sens. Ces
emplois sont dits "marginaux" parce que l’indéfini A y est associé à des termes qui
renvoient habituellement à du continu : "a disgrace", "a shame", "a relief", ou bien à des
expressions non pluralisables : "he just loves a mess" ; "have a go" ; "have a good think".
Gauthier remarque (op.cit., p. 197) que certains de ces termes se situent à la limite du
verbal et du nominal. Or s’ils sont associés à une situation repère bien particularisée, il y a
discrétisation. Gauthier (1999, pp. 86-87) revient sur ces emplois, pour poser que :
la découpe dont a est la trace ne passe pas par la référence explicite à la classe (…)
On passe ainsi d’une logique du tout ou rien à une logique du plus ou moins.
28
La discrétisation, qui n’implique pas la cardinalité, se positionne comme une souscatégorie du discontinu (Gauthier, 1986, p. 195) ; elle permet toutefois la réitération dans
une situation identique d’un "quantum itérable mais non cumulable" (op. cit., p. 196) comme
dans "another go". Il y a donc tout lieu de penser qu’une modification s’effectue par
opération énonciative et concerne les propriétés physico-culturelles de la notion.
29
Gauthier remarque d’ailleurs que ces termes sont fréquemment situés dans des énoncés
fortement modalisés, tels que "What a disgrace !" ou "What a pity !", où l’"application d’une
modalité de type 3" par l’énonciateur peut être glosée par "il est regrettable, dommage que" (
op.cit., p. 196). Le fonctionnement similaire de EVERY est analysé par Chuquet (1997,
p. 130) sur les expressions du type "every assistance", "every evidence", "every
encouragement".
30
Ces quelques remarques autour du groupe nominal illustrent la latitude dont
l’énonciateur dispose dans le traitement de la notion.
2.2. Effet des morphèmes constitutifs de BE + -ING
2.2.1. -ING
31
Le morphème -ING a fait l’objet de nombreuses publications et nous relevons ci-dessous
quelques éléments utiles à notre réflexion dans la mesure où ils suggèrent des
modifications du prédicat.
32
Dans l’histoire de la langue anglaise, -ING semble avoir une double origine : le participe
présent, dont la marque -ENDE devient -ING en Moyen Anglais, et le gérondif, forme
nominale du verbe, longtemps employée en contexte prépositionnel après BE : BE ON / IN
/ UPPON (sic) (Elsness, 1994, pp. 7, 13). L’emploi prépositionnel implique que la relation
soit validée préalablement à la localisation par la préposition. Cette validation préalable à
l’énoncé en BE + -ING pourrait être à la source de la plupart des remarques qui suivent.
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6
La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
33
Par exemple, Souesme (1992, p. 87) propose qu’avec -ING, on soit proche de la notion,
c’est-à-dire :
à un stade antérieur à la réalisation lexicale sous forme nominale ou verbale : on a
ainsi la notion prédicative /read/ qui n’est ni un nom ni un verbe. Or la forme
lexicalisée reading possède justement des propriétés nominales et des propriétés
verbales ; dans certains de ses emplois, elle garde toutes les propriétés du verbe
(ex : I like reading a book) ou au contraire elle peut les perdre toutes pour prendre
celles d’un nom (ex : I don’t like John’s reading of this poem). (…) on considérera
donc que ce terme [reading] renvoie à un ensemble d’occurrences de la notion /
read/, autrement dit à un domaine notionnel constitué d’occurrences
qualitativement identiques.
34
Dans cette logique, la nature du procès ne devrait pas être un critère pertinent, ce qui
permettrait alors à l’ensemble des notions d’être compatibles avec BE + -ING. C’est
d’ailleurs l’observation des occurrences de BE + -ING avec les verbes d’état mental qui
conduit Souesme (2000, p. 140) à souligner que l’emploi de BE + -ING est indépendant du
type de procès.
35
Groussier (2002, p. 202) mentionne également la notion, évoquant en conclusion une "
modification notionnelle", sans vraiment la détailler :
l’interprétation par l’énonciateur de l’occurrence selon son propre point de vue
peut aller jusqu’à une modification notionnelle ; avec la forme BE + ING on ne
travaille plus sur la notion de procès mais sur la notion d’état de participation, soit
de l’actant principal soit de l’actant secondaire.
36
Par ailleurs, l’hypothèse de la nominalisation par -ING, surtout développée par
Adamczewski (1982, pp. 56-58) et Cotte (1997, p. 98), va dans le sens de la perte de son
statut verbal par le prédicat. Pour Cotte, "birds were whistling" s’appuie sur la
nominalisation de "birds whistled", ce qui repousse le prédicat /whistle/ à l’arrière-plan.
Gauthier, quant à lui, indique explicitement qu’il y a "déverbalisation" (1991, p. 82).
37
L’absence de diathèse associée à BE + -ING jusqu’au début du dix-huitième siècle
(Jespersen, 1931, p. 211), avec des énoncés comme "The house is building", va également
dans le sens du statut nominal du terme affecté de -ING.
38
Des arguments supplémentaires en faveur de la neutralisation des caractéristiques des
éléments constitutifs du procès figurent dans les travaux de Gauthier, notamment la
perte du rôle agentif du sujet dans les constructions prépositionnelles en -ING (Gauthier,
1991, pp. 90-91) : par exemple, dans "the coming of the British" ("the x 1 of x 2"), la
thématisation du prédicat manifeste que ce ne sont pas les Britanniques mais leur arrivée
qui intéresse l’énonciateur. Ainsi, "the x1" situe le prédicat au premier plan avec une
opération de fléchage qui reprend à l’identique un préconstruit dans lequel on peut
penser que le terme de départ n’était déjà plus agent : on peut supposer en effet que du
fait que le fléchage marque l’identité entre le référent et le préconstruit, le rôle agentif du
sujet dans le préconstruit est réduit voire nul. Le procès tout entier (cf. note 3) serait ainsi
affecté par les opérations énonciatives.
39
Gauthier (1991, p. 87) montre de plus que dans ces expressions, le terme de départ peut
être perdu, même s’il est le plus souvent récupérable grâce au contexte, comme c’est le
cas par exemple de "the finding of the body" ou de "the bringing up of children". Pour
Gauthier, cela indique que c’est la relation entre les éléments qui prime aux yeux de
l’énonciateur, au détriment des éléments mis en relation :
la construction prépositionnelle ne semble pas renvoyer à un schéma <arb> mais
plutôt à une cohésion particulière posée entre le procès et son objet.
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7
La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
40
Il n’y a donc pas vraiment de pertinence à poser une distinction entre verbes d’état et
verbes de processus sous l’angle de la compatibilité avec -ING, hormis pour chercher à
comprendre pourquoi les verbes d’état sont plus réticents à être nominalisés (cf. 3.2.).
2.2.2. BE
41
Dans la théorie des opérations énonciatives, BE est associé à la valeur "égal" de
l’opérateur de repérage. Les termes concernés, de part et d’autre de BE, sont le sujet de
l’énoncé (S) et le prédicat (P). BE se trouve donc au centre d’un équilibre et la présence de
BE dans les énoncés en BE + -ING en fait fondamentalement des énoncés binaires.
42
Le fait que BE exprime l’état permet de considérer que le lien S-P est stabilisé dans la
situation repère ; le prédicat évoque une caractéristique, posée comme équivalente au
sujet dans la situation repère : le sujet devient donc le siège de cette caractérisation. Le
sujet est ainsi installé dans une stabilité proche de l’état, le rôle de ce dernier étant
précisément de définir le sujet.
43
Dans les exemples (9) à (11), on relève la présence d’éléments (repérés par l’italique) qui
indiquent en effet que le sujet est totalement associé au procès, défini par lui, ce qui
exclut tout autre procès dans la situation repère :
(9) Don’t disturb me, I’m listening to some music!
(10) I decide not to disturb her; utterly absorbed in what she’s reading, she’ s seen the
Rockies before. (VM, p. 91)
(11) They were safe, across the ocean, locked in their seasonal rhythms, consumed by
their various passions. They were taking Portuguese lessons, they had written. And
growing orchids. (VM, p. 177)
44
Pour chaque situation repère, S est défini par la propriété /be listener/ (9), /be reader/
(10), /be student of Portuguese/ ou /be orchid grower/ (11). Chacun de ces états étant
exclusif6, il est la cause ou la justification d’un comportement ou d’un jugement, pouvant
être paraphrasés ainsi :
(9a) Don’t disturb me because / as I am reading.
(10a) I decide not to disturb her because / as she is reading.
(11a) They were safe because / as they were locked in their seasonal rhythms.
45
On observe pourtant dans les énoncés (9) à (11) l’absence de connecteur entre les
propositions. C’est BE + -ING lui-même qui véhicule la valeur de propriété exclusive
associée au sujet dans la situation repère. D’ailleurs, lorsqu’un connecteur est présent, il
peut exprimer simplement la coordination entre les propositions, même si la relation
effective a une nature explicative comme en (12), dont la glose pourrait être : Gwenneth
n’a pas d’argent puisqu’elle consacre tout son temps à la préparation de sa thèse :
(12) Gwenneth was working on a Ph.D. and, for the most part, was without of
money. (VM, p. 144)
46
Des éléments contextuels tels que ceux relevés dans les énoncés (9) à (11) ne sont pas
toujours explicites. Ainsi, dans l’exemple (13), c’est à la fois le repérage temporel et la
complémentation verbale qui jouent un rôle essentiel pour exprimer la stabilité proche
de l’état :
(13) How come I’m thinking about beef? I was thinking about … about William
James and consciousness as a stream (T, p. 3)
47
Dans cet énoncé, le marquage temporel associé à deux situations repères distinctes ("I
was thinking" puis "I’m thinking") appuie l’interprétation proposée pour les exemples (9)
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8
La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
à (11) : en effet, le changement de complément associé à /think/ montre bien que le sujet
"I" est totalement caractérisé par "think about William James", puis par "think about
beef". Le comique de l’énoncé provient de l’association séquentielle mais totale du sujet
de l’énoncé à des pensées de nature bien variable … On comprend alors mieux la difficulté
qu’il y a à produire (1a)-(3a) avec le même contexte que celui des énoncés (1)-(3) (cf. 2.1.1).
48
Dans d’autres contextes, on relève que la valeur stative de la relation S-P est corroborée
par la présence d’éléments statifs (repérés par l’italique) qui expriment des états de S :
(14) Both Robert and Lila, each enclosed in a separate vision, could imagine houses
filled with lighted rooms, and these rooms — like the one they were sitting in —
were softened by the presence of furniture, curtains, carpets, men and women and
children, and by that human contrivance that binds them together. (VM, p. 183)
(15) In the seat ahead of us is a young man wearing a bright blue jacket — I
remember that once I had a similar jacket in a similar hue. (…) From where I am
sitting I can see his intense, eager trigger hand. (…) I tell myself that I would give a
great deal to be in that young man’ s shoes. (VM, pp. 91-92)
La même valeur de stabilité dans la situation repère est encore visible dans les énoncés
qui présentent un commentaire de nature explicitement métalinguistique (cf. note 4)
comme (16) :
(16) ’Look,’ he said to Bernie, (…), historians in the past thought history as a
continuum. And we haven’t been able to see what was patently obvious. (…) It’s our
curse to overlook beginnings. Beginnings just don’t register because we’re locked in
our vision of the status quo. We can’t even be bothered to acknowledge the feeble
stirrings – ’
’You’re not suggesting,’ Bernie said, ’that no one acknowledged the storming of
the Bastille?’
’Let’s just say they didn’t know what it signified.’ (HHS, p. 5)
49
Les occurrences de ce type, avec /suggest/, mais aussi /say/, /kid/, /joke/, /tell/, etc.
sont fréquentes. La stabilité en jeu concerne l’adéquation entre l’énoncé repère et son
interprétation. Dans l’exemple (16), la présence de "let’s just say" confirme cette valeur.
50
Si le débat sur la durée de validité des procès en BE + -ING est clos (Rivière, 1993), il reste à
souligner qu’un état peut fort bien être transitoire, comme le montrent les contextes cidessus, et qu’il ne devrait pas y avoir incohérence entre BE + -ING et la construction d’un
état par opération énonciative.
3. Conséquences de notre hypothèse
3.1. BE + -ING et le franchissement de borne
51
La proposition selon laquelle, dans les énoncés en BE + -ING, le sujet soit siège d’une
propriété, et non pas agent, amène deux réflexions : premièrement, cette proposition
reste-t-elle compatible avec le raisonnement convaincant de Souesme (1992, p. 88 sq.) qui
montre que BE + -ING est associé au franchissement de la borne de l’extérieur (E) vers
l’intérieur (I) du domaine notionnel ? Deuxièmement, ces franchissements de borne
devraient supposer l’agentivité du sujet ; mais de quel sujet s’agit-il ?
52
Prenons le cas des verbes avec aspect lexical, tel que /begin/, /start/, /cease/, /finish/, /
stop/. Ces verbes signalent un moment du procès. Or, parmi ces verbes, seuls /begin/ et /
cease/ sont habituellement réputés compatibles avec des procès de type état (repérés par
l’italique) :
(17) I’m beginning to see what you mean.
Corela, 4-1 | 2006
9
La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
(18) She ceased to be a farmer when GMOs appeared.
53
Si l’aspect7 en cause n’était pas de nature métalinguistique (cf. note 4), il y aurait conflit
entre le verbe introducteur annonçant un changement d’état (donc, un processus) et les
verbes "see" ou "be a farmer". L’aspect exprimé peut en effet être glosé ainsi :
l’énonciateur signale qu’il devient vrai de dire que (…) ou qu’il n’est plus vrai de dire que
(…).
54
Dans les énoncés en BE + -ING, le franchissement de borne de E vers I peut lui aussi
relever d’un commentaire du sujet énonciateur et ne pas relever du sujet de l’énoncé ; la
glose "il devient vrai de dire que" s’applique bien aux exemples suivants. Nous marquons
en italique les éléments contribuant à désigner le moment à partir duquel il devient vrai
de dire que (…) :
(19) She explained she was feeling unstrung because now she would have to go all
the way downtown to buy a card for her father-in-law. (VM, p. 67)
(20) What on earth ’s everyone being sorry about all of a sudden? (VM, p. 66)
His death was not unexpected, but still, Ivy and I are feeling exceptionally fragile.
(VM, p. 94)
55
Nous remarquons par ailleurs la présence d’éléments exprimant la subjectivité de
l’énonciateur, avec notamment la présence de termes comme "she explained", "what on
earth", "still" (énoncés 19-21), ou encore de "I’m sure" et "I wonder" (énoncés 22-23) :
(22) I’m sure she’s feeling as I am. (VM, p. 100)
(23) I wonder if Ivy is thinking, as I am, of the three months ahead, of how
tumultuous they will be. (VM, p. 101)
56
Le franchissement de borne n’est pas incompatible avec l’hypothèse formulée, selon
laquelle dans un énoncé en BE + -ING, le sujet de l’énoncé est le siège d’un état, car le
franchissement de borne relève du sujet énonciateur, et non pas du sujet de l’énoncé.
3.2. BE + -ING et les notions de type état
57
Si BE + -ING construit un état, il n’est guère surprenant que les énonciateurs n’utilisent
que peu de notions associées à des propriétés physico-culturelles de type état avec BE + ING car il se produit alors une redondance. L’évolution de la langue, avec la restriction
graduelle des emplois de BE + -ING, souligne la tendance à éliminer ces redondances :
ainsi /flow/ ou /run/ étaient employés avec BE + -ING dans des contextes où l’anglais
contemporain utilise les temps simples. Elsness (1994, p. 7) cite deux exemples en Vieil
Anglais: "from Danai that river which is running from northern-part" et "that this river
which is flowing all Egyptians’ land". De même, certains emplois de BE + -ING en Vieil
Anglais peuvent être ramenés à des formes adjectivales dont la valeur est l’expression
d’un état: "Therefore that which is in its Nature differing from the chief Good, cannot be
said to be the Good itself", dans lequel "is differing" est très proche de "is different"
(Elsness, 1994, p. 20).
58
Lorsque la redondance est choisie par l’énonciateur, c’est essentiellement pour souligner
que la relation est associée à une situation repère particularisante. Cela permet à
l’énonciateur de "qualifier ou de quantifier le nœud prédicationnel" (Adamczewski, 1982,
p. 75) et de construire une interprétation différente de celle produite sans BE + -ING
((24a)-(29a)) ; cela concerne des notions aussi variées que /plan/, /think/, /have/, /feel/,
ou encore /lie/ dans les énoncés (24) à (28) :
Corela, 4-1 | 2006
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La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
(24) "It just kills me to leave this place," the young woman says. She’s following us
through the rooms, pointing with unmistakable sorrow at the wall where they
were planning to put up shelving, at the hardwood floors they were thinking of
sanding. (VM, p. 98)
(24a) "It just kills me to leave this place," the young woman says. She’s following us
through the rooms, pointing with unmistakable sorrow at the wall where they
planned to put up shelving, at the hardwood floors they thought of sanding.
Because of the way she had said this, and the way she had squeezed her eyes shut,
Hélène knew her mother was thinking about Roger, the man in Winnipeg she was
in love with. (VM, p. 41)
(25a) Because of the way she had said this, and the way she had squeezed her eyes
shut, Hélène knew her mother thought about Roger, the man in Winnipeg she was
in love with.
(26) I was thinking to myself, how agreeable that is, what a nice time I’m having,
but there’s one thing missing –someone to share it with, or report it to. (T, p. 65)
(26a) I thought to myself, how agreeable that is, what a nice time I have, but there’s
one thing missing –someone to share it with, or report it to.
(27) You could buy a happiness-in-your-new-home card, (…) even a spectacular
three dollar pop-up card announcing to the world that you were feeling underappreciated. (VM, p. 66)
(27a) You could buy a happiness-in-your-new-home card, (…) even a spectacular
three dollar pop-up card announcing to the world that you felt under-appreciated.
(28) He sat down on the bed and stared around him. Nearly everything in here was
broken. The month-old cine-cinema was lying on top of a small, working tank.
(HPPS, p. 32)
(28a) He sat down on the bed and stared around him. Nearly everything in here was
broken. The month-old cine-cinema lay on top of a small, working tank.
59
Notre hypothèse permet ainsi de poser qu’il n’y a pas, a priori, de verbes réfractaires à
l’emploi de BE + -ING puisque ce n’est pas sur le verbe ni sur le sujet que porte la
quantification ou la qualification mais sur leur relation.
4. Conclusion
60
A plusieurs reprises, nous avons évoqué la notion, sous l’angle des modifications qui
pourraient l’affecter. L’hypothèse de la neutralisation des caractéristiques notionnelles a
été proposée. BE + -ING pourrait marquer une prise en charge énonciative forte par
laquelle l’énonciateur explicite la mise en relation prédicative, en la quantifiant ou en la
qualifiant. Cette mise au premier plan du rôle de l’énonciateur donnerait non seulement
au sujet, mais aussi au prédicat le statut d’objets de discours, neutralisant de ce fait les
traits sémantiques qui leur sont associés dans l’Aktionsart ou notionnellement.
61
Nous pouvons alors rapprocher BE + -ING de l’aspect en creux marqué par Ø et considérer
leur fonctionnement en système. Ø et BE + -ING sont habituellement traités sous l’angle
du rôle de l’énonciateur : pour reprendre les termes d’Adamczewski, il y a simple
connexion sémique avec Ø (rôle minimal de l’énonciateur) et énoncé métalinguistique
avec BE + -ING (rôle maximal de l’énonciateur). Si on aborde maintenant ces marqueurs
sous l’angle du procès, Ø, par effacement de l’énonciateur, laisse transparaître la nature
du procès alors que BE + -ING semble mettre au premier plan de l’énoncé sa prise en
charge par l’énonciateur. Cela implique la "désagentivisation" du sujet au profit du statut
de siège (Adamczewski, 1992, p. 76) et affecte la nature du prédicat, par intrusion
énonciative ayant pour effet de neutraliser les types de procès : le procès tout entier est
affecté d’une valeur d’état, le temps d’un énoncé.
Corela, 4-1 | 2006
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La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
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Corela, 4-1 | 2006
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Carol SHIELDS, Happenstance: the Husband’ s Story, Flamingo, Londres, 1994 (HHS)
NOTES
1. Que soit ici vivement remercié Philippe Rothstein (Université Paul Valéry, Montpellier 3) pour
sa lecture très attentive d’une version antérieure et pour les pistes de réflexion qu’il a suggérées
et qui ont permis d’enrichir cet article. Notre reconnaissance va également aux relecteurs d’une
précédente version, dont les remarques ont permis d’affiner ce travail.
2. C’est nous qui soulignons. Cette remarque s’applique à tous les éléments soulignés dans les
citations et les exemples, pour des raisons autres que métalinguistiques. Par ailleurs, les verbes
en BE+ -ING faisant l’objet d’une analyse apparaissent en caractères gras dans les exemples.
3. Le terme "type de procès" réfère manifestement ici à la distinction entre "verbe statif" et verbe
non statif ; "procès" nous semble être employé ici au sens de "verbe". Pour notre part, dans la
suite de l’article, nous appliquons le terme de "procès" à la réalité sémantique issue de la mise en
relation du prédicat et des arguments.
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La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
4. Nous qualifions de "métalinguistique" la valeur issue de l’emploi de marqueurs destinés à
commenter les choix linguistiques de l’énonciateur. L’énoncé (ou une partie de l’énoncé) est dans
ce cas objet de discours pour l’énonciateur.
5. Nous évoquons ici la distinction entre une forme lexicale unique (par exemple, "time") et les
notions qu’elle désigne : /fois/ dans "four times", /temps + approche quantifiable ou quantifiée/
dans "much time", /temps + approche qualitative/ dans "time is money". Cette distiction n’est
pas incompatible avec l’existence d’un invariant puisque pour l’exemple pris, c’est la
caractérisation temporelle qui constitue l’invarariant.
6. Dans l’exemple (11), même si deux propriétés sont évoquées successivement ("they were
taking (…). And growing orchids."), cela n’est pas incompatible avec une interprétation exclusive
puisque la seconde propriété est présentée comme un ajout de second plan : on remarque en effet
un point, puis la coordination par "And" et l’absence de "they were".
7. La définition de l’aspect donnée par Furuli (cf. 1.1.) ("the way that language user decides to
portray that action") reste valable si on interprète "portray that action" comme l’image de la
mise en relation du sujet et du prédicat par l’énonciateur.
RÉSUMÉS
BE + -ING est-il ou non compatible avec des procès de type état ? Dans la littérature, cette
question donne lieu à des réponses variables, souvent accompagnées de listes d’exceptions. Dans
cet article, nous formulons l’hypothèse selon laquelle, dans tout énoncé en BE + -ING, le point de
vue aspectuel inséré par l’énonciateur agit comme un filtre des propriétés prototypiquement
associées à la notion, installant temporairement le procès, dans une stabilité de type état ; le
sujet est alors siège d’une propriété véhiculée par le prédicat affecté de -ING. Employé avec des
procès de type état, BE + -ING crée une redondance, choisie par l’énonciateur si et seulement si
celui-ci la juge nécessaire dans le contexte.
Is BE + -ING compatible or not with stative processes? In the literature, various answers are given
to the question, and they usually appear with lists of exceptions. This article is about a
hypothesis according to which, in any BE + -ING utterance, the aspectual point of view filters the
prototypical properties associated with the notion, temporarily giving the process a stative
value; the subject becomes thus the seat of the property expressed by the predicate with -ING.
Used with stative processes, BE + -ING induces redundancy, and is therefore chosen by the
utterer only when the context requires it.
INDEX
Mots-clés : BE + -ING, procès, état, processus, aspect
Keywords : process, state, event
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La nature du procès dans les énoncés en BE + -ING
AUTEUR
LAURENCE VINCENT-DURROUX
Université Paul Valéry, Montpellier 3
Corela, 4-1 | 2006
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