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Grothendieck accueille Russell

De Russell à Grothendieck, les mutations du concept de structure.

Grothendieck accueille Russell Courrier d’Academos n° 11 Dans les Récoltes et Semailles de Grothendieck nous lisons : Je crois me rappeler que dans le formalisme des six variances en cohomologie étale (disons), l’hypothèse que les faisceaux d’anneaux servant comme coefficients soient localement constants est inutile – l’hypothèse essentielle est que ce soient des faisceaux de torsion premiers aux caractéristiques résiduelles, et que f (B) A soit un isomorphisme. Quand on abandonne cette dernière hypothèse, on doit entrer dans une théorie (jamais explicitée encore, à ma connaissance) qui « mélange » la dualité « spatiale discrète », et la dualité « cohérente » (relatives aux anneaux de coefficients et leurs isomorphismes). Du coup, on envisage de remplacer sur les schémas (ou des topos plus généraux) X, Y, les anneaux de coefficients A, B par des schémas (pas nécessairement affines) X’, Y’sur X, Y, et les morphismes de topos annelés (X, A) (Y, B) par des diagrammes commutatifs du type X’ X Y’ Y avec un formalisme « six opérations » dans un contexte de ce type. Quand X, Y, etc., sont des topos ponctuels, on devrait retrouver la dualité cohérente habituelle Récoltes et Semailles, pp. 598-599.. Dans son Introduction to Mathematical Philosophy, au chapitre VI, « Da la similarité des relations », Russell a dessiné la figure suivante, que nous avons appelée le ‘Rectangle Relationnel de Russell’ (RRR) : x P y . . C C . . z Q w Il en a d’abord donné un paradigme cartographique : Une carte illustre de la manière la plus simple ce que nous voulons. Si un lieu est au nord d’un autre, sur la carte l’endroit correspondant au premier est au-dessus de l’endroit qui représente l’autre ; pour un lieu à l’ouest d’un autre, il sera à gauche du second, et ainsi de suite. La structure de la carte correspond ainsi à celle de la région représentée Russell, Introduction à la Philosophie mathématique (1919), traduction Rivenc, Payot, p. 120.. Tel est le concept de structure dont Russell a forgé la définition Cf. « Une archéologie du structuralisme » par J.C. Dumoncel, Critique n° 804, mai 2014. en 1903 dans ses Principles of Mathematics, § 253. Nous croyons nous rappeler que Pierre Ageron, quand nous lui avons montré le diagramme de Russell, nous a dit après l’avoir examiné : « J’ai eu peur ! J’ai cru un instant que Russell avait inventé la théorie des catégories ». Cependant Seymour Papert en fait remonter l’origine à Poincaré Cf. « Catégories et structures : la réconciliation de Russell et de Poincaré dans le structuralisme de Lautman » par J.C. Dumoncel, Bulletin de l’Association des Professeurs de Mathématiques de l’Enseignement Public, 2006.. Par ailleurs le diagramme de Russell trouve une autre application (disons) dans le rapport entre les trois clochers de Martinville et trois jeunes filles chez Proust Cf. La Mathesis de Marcel Proust par J.C. Dumoncel, Garnier, 2015.. Quoi qu’il en soit, dans l’histoire du structuralisme dont nous avons conté l’archéologie Cf. « Une archéologie du structuralisme »., un nouveau chapitre s’est esquissé quand Grothendieck a écrit que « les ‘couples’ yin-yang et les groupes qu’ils forment » ont « la saveur bien particulière à l’investigation d’une ‘structure’ mathématique » Récoltes et Semailles, p. 835..