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Circuit
Musiques contemporaines
Le statut socio-institutionnel de la musique savante
The socio-institutional status of learned music
Michel Ratté
Ruptures?
Résumé de l'article
Volume 7, numéro 1, 1996
Réagissant à ce qu’il appelle l’ambiguïté de la position de Lise Bissonnette et
l’infantilisme de celle de Michel Gonneville, Michel Ratté récuse l’idée que la
subversion immanente est la première cause de la rupture avec le public et
discute l’utilisation faite, par Lise Bissonnette, des citations de Rochlitz et Ferry.
Il invite la directrice du Devoir à faire de son journal le lieu d’une authentique
critique d’art.
URI : https://id.erudit.org/iderudit/902150ar
DOI : https://doi.org/10.7202/902150ar
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Les Presses de l'Université de Montréal
ISSN
1183-1693 (imprimé)
1488-9692 (numérique)
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Citer cet article
Ratté, M. (1996). Le statut socio-institutionnel de la musique savante. Circuit, 7
(1), 25–29. https://doi.org/10.7202/902150ar
Tous droits réservés © Les Presses de l’Université de Montréal, 1996
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Le statut socio-institutionnel de la musique
savante
Michel Ratté
|
7extezyxwvutsrqponmlkjihgfedcbaZYXWVUTSRQPONMLKJIHGFEDCBA
paru dans En marge de la musique, n° 4, décembre
1994{]]
J'aimerais réagir aux propos de Madame Bissonnette sur la musique contemporaine publiés le 3 octobre dernier. Je ne m'opposerai pas à son constat
dépité en rappelant la panoplie des richesses de la musique contemporaine
comme certains de mes collègues sont tentés de le faire. Dans cette veine, le
compositeur Michel Gonneville, qui répliquait à Madame Bissonnette le 3
novembre suivant, fait figure d'emblème. En grand enfant, il a voulu révéler le
merveilleux dans la musique contemporaine. Il a évidemment fini par exhorter
ses interlocuteurs, et tout particulièrement madame Bissonnette, à l'infantilisme.
Quoi qu'il en soit, je n'aborderai pas ici la musique comme telle, d'une part
parce que je m'y consacre, sans complaisance, dans d'autres écrits (certains
sont même parus dans te Devoir), mais surtout parce qu'il me semble que l'on
n'y trouvera pas les bons arguments contre les propos de la journaliste.
Il faut d'abord dire qu'elle convoque à juste titre les musiciens à une réflexion sur le statut socio-institutionnel de la musique savante. J'aimerais dire en
passant que c'est exactement pour cette cause que je m'égosille dans le milieu de la musique où je n'ai eu droit jusqu'à maintenant qu'à l'ostracisme. Ce
n'est pas de la paranoïa. On considérera que très peu de lecteurs intéressés
par la nouvelle musique savent qui je suis. Premièrement musicien, j'ai régulièrement publié, depuis quatre ans, critiques et essais sur la musique et l'esthétique mus par la nécessité de ce débat (dans Spirale[2\ MusicWorksi3\ etc.,
ainsi que dans le bulletin En marge de la musique, publié à compte d'auteur).
L'indifférence générale saupoudrée d'hostilité - procès d'intentions banalisateurs
et interpellations aux ambitions diffamatoires — a été de mise. En lieu et place
du débat, les musiciens, en théoriciens dilettantes, ont cru qu'il fallait d'abord
choisir entre le camp moderniste ou postmoderniste. Le débat aurait pu montrer qu'avant de se soumettre à ces catégories théoriques, on doit les comprendre en s'instruisant puis surtout les critiquer, voire les dépasser par notre
réflexion et production concrètement situées — je crois avoir prêché par l'exemple.
Le problème est que jusqu'à récemment, convoquer le débat dans le milieu
semblait signifier « vouloir la chicane ». Et si, par surcroît, on l'« obscurcissait »
(1) (e Devoir a publié le 2 4 novembre
1994, sous le titre « La situation socio-institutionnelle de la musique savante », une
version écourtée et entièrement réécrite du
texte qui lui avait été envoyé le 4 novembre et qui a été publié dans En marge de
la musique sous le titre : « A l'attention du
Devoir, pour publication, le 4 novembre
1 994. » En accord avec l'auteur, c'est la
version « longue » qui est publiée ici. Nous
lui donnons comme titre une des phrases
de ce texte, proche de celui utilisé dans Le
Devoir. Les notes de l'auteur et le postscrîptum ont été ajoutées postérieurement
à l'article en vue de la présente réimpression. (NDLR)
(2) Bulletin publié par l'Université du
Québec à Montréal, sous la direction de
Georges Leroux. (NDLR)
(3) Revue de langue ançlaise consacrée
à la musique contemporaine, publiée à
Toronto. (NDLR)
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avec l'intellectualîté, le débat devenait alors vraiment un mauvais « messagemarketing » à l'égard d'un public invité à partager une expérience de diversité
relativement harmonieuse. Aujourd'hui, la requête d'un débat, prenant la forme
d'une menace en provenance de l'extérieur du milieu, fait dire à certains que
Ton est enfin mûr pour ce débat. J'étais au front et j'y reste, indépendamment
de toute solidarité opportuniste. Je mets en garde contre la simple mobilisation
politique des musiciens outrés derrière la présumée noblesse de leurs institutions. Ils rencontreront de la résistance. On doit reconnaître que la critique de
l'autonomie de l'art est maintenant une vague de fond idéologique, tenace et zyxwvutsrqponmlkjihgfedcbaZYXWVUTSRQPON
multiforme qui exige une réflexion critique approfondie et conséquente. Il n'y a
plus seulement les intellectuels néo-libéraux qui voient l'humanité « lésée » par
la situation de l'art contemporain. Il y a maintenant les citoyens ordinaires. La
façon retorse qu'ont les grandes institutions médiatiques et étatiques d'accabler les citoyens avec la culture politique gestionnaire néo-libérale - on leur
fait porter personnellement le fardeau de la dette nationale - leur fait aussi
prendre en retour le ton de « l'associé de l'Etat » à propos de ce qui ne les
interpelle plus. Ainsi, les citoyens ordinaires se construisent un droit de regard
immédiat sur ce qui est bon ou mauvais pour l'ensemble de la société et font
(4) À proprement parler, le droit de regard
passer le droit du contribuable au-dessus de la discussion démocratique'41
Considérant le sérieux, l'énormité et la complexité de la situation, j'entends
interroger l'ambiguïté de l'intervention de Madame Bissonnette. Dans le même
élan où elle demande un exercice de réflexion dans le milieu musical, elle
semble y aller d'une thèse qui anticipe de manière décevante le but d'une
telle réflexion. Pour elle, viendra en lumière le fait que l'esthétique de la rupture, la subversion immanente de l'art est la première cause de la rupture avec
le public : « Je comprends le drame des créateurs qui vivent sous les ordres de
la rupture, mais je ne les entends pas répondre. Là est pourtant le début du lien
qu'ils cherchent. » L'ennui, c'est que l'on ne sait plus si la « réponse » doit être
une œuvre d'art symbolisant ce « lien » ou une discussion ouverte à propos de
l'art. J'ai l'intention de montrer que si l'éditorialiste entend encore s'autoriser
comme elle le fait des propos de Rainer Rochlitz et Luc Ferry, elle ne peut
rester aussi ambiguë. De fait, les intellectuels parisiens ne sont pas tous unanimes. Et le sort a voulu que Rochlitz et Ferry soient même des adversaires irréductibles sur la question des arts contemporains. Il est incroyable de les voir
alliés pour la cause d'une critique de la légitimité de l'art autonomisé au nom
d'un soi-disant bon sens de la collectivité, à portée de main des intellectuels.
Rochlitz, le premier convoqué, s'était permis de critiquer haut et fort ce qu'il a
appelé « la tentation néo-conservatrice » d'un Ferry quand celui-ci voyait rouge
devant les avant-gardes artistiques, selon lui essentiellement nihilistes (cf. la recension critique du Homo aestheticus de Luc Ferry par Rochlitz dans la revue
Critique, n° 5 2 1 , octobre 1 9 9 0 ) . C'est dans son tout dernier livre que Rochlitz
présente le plus exhaustivement la perspective théorique au nom de laquelle il
critiquait Ferry. Pas de chance pour nous, lecteurs du Devoir. L'humeur
immédiat des citoyens sur les problèmes de
la société est lui-même une construction
idéologique : ce sont avant tout les médias
et les intellectuels médiatiques qui construisent la prise de parole des citoyens sous
forme d'opinions simplistes et de solutions
faciles à l'égard des problèmes de la culture savante. S'ils prétendent bénéficier de
l'assentiment du grand public, peut-être
pouvons-nous garder espoir en pensant
que, toutes proportions gardées, le « grand
public » reste indifférent à des questions
comme celle du soutien public à la musique savante. Et pourquoi ne pas concevoir
cette indifférence d'une manière bienveillante ? La sagesse populaire est avant
tout pragmatique : le grand public a peutêtre d'autres chats à fouetter sur d'autres
fronts, comme celui de la préservation
même d'une politique gouvernementale
d'assurance sociale contre les méfaits du
capitalisme dans laquelle s'inscrit le rôle de
petites institutions comme les conseils des
arts mais surtout de très grandes institutions
comme les systèmes de la santé, du revenu
minimum garanti. Il serait assez ironique que
nous, artistes de la différence, soyons éventuellement sauvés par la sagesse pragmatique des gens ordinaires.
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postmodernezyxwvutsrqponmlkjihgfedcbaZYXWVUTSRQPONMLKJIHGFEDCBA
sweet and sour (ou le simple dilettantisme) a fait dire à
Stéphane Baillargeon, qui recensait ce livre le 2 7 août dernier, qu'« on se
satisfait bien davantage des critiques adressées par l'observateur (Rochlitz) au
jeu ambigu du système de l'art [...], qu'au (sic) propos du philosophe pour
réactiver le jugement esthétique ». De fait, on n'a rien su de l'argument essentiel de Rochlitz (in Subversion et subvention, 1994). Je ne recenserai pas le
(5) Cf. ma recension critique in Ratté
livre ici{5J. Mais je crois qu'en interprétant pour les lecteurs, simplement, la pe(1994-1995)
tite citation que Baillargeon et Bissonnette s'échangent, on pourra voir qu'ils
sont bien loin de le comprendre et qu'ils n'ont pas vu la critique que Rochlitz
leur adresse. Rochlitz constate que « la critique a renoncé à toute évaluation,
le public à toute compréhension, l'esthétique à toute légitimation » (au fait, si
cet énoncé est juste par rapport à la pensée de Rochlitz, il faut se demander
s'il s'agit bien de ses mots : ceux-ci proviennent du premier paragraphe de la
quatrième de couverture... Lecture de surface, s'il en est, de la part de nos
intellectuels). Mais il ne sous-entend absolument pas, comme les gens du Devoir le font, que cette renonciation multiforme puisse avoir été causée par le
seul art contemporain. Selon Rochlitz, c'est bien plutôt seulement à titre de
démarche esthétique qui renonce à la légitimation que l'art contemporain est
criticable. Pour lui, on a renoncé synchroniquement à l'évaluation, à la compréhension et à la légitimation de l'art contemporain.
Je me permettrai une petite digression. Rochlitz est un théoricien travaillant
dans la perspective ouverte par la théorie de Jurgen Habermas. Il s'agit d'une
théorie de la société qui prétend rendre compte des problèmes socio-culturels
en les comprenant comme des problèmes de communication distordue et
brouillée par la société d'échange capitaliste et la conception technocratique
et gestionnaire de la société : voilà les premiers coupables161. Rochlitz reprend
le flambeau afin de nous rappeler la structure de communication, d'interaction
dans la constellation de l'institution-art si celle-ci doit résister à l'aliénation : comprendre, pour les publics, c'est certainement interpréter mais jamais sacrifier
l'œuvre d'art à une appropriation privée. La critique d'art, quant à elle, doit
d'abord comprendre, mais encore comparer et justifier la comparaison pour
prétendre évaluer. L'artiste, quant à lui, doit réfléchir sur le contenu de son expérience, et ceci d'autant plus explicitement et exhaustivement que cette expérience serait plus dépourvue de sens partagé a priori. Le manque de légitimité
de l'art contemporain n'advient pas par le fait que le sens des œuvres soit singularisé ou même particularisé (comme le soutiendrait Ferry), mais bien par le
fait qu'elles aspirent à rester privées en échappant à la discussion. En outre,
l'ironie a voulu que passe inaperçu à la lecture rapide de Madame Bissonnette
le fait que Rochlitz entend conserver et réformer l'impulsion critique de l'art
avant-gardiste - a r t de la subversion, de la rupture. On comprendra dès lors
que le penseur ne voit absolument pas de reconstruction de légitimité possible
pour l'art à partir d'un simple assentiment du public. On n'a certainement pas
à se rendre ici aux arguments de Rochlitz. Il vaudrait mieux que les lecteurs se
(6) Cf. Habermas ( 1987). Pour une synthèse brillante des enjeux de l'entreprise de
Habermas par rapport à la théorie critique
et la société contemporaine, cf. Wellmer
(1985), pp. 35-66.
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fassent une idée eux-mêmes. Mais il faut rappeler que sa théorie a une fonction strictement thérapeutique dans le contexte de la société de consommation, où non seulement est favorisé un rapport privé à l'art s'abstenant de la
discussion, mais encorezyxwvutsrqponmlkjihgfedcbaZYXWVUTSRQPONMLKJIHGFEDCBA
l'oubli de la simple possibilité de la discussion à propos de l'art. Le statut de cette théorie est moins inquiétant que la posture de
juge-inspecteur culturel d'un Ferry et de plusieurs autres intellectuels tentant de
définir le contenu de sens d'un nouvel art, ne serait-ce qu'en tant que renoncement à la « rupture ».
Par ailleurs, le « gros bon sens » de la citation de Rochlitz, qui fut reconnu
par Baillargeon, maintenant éclairée sous un autre angle, nous permet certainement de convoquer Madame Bissonnette à penser sa propre situation. On
lui suggérerait volontiers qu'elle aborde la tâche urgente de rénover les pages
consacrées à la musique dans Le Devoir afin qu'elles deviennent un lieu d'échanges artistiques et intellectuels par le biais d'une authentique critique d'art. Le
critique a fait place au sanctionneur. Plusieurs ont renoncé à légitimer leurs critiques en troquant la substance de l'expert pour le ton de l'expert qui dit : « Je
condescends à la formule journalistique, fiez-vous à moi, j'ai le goût sûr » - je
pense à Carol Bergeron qui collaborait encore récemment au Devoir. Plus
navrant est le fait que plusieurs - outre Madame Bissonnette - ont même
renoncé explicitement à comprendre, première condition pour intervenir de
manière pertinente sur le sujet musical dans l'espace public. Je pense à Serge
Truffault qui, depuis des années, nous distille sa fantasmagorie privée autour
de la musique afro-américaine. Le sanctionneur y va de décrets et jalouse les
sanctionneurs plus en vue. J'ai en mémoire la pathétique révision du critic poll
de la revue de jazz Down Beat que Serge Truffault nous a offerte cet été (7 '.
Un décret pour un autre : tout cela est bon pour les convervations de salon,
sinon de taverne. Madame Bissonnette nous a rappelé à juste titre que le problème de la musique savante - musique qui, au demeurant, comprend
aujourd'hui les productions d'artistes alternatifs (dont je suis) issus de la musique populaire que l'on appelle ici la musique actuelle- n'en est pas un de
vulgarisation. Par contre, il ne fait pas de doute que c'est le problème du Devoir : son mandat exige la vulgarisation entendue comme introduction à des
expériences. Mais cet exercice, pour ne pas passer au vulgaire, doit aussi
être le fruit d'une véritable expertise... On l'a oublié au profit d'une exposition
obscène des humeurs de quelques privilégiés. Et je sais pertinemment que cela
ne passe pas sous les yeux de Madame Bissonnette sans qu'elle ne s'interroge. Force est d'admettre qu'elle est déchirée entre l'exigence de l'intellectuel libre et les pressions de sa fonction institutionnelle dans ce qu'il faut appeler une entreprise. On comprend mieux la contradiction entre son atterrement
devant ce qu'elle nomme la « médiocrité » culturelle du Québec et son flirt avec
un renouveau populiste en art.
Bien sûr, le problème n'a pas à être résolu par Madame Bissonnette seule.
C'est au moins ce qu'a rendu évident son interpellation du milieu musical181.
|
(7) L'été de 1994.
(8) Madame Bissonnette n'a jamais daigné répondre à ma critique. Peut-être évalue-t-elle que le silence indifférent de la
personne prestigieuse qu'elle est, à l'égard
de mes affirmations - qui ne sont pas fondées sur le pouvoir du prestige - , est la
meilleure façon de banaliser le blâme et
même de mettre en doute les faits ? En tout
cas, à l'occasion d'une correspondance
avec Rochlitz, j'ai pu être conforté dans
mon jugement et être à même de constater
qu'il n'était pas de la moindre importance
pour l'auteur que l'on réagisse au fait qu'il
ait été cité (plus d'une fois I) par le biais
de la quatrième de couverture dont il n'est
pas l'auteur, et surtout que l'on laisse entendre d'une manière intéressée l'existence
d'une quelconque communauté de pensée
entre lui et Luc Ferry sur la question de l'institution artistique contemporaine.
Post-scriptum zyxwvutsrqponmlkjihgfedcbaZYXWVUTSRQPONMLKJIHGFEDCBA
Pour contribuer à la question de la nécessaire ouverture critique de l'institution-art, j'aimerais spécifier la signification des attaches de ma musique aux
traditions populaires. Au-delà des mobilisations soi-disant subversives des traditions populaires dans les musiques alternatives qui vivent le paradoxe d'une
nostalgie de la ritualisation — c'est certainement le cas de ce que l'on appelle
la « musique actuelle » - , au-delà de l'irruption de la culture populaire dans
les oeuvres dites postmodernes, qu'elles soient condescendantes dans leur ironie ou conciliantes dans leur utopie à l'égard de cette culture, il faut penser un
assouplissement des institutions musicales qui dépasserait l'esthétisation des
antagonismes et des tolérances institutionnelles. De l'hybridation de surface,
on peut penser aller vers une hybridation des savoirs esthétiques comme la
condition d'un approfondissement des expériences esthétiques. On pourrait
donner un sens authentique à la rencontre des institutions artistiques en assumant l'idée d'une véritable dialectique communicationnelle esthétique des transactions institutionnelles, comme le souhaite Rochlitz, dans la lignée de Habermas. J'inscris mon travail de création et de réflexion sur la musique improvisée
dans cette perspective. J'aimerais ajouter que je mesure très bien la fragilité de
ce projet en regard des luttes de pouvoir qui traversent l'institution savante de
la musique. Celle-ci fait en ce moment les frais des changements d'alliances
idéologiques dans les élites de la société qui l'avaient soutenue jusqu'à maintenant. Pour l'instant, l'institution savante de la musique, irritée, se cantonne dans
une posture d'auto-conservation.