ETUDE ARCHEOGEOGRAPHIQUE
DU LIGET
Par Rémi LEQUINT et Anthony GRILLOT
INTRODUCTION
L’implantation des établissements monastiques cartusiens répond à une logique
d’implantation guidée par l’exemple de la maison mère. Les règles d’implantation répondent
aux besoins de la communauté : l’isolement et la proximité des ressources, la principale étant
l’eau, d’où la devise « L’eau dans un désert ». La Grande-Chartreuse est implantée dans une
vallée alpine encaissée qui alimente le ruisseau de Saint Bruno. La correrie située en aval du
monastère établit le lien entre le désert et l’extérieur. Les limites du territoire cartusien dans le
massif de la Chartreuse s’identifient facilement par les lignes de crêtes des vallées qui par leur
escarpement établissent bien les frontières du domaine. L’ensemble du territoire à l’intérieur
ses limites va s’organiser pour gérer les ressources et assurer au monastère un fonctionnement
sans perturber la vie monastique. Au Liget, l’implantation de la chartreuse va suivre le plan de
la Grande Chartreuse, mais avec ses spécificités régionales. Le Liget est située dans un
paysage rural marqué par la présence de zones boisées et agricoles entre plateaux et vallons
encaissés. L’espace cartusien est originellement situé dans un « désert », coupé du monde
pour permettre aux moines chartreux de se consacrer à la foi. Mais il est également caractérisé
par l’eau car le désert cartusien ne représente pas un espace stérile mais au contraire, le
territoire des chartreux doit permettre à la communauté de subvenir à ses besoins. Donc à
partir d’un espace caractérisé par son milieu naturel, les chartreux vont se l’approprier, le
délimiter et le gérer pour qu’il devienne leur territoire en particulier. Il s’illustre ici par la
fondation de la Chartreuse du Liget dans une clairière de la forêt de Loches. Le milieu sera
structuré, organisé et géré pour parvenir à répondre aux besoins que nécessite un
établissement monastique pour sa subsistance. Le territoire des chartreux du Liget va donc
nous intéresser ici afin de mettre en évidence les relations qui sont apparues et se sont
développées entre les hommes et le milieu et leurs impacts spatiaux. L’approche passe par
l’origine de l’implantation qui va occasionner la structuration et l’organisation du territoire
puis par le décryptage de la gestion du domaine par ses conséquences sur le paysage.
1.
L’implantation monastique, présentation propriétaires et usagers
Figure 1. Le bassin de l’Aubigny. 1
1.1. L’occupation antérieure à la chartreuse
Ormis les vestiges préhistoriques de la vallée de l’Indrois, les premières traces
d’occupation du site du Liget se trouvent à Chambaudon en périphérie de la forêt de Loches.
Le site Gallo-romain de Chambaudon correspond au premier défrichement attesté du secteur2.
Dans le cœur de la forêt un second site apparait à l’Ouest de l’étang de Marigny (Figure 3), le
fossé qui longe le domaine des chartreux le contourne légèrement, alors que les chemins
modernes qui quadrillent la forêt lui coupent un de ses côtés. Une levée de terre délimite le
site découpé en deux parties attenantes. Peu de vestiges fournissent d’information sur sa
datation. Au cours du XIe siècle, une communauté s’était déjà installée près de la Chapelle
1
Source : d’après l’IGN 2011 - www.geoportail.fr.
Jacquet, G., 2003. La forêt en Val de Loire aux périodes préindustrielles : Histoire, Morphologie, Archéologie,
Dendrologie. Thèse de Doctorat, Université de Tours, 565 p.
2
Saint Jean autour d’un ermitage. Les travaux de prospection qui ont été menés à proximité de
la Chapelle (op. cit. Jacquet, 2003) montrent un site enclos par un fossé avec la présence en
surface de matériel archéologique datant du Xe et XIe siècle (Figure 2). Une première
occupation érémitique est donc présente sur le site dit des Renfermés. Il est délimité par un
fossé formant un quadrilatère (Pointillés rouge sur la Figure 3 et Figure 4).
Figure 2. Matériel céramique datant du Xe-XIe siècle et provenant du site des Renfermés
Source : Jacquet 2003.
Avant l’arrivée des Chartreux, le site va connaitre une première mise en valeur. Les
données historiques montrent que la communauté présente sur le site avait commencé les
défrichements avec l’ouverture de la clairière du Liget (op. cit. Jacquet, 2003). Au cours du
XIIe siècle, l’abbaye de Villeloin va acheter les terrains et les délimiter par un fossé. Les
moines vont continuer d’étendre la clairière du Liget qui va pouvoir accueillir la Chartreuse.
A proximité du site de la Tuilerie, la limite de la clairière est matérialisée dans la forêt par la
présence d’une levée de terre. Elle illustrerait les limites de la clairière originelle. L’espace
était donc déjà occupé, défriché et géré avant l’arrivée des chartreux au moins à partir du Xe
siècle.
Figure 3. Les anomalies topographiques de la partie Nord-Est de la forêt de Loches.
Figure 4. Extrait de la Carte de course d’orientation centré sur le site des Renfermés3.
3
Comité Départementale d’Indre et Loire de Course d’Orientation, 1996, carte N°3734.
1.2. L’installation des chartreux
1.2.1. Des terres héritées
La Chartreuse est fondée entre 1181 et 1189, les conditions d’implantation répondent
aux contextes politiques et religieux de l’époque qui est laissé à l’étude des historiens. Lors de
la fondation de la Chartreuse 700 arpents4 de terres sont données par l’abbaye de Villeloin,
elles seront ensuite payées par le roi entre 1176 et 1183. La forêt de Loches devient propriété
du roi de France en 1205, elle le reste jusque la Révolution. Le roi donne le fief à Dreux de
Mello lors du XIIIe siècle5. Les cantons qui ont été donnés portent les noms à l’époque
moderne du Bois Revenant, le Chatellier, la Vallée des Pierres, les Sept frères, les Houssières,
les Renfermés, le Pas aux Anes, les Hauts Bois, le Bois brulé, Marigny et la Vente à canons.
Le don des terres réserve les droits de vœux dans l’emprise des fossés dans la forêt et
également sur les métairies. La forêt de Loches dépend de deux propriétaires aux époques
médiévales et modernes que sont le roi d’Angleterre puis de France et la Chartreuse du Liget.
Les limites de la forêt sont restées stables depuis la fin du XVIe siècle.
1.2.2. La délimitation du territoire
Dans le fonctionnement d’une Chartreuse plusieurs espaces apparaissent, le terminii
monasteri qui correspond au monastère, le terminii spaciementa qui délimite l’espace de
promenade en dehors du monastère et le terminii possessorum qui englobe les possessions qui
ne sont pas forcément contiguës. Nous laissons de côtés les limites du monastère qui sont bien
connues et celles des possessions que nous aborderons plus tard pour l’espace proche. Ce sont
les limites du spaciement qui vous nous intéresser. Elles marquent l’extension du désert de
Chartreuse. Pour la Grande-Chartreuse, les limites du désert correspondent aux lignes de
crêtes bien marquées qui entourent la vallée du monastère. Des bornes régulières jalonnent les
crêtes du Massif. Mais la topographie tourangelle étant sensiblement différente à celle des
Alpes, les limites doivent être plus marquées pour pouvoir bien être identifiables. C’est
pourquoi elles sont matérialisées par un fossé. Comme il a été évoqué, les Chartreux
possèdent les terres à l’intérieur du tracé des fossés. Ils vont marquer la délimitation avec la
forêt royale. L’étude des documents figuratifs anciens montre la présence d’un élément
linéaire qui peut correspondre à la limite. Les plans des possessions de la Corroirie de 16806
montrent bien une limite depuis Chambaudon jusque Marigny (Figure 5 : ligne rose). Sur la
carte de Cassini (Figure 6), nous pouvons observer qu’il y a un élément linéaire depuis le
lieux–dit de la Bauge au Nord-Ouest du Bois de la Chartreuse jusqu’à l’étang de Marigny.
4
Unité de mesure de surface valant ½ ha.
ADIL H167 : T5, XXVIII 160b et T1, 15
6
ADIL H 195 ADIL H 197 fol 2 r° Arpantage figuré de la Chartreuse du Liget de ses Bois, Prez, vignes, Estangs
et Métairies et de tous les héritages qui sont dans le fief de la Courerie avec leur contenue et le devoir au quel ils
sont subjets
5
Figure 5. Assemblage des plans des possessions de la Corroirie en 16807.
La limite présente sur les plans anciens se retrouve sur la carte IGN actuelle, elle est
symbolisée comme un élément linéaire quelconque et dénommée le fossé des Chartreux. Il
importait donc de savoir si cet élément existait encore actuellement et quelles étaient ses
caractéristiques, c’est pourquoi l’étude s’est orientée vers l’analyse topographique. Les cartes
de courses d’orientation de la forêt de Loches sont des bons éléments pour détecter ces
anomalies topographiques. Elles sont réalisées afin de fournir un document permettant de se
déplacer en se localisant rapidement dans l’espace. Tous les éléments qui peuvent servir à
l’orientation sont indiqués (chemins, végétation, topographie, éléments anthropiques…). Un
7
Travail d’Anthony Grillot d’après : ADIL 37 H197 fol 13 r° « Arpantage figuré de la Chartreuse du Liget de
ses Bois, Prez, vignes, Estangs et Métairies et de tous les héritages qui sont dans le fief de la Courerie avec leur
contenue et le devoir au quel ils sont subjets »
relevé de précision est indispensable à la réalisation d’une carte pour quelle puisse être
exploitable. Les cartes réalisés entre le 1/5 000ème et le 1/15 000ème vont illustrer tous
éléments présents sur le terrain de plus de 50 cm dans leur plus grande longueur. La carte de
course d’orientation représente donc un outil important et fiable dans l’étude des anomalies
topographiques. Elles correspondent à des éléments topographiques dont l’origine ne peut être
naturelle. Elles sont classées entre les anomalies ponctuelles et linéaires, ces derniers vont
nous intéresser ici. En observant la carte un des éléments est composé d’un fossé et d’une
levée de terre parallèles entourant une partie de la Chartreuse. L’anomalie topographique est
marquante car elle n’est pas réalisée dans le sens du drainage d’un secteur car elle recoupe des
vallons sans prendre en compte les sens d’écoulement. L’ensemble formant une limite bien
identifiée et identifiable dans le relief. Il apparait donc que cela serait la limite du terminii
spaciementa ce qui a été confirmé par la prospection pédestre (Figure 7).
Figure 6. Extrait de la Carte de course d’orientation8.
Le tracé en rouge souligne l’anomalie topographique marquant la limite du territoire des Chartreux.
Dans sa majeure partie la limite apparait comme un fossé et une levée de terre du côté
intérieur du domaine cartusien, ce qui est vrai pour toute la partie Ouest et Sud, mais ils y a
8
Comité Départementale d’Indre et Loire de Course d’Orientation, 1985, carte N°3713.
quelques variations sur les autres parties. A partir du coin Sud-Est, un nouveau fossé démarre
vers l’Est puis disparait peu à peu. Il peut s’agir d’un second état des possessions du bois. A
partir du même coin, la limite Est du domaine qui semble le mieux correspondre à celle qui
apparait également sur les plans anciens change de caractéristiques. Elle devient un ensemble
de deux levés de terre parallèles qui passe à un moment à deux fossés jusque la terminaison
orientale du Bois. Il apparait souvent qu’un ensemble de levée de terre marque un chemin
traversant un bois, hypothèse émise par G. Jacquet (2003) et qui marquerait logiquement un
chemin longeant le domaine. La limite est jalonnée de quelques bornes restantes dans des
états de conservation variables et dont la datation n’est pas possible, même si certaines bornes
apparaissent sur les plans de 1620. En dehors de la forêt, des haies limitaient le territoire des
Chartreux au niveau des métairies, mais elles ne sont pas assez régulières pour montrer une
organisation visible. Des bornes de délimitation peuvent jalonner l’extérieur du territoire
comme c’est le cas dans la partie Est.
Figure 7. Photos du de la limite du terminii spaciementa du Liget.
Gauche : vue du fossé et de la levée de terre, droite : vue d’une des bornes présente à l’extérieur de la limite.
L’étude des anomalies topographiques a mis en évidence la présence de ces fossés de
délimitation jalonnés par des bornes. Les textes montrent que ces limites sont antérieures à
l’implantation de la Chartreuse, mais elles n’ont pu perdurer jusqu’aujourd’hui qu’avec un
entretien régulier.
1.2.3. Les voies de communication
Les routes et chemins vont avoir leur importance dans l’organisation du territoire
cartusien. Les plans et cartes sont les principales sources de l’étude de la hiérarchie viaire du
territoire. Actuellement la route de Montrésor à Loches passe par la Corroirie et longe la
digue de l’étang de la Corroirie avant de partir vers la Chartreuse. Cette configuration est très
récente et la configuration originelle en est tout autre. Les plans des possessions de la
Corroirie en 1680, fait un état des voies de communications dans le domaine des Chartreux
(Figure 5).
La voie principale est celle de Loches à Montrésor, en venant de Montrésor, elle passe
par le Pont aux Chèvres puis traverse le bois en direction de l’angle Sud de la Chartreuse sans
passer par la Corroirie. Sa présence dans la forêt et son importance sont attestées par les deux
levés de terres, admises comme des anomalies topographiques qui suivent le tracé de
l’ancienne route (Figure 3). Elle traverse le domaine et continue vers la forêt royale par la
passée des Regus (Figure 5). Elle se retrouve sur les plans du domaine de la Chartreuse de la
fin du XVIIe siècle (Figure 8 et 10). La carte de Cassini montre une rupture dans la continuité
de la route entre le Pont aux Chèvres et la Chartreuse, traduisant soit un faible entretien soit
que son utilisation était plus limitée (Figure 11). Pour les portions représentées, les figurés
illustrent qu’elle n’était pas empierrée. La carte d’Etat-major, dont les relevés ont été établies
en 1840 pour la feuille de Loches, montre que la route principale est la même que l’actuelle,
elle est empierrée et l’ancienne route de s’est transformée en chemin (Figure 13). Pour le
réseau secondaire, les plans anciens en particulier la série H 197 qui a été numérisée et
assemblé montre un réseau établi entre les métairies et qui va aboutir à la Corroirie et à la
Chartreuse dans une moindre mesure. Il va permettre d’assurer le lien avec l’extérieur.
La route actuelle qui va de la Corroirie à la Chartreuse est très récente. Lors de la
période d’activité du monastère, il est logique que la route principale qui traverse le domaine
ne desserve pas directement l’entrée du monastère afin de ne pas perturber la quiétude des
chartreux. C’est pourquoi la Corroirie possède cette relation privilégiée avec la Chartreuse.
Elle assure les relations avec l’extérieur jusqu’au XVIIe siècle et cela est observable dans
l’organisation du réseau de communication. Depuis le Pont aux chèvres, où arrive la route de
Montrésor, un diverticule s’oriente vers la Corroirie. Les plans les plus anciens montrent que
le chemin passait sur la digue et venait traverser l’Aubigny avant de passer un pré pour arriver
face au pont-levis. Le cadastre Napoléonien confirme cette organisation, mais à partir de
1840, la carte d’Etat-major montre une évolution avec la route principale qui ne passe plus
dans le bois mais qui utilise l’ancien chemin de la Corroirie à la Chartreuse. De la même
sorte, le plan de l’étang vers 1900 illustre qu’il y a toujours présence d’un chemin qui accède
face au pont-levis par un ponceau chevauchant l’Aubigny. Mais il indique également un
nouveau chemin qui accède directement dans la cour principale de la Corroirie. Vers l’aval
l’étude du réseau parcellaire ne met pas en évidence la présence d’un chemin. L’accès par le
pont-levis était donc, au moins à partir de la fin du XVIIe siècle, le point d’accès principal de
la Corroirie. Il est à mettre en lien avec le réseau hydraulique avec lequel il vont former le
système de défense de l’établissement.
Figure 8. Extrait du plan géométrique et arpentages du domaine de la Chartreuse9.
Figure 9. Extrait du plan de la Corroirie en 168010.
9
ADIL H. 198. registre. 1672-1675 ; 25 plans. Plans et arpentages des domaines de la chartreuse. (A.D. II, 124)
H. 195. registre +1680 ; 13 plans. Etat des fiefs de la Couroirerie. (A.D. II, 124)
10
Figure 10. Extrait du plan des coupes pour la provision de la Chartreuse, XVIIIe siècle11.
Le plan indique les dates de coupes réalisées ultérieurement dans le bois.
11
ADIL H 174 Abbaye du Liget, Plan et arpentages, XVIIe siècle (56 pièces)
Figure 11. Extrait de la Carte de Cassini de 1753.
Figure 12. Extrait du cadastre Napoléonien de 1812.
Figure 13. Extrait de la Carte d’Etat-major de 184012.
12
Source : www.geoportail.fr
Figure 14. Extrait du plan de l’étang de la Corroirie13.
La clairière du Liget rassemble les conditions d’implantation d’un monastère
cartusien. La forêt de Loches apporte l’isolement nécessaire autour de la clairière créé au sein
d’un vallon alimenté par le Liget. Mais leur impact va dépasser largement le simple vallon du
Liget. La possession des terres va leur assurer la totalité de leur gestion. Ils ont pouvoir
bénéficier des ressources afin d’assurer leur autonomie, les métairies vont également avoir un
rôle dans l’approvisionnement de la Chartreuse et de la Corroirie.
2. Gestion des ressources du territoire et impact spatial
Les chartreux ont acquis un espace qui a été délimité, mais les processus
d’appropriation de cet espace seraient incomplets dans le processus de création d’un territoire
sans une gestion adaptée.
2.1. Les ressources forestières
L’insertion de la Chartreuse dans la forêt de Loches implique nécessairement une
importance de la ressource en bois. La forêt assure l’approvisionnement des seigneuries
locales, le bois sera utilisé pour chauffer, construire mais également pour assurer une source
de revenus aux chartreux lorsque cela était nécessaire. Comme en 1280 où les chartreux qui
n’ont pas assez de revenus sont obligés de vendre leur bois. Au Moyen Age, la forêt va
alimenter en bois les villes de Loches, Chémillé sur Indrois, Saint Quentin sur Indrois,
Perrusson, Saint Senoch et Mouzay. Il servait à la confection de pièces de menuiserie et de
charpente. L’étude du bois de la charpente de l’Hôtel de Ville de Loches montre qu’il
provient de la forêt des chartreux. L’analyse dendrologique a permis de mettre en évidence
13
ADIL S 4307 Plan de l’étang de la Corroirie XIXe XXe
qu’il a été acheté, coupé et charroyé entre 1540 et 1542 et qu’il a poussé dans une futaie
dense. A l’époque moderne un procès-verbal de réformation (op. cit. in Jacquet, 2003) indique
que les Chartreux sont les derniers occupants particuliers qui exploitent leur bois, tout le reste
est destiné à la ville de Loches où il est débité. En 1788 et 1789, les chartreux vendent le bois
de la Futaie des Barrières et du Grand Renfermé à respectivement un tuilier, un vigneron et un
laboureur de Chemillé14. Les baux montrent que le teneur de la tuilerie peut acheter son bois
dans les ventes du bois des Chartreux, mais n’y a pas le droit d’usage.
Pour la gestion forestière, le traitement majoritaire en taillis est mentionné jusqu’au
XIVe siècle. Alors qu’à partir du XVIIIe siècle, la futaie est privilégiée. La figure 5 et le
traitement des données des plans d’arpentages illustrent que la totalité du bois des chartreux
est traitée en futaie (689 arpents) alors que les taillis apparaissent dans les ilots boisés insérés
dans les terres agricoles (92 arpents). Le traitement en futaie est associé à la volonté de
vouloir augmenter la production de bois d’œuvre. Les chartreux assurent la gestion de toute
leur forêt illustrée par de nombreux actes15. Les plans de la forêt royale de Loches montrent
bien la séparation avec le bois des Chartreux qui n’est pas représenté. Ils en assument la
protection des zones de régénération16. Les quantités maximales de coupent sont également
déterminées (100 arpents au XIVe siècle). Les plans du domaine qui vont apparaitre au XVIIe
siècle illustrent bien la gestion des coups qui est faite (Figure 10). Gaëlle Jacquet (2003) fait
le constat que l’ancien bois des chartreux dont le parcellaire a été préservé montre
actuellement de plus beaux arbres que dans l’ancienne forêt royale. Elle pourrait être liée à la
différence de pratiques et de gestion sylvicoles qui aurait renforcé la régénération naturelle de
la forêt et ainsi favoriser la qualité des peuplements, même si il n’existe pas de source directe
sur les pratiques sylvicoles cartusienne au Liget, mais également dans le reste des Chartreuse.
Il n’est donc pas possible de suivre l’évolution des caractères sylvicoles (Peuplement,
essences, sols…) avec précision dans le bois des Chartreux comme cela a pu être mené dans
le reste de la forêt de Loches (op. cit. Jacquet, 2003).
14
ADIL 3E52/210 et 211
ADIL H167, XIV 125 TIII
16
H167 : XX126b TIII Acte du roi de France en faveur des Chartreux du Liget en 1312
15
Figure 15. Extrait du plan de la forêt royale de Loches17.
2.2. Les espaces non-forestiers
En dehors de la forêt, la gestion des espaces est répartie entre les métairies. Chaque
métairie possède son espace à gérer qui s’organise autour de la zone d’habitation principale
avec son verger entourée des espaces agricoles, avec les près et pâtures en périphérie et
parfois des productions viticoles sur les coteaux. Les fonds de vallée sont indiqués en prairies
ou friches mais relèvent en réalité des landes qu’il est difficile d’appréhender tant au niveau
de leur surface que de leur répartition. Les fonds de vallées avec les formations alluviales
récentes (1,8 Ma – actuel) sont peu exploités car composés d’argiles à silex issues de la
dégradation des formations anciennes, ils sont donc peu fertiles. Ils vont donc composés des
corridors orohydrographiques bien présents dans le parcellaire. Par contre les formations de
versants ainsi que les calcaires vont accueillir les espaces agricoles en lien avec la fertilité des
sols qui en découlent.
17
Gallica.bnf.fr
Dénomination
Bois de haute futaie
Taillis
Vigne
Prés
Labourages
Total
Surface en arpents
689
91 arpents 68 chaisnées
41
50
1628 ?
2 500
Figure 16. Tableau de répartition des usages de la terre dans le fief des Chartreux18.
Voici la liste des métairies gérées par la Corroirie du Liget :
Le Boulay, la Chappeliere, Chambaudon, La Donerie, La Gaillardière, la Garmouzière, La
Grangette, Gouart, Grangette, Marigny, Les Tranches, La Thuillerie, La Villatte, Le
Groschesne, Le moulin des roches, la Tourtoirie, la Guignaudière.
Chacun de ces labourages correspondent à des feux auxquels il faut ajouter une
vingtaine de feux dispersés dans les différents endroits suivant : la Fouettière, le petit Gouard,
les Rouëres, le petit Marigny, la Frotinerie, les Bereaux, la Croix, Lousche, le Plessis. Les
recherches en démographie historique récente nous montrent qu’un feu correspond à une
moyenne de 4,5 à 5 personnes. Si l’on multiplie cette moyenne par le nombre de feux nous
arrivons à environ 200 personnes qui occupent de manière permanente la seigneurie du Liget.
Ajoutons à cela la communauté cartusienne proprement dite à savoir une trentaine de
personnes en maison haute et une dizaine de personnes vivant à la Corroirie. Notons
également que la seigneurie du Liget est entourée par des petits hameaux et de petits villages
d’où proviennent surement la main d’œuvre agricole journalière nécessaire à l’exploitation
des terres. Ces indications démographiques seront bien sûr à affiner avec des données
régionales plus précises et sont valables pour la période qui nous intéresse (la seconde moitié
du XVIIe siècle). Période durant laquelle les progrès agricoles sont déjà importants et où le
nombre de personnes nécessaire à l’exploitation d’une pièce de terre est réduit par des
innovations techniques et la meilleure qualité du bétail de traction.
2.3. Les ressources du sous-sol
Les anomalies topographiques ponctuelles donnent des indications sur l’utilisation du
sol qui était faite. Les carrières de pierres facilement identifiables se retrouvent régulièrement
au niveau des abrupts rocheux et falaises. Le paysage actuel repose sur le massif tertiaire de
Tuffeau de Touraine (Figure 17). L’installation d’un régime marin transgressif dans une mer
peu profonde avec des conditions de forte énergie en est à l’origine. Il est épais d’une centaine
de mètres et correspond à l’étage du Turonien (93 Ma) qui tient son nom de la Touraine. Il est
ici représenté par des calcaires bioclastiques glauconieux à silex bruns caractéristiques du
Tuffeau jaune. Le calcaire gréseux est réputé pour la construction. La plus vaste carrière se
situe au niveau du Moulin des Roches au Nord de la Corroirie. Une seconde carrière est
beaucoup plus proche, elle se situe entre le Boulay et le Pont aux chèvres sur l’abrupt qui fait
face à l’étang de la Corroirie. Ces grandes carrières ont été exploitées pour les pierres de
construction dans les affleurements du fameux calcaire turonien.
18
Travail réalisé par Anthony GRILLOT d’après les plans d’arpentage du fond ADIL H197.
Les autres sites d’extraction se situent dans la forêt en grande partie à proximité de la
Tuilerie du Liget. Sa construction est attestée depuis au moins le XVIIe siècle. Elle a cessé
son activité en 1939. Lors de la période de fonctionnement du monastère, c’est la seule
métairie qui n’est pas gérée directement par les chartreux et qui est située au cœur de la
clairière du Liget. Sa localisation répond à la proximité de la matière première. Comme son
nom l’indique elle servait à la production de tuiles, mais également de briques, chaux et elle
servait pour la lessive de la Chartreuse et de la Corroirie. Les zones d’extraction se situent
toutes dans la partie boisée. L’absence de zone d’extraction dans les espaces découverts ne
prouve pas qu’il n’y en ait pas eu. Car le sol étant composé des mêmes sédiments et roches à
l’intérieur et à l’extérieur de la forêt, il serait logique de croire qu’il y eu des zones
d’extraction à proximité immédiate de la tuilerie. Elles auraient donc pu être comblées et
nivelées, soit volontairement soit par le travail du sol lié à l’agriculture. La faible dynamique
des sols forestiers a donc permis de préserver les traces de l’exploitation ancienne au même
titre que les fossés anciens qui bordaient les chemins et ceux qui limitaient le territoire des
chartreux. Les zones de calcaires turoniens se situent entre les milieux de versant et sous le
haut des plateaux. Leur dégradation créée sur les bas de versants des dépôts sableux et
argileux qui sont faiblement exploités. Il n’apparaît que deux zones d’extraction de ces
sédiments au Sud du Pont aux chèvres. Ils peuvent correspondre à des extractions de minerais
de fers qui alimentaient les forges de la Guinanderie près du Boulay. Sur le plateau autour de
la tuilerie, de nombreuses zones d’extraction ont été détectées, elles correspondent à de vastes
dépressions à flancs raides partiellement comblées mais bien marquées dans le paysage. Une
quinzaine d’anomalies ont été détectées. Elles peuvent être séparées en deux groupes, un
premier qui comprend les anomalies situées sur le limon de plateaux et un second avec les
anomalies sur le Tuffeau.
Le limon de plateau est composé d’argile blanche à silex et spongiaires siliceux. Il est
issu de l’altération en surface sous forme d’argile sableuse du calcaire turonien et des apports
de limons issus de la succession des épisodes glaciaires et interglaciaires durant le Pléistocène
(2 Ma – 18 000 BP19). Il montre une fertilité limitée liée au lessivage important des sols qui
explique en partie la localisation des parties boisées. Sa fraction argileuse étant dominante il
va alimenter la tuilerie pour la production de terres cuites. Quatre zones sont identifiées dans
la parcelle des Renfermés à proximité directe de la tuilerie.
Les autres zones d’extraction se situent à une plus grande distance de la tuilerie, ces
dernières sont localisées sur les zones de calcaires qui vont alimenter la production de chaux
de la tuilerie. Elles ont également pu servir de carrière de pierres de construction.
19
BP : Before Present, le présent représentant en Géologie le 1er janvier 1950.
Figure 17. Carte géologique simplifiée au niveau de la Chartreuse du Liget.
2.4. Eau et environnement
La présence de l’élément hydraulique répond aux besoins de la communauté et sa
gestion est indispensable pour commander la disponibilité est assurer les besoins tout au long
de l’année. L’eau est importante déjà pour sa consommation, pour les activités, pour sa
ressource halieutique, d’autant plus que les chartreux ne consomment pas de viande, mais
également comme élément moteur et comme support de la défense militaire. La régulation du
débit d’un cours d’eau passe par des réseaux d’étangs. L’effet de stockage est le principal
facteur de modification de l’écoulement. Plus les étangs sont nombreux et plus leur impact est
élevé. Actuellement, ils sont au nombre de six sur le cours de l’Aubigny et il y en a un seul
sur le Liget. Comme il a déjà été abordé, les fonds de vallées sont composés d’argiles à silex.
Ces corridors orohydrographiques sont à la fois des espaces de friches délaissés du fait de leur
faible fertilité mais également des espaces tampon dans la dynamique fluviale. Les fonds de
vallées imperméables favorisent la création des étangs. Les étangs sont accompagnés par un
réseau d’écluses disséminées sur tout le territoire, certaines encore en activité et d’autres
abandonnées comme l’écluse en amont de l’étang de la Corroirie (Figure 18). La régulation
des débits est faite à dessein économique. Elle est historique et a permis de gérer les
ressources en équilibrant les crues et les périodes d’étiages. Elle permet de garder des réserves
durant la période estivale et d’écrêter les hauts niveaux d’eau hivernaux et donc les
inondations.
Le cours d’eau originel est celui du Liget qui a donné son nom à la chartreuse. Son
bassin versant restreint limite la disponibilité en eau. Actuellement l’étang du Pas-aux-ânes
est encore présent mais lors du XVIIe siècle les plans montrent que deux étangs étaient
présents directement en amont et en aval de la chartreuse (Figures 8 et 10). Il y avait l’étang
de l’Abreuvoir en amont et l’étang du Marjollet en aval. La disponibilité en eau du cours du
Liget était trop faible pour permettre à la communauté d’avoir une ressource suffisante. Le
Liget s’assimile actuellement à un fossé humide. Le petit âge glaciaire qui s’est développé
entre le début du XIVe siècle et le milieu du XIXe siècle était une période plus humide et plus
fraîche. Mais malgré cela le cours du Liget était tout de même limité car il n’apparaît pas de
manière plus significative sur les documents planimétriques. Pour pallier à la disponibilité en
eau, les chartreux ont investi les cours d’eau et les bassins versants alentours. Le site de la
corroirie acquiert toute son importance dans la gestion de l’eau du domaine. Il est situé à la
confluence entre le Liget et l’Aubigny. Ce dernier possède un bassin versant plus étendu qui
dépasse les limites de la forêt de Loches. Sa gestion est ancienne20 et il montre actuellement
cinq étangs dont trois sont attestés à l’époque moderne, l’étang de Marigny, l’étang de
Pézières et l’étang de la Corroirie. La situation de la corroirie n’est pas anodine, elle est située
sur un site de confluence, relativement plat sur une terrasse alluviale ancienne subhorizontale
avec une faible pente vers la zone alluviale. Elle est composée d’alluvions sableuses et
graveleuses holocène recouvertes par les dépôts sableux et limoneux de la dernière glaciation
du Würm (115 000 à 18 000 BP). Le complexe a été mis en place par les cours d’eau actuel et
représente une épaisseur de 3 à 6 m. Il est composé de sables fins, limons et argiles riches en
matières organiques21. Le site de la corroirie est une zone de confluence importante dans la
dynamique alluviale. C’est un goulet naturel favorisant la baisse de vitesse des cours d’eau et
donc le dépôt des sédiments. L’étranglement créé est à l’origine de la terrasse alluviale. Avant
la création de l’étang, la Corroirie était située sur un site potentiellement marécageux. Car une
terrasse alluviale sur un site de confluence marque souvent la formation d’un marécage avec
la divagation des cours d’eau sur un sol imperméable. Cette situation est confirmée par le
sondage réalisé au niveau de la Corroirie (Figure 18). Le niveau argileux bleuté avec
développement racinaire est un gley de marais. Donc le site de la Corroirie était un marais, il
est vrai à une période indéterminée mais en tout cas postérieure au Pléistocène (18 000 BP),
période à laquelle la falaise en arrière de la corroirie a été créée par une boucle de méandre.
La présence d’un marais n’est pas favorable à l’installation d’une communauté. Mais le
niveau supérieur d’argile blanche avec débris organiques sur 50 m marque un arrêt net de la
dynamique marécageuse avec un passage à un comblement lent et régulier sans crise marquée
du fait de son uniformité. Le site anciennement marécageux a donc eu besoin rapidement d’un
assainissement. La création de l’étang de la Corroirie date certainement au minimum de la
fondation de la Chartreuse. Car la création d’un étang dans cette position possède plusieurs
avantages. Elle permet d’assainir le site impropre à l’installation et de créer un verrou naturel
à l’entrée du désert de chartreuse. Le rôle de la corroirie est d’établir le lien entre le monastère
20
Lorans, E., 1996. Le Lochois du haut Moyen Âge au XIIIe siècle. Territoires, habitats et paysages, Tours,
Publications de l’Université de Tours, 290 p.
21
BRGM, 1990. Notice explicative de la feuille de Châtillon-sur-Indre à 1/50 000. Orléans, 38p.
et l’extérieur. Nous avons vu que le désert est limité au Sud, à l’Est et à l’Ouest par la forêt.
Dans cette configuration la corroirie est dans une position stratégique, elle a une position de
verrou pour limiter l’accès à la chartreuse. C’est également pour cela que sa fonction militaire
est importante. La régulation des flux apporté par la gestion de l’eau a été favorable à la
vocation militaire et économique de la corroirie. Par ailleurs, il apparait que sur le cadastre
napoléonien, la présence d’un bassin au contact amont de la corroirie atteste que cet espace a
connu un comblement postérieur assez important pour pouvoir y installer la route qui accède
dans la cour actuelle et qui n’existait pas auparavant.
Figure 18. Coupes stratigraphiques dans le périmètre de la Corroirie22.
22
Source (log du Pont aux chèvres) : BRGM, 2011 – infoterre.brgm.fr
Figure 19. Carte géologique simplifiée du site de la Corroirie23.
23
Source : d’après le BRGM, 2011 - infoterre.brgm.fr
Conclusion - L’évolution du paysage : une gestion séculaire
L’implantation des moines de saint Bruno sur le site de Liget ne répond pas au hasard.
La clairière du Liget occupée et entretenue depuis le XIe siècle était un site rural idéal pour
accueillir la communauté. Le désert est produit par la forêt de Loches et l’eau est apportée par
la Liget mais également par le cours de l’Aubigny et ses affluents. Même si les chartreux
n’ont pas été les instigateurs de la gestion et de la limitation de cet espace il apparait qu’ils
vont en être les principaux acteurs. Le processus de territorialisation d’un espace passe par
une appropriation, une gestion ainsi qu’une protection. Et ce processus va se perpétrer jusqu’à
aujourd’hui et modeler le paysage à l’image des chartreux. Au premier regard on note la
dichotomie qui existe dans le paysage entourant la Corroirie. Au sud et à l’Ouest, nous
observons un paysage forestier dense avec un maillage routier et des communications réduites
c’est également un territoire ou l’eau tient une place importante. Les étangs font partie
intégrante du territoire aménagé par les moines. Ne nous trompons pas, même si ce territoire
boisé peut paraitre sauvage et se recoupe avec le désert cartusien il n’en est pas moins un
territoire façonné par l’homme et moteur de ressources pour la communauté monastique. La
forêt produit le bois utilisé pour le chauffage des cellules et les cheminées de la Corroirie. Les
étangs sont soumis à contribution car au-delà de la ressource en eau se sont des pêcheries qui
fournissent aux chartreux du poisson, base de leur alimentation. Ils vont également alimenter
les fonctions économiques et militaires que va avoir la Corroirie au cours du temps. Le
paysage au Nord et à l’Est est bien différent, nous sommes sur le territoire des exploitations
agricoles gérés par les métayers. Le schéma se répète de manière assez régulière. Au centre se
trouve la métairie qui est en réalité une grosse ferme siège de l’exploitation agricole avec une
parcelle de jardin et un carré de vigne en particulier au Nord de la Corroirie. Autour et de
manière relativement concentrique, les champs où travaillent le métayer, sa famille et
quelques ouvriers agricoles durant les périodes de récoltes ou de semis. Au-delà d’une zone
pouvant être exploité par cette exploitation se trouve une autre métairie qui prend le relais. Et
ce environ tous les 500 mètres jusqu’aux limites du fief. Par le biais des relations que les
chartreux ont mis en place au sein de leur territoire, ils sont les acteurs de leur paysage. Ils ont
su instauré un échange fonctionnel avec leur environnement dans un souci de préservation qui
va de pair avec la pratique contemplative cartusienne. La gestion différenciée du territoire qui
a été le leur jusqu’à la période révolutionnaire garde leur empreinte. Cela se retrouve encore
avec l’impact de la gestion différencié entre la forêt royale et le bois des chartreux qui garde
les plus essences du domaine forestier. La gestion des espaces prend en compte également par
la composition du substrat. Les fonds de vallées et les zones humides composées d’alluvions
argileux vont accueillir les étangs et les friches inscrites dans le corridor orohydrographique.
Les zones fertiles des versants et des parties les plus basses des plateaux sont occupées par les
cultures, alors que les espaces boisés appartiennent au terrain de sols plus pauvres mais non
moins exploités pour les ressources du sol utiles pour les matériaux de constructions. Le
paysage de la Corroirie du Liget garde donc l’empreinte cartusienne qui transparaît dans la
sérénité que le site inspire tout en gardant en bruit de fond le tumulte des eaux qui n’est pas
sans rappeler les fonctions économiques, militaires et juridique de la Corroirie.