Analyse-pays: Italie
Perspectives politiques, économiques et réglementaires,
avec référence au secteur autoroutier
20 novembre 2016
Roberto Angrisani
Frédéric Merand
Table des matières
1. Contexte politique et enjeux à court terme
1.1 Référendum
1.1.a Que prévoit la réforme ?
1.2 Impacts sur les prochaines élections 2018
1.2.a Impact politique
1.2.b Impact économique
1.2.c Impact sur la solvabilité de l’Italie
1.3 Le rôle du Mouvement 5 Étoiles
1.3.a Identité du M5S
1.3.b Position du M5S sur les infrastructures
1.3.c Position du M5S sur l’euro
1.3.d Le M5S peut-il prendre le pouvoir?
1.4 Risque de sortie de l’euro
1.4.a Scénario pessimiste
1.4.b Scénario optimiste
1.4.c Scénario réaliste
2. Perspectives macroéconomiques, financières et fiscales
2.1 Perspectives de croissance et d’inflation
2.1.a Hausse de la demande intérieure
2.2.b Inflation
2.2 Situation des banques italiennes
2.2.a. L’affaire « Monte dei Paschi di Siena »
2.2.b Impact du référendum
2.3 Fiscalité
3. Justice et corruption
3.1 Corruption
3.2 Autorité Anticorruption
3.3 Système judiciaire italien
3.4 Voies de recours juridictionnelles
3.5 Indépendance du système judiciaire italien
4. Secteur autoroutier et mécanismes de réglementation
4.1 Contexte
4.2.a Utilisation des autoroutes
4.1.b Péage
4.2.c Critique du M5S
4.2 Tendances dans le secteur automobile
4.3 Perspectives d’investissement
4.3.a Précédents
4.3.b Actualité
4.3.c Perspectives
4.4 Mécanismes de régulation dans le secteur autoroutier
4.4.a Instruments de planification
4.4.b Structure de contrôle
4.5 Risque de pressions sur la réalisation des autoroutes
5. Synthèse
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1.
Contexte politique et enjeux à court terme
Président du Conseil des ministres (Premier ministre) depuis le 22 février 2014, nommé après
deux gouvernements successifs de « technocrates », Matteo Renzi a vite annoncé son intention
d’amorcer des réformes susceptibles de remettre l’Italie sur la voie de la croissance. Pour lui, les
réformes nécessaires sont autant politiques qu’économiques. Le rééquilibrage des pouvoirs entre
le parlement et l’exécutif, ainsi qu’entre l’État central et les autorités locales, représente l’objectif
le plus ambitieux du programme de son Parti Démocratique (PD, centre-gauche). Il s’agit de
débloquer le système politique pour permettre l’adoption de réformes structurelles qui mettront
fin à deux décennies de stagnation économique relative. Pour lancer ses réformes, Renzi a dans
un premier temps obtenu l’accord du Peuple de la Liberté (PDL, centre-droit) de Silvio Berlusconi
(pacte du « Nazareno »). Toutefois, il n’a pas obtenu la super-majorité requise au Parlement pour
la proposition de réforme constitutionnelle. Cette dernière est aujourd’hui soumise à un
référendum qui aura lieu le 4 décembre 2016. L’enjeu du référendum est considérable puisque le
réformateur Renzi a annoncé l’intention de quitter ses fonctions en cas de défaite. À l’heure
actuelle, tous les sondages donnent une légère avance au « non », avec toutefois un fort
pourcentage d’indécis. Face au climat d’incertitude dans lequel l’Italie se trouve depuis plusieurs
mois, le Premier ministre a cherché à rassurer ses partenaires internationaux en s’engageant à ce
que son gouvernement termine le mandat comme prévu en 2018.
1.1
Référendum
Le projet de réforme soumis au référendum a été profondément modifié par rapport à la version
originale présentée par le PD suite { l’accord avec le parti de Berlusconi (PDL). Dans sa dernière
formulation, ce texte permet, entre autres, d’éliminer le bicaméralisme parfait qui, pour
certains, représente l’une des principales causes de la lenteur du processus législatif italien.
1.1.a Que prévoit la réforme ?
Les principaux changements inclus dans la réforme sont les suivants :
1. Un Sénat réduit à 100 membres (contre 315 actuellement ) élus non plus au suffrage
universel direct, mais choisi indirectement parmi les membres des conseils régionaux et
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les maires, 5 sénateurs étant nommés par le président de la République. Son mandat
sera de représenter les institutions territoriales, limitant ainsi les cas de conflit de
compétences entre l’État et les Régions. Le mandat des sénateurs sera aligné sur la
durée prévue pour le rôle qu’ils occupent au sein des institutions territoriales dans
lesquelles ils sont élus.
2. La fin du bicaméralisme parfait. La Chambre des Députés sera l’unique chambre {
posséder le pouvoir d’initiative législative et elle seule sera liée au gouvernement par un
rapport de confiance. Les deux chambres exerceront conjointement la fonction
législative sur des matières spécifiques : lois constitutionnelles, référendum populaire,
traités de l’Union européenne, minorités linguistiques et territoriales. Pour toutes les
autres matières, les lois seront approuvées seulement par la Chambre des Députés.
3. La limitation des Lois d’initiative populaire, pour lesquelles il faudra désormais obtenir
150 000 signatures (contre 50 000 actuellement).
4. Des modifications à la composition de la Cour constitutionnelle, qui sera désormais
composée de 15 membres, dont 3 élus par la Chambre des Députés et 2 par le Sénat.
5. La possibilité pour le parti majoritaire de rédiger une loi sur le statut des oppositions.
1.2 Impact sur les prochaines élections 2018
Des conséquences économiques et politiques sont à prévoir au lendemain du référendum,
notamment à cause de la forte connotation partisane qui caractérise le débat autour de la
réforme. En effet, les partis d’opposition continuent à voir dans ce référendum un test de la
légitimité du gouvernement Renzi. Cela implique qu’au-delà du texte de la réforme, l’impact le
Pourquoi vote-t-on?
Le 4 décembre prochain, un référendum constitutionnel permettra aux citoyens italiens de voter
pour approuver ou rejeter la réforme « Renzi-Boschi ». Le texte de la réforme a été approuvé par le
parlement avec une majorité inférieure à celle prévue (les deux tiers des membres de chaque
chambre). D’où la nécessité d’interroger la population au moyen d’un référendum constitutionnel
dit consultatif, qui ne prévoit pas de quorum minimum de participation pour assurer sa validité.
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plus important sera apprécié en termes de stabilité politique, les yeux étant rivés sur la
prochaine élection législative.
1.2.a Impact politique
La victoire du « non » pourrait mener à une crise du gouvernement qui entrainerait une phase
d’instabilité dans le pays. Bien que le Premier ministre Matteo Renzi ait déclaré que, dans tous
les cas, les prochaines élections n’auront lieu qu’au printemps 2018, rien n’exclut qu’une telle
crise puisse mener à des remaniements dans le gouvernement, voire { la nomination d’un
gouvernement de technocrates, comme en 2011.
Le résultat du référendum pourrait avoir un impact aussi au-delà des frontières italiennes,
notamment dans le cas où le « non » l’emportait. L’instabilité politique renforcera la position des
partis eurosceptiques et populistes ailleurs en Europe, avec une attention particulière aux
élections en France en 2017 et en Allemagne en 2018. Une montée du Mouvement 5 Étoiles
(M5S), principal partisan du « non », sera appréciée selon ce prisme.
La victoire du « oui » présenterait quant à elle des aspects positifs à court terme. En effet, la
position du gouvernement Renzi sera sans doute renforcée, et cela pourrait garantir une phase
de stabilité dans le pays en rendant improbable le retour aux urnes avant 2018. En outre, un des
principaux bénéfices attendus de la réforme est d’améliorer le processus législatif, permettant
de nouvelles réformes structurelles. Mais le succès de la réforme pourrait aussi avoir des
conséquences inattendues à moyen terme. Le parti majoritaire, suite { l’approbation de la
nouvelle loi, acquiert de nouveaux et très importants pouvoirs, notamment la possibilité
d’établir le statut de l’opposition (à travers une loi qui ne nécessite pas de l’aval du Sénat). Dans
l’hypothèse, pas du tout improbable, d’une victoire du Mouvement 5 Étoiles aux prochaines
élections en 2018, ceci conférerait un pouvoir accru { ce parti populiste opposé { l’euro et { la
finance.
1.2.b Impact économique
Le résultat du référendum aura un impact, d’abord sur les marchés financiers et ensuite sur
l’économie réelle. De manière générale, toutes les projections prévoient un impact moins
important en cas de victoire du « oui » par rapport au cas inverse. Le secteur bancaire sera le
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plus frappé par le résultat référendaire, notamment en ce qui concerne la gestion des « nonperforming loans » et les augmentations de capital prévues par certaines institutions comme
Banca Monte dei Paschi di Siena SpA et UniCredit SpA qui pourraient connaître des retards à
cause de l’incertitude politique. À preuve, la banque UniCredit a annoncé que son plan industriel
ne sera pas rendu public avant le 14 décembre, soit dix jours après le référendum.
1.2.c Impact sur la solvabilité de l’Italie
L’incertitude économique et politique pourrait aussi mettre en danger la solvabilité de l’Italie.
L’agence de rating DBRS, qui propose { l’heure actuelle le rating le plus élevé (A low) sur la dette
italienne, a émis des perspectives négatives sur le pays et annoncé qu’elle s’exprimerait
seulement après le référendum. Deux des principales agences de rating, Fitch et Moody’s,
pourraient s’aligner sur cette prévision.
1.3 Le rôle du Mouvement 5 Étoiles
Au cours de la campagne référendaire, le Mouvement 5 Étoiles (M5S) fondé par le comédien
Beppe Grillo est apparu comme la principale force d’opposition { Renzi. Il pourrait ainsi
apparaître comme le parti le plus légitimé à proposer un projet alternatif si le « non » l’emporte.
1.3.a Identité du M5S
Né en 2009, le Mouvement 5 Étoiles représente désormais la deuxième force politique du pays.
Ses membres refusent l’étiquette d’organisation de gauche ou de droite et ils préfèrent la
définition de « libre association de citoyens » plutôt que « parti politique ». Les 5 étoiles
représentent les volets principaux du programme du mouvement : eau, environnement,
développement, énergie et transports.
1.3.b Position du M5S sur les infrastructures
Écologiste hétérodoxe, combinant une rhétorique démocratique avec des coups d’éclat
populistes, le M5S s’oppose surtout aux grands chantiers qui impliquent un fort impact sur
l’environnement naturel, par exemple, la liaison de trains à haute vitesse (TGV) entre Turin et
Lyon à la frontière avec la France ou encore le pont qui relierait la Sicile à la Calabre. À l’inverse,
il prône des interventions qui visent à réaliser une mobilité locale intégrée et durable. Dans le
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programme sont expressément mentionnés des projets pour la croissance du réseau autoroutier
existant ainsi que des investissements pour augmenter la capacité des aéroports de petite et
moyenne taille. En termes d’impacts sur l’environnement des affaires, une éventuelle montée
du Mouvement 5 Étoiles pourrait ouvrir des scénarios plutôt avantageux pour les investisseurs
étrangers dans les domaines des énergies renouvelables et des constructions durables à
moyenne échelle.
1.3.c Position du M5S sur l’euro
Le Mouvement 5 Étoiles défend une ligne hostile à la finance et prône un référendum sur la
sortie de l’euro. La réalisation d’un tel projet serait très complexe. En effet la constitution
italienne interdit le référendum populaire sur les traités internationaux comme celui de
Maastricht qui a créé l’euro en 1992. Il faudrait un premier référendum qui donne au Parlement
des pouvoirs spéciaux afin de proposer une telle modification et ensuite un deuxième
référendum sur la proposition concrète de sortie de l’euro.
Le poids politique du M5S
Le M5S gouverne 38 villes dont Rome, Turin et Parme. Il compte 17 parlementaires européens, 91
députés, 35 sénateurs, 88 conseillers régionaux et plusieurs centaines (environ 397) de conseillers
communaux élus.
1.3.d Le M5S peut-il prendre le pouvoir?
Le Mouvement 5 Étoiles s’est affirmé depuis 2011 en tant que force alternative dans le paysage
des partis traditionnels. La majorité de ses électeurs et de ses partisans expriment leur défiance
envers les politiques d’austérité subies depuis la crise économique et financière de 2007-8. La
formation d’un gouvernement 5 Étoiles, dans l’hypothèse d’une victoire aux élections de 2018,
serait empreinte d’incertitude. Malgré le fait que le résultat des récentes élections municipales
ait confirmé que le mouvement représente au niveau local la deuxième force politique du pays,
et malgré le rôle du mouvement dans la présente campagne référendaire, les sondages
indiquent que seulement 37% de l’électorat du M5S envisage un gouvernement majoritaire de
leur parti au niveau national. Trente-quatre pour cent souhaitent une coalition avec les
principaux partis « de gouvernement », 19% envisagent plutôt que le M5S reste dans
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l’opposition et 10% sont indécis1. Ces données suggère que, malgré la forte influence exercée
par le mouvement sur le paysage politique, la victoire du « non » au référendum n’est pas un
gage de réussite pour le M5S aux élections de 2018.
1.4 Risques de sortie de l’euro
La souveraineté monétaire est un sujet qui occupe les débats politiques de plusieurs pays
membres de l’Union européenne depuis le début de la crise économique et financière de 2007-8.
En Allemagne, en France et en Italie, les partis hostiles { l’euro ont le vent en poupe. Compte
tenu de l’ampleur des enjeux d’un tel changement, plusieurs institutions nationales et
internationales ont formulé des projections sur les scénarios possibles suite au référendum, en
analysant les risques de sortie de l'euro.
1.4.a Scénario pessimiste
Dans une étude publiée en juin 2016, la Confindustria (le Conseil du patronat italien) affirme que
la victoire du « non » au référendum pourrait dynamiser les forces centrifuges dans l’Union
européenne2. Cela aurait un impact en termes économiques. Tout d’abord, le « non » traduirait
l’incapacité de l’Italie { se réformer et à avancer dans le sens d’une gouvernance plus claire et
stable qui prévoit des mécanismes de prise de décision plus rapides. La déception pourrait être
d’autant plus grande que, ces dernières années, les réformes mises en chantier par les
gouvernements technocratiques de Mario Monti et Enrico Letta, puis de Matteo Renzi, ont
alimenté des attentes positives en ce sens de la part des marchés.
1.4.b Scénario optimiste
La banque Crédit suisse a récemment publié des prévisions selon lesquelles il n’y a que 1% de
probabilité que la sortie de l’Italie de l’euro devienne une réalité dans le cas d’une victoire
marquante camp du « non ». Les « dommages » seraient de dimension modeste. La banque
suisse exclut d’ailleurs tout effet domino ainsi que tout risque systémique lié au vote sur la
réforme constitutionnelle.
Étude préélectorale de l’Institut de Recherche LaPolis, Université de Urbino, 19-21 février 2015.
Centre d’étude Confindustria, « La risalita modesta ed i rischi d’instabilità », scenari economici, n. 26, juin
2016.
1
2
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1.4.c Scénario réaliste
L’agence de rating Standard and Poor’s partage le point de vue de la banque suisse, mais ajoute
que « le référendum constitutionnel italien pourrait amener à des épisodes de volatilité des
marchés »3 et que la victoire du « non » représente une possibilité réelle qui pourrait avoir des
conséquences négatives au niveau politique, économique et financière. L’impact serait toutefois
limité. Ce genre de résultat ne mènerait pas { la sortie de l’euro et, probablement, même pas à
de nouvelles élections anticipées.
3
S&P Global Rating, 11 November 2016: Ratings On Italy Affirmed At 'BBB-/A-3'; Outlook Stable : « We
expect the constitutional referendum, if passed, could benefit the Italian government's stability and
effectiveness. If the referendum is rejected, we do not believe this would be significant for Italy's
creditworthiness, unless it leads to a reversal of structural reforms ».
Page 9
2.
Prévisions macroéconomiques, financières et fiscales
Le gouvernement italien, à travers le Document de mise à jour de l’économie et de la finance
20164, a confirmé sa ligne de politique budgétaire expansionniste en 2017. Les augmentations
prévues sur la TVA sont annulées et seront équilibrées par des interventions visant à lutter
contre l’évasion fiscale. Le document prévoit aussi d’autres mesures favorables à la croissance
dans le secteur des investissements publics, les infrastructures et les allégements fiscaux pour
les entreprises. Cette politique volontariste a attiré l’attention de la Commission européenne
qui, le 16 novembre 2016, s’est exprimée sur l’opportunité d’appliquer des sanctions envers trois
États-membres – l’Espagne, le Portugal et l’Italie – pour avoir dépassé les limites en matière de
déficits publics prévues dans le Traité sur la Stabilité, la Coordination et Gouvernance (TSCG) de
l’UE. L'Italie a en effet soumis un projet de budget incluant un déficit public de 2,3 % du PIB,
alors que, considérant la dette élevée de l’Italie, la recommandation de Bruxelles était de 1,8 %
du PIB pour 2017. Mais les arguments du Premier ministre Renzi, qui a évoqué des dépenses
urgentes dues aux tremblements de terre et à la crise migratoire, ont été acceptés par la
Commission. Les commentateurs estiment surtout que cette aptitude « permissive » de la
Commission s’explique par la volonté de ne pas embarrasser le Premier ministre quelques jours
avant le référendum constitutionnel.
2.1 Perspectives de croissance et d’inflation
Selon les prévisions de la Banque Centrale Européenne, la reprise économique dans la zone
euro devrait continuer, avec une hausse de la moyenne du PIB de 1,4% en 2016 à 1,7% en 2017
et 1,8% en 2018. Les statistiques de la Banque d’Italie confirment que l’économie du pays suivra
ces tendances même si le taux de croissance interne augmentera à un rythme plus lent.
2.1.a Hausse de la demande intérieure
Le 23 septembre 2016, l’Institut Italien de la Statistique (ISTAT) a publié les chiffres annuels sur
la croissance du pays, qui montrent pour l’année précédente une hausse du PIB de l’Italie de 0,7
% en termes réels. Selon les calculs trimestriels diffusés le 3 octobre 2016, l’Institut a indiqué
que la longue phase de récession causée par la crise financière s’était interrompue au premier
trimestre 2015. En règle générale, les analyses montrent que, dans le deuxième trimestre de
4
« Nota di aggiornamento del Documento di Economia e Finanza 2016 »
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2016, le PIB a atteint des valeurs supérieures aux anciennes prévisions, de presque 0,5%. Cette
croissance a été rendue possible par la hausse de la demande interne, notamment les dépenses
des familles (1,5%) et les investissements (1,3%), surtout dans les secteurs des machines et des
matériels de construction industrielle.
2.2.b Inflation
L’inflation des prix à la consommation qui enregistrait des valeurs négatives en février 2016 a
atteint des valeurs positives en septembre. L’ISTAT prévoit une légère récupération d’ici la fin
2016 sur les biens énergétiques. L’inflation en générale reste très basse notamment { cause
d’importantes marges de capacité productive inexploitées5.
2.2 Situation des banques italiennes
Selon les documents officiels de la Banque d’Italie, le système bancaire italien est dans une
phase de reprise suite à la longue période de crise internationale. La Commission européenne
se veut aussi rassurante en affirmant que la situation actuelle de liquidités des banques est
positive avec une amélioration progressive de l’accès et du coût des financements6. Cependant,
les investisseurs craignent les effets dévastateurs d’une crise du système bancaire italien due à
la fragilité des banques italiennes aux prises avec plus que 360 milliards d’euro de prêts
improductifs.
2.2.a. L’affaire « Monte dei Paschi di Siena »
La banque qui est au centre de la possible crise du secteur est Monte dei Paschi di Siena (MPS),
la banque plus ancienne au monde et la troisième en importance en Italie. La BCE veut que MPS
mette en œuvre un plan qui prévoit l’élimination d’une bonne partie des crédits improductifs
avant 2018. Le problème des « non performing loans » restreint les opportunités d’accès au
crédit pour les entreprises italiennes, avec des conséquences significatives en termes de
croissance. Les pires scénarios évoquent la faillite de cette banque et un effet domino sur
d’autres institutions.
5
Banque d’Italie, « Bollettino economico », n. 4, octobre 2016, pp.6 et 18.
Commission Européenne, Document de travail SWD (2016) 81 final, Relation Pays relative à l’Italie avec
examen approfondi des risques macroéconomiques, Bruxelles 26.02.2016.
6
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Les banques de petite et moyenne taille, nombreuses en Italie, peuvent rencontrer des
difficultés sérieuses dans l’élimination du stock de prêts improductifs { cause du manque de
moyens et d’expertise pour attirer des investisseurs spécialisés. Déjà, de nombreuses familles
ont vu fondre leurs économies à cause de la récente résolution de quatre petites banques
italiennes (Banca delle Marche, Banca Popolare dell' Etruria e del Lazio, Cassa di Risparmio della
Provincia di Chieti, Cassa di Risparmio di Ferrara). Pour la liquidation de ces banques, les outils
créés par la directive de l’Union européenne sur le redressement et résolution des institutions
de crédit ont été utilisés7. Suite aux pertes subies par les propriétaires d’obligations
subordonnées des banques qui ont fait l’objet de résolution, les autorités italiennes ont décidé
la création d’un fonds de solidarité prévu dans la loi de stabilité 2016, qui aura un plafond de 100
millions d’euros.
2.2.b Impact du référendum
Bien que le système bancaire italien soit très fragmenté, les analystes s’accordent sur le point
qu’une application flexible des règles européennes sur la résolution bancaire pourrait éviter
l’enclenchement d’une crise de plus large portée. Néanmoins, à court terme, la fiabilité des
principaux groupes bancaires italiens reste liée aux résultats du référendum du 4 décembre.
Parmi les effets à court terme prévus, notons que trois des principales banques
italiennes (UniCredit, Monte dei Paschi di Siena et probablement Carige) nécessitent une
intervention à caractère extraordinaire visant l’augmentation du capital. Cette opération sera
déterminante pour la pérennisation de ces institutions ainsi que pour l’équilibre de tout le
système bancaire italien.
Le 11 avril 2016, plusieurs banques, assurances, fonds de retraite et d’autres investisseurs
institutionnels ont décidé d’adhérer à la création d’un fonds d’investissement alternatif nommé
Altante, dont le but est de rendre possible l’augmentation du capital des institutions de crédit
en souffrance. Dans le cas de victoire du « non » au référendum, le risque est que les acteurs
privés qui participent { l’initiative cèdent aux craintes liées aux possibilités d’instabilité politique
et retardent les opérations d’augmentation de capital.
7
Directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour le redressement et
la résolution des établissements de crédit
Page 12
2.3 Fiscalité
Le système fiscal italien s’inspire du principe de progressivité: l’imposition moyenne est
appliquée progressivement en relation avec le revenu du contribuable. L’un des problèmes
structurels de l’économie du pays est dû au fait que la charge fiscale est parmi les plus lourdes
d’Europe. Grâce aux réformes du gouvernement Renzi, elle devrait commencer à baisser. En
2014, le rapport entre les recettes fiscales et le PIB en Italie était de 43,4% du PIB national, bien
au-dessus de la moyenne des pays de l’Union européenne, qui est autour du 38,8%. Selon les
prévisions de la Commission européenne8 pour la période 2016-2017, le rapport entre les
recettes fiscales et le PIB devrait diminuer grâce { la reprise économique d’un côté et à la
réduction de la dépense publique, de l’autre. Depuis 2013, le Traité sur la Stabilité, la
Coordination et Gouvernance (TSCG), mieux connu sous le nom de « fiscal compact » ou encore
« pacte budgétaire européen », fixe des règles très strictes quant à la réduction de la dépense
publique et le non-dépassement du plafond de 0,5% du déficit structurel en prévoyant un
système de sanctions automatiques pour les États. L’impact de ces mesures devrait commencer
à donner des résultats positifs déjà dans la période 2016-2017.
La loi sur le budget 2017 prévoit de nouveaux avantages fiscaux pour les entreprises et pour les
start up. La manœuvre financière pour la période 2017-2019 a injecté 26,5 milliards d’euros dans
l’économie, la plupart destinés aux entreprises. Le plan préparé par le gouvernement Renzi
prévoit concrètement une détaxation jusqu’{ 30% pour toute entreprise qui adhére aux plans
individuels d’épargne et pour celles qu’investissent dans les start up. Le but de cette opération
est de canaliser des ressources dans l’économie réelle et le soutien aux entreprises.
Notons en terminant que la position du M5S sur l’impôt demeure floue; de manière générale, il
s’est opposé aux taxes sur le ménages mais semble hostile aux grandes entreprises. Le PDL,
pour sa part, défend un agenda favorable à la diminution des impôts.
8
Commission Européenne, Document de travail SWD(2016) 81 final, Relation Pays relative à l’Italie avec
examen approfondi des risques macroéconomiques, Bruxelles 26.02.2016.
Page 13
3.
Justice et Corruption
Le système judiciaire est souvent appelé { s’occuper d’affaires de corruption qui concernent
notamment le domaine des marchés publics et les liens entre politiciens et entrepreneurs. Les
outils et les procédures dont les juges et les enquêteurs disposent ne sont pas toujours à la
hauteur. Afin de faire face à ces carences, une nouvelle loi anticorruption a été adoptée cette
année9. Elle crée une nouvelle autorité de contrôle anticorruption (ANAC) et donne pleins
pouvoirs en matière de contrôle et de coordination des enquêtes à un « super juge », Raffaele
Cantone.
3.1 Corruption
En 2016, l’ONG Transparency International a classé encore une fois l’Italie au 61e rang parmi les
pays les plus affectés par le phénomène de la corruption. Il faut prendre en compte que ces
chiffres se basent sur la perception de l’échantillon de population interviewée et non sur l’étude
de cas réels. Néanmoins les évaluations de Transparency International sont souvent reprises dans
des documents officiels de la Banque Mondiale ou de la Commission européenne avec un impact
négatif sur les investisseurs étrangers. Il est vrai que la corruption reste un phénomène présent
en Italie, notamment dans le secteur de la passation des marchés publics et de la nomination de
fonctionnaires haut placés. La justice est quotidiennement appelée à faire face à cette urgence,
pas plus tard que le 28 octobre 2016 lorsque 30 personnes ont été arrêtées dans le cadre d’une
enquête sur les travaux de la ligne de train à haute vitesse (TAV) Milan-Gênes. Le fils de l’ancien
ministre aux infrastructures Lunardi est dans la liste des accusés pour corruption et
détournement de fonds publics.
3.2 L’Autorité Anticorruption
Avec la réforme du nouveau code de passation des marchés a été créée une nouvelle structure :
l’Autorité Nationale Anticorruption (ANAC). La mission de cet organe de contrôle consiste à
prévenir la corruption dans l’administration publique, dans les sociétés { participation de l’État ou
contrôlées par ses organes, grâce { la mise en place d’une politique de transparence ainsi qu’{
travers de meilleurs contrôles dans l’attribution des contrats publics et des concessions. En
même temps, l’ANAC vise aussi { rendre moins lourdes les procédures de contrôle en renforçant
9
Décret legislatif 25 mai 2016, n. 97
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l’efficacité de l’action de l’administration publique. La corruption de haut niveau qui implique les
liens entre la politique et la criminalité organisée ainsi que les conflits d’intérêts entre acteurs du
marché et décideurs sont des facteurs qui peuvent influencer négativement la réalisation des
travaux publics et des infrastructures. Les observateurs estiment que les nouvelles mesures
visant à rendre plus transparentes les procédures de passation de marchés, ainsi que le haut
niveau de formation des juges dans la gestion d’enquêtes spécifiques dans le domaine de la lutte
contre la criminalité organisée, produisent lentement des effets positifs.
3.3 Système judiciaire italien
Le système judiciaire italien suit le schéma classique des pays de droit civil. Il est composé d’une
justice civile pour le règlement des conflits entre citoyens (personnes physiques ou morales),
d’une justice pénale pour la protection de l’intérêt public face aux délits commis par les
personnes physiques et, enfin, d’une justice administrative apte { appliquer l’ensemble des
normes qui visent à la protection des intérêts légitimes des personnes physiques ou morales face
{ l’action de l’administration publique. Le système de concessions dans le secteur autoroutier, qui
implique l’interaction entre acteurs privés et institutions de l’État, est par exemple régi par le
droit administratif. Les tribunaux compétents pour trancher ces questions sont les Tribunaux
Administratifs Régionaux (TAR) et le Conseil d’État.
La lenteur des procès et le grand nombre d’affaires pendantes sont des problèmes cruciaux dans
le système judiciaire italien. La Commission européenne, dans un récent document de travail10, a
néanmoins remarqué une diminution des retards pour les tribunaux administratifs (presque de la
moitié depuis 2010) grâce à la diminution du temps d’examen des affaires en première instance.
La possibilité de dépôts numérisés d’actes processuels, introduite depuis le 30 juin 2015, a été
une importante innovation à cet égard.
3.4 Voies de recours juridictionnelles
Les différends entre acteurs du marché (entreprises nationales ou internationales) et organismes
de l’administration publique qui gèrent l’attribution des marchés ou le suivi des travaux relèvent
du juge administratif, au niveau des tribunaux régionaux en première instance et au Conseil
d’État pour les recours contre les arrêts des TAR. L’une des nouveautés introduites par la loi
10
Commission Européenne, Document de travail SWD(2016) 81 final, Relation Pays relative à l’Italie avec
examen approfondi des risques macroéconomiques, Bruxelles 26.02.2016.
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11/2016 est la possibilité de recours précontentieux devant l’ANAC contre les avis et les
recommandations de l’Autorité.
3.5 Indépendance du système judiciaire
L’ordre juridique italien incarne dans ses valeurs constitutionnelles le principe de séparation des
pouvoirs avec une attention particulière au rôle du juge. Les compétences et les attributions de
chaque tribunal sont bien définies et, sauf épisodes isolés, l’indépendance des juges ne constitue
pas un problème structurel au pays, bien que le système judiciaire souffre de plusieurs carences.
Les termes de prescription des délits constituent un obstacle sérieux { l’exercice efficace de la
justice ainsi qu’à la lutte contre la criminalité organisée et au phénomène de corruption au sens
large. Selon les chiffres du Ministère de la Justice italien, si d’un côté les délais de prescription
restent constants devant le juge de première instance, ce délai augmente d’environ 7% chaque
année pour les cours d’appel. La lenteur des procès est souvent un outil dilatoire utilisé par les
grands groupes économiques ainsi que par les organisations criminelles afin de rendre la justice
inefficace. Plusieurs projets de réforme sont { l’heure actuelle en discussion au Parlement, mais
aucune ne semble aboutir à un consensus entre les partis politiques.
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4.
Secteur autoroutier et mécanismes de règlementation
Les enjeux autour des grandes infrastructures, notamment des projets sur le réseau
autoroutier, concentrent les intérêts de plusieurs acteurs économiques. En matière de
passation de marchés, le véritable défi reste la transparence et l’accès aux informations
relatives aux appels d’offres. La Commission européenne a récemment souligné que l’Italie
détient plusieurs records négatifs quant aux marchés passés sans publication officielle (environ
9% des procédures ) et ceux attribués sur la base d’une offre unique (29%). Dans le cas
spécifique du secteur autoroutier, le système de concessions et la position dominante du
groupe Autostrade per l’Italia S.p.A. (Atlantia) font exception dans la mesure où ce genre de
problématique n’entache pas ces types de marchés.
4.1 Contexte
La gestion du réseau autoroutier italien est partagée entre 25 sociétés concessionnaires. Cette
fragmentation est équilibrée par la présence d’une société qui gère seule plus de la moitié du
réseau national (environ 3 000 km). Il s’agit de Autostrade per l’Italia S.p.A, une société créée en
2002 qui a comme objectif la gestion de concessions de portions du réseau autoroutier en Italie
et { l’étranger. Ladite société fait partie de la holding Atlantia S.p.A. qui est propriétaire de
100% de son capital social et est dirigée avec des quotas majoritaires par la famille Benetton
(Sintonia S.p.A.).
L’extension globale du réseau autoroutier italien est de 5 438 km, dont 4 619 km actuellement en fonction
et 864 km en construction.
4.1.a Utilisation des autoroutes
L’utilisation des autoroutes payantes en Italie a subi une diminution significative à partir de
2008, suite à la diminution générale de la consommation dans le contexte de crise économique.
Cette tendance a été renversée en 2014, moment à partir duquel les chiffres du trafique
autoroutier ont fait enregistrer des hausse régulières. Les chiffres officielles fournis par
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Autostrade per l’Italia S.p.A. montrent que le trafique dans les autoroutes gérées par le groupe
a eu une hausse de 0,6% en 2014 et de 1,8% en 2015 par rapport à l’année précédente.
L’augmentation a été plus marquée par le transit de moyens de transport lourds ( +2,4%) or que
les voiture particulières ont fait enregistrer une hausse de +1,6%
Voici un aperçu des actionnaires du Groupe :
Source : CONSOB, données mises à jour le 30 juin 2016
4.1.b Péage
En 2016, afin de favoriser l’ accès au réseau autoroutier le Ministère des Transports et de
Infrastructure d’Italie avec le décret ministériel 2/16 du 6 mai 2016 a prévu une allocation de
ressource de l’État d’ environ 132.741.173,80 d’euros à titre de compensation pour certaines
réductions du cout du péage destinées aux usagers habituels, notamment les entreprises
résidentes dans l’Union européenne et les opérateurs qui en font un usage commercial, ainsi
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que le particulier propriétaire de véhicules moins polluants (qui appartiennent aux catégories de
certification européenne des émissions : Euro3- Euro4-Euro5).
Le mécanisme d’adéquation du prix des péages sur les autoroutes italiennes est extrêmement
complexe, dans le document rattaché au texte de la convention de concessions entre le
Ministere (MIT) et la Societé autostrade per l’Italia S.p.A., nommé « Réglementation des tarifs
autoroutière et mécanismes d’adéquation » il y a 6 différentes formules de pondérations des
augmentations annuelles, qui tiennent en compte des variables différentes comme le taux de
l’inflation prévue, les investissements pour les travaux de maintenance, la productivité, etc.
Dans la période 2008- 2015, les péages ont subi une hausse générale du 22%. L’association pour
la protection des consommateurs (CODACONS) a fait une censément de la hausse des prix
dans la période entre décembre 2015 et janvier 2016 :
4.1.c Critique du M5S
Le 10 octobre 2016 le Mouvement 5 étoiles a présenté une interrogation parlementaire à la
« Camera dei Deputati » dans laquelle ont étés formulées des fortes critiques concernant la
hausse généralisée des prix des péages, notamment face à la diminution du taux d’utilisation du
7% par rapport aux prévisions inscrites dans la Convention de concession pour la période 200720138. En effet, en force de ce document, la société Autostrade per l’Italie est autorisée a
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appliquer les paramètres établis pour l’adéquation des tarifes en fonction des prévisions
d’utilisation présentées. La critique du parlementaire 5étoiles Carinelli, était justement sur le
fait que le document ne prévoyait rien dans ,Hypothèse où l’utilisation des autoroutes soit
inférieure à celle prévue dans le document de prévision rattaché à la convention . Cependant
aucune proposition concrète de contingentement des prix des péages n’a été faite..
4.2 Tendances du secteur automobile
Les analyses statistiques concernant les tendances du secteur automobile publiées par
l’Automobil Club Italia (ACI)
pour l’année 2016 montrent un marché en croissance. En
septembre dernier, il y a eu une hausse de +18% de nouvelles voitures enregistrées par rapport
à la même période en 2015. On retrouve la même tendance durant le mois d’octobre, avec
140,698 nouveaux véhicules ayant été enregistrés, soit une hausse de +7,4% par rapport à 2015.
Les prévisions assurent que cette tendance continuera à rester positive dans les prochains mois.
En effet, bien que sur le plan démographique l’Italie, tout comme les autres pays européens,
soit composée d’une population vieillissante, l’utilisation de la voiture reste une habitude bien
ancrée dans le quotidien de la plupart des citoyens, notamment à cause de la carence de
systèmes intégrés de transport du réseau public (trains et autobus). La société de recherche
statistique CSA Research a réalisé cette année une étude sur les habitudes d’utilisation de la
voiture dans 7 pays européens ( Allemagne, Espagne, France, Pologne, Portugal, Royaume Uni
et Italie). Les résultats confirment la grande utilisation que les Italiens font de la voiture autant
pour des raisons professionnelles que familiales. Les citoyens européens passent en moyenne 4
ans et 1 mois de leur vie à bord d’un véhicule, alors que les Italiens y passent 5 ans et 7 mois.
4.3 Perspectives d’investissement
Pour les citoyens, l’impact des grandes infrastructures sur le territoire reste un sujet
controversé. Néanmoins, la morphologie du territoire italien, avec ses chaines montagneuses et
la multitude de petits villages, rend indispensable un renforcement du réseau autoroutier,
notamment dans le Sud du pays. L’insuffisance du transport ferroviaire pousse a fortiori un
nombre toujours important de consommateurs à choisir le transport sur roues.
4.3.a Précédents
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En 2011, le consortium guidé par Autostrade per l’Italia S.p.A. a gagné l’appel d’offres lancé par
le gouvernement français, portant sur l’installation du péage satellitaire pour les véhicules
lourds sur environ 15 000 km du réseau routier national français. En 2012, Atlantia S.p.A. a
renforcé sa stratégie d’expansion { l’international grâce { une joint venture avec le groupe
brésilien Bertin, pour la gestion de plus de 1 500 km de réseau autoroutier concentrés dans la
région de Sao Paolo. D’autres partenariats { l’international ont été signés notamment au Chili
et en Pologne pour la gestion d’un total de 5 000 km d’autoroutes. En 2013, la fusion a été
achevée par incorporation de Gemina S.p.A, actionnaire majoritaire de la société A.D.R.
(Aéroports de Rome) dans Atlantia. Cette opération a permis l’ouverture d’un nouveau « core
business » qui s’ajoute { la gestion des réseaux autoroutiers.
4.3.b Actualité
Le P.D.-G. de Atlantia S.p.A, Giovanni Castelluccio, dans un communiqué de presse publié à
Londres le 19 octobre dernier, a dévoilé les objectifs de croissance du groupe : « Dans les 5
prochaines années nous investirons plus que 5 milliards d’euros pour Autostrade per l’italia et
2,5 milliards pour Aeroporti di Roma, mais l’objectif stratégique est la croissance dans le secteur
international »11. Castelluccio s’est dit aussi très attentif aux offres en provenance de grands
investisseurs internationaux comme des fonds de pension ou des fonds souverains d’États
étrangers, l’ouverture du capital social aux nouveaux partenaires internationaux étant une
priorité pour le groupe. Il a aussi montré qu’en 2017, le groupe aura une nouvelle structure
organisationnelle composée de 4 plateformes relatives aux volets d’affaires suivants :
1. « Autoroutes italiennes », gérées directement par Autostrade S.p.A.
2. « Autoroutes étrangères », gérées par Atlantia S.p.A. qui prendra le contrôle des
sociétés Groupe Costanera et Los Lagos au Chili, Atlantia Bertin Concessoes au Brésil et
Stalexport en Pologne.
3. « Aéroports », avec Aeroporti di Roma (ADR) et Aéroport de la Côte d’Azur, société pour
laquelle le Groupe Atlanta a obtenu 75% des concessions dans la procédure de
privatisation enclenchée par le gouvernement français.
4. « Autre business », avec les sociétés Pavimental, Spea Engineering, Telepass et ETC,
dont le contrôle sera transféré entièrement { Atlantia avec l’objectif de la promotion des
systèmes de paiement automatisés.
11
Communiqué de presse Atlantia S.p.A. du 19 octobre 2016, Londres.
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4.3.c Perspectives
Pour la période quadriennale 2016-2020, le Groupe Atlantia prévoit une croissance de 1,3
milliards d’euros de bénéfices et une hausse globale de l’EBITDA (bénéfice avant intérêts,
impôts, dépréciation et amortissement) d’environ 7% par année. Les prévisions sectorielles d’ici
2020 sont les suivantes :
- Hausse de l’EBITDA de 4% par année pour « Autoroutes italiennes »
- Hausse moyenne de l’EBITDA de 11% pour « Autoroutes étrangères »
- Hausse moyenne de l’EBITDA de 7% pour « Aéroports ».
4.4 Mécanismes de régulation dans le secteur autoroutier
Une réforme a été récemment approuvée en matière de passation de marchés, y compris des
contrats de concession pour les infrastructures. Le gouvernement italien, avec le D.lgs 18 avril
2016 n. 50, a transposé en droit interne le contenu de trois importantes directives
européennes12 pour former le nouveau code des contrats publics. Les nouveautés ainsi
apportées concernent la simplification des procédures, le renforcement en termes d’efficacité
et compétitivité du système administratif, et la lutte contre la corruption.
4.4.a Instruments de planification
La réforme de 2016 a aussi créé deux instruments de planification générale pour le choix des
priorités quant aux infrastructures, qui seront adoptés sur proposition du Ministère des
Transports et des Infrastructures (MIT). Le premier est le Plan général des transports et de la
logistique (PGTL) qui fixe, pour une période de trois ans, les lignes stratégiques des politiques
de mobilité des personnes et des marchandises, ainsi que le développement des infrastructures
dans le pays. Le deuxième est le Document pluriannuel de planification (DPP) qui porte une liste
d’interventions dans le domaine des transports et de la logistique.
Directive n. 2014/23/UE du 26 février 2014, sur l’attribution de contrats de concession; Directive n.
2014/24/UE du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE;
Directive n. 2014/25/UE du 26 février 2014, relative à la passation de marchés par des entités opérant
dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive
2004/17/CE
12
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4.4.b Structure de contrôle
La loi n. 111 de 2011 a créé à l’intérieur du MIT une Structure de contrôle des contrats de
concessions autoroutières qui joue un rôle clé dans la sélection, le suivi et le contrôle des
contrats publics dans le secteur autoroutier. Parmi les principales fonctions de cette Structure,
notons:
- la sélection des concessions autoroutières et l’attribution des contrats;
- la vérification et le contrôle sur les contrats de concessions attribuées, y compris le
suivi des travaux en exécution;
- le contrôle de la gestion des autoroutes octroyées en concession;
- l’approbation de projets de travaux « d’intérêt national » sur le réseau autoroutier.
Les fonctions de contrôle exercées par la Structure de contrôle des contrats de concessions
autoroutières peuvent être ainsi classées : contrôle économique et financier (notamment sur la
gestion des participations aux concessions et sur les opérations des sociétés concessionnaires),
contrôle opérationnel (sur la qualité du service et la sécurité des autoroutes) et activité
d’inspection.
4.5 Risque de pressions sur la réalisation des autoroutes
Le PD et le PDL sont très favorables au développement du réseau autoroutier. Dans le paysage
politique italien, les seules forces qui s’opposent nettement { toute intervention pouvant avoir
un impact environnemental néfaste pour le territoire sont « i Verdi » (les Verts) et « i Radicali »
(les Radicaux). Le Mouvement 5 Étoiles est très attentif { l’utilisation des fonds publics et,
même s’il ne s’oppose pas { la plupart des projets existants, il a défini dans son programme que
les grandes infrastructures ne sont pas une priorité. Dans les conditions actuelles, même dans
l’éventualité de la victoire du « non » au référendum du 4 décembre, ces forces ne représentent
pas un contrepoids capable de renverser des décisions prises à la majorité du Parlement.
4. Synthèse
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Le référendum du 4 décembre 2016 représente un stress test important non seulement pour la
politique italienne mais aussi pour les équilibres européens, fondés de plus en plus sur la réforme
des institutions nationales comme réponse aux crises supranationales. Depuis 2014, Matteo
Renzo s’est imposé comme un réformateur après deux décennies de blocage politique et de
relative stagnation économique. À l’heure actuelle, tous les sondages donnent une légère avance
au « non », avec toutefois un fort pourcentage d’indécis et une proportion significative de
l’électorat dite « silencieuse », qui préfère ne pas annoncer { l’avance ses préférences. Dans le cas
du Brexit tout comme dans les récentes élections aux Etats-Unis, nous avons remarqué l’impact
de cette dynamique. Il existe un risque important que Renzi perde son pari, ouvrant une période
d’instabilité politique et le ralentissement des réformes structurelles.
Les conséquences de la victoire du « non » en termes de stabilité du secteur bancaire pourraient
aussi être considérables. Les augmentations de capital prévues par certaines institutions comme
Banca Monte dei Paschi di Siena SpA et UniCredit SpA pourraient connaître des retards à cause
de l’incertitude politique. Cela exposerait les détenteurs d’obligations et les familles au risque de
pertes sérieuses, notamment à cause des 360 milliards d’euro de prêts improductifs qui pèsent
dans les caisses des banques italiennes. Le Mouvement 5 Étoiles pourrait s’affirmer en tant que
force politique légitimée à proposer des réformes alternatives, préparant ainsi le terrain pour les
prochaines élections nationales prévues pour 2018. Sur le front des infrastructures, le
Mouvement s’oppose aux grands chantiers au nom d’une approche écologiste qui vise {
préserver l’environnement naturel. Le train de réformes fiscales pour la période 2017-2019, qui
prévoit des assouplissements pour les entreprises, pourrait aussi être menacé. En revanche, la
sortie de l’euro, perspective déjà lointaine dans l’actuel contexte politique, ferait face à des
obstacles d’ordre procédural considérables même dans l’hypothèse où le M5S prend le pouvoir.
Quant au secteur autoroutier, les perspectives de croissance restent élevées en raison des
habitudes ancrées de la population. Néanmoins une période d’instabilité politique pourrait
menacer la réalisation de certains projets importants comme le pont entre la Sicile et la Calabre.
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