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l'Italie : laboratoire de l'État du pire ?

2011, Vacarme

Abstract

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l'anamorphose continue de l'État de droit

Depuis les années 1980 et surtout 1990, l'Italie peut ainsi être considérée comme un cas paradigmatique de ce qu'il convient d'appeler l'anamorphose continue de l'État de droit, qui se caractérise par un mouvement continu passant de la légalité à l'illégalité, de la démocratie à l'autoritarisme, du public au privé et vice-versa. Cette anamorphose se manifeste par exemple dans les cas répétés d'amnisties accordées à des cas de fraude fiscale ou à des constructions illégales. Ce paradigme est en passe d'envahir toute l'Europe. En effet, l'anamorphose de l'État de droit démocratique convient parfaitement au développement néo-libéral, car il ne s'agit que d'accentuer l'asymétrie du pouvoir. Cette asymétrie a permis aux dominants (à toutes les échelles) de maximiser leurs profits, de s'accaparer davantage de biens publics, de privatiser la res publica, et d'éroder les droits et les possibilités d'agir des plus faibles, de contourner la loi et les procédures au gré du plus fort. C'est pour préserver ce pouvoir que Berlusconi et les siens sont en guerre permanente contre la magistrature, même la plus modérée : ils veulent accroître encore cette asymétrie du pouvoir, leur liberté d'agir, afin d'accroître davantage leur prospérité immédiate, quand bien même ce serait aux dépens du futur de la société. Cette asymétrie a permis le développement des économies souterraines, et d'imposer aux travailleurs, en particulier aux migrants, des conditions de vie, de travail et de rémunération qui mettent en cause les droits acquis.

Les événements qui ont lieu ces temps-ci de l'autre côté de la Méditerranée montrent qu'une résistance populaire voit le jour dans des pays qui ont payé un lourd tribut à plus de trente ans de néo-libéralisme et de décolonisation factice. Mais, même dans les pays riches dits démocratiques, une partie de la population, qui paye cher les conséquences des choix néo-conservateurs, commence à se révolter, et il n'est pas improbable qu'elle puisse trouver y compris chez les militaires et les forces de police quelque solidarité. En effet, le néo-libéralisme semble avoir trop « tiré sur la corde », et finit par produire de plus en plus de victimes, y compris dans la fonction publique, et en particulier parmi les femmes et les jeunes diplômés au chômage, ou bien à la merci d'emplois mal rémunérés et souvent dangereux. En Italie, l'impunité qui a été jusqu'à présent assurée aux militaires et policiers responsables de graves violences, et que Berlusconi et la Ligue du Nord voudraient perpétuer indéfiniment, commence à susciter l'indignation d'une bonne partie de la population. Ainsi, on voit se développer de plus en plus de mobilisations d'ouvriers, d'étudiants, ou de populations locales, révoltées par les conséquences dévastatrice d'un développement qui n'offre pas de travail correctement rémunéré mais produit pollution et cancers. Il faut donc espérer que l'érosion des capacités d'agir politiquement, qui a miné ces dernières décennies la société italienne, va finir par s'arrêter, et qu'une dynamique collective pour l'émancipation finira par l'emporter.

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Clinton et Blair sont devenus les références préférées des leaders de la gauche italienne.

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