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Arbres de Joséphine de Beauharnais à Antibes

L’acclimatation d’espèces exotiques sur la Riviera française a bénéficié de l’envoi des espèces de plantes australiennes de melaleuca et d’eucalyptus par Joséphine de Beauharnais à partir de 1804 et la Villa Thuret a ensuite joué un rôle important dans leur introduction et dans leur diffusion sur notre territoire.

Arbres de Joséphine de Beauharnais à Antibes Pierre-François PUECH L’acclimatation d’espèces exotiques sur la Riviera française a bénéficié de l’envoi de melaleuca et d’eucalyptus venant d’Australie par Joséphine de Beauharnais à partir de 1804 et la Villa Thuret a ensuite joué un rôle important dans leur introduction et dans leur diffusion sur notre territoire. Marie Josèphe Rose Tascher de La Pagerie, née en 1763 en Martinique, a quitté la plantation de canne à sucre de son père pour épouser le vicomte Alexandre de Beauharnais. Elle a ensuite épousé, en mars 1796, Napoléon Bonaparte qui lui a choisi le prénom de Joséphine avant de la faire impératrice de 1804 à 1809. Joséphine, qui aime les plantes rares s’efforce alors de les cultiver à la Malmaison. Elle joue ainsi, avec l’aide du Muséum, un rôle considérable dans l’acclimatation des végétaux exotiques et fait envoyer au Jardin botanique de Nice des plantes de la Malmaison. Charles de Mirbel, attaché au Muséum d'histoire naturelle de Paris et intendant des jardins de La Malmaison, écrit en 1804 au préfet pour lui annoncer l’envoi de plantes de la famille des myrtacées, provenant de la Nouvelle-Hollande (Australie), en précisant les précautions à prendre pour assurer leur reprise. .. [L’Impératrice] désire vivement que vous la serviez dans le projet qu’elle a conçu de naturaliser en France une multitude de végétaux exotiques. » Figure 1. Antoine-Jean Gros : l’Impératrice Joséphine 1808. Elle pose la main sur un livre relié de maroquin rouge sur lequel est inscrit Flore de Malmaison Musée Masséna, Nice (France). © JeanPierre Dalbéra Wikipedia. Deux expéditions françaises ont été essentielles pour la dispersion des collections florales australiennes en Europe. La première de Bruni d'Entrecasteaux, qui a entrepris la recherche du navire perdu de La Pérouse, a embarqué Jacques-Julien Houtou de Labillardière qui a publié le premier grand ouvrage de botanique illustré sur les plantes australiennes en 1804. La seconde fut l'expédition des scientifiques de Nicolas Thomas Baudin de 1800 à 1803. La majorité des spécimens collectés ont été confiés aux soins du botaniste Labillardière, sans doute pour continuer son bestseller sur la flore des antipodes. Suite à ce retour, l’Impératrice Joséphine fit parvenir à Nice en 1804 le Melaleuca linariifolia (à feuilles allongées) alors introduit en France et l’Eucalyptus parvifolia ?. L’eucalyptus avait fait son entrée en Europe en 1770 pour la première fois après l’exploration d’une partie de la côte australienne par le capitaine James Cook. Les botanistes avaient recueilli plusieurs espèces différentes le long du chemin, les ramenant à Londres. Le nom d '"eucalyptus" inventé par Charles L'Héritier en 1788 vient de la structure rigide et protectrice des fleurs: "eu" signifie en grec "bien" et "calyptos" veut dire "couvert" (Trove, 2018). Les aristocrates ont été enthousiasmés par ces plantes rares qui ont été décrites après analyses. Ainsi l’Eucalyptus envoyé à Nice a été nommé d’après la description publiée en 1895 par John Strong Newberry d’une feuille fossilisée du Crétacé mise au jour dans la localité de South Amboy, New Jersey (USA). La feuille lancéolée est petite, d'environ 5 à 6 cm sur 12 mm à 15 mm au maximum, mais celle-ci n’est peut-être que la feuille d’une des variétés d'Eucalyptus Geinitzi. Figure 2. PB.011162: Eucalyptus? parvifolia: Yale Peabody Museum of Natural History. La plante fossile du Crétacé se présente imprégnée de matière carbonée de couleur noire. Richard Hind Cambage (1859 - 1928) a décrit Eucalyptus parvifolia en 1909 (McCarthy G.J., Moje C., Walsh N., 1993), sans savoir que ce nom avait été donné à un fossile par Newberry, J. S. en 1895. Il a donc fallu trouver un nouveau nom pour cet Eucalyptus actuel, ce sera en 1991 Hill & Johnson qui opteront pour Eucalyptus parvula. Mais l'ancien nom est toujours utilisé ce qui illustre la difficulté à s’accorder pour un nom. Gustave Thuret (1817-1875) qui venait de créer au Cap d’Antibes un jardin botanique “utile”, écrit en novembre 1858 à Joseph Decaisne du Muséum national d'histoire naturelle de Paris: “Une plante qui m’a le plus frappé [à Nice] est un énorme Melaleuca [il s’agit de M. linariifolia] qui vient de la Malmaison et qui forme aujourd’hui un arbre touffu d’au moins vingt cinq pieds de haut”. Le Melaleuca linariifolia fait maintenant parti avec l’Eucalyptus parvula du patrimoine offert par Joséphine de Beauharnais représenté au jardin Thuret. Ce Melaleuca de Joséphine à l’extraordinaire floraison blanche possède une écorce qui s’exfolie par lambeaux qui peuvent être utilisés pour écrire et pour cela parfois improprement dénommé papyrus selon Fritz Mader (1912). L’impératrice Joséphine a fait de nombreux dons de plantes comme le Melaleuca linariifolia confié en 1811 à Antoine Risso. Cet arbre a longtemps subsisté dans la petite cour de l'actuel lycée Masséna de Nice, édifié sur l'emplacement de l'ancienne école centrale et témoigné ainsi des premiers essais d'acclimatation sur la Côte d'Azur. Figure 3. Ces plantes appartiennent à la famille des myrtes, ou myrtacées, et partagent la caractéristique des feuilles parfumées qui ont des huiles essentielles. Leurs fleurs ont une structure similaire, avec une couleur souvent voyante qui provient de longues étamines plutôt que des pétales. Des variétés de Melaleuca et Eucalyptus sont cultivées comme plantes de jardin dans les zones d'hiver chauds. Références : Ducatillion C. et Blanc-Chabaud L.– 2010. L'art d'acclimater les plantes exotiques: Le jardin de la Villa Thuret Quae éditions, Versailles https://books.google.fr/books?id=mdkjCwAAQBAJ&printsec=frontcover&dq=inauthor:%22Catherine+Duc atillion%22&hl=en&sa=X&ved=0ahUKEwjK5urI7fbaAhUGvhQKHYR9CxEQ6AEIMDAB#v=onepage& q&f=false Ducatillion C. 2013. Peut-on se passer des Palmiers sur la Côte d’Azur? AFPP – Colloque Méditerranéen sur les ravageurs des Palmiers de Nice– 16, 17 ET 18 janvier 2013 http://www.afpp.net/apps/accesbase/bindocload.asp?d=7130&t=0&identobj=UuJsUmzi&uid=57305290&si d=57305290&idk=1 Eucalyptus? parvifolia Digital Image 2017. Yale Peabody Museum of Natural History; photo by Division of Paleobotany, Yale Peabody Museum, 2015 metadata updated: 13 Jun 2017 http://collections.peabody.yale.edu/search/Record/YPM-PB-011162 McCarthy G.J., Moje C., Walsh N. 1993. Biographical entry: Cambage, Richard Hind (1859 - 1928). Encyclopedia of Australian Science http://www.eoas.info/biogs/P000945b.htm Newberry, J. S. 1895. The flora of the Amboy clays. U.S. Geological Survey Monograph 26: 1-137. Hollick Charles Arthur ed, Govt. Print. Off. Washington. https://archive.org/details/floraofamboyclay01newb Trove 2018. L'Héritier de Brutelle, Charles Louis. Encyclopedia of Australian Science. The University of Melbourne eScholarship Research Centre. https://nla.gov.au/nla.party-1506782.