Odysseys / Odyssées
Travel Narratives in French / Récits de voyage
en français
Edited by
Jeanne M. Garane
LEIDEN | BOSTON
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Contents
List of Figures vii
List of Contributors ix
1 A Brief Introduction
Jeanne Garane
1
2 L’odyssée de Brandain dans l’enfer fictionnel 3
Juliette Bourdier
3 The Columns of (Dis)possession: Totem and Territory in French Colonial
Expeditions to Florida (1562–1565) 16
Scott D. Juall
4 Écriture et réécriture de l’exploration de la Louisiane : le cas des
Dernières découvertes dans l’Amérique septentrionale de M. de la Sale
mises au jour par le chevalier Tonti, 1697 42
Catherine Broué
5 Le paradoxe de la représentation visuelle des Amérindiens dans
l’Histoire générale des voyages de l’abbé Prévost 60
Antoine Eche
6 Voyage du comte Waclaw Seweryn Rzewuski en Arabie 1817–1819: de la
recherche des chevaux à l’intégration dans la société bédouine 82
Hana Subhi
7 Algeria’s Ghosts: Eugène Fromentin’s Un été dans le Sahara
Sage Goellner
109
8 Travel and Technology in Blaise Cendrars 122
Roxanna Curto
9 Les Intellectuels français face au Stalinisme: André Gide et L.F. Céline en
Union Soviétique (1936) 136
Annick Durand
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vi
Contents
10
Le voyage labyrinthique de la mémoire vers un utopique pays
natal: Formes odysséennes du récit dans les romans de Patrick
Modiano 144
Élise Wiener
11
Nomadic Reflections: Voyage to a Lost Maghreb in Albert Memmi’s Le
Désert and Earlier Literary Exoduses 160
Araceli Hernández-Laroche
12
Je marche donc je revis. D’Istanbul à Xian : La Route du Soi de Bernard
Ollivier 173
Christophe Corbin
13
« Little Senegal » ou le voyage solitaire vers l’imaginaire
identitaire 184
Kodjo Adabra
14
Writing Hybridized Identities in Fatou Diome’s Le ventre de
l’Atlantique 198
Marissa Brown
15
Le récit de voyage : du genre littéraire au genre en bande dessinée.
L’exploration d’Un printemps à Tchernobyl d’Emmanuel Lepage 210
Évelyne Deprêtre
16
The Odyssey Revisited in Marie Ndiaye’s Ladivine
Deborah B. Gaensbauer
229
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CHAPITRE 2
L’odyssée de Brandain dans l’enfer fictionnel
Juliette Bourdier
Résumé
Li erre seint Brandain, rédigée au tout début du xiie siècle par Benedeiz, auteur
anglo-normand, raconte le voyage maritime parsemé d’aventures singulières, de St
Brendan à la recherche du Paradis. Puisque la dernière étape de ce poème passe par
les enfers, il m’a semblé intéressant de l’exposer à la tradition des voyages infernaux
édifiants afin d’examiner dans quelle mesure peuvent se rencontrer le témoignage
chrétien et la fiction romanesque. Cette étude se construit sur les écarts du poète par
rapport à la tradition des voyages infernaux et tente de réconcilier création littéraire et
mission édifiante.
Mon étude se situe dans l’univers du voyage infernal édifiant1, c’est-à-dire au
sein d’une collection de témoignages médiévaux de voyages chrétiens effectués
dans la partie infernale de l’au-delà, et qui ont été transcrits par des clercs dans
un dessein sotériologique. Cette littérature médiévale s’est développée d’abord
en latin, puis certains textes ont été adaptés en langues vernaculaires. Pour
cette réflexion sur l’odyssée, je me suis attardée sur Li erre seint Brandain2, rédigée au tout début du xiie siècle par Benedeiz, auteur anglo-normand, à partir
de la Navigatio Sancti Brendani3. Le poème, de 1834 octosyllabes à rimes plates,
décrit le voyage maritime parsemé d’aventures singulières, de St Brendan à la
recherche du Paradis, il s’adresse à un public laïque et courtois, et est dédicacé
à la reine Adeliza, épouse de Henri I, duc de Normandie et roi d’Angleterre.
Ce texte a attiré l’attention des médiévistes qui se sont plus particulièrement
penchés sur les bestiaires adoptés, le schéma fantastique, le vocabulaire utilisé,
ou l’étude comparative des versions4. Dans le cadre de cette réflexion, je me
pencherai sur le concept de voyage vers l’enfer que présente le texte, et tenterai
de l’exposer à la tradition des voyages infernaux afin d’examiner dans quelle
1
2
3
4
Cité par la suite, voyage infernal.
Benedeiz. De s[eint] Brandain,1106–1120. Ms. bnf Arsenal 3516, f96a–100h.
Source latine du Xe siècle dont le manuscrit a été amplement étudié par Selmer (1959).
L’édition de Ian Short et Brian Merrilees (1984) permet d’obtenir une approche exhaustive du
texte.
© koninklijke brill nv, leiden, ���7 | doi �0.��63/97890043347�4_003
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Bourdier
mesure peuvent se rencontrer le témoignage chrétien et la fiction romanesque.
Je construirai mon enquête en soulignant les écarts du poète, concernant la
démarche générale du témoignage qui s’affranchit du format traditionnel (en
particulier dans la gestion de la corporalité des voyageurs), la banalisation d’un
voyage supposé extraordinaire, qu’il transforme en chasse au trésor, pour proposer finalement à son auditoire une topographie infernale fragmentée, et un
témoignage infernal par procuration. Ma démarche suivra une question centrale, le carnet de voyage explicitement romancé de l’Erre peut-il accomplir la
mission édifiante à laquelle un témoignage de voyage infernal est consacré ?
1
Voyage médiéval infernal édifiant
La création d’un autre monde correspond au besoin de spatialiser le destin
de l’âme; puisqu’il y a deux existences, l’une dans la vie et l’autre dans la mort,
l’homme « partitionne » l’espace et le temps entre l’ici-bas et l’au-delà, et organise l’aventure humaine autour du passage entre les univers; il faut alors décrire
un « lieu » dont seule la mort peut ouvrir les portes et d’où l’on ne revient pas.
La mise en place au Moyen-Âge de ce que j’appelle le voyage infernal édifiant
a permis de définir un espace inaccessible au monde des vivants, à l’aide de
témoignages qui répondent à un schéma judéo-chrétien, dans lesquels le passage dans l’autre monde devient une fin en soi et dont le but s’associe au salut
de l’âme. Le genre regroupe des visions dont le récit suit un schéma particulier. Par l’entremise de Dieu et profitant de l’affaiblissement du corps terrestre
(maladie ou pseudo-mort), l’âme s’échappe et, guidée par un psychopompe,
visite les différentes zones infernales, pour recevoir un savoir lié au sort des
âmes après la mort. Par la suite, elle réintègre son corps et, devenu visionnaire,
témoigne de son voyage auprès d’un moine qui prend soin d’étayer la transcription de références chrétiennes.
Mes recherches sur le voyage infernal m’ont permis de cerner quatre étapes
dans l’évolution de la définition de l’espace infernal monastique traditionnel :
divin, naturel, humain et spirituel. L’espace du divin est ineffable, il habite les
textes bibliques, évangéliques et apocryphes. L’espace du naturel adopte les
particularités terrestres et apparaît dans les premiers voyages infernaux monacaux. L’espace de l’humain qui reproduit les caractéristiques communautaires
et urbaines s’est mis en place progressivement avec la nécessité de bâtir un
espace tangible, parcouru par un acteur charnel capable de palper les tourments, et dans lequel l’auditeur peut s’identifier. En parallèle se développe un
espace du spirituel qui adopte les caractéristiques de l’introspection individuelle et mystique, et dont les peines métaphoriques ramènent à l’annihilation
du moi. C’est à la rencontre de ces espaces, qu’une nouvelle vague d’auteurs,
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L’odyssée De Brandain Dans L’enfer Fictionnel
5
influencés par les courants romanesques nés de la littérature des xie et xiie
siècle, ont commencé à proposer, en vernaculaire et à un public laïque, une
série de textes qui ne cherchaient plus à justifier leur véracité, mais affichait
une fictionnalité revendiquée; bien qu’il paraisse en être éloigné, il me semble
que Li Erre Seint Brendan en est le précurseur, il est aussi le seul qui adopte la
forme d’une odyssée5.
2
Écriture affranchie des traditions
L’Erre est-il un voyage infernal ? A priori, il détonne parmi le flot des témoignages
de voyages infernaux, par son usage immodéré du fantastique qui accompagne
un voyageur omniscient6. C’est ainsi que (contrairement à ses prédécesseurs),
Brendan se pose comme l’instigateur d’un périple fabuleux où, dans son enveloppe corporelle terrestre, le héros parcourt les espaces sacrés sans quitter la
terre. Cette corporéalité du héros perturbe quelque peu les règles du voyage
infernal traditionnel et influence la structure du texte. Chez Benedeiz, puisque
Brendan ne meurt pas, la frontière entre l’au-delà et l’ici-bas est franchie par
le pouvoir de la fiction qui utilise une pirouette narrative autour du désir et de
l’aventure qu’une navigation initiatique matérialise. Finalement, l’Erre retrace
une équipée temporelle, au cours de laquelle l’abbé, accompagné de dix-sept
moines, navigue l’Ocianne et triomphe d’une série d’épreuves qui transforment
son voyage en une véritable odyssée.
Cette expédition maritime est largement inspirée d’épisodes de la vie du
saint d’origine irlandaise ayant vécu au vie siècle, et le poème syncrétique qui
en résulte offre un savant mélange entre l’hagiographie et la fiction celtique de
l’Immram7. Selon la Vita Brendani, Brendan aurait atteint sa sanctimonie en
parcourant l’océan, et l’Erre reprend les destinations de la légende évhémérisée. Concernant la zone couverte, les différentes études s’accordent avec la lecture de Francisque Michel qui imagine Brendan atteignant au Nord : L’Islande
et les îles Féroé (où se trouve l’enfer); au Nord-Ouest Terre neuve; au Sud : les
Açores, Madère et les Canaries; et après avoir traversé la mer des Sargasses,
5 Généralement, L’Erre a été assimilée au genre de « L’errance imaginaire en mer », notamment
par Guy Vincent (53).
6 Je me permets d’utiliser le terme « fantastique », faisant référence à l’étude de Pierre Bouet
qui précise néanmoins que « Le fantastique médiéval ne coïncide pas tout à fait avec le fantastique moderne […car] les hommes vivent dans un monde où les interventions surnaturelles se produisent de façon si habituelles qu’elles sont perçues comme des phénomènes
normaux, faisant partie de la nature des choses » (9).
7 L’Immram est un conte mythologique celtique irlandais qui narre le séjour d’un héros dans
l’Autre Monde. La traduction usuelle de ce mot gaélique est « voyage » ou « navigation ».
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Bourdier
vers le Sud-Ouest aux Caraïbes (où se trouve le paradis terrestre). En imaginant
que le texte de Benedeiz décrive un itinéraire, Janet Hillier-Caulkins propose
que Brendan, parti d’Irlande, ait effectué une série de traversées par le biais
d’allers et venues annuels formant une spirale de sept cercles dont le centre
serait le Paradis (255). Bien que ponctué par le temps liturgique (chaque année
les moines s’arrêtent sur trois îles pour y célébrer le culte comme la Pâques), le
texte est construit sur le fantastique et l’étrange qui mènent au merveilleux8, il
déploie des objets sacrés, une nature sauvage, des événements et êtres surnaturels, faisant appel aux bestiaires (griffons, baleine) ou au lapidaires (notamment avec l’église de cristal), ce qui lui donne une tonalité particulière, à la fois
profondément chrétienne mais aussi, intimement païenne. Les navigateurs
atteignent le paradis sans quitter la surface de la terre, parce qu’avec Brendan
comme dans l’imaginaire celtique, il n’existe pas de réelle dichotomie entre
l’au-delà et l’ici-bas qui cohabitent au sein d’un espace fictionnel ne réclamant
aucune justification. La différenciation entre les mondes correspond plus à un
« ici » versus un « ailleurs » ou encore, à l’expression d’un état traduite par les
notions d’être en ce siècle (hoedl) ou hors du siècle9. Bernard Meier qui a étudié le vocabulaire utilisé dans l’abondante littérature vernaculaire irlandaise
de voyages imaginaires (dans lesquels la frontière se fait par le monde (bith)
des vivants (bethu)), rapproche la racine et la signification, qu’il associe au
monde temporel10. Dans ce contexte, l’existence d’un archipel qui matérialise
l’au-delà, n’est visible que par certains et sous certaines conditions, et qui justifie le transport grâce à l’effet magique des voies d’eau, est tout à fait acceptable
pour un auditoire friand de textes merveilleux11.
3
Espace courtois banalisé
Bien que familière, cette géographie celtique redéfinit la cosmologie de l’audelà telle que dessinée au cours des précédents témoignages, proposant un
enfer chtonien et un paradis aérien. Par conséquent le voyage aura entièrement
8
9
10
11
Mackley utilise l’approche structurelle du fantastique de Todorov pour suivre l’évolution de l’Erre « from familiar to the fantastic-uncanny » (Chap. ii) et from the fantasticuncanny to the marvellous (Chap. iii).
« Discussing imaginary journeys among the Celts, the dichotomy between this world and
an otherworld […] doesn’t reflect a pre-Christian pair of concepts […] we may take them
to have assumed the existence of only one world […] » (Meier 162).
Meier 162–163.
« In Irish literature, the idea of a mythical offshore island is prominent in the traditions
about Donn, ‘The Dark One’ […] who was buried on a small rocky island […] called ‘ king
of the dead ’» (Meier 165).
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L’odyssée De Brandain Dans L’enfer Fictionnel
7
lieu sur les océans dans un espace parallèle à l’ici-bas qui a déjà été parcouru,
notamment par l’abbé Barinz (inspirateur et confident de Brendan)12 et le frère
Mernoc (qui prît résidence près du paradis). D’ailleurs, Brendan ne prétend
pas innover mais au contraire suivre les pas de personnages mythiques dont
le voyage banalisé valide sa propre expérience et lui permet de motiver son
voyage sur le libre-arbitre et la conscience (puisqu’il décide, n’est pas pris par
surprise, sait où il se rend). Il prie pour accéder au paradis terrestre jusqu’à ce
qu’un ange vienne l’éduquer13, et grâce à cet enseignement Brendan, transformé par Benedeiz en véritable chef d’expédition, n’a pas besoin du guide des
voyages traditionnels car il a la faculté de comprendre les règles à suivre dès
l’accostage d’un rivage ainsi que la signification des événements qui s’y produisent. Il bénéficie de la participation d’informateurs, autochtones aux particularités anthropomorphes ou animorphes, dont les références intertextuelles
s’appliquent au monde de la mythologie celtique (oiseau, baleine, dragon) plus
qu’à celui des évangiles. Il est remarquable que l’appréciation du savoir aborigène, de l’espace visité, corresponde à la démarche du monde courtois dans
lequel quelques personnages dédiés, servent à expliquer le fonctionnement
du récit aux auditeurs autant qu’aux protagonistes14. L’auteur maintient cette
dynamique au cours du périple; d’ailleurs, et dans le cadre de la visite des lieux
de rétribution, Judas, le traître, leur narre l’enfer tandis que Paul, l’ermite, les
éclaire sur le paradis.
Plus précisément, le voyage quasi-chevaleresque a lieu sur les mers et îles
telluriques, offrant une représentation matérielle qui revendique une légitimité tangible; les protagonistes sont, eux aussi, représentés dans leur corporéalité
(c’est-à-dire leur corps d’origine) et Benedeiz ajoute d’originales descriptions
de paysages insulaires, de sentiments et de sensations corporelles (par exemple
le bonheur que les voyageurs éprouvent à se laver, se changer, se reposer ou
se restaurer, leurs souhaits, peurs, doutes et joies). Les visionnaires traditionnels étaient transportés sans leur corps terrestre, car bien qu’étant corporifiés
dans l’au-delà (c’est-à-dire ayant acquis, le temps du voyage, un corps adapté
à l’autre-monde), seule leur âme voyageait, tandis-que leur dépouille terrestre
restait, léthargique dans l’ici-bas, authentifiant l’exploit auprès d’une cohorte
de témoins curieux15. En revanche, Benedeiz ne met en scène aucune âme,
12
13
14
15
Benedeiz, v.93–100. Barrindus que l’on retrouve dans la Vita Merlini alors qu’il guide
Arthur vers Avalon ou chez Béroul dans son Tristan.
Benedeiz, v.48–52, v.57–60, v.65–70.
Benedeiz, v.1115–1116, 19–20.
Par exemple, dans la Vision Tondale, un long paragraphe décrit les notables venus tour à
tour observer le corps du chevalier auquel il restait un semblant de vie pendant que l’âme
de Tondale dans son corps d’emprunt se promenait en enfer.
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Bourdier
d’ailleurs Judas y est dépeint comme un « homme nu, et le bon ermite Paul
comme un « homme » dont la pilosité est le seul habit car dans l’Erre, la nudité est la marque extérieure de l’altérité de l’au-delà qui implicitement établit
la corporalité des protagonistes, puisque tous, visiteurs comme autochtones,
arborent une enveloppe corporelle16. Les voyageurs sont perçus par les habitants de l’au-delà comme d’humaine gent, et c’est ainsi que l’Oiseus li Parais,
les qualifie17. Cette nature se confirme lorsque l’un des moines de l’équipage
meurt pour être ravi vers son lieu de rétribution. Son âme s’envole abandonnant un cadavre inerte et ses compagnons enterrent la dépouille dans la terre
de l’au-delà devant le public pris à témoin18. Ce décès illustre la corporéalité des voyageurs tandis que la sépulture réifie l’espace visité19. Il ne s’agit pas,
comme dans les voyages infernaux traditionnels, d’un semblant d’enveloppe
corporelle adaptée aux besoins sensibles du témoin dans l’au-delà (se déplacer, voir ou entendre), mais bien d’un corps que déploie un récit d’aventure,
par lequel un acteur entreprenant évolue dans un univers merveilleux, tandis
que le long poème ne s’encombre d’aucun discours parasitant pour justifier les
phénomènes surnaturels qui semblent se déclencher au passage du voyageur.
4
Entre chasse au trésor et pèlerinage
En l’occurrence, sur les 1834 vers qui composent le poème de Benedeiz, près
de 1500 décrivent les différentes étapes de l’odyssée qui va le mener à sa destination. Au cours de leur première rencontre, l’Oiseus li Parais avait annoncé
qu’il faudrait souffrir six ans de plus, avant d’atteindre le paradis20. Et de fait,
joignant les pages à la parole, l’auteur nous emmène dans un monde surnaturel
jalonné d’aventures. Par la suite, alors que les rivages infernaux se découvrent,
et sur les 734 vers qui mènent à la révélation, environ 285 traitent de la zone
infernale (bien qu’il s’agisse de l’épisode que Benedeiz a le plus développé
par rapport aux sources latines) et près de 145 de la zone paradisiaque. Donc,
430 vers, soit 23% du texte, exposent les lieux de rétribution et les règles qui
y correspondent. Parce qu’au final, adoptant un registre romanesque proche
de ceux des quêtes courtoises, l’Erre se rapproche d’une chasse au trésor dans
laquelle le graal s’est matérialisé en île originelle. Mais contrairement aux
16
17
18
19
20
Benedeiz, v.1515–1516 & 1528–1529, v.93–100.
Benedeiz, v.561–562.
Benedeiz, v.339–340.
Benedeiz, v.347–349, 351–352.
Benedeiz, v.545–549.
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L’odyssée De Brandain Dans L’enfer Fictionnel
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chevaliers d’Arthur, dès le départ, le voyageur sait où aller, que chercher et
même le temps nécessaire pour l’atteindre. Comme il discute longuement avec
Barinz qui lui décrit minutieusement son propre voyage, la tension portée sur
l’objet du désir se réduit et fait place à une dynamique dans laquelle le récit de
voyage prend la prérogative sur son inspiration21. De ce fait, contrairement aux
voyages infernaux traditionnels dans lesquels le transport se fait en quelques
vers, chez Brendan, l’odyssée prédomine dans une mise en scène de palais magiques, d’îles merveilleuses, de baleine-île, de paradis aux oiseaux, d’iceberg
magique, parmi des animaux dotés de la parole, des monstres marins, des griffons et dragons ou même d’une loutre ravitailleuse. Cette fictionnalisation est
d’autant plus frappante qu’avec Benedeiz, la majeure partie du texte religieux
de la version latine a disparu, ainsi il n’est fait référence ni à l’étape de l’île
des gospels, ni à la vie du saint, et la majorité du texte de prêche a disparu
au bénéfice de descriptions sensationnelles et surnaturelles, ou de narrations
élaborées qui valorisent le rôle des protagonistes. On appréciera, par exemple,
comment Benedeiz métamorphose l’épisode des deux monstres marins qui, à
partir de trois phrases dans la version latine, confronte le public avec un véritable combat sanglant à force de détails22. Alors, si la métaphore-pèlerinage
de la navigation au milieu des périls est accessible à tous, Benedeiz s’adresse à
un public laïc, friand de poésie, d’action et de merveilleux, qui accueille l’Erre
comme les Lais courtois et fantastiques de Marie de France (rédigés et diffusés
à la même époque), un conte divertissant et moralisateur23.
5
Topographie infernale fragmentée
L’enfer, le public en connaît déjà parfaitement la description, au travers de la
prêche et des exempla inspirés des voyages infernaux traditionnels, c’est pourquoi la découverte des zones infernales, qui intéressent plus particulièrement
cette étude comparative, ne s’amorce qu’au vers 1103 lorsque « apparut lur terre
truble de noir calin de nuble. » Il n’est nul besoin d’expliciter : les rivages brumeux et sombres sont nécessairement infernaux; Brendan le sait, son équipage
le subodore, l’auditoire aussi. Il en demeure que pour Brendan l’enfer est un
archipel volcanique qu’il approche sans l’accoster, et le scénario met en place
une forge infernale couverte de diables, et plus loin Judas enchaîné à un rocher
au milieu de l’océan.
21
22
23
Benedeiz, v.71–101.
Benedeiz, v.925–952.
Marie de France, Les Lais, Manuscrit Harley 978, f116–f182.
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Bourdier
L’analyse du fragment sur l’enfer24, soulève la question de la vision en ellemême, et il faut admettre que finalement, et contrairement à ses prédécesseurs et successeurs, Brendan, tout saint qu’il est, n’a pas vu grand-chose. Dans
un tel contexte, il est significatif de se pencher sur le semblant de géographie
infernale proposée par Benedeiz. Tout commence donc par une terre inhospitalière et les voyageurs aperçoivent un atoll entouré d’un brouillard de fumée
putride dont l’une d’entre-elles accède au « puits d’enfer ». La première réaction de l’équipage est le refus et la déroute, ils tentent de s’éloigner mais le vent
est trop fort et ils sont contraints d’assister à quelques scènes effrayantes25.
Les images proposées rappellent l’atmosphère générale qui flotte dans les infernos brûlants du sud de l’Italie déjà célèbres; d’ailleurs Grégoire Le Grand
dans ses Dialogues, raconte qu’un collecteur des impôts ayant fait naufrage
sur l’île Lipari en 526 a rencontré un ermite qui avait observé le roi ostrogoth
Théodoric encadré de ses victimes, pieds nus et attaché, alors qu’il était mené
pour être jeté dans le cratère du volcan26. Et c’est bien un archipel volcanique
en éruption que Benedeiz décrit, une île embrasée, occultée par une fumée
nauséabonde. L’auteur dépeint des vallées profondes, des fosses fumantes et
d’énormes flammes chargées de lave en fusion qui s’envolent dans un vent
cinglant, émettant un tonnerre assourdissant tandis qu’une fumée épaisse
masque le jour, et dans cette obscurité, Brendan entend les cris et lamentations
des damnés sans pouvoir les distinguer27.
Tout se passe dans la distance, et seul ce qui s’échappe de l’enfer peut être
aperçu, c’est ainsi que les navigateurs entrevoient un diable gigantesque aux
yeux ardents, surgissant tout embrasé des forges d’enfer. Il porte un immense
marteau de fer, et dans ses tenailles une lame chauffée à rouge qu’il jette violement en direction des moines, et qui va s’écraser dans l’eau dans un bouillon
de grandes flammes28. Cette dernière scène achève d’effrayer les explorateurs
qui, après avoir surmonté de nombreux périls, fuient avec l’aide d’un vent
salvateur29.
Il est intéressant ici de noter que la tentation voyeuriste d’observer les
peines infernales a été contrebalancée par l’appréhension de l’équipage que
l’auteur transmet au public; parce que la suggestion des peines est parfois plus
effrayante que leur description, Benedeiz, romancier, choisit le registre de
24
25
26
27
28
29
Benedeiz, v.1103–1239, 1323–1436, 1463–1504.
Benedeiz, v.1103–1107.
Grégoire le Grand, Dialogues, Livre iv, 31. « De morte Theodorici regis Ariani ».
Benedeiz, v.1165–1166, 1168.
Benedeiz, v.1114–1160.
Benedeiz, v.1108–1110, v.1161–1164.
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L’odyssée De Brandain Dans L’enfer Fictionnel
11
l’épouvante. Les scènes en relation avec l’au-delà baignent dans une ambiance
angoissante axée sur ce qui se passe dans le hors champ (ainsi ce qui est dans la
forge ou dans le puits, ce que peuvent subir les pécheurs que l’on ne voit jamais
mais dont on entend les cris étouffés), tout suggère une présence surnaturelle
(comme lorsqu’un des moines semble s’élancer par-dessus bord, et s’enfonce
dans la mer en hurlant qu’il est enlevé par cent démons invisibles)30. L’utilisation répétée du registre du « non vu » engendre une tension qui doit provoquer
la terreur chez l’auditeur (au final trois membres de l’équipage disparaissent
et les démons sont omniprésents bien qu’évanescents). Cette tournure, particulière à Benedeiz, est remarquable en contraste avec les voyages infernaux
traditionnels qui jouent de surenchère avec le registre de l’horreur (offrant la
description détaillée et visuelle de tortures atroces qui mènent au dégoût)31.
Il en ressort que, pour Benedeiz, le sacré doit rester caché, et les lames de
roche en fusion, après avoir jailli du cœur du volcan, y retournent inévitablement. L’enfer montre sa colère aux voyageurs, mais reprend tout ce qu’il dévoile, confirmant son inviolabilité32. Par conséquent, la description de l’enfer
qui apparaît dans L’Erre, se construira sur une mise en abîme du témoignage
de Judas, rapporté par Brendan, puis transmis par le trouvère.
6
Voyage par procuration d’un enfer réinventé
Il est ici important de faire une pause sur l’odyssée de Brendan pour préciser
que le voyage infernal traditionnel propose deux espaces (infernal et paradisiaque) qui « par magie » communiquent, bien qu’ils soient (à priori) séparés
par les tampons terrestre et sublunaire. Dans la majorité des témoignages, la
frontière entre les deux univers est poreuse et les auteurs se réfèrent fréquemment à la parabole de Lazare et du mauvais riche où les pécheurs souffraient de
pouvoir contempler le bonheur des bienheureux33. Par ailleurs, chacune des
deux zones de l’au-delà est elle-même dédoublée; en celle accessible au visionnaire, temporaire et curative (le purgatoire et le paradis terrestre); et l’autre
inviolable, éternelle, rétributive et sacrée (l’enfer et le paradis céleste). La scission de l’espace de punition, théorisée par St Augustin, établit un enfer sous
l’enfer. Cet inferno inferiori est total et ineffable, il correspond aux évocations
30
31
32
33
Benedeiz, v.1195, 96,98 & 1200–1202.
Il n’est qu’à lire les descriptions « sadiques » de la Vision de Tondale au traitement des
moines débauchés.
Benedeiz, v.1168–1172, v.1203–1204.
Évangile selon Jésus-Christ selon Saint-Luc, chapitre 16, v.19–31.
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évangéliques du châtiment divin conçu avant que des visionnaires n’aient l’opportunité de voyager et de rapporter des images édulcorées d’un espace représentable à l’esprit humain34. C’est, à mon avis, grâce à cette dichotomie, validée
par Grégoire le Grand, que le voyage infernal a pu devenir possible; les visionnaires visitent le purgatoire, c’est-à-dire l’enfer supérieur, ils s’arrêtent devant
un puits infiniment profond d’où s’échappent des gémissements, la peur et
d’horribles odeurs et l’enfer inférieur reste inaccessible35.
En comparaison, les zones infernales et paradisiaques de l’Erre correspondent à deux archipels (l’un en Islande, l’autre dans les Caraïbes), par ailleurs les deux enfers sont abordés d’une façon originale chez Benedeiz qui
n’utilise pas la géographie traditionnelle des deux enfers superposés (pécheurs
versus damnés)36. Pour l’auteur françois et par l’intermédiaire de Judas, la roue
est un lieu, c’est un enfer à elle seule qui vole dans le ciel au gré d’un vent furieux. Les autres châtiments ont lieu à tour de rôle entre deux autres niveaux
« L’un est en haut, l’autre en bas, et la mer salée les sépare. […] Celui d’en haut
est le plus pénible, celui d’en bas le plus effrayant; celui qui est près de l’air est
brûlant et fait suer; celui près de la mer est glacé et sent fort mauvais »37, néanmoins, il existe toujours l’enfer des damnés dont Brendan avait aperçu l’entrée
sur l’île volcanique. De son côté, au cours de son voyage hebdomadaire, Judas
suit un mouvement de balancier qui le fait monter ou descendre prolongeant
l’effet de la roue du lundi. Ainsi, le mardi il descend dans « l’autre enfer » « en
le val » (en bas) pour que son corps soit battu et transpercé par les démons; le
mercredi il est rejeté « sus » (en haut) pour être brûlé et bouilli dans la poix
puis rôti; le jeudi il est « mis en val » (en bas) où enfermé dans un lieu glacé
et obscur, il a si froid qu’il a hâte de retourner dans le feu, le vendredi « revunc
amunt » (en haut) où il est écorché vif puis roulé dans le sel, le samedi il est
renvoyé « jus » (en bas) dans la geôle la plus affreuse, immonde et obscure de
tout l’enfer, la puanteur y est intolérable mais il ne peut vomir car son estomac
est empli de cuivre.
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Dans son Opus Augustin parle d’« inferno inferiori: è sepulchris infimis ». Dans De civitate
dei, il utilise les termes de « purgatorius, temporarius ou transitorius », et interprète l’inferno extremo de St Jérôme (476).
Grégoire le Grand (précurseur des voyages infernaux) met en scène des visionnaires dans
les exempla qui serviront de modèle aux premiers voyages infernaux édifiants. Il différencie les enfers: « meam ex inferno inferiori; ut infernus superior in terra, infernus uero
inferior sub terra esse uideatur. » (Dialogus, Livre iv, 44).
L’auteur de la source latine oppose l’inferno superiori du lundi, à L’infernum inferiorem du
mardi. xlv. « Die lune cum nocte comitante in inferno superiori, […] Die martis sequente
ad infernum inferiorem […]» (Hiberniae, 287).
Benedeiz, v.1353–1354, 1359–1362.
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L’odyssée De Brandain Dans L’enfer Fictionnel
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Finalement, le dimanche et les jours saints (selon le rythme cultuel des
moines), il est enchaîné à un rocher battu par les vents et la mer où « il souffre
une mort sans fin ». Il est au ras des flots, c’est-à-dire entre air et mer, ce que je
définirais comme le centre du balancier qui s’avère être celui de la prière (c’est
l’endroit où Brendan le surprend à louer Dieu). Il y est mandé d’une mission
édifiante, car étant le seul à avoir accès aux lieux infernaux, il se métamorphose
en visionnaire et devient celui qui produit la parole à transcrire. Finalement,
Judas est le seul voyageur infernal de l’Erre, témoin d’un enfer vécu38. Aussi,
Brendan et l’auditoire découvrent l’enfer de Judas qui n’atteste, à la première
personne, que de son propre calvaire dans un espace décrit par la sensation et
non l’observation. Anti-héros souvent nommé dans les voyages traditionnels,
c’est le témoignage de son voyage, cyclique et perpétuel, qui marque la dernière étape de l’odyssée de Brendan vers le Paradis39.
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Voyage infernal courtois d’un nouveau genre
Pour répondre à la question posée en introduction, il me semble raisonnable
d’affirmer qu’en dépit des particularités du poème, et des apparentes contradictions qu’il propose par rapport à ses aînés, Li erre seint Brandain est bien un
voyage infernal médiéval édifiant.
Tous les éléments y sont : il y a intervention divine sur le voyage (Dieu envoie un ange); il y a voyage dans l’au-delà (Brendan a bien atteint un espace
inaccessible et destiné aux âmes); il y a transformation (le couple âme et corps
a été transcendé par la prière et le voyageur métamorphosé par l’odyssée initiatique semble doté de pouvoirs spéciaux); il y a acquisition d’un savoir lié
au salut de l’âme (L’Erre présente bien des tableaux de rétribution liés aux
actes terrestres); et enfin il y a témoignage (à son retour, Brendan colporte son
témoignage qui est transcrit) et la tangibilité du voyage est prouvée par des
objets que l’abbé ramène du monde parallèle.
Ce qui avait semblé atypique dans le témoignage de Brendan explique le
fonctionnement de la narration. Le fait qu’il ait voyagé de son propre chef,
dans son corps, de son vivant et accompagné de disciples, est contrecarré par
le fait que le divin a entièrement contrôlé le périple cyclique de sept ans, et
que Brendan n’a jamais vraiment pénétré l’enfer. Là est toute la subtilité du
voyage de Brendan, il a bien vu l’enfer mais ne l’a jamais visité. Alors, ce qui
rend l’Erre précurseur est que le voyageur Brendan est appréhendé en tant que
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Benedeiz, v.1323–1324, 1327–1328, 1340–1341, 1343–1344, 1335–1338.
Benedeiz, v.1301–1304.
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personnage littéraire qui évolue dans un espace à géométrie variable dont les
dimensions, plutôt que de reproduire l’espace terrestre dans le miroir déformant de l’au-delà, le prolongent pour épouser un scénario adapté à la quête
du héros40. Avec Brendan, l’autonomie apparente d’une figure héroïque qui
s’impose sur le processus de rédemption, et s’émancipe de sa condition première de faire-valoir de l’espace infernal, traduit la libération de son auteur,
Benedeiz qui s’éloigne de ses sources latines. Il transforme la merveille née du
miracle divin en un espace fantastique qui propose un monde magique auquel
on ne s’attend pas, qui ne se justifie pas et qui passe du naturel au surnaturel,
du normal à l’anormal sans que l’auditeur n’ait la possibilité de délimiter la
frontière entre le réel et l’imaginaire. Par conséquent le seul repère auquel il
peut se fier est Brendan, héros, qui devient alors une légende.
C’est la laïcisation du texte (dans le sens où il s’adresse à un auditoire laïc)
qui autorise le voyageur à reconsidérer sa rédemption comme une aventure
personnelle. C’est la laïcisation du texte (dans le sens où son auteur écrit un
texte laïc) qui lui offre la liberté d’évoluer dans un espace de pensée subjectivisé. L’auteur s’affranchit des règles formulatives du voyage infernal médiéval édifiant monacal, et s’imprègne des formes littéraires romanesque de son temps,
pour se consacrer à un poème en vers (donc nécessairement artificiel) dans un
décor celtique qui apparente l’Erre à un conte mythique.
Avec l’Erre, il n’y aura pas d’effet de catharsis comme dans les voyages infernaux traditionnels, parce que l’auditeur ne s’identifiera ni à Brendan (modèle de perfection), ni à Judas (incarnation du mal), cependant le message
du poème encourage le bien contre le mal, il rappelle que la vie est une sorte
d’odyssée, un long pèlerinage qui s’interrompt là où la rétribution des actes
terrestres commencent. Les tableaux fantastiques et la cruauté des punitions
infernales subies par Judas contribuent à l’ancrage dans la mémoire collective
de toute une imagerie infernale qui continuera à se colporter dans les voyages
infernaux qui suivront l’Erre. Néanmoins, à partir de ce poème (dont le succès a été phénoménal au Moyen-Âge), les auteurs prendront des libertés et les
nouvelles générations de voyageurs fictionnalisés accepteront des rôles toujours plus actifs et romancés au sein de voyages infernaux regagnés au giron
traditionnel des témoignages édifiants. Et le poète n’oubliera pas qu’« une musique surnaturelle enveloppait la nef de saint Brendan, quand elle voguait vers
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Il est important de noter qu’il y a de nombreux parallèles et plusieurs références croisées
entre le Voyage de Saint Brendan et le Voyage de Bran (issu de la mythologie celtique irlandaise) et que l’on retrouve au Moyen Âge dans le texte irlandais Immram Brain Maic Febail
ocus a echtra andso sis.
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L’odyssée De Brandain Dans L’enfer Fictionnel
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les îles Fortunées sur la mer aussi blanche que le lait » (Le Roman de Tristan et
Iseut, Joseph Bedier 1180, 47).
Ouvrages cités
« Augustini Hipponenis » dans Opus in Psalmos, edition Gymnicus, 1662.
Bouet, Pierre. Le fantastique dans la littérature médiévale. Caen : cerpa, 1986.
Francisque, Michel. Les Voyages merveilleux de Saint Brandan. Paris : Claudin, 1878.
Magnus Gregorius, Dialogus, Liber iv.
Hillier-Caulkins, Janet. « Les notations numériques et temporelles dans la Navigation
de Benedeit », Le Moyen Âge, 80, 1974.
Mackley, Jude. The Legend of St. Brendan. Boston : Brill, 2008.
Meier, Bernard. « Imaginary Journeys Among the Celts », Monsters Marvels and Miracles. Odense: University Press of Southern Denmark, 2005.
Selmer, Carl, ed. Navigatio Sancti Brendani Abbatis. Notre Dame : University of
Notre-Dame Press, 1959. Mediaeval Studies ser. 16.
Short, Ian, and Brian Merrilees, eds. La Navigation de St Brandan. Paris: Union Générale
d’Editions, 1984.
Vincent, Guy. La fascination exercée par la légende de St Brendan. Éditions Carâcara,
1985. www.utqueant.org.
Vincent, Guy, ed. Vita sanctissimi Brendani, manuscrit d’Alençon, Codex 14, f1r–11v.
Bibliotheca Augustana.
Vision de Tondale. Paris : Bibliothèque nationale de France, Ms 763, f. 196.
Vitae Sanctorum Hiberniae, T.2, Henry Frowde, University of Oxford, 1696.
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