Reproduction sur d’autres sites interdite mais lien vers le document accepté :
https://www.irdes.fr/recherche/ouvrages/007-atlas-de-la-sante-mentale-en-france.pdf
Réalisation de l’atlas
Construction des indicateurs
Mathieu Joyau Direction de la recherche,
des études, de l’évaluation
et des statistiques-Drees
Cartographie numérique
Franck-Séverin
Clérembault
Irdes
ainsi que
Élias Ouadghiri Atlasanté
Charlie Ménard Institut de recherche
Xavier Vitry Atlasanté,
et documentation en
Agence régionale
économie de la santé-Irdes de santé ARS Auvergne–
Florent Dralet Irdes
Rhône-Alpes
Alexandre Lolivier Irdes
Inès Khati
Drees
Directeur de publication
Éditrice
Conception graphique
Denis Raynaud
Anne Evans
Diffusion
Suzanne Chriqui
Couverture, maquette, infographies Franck-Séverin Clérembault
Dépôt légal À parution
ISBN Papier 978-2-87812-522-1
ISBN PDF
978-2-87812-523-8
Institut de recherche et documentation en économie de la santé
117bis, rue Manin 75019 Paris
Courriel :
[email protected] Tél. : 01 53 93 43 06 www.irdes.fr
Remerciements
Cet Atlas est le fruit d’une large collaboration. Nous remercions particulièrement l’Agence régionale de santé (ARS)
Provence–Alpes–Côte d’Azur (Paca), l’équipe Atlasanté, la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et
des statistiques (Drees) et les Universités d’Aix–Marseille et de Versailles–Saint-Quentin-en-Yvelines pour leurs
contributions et relectures de cet ouvrage collectif, ainsi que les nombreux experts sollicités tout au long de ce
projet. Nous remercions également l’ensemble des membres du comité de pilotage.
Agence nationale d'appui
à la performance (Anap)
Corinne Martinez
Valérie Reznikoff
Agence régionale de santé (ARS)
Provence–Alpes–Côte d’Azur
(Paca)
Marion Chabert
Evelyne Falip
David Lapalus
Steve Nauleau
Géraldine Tonnaire
Nadia Younès
Christine Passerieux
Centre d'études et de recherche
sur les services de santé
et la qualité de vie,
Université Aix-Marseille
Sara Fernandes
Agence technique
de l’information sur
l’hospitalisation (ATIH)
Anne Buronfosse
Anis Ellini
Marie-Caroline Clément
Assistance publiquehôpitaux de Marseille (AP-HM)
Guillaume Fond
Catherine Paulet
Cercle de réflexion
et de proposition d’actions
sur la psychiatrie (CRPA)
André Bitton
Centre ressource régional
de psychiatrie du sujet âgé
(CRRPSA) d’Île-de-France
Pr. Frédéric Limosin
Dr. Cécile Hanon
Direction de la recherche,
des études, de l’évaluation
et des statistiques (Drees)
Atlasanté
Élias Ouadghiri
Xavier Vitry (ARS Auvergne –
Rhône-Alpes)
Caisse nationale de l’assurance
maladie (Cnam)
Anne Cuerq
Christelle Gastaldi-Ménager
Caisse nationale de solidarité
pour l’autonomie (CNSA)
Fanny Bouarek
Violaine Eudier
Catherine Perisset
Danièle Steinbach
Centre de preuves
en psychiatrie et santé mentale,
Université Versailles–
Saint-Quentin-en-Yvelines
Emin Agamaliyev
Muriel Barlet
Valérie Carrasco
Mathilde Gaini
Mathieu Joyau
Inès Khati
Philippe Raynaud
Miléna Spach
Fabien Toutlemonde
Direction générale
de l’offre de soins (DGOS)
Céline Descamps
Direction générale
de la santé (DGS)
Pascale Fritsch
Anne-Claire Stona
Institut de recherche
et documentation
en économie de la santé (Irdes)
Suzanne Chriqui
Franck-Séverin Clérembault
Florent Dralet
Anne Evans
Alexandre Lolivier
Véronique Lucas-Gabrielli
Anna Marek
Charlie Ménard
Clément Nestrigue
Denis Raynaud
Marie-Odile Safon
Véronique Suhard
Ministère de la Justice
Florence De-Bruyn
Caroline Jeangeorges
Annie Kensey
Camille Lancelevée
Santé publique France
Christine Chan Chee
Secrétariat général des ministères
chargés des affaires sociales
(SGMAS)
Élisabeth Féry-Lemonnier
Patrick Risselin
Union nationale de familles
et amis de personnes malades
et/ou handicapées psychiques
(Unafam)
Alain Monnier
ISBN : 978-2-87812-522-1 (papier)
ISBN : 978-2-87812-523-8 (PDF)
Les reproductions de textes, infographies ou tableaux sont autorisées
à condition de mentionner la source et les auteurs.
1
2
Préambule_________________________________________
5
Sources___________________________________________
9
L’offre de soins et services en santé mentale
dans les territoires__________________________________
15
1.1. L’offre de soins en santé mentale
15
1.2. L’offre d’accompagnement
39
Les enfants et adolescents____________________________
51
2.1 Des informations lacunaires sur le recours aux soins des enfants et adolescents
en santé mentale…
52
2.2 ... et des facteurs de risque variés selon les territoires
53
2.3 Diversité de la prise en charge des enfants et adolescents
pour troubles psychiques
55
2.4 Un recours aux soins des moins de 18 ans qui s’exerce prioritairement
vers les établissements de santé autorisés en psychiatrie et en ambulatoire
57
2.5 Des modalités de prise en charge variables selon l’âge et les pathologies suivies 58
3
4
5
2.6 Variabilité territoriale du recours aux soins selon le mode de prise en charge
et disparités d’offre
61
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques
fréquents chez les 18-64 ans__________________________
71
3.1 Recours aux soins de santé mentale
75
3.2 Les prises en charge spécialisées en établissements de santé
81
3.3 Articulation entre ville et hôpital
88
Les personnes âgées_________________________________
97
4.1. Le recours aux soins de santé mentale des personnes âgées
103
4.2. L’offre de soins et d’accompagnement médico-social à destination
des personnes âgées
109
La population pénitentiaire___________________________
113
5.1. La population carcérale
115
5.2. L’offre de soins en milieu pénitentiaire
117
5.3. Recours aux soins
119
Glossaire__________________________________________
123
Bibliographie______________________________________
135
Table des illustrations_______________________________
153
Atlas de la santé mentale en France
3
4
Atlas de la santé mentale en France
Préambule
Magali Coldefy, Coralie Gandré
Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes)
E
n France, les troubles psychiques sont
associés à des enjeux majeurs en termes
de prises en charge dans un champ en
pleine mutation. Le changement de paradigme
de la psychiatrie vers la santé mentale, entamé à
l’échelle mondiale, oblige à repenser les liens entre
les acteurs impliqués dans le suivi des personnes
avec des troubles psychiques. Encore trop souvent
centré uniquement sur le soin, ce suivi devrait
davantage s’orienter vers le rétablissement, l’inclusion sociale, professionnelle et citoyenne des
personnes. Ces évolutions s’inscrivent dans un
contexte où les répercussions épidémiologiques et
économiques des troubles psychiques sont particulièrement significatives. Si leur prévalence reste
difficile à caractériser à l’échelle nationale, notamment du fait de l’importance du non-recours
aux soins et de la difficulté à poser un diagnostic
pour certains de ces troubles, en 2017, on estime
que plus de 7 millions d’individus ont eu une prise
en charge spécialisée due à un trouble psychique
diagnostiqué ou à un traitement psychotrope. De
ce fait, les dépenses liées sont particulièrement
élevées et représentent l’un des principaux postes
de dépense de l’Assurance maladie, 23 milliards
d’euros annuels, soit 14 % des dépenses totales
remboursées en 2017 (Cnam, 2019). L’inclusion
des coûts additionnels relatifs aux prises en
charge médico-sociales, à la perte de productivité
et à la réduction de la qualité de vie a conduit à
estimer le fardeau économique total des troubles
psychiques à près de 110 milliards d’euros pour la
seule année 2007 (Chevreul et al., 2013). En 2015,
l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estime que ces coûts
représentent près de 4 % du Produit intérieur brut
(PIB) [OECD/EU, 2018]. Néanmoins, les répercussions des troubles psychiques ne se limitent
pas à leur impact direct car ils sont également à
l’origine de fortes répercussions somatiques sur
la santé physique des personnes qui en souffrent.
Une étude récente montre une diminution de l’espérance de vie atteignant en moyenne seize ans
chez les hommes et treize ans chez les femmes
suivis pour des troubles psychiques ainsi que des
taux de mortalité systématiquement supérieurs à
ceux de la population générale, particulièrement
marqués pour la mortalité prématurée, et ce quelle
que soit la cause décès (Coldefy et Gandré, 2018).
En conséquence, la santé mentale est une thématique qui prend de l’ampleur sur l’agenda politique en France. La reconnaissance du handicap
psychique a été officialisée dans une loi de 2005
(Légifrance, 2005) tandis que deux plans interministériels successifs Psychiatrie et santé mentale,
couvrant les périodes 2005-2008 et 2011-2015,
ont défini les priorités politiques dans ce champ
(Ministère de la Santé et des Solidarités, 2005 ;
Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Santé,
2012). Une feuille de route pour la santé mentale
et la psychiatrie, lancée en juin 2018 par la ministre de la Santé et s’inscrivant dans le cadre de la
Stratégie nationale de santé, leur a fait suite. Cette
feuille de route est notamment organisée autour
de trois priorités : la promotion du bien-être mental et la prévention de la souffrance psychique ; la
mise en place de parcours de soins coordonnés
soutenus par une offre diversifiée ; et l’amélioration des conditions de vie, d’inclusion sociale et de
Atlas de la santé mentale en France
5
P
Préambule
citoyenneté des personnes en situation de handicap psychique (Ministère de la Santé, 2018a). En
parallèle, des adaptations organisationnelles sont
soutenues. C’est en particulier le cas des Projets
territoriaux de santé mentale (PTSM) que les acteurs locaux sont incités à définir et porter sous
l’égide des Agences régionales de santé (ARS) d’ici
juillet 2020. Ces projets territoriaux visent à organiser les parcours de santé et de vie des personnes
et à structurer et coordonner l’offre sanitaire et
d’accompagnement social et médico-social pour le
suivi des troubles psychiques. Ils reposent notamment sur des diagnostics préalables de la situation
sur les territoires (Légifrance, 2017 ; Ministère de
la Santé, 2018b). Une réforme du financement
de la psychiatrie hospitalière est également en
cours pour introduire un cadre commun aux secteurs public et privé, favoriser le développement
d’alternatives à l’hospitalisation complète et permettre une réduction des inégalités territoriales
persistantes liées au mode de financement actuel
(Ministère des Solidarités et de la Santé, 2019).
Cette réforme repose sur la combinaison de modalités de financement avec une dotation populationnelle ajustée, notamment sur la précarité de
la patientèle ainsi que sur une part liée à l’innovation et à la qualité. Malgré cette volonté politique
forte, un récent rapport parlementaire pointe le
chemin qui reste à parcourir pour garantir une
prise en charge optimale des troubles psychiques
en France (Hammouche, Fiat, Wonner, 2019).
Il s’avère donc plus que jamais nécessaire de
mieux documenter les organisations et prises en
charge actuelles dans le champ de la santé mentale en France. Or les troubles psychiques sont caractérisés par de nombreux facteurs de complexité tels que la difficulté à poser un diagnostic, le
caractère évolutif des troubles, l’hétérogénéité des
situations au sein d’un même groupe diagnostic et
les risques de déni de soins et de stigmatisation. Si
ces particularités ont conduit au développement
de prises en charge spécifiques pour ces troubles,
elles ont également eu des conséquences sur les
systèmes d’information existants pour les caractériser. Ainsi, les données d’activité hospitalière
en psychiatrie ont été disponibles plus tard que
pour le champ de la Médecine, chirurgie et obstétrique (MCO). N’étant pas directement liées aux
modalités de financement des établissements, à
la différence du champ MCO, elles ont longtemps
été moins bien renseignées (Coldefy et al., 2012).
Ce retard se comble progressivement et la récente
mise à disposition du Système national des données de santé (SNDS) incluant à la fois les données d’activité hospitalière et de soins en ville des
6
Atlas de la santé mentale en France
assurés de la Cnam permet une caractérisation
de plus en plus fine, bien qu’uniquement sanitaire, des prises en charge des personnes suivies
pour des troubles psychiques. Tenter de décrire
ces prises en charge mobilisant l’intervention de
nombreux acteurs nécessite d’analyser de nombreuses sources d’informations, tels que les enquêtes auprès des établissements de santé ou
médicosociaux, les répertoires de professionnels
de santé, les bases de données médico-administratives en santé, les données du recensement de
la population, ainsi que des recueils d’information
spécifiques.
Dans ce contexte, l’Atlas de la santé mentale en
France se propose de faire une synthèse descriptive des données disponibles, à partir des différents systèmes d’information existants, à destination des acteurs concernés dont les usagers
des services de santé mentale, leurs proches, les
professionnels de santé et du secteur social et médico-social, les décideurs politiques nationaux et
locaux et les chercheurs impliqués dans ce champ.
Cet Atlas vise à documenter tant les prises en
charge que l’offre disponible en tenant compte des
situations spécifiques, et notamment celles de populations particulièrement vulnérables du fait de
leur âge ou de leur milieu de vie. Une présentation
générale des sources de données mobilisées est
tout d’abord proposée. Cinq grands chapitres lui
font suite. Le premier porte sur l’offre de soins et
de services en santé mentale dans les territoires
tandis que les quatre chapitres suivants décrivent
les prises en charge par populations : les enfants
et adolescents, les adultes de 18 à 64 ans suivis
pour des troubles psychiques fréquents ou des
troubles psychiques sévères et persistants, les personnes âgées et la population pénitentiaire. Enfin,
cet Atlas propose une bibliographie générale et un
glossaire des termes techniques utilisés. Ce document vient compléter la version numérique de
l’Atlas qui met à disposition les principaux indicateurs mobilisables de façon actualisée et cartographiée (http://santementale.Atlasanté.fr/).
Ce projet global est issu d'une collaboration entre
l'Irdes, la Drees, l'ARS Paca et l'équipe Atlasanté
afin de mettre à disposition des acteurs de la santé
mentale des données et connaissances actualisées
sur un champ vaste et majeur en santé, utiles pour
la mise en place de politiques de santé mentale sur
les territoires.
Préambule
L’Atlas numérique
de la santé mentale en France
http://santementale.Atlasanté.fr
Cet atlas interactif constitue une base de données territorialisée en santé mentale inédite. Il
a été conçu par l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes), la
Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) du ministère
des Solidarités et de la Santé, en collaboration
avec l’Agence régionale de la santé (ARS) Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca), et avec l’appui de l’équipe Atlasanté, le projet mutualisé
de système d’information géographique des
Agences régionales de santé.
Issu d’un groupe de travail ayant réuni les
principaux producteurs de données et experts
de la thématique, cet atlas propose une série
d’indicateurs pertinents pour décrire et suivre
les politiques de santé mentale et leurs déclinaisons territoriales. Il affiche et édite à la demande des cartes et permet d’exporter les données rassemblant des informations relatives à
la santé mentale dans les territoires de France
métropolitaine et départements et régions
d’outre-mer, jusqu’au niveau de la commune,
selon les disponibilités. Il propose ainsi plus de
350 indicateurs, construits à partir de plus de
dix bases de données (recensement, bases de
données médico-administratives, enquêtes, recueils spécifiques) qui peuvent être mobilisés
notamment pour élaborer et faire le suivi des
diagnostics territoriaux partagés ou des projets
territoriaux de santé mentale. Il est destiné à
l’ensemble des acteurs intervenant dans le
champ de la santé mentale : usagers, professionnels, décideurs et chercheurs.
L’atlas est organisé sous forme de rubriques
thématiques qui présentent le contexte territorial, l’offre de santé mentale, et différentes
entrées populationnelles : adultes, enfants et
adolescents, personnes âgées et personnes
vulnérables.
Pour en savoir plus :
www.Atlasanté.fr/accueil/presentation_du_projet/429_314/latlas_de_la_sante_mentale_en_france
INDICATEURS
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ZONAGES
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Santé Mentale, une base de donnée territorialisée
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LE CONTEXTE TERRITORIAL
23
LES ENFANTS ET ADOLESCENTS
56
LES PERSONNES ÂGÉES
42
LES POPULATIONS VULNÉRABLES
26
LES ADULTES - OFFRE DE SANTÉ MENTALE
29
LES ADULTES - TROUBLES MENTAUX FRÉQUENTS
38
LES ADULTES - TROUBLES MENTAUX SÉVÈRES
40
CHANGER LE DÉCOUPAGE GÉOGRAPHIQUE
Niveau Département 2015
Rechercher un territoire
ALLER PLUS LOIN
Partager, imprimer, exporter
Editer des rapports
Charger des données externes
Atlas de la santé mentale en France
7
P
P
Préambule
8
Atlas de la santé mentale en France
Sources
De nombreuses sources d’information ont été mobilisées pour élaborer cet atlas de la santé mentale
en France. La présente liste n’est pas exhaustive.
Sont présentées ici les principales sources d’information mobilisées, disponibles en routine au
niveau national. Certaines données complémen-
1.
taires ont fait l’objet de collecte spécifique auprès
d’organismes tels que la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), le Psycom, le collectif Schizophrénies, le Centre collaborateur de
l’OMS pour la recherche et la formation en santé
mentale, le ministère de la Justice, etc.
Insee, recensement général de population
Le recensement de la population permet de
connaître la diversité et l'évolution de la population de la France. L'Insee fournit ainsi des statistiques sur les habitants et les logements, leur
nombre et leurs caractéristiques : répartition par
sexe et âge, professions, conditions de logement,
modes de transport, déplacements domicile-travail, etc.
Depuis 2004, le recensement repose sur une collecte d'information annuelle, concernant successivement tous les territoires communaux au cours
d'une période de cinq ans. Les communes de
moins de 10 000 habitants réalisent une enquête
de recensement portant sur toute la population, à
raison d'une commune sur cinq chaque année. Les
communes de 10 000 habitants ou plus, réalisent
tous les ans une enquête par sondage auprès d'un
échantillon d'adresses représentant 8 % de leurs
logements.
En cumulant cinq enquêtes, l'ensemble des habitants des communes de moins de 10 000 habitants
et 40 % environ de la population des communes
de 10 000 habitants ou plus sont pris en compte.
Les informations ainsi collectées sont ramenées
à une même date pour toutes les communes afin
d'assurer l'égalité de traitement entre elles. Cette
date de référence est fixée au 1er janvier de l'année
médiane des cinq années d'enquête pour obtenir
une meilleure robustesse des données.
Les cinq premières enquêtes de recensement ont
été réalisées de 2004 à 2008. Ainsi, à partir de fin
2008, il a été possible d'élaborer puis de diffuser
les résultats complets du recensement millésimé
2006, date du milieu de la période. Depuis lors et
chaque année, les résultats du recensement sont
produits à partir des cinq enquêtes annuelles les
plus récentes : abandon des informations issues
de l'enquête la plus ancienne et prise en compte
de l'enquête nouvelle.
Pour en savoir plus :
www.insee.fr/fr/information/2383265
Atlas de la santé mentale en France
9
S
Sources
2.
Système national d’information inter-régimes
de l’Assurance maladie (Sniiram)
Créé en 1999 par la loi de financement de la
Sécurité sociale, le Sniiram est une base de données nationale dont les objectifs sont de contribuer
à une meilleure gestion de l’Assurance maladie et
des politiques de santé, d’améliorer la qualité des
soins et de transmettre aux professionnels de santé les informations pertinentes sur leur activité. La
Cnam est chargée de la gestion du Sniiram, elle est
responsable du système d’information au regard
de la Cnil, autorité indépendante compétente en
matière de protection des données personnelles.
Le Sniiram est un entrepôt de données anonymes
regroupant les informations issues des remboursements effectués par l’ensemble des régimes d’assurance maladie pour les soins du secteur libéral
(1,2 milliard de feuilles de soins pour l’ensemble de
la population vivant en France). Les informations
sur les séjours hospitaliers (diagnostics, actes,…)
recueillis par l’Agence technique de l’information
hospitalière (ATIH) au sein du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI)
sont également disponibles dans le Sniiram. Le
Sniiram constitue donc une base de données complète et détaillée sur le parcours des patients et
l’organisation du système de soins.
Le Sniiram regroupe :
- des données sur les patients telles que l’âge, le
sexe, le bénéfice de la Couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), la commune
et le département de résidence, ainsi qu’éventuellement le diagnostic d’Affection de longue
durée (ALD) et la date de décès ;
- toutes les prestations remboursées dans le cadre
des soins réalisés en médecine de ville: les informations disponibles sur le prestataire de soins
et éventuellement le prescripteur (spécialité,
mode d’exercice, sexe, âge, département d’implantation), le codage détaillé (médicaments,
actes techniques des médecins, dispositifs médicaux, prélèvement biologiques) ainsi que la
date des soins et les montants remboursés par
l’Assurance maladie et payés par les patients ;
- des données sur la consommation de soins en
établissement : le Sniiram centralise les données relatives aux séjours facturés directement
à l’Assurance maladie, principalement par les
cliniques privées et les données du Programme
de médicalisation des systèmes d'information
(PMSI) pour l’ensemble des établissements sanitaires. Les données sur les pathologies traitées
sont disponibles dans le Sniiram au travers des
données issues du service médical ou des diagnostics hospitaliers du PMSI.
Pour en savoir plus :
www.ameli.fr/l-assurance-maladie/statistiques-et-publications/sniiram/finalites-du-sniiram.php
3.
Programme de médicalisation des systèmes d’information
en médecine, chirurgie, obstétrique (PMSI MCO)
Depuis la loi du 31 juillet 1991 portant réforme
hospitalière, les établissements de santé publics et
privés doivent procéder à l’analyse de leur activité
médicale et transmettre aux services de l’État et à
l’Assurance maladie « les informations relatives à
leurs moyens de fonctionnement et à leur activité » : articles L. 6113-7 et L. 6113-8 du code de la
santé publique. À cette fin ils doivent « mettre en
oeuvre des systèmes d’information qui tiennent
compte notamment des pathologies et des modes
de prise en charge » : c'est la définition même du
Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI). Pour les séjours hospitaliers
en soins de courte durée — médecine, chirurgie,
obstétrique et odontologie (MCO) — cette analyse
est fondée sur le recueil systématique d’un petit
10
Atlas de la santé mentale en France
nombre d’informations administratives et médicales, qui constituent le Résumé de sortie standardisé (RSS). Les informations recueillies font
l’objet d’un traitement automatique aboutissant
au classement des RSS en un nombre volontairement limité de groupes cohérents du point de vue
médical et des coûts : les Groupes homogènes de
malades (GHM).
Les informations ainsi produites sont utilisées
principalement à deux fins, pour le financement
des établissements de santé (tarification à l'activité) et pour l’organisation de l’offre de soins (planification).
Sources
La description de l’activité médicale dans le cadre
du PMSI MCO des établissements de santé publics et privés repose sur le recueil systématique
de données administratives, démographiques,
médicales et de prise en charge, normalisées.
Les établissements de santé publics et privés, en
France métropolitaine et dans les Drom, ayant
une activité autorisée en médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie (MCO), quel que soit leur
mode de financement, sont tenus de réaliser, pour
chaque patient pris en charge en hospitalisation,
par extraction depuis le système d’information
de l’établissement de santé, un recueil d’informations portant sur l’activité de soins et sur sa facturation. Ce recueil couvre l’hospitalisation à temps
complet et à temps partiel réalisée dans les établissements de santé. L’activité de consultations
et de soins externes réalisée par les établissements
sous Dotation annuelle de financement (Daf) est
également enregistrée.
Pour en savoir plus :
www.solidarites-sante.gouv.fr/fichiers/bos/2017/sts_20170006_0001_p000.pdf
www.atih.sante.fr/mco/presentation
4.
Recueil d’informations médicalisé pour la psychiatrie
(Rim-P)
Le Recueil d’informations médicalisé pour la psychiatrie (Rim-P) permet de décrire toute l’activité
réalisée au bénéfice de malades par les établissements de santé autorisés en psychiatrie, en hospitalisation complète ou partielle comme en ambulatoire. La description de l'activité médicale dans
le cadre du Programme de médicalisation des
systèmes d'information (PMSI) en psychiatrie des
établissements de santé publics et privés repose
sur le recueil systématique de données administratives, démographiques, médicales et de prise
en charge, normalisées. Ce recueil s’inscrit dans
la logique des dispositions des articles L.6113‑7 et
L.6113-8 du code de la santé publique, qui s’appliquent aux établissements de santé, publics
et privés, en matière d’analyse de leur activité.
Les établissements de santé publics et privés, en
France métropolitaine et dans les départements
d’outre-mer, ayant une activité autorisée en psychiatrie, quel que soit leur mode de financement,
sont tenus de réaliser, pour chaque patient pris
en charge, par extraction depuis le système d’information de l’établissement de santé, un recueil
d’informations portant sur l’activité de soins et
sur sa facturation. Ce recueil couvre les prises en
charge à temps complet et à temps partiel sous
la forme de Résumés par séquence (RPS) et les
prises en charge ambulatoires sous la forme de
Résumés d’activité ambulatoire (RAA).
Le Sniiram et les bases PMSI sont aujourd’hui intégrées au Système national des données de santé
(SNDS), qui inclut aussi les données de l’Inserm
sur les causes de décès. A terme, les données relatives au handicap (en provenance des MDPH
- données de la CNSA) et un échantillon de données en provenance des organismes d’Assurance
maladie complémentaire alimenteront également
le SNDS. Géré par l’Assurance maladie, le SNDS
a pour finalité la mise disposition de ces données
afin de favoriser les études, recherches ou évaluation présentant un caractère d’intérêt public
et contribuant à l’une des finalités suivantes :
information sur la santé, mise en œuvre des politiques de santé, connaissance des dépenses de
santé, information des professionnels et des établissements sur leurs activités, innovation dans
les domaines de la santé et de la prise en charge
médico-sociale, surveillance, veille et sécurité sanitaire.
Pour en savoir plus :
www.snds.gouv.fr/SNDS/Accueil
Pour en savoir plus :
www.solidarites-sante.gouv.fr/fichiers/bos/2017/
sts_20170004_0001_p000.pdf
www.atih.sante.fr/psy/presentation
Atlas de la santé mentale en France
11
S
S
Sources
5.
Statistique annuelle des établissements de santé (SAE)
La SAE est une enquête administrative obligatoire
et exhaustive, réalisée annuellement par la Drees,
auprès des établissements de santé, publics et privés, situés sur le territoire français. Cette enquête
recueille des informations détaillées sur l’activité
et les ressources en équipement et en personnel
dans les établissements de santé, que ceux-ci aient
ou non une autorisation d’activité en psychiatrie.
Depuis 2006, un bordereau de cette enquête est
spécifiquement consacré à la psychiatrie. La SAE
a pour principaux objectifs de :
- caractériser de façon précise les établissements :
structure, capacités, équipements des plateaux
techniques et personnels ;
- caractériser l’activité réalisée par type d’activité
ou de discipline d’équipement ;
- recueillir des indicateurs sur la mise en oeuvre
des politiques nationales et le suivi des activités
de soins soumises à autorisation.
Les données recueillies auprès des établissements
de santé dans le cadre de l’enquête SAE portent
principalement sur :
- les évolutions juridiques des structures ;
- les modes de coopération inter hospitalière,
avec des médecins et autres professionnels de
santé non hospitaliers, et avec des services sociaux et médico-sociaux ;
- des indicateurs de suivi des politiques nationales ;
- les capacités d’accueil par type d’activité et par
disciplines d’équipement regroupées ;
- l’activité réalisée par type d’activité et par disciplines d’équipement regroupées ;
- l’équipement, l’activité et le personnel du plateau technique ;
- les interruptions volontaires de grossesse ;
- l’équipement, l’activité et le personnel des principales activités de soins soumises à autorisation ;
- les effectifs, qu’il s’agisse des personnels médicaux salariés ou libéraux, des internes, des
sages-femmes et des personnels non médicaux,
des emplois aidés.
Pour en savoir plus :
http://drees.solidarites-sante.gouv.fr/etudes-et-statistiques/open-data/etablissements-de-sante-sociaux-et-medico-sociaux/article/la-statistique-annuelle-des-etablissements-sae
6.
Fichier national des établissements sanitaires et sociaux
(Finess)
Le Fichier national des établissements sanitaires
et sociaux (Finess) est un répertoire national
géré par le Ministère des Affaires sociales et de
la Santé. Ce fichier constitue la référence en matière d’inventaire des structures et équipements
des domaines sanitaire, médico-social, social et
de formation aux professions de ces secteurs. Il
Pour en savoir plus :
http://finess.sante.gouv.fr/fininter/jsp/index.jsp
12
Atlas de la santé mentale en France
est mis en oeuvre et maintenu par la Direction
de la recherche, des études, de l’évaluation et des
statistiques (Drees). Les données de ce répertoire
sont actualisées de façon continue par des agents
en service dans les Agences régionales de santé et
dans les services déconcentrés de l’Etat et mises
à disposition du public sur un site internet dédié.
Sources
7.
Les répertoires nationaux des professionnels de santé
(RPPS et Adeli)
Les répertoires nationaux RPPS et Adeli garantissent l’identification des professionnels de santé
et viennent alimenter l’annuaire santé.
Les référentiels nationaux des professionnels de
santé sont le RPPS ou Adeli. Certifiées par les
ordres professionnels, le Service santé des armées
(SSA) ou les Agences régionales de santé (ARS), les
données enregistrées permettent l’identification
des professionnels de santé. Elles sont publiées
par le service « Annuaire Santé » de l'Agence du
numérique en santé (ANS).
Le Répertoire partagé des professionnels intervenant dans le système de santé (RPPS) est le répertoire unique de référence permettant d’identifier
les professionnels de santé. Il rassemble et publie
les informations des professionnels de santé, sur
la base d’un numéro RPPS attribué au professionnel toute sa vie. Ce répertoire vise à : identifier les
professionnels intervenant dans le domaine de
la santé en exercice, ayant exercé ou susceptible
d’exercer ; suivre l’exercice de ces professionnels,
connaître le niveau d’étude des internes et étudiants ; contribuer aux procédures de délivrance
et de mise à jour des produits de certification ;
permettre la réalisation d’études et la production
de statistiques relatives aux professionnels répertoriés. Le RPPS a été créé par l’arrêté du 6 février
2009, modifié par l’arrêté du 18 avril 2017. Les
professions enregistrées dans le RPPS incluent les
médecins, les chirurgiens – dentistes, les sagesfemmes, les pharmaciens, les masseurs-kinésithérapeutes et les pédicure- podologues. Le RPPS
regroupera à terme l’ensemble des professionnels
de santé. L’intégration est progressive, en fonction
des possibilités des autorités d’enregistrement.
Le répertoire Adeli est le système d’information
national portant sur les professionnels de santé
qui ne sont pas déjà dans le RPPS. Ce répertoire
attribue un numéro aux professionnels non-RPPS,
lors de leur enregistrement auprès de leur ARS.
C’est le numéro de référence d'identification pour
ces professionnels (hors RPPS). Les professions
enregistrées dans Adeli rassemblent les audioprothésistes, diététiciens, épithésistes, ergothérapeutes, infirmiers, manipulateurs en radiologie,
ocularistes, opticiens-lunetiers, orthopédistes-orthésistes, orthophonistes, orthoprothésistes, orthoptistes, podo-orthésistes, psychologues, psychomotriciens et techniciens de laboratoire.
Pour en savoir plus :
https://esante.gouv.fr/securite/annuaire-sante/rpps-adeli
Atlas de la santé mentale en France
13
S
S
Sources
14
Atlas de la santé mentale en France
chapitre
1
L’offre de soins et services
en santé mentale
dans les territoires
Sara Fernandes1, Magali Coldefy2, Coralie Gandré2
Avec la collaboration d’Inès Khati3
1
Centre d'études et de recherche sur les services de santé et la qualité de vie, Université Aix-Marseille
2
Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes)
3
Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees)
L
es troubles psychiques* affectent à des
degrés divers les différents aspects de
la vie personnelle et sociale, tant de la
personne atteinte que de son entourage. Dans ce
contexte, les réponses à apporter englobent non
seulement le traitement des symptômes mais aussi la réduction des conséquences fonctionnelles et
sociales des troubles psychiques.
Le système français de prise en charge des troubles
psychiques est caractérisé par une grande pluralité des acteurs, des organisations et des structures ainsi que des modalités d’accompagnement.
Des caractéristiques propres à ce champ médical
(tels le caractère souvent durable et évolutif des
troubles, le déni de soins et la stigmatisation couramment associés ou la nécessité d’une approche
globale de la prise en charge) ont été à l’origine
d’une organisation et d’une législation spécifiques
par rapport au reste du champ sanitaire (Coldefy,
2016).
Ainsi, depuis les années 1960, l’organisation des
soins de santé mentale a été construite dans une
logique territoriale autour des secteurs psychiatriques*. Ils correspondent à des aires popula-
tionnelles dans lesquelles une équipe pluridisciplinaire médicale et médico-sociale est chargée
de fournir des soins ambulatoires et hospitaliers
intégrés*. Leur objectif prioritaire est de favoriser
l’accès aux soins, sans couper les personnes de
leur environnement familial et social, et d’assurer
la continuité entre prévention, dépistage et traitement de façon équitable pour chacun, quel que
soit son lieu d’habitation (Légifrance, 1960).
Plusieurs types d’établissements hospitaliers sont
autorisés pour la prise en charge des pathologies
psychiatriques : les établissements publics spécialisés dans le champ de la santé mentale, les établissements publics pluridisciplinaires qui disposent
d’un service de psychiatrie, les Établissements de
santé privés d’intérêt collectif (Espic) et les établissements privés à but lucratif. Parallèlement à
ces prises en charge en établissement de santé, il
existe une prise en charge en ville par des professionnels libéraux spécialisés ou non qui vont jouer
un rôle important dans l’accompagnement et le
suivi des troubles les plus fréquents.
Par ailleurs, les établissements et services des secteurs social et médico-social sont également mo-
Atlas de la santé mentale en France
15
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
bilisés pour assurer l’hébergement et l’accompagnement des personnes en situation de handicap
psychique, pour lesquelles les conséquences de la
maladie peuvent rendre difficile l’accès et le maintien dans un logement, un emploi, des études…
(Coldefy, 2016). Enfin, des dispositifs additionnels complètent ces prises en charge tels que des
actions de prévention ciblées ou des initiatives
communautaires. Depuis quelques années, les initiatives d’entraide par les pairs* tendent notamment à se multiplier.
Il existe néanmoins un cloisonnement persistant
entre l’offre de soins de santé mentale publique
et privée, l’offre de soins primaires et spécialisés,
et l’offre médico-sociale et sociale pour la prise
en charge des troubles psychiques, régulièrement souligné dans les rapports institutionnels
(Laforcade, 2016). Le volet handicap psychique
de la stratégie quinquennale de l’évolution de
l’offre médico-sociale du ministère de la Santé
mentionne par ailleurs que la prise en charge des
troubles psychiques sévères* et persistants doit
répondre à un objectif de rétablissement, fondé
sur l’empowerment* dans le cadre de parcours de
soins mais aussi de vie. A ce titre, en plus de la
stabilisation des troubles sont visés la promotion
des capacités des personnes et leur accès à une vie
active et sociale via la mobilisation des dispositifs
de droit commun mais également des secteurs sanitaires, médico-sociaux et sociaux (Ministère des
Affaires sociales et de la Santé, 2016).
De la psychiatrie vers la santé mentale
Des initiatives politiques récentes viennent ainsi
soutenir le changement de paradigme nécessaire
de la psychiatrie vers la santé mentale par l’intégration des différents secteurs de prises en charge.
La loi de modernisation du système de santé de
2016 redéfinit la politique de santé mentale et les
missions de la psychiatrie de secteur. La politique
de santé mentale est désormais conçue comme une
action globale comprenant des actions de prévention, de diagnostic, de soins, d’accompagnement,
de réadaptation et de réinsertion sociale, associant tous les acteurs sanitaires et sociaux concernés (Légifrance, 2016). Ainsi, cette loi distingue
la politique de santé mentale, branche de la santé
publique, de l’organisation de la psychiatrie. En
effet, la santé mentale n’est pas de la responsabilité exclusive de la psychiatrie, cependant intégrée
dans la politique de santé mentale. A cet égard,
elle clarifie la responsabilité des différents acteurs
qui interviennent en santé mentale (Laforcade,
2016). Cette loi s’appuie sur l’expérience du sec-
16
Atlas de la santé mentale en France
teur psychiatrique tout en la repensant en fonction des évolutions survenues depuis lors. Cellesci concernent le champ sanitaire (progrès thérapeutiques qui rendent difficile le maniement de
l’ensemble des techniques par une seule équipe,
développement du rôle du médecin traitant, de la
psychiatrie libérale, d’établissements non sectorisés), social (impact des politiques de la ville, de
l’éducation nationale, du logement, du travail sur
l’insertion des personnes), et médico-social (développement d’une offre d’établissements et services
ayant compétence dans l’accompagnement vers
l’insertion, cf. loi du 11 février 2005 reconnaissant
le handicap psychique (Légifrance, 2005)). La loi
de modernisation du système de santé de 2016
a ainsi introduit les Projets territoriaux de santé
mentale (PTSM). Ils visent à faciliter le suivi des
individus souffrant de troubles psychiques dans
leur milieu de vie ordinaire par l’organisation
de parcours de proximité ainsi que par la structuration et la coordination de l’offre sanitaire et
d’accompagnement social et médico-social. Ces
projets territoriaux sont proposés et portés par
les acteurs locaux sous l’égide des Agences régionales de santé (ARS) et devront être mis en œuvre
d’ici juillet 2020 (Légifrance, 2017 ; Ministère des
Solidarités et de la Santé, 2018).
Dans ce contexte en pleine évolution, ce chapitre
dresse un état des lieux des ressources existantes
sur les territoires pour répondre aux besoins
de santé mentale des individus, à partir des données disponibles dans le système d’information en
santé.
En raison de la difficulté à réunir les données,
l’offre de prévention n’est pas traitée ici bien
qu’elle constitue, avec la promotion de la santé mentale, un enjeu majeur d’amélioration de
la prise en charge des troubles psychiques. Pour
autant, des interventions se développent dans ces
domaines comme le soutien à la parentalité, le développement des compétences psychosociales, les
actions de prévention de la souffrance psychique
au travail, du suicide (à travers notamment les
dispositifs de rappels des suicidants)… Le site
Oscarsante vise à observer et suivre les actions régionales de santé, et permet un premier recensement des actions de prévention en santé mentale
sur les territoires (http://oscarsante.org).
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
1.1. L’offre de soins en santé mentale
L’offre de soins à destination des populations vivant avec des troubles psychiques repose sur deux
types d’offre complémentaires : l’offre libérale de
ville et l’offre des établissements de santé, majoritairement publique, avec une répartition qui se fait
essentiellement selon la sévérité des troubles et le
besoin ou non d’une équipe pluriprofessionnelle,
sans que ces critères soient clairement énoncés.
L’offre de ville s’occupe du suivi de proximité des
troubles de sévérité limitée et sans besoin d’une
équipe pluriprofessionnelle. L’offre des établissements de santé est surtout centrée sur les prises
en charge des troubles plus sévères et persistants
nécessitant l’intervention d’une équipe multi-professionnelle, en hospitalisation ou en ambulatoire.
1.1.1. L’offre de soins de ville
L’offre de ville à destination des individus vivant
avec des troubles psychiques est graduelle. Elle
se compose tout d’abord d’une offre médicale non
spécialisée. Les médecins généralistes sont les
interlocuteurs privilégiés pour la prise en charge
de premier recours en santé mentale en France
(Dezetter et al., 2013). Ils participent de facto à la
détection et au traitement des troubles et accompagnent les patients dans le cadre d’une prise en
charge globale (Regier et al., 1993). Cette offre est
complétée par une offre spécialisée non médicale,
principalement à destination des individus vivant
avec des troubles fréquents de sévérité modérée,
assurée par les psychologues libéraux. Enfin, il
existe une offre spécialisée médicale assurée par
les psychiatres libéraux. Des structures pluri
professionnelles telles que les maisons de santé se
développent par ailleurs dans certains territoires
sous-dotés en offre de ville, et peuvent combiner
prises en charge non spécialisées et spécialisées.
Les médecins généralistes
Depuis la reconnaissance de la médecine générale en tant que spécialité médicale à part entière
en 1983, la place du médecin généraliste dans le
dispositif de soins a beaucoup évolué. La loi de
2004 a notamment instauré la mise en place du
« parcours de soins coordonnés » qui impose de
déclarer un médecin traitant, généraliste ou spécialiste. Celui-ci assure le suivi personnalisé et au
long cours de la personne et l’oriente vers d’autres
médecins ou professionnels de santé lorsque c’est
nécessaire (Légifrance, 2004). Avec près de 7 personnes sur 10 se tournant vers un médecin généraliste en première intention, quelle que soit la
nature du problème de santé rencontré, ce dernier
apparaît comme le pivot du dispositif d’offre de
soins de ville. Le cabinet de médecine générale est
ainsi considéré comme un cadre de soins personnalisé accessible, stable, disponible, assurant permanence et continuité des soins, et le médecin généraliste est parfois le dernier interlocuteur accepté par des personnes en rupture de soins (Gallais et
Alby, 2002). En tant que garant de l’offre de soins
de proximité, le généraliste est fréquemment sollicité pour des affections d’ordre mental (Morin,
2007 ; Dezetter et al., 2013 ; Norton et al., 2009).
Près de 13 % des consultations chez le médecin
généraliste sont liées aux seuls troubles dépressifs et anxieux (Labarthe, 2004). En France, on
compte en moyenne 104 médecins généralistes libéraux ou mixtes pour 100 000 habitants en 2016
(RPPS, Insee). Néanmoins leur répartition sur le
territoire est inégale : cette densité dépasse ainsi 130 généralistes pour 100 000 habitants dans
des départements urbains ou de la moitié sud de
la France tels que Paris, la Haute-Garonne, les
Bouches-du-Rhône, la Gironde, la Haute-Vienne,
les Alpes-de-Haute-Provence, les Hautes-Alpes,
les Alpes-Maritimes, les Pyrénées-Orientales
ou l’Hérault. A l’inverse, elle est inférieure à 75
pour 100 000 habitants en Guyane, Eure-et-Loir,
Seine-Saint-Denis, Seine-et-Marne et Mayenne.
Ces disparités de répartition géographique pourraient être liées à des différences de besoins de
soins des habitants des divers départements résultant, notamment, de la variabilité de la structure par âge de leurs populations. Afin de tenir
compte de cet élément, la disponibilité des médecins généralistes sur le territoire peut également
être caractérisée via l’Accessibilité potentielle localisée (APL)*, un indicateur qui considère à la
fois l’offre de soins disponible, tenant compte du
niveau d’activité des professionnels en exercice et
de leur distance géographique, et de la demande
(taux de recours ajusté sur la structure par âge de
la population) au niveau des communes. Cet indicateur, calculé en nombre de consultations ou
visites accessibles par habitant standardisé, rend
donc comparable l’accessibilité de communes aux
populations d’âges très différents (Barlet et al.,
2012).
Les résultats montrent en 2015, que les habitants
des communes françaises ont eu accès en moyenne
à 4,1 consultations ou visites de médecine générale, et qu’il existe d’importantes variations territoriales. On observe une forte hétérogénéité de si-
Atlas de la santé mentale en France
17
1
1
CARTE 1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Accessibilité potentielle localisée (APL) aux médecins généralistes en 2015
dans trois départements français
Nombre de consultations ou de visites de médecine générale par habitant
0
2,3
3,0
3,5
4,2
28,7
Valeur minimum : 0
Amirat, Ascros, Auvare,
Bairols, Beuil, Briançonnet,
Castellar, Caussols,
Châteauneuf-d'Entraunes,
Cipières, Clans, Collongues,
Entraunes, Escragnolles,
Gars, Gorbio, Ilonse,
La Penne, La Tour, Le Mas,
Les Mujouls, Lieuche,
Moulinet, Pierlas, Rigaud,
Saint-Antonin, Saint-Auban,
Saint-Léger, Sallagriffon,
Sauze, Thiéry, Utelle
AlpesMaritimes
Valeur maximum : 13
Rimplas, Valdeblore
Nice
10 km
Valeur minimum : 0
Boisset,
Ceilhes-et-Rocozels,
Pégairolles-de-Buèges
Valeur maximum : 8,4
Balaruc-le-Vieux
Hérault
Montpellier
10 km
Perpignan
Valeur minimum : 0
Ayguatébia-Talau,
Boule-d'Amont, Calmeilles,
Caudiès-de-Conflent,
Glorianes, La Bastide,
Lamanère, Mantet,
Montferrer, Nohèdes,
Prunet-et-Belpuig, Railleu,
Saint-Marsal, Sansa, Taillet,
Taulis, Urbanya, Valmanya
Valeur maximum : 10,3
Mont-Louis
PyrénéesOrientales
10 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Drees-Sniiram 2015, Insee 2017. Infographie : Irdes 2019
18
Atlas de la santé mentale en France
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
tuations dans certains départements (par exemple
l’Hérault, les Pyrénées-Orientales ou les AlpesMaritimes, avec notamment des zones littorales
ou montagnardes touristiques mieux dotées que
les zones intérieures des départements (carte 1).
Plus généralement, l’indice APL est bien plus élevé dans les pôles urbains quelle que soit leur taille
que dans les communes isolées hors influence
des pôles. Il y a donc des disparités territoriales
dans l’accessibilité aux médecins généralistes qui
ne sont pas uniquement liées à des différences de
besoins de soins. La concentration des médecins
dans les zones les plus urbaines est globalement
constatée dans l’ensemble des pays développés
et n’est pas spécifique aux médecins généralistes.
Elle peut s’expliquer par des conditions de travail généralement plus difficiles en milieu rural
(horaires de travail plus importants, manque de
contact avec les confrères, etc.) ainsi que par des
raisons sociales (moindres perspectives professionnelles pour le conjoint, plus grandes distances
d’accès aux établissements scolaires pour les enfants, etc.) [Organisation de coopération et développement économiques, 2017].
Les psychologues
Les psychologues libéraux assurent le suivi psychologique des individus souffrant de troubles
psychiques par l’intermédiaire de thérapies, notamment la psychothérapie*, qui est recommandée en première intention dans le traitement des
troubles psychiques d’intensité légère à modérée
(HAS, 2017). Néanmoins, les psychologues ne sont
pas reconnus comme des professionnels de santé
en France et ne relèvent pas à ce titre du code de la
santé publique. Ils bénéficient d’une liberté d’installation sur le territoire français mais sont tenus
de s’inscrire au répertoire Adeli (Automatisation
des listes), ce qui permet de connaître leurs effectifs et leur répartition géographique, mais pas leur
activité ni le nombre de personnes qui y recourent.
Des retours d’expérience montrent également que
ce répertoire n’est pas systématiquement mis à
jour, les données présentées doivent donc être interprétées avec précaution.
Parmi les 61 633 psychologues en activité en 2017,
19 726 exercent en tant que professionnels libéraux ou mixtes (32 %), soit une densité moyenne
de 29,7 pour 100 000 habitants. Leur répartition
sur le territoire français est inégale et les différences de densité sont encore plus marquées que
pour les médecins généralistes car elles varient
dans un rapport de 1 à 16 (carte 2). Trois départements urbains se démarquent par une densité
supérieure à 50 psychologues pour 100 000 habitants : Paris, la Haute-Garonne et le Rhône. A l’inverse, la Guyane, les Ardennes, le Pas-de-Calais
et la Creuse comptent moins de 10 psychologues
pour 100 000 habitants. Globalement, les plus
faibles densités sont observées dans les départements ruraux où l’offre en médecins généralistes
est également faible. Ainsi les psychologues ne
semblent pas être un levier mobilisable à ce jour
dans les déserts médicaux pour assurer une première prise en charge des personnes avec des
troubles psychiques. Par ailleurs, les consultations
de psychologues libéraux ne sont actuellement pas
remboursées par la sécurité sociale – uniquement
par certaines complémentaires privées et selon un
montant limité – ce qui peut constituer un frein
au recours pour les populations défavorisées.
Certains médecins généralistes indiquent ainsi
ne pas pouvoir adresser leurs patients à des psychologues libéraux du fait de la charge financière
associée (Dumesnil, Apostolidis et Verger, 2018 ;
Dumesnil et al., 2012 ; Fournier et al., 2010).
Afin de tenter d’apporter une réponse à ce potentiel frein au recours aux psychologues libéraux, deux expérimentations de prise en charge
à 100 % de la psychothérapie dans le cadre d’un
parcours de soins coordonnés, sont menées par
l’Assurance maladie depuis 2017. L’une concerne
le remboursement des consultations chez un psychologue libéral pour les jeunes de 6 à 21 ans dans
trois régions : Ile-de-France, Pays de la Loire et
Grand Est. L’autre concerne les adultes de 18 à
60 ans dans les départements du Morbihan, des
Bouches-du-Rhône, de la Haute-Garonne et des
Landes. Dans cette expérimentation, le remboursement de la consultation chez le psychologue est
soumis à une collaboration étroite avec le médecin généraliste, qui doit réaliser un premier bilan
de l’état de santé mentale du patient avant adressage vers le psychologue et suivre l’évolution de
l’état du patient (Cnam, 2017). L’efficacité de ce
dispositif va être évaluée sur plusieurs années
avant une éventuelle extension nationale (Gandré
et al., 2019). Le remboursement des consultations
chez le psychologue est déjà effectif dans plusieurs
pays, et en discussion dans d’autres (De Block,
2018 ; Vasiliadis et Dezetter, 2015 ; Diminic et
Bartram, 2018 ; Jorm, 2018).
Atlas de la santé mentale en France
19
1
1
CARTE 2
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Densité de psychologues libéraux en 2017
Pour 100 000 habitants
Départements et
régions d'outre-mer
101,3
30,8
A Guadeloupe
France
29,7
24,3
19,8
20 km
14,8
B Martinique
6,3
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : RPPS-Adeli 2017, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Les psychiatres
L’offre de ville est complétée par l’activité des
psychiatres libéraux. En 2017, sur les 15 307
psychiatres qui couvrent le territoire français,
6 509 exercent leur activité selon un mode d’exercice libéral ou mixte (43 %), soit une densité nationale de 9,9 pour 100 000 habitants. Selon l’Ordre
des médecins, parmi eux, seuls 780 sont inscrits
en tant que pédopsychiatres. Les psychiatres libéraux bénéficient, tout comme les médecins
généralistes et les psychologues libéraux, de la
liberté d’installation. La majorité des psychiatres
libéraux (67 %) exercent en secteur 1, c’est-à-dire
sans dépassement d’honoraires. Ces psychiatres
sont d’ailleurs majoritaires dans l’ensemble des
départements français, à l’exception de départements de région parisienne (Essonne, Yvelines,
Hauts-de-Seine et Paris) où les psychiatres exerçant en secteur 2 sont plus nombreux. Notons
également la situation particulière du Cantal et
de la Meuse, qui en plus d'une faible densité de
psychiatres libéraux, ne comptent que la moitié de
professionnels ne pratiquant pas de dépassement
d'honoraires.
20
Atlas de la santé mentale en France
20 km
L’offre libérale de psychiatrie est très inégalement
répartie sur le territoire. La densité de psychiatres
libéraux ou mixtes varie dans un rapport de 1 à
59 entre les départements. La densité la plus élevée est observée dans le département parisien
(64,4 pour 100 000 habitants) et la plus faible en
Haute-Marne (1,1 pour 100 000 habitants).
Le nombre total de psychiatres en France n’a cessé de croître depuis les années 1980, passant de
8 418 professionnels en 1984 à plus de 15 000 en
2017. Avec une densité nationale de 23 psychiatres
(tous modes d’exercice confondus) pour 100 000
habitants, la France possède l’une des densités
les plus élevées d’Europe (Coldefy et Le Neindre,
2014). Ce constat doit toutefois être nuancé par la
prise en compte de la pyramide des âges de ces
professionnels. En moyenne, 66 % des psychiatres
libéraux d’un département sont âgés de 55 ans et
plus et, dans plus de la moitié des départements,
ce taux est supérieur à 50 %. Les départements
concernés ne sont par ailleurs pas ceux fortement dotés en psychiatres libéraux ou mixtes. Ce
constat suggère une potentielle diminution des
effectifs de psychiatres libéraux dans les années à
venir avec les départs à la retraite d'autant que la
psychiatrie figure parmi les spécialités qui peinent
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Densité de pédo-psychiatres libéraux et salariés en 2016
Pour 100 000 jeunes
de 0 à 14 ans
Départements et
régions d'outre-mer
23,7
A Guadeloupe
11,5
7,9
France
6,7
20 km
5,4
B Martinique
2,9
0,9
20 km
0
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
à attirer les étudiants lors des épreuves classantes nationales [Anguis, 2017]. Cela pourrait
contribuer à aggraver les inégalités spatiales sur
le territoire français. Cependant les projections
démographiques réalisées par le ministère de la
Santé prévoient une légère baisse du nombre de
psychiatres entre 2016 et 2021 avant un retour à la
hausse jusqu’en 2040, de façon similaire aux projections pour l’ensemble des médecins. La situation est critique pour les pédopsychiatres avec une
densité nationale de 6,7 médecins pour 100 000
jeunes et une dizaine de départements dépourvus
de toute offre de pédopsychiatres libéraux. La répartition territoriale met en évidence un gradient
nord-sud, avec une meilleure couverture à Paris et
au sud-ouest de la France (carte 3).
Tout comme pour les médecins généralistes, la
disponibilité des psychiatres libéraux sur le territoire peut être appréciée via l’APL qui tient
compte à la fois de l’offre (en particulier niveau
d’activité des médecins et distance géographique)
et de la demande (taux de recours ajusté sur l’âge
de la population). En 2013, les habitants des communes françaises ont eu accès en moyenne à 3,8
psychiatres pour 100 000 habitants. L’APL aux
psychiatres libéraux apparaît particulièrement
Discrétisation : quintiles. Sources : RPPS 2016, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
élevée en zones urbaines (notamment les grandes
aires urbaines de Paris, Marseille et Lyon) et
périurbaines. Ainsi, les variations géographiques
dans la disponibilité des psychiatres libéraux ne
s’expliquent pas uniquement par des différences
de besoins de soins des populations (carte 4
p. 22). Bien qu’il existe également une concentration dans les zones urbaines, la répartition des
psychiatres n’est pas strictement superposable à
celle des médecins généralistes, la disponibilité
des psychiatres étant relativement élevée dans les
départements sièges d’universités.
Liens entre les professionnels de ville
La coordination entre soins primaires et soins
spécialisés en ville est déterminante pour permettre une prise en charge graduelle des troubles
psychiques dont l’évolution n’est pas favorable,
ainsi que pour garantir le suivi somatique des patients vivant avec ces troubles. Les conséquences
d’une mauvaise coopération entre les professionnels de santé, et plus particulièrement entre
le médecin généraliste et le psychiatre, sont en
effet nombreuses et de mauvais pronostic pour
les patients (absence ou retard au diagnostic,
augmentation de la iatrogénie*, mauvaise obser-
Atlas de la santé mentale en France
21
1
CARTE 3
1
CARTE 4
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Accessibilité potentielle localisée aux psychiatres libéraux en 2013
22
Atlas de la santé mentale en France
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
vance des traitements, rupture de soins, prise en
charge somatique insuffisante, etc.) [Hardy-Baylé
et Younès, 2014]. Pourtant, en France, les collaborations entre médecins généralistes, psychiatres
et psychologues restent compliquées (Dumesnil
et al., 2018). Afin d’y remédier, la Haute Autorité
de santé (HAS) a publié en 2018 un guide pour
aider les professionnels à développer et renforcer
la coordination interprofessionnelle dans la prise
en charge des patients adultes vivant avec des
troubles psychiques (HAS, 2018).
Des structures pluriprofessionnelles sont par ailleurs en plein développement. Ainsi, en parallèle
d’une offre de ville libérale en cabinets, l’offre de
ville se diversifie pour simplifier les conditions
d’exercice des professionnels de santé et améliorer
la prise en charge des patients. De nouveaux modèles de soins ont ainsi vu le jour, parmi lesquels
notamment les Maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) et les centres de santé. Les MSP ont
été introduites dans la Loi de financement de la
Sécurité sociale (LFSS) de 2007 pour permettre
aux professionnels libéraux d’accéder à un mode
d’exercice collectif (Légifrance, 2007). Ces structures regroupent des professionnels de santé de
premier recours, professionnels médicaux, auxiliaires médicaux ou pharmaciens, qui assurent de
façon coordonnée un projet de soins partagé. Des
psychologues exercent fréquemment dans ce type
de structure pour réaliser le suivi de la santé mentale des patients. Ces initiatives locales ont vocation à maintenir les services publics de santé de
proximité et à lutter contre la désertification médicale. Alors qu’en 2008 on comptabilisait seulement 20 MSP en France, elles sont 1 332 fin 2019
(DGOS, 2019).
Les centres de santé viennent également compléter l’offre de soins de ville mais ils se distinguent
des MSP par leur dimension plus sociale. Ces
structures ont en effet pour mission prioritaire
de contribuer à l’accès aux soins pour tous et sont
principalement implantées dans les zones reculées ou à faibles ressources. Les professionnels de
santé y exerçant sont des salariés pratiquant tous
les tarifs du secteur 1 et le tiers payant intégral.
Près de 2 000 centres de santé sont recensés en
2015 (FNSS, 2015).
Enfin, des dispositifs de soins partagés, dédiés à
la coopération entre médecins généralistes et psychiatres, se développent sous la forme d’initiatives
locales sur le territoire français, notamment dans
les Yvelines et la région de Toulouse. Ces dispositifs permettent aux médecins généralistes de
solliciter une expertise spécialisée pour leurs patients souffrant de troubles psychiques avec une
évaluation initiale de la situation ainsi que le possibilité de mettre en place des consultations systématiques de suivi si nécessaire (Hardy-Baylé et
Younès, 2014).
Par ailleurs, des initiatives politiques récentes,
introduites par la loi de modernisation du système de santé de 2016, visent à faciliter la coordination des soins ambulatoires pour le bénéfice
des patients (Légifrance, 2016a). Cette loi a ainsi
prévu la création de Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) qui ont pour
objectif de renforcer les liens entre les différents
types de soins de ville et de proposer des actions
et outils de coordination communs. Ces CPTS,
créées à l’initiative des professionnels de santé,
regroupent des acteurs des soins de premier et
de deuxième recours (médecins généralistes et
spécialistes, infirmiers, etc.), et, le cas échéant,
des acteurs médico-sociaux ou sociaux, qui interviennent ensemble pour fluidifier le parcours de
soins des personnes. Ces dispositifs sont actuellement en cours d’implantation sur les territoires.
1.1.2. L’offre en établissements
de santé
Plus de 600 établissements de santé sont autorisés en France pour une activité de psychiatrie,
parmi les 3 000 établissements de santé recensés
(Drees, 2018). Plus de la moitié d’entre eux appartiennent au secteur public et assurent 67 % des capacités d’accueil, contre 45 % des établissements
de santé tous secteurs confondus. Le reste des
établissements se répartissent à parts égales entre
les cliniques privées et les établissements privés
d’intérêt collectif. L’offre de soins en psychiatrie
infanto-juvénile dépend presque exclusivement
des établissements publics et privés d’intérêt collectif (Drees, 2019).
La France se distingue de ses voisins européens
par la part importante d’établissements spécialisés dans la prise en charge des troubles mentaux (Coldefy, 2012). 61 % des établissements
dispensant des soins psychiatriques sont mono
disciplinaires, et ce malgré un mouvement dans
les années 1990 promouvant l’intégration de la
psychiatrie à l’hôpital général. Cette intégration
existe notamment en Angleterre et en Italie où
les hôpitaux psychiatriques ont été fermés dans
le cadre du mouvement de désinstitutionnalisation des soins psychiatriques (Chapireau, 2008 ;
Glover, 2007). Elle tend à réduire la stigmatisa-
Atlas de la santé mentale en France
23
1
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
tion associée aux maladies mentales et à la psychiatrie et à améliorer la prise en charge somatique des
personnes suivies pour des troubles psychiques.
La psychiatrie se distingue des autres spécialités médicales par l’importance et la diversité du
gradient de soins proposés pour répondre aux
différentes phases de la pathologie, depuis l’ambulatoire aux différentes prises en charge à temps
complet, en passant par l’hospitalisation à temps
partiel. L’offre est majoritairement publique et spécialisée et s’appuie sur de nombreuses structures
extra-hospitalières développées pour la plupart
dans le cadre de la politique de sectorisation psychiatrique et visant à favoriser l’intégration et le
maintien dans la cité de la personne. Les établissements privés à but lucratif n’étant autorisés à ne
proposer que des hospitalisations (à temps plein et
partiel), dans le secteur privé, l’offre ambulatoire
est proposée par les psychiatres libéraux exerçant
en cabinet.
Les établissements de santé autorisés en psychiatrie ont pris en charge 2,5 millions de personnes
en 2017, soit près de 2 millions d’adultes (âgés de
16 ans ou plus) et 511 000 enfants et adolescents.
Parmi ces patients, 340 000 ont été hospitalisés à
temps plein. Les autres sont essentiellement suivis
en ambulatoire.
Les personnels des établissements de santé
Les soins dispensés en établissement de santé le
sont par des professionnels de santé qualifiés, exerçant leur activité au sein d’une équipe pluridisciplinaire (psychiatres, psychologues, infirmiers, assistants sociaux, psychomotriciens, etc.) assurant une
prise en charge globale et coordonnée.
Selon la Statistique annuelle des établissements de
santé (SAE), en 2016, plus de 120 000 professionnels (soit 110 000 Équivalents temps plein (ETP))
ont exercé en psychiatrie en établissement de
santé, dont 12 300 professionnels médicaux (soit
8 900 ETP). Comparativement à l’ensemble des
tableau 1
établissements de santé, avec 90 % des effectifs, le
personnel non médical assure une part importante
de la prise en charge des personnes en psychiatrie
(tableau 1). La psychiatrie se distingue également
des autres disciplines médicales par la faible proportion de praticiens hospitalo-universitaires, qui
représentent moins de 2 % des ETP du personnel médical salarié, contre 8 % pour la médecine,
chirurgie, obstétrique.
Alors que plus de 80 % des personnes suivies en
psychiatrie en établissement de santé le sont en
ambulatoire, seuls 47 % du personnel non médical
et 67 % du personnel médical exercent en dehors
des unités d’hospitalisation à temps plein (carte 5
p. 25). Ces proportions sont très variables selon les établissements et peuvent renseigner sur
l’intensité du virage ambulatoire opéré par les établissements de santé dans le cadre de la sectorisation psychiatrique. Comme pour l’offre libérale,
les densités des personnels des établissements
de santé varient fortement selon les territoires.
En psychiatrie générale, la densité de psychiatres
exerçant en établissement varie de moins de 5
ETP pour 100 000 habitants de 16 ans ou plus en
Saône-et-Loire, Jura, Dordogne ou dans les Landes
à plus de 15 ETP de psychiatres pour 100 000 habitants à Paris, dans le Val-de-Marne, le Rhône ou
la Haute-Vienne. Pour le personnel de soins et de
services socio-éducatifs, la Haute-Corse, la Saôneet-Loire, le Puy-de-Dôme, la Seine-et-Marne, la
Haute-Savoie déclarent moins de 100 ETP de personnels de soins pour 100 000 habitants contre
plus de 300 en Haute-Saône, Lozère ou Dordogne.
La démographie des personnels médicaux et non
médicaux ne se superpose pas (carte 6 p. 26).
En psychiatrie infanto-juvénile, les disparités sont
encore plus marquées. La densité de psychiatres
exerçant en établissement de santé varie de moins
de 5 ETP pour 100 000 jeunes en Guyane, Saôneet-Loire, Indre, Alpes-de-Haute-Provence, Orne,
Ardennes à plus de 20 ETP à Paris, en Corse-duSud, en Haute-Vienne, dans le Val-de-Marne et le
Rhône. Pour les autres personnels soignants, les
densités varient de moins de 70 ETP pour 100 000
Densité des différents types de personnel exerçant en établissement de santé
Type de personnel
Densité de psychiatres
Densité de personnels médicaux autres
Densité de personnels soignants et socio-éducatifs
Psychiatrie générale
pour 100 000 habitants
de 16 ans ou plus
Psychiatrie infanto-juvénile
pour 100 000 habitants
de moins de 16 ans
10,8
13,4
1,7
0,7
156,4
134,4
Sources : SAE 2015, Insee.
24
Atlas de la santé mentale en France
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Part des personnels soignants et éducatifs
exerçant en dehors des unités d’hospitalisation à temps plein
Équivalents temps plein
Départements et
régions d'outre-mer
87,0
A Guadeloupe
54,0
France
47,1
46,7
42,8
20 km
38,3
B Martinique
0,7
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
jeunes en Saône-et-Loire, Indre-et-Loire, Côtes
d’Armor, Puy-de-Dôme à plus de 300 dans le Lot,
la Corse du Sud et la Lozère (carte 7 p. 27).
Depuis 2012, une nouvelle catégorie d’intervenants en santé mentale émerge en France, sous
l’égide du Centre collaborateur de l’Organisation
mondiale de la santé pour la recherche et la formation en santé mentale (CCOMS). Ces nouveaux
intervenants viennent compléter la plurisdiciplinarité des équipes soignantes : les pairs-aidants*
professionnels ou médiateurs de santé, pairs qui
ont pour mission la médiation en santé mentale. La particularité de ces médiateurs est d’être
des « ex-usagers de la psychiatrie » d’où la référence à la notion de « pair ». A l’instar d’autres
pays tels que les États-Unis, le Canada, l’Angleterre, l’Australie, le Danemark ou les Pays-Bas, la
France a mis en place en 2012 une première promotion de médiateurs de santé pairs dans trois
régions pilotes (Ile-de-France, Hauts-de-France
et Provence-Alpes-Côte-d’Azur) issus d’un cursus
universitaire diplômant. Depuis 2018, une nouvelle formation de niveau licence de science sanitaire et sociale mention médiateur de santé pair
est mise en place. Une trentaine d’établissements
(dont un quart d’établissements médico-sociaux)
accueillent ces nouveaux professionnels. La litté-
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
rature internationale montre que l’intégration de
pairs-aidants dans les services de santé mentale a
des effets positifs pour : les usagers des services
de santé mentale (amélioration de l’accès aux
soins et de l’observance du traitement, transmission aux usagers de l’espoir du rétablissement à
tous les stades de la maladie, développement de
l’empowerment des usagers, amélioration de leur
fonctionnement social, diminution de l’auto-stigmatisation et de la mésestime de soi, etc.) ; les
équipes de soins (diversification et amélioration
de la prise en charge, amélioration de l’alliance
thérapeutique, évolution favorable des représentations liées aux personnes vivant avec des
troubles psychiques, etc.) ; les pairs-aidants euxmêmes (amélioration de la qualité de vie, reprise
d’une activité professionnelle, évolution favorable
du parcours du rétablissement) [CCOMS, de
Vayshenker et al., 2016 ; Crane et al., 2016]. Le
recrutement de pairs-aidants est encore peu pratiqué en France au sein des équipes de psychiatrie,
se heurtant en partie à une acceptation difficile par
les professionnels de santé traditionnels. En 2018,
moins de 50 médiateurs de santé pairs exercent
dans des services de santé mentale en France.
Atlas de la santé mentale en France
25
1
CARTE 5
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Densité d’Équivalents temps plein (ETP) moyens exerçant en établissement de santé
en psychiatrie générale en 2015
CARTE 6
6a
Psychiatres
Pour 100 000 habitants
de 16 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
25,7
A Guadeloupe
11,4
9,8
France
10,8
20 km
8,4
B Martinique
7,2
1,8
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
6b
Personnels soignants
Pour 100 000 habitants
de 16 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
341,6
A Guadeloupe
210,6
174,9
151,0
France
156,4
20 km
B Martinique
131,5
15,0
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
26
Atlas de la santé mentale en France
20 km
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
1
Densité d’Équivalents temps plein (ETP) moyens exerçant en établissement de santé
en psychiatrie infanto-juvénile en 2015
Psychiatres
CARTE 7
7a
Pour 100 000 habitants
de moins de 16 ans
Départements et
régions d'outre-mer
47,1
A Guadeloupe
15,1
France
13,4
12,4
20 km
10,7
B Martinique
8,4
3,0
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Personnels soignants
Pour 100 000 habitants
de moins de 16 ans
Départements et
régions d'outre-mer
363,3
A Guadeloupe
199,2
156,8
France
134,4
20 km
128,2
B Martinique
111,0
39,4
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
27
7b
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
1.1.3. Les structures de soins
Les prises en charge ambulatoires
Au sein des établissements de santé, la majorité
des personnes suivies en psychiatrie bénéficient
d’une prise en charge ambulatoire. 1,6 millions
de personnes, soit environ 80 % des adultes suivis en psychiatrie en établissement de santé,
le sont exclusivement en ambulatoire en 2016
(Drees, 2018).
Plus de 21 millions d’actes ambulatoires ont été réalisés en 2016, dont 75 % en psychiatrie générale.
La majorité des actes réalisés sont des consultations médicales ou entretiens soignants dispensés
en Centre médico-psychologique (CMP) [60 %],
mais aussi en Centre d’accueil thérapeutique à
temps partiel (CATTP) [13 %], au domicile des
patients ou en institutions substitutives au domicile (8 %), en unités d’hospitalisation somatique
(5 %), en établissements pénitentiaires (4 %) et
dans d’autres lieux divers (12 %).
L’offre ambulatoire des établissements publics ou
à but non lucratif repose essentiellement sur les
CMP. Implantées pour la plupart hors de l’enceinte
hospitalière, les équipes pluriprofessionnelles des
CMP coordonnent l’ensemble des actes de soins
ambulatoires : consultations médicales, entretiens soignants, démarches et accompagnement
social, dans les locaux de la structure ou plus rarement à domicile. Le cas échéant, elles orientent les
patients en direction de structures plus adaptées
(CATTP, hospitalisation de jour ou de nuit…). En
2016, 2 263 CMP de psychiatrie générale et 1 545
CMP de psychiatrie infanto-juvénile sont présents
sur le territoire français. Le nombre de structures
est en augmentation pour la psychiatrie générale
comme pour la psychiatrie infanto-juvénile. Ainsi,
entre 2006 et 2016, on compte respectivement 680
et 500 CMP supplémentaires et 11 % de structures
en plus ouvertes cinq jours ou plus par semaine.
La densité nationale de CMP s’élève à 4 pour 100
000 habitants de 16 ans et plus pour la psychiatrie
générale et 11 pour 100 000 habitants de moins
de 16 ans pour la psychiatrie infanto-juvénile. Des
disparités territoriales marquées sont observées
avec des densités de CMP qui semblent plus élevées dans les départements ruraux qu’urbains.
Pour autant, ces disparités doivent être interprétées avec précaution car elles ne renseignent pas
sur les ressources humaines disponibles dans les
différents CMP qui peuvent être de taille très variable. Certains territoires urbains privilégient des
structures concentrées de taille importante avec
des horaires d’ouverture amples, alors que, dans
28
Atlas de la santé mentale en France
les territoires ruraux, des antennes de CMP sont
dispersées sur le territoire pour assurer une meilleure couverture géographique. Il demeure que
plusieurs enquêtes montrent des difficultés d’accès à un premier rendez-vous en CMP. Les délais
d’attente peuvent être très importants, et ce particulièrement en psychiatrie infanto-juvénile. Selon
une étude réalisée par l’ARS Rhône-Alpes en 2014
auprès de plus de 300 structures, le délai moyen
d’attente pour un premier rendez-vous hors urgence y est de 21 jours pour la psychiatrie générale
et de 116 jours pour la psychiatrie infanto-juvénile (Ynesta et Danguin, 2015). Ces délais importants constituent une véritable barrière d’accès
aux soins de santé mentale, notamment chez les
jeunes (Redko, Rapp, et Carlson, 2006 ; O’Brien
et al., 2016). Ils peuvent avoir des conséquences
sur le pronostic des patients puisqu’un retard à la
prise en charge initiale des troubles mentaux est
associé à des résultats cliniques moins favorables
(Kisely et al., 2006).
Un des défis de la prise en charge psychiatrique
est le non-recours aux soins et les ruptures de
soins qui touchent plus particulièrement les populations défavorisées et désocialisées. Depuis
quelques années, en parallèle aux visites à domicile que peuvent réaliser les équipes des CMP
(mais qui ont tendance à se réduire avec les
contraintes budgétaires), des équipes mobiles
spécialisées, se déplaçant dans le milieu de vie des
personnes, se sont développées afin de répondre
aux objectifs d’évolution vers une psychiatrie
« hors les murs ». Les plus nombreuses sont les
Equipes mobiles psychiatrie-précarité (EMPP).
La sectorisation, en reposant sur l’orientation
des personnes selon leur appartenance à une aire
géographique délimitée, est un frein à l’entrée en
soins des personnes en situation de précarité et
d’exclusion sociale, dont le mode de vie est souvent caractérisé par l’itinérance. Fondées sur le
principe d’aller au-devant des populations concernées, des équipes pluridisciplinaires, composées
de professionnels issus des secteurs sanitaires et
sociaux, se déplacent jusqu’à leurs lieux de vie.
Les EMPP sont chargées de faciliter l’entrée dans
le circuit du soin des publics concernés quel que
soit le lieu, en assurant la prévention et le repérage
précoce des troubles, et en facilitant l’orientation
et l’accès au dispositif de soins lorsque cela s’avère
nécessaire. Ces équipes s’adressent aux personnes
en souffrance psychique, mais remplissent aussi
des fonctions de soutien et de formation à destination des acteurs de première ligne. Ainsi, les
EMPP font office d’interface entre les secteurs de
psychiatrie, les équipes sanitaires, sociales et mé-
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
dico-sociales, afin de fournir une prise en charge
adaptée et coordonnée aux patients. Au total, 152
équipes mobiles couvrent l’ensemble du territoire
en 2015 (contre 126 en 2011, soit une augmentation de 21 %) et trois-quarts des départements en
sont équipés. Toutefois, il existe de nombreuses
disparités au niveau de leur implantation géographique, avec cinq départements possédant au
moins cinq EMPP (le Nord, l’Hérault, les AlpesMaritimes, le Pas-de-Calais et Paris). Ces départements sont aussi ceux qui enregistrent le plus de
personnes en situation de précarité. Les disparités
d’offre observées en termes d’EMPP pourraient en
partie s’expliquer par des différences de besoins
des populations desservies.
D’autres équipes mobiles existent mais ne font pas
l’objet d’un recensement national. Il s’agit notamment des équipes mobiles d’urgence et de crise,
dont des équipes d’intervention précoce pour
les troubles psychotiques, qui sont pourtant fréquentes à l’étranger et qui ont été développées à
la suite d’évaluations de leur efficacité (Baumann
et al., 2013 ; Johnson, 2013). Certaines équipes
mobiles se sont spécialisées dans les interventions
auprès de publics jeunes (périnatalité, adolescents
et jeunes adultes) ou au contraire âgés, ou dans
la prise en charge de certains troubles spécifiques
comme les addictions.
Les prises en charge à temps complet
et partiel
Depuis l’instauration de la psychiatrie sectorisée
dans les années 1960, l’organisation des soins a
considérablement évolué, passant d’une psychiatrie exclusivement hospitalière à une psychiatrie
désinstitutionnalisée, au plus près du lieu de vie
des populations. Cette nouvelle organisation des
soins a eu pour conséquence une réduction des
capacités d’hospitalisation au profit des prises en
charge ambulatoires et à temps partiel. En France,
le nombre de lits d’hospitalisation en psychiatrie a
été divisé par deux entre 1985 et aujourd’hui. La
France comptait plus de 110 000 lits d’hospitalisation en psychiatrie en 1985 contre 56 000 en
2017, soit 84 lits pour 100 000 habitants. Depuis
2007, leur nombre tend à se stabiliser du fait notamment d’une évolution contraire selon les types
d’établissements : les établissements publics et
Espic tendent à poursuivre la fermeture de lits,
alors que les établissements privés à but lucratif
tendent à les augmenter.
Différents types de séjours hospitaliers sont disponibles afin d’offrir une gamme de prise en
charge complète et adaptée. Ils se différencient
suivant la nature des soins à prodiguer, et notamment de leur intensité, mais aussi en fonction de
la nécessité d’une mise sous surveillance médicale
constante ou épisodique.
L’hospitalisation à temps plein
L’hospitalisation à temps plein est la principale
modalité de prise en charge à temps complet
puisqu’elle représente 91 % des prises en charge.
Cette modalité de soins correspond à une hospitalisation d’au minimum 24 heures réservée
aux situations les plus aigües qui requièrent des
soins intensifs associés à une surveillance médicale continue. 53 424 lits de psychiatrie générale
et 2 228 lits de psychiatrie infanto-juvénile y sont
dédiés en 2017 (Drees, 2019). La psychiatrie représente ainsi 14 % des capacités d’hospitalisation
complète des établissements de santé français. Les
lits sont majoritairement rattachés à des établissements publics (62 % pour la psychiatrie générale et 72 % pour la psychiatrie infanto-juvénile)
et, dans une moindre mesure, aux établissements
privés à but lucratif (25 % et 11 %) et aux établissements privés d’intérêt collectif (13 % et 18 %). Ce
sont 337 600 patients adultes et 10 400 enfants
ou adolescents qui ont été accueillis dans ce mode
de prise en charge en 2016, soit respectivement 19
et 2,3 % des files actives* suivies en psychiatrie en
établissement de santé.
Alors que la France présente une densité de lits
d’hospitalisation en psychiatrie élevée en comparaison à la plupart des pays de l’OCDE (OCDE,
2017), une partie non négligeable de ces capacités
d’accueil n’est pas disponible pour de nouvelles
admissions. En effet, un quart des lits sont occupés par des patients hospitalisés au long cours,
sans que cela ne soit pour autant le résultat d’une
indication thérapeutique. En 2017, ce sont plus de
15 000 patients qui ont été hospitalisés plus de
270 jours dans l’année. Une partie de ces situations est liée à un défaut d’offre d’accompagnement et d’hébergement non médicalisé plus adaptée (Coldefy et Nestrigue, 2014).
En 2016, la densité nationale, tout type d’établissements confondus, est de 103 lits d’hospitalisation à temps plein en psychiatrie générale pour
100 000 habitants âgés de 16 ans et plus et de 18
lits pour 100 000 habitants de moins de 16 ans
(carte 8 p. 30). Des disparités territoriales
marquées sont cependant observées. Ainsi, en
psychiatrie générale, la densité de lits par département varie de moins de 60 lits pour 100 000 ha-
Atlas de la santé mentale en France
29
1
1
CARTE 8
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Densité de lits d'hospitalisation à temps plein en 2016
8a
Psychiatrie générale
Pour 100 000 habitants
de 16 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
195,1
A Guadeloupe
131,5
116,2
94,1
France
103,2
20 km
B Martinique
77,2
53,8
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2016, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
8b
Psychiatrie infanto-juvénile
Pour 100 000 habitants
de moins de 16 ans
Départements et
régions d'outre-mer
148,1
A Guadeloupe
27,4
19,4
France
18,0
20 km
12,6
B Martinique
9,4
0,0
20 km
0
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2016, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
30
Atlas de la santé mentale en France
20 km
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
bitants de 16 ans et plus (à Mayotte, en Meurtheet-Moselle et dans la Loire) à plus de 160 lits pour
100 000 habitants de 16 ans et plus dans des départements ruraux (tels que la Haute-Saône, la
Dordogne, l’Yonne, la Lozère, les Hautes-Pyrénées
ou la Creuse). Globalement, cette densité est plus
importante dans la moitié sud de la France, du fait
d’une offre privée s’ajoutant à l’offre publique. Les
plus fortes densités sont rencontrées dans les départements plutôt ruraux, sièges d’implantation
historique des grands établissements spécialisés
dans la lutte contre les maladies mentales, parmi
lesquels plusieurs ont un statut d’Espic. Pour la
psychiatrie infanto-juvénile, onze départements
ne disposent d’aucune capacité d’hospitalisation à
temps plein alors qu’à l’inverse les Hautes-Alpes
et les Landes ont une capacité d’accueil de plus
de 100 lits pour 100 000 habitants de moins de
16 ans, notamment du fait d’une offre privée importante qui s’ajoute à l’offre publique.
Cinq départements possèdent une offre d’hospitalisation à temps plein uniquement portée par
des établissements pluridisciplinaires : les Alpesde-Haute-Provence, l’Ariège, les Deux-Sèvres,
les Hautes-Alpes et la Guyane. A l’inverse, l’offre
de psychiatrie hospitalière de 31 départements
est uniquement portée par des établissements
spécialisés.
Des établissements privés à but lucratif sont implantés dans 61 départements français. Ils se
concentrent davantage dans le sud de la France,
principalement au niveau du littoral méditerranéen et des Pyrénées. La densité nationale
de lits d’hospitalisation à temps plein dans ces
établissements est de 25 lits pour 100 000 habitants de 16 ans et plus. Dans neuf départements
(les Bouches-du-Rhône, le Var, les Pyrénées
Orientales, le Loir-et-Cher, le Gard, l’Hérault, la
Loire, la Haute-Garonne et la Haute-Corse), cette
offre privée est majoritaire et représente plus de
la moitié des capacités d’hospitalisation à temps
plein en psychiatrie générale.
Au-delà de la quantité d’offre disponible, son éloignement peut être parfois problématique et défavorable au maintien du lien avec la famille ou les
proches, notamment dans le cas de l’hospitalisation d’enfants ou d’adolescents. C’est particulièrement le cas quand les temps d’accès en voiture à
l’unité d’hospitalisation la plus proche dépassent
fréquemment une heure (carte 9 p. 32-33).
Autres modalités de soins à temps complet
Bien que l’hospitalisation à temps plein soit la
forme d’activité majoritaire des prises en charge à
temps complet (prises en charge continues de jour
et de nuit), il existe d’autres modalités de soins
à temps complet situées en dehors de l’hôpital
telles que les séjours thérapeutiques, l’hospitalisation à domicile, l’accueil familial thérapeutique,
les appartements thérapeutiques, les centres de
post-cure et les centres de crise. En 2017, elles
représentaient 6 089 lits et places pour la psychiatrie générale, l’accueil familial thérapeutique
en constitue la principale modalité (43 % des lits
et places). 852 places alternatives sont recensées
pour la psychiatrie infanto-juvénile, sous la forme
majoritaire d’accueil familial thérapeutique. Pour
les patients de moins de 16 ans, ces modalités de
soins représentent plus d’un quart (28 %) des capacités de prise en charge à temps complet. Dans
certains départements, elles constituent l’unique
modalité de prise en charge à temps complet en
psychiatrie-infanto-juvénile, c’est le cas notamment de la Corrèze, de la Creuse, de la Manche, de
la Martinique et de l’Eure.
En psychiatrie générale, en 2016, la densité
moyenne de ces autres modalités de soins à temps
complet est de 12 places pour 100 000 habitants
de 16 ans et plus. Cette modalité de prise en charge
est marquée par une très forte hétérogénéité sur
l’ensemble du territoire : la majorité des départements possède un nombre de places ou de lits inférieurs à la moyenne alors que trois départements
se distinguent avec des densités supérieures à 50
lits ou places pour 100 000 habitants : l’Allier, le
Cher et l’Aisne (carte 10 p. 34).
L’hospitalisation à temps partiel
L’hospitalisation à temps partiel correspond à une
hospitalisation de moins de 24 heures, et constitue une alternative aux prises en charge à temps
complet. Le temps partiel ne se limite pas à la
seule hospitalisation, il peut également se matérialiser par une activité dispensée au sein d’un atelier thérapeutique visant la réinsertion sociale de
la personne. L’hospitalisation à temps partiel peut
avoir une visée diagnostique ou thérapeutique et
se dérouler de jour, allant d’une demi-journée à
la journée complète, ou de nuit, lorsque l’état de
santé du patient nécessite une surveillance médicale nocturne. On compte en France, en 2017, près
Atlas de la santé mentale en France
31
1
1
CARTE 9
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Temps moyen d'accès (en véhicule) aux unités d'hospitalisation temps plein en 2015
9a
Psychiatrie générale
32
Atlas de la santé mentale en France
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
1
Temps moyen d'accès (en véhicule) aux unités d'hospitalisation temps plein en 2015
Psychiatrie infanto-juvénile 9b
Atlas de la santé mentale en France
33
CARTE 9
1
CARTE 10
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Densité de places des autres modalités de soins à temps complet en 2016
10a
Psychiatrie générale en 2016
Pour 100 000 habitants
de 16 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
146,2
A Guadeloupe
16,1
9,8
France
11,9
20 km
6,4
B Martinique
4,2
0,5
20 km
0
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2016, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
10b
Psychiatrie infanto-juvénile en 2015
Pour 100 000 habitants
de moins de 16 ans
Départements et
régions d'outre-mer
77,1
A Guadeloupe
20,2
10,3
5,5
France
6,4
20 km
B Martinique
2,9
0,5
20 km
0
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
34
Atlas de la santé mentale en France
20 km
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
de 30 000 places1 d’accueil en hôpital de jour ou
de nuit dont 9 500 sont destinées à la psychiatrie
infanto-juvénile. Ce nombre a doublé depuis les
années 1980. Ces places sont majoritairement rattachées aux établissements publics (75 %), et aux
Espic (19 %), même si elles tendent à se développer au cours du temps dans les établissements privés à but lucratif avec 1 750 places en 2017 contre
moins de 500 avant 2008. Les places d’hospitalisation à temps partiel représentent un quart des
capacités d’hospitalisation en psychiatrie générale
contre 75 % pour la psychiatrie infanto-juvénile.
Les prises en charge en hospitalisation à temps
plein pour les enfants et les adolescents sont en
effet plus rares et correspondent à des indications
limitées. En 2016, la densité nationale en places
d’hospitalisation à temps partiel de psychiatrie est
de 37 pour 100 000 habitants de 16 ans et plus
(soit 40 % des places d’hospitalisation à temps
partiel toutes spécialités confondues dans les
établissements de santé français) et de 71 pour
100 000 habitants de moins de 16 ans. On observe
néanmoins des disparités importantes selon les
départements, plus marquées pour la psychiatrie
infanto-juvénile (carte 11 p. 36).
Près de 300 ateliers thérapeutiques et 1 900
CATTP viennent compléter l’offre de prise en
charge à temps partiel. Ces dispositifs ont pour
fonction la réinsertion sociale et l’autonomie des
usagers des services de santé mentale. Ils proposent des soins peu intensifs déclinés sous la
forme d’ateliers (soutien, thérapie de groupe…).
Les densités de structures, lits ou places disponibles, selon les différents modes de prise en
charge en établissements de santé, à la fois pour
la psychiatrie générale et la psychiatrie infanto
juvénile, sont synthétisées dans le tableau 2 et la
figure 1 p. 37.
Densité de structures, lits ou places disponibles en établissements de santé en 2016
Densité de structures, lits et/ou places
Mode de prise en charge
Ambulatoire (nombre de centres médico-psychologiques)
Hospitalisation à temps plein (nombre de lits)
En psychiatrie générale
(pour 100 000 habitants
de 16 ans ou plus)
En psychiatrie infanto-juvénile
(pour 100 000 habitants
de moins de 16 ans)
4
11
103
18
Alternatives à l’hospitalisation à temps complet
(nombre de lits ou places)
12
6
Hospitalisation à temps partiel (nombre de places)
37
71
Sources : SAE 2016, Insee.
1
1
Le nombre de places correspond au nombre de patients pouvant être accueillis en même temps au sein d’un établissement de santé.
Atlas de la santé mentale en France
35
tableau 2
1
CARTE 11
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Densité de places en hospitalisation à temps partiel
11a
Psychiatrie générale en 2016
Pour 100 000 habitants
de 16 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
106,1
A Guadeloupe
47,6
39,7
30,4
France
37,1
20 km
B Martinique
24,5
11,3
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2016, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
11b
Psychiatrie infanto-juvénile en 2015
Pour 100 000 habitants
de moins de 16 ans
Départements et
régions d'outre-mer
204,9
A Guadeloupe
99,7
77,1
61,7
France
70,7
20 km
B Martinique
48,7
9,8
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : SAE 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
36
Atlas de la santé mentale en France
20 km
1 1
Atlas de la santé mentale en France
Densité pour 100 000 habitants*
générale infanto-juvénile
générale
Nombre de lits/places
en psychiatrie...
infanto-juvénile
Alternatives à l’hospitalisation
à temps plein
Hospitalisation
à temps partiel
Nombre de places
en psychiatrie...
générale infanto-juvénile
37
France métropolitaine :
régions 2016
générale
infanto-juvénile
Nombre de centres médico-psychologiques
en psychiatrie...
Ambulatoire
Chaque point représente un département français.
Il est positionné sur le graphique en fonction de sa
densité de lits, places ou structures. La couleur
associée indique sa région d'appartenance. La
moyenne nationale est représentée par une ligne
pointillée.
France
d’outre-mer
Couleurs des points
Sources. Psychiatrie générale : SAE 2016. Psychiatrie infanto-juvénile : SAE 2015, Insee. Infographie : Irdes 2020.
* âgés de 16 ans et plus pour la psychiatrie générale adulte et de moins de 16 ans pour la psychiatrie infanto-juvénile.
0
25
50
100
150
204
Nombre de lits
en psychiatrie...
Hospitalisation
à temps plein
Densité d'équipements (lits, places, structures) en psychiatrie en 2015-2016
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
1
FIGURE 1
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
1.1.4. Les unités à destination
de populations spécifiques
Si la politique de sectorisation psychiatrique a
pendant longtemps privilégié une prise en charge
généraliste et non spécialisée, de plus en plus de
dispositifs se mettent en place pour proposer une
offre spécifique à certaines populations ou pathologies.
Les unités spécialisées dans la prise
en charge de patients agités ou difficiles
Des unités spécialisées dans la prise en charge de
patients agités ou difficiles ont été mises en place
afin de répondre à des besoins spécifiques et ponctuels : les Unités pour malades difficiles (UMD) ou
les Unités de soins intensifs psychiatriques (Usip).
Les UMD sont des structures psychiatriques spécialisées dans l’accueil des personnes présentant
une dangerosité pour elles-mêmes ou pour autrui.
L’admission en UMD relève des soins psychiatriques sans consentement* sous la forme d’une
hospitalisation complète assortie de protocoles de
soins intensifs et de mesures de sûreté particulières. Ces unités, à vocation interrégionale, sont
implantées dans des centres hospitaliers spéciali-
CARTE 12
sés. En 2016, le territoire français compte 10 UMD
qui se situent dans les départements du Val-deMarne, du Vaucluse, de la Moselle, de la Gironde,
de la Corrèze, de la Seine-Maritime, du Rhône, de
la Marne, du Tarn et des Côtes d’Armor (carte 12).
Les Usip sont des structures de soins intermédiaires aux unités psychiatriques traditionnelles
et aux UMD. Ces unités intersectorielles offrent un
cadre sécurisé aux patients en état de crise ou présentant des troubles majeurs du comportement,
mais ne relevant pas d’une admission en UMD en
l’absence d’une dangerosité particulière. En 2016,
22 départements disposent de ce type d’unité.
Ces unités spécialisées dans la prise en charge
des patients hospitalisés présentent une répartition hétérogène sur le territoire métropolitain,
qui peut notamment être liée à la vocation interrégionale des UMD. On observe néanmoins une
sous-dotation dans le centre ouest de la France
(carte 12).
Les centres experts et centres ressources
Les centres experts sont des plateformes de soins
spécialisées par pathologie, à la différence des
services classiques de psychiatrie. Ils sont label-
Présence d'unités spécialisées dans la prise en charge de patients agités ou difficiles en 2016
(Unités de soins intensifs psychiatriques (Usip) et Unités pour malades difficiles (UMD))
Nombre d’unités
Départements et
régions d'outre-mer
3
A Guadeloupe
1
20 km
B Martinique
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Source : SAE 2016. Infographie : Irdes 2019-20.
38
Atlas de la santé mentale en France
20 km
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
lisés par la fondation de coopération scientifique
FondaMental, hébergés au sein de services hospitaliers et intègrent des équipes pluridisciplinaires.
Ils sont accessibles sur orientation par le médecin
généraliste ou le psychiatre. 43 centres labellisés
sont présents sur le territoire français. 13 d’entre
eux sont spécialisés dans la prise en charge de la
dépression résistante, 12 dans celle des troubles
bipolaires, 10 dans celle de la schizophrénie et 8
dans celle de l’autisme de haut niveau. Ils visent
à fournir une prise en charge personnalisée, s’appuyant sur des techniques de soins orientées vers
le rétablissement, notamment la réhabilitation
psychosociale après une démarche évaluative et
diagnostique commune aux différents centres
(Fondation FondaMental, 2017). Ils ne se substituent pas aux soins mais visent à leur apporter
un soutien, à partir d’une évaluation poussée. Ces
centres s’inscrivent par ailleurs dans une dynamique de recherche à partir des données collectées auprès des personnes.
Par ailleurs, des centres de ressources, réhabilitation psychosociale, handicap psychique ou encore
autisme complètent cette offre d'expertise spécialisée à vocation régionale.
1.2. L’offre d’accompagnement
La loi pour l’égalité des droits et des chances, la
participation et la citoyenneté des personnes handicapées du 11 février 2005 a reconnu le handicap
psychique pour la première fois de façon officielle
en France (Milano, 2009). Ce handicap renvoie
aux limitations rencontrées dans la vie quotidienne par les personnes vivant avec un trouble
psychique. Les conséquences de la pathologie (par
exemple : troubles de la volonté, altération de la
vision du monde, somnolence provoquée ou renforcée par les traitements,…) peuvent impacter la
vie sociale et professionnelle. Le handicap psychique est caractérisé en particulier par des difficultés dans les relations sociales, un repli sur soi,
et des difficultés à prendre des initiatives. L’offre
médico-sociale sur le territoire doit pouvoir accompagner les personnes afin qu’elles soient en
capacité d’accéder et de se maintenir dans un logement autonome, d’accéder à une scolarisation,
à des études, à un emploi qui leur conviennent,
à une participation active à la vie sociale et citoyenne, par des solutions diversifiées, graduées et
modulables en fonction de leurs besoins et projet
personnalisé. Pour ce faire, l’offre d’accompagnement à destination des personnes en situation de
handicap psychique est spécifique et doit prendre
en compte : le caractère variable, intermittent et
évolutif des troubles, imposant un ajustement en
continu de l’accompagnement proposé et la nécessité de co-construire les solutions avec la personne
et ses aidants ; la difficulté des personnes à demander de l’aide et la nécessaire reconnaissance
des capacités d’auto-détermination et du rôle de
citoyen de la personne (Anesm, 2016).
La reconnaissance récente du handicap psychique
par la loi de 2005 rend cependant difficile le recensement exhaustif de l’offre médico-sociale disponible en la matière à travers les systèmes d’infor-
mation existants, contrairement à l’offre sanitaire
globale. En effet, cette reconnaissance a bousculé
l’organisation des établissements et services médico-sociaux, qui ne prenaient jusque-là pas en
compte de manière officielle les personnes avec
des troubles psychiques. Pour autant, certains établissements accueillaient déjà des personnes avec
des troubles psychiques (Bergeron, Eldeminan,
2018). Plutôt que de créer des structures dédiées
à ce type de handicap, des établissements se sont
ouverts à cette population. Pour mieux les identifier, ne sont conservés ici que les structures et services pouvant accueillir les personnes en situation
de handicap psychique, en excluant les places autorisées pour personnes en situation de handicaps
moteurs, visuels, auditifs et polyhandicaps. Seul
le Fichier national des établissements sanitaires
et sociaux (Finess) a pu être mobilisé pour qualifier l’offre d’accompagnement et d’hébergement
disponible pour la prise en charge du handicap
psychique. L’offre médicosociale spécifiquement
dédiée aux enfants et adolescents est présentée
dans l’encadré 1 p. 42.
Plusieurs types d’établissements et de services
coexistent pour les personnes adultes en situation de handicap. Ils se différencient du fait de
la nature des besoins des personnes en leur dispensant un accompagnement médico-social dans
leur milieu ordinaire de vie ou en institution. Ils
ont vocation à être un support social et éducatif
en vue de maintenir ou de recouvrer une certaine
autonomie et sont en mesure de répondre aux
besoins de soins. Certains sont des structures
d’hébergement, d’autres sont des dispositifs d’accompagnement dans la vie quotidienne ou encore
d’accompagnement à l’emploi, à la formation et
aux activités courantes. L’offre d’établissements et
de services a pratiquement doublé en dix ans pour
Atlas de la santé mentale en France
39
1
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
s’adapter aux besoins des personnes en situation
de handicap. Elle se développe plus rapidement
dans les services que dans les établissements.
Sur les 494 353 places que compte le territoire en
2017, 75 % peuvent potentiellement accueillir des
personnes en situation de handicap psychique.
Le paysage de l’offre médico-sociale est aujourd’hui en profonde mutation, traversé par les
dynamiques que représente la « réponse accompagnée pour tous » afin de répondre de manière
individualisée aux besoins des personnes et de
permettre leur inclusion en milieu ordinaire autant que possible. Cette transformation s’applique
également au handicap psychique et est déclinée dans la stratégie quinquennale de transformation de l’offre médico-sociale pour la période
2017-2021 (Ministère des Affaires sociales et de la
Santé, 2016).
1.2.1. L’accompagnement dans la vie
quotidienne et courante
Les personnes en situation de handicap psychique peuvent rencontrer des limitations dans
la vie quotidienne et courante pour assurer leur
hygiène corporelle, s’habiller de façon adaptée,
préparer un repas équilibré, gérer leurs médicaments, leur sécurité (se protéger des abus, savoir
demander de l’aide, connaître ses limites, etc.),
gérer leurs dépenses courantes, réaliser des démarches administratives, sortir de leur domicile,
utiliser les transports en commun, conduire un
véhicule, faire leurs courses, etc. (Anesm, 2016).
Pour répondre à ces besoins, plusieurs services ou
dispositifs sont proposés par le secteur médicosocial.
Le Service d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) s’adresse aux personnes en situation de handicap dont la vie en logement de droit
commun est rendue possible par un accompagnement adapté. Basé sur un projet individuel de
prise en charge et d’accompagnement, le SAVS
vise à favoriser le maintien ou la restauration de
l’ensemble des liens sociaux de la personne, offre
un suivi éducatif et psychologique ainsi qu’une
assistance dans la réalisation de l’ensemble des
actes de la vie quotidienne. L’accompagnement
délivré par le SAVS est proportionnel aux besoins
de chaque usager et peut être permanent, temporaire ou séquentiel.
La répartition des 32 198 places en SAVS que
compte le territoire français est également caractérisée par des disparités géographiques majeures
40
Atlas de la santé mentale en France
avec des densités de places qui varient dans un
rapport de 1 à 20 selon les territoires. Alors que
la densité nationale est de 79 places de SAVS
pour 100 000 adultes âgés de 20 ans ou plus, leur
nombre varie de moins de 20 en Seine-et-Marne,
Martinique, Haute-Corse, Moselle, Seine-SaintDenis et Territoire de Belfort à plus de 200 places
dans le Doubs, les Côtes d’Armor, l’Indre et la
Corrèze (carte 13).
Dans la continuité des prestations offertes par
le SAVS, le Service d’accompagnement
médico
social pour adultes handicapés
(Samsah) contribue à la réalisation du projet de
vie de la personne tout en proposant un accompagnement médical et paramédical qui permet son
maintien en milieu ordinaire.
L’offre de places installées en Samsah est tout
aussi hétérogène que celle en SAVS. Alors que la
densité nationale est de 20 places pour 100 000
habitants de 20 ans et plus, sept départements
comptent moins de 5 places pour 100 000 habitants (Creuse, Moselle, Meuse, Essonne, HautesPyrénées, Ardèche et Vosges), tandis que la
Corrèze, le Cantal et les Ardennes offrent plus de
80 places de Samsah pour 100 000 adultes.
Si dans certains territoires les offres de services
d’accompagnement se complètent, dans d’autres
elles font défaut ou à l’inverse semblent très présentes au regard de la population locale à desservir (carte 14).
Plus récemment, les Pôles de compétences et de
prestations externalisées (PCPE), institués en
2016, sont appelés à être une des briques de la
transformation en cours de l’offre médico-sociale.
Plus de 100 existent actuellement sur le territoire
et s’adressent à toute personne en situation de
handicap pour soutenir son projet de vie en milieu
ordinaire dans un objectif inclusif.
1.2.2. L’accompagnement à l’emploi,
à la formation et aux activités
courantes
La demande d’accès à l’emploi en milieu ordinaire
est forte parmi les personnes en situation de handicap psychique, le travail étant à la fois source
de revenus mais aussi de reconnaissance sociale
et de mise à distance du handicap (Anesm, 2016).
De nombreuses études montrent un lien entre
le rétablissement et le travail. L’activité permet
d’augmenter l’estime de soi, de ne pas se focaliser
sur les symptômes de la maladie, de se libérer de
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Densité de places installées en Services d’accompagnement à la vie sociale (SAVS)
1
CARTE 13
Pour 100 000 habitants
de 20 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
260,6
A Guadeloupe
130,5
88,8
France
79,2
20 km
67,9
B Martinique
45,8
0,0
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Finess 2017, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Densité de places installées en Services d'accompagnement médico-social
pour adultes handicapés (Samsah)
Pour 100 000 habitants
de 20 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
87,4
A Guadeloupe
32,1
22,8
France
20,3
20 km
16,7
B Martinique
11,9
0,0
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Finess 2017, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
41
CARTE 14
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
l’image stigmatisante du handicap, de développer
des contacts sociaux, d’aider à la structuration du
temps et des journées (Anesm, 2016).
Comme pour le logement, une évolution est en
cours concernant les dispositifs d’accompagnement à l’emploi, à la formation et aux activités
courantes des personnes en situation de handicap. L’accès direct au milieu ordinaire de travail
plutôt que dans l’emploi protégé grâce à un soutien personnalisé est désormais privilégié. C’est
notamment le cas des dispositifs d’emploi ac-
Encadré 1
compagné créés par la loi travail du 8 août 2016
qui visent à permettre d’obtenir et de conserver
un emploi rémunéré sur le marché du travail,
via un soutien et un accompagnement du salarié ainsi qu’un appui et un accompagnement de
l’employeur (Légifrance, 2016b). Cet accès direct est également facilité par l’implication de
conseillers en insertion professionnelle présents
dans les Établissements de santé, sociaux et médico-sociaux (ESMS) et les entreprises adaptées.
Le développement de ce type d’accompagnement,
existant dans de nombreux pays européens, est
L’offre d’accompagnement en établissements et services médico-sociaux
à destination des enfants et adolescents
Les structures médico-sociales jouent
un rôle important dans la prise en
charge des enfants et adolescents
présentant des troubles psychiques,
parfois proche de celui des structures
sanitaires ambulatoires. En effet, depuis la reconnaissance du handicap
psychique avec la loi du 11 février
2005 (Légifrance, 2005), le nombre
de structures ou de places dédiées
aux personnes souffrant de troubles
psychiques s’est fortement développé dans les établissements et services
médico-sociaux (Amara et al., 2011).
Les prises en charge
en Centre d’action médico-sociale
précoce (CAMSP)
Les CAMSP proposent un dépistage
précoce et des suivis thérapeutiques
en ambulatoire pour les enfants âgés
de moins de 6 ans. En 2015, près de
330 CAMSP couvrent l’ensemble du
territoire français. La densité nationale
moyenne s’établit à 6 structures pour
100 000 enfants de 0 à 6 ans et apparaît plus élevée dans les départements
à dominante rurale. Par ailleurs, les capacités d’accueil en CAMSP sont parfois insuffisantes. Selon l’enquête Etablissements sociaux (ES) de la Drees,
en 2010, le délai moyen d’attente
entre le premier contact et la première
consultation était de 1,8 mois (Makdessi, 2013). D’autres enquêtes plus
récentes (CNSA, 2017) avancent également des délais moyens d’attente assez longs, variant de 15 jours à 3 mois
(Ledésert et Mari, 2016). Les possibilités de prise en charge en CAMSP
se mesurent également par le temps
d’accès à la structure la plus proche :
sur 10 enfants, 3 se situent à moins de
20 minutes d’un CAMSP, 4 entre 20 et
40 minutes, 2 entre 40 et 60 minutes et
1 à plus de 60 minutes.
42
Les prises en charge
en Centre médico-psychopédagogique (CMPP)
à 307 places pour 100 000 jeunes âgés
de 0 à 20 ans.
Les CMPP offrent un suivi ambulatoire et des consultations thérapeutiques pour les enfants de moins de
20 ans, ainsi qu’un accompagnement
dans leur milieu de vie et leur scolarisation. En 2015, on dénombre 483
CMPP sur le territoire français, quatre
départements en étant dépourvus :
la Lozère, les Alpes-Maritimes, la Savoie et l’Ain. La densité nationale
moyenne de CMPP est de 3 structures
pour 100 000 jeunes de 0 à 18 ans et
apparaît plus élevée dans les départements à dominante rurale. Les CMPP
présentent aussi des délais d’attente
importants. Le délai moyen d’attente
entre le premier contact et la première
consultation était de 2,6 mois en 2010
(Makdessi, 2013). Du point de vue de
l’accessibilité géographique, 15 % de
la population se situe à plus d’une
heure d’un CMPP.
Les prises en charge
en Institut thérapeutique éducatif
et pédagogique (Itep)
Les prises en charge
en Service d’éducation spéciale
et de soins à domicile (Sessad)
Les Sessad assurent un accompagnement personnalisé des enfants et adolescents en situation de handicap par
une équipe éducative, médicale et paramédicale pour favoriser leur maintien dans leur milieu de vie ordinaire.
Depuis le milieu des années 1990, le
nombre de places en Sessad n’a cessé
de croître, passant de 12 000 à 52 000
places entre 1995 en 2015 (Mainguené, 2008). Ce développement des
services a particulièrement bénéficié
aux enfants présentant des troubles
psychiques qui occupaient 15 % des
places de Sessad en 2010 et 24 % en
2014 (Drees, enquête ES). Bien que
plus élevée dans les départements à
dominante rurale, la densité de places
varie assez peu par département et
s’élève en moyenne au niveau national
Atlas de la santé mentale en France
Les Itep sont dédiés à l’accueil des
enfants présentant des troubles psychiques. Ils évoluent vers des modalités d’accueil et d’accompagnement
diversifiées, des possibilités d’hébergement modulées, de l’accueil en
externat et des services spécialisés
pour favoriser le maintien des enfants
en milieu ordinaire. La part d’internat
diminue ; elle est de 53 % en 2014
(Drees, enquête ES). La densité nationale moyenne de places en Itep s’élève
en 2015 à 148 places pour 100 000
jeunes de 6 à 18 ans. La répartition
des 450 Itep sur le territoire en 2015
fait apparaître un gradient Nord-Sud,
avec des taux d’équipement plus forts
dans les départements du sud de la
France. En particulier, le département
de la Lozère bénéficie d’une densité
de 700 places pour 100 000 jeunes
de 6 à 18 ans, mais présente l’une des
plus faibles densités de population de
cet âge.
Les prises en charge
en Institut médico-éducatif (IME)
Les IME sont dédiés aux enfants présentant une déficience intellectuelle
ou des troubles psychiques. 18 % des
places d’IME sont occupées par des
enfants avec troubles du psychisme
(Drees, enquête ES). Ils fonctionnent
le plus souvent en externat, la part
d’internat diminue, elle est de 29 % en
2014. En 2015, la France compte plus
de 1 200 IME. La répartition des 70 000
places disponibles en IME apparaît relativement homogène sur le territoire et
une densité nationale moyenne de 578
places pour 100 000 jeunes.
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
récent en France où les Établissements et services d’aide par le travail (Esat) restent prédominants. Ils sont destinés aux personnes présentant
un handicap ne leur permettant pas d’exercer une
activité professionnelle dans une entreprise ordinaire ou adaptée. Ces structures de travail visent
la réinsertion professionnelle et sociale en offrant
à la fois un milieu protégé aux travailleurs handicapés et un soutien médico-social et éducatif.
Historiquement, ils ont été essentiellement créés
pour répondre aux besoins des personnes présentant des déficiences intellectuelles. Ils doivent
désormais proposer des solutions adaptées aux
spécificités du handicap psychique, en constituant
notamment une étape de transition vers le milieu
ordinaire (Anesm, 2016). Ceci est un axe fort de
la transformation de l’offre d’accueil en Esat, souhaitée pour les prochaines années, avec le développement d’Esat dits de transition, ouverts sur le
milieu ordinaire.
Avec 118 331 places recensées pour l’année 2017,
soit 240 places pour 100 000 adultes, le territoire
français est relativement bien doté. La Lozère
apparaît atypique avec 880 places en Esat pour
100 000 adultes, accueillant des personnes de
toute la France. Lorsqu’on l’exclut, les disparités
territoriales semblent moindres pour ces struc-
tures, variant dans un rapport de 1 à 3 entre les
départements. Ainsi, la Guyane, la Haute-Corse,
Paris et le Var comptent moins de 170 places pour
100 000 adultes, alors que les départements ruraux du Cantal, de l’Orne, de la Corrèze, de la
Creuse et des Hautes-Pyrénées en proposent plus
de 350. Encore plus que dans le secteur sanitaire,
les disparités territoriales d’offre médico-sociale
semblent obéir à des logiques différentes de la
couverture des besoins locaux (carte 15).
1.2.3. La pair-aidance* et les
dispositifs visant à faire de la
personne un acteur de sa santé
Au-delà des réponses apportées par l’Etat et les
institutions aux problèmes de santé mentale, de
plus en plus de dispositifs et d’initiatives se développent en dehors des institutions pour favoriser
l’autonomie et l’inclusion sociale et citoyenne des
personnes vivant avec un trouble psychique et
en faire des acteurs de leur santé. Ces initiatives
peuvent émaner d’une pluralité d’acteurs, dont
les personnes elles-mêmes, et revêtir différentes
formes, mais reposent sur des principes communs : viser la pleine citoyenneté et le rétablissement des personnes. Ce sont des espaces d’accueil,
d’échanges ou de vie, non médicalisés, qui offrent
Densité de places installées en Établissements et services d'aide par le travail (Esat)
Pour 100 000 habitants
de 20 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
880,4
A Guadeloupe
298,0
263,0
20 km
France
240,4
B Martinique
245,2
213,8
127,8
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
1
Discrétisation : quintiles. Sources : Finess 2017, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
43
CARTE 15
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
une alternative ou un complément à la prise en
charge en institution. Ces services échappent au
système d’information statistique, mais il est important de les évoquer ici car ils contribuent à la
qualité de vie des personnes et sont inégalement
répartis sur le territoire. Loin d’être exhaustif, ce
recensement a pour objet de faire connaître ces
dispositifs, en développement depuis quelques
années en France.
Plusieurs dispositifs reposent sur la pair-aidance*
– entraide entre personnes partageant ou ayant
partagé la même expérience d’une problématique de santé – qui a montré depuis longtemps
son bénéfice, notamment dans le domaine des
addictions, pour les personnes concernées par
l’aide issue du savoir expérientiel de la personne.
Le partage d’expérience, du vécu de la maladie et
du parcours de rétablissement induisent des effets positifs dans la vie des personnes souffrant
de troubles psychiques (Vayshenker et al., 2016 ;
Crane et al., 2016).
Avec les associations d’usagers et de proches,
les Groupes d’entraide mutuelle (Gem) constituent les dispositifs les plus connus et répandus.
Véritables lieux de rencontres, d’échanges et de
soutien, les Gem permettent aux personnes avec
des expériences similaires de partager leur vécu
de la maladie et plus particulièrement d’échanger
autour du parcours ayant mené à leur rétablissement. Les Gem sont des outils d’insertion dans la
cité, de lutte contre l’isolement et de prévention de
l’exclusion sociale de personnes en grande fragilité (CNSA, 2018).
Introduits par la loi du 11 février 2005 et gérés par
la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie
(CNSA) depuis 2011, les Gem ont vu leur nombre
multiplié par trois en dix ans, traduisant une volonté d’accroître le développement des dispositifs à
l’initiative des usagers et ex-usagers de la psychiatrie afin de faciliter leur intégration dans la cité.
En 2018, le territoire compte 505 Gem en service
(dont 375 uniquement destinés à des publics présentant des troubles psychiques, 59 à des publics
présentant des traumatismes crâniens et 36 aux
deux types de public) [CNSA, 2019]. L’ensemble
des départements français est aujourd’hui couvert
par au moins un Gem, même si leur nombre varie
selon les départements. (carte 16).
Si, dans l’ensemble, les territoires de la France métropolitaine sont bien couverts en Gem, quelquesuns (formalisés en blanc dans la carte 17) demeurent concernés par des distances d’accès à ce
44
Atlas de la santé mentale en France
dispositif supérieures ou égales à 35 kilomètres. Or
le Gem, qui appelle une fréquentation régulière,
est censé être un dispositif de proximité souple et
accessible. La constitution même des Gem, basée
sur la mobilisation d’un collectif d’usagers, rend
toutefois difficile leur diffusion dans des territoires isolés (CNSA, 2018).
D’autres réseaux d’entraide entre pairs tendent
à se développer en France, tels que les réseaux
d’entente de voix qui ont pour objectif de promouvoir une approche des expériences, perceptions ou vécus inhabituels, respectueuse des
personnes et de leur expertise. Ils offrent pour ce
faire des espaces d’expression où les personnes
peuvent parler de leurs expériences sans être jugées ni enfermées dans une identité de malades.
Trente-deux groupes locaux sont ainsi recensés en
France par le Réseau français sur l’entente de voix
(REV France).
Inspirés du modèle des « Recovery colleges »
qui se développent à l’étranger, deux Centres de
formation au rétablissement (CoFoR) ont également ouvert leurs portes à Marseille et à Lille depuis 2017. Un troisième est en cours de construction à Paris. Basés sur les recommandations internationales des pratiques orientées vers le rétablissement, ils proposent aux personnes concernées
par des troubles psychiques des programmes de
formation extérieurs aux services de soin. Fondé
sur le principe de l’entraide mutuelle, l’ensemble
du dispositif, de la conception des modules aux interventions, est géré par des experts d’expériences,
c’est-à-dire des personnes concernées ou ayant été
concernées par des troubles psychiques (Psycom,
2018). Le CoFor propose à ses étudiants des outils
d’appropriation collective de connaissance de soi,
de ses troubles et des moyens d’y faire face mobilisant des outils reconnus au niveau international
tels que des plans de crise et de bien-être.
Ces différents dispositifs participent à une politique de santé mentale orientée vers le rétablissement des personnes. Dans cette optique, se développent également des dispositifs à destination
des familles et des proches qui assurent souvent au
quotidien l’accompagnement des personnes avec
des troubles psychiques. C’est par exemple le cas
des programmes de psycho-éducation dont les
objectifs sont de permettre aux familles de mieux
comprendre comment agir avec leur proche, dont
les symptômes peuvent être difficiles à gérer, mais
également d’apprendre à réduire l’impact de la
maladie sur leur propre santé. Les recommandations internationales récentes précisent que la
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Répartition des groupes d’entraide mutuelle sur le territoire français en 2017
1
CARTE 16
Nombre de Groupes
d'entraide mutuelle (Gem)
Départements et
régions d'outre-mer
A Guadeloupe
15-7
6-5
4
20 km
3
B Martinique
2-1
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : CNSA 2017. Infographie : Irdes 2019-20.
Distance d’accès aux groupes d’entraide mutuelle en 2017
Atlas de la santé mentale en France
45
CARTE 17
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
psycho-éducation à destination des aidants devrait être proposée précocément de manière systématique. Trois principaux programmes d'aide aux
aidants sont actuellement développés sur le territoire et proposent des formations plus ou moins
longues : Profamille, programme psycho-éducatif
sur deux ans destiné aux familles et proches de patients souffrant de troubles schizophréniques ou
apparentés ; deux programmes courts sont également proposés : « Bref », un programme de psycho-éducation à destination des aidants, construit
par l'Unité de psycho-éducation et de psychothérapies du centre hospitalier du Vinatier en collaboration avec l'Union nationale de familles et
amis de personnes malades et/ou handicapées
psychiques (Unafam), et « Prospect », des ateliers
d'entraide également mis en œuvre par l'Unafam
depuis 2005.
1.2.4. Les structures d’hébergement
installées en Fam pouvant accueillir des personnes en situation de handicap psychique est de
61 places pour 100 000 habitants de 20 ans et plus
et varie de 19 places pour le Territoire de Belfort
à 247 pour le département de la Lozère connu
pour ses traditions d’accueil. Excepté la situation
très particulière de la Lozère, la densité de places
en Fam varie tout de même dans un rapport de
1 à 7 entre les territoires les moins dotés (densité inférieure à 25 places pour 100 000 habitants)
tels que le Territoire de Belfort, la Guadeloupe,
la Haute-Marne, la Haute-Corse et la Corrèze, et
les territoires les plus dotés (densité supérieure à
140 places) : la Haute-Loire, les Hautes-Pyrénées,
l’Yonne et la Dordogne (carte 18). L’implantation
de l’offre médico-sociale diffère ainsi sensiblement de celle de l’offre sanitaire.
Les Maisons d’accueil spécialisé (Mas) sont prévues pour des personnes présentant un niveau
de dépendance supérieur à celui des personnes
admises en Fam. Ces personnes requièrent une
assistance permanente pour effectuer les actes
essentiels de la vie quotidienne ainsi qu’une surveillance médicale et des soins constants. La
densité nationale est de 59 places pour 100 000
adultes de 20 ans et plus en 2017. Là encore, la
Lozère se distingue par une offre très supérieure,
avec 675 places en Mas pour 100 000 habitants.
L’ampleur des disparités territoriales est similaire à celle observée pour les Fam, même si elle
concerne des territoires un peu différents. Ainsi,
les départements tels que la Haute-Savoie, Paris
et les Hauts-de Seine ont des densités de places en
Mas inférieures à 25 pour 100 000 habitants âgés
de 20 ans ou plus, alors qu’à l’opposé du gradient,
les Hautes-Pyrénées, la Creuse, la Corrèze offrent
plus de 150 places en Mas pour 100 000 habitants
(carte 19).
Lorsque les solutions visant à maintenir en milieu
ordinaire les individus atteints de handicap psychique échouent, notamment pour les individus
avec les troubles les plus sévères, il existe, inégalement réparties sur le territoire, des solutions
d’hébergement pour ces individus : logements individuels avec accompagnement, regroupements
de logements individuels avec accompagnement
(résidence-accueil par exemple), appartements
collectifs, structures sociales ou médico-sociales
d’hébergement, familles d’accueil, logements accompagnés. Ces diverses modalités d’accueil et
d’hébergement relèvent d’acteurs multiples des
champs sanitaires, sociaux, médico-sociaux ou du
milieu ordinaire. Certaines sont des logements,
dans lesquels la personne est titulaire de son bail,
d’autres sont des hébergements (par exemple, les
foyers de vie). Plusieurs structures d’hébergement
médico-social accueillent en particulier des personnes en situation de handicap psychique avec
différents niveaux d’accompagnement et de soins,
qui sont proposés en fonction de l’autonomie et
des besoins de la personne.
Entre 2007 et 2017, le nombre de places en Fam
ou en Mas est passé de 30 357 à 57 250, soit une
progression de près de 90 %, afin de mieux répondre à la demande de la population.
Les foyers d’accueil médicalisé (Fam) accueillent
des personnes avec un niveau de dépendance totale ou partielle rendant impossible l’exercice
d’une activité professionnelle et nécessitant l’assistance d’une tierce personne pour effectuer la
plupart des actes essentiels à la vie courante. Les
Fam sont des structures de vie qui tendent à favoriser l’ouverture sociale des personnes en leur
apportant un soutien éducatif afin de développer
leur autonomie, et fournissent en parallèle un suivi médical. En 2017, la densité nationale de places
Aujourd’hui, on note une diversification des Fam
et des Mas, à travers notamment la mise à disposition de plateaux techniques en soutien à d’autres
établissements et services médico-sociaux, le développement d’une fonction-ressource visant à
appuyer la montée en compétence des autres établissements et la gestion des situations complexes,
la possibilité d’hospitalisation à domicile en établissement médico-social ou encore la création de
Mas externalisées permettant de vivre à domicile.
Le développement de l’accueil de jour, de l’hé-
46
Atlas de la santé mentale en France
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Densité de places installées en Foyers d’accueil médicalisé (Fam)
1
CARTE 18
Pour 100 000 habitants
de 20 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
247,0
A Guadeloupe
84,1
France
60,9
20 km
63,7
51,5
B Martinique
40,5
0,0
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Finess 2017, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Densité de places installées en Maisons d'accueil spécialisée (Mas)
Pour 100 000 habitants
de 20 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
674,8
A Guadeloupe
84,4
70,5
France
58,6
20 km
56,4
B Martinique
42,6
21,9
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Finess 2017, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
47
CARTE 19
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
bergement temporaire et de l’accueil séquentiel à
temps partiel est également encouragé au sein des
Mas, Fam et foyers de vie (voir ci-dessous) afin de
répondre de manière souple aux besoins des personnes en évitant les ruptures de parcours.
Les foyers de vie ou foyers occupationnels ont pour vocation d’accueillir des personnes
adultes handicapées dont le degré d’autonomie
ne relève pas d’une admission en Fam, en Mas ou
en Etablissement spécialisé d’aide par le travail
(Esat). Ces foyers proposent des activités quotidiennes diversifiées, adaptées au handicap des
personnes, et ont aussi pour mission de stimuler
leur autonomie. Plusieurs modalités d’accueil y
sont offertes : internat, semi-internat ou accueil
de jour uniquement.
Le foyer d’hébergement se différencie du
foyer de vie, sa principale mission étant de fournir un hébergement aux travailleurs handicapés
exerçant une activité professionnelle en milieu
ordinaire, adapté ou en établissement spécialisé
d’aide par le travail. Leur objectif est d’améliorer
l’intégration sociale et l’autonomie des personnes
en leur proposant un hébergement collectif ou un
logement individuel, en internat complet ou à la
semaine. Ce type de structure est souvent annexé
à un Esat.
En 2017, on compte 103 places installées en foyers
de vie et d’hébergement pour 100 000 adultes
de 20 ans et plus. Là encore, la Lozère fait figure
d’exception avec plus de 900 places pour 100 000
adultes. Ces structures sont marquées par les
disparités territoriales les plus fortes, les capacités variant de moins de 20 places pour 100 000
adultes dans les départements corses et la HauteMarne à plus de 200 dans le Tarn, le Tarn-etGaronne, la Corrèze et la Nièvre (carte 20).
Lorsque les troubles psychiques n’entraînent pas
une admission en institution médico-sociale, des
modalités d’habitat alternatif peuvent être proposées, permettant un maintien dans le milieu de vie
ordinaire. Le « logement accompagné » désigne
une variété de pratiques fondées sur l’insertion
par le logement. Celle-ci permet de renforcer l’autonomie des personnes tout en favorisant le maintien et le développement de leurs liens sociaux.
Le logement peut être individuel ou collectif et la
personne bénéficie d’un accompagnement adapté
à ses besoins et à sa capacité d’autonomie.
La maison relais est un habitat communautaire
de petite taille associant des logements privatifs à
48
Atlas de la santé mentale en France
des espaces de vie collectifs sous la direction d’un
hôte chargé d’en assurer le bon fonctionnement.
Ces résidences offrent un logement, sans limitation de durée, aux personnes dont la nature des
troubles, et les difficultés engendrées, empêchent
leur accès à un logement individuel autonome.
Ces maisons s’adressent à l’ensemble des personnes désocialisées et démunies en leur offrant
un lieu de vie convivial et sécuritaire.
La résidence d’accueil est une déclinaison de la
maison relais. Elle est spécifiquement dédiée à
l’accueil durable des personnes adultes en situation de handicap psychique souffrant de précarité
ou d’exclusion sociale. Ces personnes, suffisamment stabilisées pour vivre dans un logement individuel, nécessitent encore un suivi par un service d’accompagnement médico-social modulable
suivant l’évolution de leurs besoins.
D’autres pratiques coexistent sur l’ensemble du
territoire, parmi lesquelles les appartements
accompagnés ou le programme « Un chez soi
d’abord ». Le premier est un logement mis à disposition par une association qui assure le rôle de
tiers entre le propriétaire ou le bailleur et la personne en situation de handicap psychique suivie
par un service d’accompagnement. Ce dispositif
se base sur l’intermédiation locative de logement
relais ou de bail glissant. Le second est une expérimentation mise en place depuis 2010 qui vise à
faciliter l’accès au logement et aux soins des personnes sans domicile souffrant de troubles psychiatriques sévères qui s’inspire des expériences
étrangères « Housing first » (Aubry et al., 2015 ;
Whittaker et al., 2015). Le programme « Un chez
soi d’abord » se répand maintenant sur le territoire français sous la forme d’appartement de
coordination thérapeutique. Ces appartements
désormais inclus dans la liste des établissements
et services sociaux et médico-sociaux ont leurs
dépenses de fonctionnement prises en charge par
l’Assurance maladie.
En 2014, la répartition géographique des 11 528
places en logement accompagné de type maisons-relais et pensions de famille, disponibles en
France reflète quelques disparités mais dans une
moindre mesure que pour les autres types d’hébergements médico-sociaux. La densité nationale
moyenne est de 22 places pour 100 000 habitants
de 20 ans et plus et oscille entre moins de 10
places pour la Réunion, la Haute-Corse, l’Aube, la
Guadeloupe, les Yvelines, la Corrèze, le Calvados,
l’Isère, à plus de 60 places en Lozère, HauteMarne, Lot-et-Garonne (carte 21).
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
Densité de places installées en foyers de vie et d'hébergement
1
CARTE 20
Pour 100 000 habitants
de 20 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
911,9
A Guadeloupe
151,4
119,5
France
103,3
20 km
102,0
B Martinique
66,2
10,1
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Finess 2017, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Densité de logements accompagnés (maisons relais, pensions de famille...)
Pour 100 000 habitants
Départements et
régions d'outre-mer
85,2
A Guadeloupe
32,5
25,2
France
22,0
20 km
20,9
14,6
B Martinique
0,0
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Score-Santé 2014. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
49
CARTE 21
1
L’offre de soins et services en santé mentale dans les territoires
***
L’offre de soins et services à destination des personnes souffrant de troubles psychiques en France
a longtemps été centrée sur les prises en charge
sanitaires (notamment en milieu hospitalier). Elle
se caractérise désormais par sa diversité (offre sanitaire en ville et à l’hôpital, ambulatoire ou non,
spécialisée ou non ; offre médico-sociale ; offre
citoyenne ou initiée par les pairs). On observe en
particulier une volonté de maintenir et intégrer
autant que possible les individus en situation de
handicap psychique en milieu de vie ordinaire et
de garantir le plein exercice de leurs droits de citoyens par une offre de services adaptés à ces objectifs d’inclusion.
Des disparités géographiques dans la répartition
de l’offre persistent néanmoins. Bien que les déterminants à l’origine de ces disparités ne soient
pas totalement élucidés, elles n’apparaissent pas
liées uniquement à des différences de besoins de
soins entre les populations desservies. Cela questionne l’équité des prises en charge et services
proposés selon les territoires.
Ces caractéristiques de l’offre de soins et services à
destination des individus vivant avec des troubles
psychiques (diversité, caractère évolutif, développement variable selon les territoires) rendent cette
offre complexe et parfois difficilement lisible, d’autant que de nombreux acteurs, décideurs et financeurs y sont impliqués, ce qui concourt à rendre
l’articulation entre les différents types d’offre peu
aisée. C’est d’ailleurs tout l’enjeu des Projets territoriaux de santé mentale (PTSM) qui doivent être
mis en place par l’ensemble des acteurs impliqués
dans la prévention, le soin et l’accompagnement
des troubles psychiques, dans les territoires en
2020. Coordination, co-construction, repositionnement des acteurs dans un objectif d’amélioration de la qualité de vie et des soins des personnes
vivant avec un trouble psychique constituent ainsi
les principes majeurs de l’évolution de la politique
de santé mentale redéfinie par la loi de modernisation du système de santé de 2016.
Remerciements relecteurs : Fanny Bouarek (Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, CNSA), Alain Monnier (Union nationale
de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques, Unafam), Nadia Younès (EA 4047 Handiresp, Université
Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines).
50
Atlas de la santé mentale en France
chapitre
2
Les enfants et adolescents
Valérie Carrasco1, Inès Khati1
1
Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees)
E
n 2017, la France compte près de 15 millions de personnes âgées de moins de 18
ans, soit près d’un quart de la population française. Les troubles psychiques peuvent
se manifester à différents âges mais les premiers
signes apparaissent souvent au cours de l’enfance
et de l’adolescence (Kessler et al., 2001 ; Rosa et
al., 2003). En effet, 75 % des affections psychiatriques débutent avant 25 ans et la moitié avant
15 ans1. Selon les estimations, entre 10 et 20 % des
enfants et adolescents seraient touchés par un ou
plusieurs troubles psychiques*, qui peuvent être
de durée et de sévérité très variables. À l’adolescence, la dépression* constitue la troisième cause
de morbidité selon l’Organisation mondiale de la
santé (OMS).
Les troubles psychiques pouvant avoir des conséquences à long terme entraînent des coûts sociaux
et économiques élevés : « L’introduction au Plan
psychiatrie et santé mentale 2011-2015 rappelle
que les coûts collatéraux liés à la perte de production et de qualité de vie atteindraient près de 80
milliards d’euros chaque année, soit plus de 3,5
points de Produit intérieur brut (PIB) [Million,
Amiel, 2017]. » Or, un repérage et une prise en
charge précoces réduisent les risques de développement et de chronicisation de ces troubles, a
fortiori sur une population jeune. Rappelons que
le suicide est la deuxième cause de mortalité des
15-24 ans, après les accidents de la route, et que la
maladie mentale est le premier facteur de risque
1
des décès par suicide. La prévention en santé
mentale s’avère donc cruciale pour les jeunes. En
France, plusieurs types d’intervention en promotion et prévention en santé mentale sont développés dans les territoires : programmes centrés sur
le développement des compétences parentales,
développement des compétences psycho-sociales,
actions d’information et de prise en charge des
conduites addictives, interventions contre les violences et les discriminations, prévention du suicide notamment. Ces actions, conduites par une
multiplicité d’acteurs, relevant des champs associatif, sanitaire et socio-éducatif, rendent difficile
leur recensement exhaustif et l’analyse de leur
couverture territoriale. Le site Oscarsante vise à
observer et suivre les actions régionales de santé,
et permet un premier recensement sur les actions
de prévention en santé mentale menées sur les
territoires (http://oscarsante.org).
Les troubles psychiques des mineurs se caractérisent par la variabilité de leur gravité et leur caractère souvent transitoire (CESE, 2010) rendant
parfois difficile l’établissement d’un diagnostic. La
prise en charge des jeunes mineurs est d’autant
plus spécifique que la demande de soins émane
souvent d’une tierce personne, les parents, l’école
ou encore la Justice. Ces spécificités appellent
une intervention pluridisciplinaire et une certaine souplesse dans l’appréhension et la prise en
charge des troubles afin d’éviter de séparer les mineurs de leur milieu de vie, de provoquer des rup-
www.who.int/mediacentre/news/releases/2014/focus-adolescent-health/fr/
Atlas de la santé mentale en France
51
2
Les enfants et adolescents
tures dans le parcours scolaire, à l’occasion d’une
hospitalisation ou d’un accueil dans une structure
médico-sociale.
troubles psychiques, décrite dans le chapitre 1, est
par ailleurs très variable d’un territoire à l’autre et
peut contribuer à des recours aux soins différenciés en termes d’opérateurs.
L’offre de santé et d’accompagnement à destination des enfants et adolescents vivant avec des
2.1
Des informations lacunaires sur le recours aux soins
des enfants et adolescents en santé mentale…
Les informations permettant de caractériser l’état
de santé mentale des enfants et adolescents sont
lacunaires, particulièrement à des échelles géographiques fines. En France, des enquêtes fournissent cependant des estimations nationales de
la prévalence* en population générale qui sont
proches des estimations internationales. Ainsi,
selon l’Inserm, 12 % des enfants et adolescents
souffriraient d’au moins un trouble psychique en
France. Cette évaluation regroupe des troubles de
fréquence, de gravité, d’âge d’apparition et de durée très variables et diffèrent en partie, en proportion, de ceux observés dans la population adulte :
5 % des enfants souffrent de troubles anxieux*, et 1
à 2 % sont hyperactifs. À l’adolescence, les troubles
de l’humeur* augmentent puisqu’ils touchent 3 %
des 13-19 ans2. La boulimie* concerne 1 % des
jeunes filles de 17 à 19 ans, et l’anorexie* affecte
0,2 % des adolescentes de 15 à 19 ans. Les troubles
du spectre autistique* et les troubles schizophréniques* touchent pour leur part moins de 1 % des
enfants et des adolescents (Institut national de la
santé et de la recherche médicale, 2002). Le baromètre santé 2014, enquête nationale réalisée
par Santé publique France3, évalue la prévalence
des tentatives de suicide sur les douze derniers
mois à 2,6 % pour les filles de 15-19 ans et à 0,5 %
pour les garçons du même âge, et celle des pensées suicidaires à respectivement 3,9 % et 2,2 %
(Observatoire national du suicide, 2016).
2
3
Afin d’approcher les disparités territoriales de
santé mentale des jeunes, il est possible de mobiliser les bases de données médico-administratives
issues du système d’information national en santé.
Ces bases de données exhaustives, alimentées lors
du recours aux soins hospitalier ou ambulatoire,
renseignent indirectement sur la santé mentale
des jeunes et permettent d’observer des disparités entre les territoires. Ces indicateurs de recours
à différentes formes de soins ne dépendent pas
seulement de l’état de santé de la population mais
reflètent également l’intensité du recours ou les
pratiques des professionnels de santé, qui peuvent
être associées au niveau ou à la composition de
l’offre de soins sur les territoires (chapitre 1).
Un rapport plus récent (2015) aboutit à une estimation de la prévalence de l’épisode dépressif majeur chez les 13-18 ans
à 5,6 % (Brunelle, Cohen, 2015).
Le Baromètre était réalisé par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes) jusqu’à sa fusion en
2016 avec l’Institut de veille sanitaire (InVS) et l’Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires
(Eprus), pour créer Santé publique France.
52
Atlas de la santé mentale en France
Les enfants et adolescents
2.2
... et des facteurs de risque variés selon les territoires
Les facteurs de risque des troubles psychiques, en
particulier environnementaux, peuvent en outre
être liés à des caractéristiques du territoire. Si certains facteurs de risque environnementaux de la
dépression sont communs aux adolescents et aux
adultes (violences et abus sexuels dans l’enfance,
pauvreté, être issu d’une minorité, isolement social, stress, harcèlement, etc.), d’autres sont spécifiquement associés à la dépression de l’adolescence (problèmes périnataux, déficit moteur, rupture et instabilité dans la fonction parentale, criminalité et psychopathie dans la famille, troubles
du comportement et émotionnels dans l’enfance,
etc.) [Brunelle, Cohen, 2015]. De même, les principaux facteurs associés à une tentative de suicide
sont similaires pour les adolescents et les adultes
(négligences, violences, sexuelles et autres,
trouble dépressif sévère, pauvreté, consommation
de produits psychoactifs, etc.) [Janssen, Spilka,
2016]. L’isolement et la précarité sociale semblent
cependant moins déterminants pour les jeunes
que pour les adultes (François et al., 2011).
Les territoires présentent des caractéristiques
différentes au regard de ces facteurs de risque.
Ainsi, selon les départements, la part d’enfants
vivant dans une famille monoparentale varie de
13 à 29 % en métropole et atteint 50 % dans les
Départements et régions d’outre-mer (Drom)
[carte 22]. La part des enfants de moins de 6 ans
vivant sous le seuil de pauvreté varie de 11 à 30 %
(carte 23 p. 54) et la part de jeunes faisant
l’objet d’un placement ou d’une mesure éducative
dans le cadre de l’Aide sociale à l’enfance (Ase) de
1 à 4 % (carte 24 p. 54). Plusieurs études ont
mis en avant une vulnérabilité et une souffrance
psychique accrue des enfants placés* (Bronsard et
al., 2008 ; Rozé, 2016).
Part des enfants vivant dans une famille monoparentale
Pour 100 habitants
de moins de 18 ans
Départements et
régions d'outre-mer
50,2
A Guadeloupe
21,6
19,8
20 km
18,1
B Martinique
16,9
13,0
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Source : Insee RP 2013. Infographie : Irdes 2019-20.
2
Atlas de la santé mentale en France
53
CARTE 22
2
CARTE 23
Les enfants et adolescents
Taux de pauvreté des moins de 6 ans
Pour 100 enfants
de moins de 6 ans
Départements et
régions d'outre-mer
30,0
A Guadeloupe
22,0
19,0
20 km
18,0
B Martinique
15,0
11,0
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Insee, FiloSofi 2013. Infographie : Irdes 2019-20.
CARTE 24
Taux de mesures éducatives ou placements dans le cadre de l’Aide sociale à l’enfance (Ase)
Pour 100 habitants
de moins de 18 ans
Départements et
régions d'outre-mer
4,2
A Guadeloupe
2,5
2,3
1,9
20 km
France
1,9
B Martinique
1,6
0,9
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Drees 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
54
Atlas de la santé mentale en France
20 km
Les enfants et adolescents
2.3
Diversité de la prise en charge des enfants et adolescents
pour troubles psychiques
Le rapport Moro-Brison (2016) estime « à près
d’un million le nombre de jeunes ayant consulté
au moins une fois au cours de l’année dans une
structure dédiée à la prise en charge des troubles
psychiques », toutes structures confondues. Pour
autant, le système d’information actuel ne permet pas de dénombrer précisément les enfants et
adolescents qui ont fait l’objet d’une double prise
en charge sanitaire et médico-sociale au cours de
l’année, ni ceux qui ont consulté un psychologue
libéral, un médecin généraliste ou un pédiatre
pour un problème de santé mentale4. Malgré ces
limites, les chiffres suivants, par grands segments
de l’offre de soins et d’accompagnement, confirment cet ordre de grandeur.
Sur l’ensemble du territoire, environ 500 000 personnes âgées de moins de 18 ans ont été prises en
charge en 2015 par un établissement de santé autorisé en psychiatrie (public ou privé), en ambulatoire, à temps partiel ou complet (figure 2). Un
peu moins de 100 000 bénéficient d’une prise en
charge pour ALD psychiatrique (la plupart pour
des troubles envahissants du développement*).
Environ 30 000 personnes de moins de 18 ans ont
été hospitalisées dans un service de MCO pour un
motif psychiatrique et 8 000 jeunes de 12 à 17 ans
à la suite d’une tentative de suicide5. Ce dernier
chiffre ne représente qu’une part des tentatives
de suicide prises en charge à l’hôpital, celles non
suivies d’hospitalisation après un passage aux ur-
Nombre de mineurs ayant eu recours à des soins de santé mentale en 2015,
selon le type de soins
Prise en charge
médico-sociale
Prise en charge en établissement
de santé autorisé en psychiatrie
Prise en charge
ambulatoire
de ville
486 026
175 160
49 743
Ambulatoire
public
32 342
159 536
65 010
30 311
Hospitalisation
Hospitalisation
MCO
en psychiatrie
Temps Temps
Motif
Tentacomplet partiel psychia- tive de
trique suicide
51 000
69 900
63 532
15 200
8 238
CMPP1
CAMSP2
Itep3
Sessad4
(24 %)
IME5
(18 %)
Psychiatres Psycholibéraux
tropes
Centres médico-psycho-pédagogiques ; 2 Centres d’action
médico-sociale précoce ; 3 Instituts thérapeutiques, éducatifs
et pédagogiques ; 4 Services d’éducation spéciale et de soins
à domicile ; 5 Instituts médico-éducatifs ;
1
Sources : Rim-P, PMSI-MCO, Enquête ES, Sniiram. Infographie : Irdes 2020.
4
5
2
L’absence de système d’information dans le champ médico-social ne permet pas de connaître précisément le nombre
d’individus concernés ni les passerelles existantes avec le champ sanitaire. D’autre part, les prises en charge sanitaires
non remboursées par l’Assurance maladie échappent également au système d’information. Enfin, le motif de consultation des professionnels de santé libéraux n’est pas renseigné dans les données de l’Assurance maladie.
Les spécifications de codage des tentatives de suicide dans le Programme de médicalisation des systèmes d'information
(PMSI) imposent de coder la tentative de suicide en diagnostic associé, et d’indiquer en diagnostic principal un code
Cim 10 en S ou T (lésions traumatiques, empoisonnements et autres conséquences de causes externes). Si on adopte
une définition moins stricte qui retient tous les séjours avec un diagnostic associé de tentative de suicide (codes X60 à
X84), quel que soit le diagnostic principal, on arrive à un total d’environ 10 000 jeunes de 12 à 17 ans hospitalisés pour
ce motif.
Atlas de la santé mentale en France
55
FIGURE 2
2
Les enfants et adolescents
gences n’étant pas dénombrées. Or, seulement la
moitié des adolescents venus aux urgences pour
ce motif sont ensuite hospitalisés en MCO (Chan
Chee, Jezewski-Serra, 2014). La carte départementale des taux d’hospitalisation pour tentative
de suicide des 12-18 ans fait état de disparités territoriales importantes, les départements du nord
de la France étant particulièrement concernés
(carte 25).
Les jeunes vivant avec des troubles psychiques
peuvent également être pris en charge par une
structure médico-sociale, essentiellement en
Centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP)*,
Centres
d’action
médico-sociale
précoce
(CAMSP)*, Instituts médico-éducatifs (IME)*,
Instituts thérapeutiques éducatifs et pédagogiques
(Itep) ou Services d’éducation spéciale et de soins
à domicile (Sessad). L’offre d’accompagnement
à destination des enfants et adolescents est présentée dans l’encadré 1 du chapitre 1. Si la quasi-totalité des mineurs accueillis dans les CMPP,
les CAMSP et les Itep souffrent de troubles psy-
CARTE 25
chiques, il n’en va pas de même pour les IME et les
Sessad accueillant respectivement 18 et 24 % des
enfants avec des troubles psychiques au niveau
national. Les CMPP ont accueilli ainsi 175 000
enfants en 2014, les CAMSP 65 000 (Chan Chee,
Jezewski-Serra, 2014), les Itep 15 000, les IME
70 000 et les Sessad 51 000 (Falinower, 2016). Le
système d’information actuellement disponible
dans le champ médico-social ne permet pas de
décrire les disparités territoriales de recours à ces
structures d’accompagnement.
Le recours des enfants et adolescents aux professionnels de santé libéraux de ville pour un problème de santé mentale peut être en partie appréhendé par la consommation de psychotropes
et les consultations de psychiatres libéraux.
En 2015, 64 000 jeunes de moins de 18 ans ont
reçu au moins trois délivrances de psychotropes
et 150 000 jeunes ont consulté un psychiatre libéral, soit respectivement 0,4 et 1 % d’entre eux
(figure 2).
Taux d’hospitalisation pour tentative de suicide des 12-18 ans en 2015
Pour 10 000 habitants
de 12 à 18 ans
Départements et
régions d'outre-mer
47,6
A Guadeloupe
21,4
18,0
14,1
France
16,1
20 km
B Martinique
10,4
3,4
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : PMSI-MCO 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
56
Atlas de la santé mentale en France
20 km
Les enfants et adolescents
2.4
Un recours aux soins des moins de 18 ans qui s’exerce
prioritairement vers les établissements de santé
autorisés en psychiatrie et en ambulatoire
Parmi ces recours aux soins de santé mentale des
moins de 18 ans, le recours aux établissements
de santé autorisés en psychiatrie est majoritaire :
près de deux fois supérieur au cumul des différentes prises en charge médico-sociales et trois
fois plus fréquent que le recours aux psychiatres
libéraux. Cette prise en charge en établissement
concerne 3,5 % des jeunes de moins de 18 ans et
se fait en ambulatoire* dans 90 % des cas. Les
données ne permettent pas d’identifier les prises
en charge parallèles par plusieurs intervenants
sanitaires ou médico-sociaux. Quelle que soit la
structure ou le professionnel contacté, le recours
ambulatoire est majoritaire chez les enfants et
adolescents, pour lesquels le maintien dans le milieu de vie est privilégié.
Au sein des établissements de santé, le recours
ambulatoire peut prendre plusieurs formes et
varie selon les âges et les pathologies. Même s’il
reste le principal mode de recours aux soins de
santé mentale pour l’ensemble des tranches d’âge,
il est plus élevé chez les 12-17 ans que chez les
plus jeunes qui, pour une partie d’entre eux, sont
orientés vers les CAMSP et CMPP. Les consultations en CMP constituent la principale modalité
de prise en charge ambulatoire, 81 % des mineurs
suivis en ambulatoire en établissement de santé
ont été vus en CMP. 6 % ont été suivis en CATTP,
dont l’indication est adaptée à des troubles plus
sévères. Les soins ambulatoires à domicile restent
rares pour les mineurs (2 % des jeunes pris en
charge, contre 8 % pour les adultes).
L’intensité de la prise en charge ambulatoire diffère d’une personne à l’autre. Un jeune sur cinq
n’a été vu qu’une seule fois au cours de l’année.
Cela peut correspondre à une consultation pour
avis ou orientation, sans prise en charge au sein
de l’établissement. Ces actes uniques représentent
moins de 2 % de l’ensemble des actes et sont le
plus souvent effectués par des médecins (50 %
contre 18 % pour l’ensemble).
Le recours aux soins de ville des enfants et
adolescents pour un problème de santé mentale
apparaît moins fréquent que le recours ambulatoire en établissement de santé. 1,1 % des moins
de 18 ans ont consulté un psychiatre en ville en
2015 et 0,4% ont eu au moins trois délivrances de
psychotropes*. Cependant, une partie du recours
aux soins de ville des jeunes ne peut être observée par le système d’information actuel, il s’agit
notamment du recours aux psychologues ou aux
médecins généralistes pour un problème de santé
mentale (les motifs de consultation en ville n’étant
pas renseignés dans les données recueillies).
Par ailleurs, certaines situations nécessitent une
intensité de soins ou d’accompagnement plus
importante. 33 000 jeunes ont été hospitalisés
à temps partiel* (de jour ou de nuit) en psychiatrie, soit 0,2 % des jeunes de moins de 18 ans, un
taux de recours similaire à celui observé pour les
CATTP. Cette prise en charge concerne surtout les
populations plus jeunes : 22 400 jeunes de 0 à 11
ans ont été hospitalisés à temps partiel, et 10 600
jeunes de 12 à 17 ans. En revanche, les prises en
charge à temps complet en psychiatrie sont moins
fréquentes pour des populations jeunes (0,1 %
des mineurs concernés en 2015). Moins de 4 000
jeunes de moins de 12 ans ont été pris en charge à
temps complet en psychiatrie en 2015, et la moitié
l’ont été dans des structures alternatives à l’hospitalisation à temps plein (accueil familial thérapeutique notamment). L’hospitalisation à temps
plein des adolescents est plus fréquente : 16 600
jeunes âgés de 12 à 17 ans ont été pris en charge
à temps complet* en psychiatrie, majoritairement
en hospitalisation à temps plein*. Les capacités
d’hospitalisation en psychiatrie infanto-juvénile
étant restreintes et diversement réparties sur le
territoire, avec 2 300 lits pour l’ensemble du pays
(chapitre 1), il arrive que cette hospitalisation se
fasse dans des services de psychiatrie générale.
C’est le cas de plus d’un mineur sur cinq hospitalisé à temps plein en psychiatrie en France. Ces
hospitalisations dans des services adultes peuvent
s’accompagner de mesures d’isolement afin de
protéger le jeune ou lors de situations d’hétéroagressivité*, d’agitation, dans 18 % des cas (6 %
pour l’ensemble des mineurs hospitalisés à temps
plein en psychiatrie). L’hospitalisation peut également avoir lieu dans des services de pédiatrie, en
MCO, souvent perçue comme moins stigmatisante
et réservée aux tranches d’âge les plus jeunes.
Cette situation est d’ailleurs plus fréquente que
l’hospitalisation à temps plein en psychiatrie pour
les moins de 12 ans : près de 11 000 jeunes ont
été hospitalisés en pédiatrie pour des problèmes
de santé mentale. En revanche, pour les adolescents, les taux d’hospitalisation en MCO et en
Atlas de la santé mentale en France
57
2
2
Les enfants et adolescents
psychiatrie sont du même ordre. De fait, même si
la pédiatrie offre une prise en charge moins stigmatisante que la psychiatrie, y accueillir des ado-
2.5
Des modalités de prise en charge variables
selon l’âge et les pathologies suivies
Le recours aux différents modes de prises en charge
dépend non seulement de l’âge mais également du
diagnostic, disponible uniquement pour les prises
en charge en établissement de santé. Cependant,
16 % des mineurs qui y sont suivis n’ont pas de
diagnostic principal renseigné lors de leur séjour
hospitalier ou prise en charge ambulatoire. Ce
taux est supérieur à celui observé chez les adultes
suivis en psychiatrie. À cela, diverses causes dont :
une prise en charge visant à établir un diagnostic,
un refus de la part du psychiatre de poser précocement certains diagnostics, ou encore, l’inadaptation des codes de la Cim 10 à la pédopsychiatrie6.
Les « troubles mentaux et du comportement » représentent les trois quarts des diagnostics renseignés. Mais, pour nombre d’entre eux, le diagnostic
principal peut renvoyer au chapitre de la Cim 10
« Facteur influant sur l’état de santé et motifs de
recours aux services de santé » qui reflète la présence de symptômes ou de demandes d’évaluation
plus que des pathologies avérées.
Les pathologies prises en charge en établissement
de santé diffèrent sensiblement selon l’âge et le
mode de prise en charge (figure 3). Pour les enfants de moins de 12 ans, les « troubles du comportement et troubles émotionnels apparaissant habituellement pendant l’enfance » arrivent en tête
(29 % des enfants). Ils consistent essentiellement
en troubles des conduites (6 %), troubles émotionnels (9 %), troubles mixtes (3 %) et troubles
hyperkinétiques (5 %). Les « troubles du développement psychologique » constituent le deuxième
motif de prise en charge des enfants de moins de
12 ans (21 %), surtout des « troubles envahissant
du développement» (TED, dont les troubles du
spectre autistique). Enfin, les « troubles névrotiques*, troubles liés à des facteurs de stress et
troubles somatoformes* » concernent 12 % des
enfants pris en charge, le plus souvent « troubles
6
lescents est plus difficile, ces derniers nécessitant
souvent une prise en charge plus « contenante »,
que la pédiatrie ne peut pas toujours proposer.
réactionnels à un facteur de stress sévère et
troubles de l’adaptation » (7 %).
Premiers motifs aussi de prise en charge des adolescents de 12 à 17 ans, ces trois grandes catégories
de pathologies se répartissent différemment : les
« troubles névrotiques, troubles liés à des facteurs
de stress et troubles somatoformes* » sont nettement plus fréquents (21 %, avec 11 % de « réaction
à un facteur de stress sévère et troubles de l’adaptation » et 6 % de troubles anxieux non phobiques)
et les troubles du développement psychologique
ne sont plus retrouvés que pour 9 % des adolescents suivis en psychiatrie. On constate également
une diversification des troubles, 17 % des adolescents pris en charge présentant une autre catégorie de diagnostic : « troubles de l’humeur » (7 %),
« troubles de la personnalité et du comportement
chez l’adulte » (3 %), « syndromes comportementaux associés à des perturbations physiologiques
et à des facteurs physiques » (3 %, essentiellement
troubles du comportement alimentaire), troubles
psychotiques (2 %) et « troubles mentaux et du
comportement liés à l’utilisation de substances
psychoactives » (1 %), ces pathologies émergeant
généralement à un âge plus avancé.
Cette répartition des diagnostics reflète essentiellement celle de la prise en charge ambulatoire,
qui concerne 90 % des mineurs pris en charge en
psychiatrie en établissement de santé. Elle diffère
en hospitalisation complète ou partielle, davantage indiquée dans le cas de troubles plus sévères
ou installés, ou en situations de crise. D’ailleurs,
dans le cadre de ces prises en charge, un diagnostic psychiatrique est plus fréquemment renseigné.
Pour les moins de 12 ans, dont la prise en charge
en hospitalisation se fait essentiellement à temps
partiel, un diagnostic psychiatrique est ainsi ren-
En particulier, les pédopsychiatres peuvent lui préférer la Classification française des troubles mentaux de l’enfant et
de l’adolescent (CFTMEA) qui s’intègre à une « approche pluridimensionnelle rendant possible la saisie des contraintes
organiques pesant sur l’enfant, les effets des événements de la vie ayant marqué sa trajectoire ainsi que ceux liés à son
environnement familial et social ».
58
Atlas de la santé mentale en France
Les enfants et adolescents
Part des mineurs pris en charge en psychiatrie en établissement de santé par grande catégorie
diagnostique, selon la tranche d’âge (plus ou moins de 12 ans)
Pourcentage de
mineurs concernés
0-11 ans
12-17 ans
30
25
20
15
10
5
0
ND
F0
F1
F2
F3
F4
F5
F6
F7
F8
F9
Z
F0
F1
F2
F3
F4
F5
F6
F7
Classes Cim 10 du diagnostic principal
F9
Z
Autres
Troubles mentaux organiques, y compris les troubles symptomatiques
Troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de substances psychoactives
Schizophrénie, troubles psychotiques
Troubles de l’humeur
Troubles névrotiques, troubles liés à des facteurs de stress et troubles somatoformes
Syndromes comportementaux associés à des perturbations
Troubles de la personnalité et du comportement
Retard mental
Troubles du développement psychologique
Troubles du comportement et troubles émotionnels (hors troubles mentaux)
Facteurs influençant l’état de santé
Source : Rim-P 2015. Infographie : Irdes 2020.
seigné pour 84 % d’entre eux. Il s’agit principalement de « troubles du développement psychologique » indiqués pour plus de la moitié des
enfants pris en charge en hospitalisation partielle
(55 %). Il s’agit essentiellement des troubles envahissants du développement (40 % des enfants).
En revanche, les « troubles du comportement et
troubles émotionnels apparaissant habituellement pendant l’enfance » sont moins fréquents
qu’en ambulatoire, même s’ils sont indiqués pour
22 % des enfants. Toutes les autres grandes catégories de diagnostics concernent moins de 3 %
des enfants (figure 4 p. 60).
Pour les adolescents de 12 à 17 ans pris en charge
en hospitalisation complète ou partielle, les absences de diagnostic principal et les « facteurs
influant sur l’état de santé et motifs de recours
aux services de santé » sont également beaucoup
moins fréquents qu’en ambulatoire. Concernant
les diagnostics médicaux, l’hospitalisation à
temps complet se caractérise par l’importance
des troubles de l’humeur, indiqués pour 16 % des
F8
adolescents pris en charge. Les troubles psychotiques et les « troubles de la personnalité et du
comportement chez l’adulte » sont également nettement plus fréquents qu’en ambulatoire (concernant respectivement 8 et 7 % des adolescents).
Enfin, 2,5 % des adolescents sont pris en charge
pour troubles liés à des substances psychoactives
(figure 4 p. 60).
Comme pour les plus jeunes, l’hospitalisation à
temps partiel se démarque de la prise en charge
ambulatoire par une part beaucoup plus importante d’adolescents ayant un trouble du développement psychologique (24 %), essentiellement troubles envahissants du développement
(19 %), et de façon moindre, par des diagnostics
de troubles psychotiques plus fréquents (6 %) (figure 4 p. 60).
L’hospitalisation des enfants de moins de 12 ans
pour motif psychiatrique est aussi fréquente dans
un service de MCO que dans un service psychiatrique. Les diagnostics sont alors assez proches
Atlas de la santé mentale en France
59
2
FIGURE 3
2
FIGURE 4
Les enfants et adolescents
Part des mineurs pris en charge en établissements psychiatriques concernés
par chaque grande catégorie de diagnostics,
selon le mode de prise en charge et l’âge (plus ou moins de 12 ans)
Hospitalisation à temps plein
Hospitalisation à temps partiel
Ambulatoire
Enfants
0-11 ans
Adolescents
12-17 ans
0,3 0,4
0,2 0,3
0,1 0,1
F0. Troubles mentaux organiques,
y compris les troubles
symptomatiques
F1. Troubles mentaux et du
comportement liés à l’utilisation
de substances psychoactives
0,0
2,4
0,0 0,5
0,0 0,9
0,8
0,3
0,1
F2. Schizophrénie,
troubles psychotiques
1,6
0,3
0,9
F3. Troubles de l'humeur
F4. Troubles névrotiques, troubles
liés à des facteurs de stress
et troubles somatoformes
6,7
11,8
1,3
7,8
5,6
2,9
1,8
0,7
1,4
5,3
3,1
2,4
F6. Troubles de la personnalité
et du comportement
2,0
1,1
0,8
7,5
5,0
2,6
F8. Troubles du développement
psychologique
2,2
2,5
1,0
8,4
20,0
F9. Troubles du comportement
et troubles émotionnels
(hors F99. Trouble mental)
29,9
29,1
24,0
26,5
24,2
18,4
9,5
5,8
7,5
5,1
2,4
1,1
2,3
Autres
Diagnostics non renseignés
17,2
50
40
24,3
8,9
22,5
Z. Facteurs influençant sur l’état
de santé
60
20,5
2,4
2,2
1,1
36,6
55,1
20,9
12,6
F5. Syndromes comportementaux
associés à des perturbations
F7. Retard mental
16,0
7,4
6,0
30
20
3,5
0,4
3,2
7,4
9,6
9,5
10
19,0
0
10
11,2
15,5
20
30
Pourcentages
Lecture : 37 % des mineurs de moins de 12 ans pris en charge en 2015 en hospitalisation à temps plein dans un établissement
psychiatrique ont eu un diagnostic du chapitre F8 de la Cim 10 « troubles du développement psychologique ».
Source : Rim-P 2015. Infographie : Irdes 2020.
60
Atlas de la santé mentale en France
Les enfants et adolescents
de ceux observés en psychiatrie, ce qui n’est pas
le cas pour les adolescents de 12-17 ans7. Les enfants de moins de 12 ans hospitalisés en pédiatrie
pour un problème de santé mentale sont en effet
majoritairement pris en charge pour des troubles
du développement psychologique (45 % d’entre
eux), mais ces troubles sont moins sévères qu’en
psychiatrie : il s’agit de troubles spécifiques de
la parole et du langage et de troubles spécifiques
des acquisitions scolaires (12 % chacun), et pour
seulement 8 % de troubles envahissants du développement, nettement moins fréquents qu’en psychiatrie. La deuxième grande catégorie de troubles
prise en charge en pédiatrie est constituée, comme
en psychiatrie, par les troubles du comportement
et troubles émotionnels apparaissant habituellement pendant l’enfance (31 % des enfants). Les
cas d’enfants suivis pour retard mental sont un
peu plus nombreux qu’en psychiatrie (7 % contre
2.6
Variabilité territoriale du recours aux soins
selon le mode de prise en charge et disparités d’offre
La variabilité territoriale du taux de recours aux
soins de santé mentale des jeunes est très différente d’un mode de prise en charge à l’autre et
n’est pas liée à sa fréquence (figure 5 p. 62
et carte 28 p. 64-p. 65). Ainsi, la prise en
charge ambulatoire en CMP est la plus répandue
mais présente un coefficient de variation du même
ordre (30 %) que des types de recours plus rares,
comme l’hospitalisation à temps complet en psychiatrie ou en MCO, ou encore la consommation
de psychotropes. En revanche, les taux de recours
départementaux aux CATTP et aux psychiatres libéraux sont très hétérogènes (avec des coefficients
de variation autour de 100 %).
Si le nombre de mineurs suivis en CATTP est relativement faible (moins de 30 000) et leur répartition sur le territoire peu corrélée à l’offre de
soins, à l’inverse le recours aux consultations de
psychiatres libéraux est nettement plus fréquent
(près de 160 000 mineurs concernés) et fortement
lié à l’offre de soins8, très inégalement répartie sur
le territoire (chapitre 1). La densité de psychiatres
7
8
2 %). Concernant les adolescents de 12 à 17 ans,
la différence majeure est la prise en charge pour
des troubles liés à l’utilisation de substances psychoactives, surtout l’alcool, catégorie diagnostique
quasiment inexistante comme motif principal de
prise en charge en psychiatrie, et qui concerne un
quart des adolescents hospitalisés en MCO pour
motif psychiatrique : 58 % de ces adolescents sont
hospitalisés dans les Unités d’hospitalisation de
courte durée des urgences (UHCD) et 31 % en pédiatrie. La seconde spécificité des adolescents pris
en charge en MCO est la fréquence de ceux qui
présentent un diagnostic de troubles de l’humeur
(20 %). Comme en psychiatrie, les « troubles névrotiques, troubles liés à des facteurs de stress
et troubles somatoformes » concernent 21 % des
adolescents et les « troubles du comportement
et troubles émotionnels apparaissant habituellement pendant l’enfance » un quart d’entre eux.
à Paris est en effet six fois supérieure à la moyenne
France entière et l’implantation des psychiatres libéraux reste globalement très concentrée dans les
grandes agglomérations urbaines (cartes 26 et 27
p. 63).
Une typologie permet d’affiner cette approche
des disparités territoriales en matière d’offre et
de recours aux soins des mineurs présentant des
troubles psychiques (encadré 2 p. 66). Elle fait
apparaître quatre configurations distinctes (carte
p. 67). Dans la classe 3 regroupant le plus de
départements (38) et couvrant 24 % de la population des 0 à 17 ans, un quart de la population
vit en zone rurale et présente des signes de vulnérabilité sociale. Ces départements se caractérisent
par une offre importante en soins hospitaliers
spécialisés en psychiatrie infanto-juvénile ainsi
qu’en services et accompagnement médico-sociaux. À cette offre est associé un recours élevé
vers ces structures spécialisées, semblant indiquer
une relativement bonne adéquation de l’offre à la
demande de soins. Dans une autre classe (1) re-
Dans les deux cas, psychiatrie et MCO, les parts de mineurs concernés par un diagnostic sont calculées par rapport à
l’ensemble des mineurs pris en charge, et non par rapport aux seuls mineurs pour lesquels un diagnostic est renseigné.
En effet, on ne peut assimiler la structure des cas où le diagnostic est non renseigné à celle des cas où il est connu ;
néanmoins, la grande variabilité de cette part de diagnostics inconnus selon le mode de prise en charge et l’âge (de 17 %
en ambulatoire à 0 % en MCO, par définition) rend la comparaison plus délicate.
Le coefficient de corrélation linéaire entre le taux de recours aux psychiatres des jeunes de moins de 18 ans et le nombre
de psychiatres libéraux par habitant de moins de 18 ans est de 0,8.
Atlas de la santé mentale en France
61
2
2
FIGURE 5
Les enfants et adolescents
Nombre de mineurs ayant eu recours à des soins de santé mentale en 2015,
selon le type de soins
Taux de recours
(pour 10 000 habitants)
50 % des
départements
1 000
90 e percentile
3 e quartile
1er quartile
e
10 percentile
100
10
1
0,1
Ensemble
ambulatoire
CMP
CATTP
à temps
complet
Hospitalisation...
à temps
en MCO
pour motif
partiel
psychiatrique
Psychotropes
Psychiatres
libéraux
CMP : Centres médico-pédagogiques
CATTP : Centres d'activité thérapeutique à temps partiel
MCO : Médecine, chirurgie, obstétrique
Lecture : Le 10e percentile (seuil en dessous duquel se situent les 10 % de départements au taux le plus faible) est de 229.
Le 1er quartile (seuil en dessous duquel se situent les 25 % de départements au taux le plus faible) est de 276. Le 3e quartile (seuil
en dessous duquel se situent les 75 % de départements au taux le plus faible) est de 429. Le 90e percentile (seuil au-dessus duquel se situent les 10 % de départements au taux le plus fort) est de 499.
Sources : Rim-P, PMSI MCO, Sniiram 2015, Insee. Infographie : Irdes 2020.
groupant 30 départements urbains parmi les plus
peuplés, soit 44 % des moins de 18 ans, l’offre se
caractérise par l’importance de dispositifs d’accueil spécifiques ou de référence régionale, ainsi
que par une offre privée de ville bien implantée,
associée à un recours important aux psychiatres
libéraux. A l’inverse, l’offre médico-sociale y est
peu développée. La présence de cette offre spécifique en direction des enfants et adolescents
tend à limiter le recours aux établissements de
santé, qu’il soit ambulatoire ou hospitalier, ce qui
pourrait traduire un assez bon fonctionnement
de la complémentarité des secteurs et dispositifs
dans ces territoires. Les deux autres classes (2 et
4) apparaissent plus problématiques, réunissant
des départements où vivent respectivement 19 et
13 % des mineurs. Dans la classe 2, réunissant une
vingtaine de départements présentant des caractéristiques sociales plus défavorisées, il semble y
avoir des difficultés de prises en charge hospitalières à temps complet ou partiel. L’offre moindre
en capacités ou en offre libérale spécialisée génère
un recours plus important vers l’hospitalisation
62
Atlas de la santé mentale en France
en pédiatrie pour motif psychiatrique ou suite à
une tentative de suicide, ou en psychiatrie générale, notamment en urgence, et une consommation plus importante de psychotropes. Les douze
départements de la classe 4 se caractérisent quant
à eux par un faible recours dont on ne sait pas s’il
est subi du fait d’une offre insuffisante pour répondre à la demande, ou s’il est lié au fait que la
population de ces territoires, qui cumule des indicateurs sociaux défavorables et une population
jeune relativement importante, ne recourent pas
aux soins. Cette classe est notamment retrouvée
pour les quatre Drom.
***
Ces configurations diverses appellent des réponses
variées pour améliorer la prise en charge des enfants et adolescents sur ces territoires. Les projets
territoriaux de santé mentale qui doivent être mis
en place en 2020 doivent prendre en compte ces
spécificités.
Les enfants et adolescents
2
CARTE 26
Densité de psychiatres libéraux
Pour 100 000 habitants
Départements et
régions d'outre-mer
64,4
France
9,9
A Guadeloupe
9,0
6,6
5,0
20 km
3,6
B Martinique
1,1
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : RPPS 2016, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Taux de recours aux psychiatres libéraux pour les mineurs
Pour 100 000 habitants
de moins de 17 ans
Départements et
régions d'outre-mer
266,5
A Guadeloupe
124,5
France
109,2
90,6
20 km
63,7
B Martinique
41,4
13,3
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Source : Sniiram 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
63
CARTE 27
2
Les enfants et adolescents
Taux de recours en établissement de santé des enfants et adolescents,
par grand mode de prise en charge, en 2015
CARTE 28
28a
Taux de recours ambulatoire
Pour 10 000 habitants
de 0 à 17 ans
Départements et
régions d'outre-mer
585,4
A Guadeloupe
454,4
374,7
322,1
France
335,2
20 km
B Martinique
267,7
3,3
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Rimp 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
28b
Taux de recours à temps partiel
Pour 10 000 habitants
de 0 à 17 ans
Départements et
régions d'outre-mer
79,3
A Guadeloupe
42,2
23,6
France
22,3
20 km
16,6
B Martinique
13,4
0,9
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Rimp 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
64
Atlas de la santé mentale en France
20 km
Les enfants et adolescents
2
Taux de recours en établissement de santé des enfants et adolescents,
par grand mode de prise en charge, en 2015
Taux de recours à temps complet en psychiatrie
CARTE 28
28c
Pour 10 000 habitants
de 0 à 17 ans
Départements et
régions d'outre-mer
37,6
A Guadeloupe
20,9
16,1
France
14,5
20 km
13,7
B Martinique
10,5
5,2
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Rimp 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Taux de recours en hospitalisation en MCO pour un motif psychiatrique
Pour 10 000 habitants
de 0 à 17 ans
Départements et
régions d'outre-mer
56,9
A Guadeloupe
27,4
France
20,9
20 km
21,5
17,6
B Martinique
14,7
5,5
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Rimp 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
65
28d
2
Les enfants et adolescents
Encadré 2
1 sur 5
Une typologie des départements fondée sur le recours aux soins
Pour synthétiser la diversité des situations départementales en matière
de prise en charge des troubles psychiques des jeunes de moins de 18
ans, une typologie en quatre classes
a été réalisée au moyen d’une Classification ascendante hiérarchique
(CAH). Elle s’appuie sur l’analyse de
différents indicateurs de recours aux
soins et est ensuite mise en regard
de données relatives au contexte démographique, socio-économique et
d’offre dans lequel ce recours opère
(tableau p. 69-70).
Classe 1 30 départements
urbains dotés d’une offre de
psychiatres libéraux élevée et
marqués par un faible recours en
établissements de santé.
Réunissant 30 départements, parmi
les plus peuplés, et 44 % de la population des moins de 18 ans, cette
classe est la plus importante. Elle
est composée de départements urbains (en moyenne, 85 % de la population du département vit en zone
urbaine), essentiellement situés en
Ile-de-France, sur le littoral méditerranéen, à l’Est, en Corse et dans
les départements sièges de grandes
villes (Paris, Nantes, Besançon, Clermont-Ferrand, Strasbourg, Lyon,
Toulouse). Sur le plan socio-économique, cette classe ne présente
pas de difficultés sociales majeures
(indicateurs de recours à l’Aide sociale à l’enfance (Ase) inférieurs à la
moyenne).
Contrairement aux autres classes,
ce groupe est marqué par une forte
offre en matière de dispositifs d’accueil spécifiques ou de niveau de
recours régional comme les unités
spécialisées dans la prise en charge
de l’adolescent, les unités d’hospitalisation ou de jour parents-bébés
ainsi que les maisons départementales des adolescents. Cette classe
se caractérise également par une
très importante offre psychiatrique
libérale de ville avec 10,3 psychiatres
libéraux pour 100 000 habitants
contre 7,1 en moyenne1. Ceci peut
expliquer un taux de recours aux
psychiatres libéraux de ville nettement supérieur à la moyenne (1,5 %
versus 1 %) et une faible consommation de psychotropes. Bénéficiant
également d’une dotation en psychiatres hospitaliers au-dessus de
la moyenne, ces départements se
distinguent par un faible recours aux
1
établissements de santé, surtout en
psychiatrie ambulatoire et en unité
d’hospitalisation MCO. Le taux d’hospitalisation à temps plein en psychiatrie reste inférieur à la moyenne,
malgré une part relativement élevée
de population située à moins de 20
minutes d’une unité d’hospitalisation à temps plein (41 % contre 30 %
en moyenne), liée au caractère urbain de ces territoires. En outre, ces
départements disposent de l’offre
la plus faible en équipements médico-sociaux, avec notamment des
densités très inférieures de CAMSP et
de places en IME et en Sessad.
Classe 2 20 départements
caractérisés par de faibles offres et
recours spécialisés, en psychiatrie
hospitalière comme de ville,
mais un fort taux de recours en
MCO et de consommation de
psychotropes.
Cette classe englobe 20 départements qui couvrent 19 % de la
population concernée. Géographiquement, elle concentre un grand
nombre de départements de la
moitié nord de la France, avec une
répartition de la population entre
zones urbaines et rurales proche de
la moyenne nationale. Cette classe se
démarque des autres sur deux indicateurs sociodémographiques : une
part de moins de 18 ans (comme de
moins de 6 ans) vivant sous le seuil
de pauvreté supérieure à la moyenne
(22,6 % contre 19,7 %) et un taux de
mineurs faisant l’objet d’un taux
de mesures d’assistance éducative
également supérieur (2,5 % contre
2,1 %), indicateurs a priori révélateurs de besoins plus importants.
Cette classe se distingue en premier
lieu par un taux d’hospitalisation en
MCO (notamment en pédiatrie) très
supérieur à la moyenne nationale.
Les taux d’hospitalisation pour motif
psychiatrique et suite à une tentative
de suicide s’élèvent respectivement à
29,8 pour 10 000 habitants de moins
de 18 ans (contre 21 en moyenne) et
à 25,3 (contre 16,7 en moyenne). Par
ailleurs, la part des admissions par
les urgences est assez élevée, 63 %
contre 56 % pour la moyenne des
départements.
Le recours aux soins en psychiatrie
infanto-juvénile en établissement de
santé, se caractérise par un recours en
ambulatoire proche de la moyenne
nationale (3,6 %), mais un faible recours en hospitalisation complète et
surtout partielle (18 contre 26 pour
10 000 en moyenne pour l’ensemble
des départements). Ceci peut en
partie s’expliquer par une offre hospitalière infanto-juvénile peu développée, avec des densités de lits et
de places d’hospitalisation plutôt
inférieures à la moyenne.
Pour autant, les différences ne sont
pas significatives du fait du petit effectif de cette classe (11 lits
pour 100 000 habitants contre 16
en moyenne pour l’hospitalisation temps plein dans le public et
59 places d’hospitalisation partielle
pour 100 000 habitants contre 77 en
moyenne) et une part relativement
importante de la population mineure
qui réside à plus d’une heure d’une
unité d’hospitalisation (15 % contre
12 %). La relative faiblesse de l’offre
d’hospitalisation en psychiatrie infanto-juvénile ne semble pas aboutir
à une saturation des ressources. En
effet, le taux d’occupation des lits
d’hospitalisation temps plein n’est
pas spécialement élevé (54 % contre
59 %) mais le recours à l’hospitalisation en psychiatrie générale (9,8 %
des adolescents hospitalisés en psychiatrie le sont en psychiatrie générale, contre 5,9 % en moyenne) ou en
MCO s’accroît.
L’offre libérale est également limitée (qu’il s’agisse de psychiatres ou
de psychologues) et s’accompagne
d’un faible recours à ces professionnels (58 pour 10 000 contre 99
en moyenne). Toutefois, ces territoires se démarquent par une forte
consommation de psychotropes,
peut-être liée à un moindre recours à
l’offre spécialisée. Les départements
de cette classe proposent une offre
médico-sociale globalement dans
la moyenne des autres départements, mais supérieure concernant
les IME, avec une densité de places
supérieure (767 contre 644) et au
contraire, un peu inférieure concernant les CMPP.
Classe 3 38 départements, à
dominante rurale combinant une
offre de psychiatrie et médicosociale importante se traduisant
par un faible recours en unité
d’hospitalisation MCO.
Cette classe regroupe 38 départements, couvrant 24 % de la population des 0-17 ans. Il s’agit majoritai-
Le taux France entière est de 10, peu différent de la moyenne des taux départements de la classe du fait du poids très important
de cette classe au sein de la population française en termes de nombre d’habitants.
66
Atlas de la santé mentale en France
Les enfants et adolescents
Une typologie des départements fondée sur le recours aux soins
rement de territoires ruraux présents
dans le sud-ouest et une partie du
centre de la France, à faible densité
de population mineure, mais présentant des signes de vulnérabilité
sociale, comme en témoignent des
indicateurs de recours à l’Ase plus
élevés que dans les autres départements (taux de saisines du juge
des enfants en assistance éducative,
taux de placements Ase, densités de
places en établissements Ase).
Cette classe se démarque par une
offre de psychiatrie infanto-juvénile
en établissement de santé relativement importante : les densités de
lits d’hospitalisation à temps plein et
de places d’hospitalisation à temps
partiel mais également la densité
de structures ambulatoires (CMP,
CATTP, Itep) sont toutes nettement
supérieures à la moyenne des autres
classes. Cette forte dotation en services de psychiatrie est associée à un
taux de recours à ces établissements,
lui aussi très élevé, dans le cadre
d’une prise en charge hospitalière ou
ambulatoire. Par ailleurs, la part des
adolescents hospitalisés dans des
services de psychiatrie générale y est
faible ainsi que la part des admissions
par les urgences psychiatriques.
Ces indicateurs suggèrent que dans
ces territoires, l’offre proposée par
la psychiatrie permet d’absorber la
demande exprimée. Parallèlement,
le taux d’hospitalisation en pédiatrie
pour un motif psychiatrique atteint à
peine la moyenne, avec un taux de
19 patients pour 10 000 habitants de
0 à 17 ans contre 21 en moyenne.
Ces départements disposent également de densités de pédopsychiatres, libéraux et salariés, ainsi que
de psychiatres libéraux proches de la
moyenne et le recours à ces spécialistes n’y est pas significativement
différent du recours moyen. Au sein
des établissements psychiatriques,
les moyens en psychiatres affectés
à la pédopsychiatrie se situent dans
la moyenne du territoire alors qu’ils
sont plus importants concernant les
autres catégories de personnel, médical ou non.
L’offre médico-sociale y est également très bien implantée : en particulier, les densités de CAMSP et de
CMPP ainsi que les places d’accueil
en Itep sont très largement supérieures à la moyenne française.
Départements et
régions d'outre-mer
Classes de la typologie des départements
1
2
3
4
Guadeloupe
20 km
Martinique
20 km
Guyane
100 km
Réunion
20 km
Mayotte
100 km
20 km
Classe 4 12 départements
à faibles offre et recours
de psychiatrie comme de
consommation de psychotropes,
caractérisés par des difficultés
sociales et une forte prise en
charge par les urgences.
Cette classe compte 12 départements (dont les 4 Drom) qui représentent 13 % de la population
concernée. Sur le plan social, bien
que cette classe ne soit pas très homogène, les départements qui la
composent apparaissent assez défavorisés : la part des enfants ayant
des difficultés scolaires, comme celle
des enfants vivant dans une famille
monoparentale ou ayant des parents
sans emplois sont particulièrement
élevées (les parts des mineurs et des
moins de 6 ans vivant sous le seuil
de pauvreté ne sont pas renseignées
pour les Drom). En outre, cette classe
est celle qui détient en moyenne la
plus forte part de jeunes de moins
de 18 ans (avec cependant des valeurs beaucoup plus élevées pour la
Guyane que pour les autres départements de la classe, 28 % de moins de
12 ans et 12 % d’adolescents entre
12 et 17 ans).
Du point de vue de la prise en charge,
cette classe se caractérise par de
faibles taux de recours en psychiatrie
infanto-juvénile en établissements
de santé, se distinguant ainsi de la
classe précédente : le taux d’hospitalisation en psychiatrie des moins
de 18 ans s’élève à 8,8 pour 100 000
pour l’hospitalisation à temps plein
(contre 13,2 pour 100 000 pour la
moyenne des départements) et à
12 pour 100 000 pour l’hospitalisation à temps partiel (contre 25,7
en moyenne). Cette situation est
à mettre en regard d’indicateurs
d’offre de soins en établissement de
santé et d’offre médico-sociale nettement en dessous de la moyenne2.
Elle s’accompagne d’une part d’adolescents admis par les urgences très
supérieure à celle des autres classes
(9,6 % contre 2,9 % pour la moyenne
des départements). Le taux de recours en ambulatoire est également
faible, de 234 pour 10 000 habitants
mineurs (contre 349 en moyenne) et
une forte proportion de ces jeunes
n’ont été vus qu’une seule fois dans
l’année (24 % de mono-consultants
contre 21 % en moyenne). Ce dernier
résultat peut être lié à une difficulté
à instaurer une prise en charge après
cette première évaluation ou à l’afflux de demandes psychosociales ne
relevant pas d’une prise en charge
sanitaire. Il est difficile de savoir si
ces territoires sont particulièrement
en difficulté pour répondre à la demande ou si la demande ne s’exprime pas. En effet, le faible effectif
de la classe (12 départements) rend
fragile la comparaison de son offre
de soins avec celle des autres départements, les différences observées
par rapport à la moyenne nationale
2 A l’exception de la densité de personnels de soins et socio-éducatifs dans les services hospitaliers de psychiatrie infanto-juvénile,
on n’observe pas de différences significatives sur ces indicateurs en raison du faible effectif de cette classe.
Atlas de la santé mentale en France
67
2
Encadré 2
2 sur 5
2
Encadré 2
3 sur 5
Les enfants et adolescents
Une typologie des départements fondée sur le recours aux soins
n’étant en général pas statistiquement
significatives. Le taux d’hospitalisation
en MCO pour motif psychiatrique est
tout à fait conforme à la moyenne des
autres départements mais comme
pour la psychiatrie, la part d’admissions par les urgences y est significativement plus forte (69 % contre 56 %).
En ville, on note à la fois un faible recours, que ce soit les consultations de
psychiatres libéraux ou la consommation de psychotropes, et une offre inférieure à la moyenne nationale, avec
de faibles densités de psychologues
libéraux (17,6 pour 100 000 habitants
contre 22) et de psychiatres (6,4 pour
100 000 habitants contre 7,1).
L’offre médico-sociale ne se démarque
guère de la moyenne, sauf concernant
la densité de places en IME où elle
semble plus faible (576 pour 100 000
jeunes de 6 à 20 ans contre 644).
Remerciements aux relecteurs : Guillaume Fond (Assistance publique-hôpitaux de Marseille, AP-HM), Alain Monnier (Union nationale
de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques, Unafam), Nadia Younès (Université de Versailles-SaintQuentin-en-Yvelines).
68
Atlas de la santé mentale en France
Les enfants et adolescents
Une typologie des départements fondée sur le recours aux soins
Significatvité°
Moyenne Moyenne
départe- France
mentale entière
Classe 1
N=30
Classe 2
N=20
Classe 3
N=38
Classe 4
N=12
Variables de recours
Taux d'hospitalisation temps plein
en psychiatrie des 0-17 ans
Taux d'hospitalisation temps partiel
en psychiatrie des 0-17 ans
Taux d'hospitalisation en alternatives à temps complet
en psychiatrie des 0-17 ans
Part des adolescents hospitalisés
en psychiatrie générale
Part des admissions par les urgences
des 0-17 ans en psychiatrie
Part des mineurs hospitalisés
en soins sans consentement
**
13,2
12,5
-
11,32
**
25,7
22,3
-
18,78
**
2,9
2,3
-
1,62
**
5,9
5,6
5,23 ++ 9,75
--
2,75 ++ 11,55
**
2,9
2,6
2,31
2,55
--
1,38 ++ 9,59
ns
5,2
5,09
5,26
4,49
7,70
Part des mineurs en isolement thérapeutique
*
9,5
8,06 ++ 14,60
7,55
10,53
Taux de recours en ambulatoire des 0-17 ans ans
en établissement de santé pour motif psychiatrique **
348,6
335,2
-- 296,55
363,58 ++ 417,81
-- 234,27
*
20,8
20,5
21,90
20,66
-- 18,76
+ 24,35
Part des actes ambulatoires à domicile ns
1,0
1,0
0,81
1,19
1,18
0,52
Part des actes ambulatoires
hors Centres médico-psycyhologiques (CMP) ns
24,1
24,3
24,41
22,11
24,42
25,82
**
21,1
20,9
-
18,39 ++ 29,51
19,33
19,87
**
16,7
16,1
-- 11,56 ++ 25,34
16,82
14,99
**
44,3
38,9
**
1,6
1,5
Part de mineurs consommant des psychotropes
(ensemble) **
47,7
Taux de recours à un psychiatre des 0-17 ans **
99,1
109,2
++ 148,05
Variables d'offre domaine sanitaire/médico-social
Nombre d'unités spécialisées
dans la prise en charge des adolescents ns
2,0
202,0
++
*
0,2
19,0
Nombre d'unités de jour parents-bébés ns
0,2
20,0
Nombre de maisons départementales des adolescents ns
1,5
**
Part des 0-17 ans monoconsultants en ambulatoire
Taux d'hospitalisation en MCO pour motif psychiatrique
des 0-17 ans
Taux d'hospitalisation pour tentative de suicide
des 12-18 ans
Part des admissions par les urgences
des 0-17 ans en Médecine-chirurgie-obstétrique (MCO)
Part des 0-17 ans hospitalisés en MCO
pour un trouble psychiatrique
12,12 ++ 16,70
--
-
17,65 ++ 39,68
-- 11,95
-
1,19 ++ 5,13
2,31
++ 47,10
63,10
8,76
56,40 + 68,50
1,36 ++ 2,21
1,49
1,56
-- 38,49 ++ 58,83
+ 51,97
-- 39,02
58,18
85,91
86,79
2,80
1,70
1,66
1,75
++
0,43
0,10
0,08
0,08
+
0,40
0,10
0,13
0,08
151,0
1,73
1,30
1,37
1,75
16,0
15,1
14,12
10,82 ++ 22,16
10,10
ns
2,4
1,5
1,78
1,43
4,03
0,81
ns
7,6
6,4
3,89
7,11
9,18
12,57
**
76,8
70,7
59,36 ++ 102,54
60,68
Taux d'occupation des lits d'hospitalisation temps plein ns
58,6
61,0
63,75
54,31
59,89
49,17
Part de la population mineure à moins de 20 min
d'une unité d'hospitalisation temps plein **
Part de la population mineure à plus de 60 min
d'une unité d'hospitalisation temps plein ns
30,4
37,1
++ 41,04
25,14
26,48
25,11
11,9
4,5
6,96
15,35
15,02
8,80
Atlas de la santé mentale en France
69
Nombre d'unités d'hospitalisation parents-bébés
Densité de lits d'hospitalisation
en psychiatrie infanto-juvénile en établissement public
Densité de lits d'hospitalisation
en psychiatrie infanto-juvénile en établissement privé
Densité d'alternatives à temps complet
en psychiatrie infanto-juvénile
Densité de places d'hospitalisation partielle
en psychiatrie infanto-juvénile
-
-
62,24
-
-
° Test de Fischer de comparaison globale des moyennes de la variable entre les classes : ** p < 0,01 ; * p < 0,05.
Pour chaque classe, test de Fischer de comparaison de la moyenne de la variable dans la classe et dans la population totale :
p<0,01
p<0,05
(1) : indicateurs non renseignés pour les 4 départements de la classe (les Dom)
Encadré 2
4 sur 5
TABLEAU. Typologie de départements selon le recours aux soins : caractéristiques des 4 classes
Variables actives
Variables illustratives
2
Encadré 2
5 sur 5
Les enfants et adolescents
Une typologie des départements fondée sur le recours aux soins
TABLEAU. Typologie de départements selon le recours aux soins : caractéristiques des 4 classes (suite)
Significatvité°
2
Variables actives
Variables illustratives
Variables d'offre domaine sanitaire/médico-social (suite)
Part des CMP ouverts 5 jours ou plus par semaine
psychiatrie infanto-juvénile ns
Moyenne Moyenne
départe- France
mentale entière
Classe 1
N=30
79,7
80,4
84,23
12,1
13,4
++ 14,82
Classe 2
N=20
Classe 3
N=38
Classe 4
N=12
78,58
77,20
78,09
9,82
11,86
9,92
Densité d’Équivalents temps plein (ETP) moyens annuel
de psychiatre infanto-juvénile **
Densité d’ETP moyens personnel médical autre
psychiatrie infanto-juvénile *
Densité d’ETP moyen personnels de soins
et socio-éducatif psychiatrie infanto-juvénile **
0,9
0,7
0,54
0,72 ++ 1,35
0,76
148,9
134,4
131,08
130,51 ++ 188,22
-- 99,45
Taux d'encadrement (psychiatres/file active) ns
4,6
4,8
6,7
+
-
5,82
3,29
4,56
3,80
*
6,3
Accessibilité potentielle localisée (APL)
aux psychiatres libéraux **
5,6
*
7,1
Densité de psychologues libéraux **
22,0
Densité de Centres d’action
médico-sociale précoce (CAMSP) *
Densité de Centres médicopsycho-pédagogiques (CMPP) *
Densité de places en Institut thérapeutique
éducatif et pédagogique (Itep) ns
8,1
5,9
3,7
2,9
3,13
171,2
148,2
154,48
Densité de places en Institut médico-éducatif (IME) **
643,5
577,8
-- 527,56 ++ 766,93
691,20
576,21
338,3
307,3
-- 303,45
354,82
357,98
2,1
1,9
--
1,63 ++ 2,46 +
2,20
1,97
Densité de pédopsychiatres libéraux et salariés
Densité de psychiatres libéraux (sur la population totale)
Densité de places en Service d’éducation spéciale
et de soins à domicile (Sessad)
*
7,11
-
3,79
7,41
5,27
7,85
-
3,91
4,95
4,78
++ 10,32
4,66
6,13
6,36
++ 30,47
-- 14,58
20,50
17,58
6,99 ++ 10,57
9,60
2,30 ++ 4,83
3,79
147,00 + 207,95
136,53
++
10
--
5,07
-
347,20
Variables de contexte
Taux de mesures éducatives ou de placement
dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance **
Part de mineurs faisant l’objet d’une saisine
du juge des enfants en assistance éducative **
Nombre de places en établissements
d'aide sociale à l'enfance *
8,0
7,6
--
7,24
8,26 ++ 8,70
7,52
4,1
3,8
-
3,51
4,07 ++ 4,72
3,82
Taux de pauvreté des moins de 6 ans **
17,9
18,0
17,71 + 20,40
18,45
-- 12,08
Taux de pauvreté des moins de 18 ans **
19,7
20,0
19,46 + 22,55
20,29
-- 13,25
Part des enfants vivant
dans une famille monoparentale **
19,9
19,9
19,27
18,44
18,79 ++ 27,22
Part des enfants vivant dans une famille
dont les parents n’ont pas d’emploi **
et ne sont ni retraités ni étudiants
Part d'élèves entrant en 6e avec
au moins un an de retard, à la rentrée 2015 *
11,5
11,5
9,81
12,20
10,06 ++ 19,31
10,2
10,2
9,81
10,56
9,77 ++ 11,79
Densité des 0-12 ans **
14,3
14,76
14,66
-- 13,33 ++ 15,94
Densité des 12-17ans **
7,3
7,23
7,42
Part de population mineure vivant
en zone urbaine (111, 112, 120) **
Part de population mineure vivant
en zone rurale (300, 400) **
71,3
++ 85,48
67,80
16,9
--
8,47
--
-- 59,88
77,79
18,36 ++ 24,55
11,39
° Test de Fischer de comparaison globale des moyennes de la variable entre les classes : ** p < 0,01 ; * p < 0,05.
Pour chaque classe, test de Fischer de comparaison de la moyenne de la variable dans la classe et dans la population totale :
p<0,01
p<0,05
(1) : indicateurs non renseignés pour les 4 départements de la classe (les Dom)
70
Atlas de la santé mentale en France
6,99 ++ 8,10
chapitre
3
Troubles psychiques sévères
et troubles psychiques
fréquents chez les 18-64 ans
Coralie Gandré1, Magali Coldefy1, Clément Nestrigue1
1
Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes)
L
es troubles psychiques de l’adulte
présentent un très large spectre : ils
regroupent un ensemble de maladies hétérogènes tant sur le plan phénotypique*
qu’étiologique*. De nature, de gravité et d’évolution différentes, ils vont des troubles légers et
ponctuels, tels que des épisodes anxieux isolés*,
à des troubles sévères et persistants, tels que les
troubles schizophréniques*, avec entre ces deux
extrêmes une très grande variété de troubles aux
manifestations multiples. De ce fait, il est difficile
de catégoriser les différentes maladies mentales.
Néanmoins, la littérature étrangère distingue couramment les troubles fréquents légers à modérés
des troubles sévères plus rares et au caractère plus
durable dans le temps, même s’il n’existe pas de
consensus sur la définition précise de ces deux
types de troubles (Steel et al., 2014).
D’après la définition de l’Organisation mondiale
de la santé (OMS), les troubles psychiques fréquents (ou modérés) sont caractérisés par l’importance de leur prévalence* et incluent deux
pathologies principales : les troubles dépressifs
et les troubles de l’anxiété sans critère restrictif
lié à la sévérité, à la durée ou à la récurrence des
troubles (OMS, 2017 ; Fleury et Grenier, 2012).
Néanmoins, d’autres travaux incluent également
les addictions* parmi les troubles fréquents (Steel
et al., 2014 ; Alonso et al., 2004).
Les troubles psychiques sévères et persistants
correspondent à des troubles chroniques avec des
épisodes récurrents qui interfèrent fortement avec
les relations interpersonnelles limitant les compétences sociales et les capacités fonctionnelles
(Fleury et Grenier, 2012). La plupart des définitions de ces troubles issues de la littérature internationale reposent sur une identification non seulement basée sur le diagnostic mais qui s’appuie
également sur leur durée et les limitations fonctionnelles qu’ils entraînent. Certaines définitions
s’affranchissent en partie de la notion de diagnostic en se basant davantage sur des critères opérationnels, tels qu’une longue durée de contact avec
des services de santé mentale et des scores peu élevés sur des échelles d’évaluation globale du fonctionnement d’un individu (Ruggeri et al., 2000 ;
Parabiaghi et al., 2006 ; Schinnar et al., 1990).
Les groupes diagnostiques identifiés comme
ayant un impact durable avec des conséquences
fonctionnelles peuvent donc différer selon les publications consacrées aux troubles psychiques sévères et persistants. Certaines n’incluent que les
troubles schizophréniques* (Murphy et al., 2015),
d’autres intègrent les troubles sévères de l’humeur* et les troubles liés aux addictions (de Mooij
Atlas de la santé mentale en France
71
3
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
et al. 2016), d’autres encore réunissent troubles
psychotiques*, dépressifs et bipolaires (Fleury et
Grenier 2012).
Les données médico-administratives mobilisées
dans le cadre de cet Atlas ne contiennent pas de
données précises sur la sévérité des troubles psychiques des patients pris en charge, que ce soit
en termes de symptomatologie* ou de limitations
fonctionnelles. Elles incluent uniquement le diagnostic ayant conduit à la prise en charge, codé
selon la dixième version de la Classification internationale des maladies (Cim 10), qui ne contient
pas d’informations détaillées sur la sévérité du
trouble. L’identification des troubles psychiques
fréquents et des troubles psychiques sévères et
persistants a donc été faite essentiellement sur
la base des groupes diagnostiques. Ainsi, nous
avons fait le choix d’inclure dans les troubles psychiques fréquents deux sous-groupes : d’une part,
les troubles névrotiques et de l’humeur* intégrant
notamment les troubles anxieux et les épisodes
dépressifs sans notion de sévérité et, d’autre part,
les troubles addictifs. Pour les troubles psychiques
sévères et persistants, nous avons considéré
les troubles psychotiques (incluant notamment
la schizophrénie), les troubles bipolaires et les
troubles dépressifs sévères.
Les troubles psychiques chez les adultes sont associés à des enjeux significatifs pour le système de
santé français tant en termes de santé publique
que sur le plan économique. En effet, les troubles
psychiques sont responsables de 11 % de la morbidité* en termes d’années de vie ajustées sur
l’incapacité (disability-adjusted life years, Dalys)
[OMS, 2018]. Le coût de leur prise en charge
s’élève à 23 milliards d’euros annuels, ce qui représente l’un des principaux postes de dépense
de l’Assurance maladie, équivalent à 14 % des dépenses totales remboursées (Cnam, 2018).
Néanmoins, les données de prévalence des troubles
psychiques sont limitées en France. Quelques enquêtes génériques en population générale ont permis d’obtenir des estimations pour les troubles
psychiques fréquents. Ainsi, d’après l’enquête
Baromètre santé 2017, les épisodes dépressifs caractérisés toucheraient 13 % des femmes et 6 %
des hommes chaque année, soit près d’une personne sur dix (Léon et al., 2018). L’Enquête santé
européenne (EHIS-ESPS) estime quant à elle que
9 % des femmes et 5 % des hommes présentent des
symptômes dépressifs dans les deux semaines précédant l’entretien (Pisarik et al., 2017). Toutefois,
ces enquêtes génériques se prêtent mal à la me-
72
Atlas de la santé mentale en France
sure de la prévalence des troubles psychiques sévères et persistants qui concernent une population
plus réduite bien que significative. À l’heure actuelle, seules deux enquêtes en population générale spécifiques à la santé mentale ont été réalisées
en France. L’enquête Santé mentale en population générale : images et réalités (SMPG), réalisée
entre 1999 et 2003 en France métropolitaine, a
ainsi estimé la prévalence des troubles dépressifs récurrents à 7 % chez les femmes et 5 % chez
les hommes sur la vie entière, celle des épisodes
maniaques* à 1 % chez les femmes et 2 % chez les
hommes, et celle des troubles d’allure psychotique*
à 2,5 % chez les femmes et 3,1 % chez les hommes
(Bellamy, 2004). L’enquête European Study of the
Epidemiology of Mental Disorders (ESEMED) a,
elle, estimé la prévalence des épisodes dépressifs
majeurs tous sexes confondus à 6 % chaque année
et à 21 % sur la vie entière en France (Lépine et
al., 2005). Ces données sont cependant anciennes,
les deux enquêtes spécifiques à la santé mentale
ayant été réalisées au début des années 2000. De
plus, elles ont été obtenues par pondération d’un
échantillon représentatif de la population, ce qui
ne permet pas d’avoir une approche territorialisée
de ces prévalences, par exemple par région, département ou territoire de santé mentale.
L’une des approches pouvant être employée pour
combler le manque de données sur la prévalence
des troubles psychiques est de recourir à des
données sur la prévalence des troubles pris en
charge par le système de santé qui correspond au
concept de prévalence « traitée » (treated prevalence) évoqué dans la littérature internationale
(Bulloch et al., 2011 ; Bijl et al., 2003). Pour autant, ce concept n’intègre pas les personnes ne
recourant pas aux soins, qui sont nombreuses, y
compris dans les pays développés. Comme le pose
le modèle d’Andersen, l’accès aux soins relève de
facteurs « prédisposants » (résultant de facteurs
sociodémographiques, d’attitudes, de croyances et
de stigmatisation), de facteurs « de besoin » (la sévérité évaluée subjectivement et objectivement),
et de facteurs « favorisant » (système d’assurance,
niveau financier, soutien social, offre de soins)
[Andersen, 1995]. Ainsi, la prévalence « traitée »
dépend de la prévalence des troubles psychiques,
et de nombreux autres facteurs tels que le niveau
de défavorisation sociale des territoires et l’offre
de soins disponible (Bocquier et al., 2008). Selon
l’OMS, le pourcentage de cas non traités est estimé entre 44 % et 70 % dans les pays développés, notamment pour les troubles les plus légers
(OMS, 2004).
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
En France, la prévalence « traitée » peut être approchée à travers la cartographie des pathologies
et des dépenses de la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam). Cette analyse médicalisée
s’appuie sur les données issues du Système national des données de santé (SNDS). Le SNDS est une
base de données nationale, gérée par la Cnam, qui
inclut les données hospitalières de l’Agence technique d’information sur l’hospitalisation (ATIH)
en services de Médecine, chirurgie et obstétrique (base PMSI-MCO) ou psychiatriques (base
Rim-P), l’ensemble des remboursements de soins
hospitaliers et de médecine de ville des assurés
de l’Assurance maladie (base Sniiram), ainsi que
certaines de leurs caractéristiques individuelles,
notamment sociodémographiques et médicales
(dont les motifs d’hospitalisation et les causes de
décès). Des groupes de populations sont constitués à partir d’algorithmes développés afin d’identifier et de caractériser, pour chaque bénéficiaire,
les pathologies, traitements ou épisodes de soins
repérables à partir du SNDS. Les groupes relatifs
aux pathologies psychiatriques sont constitués à
partir des diagnostics repérés lors d’une hospitalisation ou d’une Affection de longue durée (ALD),
ainsi qu’à partir des traitements psychotropes
réguliers (au moins trois délivrances) sur une période allant de un à cinq ans (Cnam, 2018a).
Les prévalences « traitées » sont relativement
proches de celles estimées au niveau international en population générale pour certains troubles
sévères pour lesquels le recours aux soins mobilisés dans la construction des algorithmes de la
cartographie est quasi-systématique. C’est le cas
des troubles psychotiques qui présentent une prévalence mondiale moyenne de 7,2 pour 1 000 en
population générale (Moreno-Küstner, Martín, et
Pastor, 2018). Pour les troubles fréquents, la prévalence « traitée » identifiée par l’Assurance maladie à travers des consommations de soins spécifiques tend à fortement sous-estimer le nombre
de personnes concernées, notamment les addictions, qui en France sont majoritairement prises
en charge par le secteur social ou médico-social ou
en ambulatoire.
Dans ce contexte, ce chapitre vise à décrire les
prises en charge des individus adultes souffrant de
troubles psychiques fréquents ou de troubles psychiques sévères et persistants en caractérisant :
le recours aux soins pour ces troubles en France,
les prises en charge au sein des établissements de
santé et l’articulation ville-hôpital, tant pour les
soins spécialisés qu’en termes d’accès aux soins
somatiques* et à la prévention, sont également
observées.
Ainsi en 2016, il est estimé que 7,3 millions d’individus couverts par le Régime général et les
Sections locales mutualistes (SLM)1 [dont près de
60 % ont entre 15 et 64 ans], faisaient partie de ces
catégories (Cnam, 2018). Néanmoins, si l’utilisation des causes d’hospitalisation et des ALD limite
l’estimation de la prévalence des troubles psychiques aux troubles très sévères, l’utilisation de
la consommation de médicaments psychotropes
peut au contraire conduire à surestimer cette prévalence car ils sont parfois prescrits en dehors du
cadre d’une pathologie psychiatrique. La bonne
estimation de la prévalence traitée des troubles
psychiques doit donc se situer entre les deux. Les
données issues de la cartographie des pathologies
et des dépenses de la Cnam sont présentées dans
le tableau 1.
1
Ces sections correspondent à des régimes propres à des statuts particuliers (par exemple les fonctionnaires ou les étudiants).
Atlas de la santé mentale en France
73
3
3
tableau 1
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
Estimation de la prévalence « traitée » des troubles psychiques
chez les bénéficiaires du Régime général et des Sections locales mutualistes (SLM)
ayant consommé des soins et étant âgés de 15 à 64 ans
Nombre
de personnes
Catégories
Prises en charge
pour...
Au moins
trois délivrances...
Taux pour 1 000
consommants
des troubles névrotiques et de l’humeur
773 600
21,5
des troubles addictifs
257 400
7,2
des troubles psychotiques
331 700
9,2
de neuroleptiques, hors pathologie identifiée
151 500
4,2
d’antidépresseurs, hors pathologie identifiée
1 567 200
43,6
d’anxiolytiques, hors pathologie identifiée
1 459 500
40,6
d’hypnotiques, hors pathologie identifiée
611 000
17,0
Sources : Cnam, 2018 a et b.
74
Atlas de la santé mentale en France
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
3.1
Recours aux soins de santé mentale
Etant donné la diversité des troubles psychiques,
leur large spectre, et les différentes phases de la
maladie, la demande de soins pour un problème
de santé mentale peut s’exprimer auprès de plusieurs opérateurs. La médecine de ville est naturellement en première ligne, avec un recours aux
soins qui peut se faire auprès de médecins généralistes ou de professionnels spécialisés tels que
les psychiatres et psychologues libéraux. Il peut
également avoir lieu auprès des établissements
de santé qui proposent des prises en charge ambulatoires (majoritairement en Centres médico
psychologiques (CMP)) ainsi qu’en hospitalisation à temps partiel ou complet, en psychiatrie
ou dans des services somatiques (notamment aux
urgences). Une partie du recours, notamment
pour les addictions, se fait également auprès du
secteur social et médico-social (en particulier via
les centres de soins, d’accompagnement et de
prévention en addictologie, les centres d’accueil
et d’accompagnement à la réduction des risques
pour usagers de drogues, les Consultations jeunes
consommateurs (CJC) et autres dispositifs).
Peu de données sont disponibles dans la littérature pour caractériser le recours aux soins des
personnes avec des troubles psychiques fréquents
ou des troubles psychiques sévères et persistants
en France. Tout comme pour l’estimation de la
prévalence des troubles, les données de l’enquête
SMPG en population générale ont néanmoins
apporté quelques premiers éléments de réponse.
Elles soulignent ainsi l’absence de recours aux
soins pour un quart des individus souffrant de
dépression, qui semble cependant concerner principalement les individus les moins sévèrement
malades. 26 % des individus dépressifs ont déclaré avoir consulté un professionnel de la santé
mentale et 38 % un professionnel de santé non
spécialisé, tandis que 17 % ont été pris en charge
en établissement hospitalier (Morin, 2007).
L’enquête ESEMED a confirmé que les individus
souffrant de troubles psychiques fréquents en
France étaient plus susceptibles de consulter un
médecin généraliste qu’un psychiatre (Dezetter
et al., 2013). Il est par ailleurs estimé qu’une part
importante des consultations chez les médecins
généralistes sont liées à des troubles psychiques
(Norton et al., 2009), cette part pouvant atteindre près de 13 % rien que pour les principaux
troubles fréquents (troubles dépressifs et anxieux)
[Labarthe, 2004].
Les données de consommation de soins des individus suivis pour des troubles psychiques issues
du SNDS permettent de compléter ces premiers
éléments. Pour autant, le SNDS ne permet qu’une
approche parcellaire des soins reçus par les individus avec des troubles psychiques. En effet, les diagnostics ayant motivé les prises en charge ne sont
renseignés que pour celles réalisées en établissement de santé (en service de psychiatrie ou en
MCO) hors passage aux urgences. En ville, le motif
de consultation n’est pas disponible. Ainsi, si l’ensemble des consultations chez les psychiatres peut
être attribué à la prise en charge des troubles psychiques, il n’est pas possible d’identifier les consultations de médecins généralistes spécifiquement
motivées par un problème psychique. Ces limites
sont liées aux modes de financement des différents types de soins. Les passages aux urgences et
les consultations en ville n’étant pas financés selon une tarification à l’activité, ils ne nécessitent
pas le recueil de données sur les motifs de recours.
Par ailleurs, des limites sont également présentes
pour les prises en charge psychiatriques ambulatoires en établissement de santé. Il n’est en effet
possible d’identifier qu’un même patient a été pris
en charge en ambulatoire dans plusieurs établissements que s’il a également été hospitalisé dans ces
établissements. Cela est lié à l’absence de recueil
d’un numéro d’identification national lors des
prises en charge en CMP (qui est néanmoins prévu pour la première fois en 2020) et peut conduire
à comptabiliser plusieurs fois le recours d’un
même patient. De plus, les données du SNDS n’incluent pas les consultations de psychologues ou
de psychothérapeutes pour lesquelles les patients
ne sont pas remboursés à ce jour, en dehors d’une
expérimentation mise en œuvre dans quelques départements français (Cnam, 2017). Enfin, le système d’information national sur le recours au secteur social et médico-social est encore en cours de
construction, ne permettant pas à ce jour d’avoir
accès à des données à l’échelle nationale.
Malgré ces limites, le SNDS est une source de
données particulièrement riches pour caractériser le recours aux soins des individus souffrant
de troubles psychiques fréquents ou sévères et
persistants. À partir de ces données, il est ainsi
possible d’obtenir une estimation du taux de recours aux psychiatres libéraux qui s’élève à 18
pour 1 000 bénéficiaires du Régime général et des
Sections locales mutualistes (SLM) en 2015, même
si l’absence de motif de consultation dans le SNDS
ne permet pas de savoir quelle proportion du re-
Atlas de la santé mentale en France
75
3
3
CARTE 29
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
Taux de recours aux psychiatres libéraux tous motifs confondus en 2015
Pour 100 000 habitants
de 18 à 64 ans
Départements et
régions d'outre-mer
3 896,6
A Guadeloupe
2 016,9
France
1 829,8
1 601,4
20 km
1 369,7
B Martinique
1 018,7
1,9
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Sniiram 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
CARTE 30
Densité de psychiatres libéraux ou mixtes en 2016
Pour 100 000 habitants
64,4
9,0
Départements et
régions d'outre-mer
France
9,9
A Guadeloupe
6,6
5,0
20 km
3,6
B Martinique
1,1
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : RPPS 2016, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
76
Atlas de la santé mentale en France
20 km
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
cours concerne des troubles fréquents et modérés
ou des troubles plus sévères. Des disparités territoriales sont observées entre départements avec
des taux de recours2 qui varient dans un rapport
de 1 à 10. Les taux les plus élevés sont observés
dans des départements densément peuplés, tels
que les Bouches-du-Rhône, les Alpes-Maritimes
et Paris. A l’inverse, les taux les plus faibles sont
localisés dans des départements moins densément
peuplés, tels que le Cantal, la Manche, la HauteMarne et la Meuse (carte 29).
Une partie de la variabilité du recours aux psychiatres libéraux entre départements s’explique
par la variabilité de la disponibilité de ces professionnels de santé au sein des différents territoires
(carte 30). En effet, si la France présente une importante densité de psychiatres par rapport aux
autres pays, l’hétérogénéité de leur répartition
géographique, avec notamment une concentration
dans les grands pôles urbains, est soulignée depuis de nombreuses années (Milon, 2009 ; Drees,
2016). L’offre de soins disponible permet de répondre aux besoins, elle peut aussi influencer le recours selon la théorie économique de la demande
induite vérifiée dans le champ de la santé (Davis et
al., 2000 ; Hendryx, Urdaneta, et Borders, 1995) et
le modèle d’Andersen (Andersen, 1995). La prise
en charge en psychiatrie nécessitant un recours
fréquent et régulier et non ponctuel justifie d’autant plus cette corrélation entre recours et offre de
soins car l’éloignement géographique rend difficile
le suivi et la continuité de la prise en charge.
Le taux de recours en établissements de santé
ayant une autorisation d’activité en psychiatrie
en 2015, tous modes de prises en charge confondus (hospitalisation à temps complet ou partiel
et ambulatoire), est particulièrement élevé pour
les troubles névrotiques et de l’humeur (12 pour
1 000 habitants), suivi des troubles psychotiques,
bipolaires ou dépressifs sévères (9 pour 1 000) et
des troubles addictifs (3 pour 1 000). Ainsi, bien
que les prévalences « traitées » des troubles addictifs et des troubles psychotiques apparaissent
proches chez les adultes en France, le taux de
recours en établissement de santé est bien plus
élevé pour ces derniers. Cela peut s’expliquer par
la sévérité de ces troubles qui peut nécessiter des
prises en charge mobilisant des équipes pluriprofessionnelles ainsi que par le poids du secteur
médico-social et social dans la prise en charge des
addictions.
2
Des disparités géographiques sont observées entre
départements dans les taux de recours en établissements de santé, quel que soit le groupe diagnostique considéré. Mais elles sont plus marquées
pour les troubles psychiques fréquents (rapport
de 1 à 14 pour les troubles névrotiques et de l’humeur et de 1 à 12 pour les troubles addictifs versus de 1 à 4 pour les troubles sévères) [cartes 31a
et 31b p. 78]. Les disparités plus importantes
pour les troubles psychiques fréquents peuvent
s’expliquer par le plus large spectre de troubles
inclus dans cette catégorie ainsi que par des variations de pratiques : les hospitalisations ne
font pas partie du traitement recommandé en
première intention, le recours peut s’effectuer
vers les soins primaires, les psychologues ou les
psychothérapeutes sans objectivation possible
dans le système d’information actuel et ces recours peuvent varier selon les territoires. Pour les
troubles sévères, des taux élevés de recours aux
établissements de santé sont notés en Guadeloupe
ou en Martinique, sans être retrouvés pour les
autres groupes diagnostiques. Cela peut être lié à
une forte prévalence des troubles sévères dans ces
départements ou à un moindre recours aux soins
pour des troubles névrotiques et de l’humeur du
fait de facteurs culturels (soutien communautaire et familial développé, poids de la religion
et forte stigmatisation associée à ces troubles)
[Robert et al., 2017]. Pour les troubles fréquents,
les taux de recours en établissements de santé
(cartes 31a, 31b et 31c p. 78-79) semblent
plus faibles dans les régions où les taux de recours
aux psychiatres libéraux et leur densité sont les
plus élevés (cartes 29 et 30 p. 76). Des travaux de recherche ont mis en évidence une diminution du taux d’hospitalisation à temps plein
en psychiatrie avec l’augmentation du nombre de
psychiatres libéraux (Gandré et al., 2018). Cela
pourrait signifier qu’en l’absence d’une offre libérale dans certains territoires, les personnes sont
suivies en établissement de santé même pour des
troubles légers à modérés (hypothèse de la subsidiarité des différents types d’offre).
Les prises en charge en hospitalisation (à temps
complet ou partiel) en 2015 ont lieu majoritairement dans des établissements publics ou Espic
(qui représentent 81 % des capacités d’hospitalisation – lits et places – en psychiatrie), quel que
soit le groupe diagnostique considéré. Cela est
néanmoins particulièrement marqué pour les
addictions pour lesquelles les taux de recours en
Le terme « recours » est utilisé pour indiquer que le taux est rapporté à la zone de résidence des patients et non pas au
lieu de prise en charge.
Atlas de la santé mentale en France
77
3
3
CARTE 31
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
Taux de recours global (complet, partiel, ambulatoire) en établissements de santé en 2015
31a
Pour des troubles névrotiques et de l’humeur
Pour 1 000 habitants
de 18 à 64 ans
Départements et
régions d'outre-mer
25,5
A Guadeloupe
17,0
12,7
France
11,7
20 km
10,8
B Martinique
8,2
1,8
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
31b
Discrétisation : quintiles. Sources : Rim-P 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Pour des troubles addictifs
Pour 1 000 habitants
de 18 à 64 ans
Départements et
régions d'outre-mer
11,6
A Guadeloupe
4,7
3,5
France
3,2
20 km
2,9
B Martinique
2,1
1,0
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
78
Atlas de la santé mentale en France
Discrétisation : quintiles. Sources : Rim-P 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
3
CARTE 31
Taux de recours global (complet, partiel, ambulatoire) en établissements de santé en 2015
Pour des troubles sévères
Pour 1 000 habitants
de 18 à 64 ans
Départements et
régions d'outre-mer
15,1
A Guadeloupe
10,2
8,8
France
8,7
20 km
8,1
B Martinique
6,8
3,4
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Rim-P 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
79
31c
3
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
hospitalisation sont 11 fois supérieurs en établissements publics ou Établissements de santé privés d’intérêt collectif (Espic) qu’en établissements
privés (contre 4 fois supérieurs pour les troubles
sévères et 2 fois supérieurs pour les troubles névrotiques et de l’humeur). La cause peut être qu’il
s’agit de populations plus difficiles à prendre en
charge et moins favorisées socialement pour lesquelles certains établissements développent des
dispositifs territoriaux spécifiques. Par ailleurs,
quel que soit le groupe diagnostique considéré,
le recours vers le secteur privé est plus important
dans les départements du sud de la France, où
existe la plus forte concentration d’établissements
de statut privé.
Le taux de recours en ambulatoire dans les établissements ayant une autorisation d’activité en
psychiatrie en 2015 est élevé pour l’ensemble des
groupes diagnostiques considérés : 10 pour 1 000
habitants pour les troubles névrotiques et de l’humeur, 8 pour 1 000 habitants pour les troubles
sévères et 3 pour 1 000 pour les troubles addictifs. Ces chiffres sont très proches des taux de recours global en établissements de santé, plus de
80 % des patients suivis en psychiatrie l’étant en
ambulatoire quel que soit le groupe diagnostique
considéré (Drees, 2018). La part des patients pris
en charge exclusivement en ambulatoire en établissement de santé est néanmoins plus élevée
pour les troubles fréquents que pour les troubles
sévères et persistants, ce qui est peu surprenant
car ces derniers nécessitent des prises en charge
mobilisant des équipes pluriprofessionnelles et
des soins plus intensifs. La part des patients pris
en charge uniquement en ambulatoire en établissement de santé atteint 77 % pour les troubles névrotiques et de l’humeur, 69 % pour les troubles
addictifs et 57 % pour les troubles sévères.
La densité des soins à domicile réalisés par
des équipes hospitalières pour des troubles
sévères s’élève à 16 actes pour 1 000 habitants
en 2015 avec de fortes variations entre départements. Cette densité varie dans un rapport de 1 à
65 entre l’Aveyron où la densité est la plus forte et
la Vendée où elle est la plus faible.
La densité des soins ambulatoires hors lieux
de soins de l’établissement (notamment au domicile des patients et dans les structures médicosociales) pour des troubles sévères est de 24 actes
pour 1 000 habitants en 2015 avec des variations
par département extrêmement marquées. Ce taux
varie en effet dans un rapport de 1 à 33, avec des
taux plus élevés dans les départements ruraux
mais également dans le Nord et le Pas-de-Calais.
Ces variations illustrent le développement très
inégal des prises en charge hors structures hospitalières selon les établissements.
Les valeurs nationales des principaux indicateurs
de recours aux soins de santé mentale pour des
troubles psychiques fréquents ou sévères et persistants sont synthétisées dans le tableau 2.
Synthèse des indicateurs de recours aux soins de santé mentale
pour des troubles psychiques fréquents ou sévères en 2015
tableau 2
Troubles
névrotiques
et de
l’humeur
Troubles
addictifs
Troubles
psychotiques,
bipolaires ou
dépressifs
sévères
Tous motifs
de recours
-
-
-
18,3
Taux de recours en établissements de santé
ayant une autorisation d’activité en psychiatrie
tous modes de prises en charge confondus
12
3
9
-
Taux de recours en ambulatoire dans les établissements
ayant une autorisation d’activité en psychiatrie en 2015
10
3
8
-
Indicateur (pour 1 000 habitants)a
Taux de recours aux psychiatres libéraux
a
Pour les psychiatres libéraux, ce taux est calculé pour 1 000 bénéficiaires du Régime général et des Sections locales mutualistes
(SLM) qui incluent néanmoins la majeure partie de la population française.
Sources : Cnam, 2018 a, Rim-P, Insee.
80
Atlas de la santé mentale en France
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
3.2
Les prises en charge spécialisées en établissements de santé
En France, la place de l’hôpital dans la prise en
charge des troubles psychiques est particulièrement forte et les soins qui y sont réalisés sont parmi les plus documentés dans le système national
d’information. Plusieurs indicateurs complémentaires, tels que le taux de recours en hospitalisation à temps plein, la part d’admissions par les
urgences, les taux de réhospitalisation ou le taux
de recours aux soins sans consentement, peuvent
être mobilisés pour caractériser le parcours des
individus suivis pour des troubles psychiques en
établissements de santé, spécialisés ou non, ayant
une autorisation d’activité en psychiatrie. Les disparités territoriales observées sur certains de ces
indicateurs peuvent être les signaux de dysfonctionnements et points de rupture dans les parcours des personnes.
Le taux de recours en hospitalisation à temps
plein standardisé sur le sexe et l’âge en 2015
est très élevé pour les troubles sévères (2,9 pour
1 000 habitants) et les troubles névrotiques et de
l’humeur fréquents (2,3 pour 1 000 habitants). Le
taux est nettement plus faible pour les troubles addictifs (0,9 pour 1 000 habitants). Ces différences
peuvent être liées au poids du secteur médico-social dans la prise en charge de ces troubles qui sont
la plupart du temps pris en charge de façon pluridisciplinaire et transversale. C’est d’ailleurs pour
eux que les variations du taux de recours standardisé en hospitalisation à temps plein entre départements sont les plus élevées (rapport de 1 à 14).
Si ces variations peuvent ainsi traduire des différences dans la disponibilité d’une offre alternative
à l’hospitalisation à temps plein, elles peuvent
également illustrer des différences de pratique
entre zones géographiques. Or, lorsque les hospitalisations à temps plein en psychiatrie sont liées
à des critères non justifiés par les caractéristiques
cliniques des patients (notamment de sévérité ou
d’urgence), elles sont contraires aux recommandations internationales et européennes de bonne
pratique (OMS, 2005, 2012). L’hospitalisation à
temps plein en psychiatrie peut avoir des conséquences néfastes, notamment en termes de perte
d’autonomie et de lien social ainsi que de stigmatisation (Quirk et Lelliott, 2001 ; Mattioni et al.,
1999 ; Thomas, Guire, et Horvat, 1997 ; Knapp et
al., 2011).
La part des admissions en hospitalisation à
temps plein réalisées suite à un passage aux
urgences en 2015 pour des troubles psychiques
fréquents ou sévères et persistants est importante
et diffère peu selon les troubles. Ainsi, plus d’un
patient hospitalisé sur quatre est admis via les
urgences (26 % pour les troubles sévères, 29 %
pour les troubles névrotiques et de l’humeur et
25 % pour les troubles addictifs). Les admissions
par les urgences, utilisées comme un point d’entrée dans le système de santé par les patients
n’ayant pas d’autres moyens d’obtenir des soins
adéquats et rapides, sont régulièrement considérées comme un indicateur de qualité des soins
dans la littérature internationale (Or et Penneau,
2018 ; O’Malley, 2013 ; Cowling et al., 2013).
Les données sur la part d’admissions par les urgences pour les troubles psychiques fréquents et
les troubles psychiques sévères et persistants en
France suggèrent que leur prise en charge dans la
communauté n’est pas optimale ou qu’il existe des
problèmes d’accès ou de recours aux soins pour
les individus vivant avec ces troubles. Ces données
confirment les résultats issus de travaux précédents qui mettaient en évidence des taux élevés et
de fortes variations dans les taux d’admissions par
les urgences chez les patients hospitalisés pour
dépression (Nestrigue et al., 2017).
La Durée moyenne annuelle d’hospitalisation
à temps plein (DMAH) en 2015 apparaît, sans
surprise, plus élevée pour les troubles sévères
que pour les troubles fréquents, montrant également l’intérêt de raisonner en grands groupes
diagnostiques plutôt que de manière globale pour
l’ensemble des patients d’un établissement. Elle
s’élève en moyenne à 71 jours pour les troubles
sévères, 37 jours pour les troubles addictifs et
33 jours pour les troubles névrotiques et de l’humeur (cartes 32a, 32b et 32c p. 82-83). La
DMAH très élevée observée pour les troubles sévères peut être liée aux particularités de la prise
en charge de ces troubles qui nécessitent pour certains patients des hospitalisations au long cours,
en lien avec la disponibilité ou non de services
d’accompagnement permettant un maintien au
domicile de la personne. La part des patients hospitalisés à temps plein depuis plus d’un an pour
ces troubles atteint 4 % avec de fortes variations
en fonction des territoires (carte 33 p. 83), ce
qui questionne les pratiques. En termes d’effectifs, 5 550 personnes sont concernées. Au total, les
hospitalisations au long cours immobilisent près
d’un quart des lits d’hospitalisation en psychiatrie, limitant ainsi les possibilités d’accueil dans
certains établissements de patients en crise, et
empêchant la fluidité des parcours.
Atlas de la santé mentale en France
81
3
3
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
Durée moyenne annuelle d’hospitalisation à temps plein
selon le type de trouble psychique en 2015
CARTE 32
32a
Pour des troubles névrotiques et de l’humeur
Nombre de jours par patient
Départements et
régions d'outre-mer
54,3
A Guadeloupe
39,9
35,2
30,0
France
33,2
20 km
26,7
B Martinique
15,8
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Source : Rim-P 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
32b
Pour des troubles addictifs
Nombre de jours par patient
Départements et
régions d'outre-mer
67,9
A Guadeloupe
44,2
39,5
35,8
France
37,4
20 km
30,7
B Martinique
20,8
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Source : Rim-P 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
82
Atlas de la santé mentale en France
20 km
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
3
Durée moyenne annuelle d’hospitalisation à temps plein
selon le type de trouble psychique en 2015
Pour des troubles sévères
CARTE 32
32c
Nombre de jours par patient
Départements et
régions d'outre-mer
225,7
A Guadeloupe
81,0
72,4
France
70,5
68,2
20 km
62,6
B Martinique
38,6
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Source : Rim-P 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
Part des personnes hospitalisées depuis plus d’un an
pour des troubles psychotiques sévères et persistants
Pour 100 patients hospitalisés
Départements et
régions d'outre-mer
50,0
A Guadeloupe
6,5
4,8
France
4,3
20 km
3,8
2,5
B Martinique
0,3
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Source : Rim-P 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
83
CARTE 33
3
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
Des variations départementales dans la DMAH
sont observées dans un rapport de 1 à 3 pour l’ensemble des groupes diagnostiques considérés.
Tout comme la part d’admission par les urgences,
la DMAH peut s’interpréter en termes de qualité
des soins. En effet, les hospitalisations prolongées peuvent être responsables d’une perte de
lien social et d’autonomie et sont peu appréciées
des patients qui jugent qu’elles ne fournissent
pas un environnement stable, rassurant et thérapeutique (Thomas et al., 1997 ; Quirk et Lelliott,
2001; Baker, s. d. ; Knapp et al., 2011). L’OMS fait
ainsi figurer de courtes durées d’hospitalisation
parmi les indicateurs permettant de déterminer le
caractère vertueux d’un service de soins de santé
mentale (OMS, 2005, 2012, 2003). Il est ainsi recommandé que les séjours hospitaliers soient aussi brefs que possible, réservés aux soins aigus et
organisés rapidement et uniquement lorsque cela
est nécessaire (Thornicroft et Tansella, 2003). Ces
préconisations sont également soutenues par des
rapports institutionnels nationaux (Laforcade,
2016). Néanmoins, une réduction trop drastique
des durées de séjour peut conduire à augmenter
les taux de réhospitalisation. La DMAH, calculée
sur l’année, permet de tenir compte de ce phénomène : elle reflète davantage la prise en charge annuelle – en permettant de tenir compte des réhospitalisations – que la durée moyenne de séjour,
qui représente par ailleurs davantage une notion
administrative que clinique. Son utilisation est
soutenue par l’ATIH ainsi que par l’OMS (OMS,
2005, 2012. ATIH, s.d.).
Les variations observées entre départements pour
la DMAH ont plusieurs implications. Elles peuvent
résulter de variations de pratiques entre établissements hospitaliers ainsi que de variations dans
les prises en charge alternatives à l’hospitalisation
proposées par ces établissements (Gandré et al.,
2017a) ou par le secteur social et médico-social
environnant. Ces variations de pratiques peuvent
également se traduire par des variations dans la
qualité des soins prodigués par les établissements.
Tout comme pour les valeurs des DMAH, des taux
de réhospitalisation à temps plein plus élevés
sont observés pour les troubles sévères et persistants comparativement aux troubles fréquents en
2015. Ainsi, 11 % des patients hospitalisés pour un
trouble psychotique, bipolaire ou dépressif sévère
sont réhospitalisés dans les 15 jours qui suivent
la sortie de l’hospitalisation, contre 8 % pour les
troubles addictifs et 6 % pour les troubles névrotiques et de l’humeur. Si l’on étend la durée à 30
jours suivant la sortie d’hospitalisation, ce sont
84
Atlas de la santé mentale en France
respectivement 17 %, 13 % et 11 % de patients qui
sont réadmis en hospitalisation à temps plein
pour ces troubles. Ces chiffres sont similaires aux
taux de réhospitalisation observés suite à un séjour en MCO.
En revanche, les variations départementales sont
importantes et plus élevées pour les troubles fréquents que pour les troubles sévères. Le taux de
réhospitalisation à 15 jours varie dans un rapport
de 1 à 9 entre départements pour les troubles
sévères (carte 34), alors qu’il varie dans un rapport de 1 à 32 pour les troubles addictifs et de 1
à 36 pour les troubles névrotiques et de l’humeur
(carte 35). Par ailleurs, dans certains départements, plus d’un patient sur trois est réhospitalisé dans les 30 jours suivant la sortie, et ce pour
l’ensemble des groupes diagnostiques considérés
même si les départements concernés varient en
fonction des troubles. Tout comme pour les indicateurs mobilisés précédemment, ces variations
questionnent. Les réhospitalisations peuvent
avoir une significativité en termes de qualité des
soins en traduisant une détérioration de l’état de
santé des patients suite à une prise en charge initiale. Dans ce cadre, elles sont particulièrement
utiles pour les pathologies associées à un faible
taux de décès pour lesquelles un indicateur de
mortalité ne peut être employé (Or et Renaud,
2009). Cela est d’autant plus vrai lorsqu’elles
sont considérées à court terme, comme c’est le cas
pour les réhospitalisations à 15 et 30 jours après la
sortie de l’hospitalisation. Ces réhospitalisations
précoces sont en effet un meilleur marqueur des
prises en charge hospitalières que les réhospitalisations à plus long terme, davantage influencées
par l’évolution naturelle des troubles psychiques
(Craig et al., 2000 ; Heggestad, 2001 ; Heggestad
et Lilleeng, 2003 ; Zilber et al.,, 2011). Néanmoins,
cet indicateur est à interpréter avec prudence dans
un contexte où les retours à domicile sont encouragés précocement pour maintenir les personnes
dans leur environnement. Par ailleurs, des réhospitalisations planifiées séquentielles, que les données mobilisées ne permettent pas d’identifier,
peuvent être prévues dans le cadre de stratégies
thérapeutiques. Ainsi, il est important de n’interpréter aucun des indicateurs présentés seul mais
au contraire de mobiliser conjointement des indicateurs complémentaires (part d’admission par
les urgences, DMAH, taux de réhospitalisation…)
pour mieux caractériser la qualité des soins de
santé mentale sur les territoires.
Les soins psychiatriques sans consentement
peuvent être mobilisés en France dans les par-
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
Taux de réhospitalisation à 15 jours pour trouble mental sévère en 2015
3
CARTE 34
Pour 100 patients hospitalisés
Départements et
régions d'outre-mer
35,6
A Guadeloupe
8,8
France
6,6
6,7
5,3
20 km
4,2
B Martinique
1,0
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Source : Rim-P 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
Taux de réhospitalisation à 15 jours pour troubles de l’humeur en 2015
Pour 100 patients hospitalisés
Départements et
régions d'outre-mer
33,4
A Guadeloupe
22,0
France
17,3
18,2
15,3
20 km
13,2
B Martinique
3,7
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Source : Rim-P 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
85
CARTE 35
3
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
cours de soins des patients en présence de trois
critères indispensables : l’existence de troubles
psychiques requérant des soins, l’impossibilité
de consentir aux soins et la nécessité de soins immédiats et d’une surveillance médicale constante
ou régulière. L’établissement de certificats médicaux circonstanciés est par ailleurs nécessaire,
tout comme l’implication d’un juge pour évaluer
la légitimité de la mesure qui implique une privation de liberté. Les soins sans consentement
concernent majoritairement des personnes suivies
pour des troubles sévères (troubles psychotiques,
bipolaires et de la personnalité). Le taux de recours aux soins sans consentement s’élève à 133
pour 100 000 habitants en France en 2015. Près
de 96 000 personnes ont ainsi été concernées par
des soins sans consentement en 2018. Trois principaux modes légaux distincts peuvent conduire
aux soins sans consentement : 1/ les soins psychiatriques sur décision du représentant de l’État
(SDRE) en cas d’atteinte à la sûreté des personnes
ou à l’ordre public ; 2/ les soins psychiatriques sur
demande d’un tiers (SDT) lorsqu’une personne
justifiant d’une relation avec le patient antérieure
à l’admission en fait la demande ; 3/ les soins psychiatriques en cas de péril imminent (SPI) pour
les personnes isolées ou désocialisées pour lesquelles aucune demande de soins par un tiers n’a
pu être recueillie (Coldefy et Fernandes, 2017).
Parmi les soins sans consentement, les SDT sont
les plus fréquents et concernent 87 personnes
pour 100 000 habitants contre 29 pour 100 000
pour les SPI et 23 pour 100 000 pour les SDRE.
Les variations départementales sont particulièrement marquées pour les SPI : elles varient ainsi
dans un rapport de 1 à 69 entre départements,
contre 1 à 20 pour les SDRE et 1 à 7 pour les SDT.
Si une grande partie de ces variations s’explique
par des différences dans les populations prises
en charge et le contexte socio-économique environnant (notamment en termes de fragmentation sociale et de défavorisation) [Coldefy et al.,
2016], l’importance de ces disparités questionne.
Elles sont couramment interprétées comme un
marqueur de la qualité des soins car des prises en
charge optimales ne devraient pas mener à des situations de crise (OMS, 2005, 2012 ; Center for
Quality Assessment and Improvement in Mental
Health, 2015 ; Donisi et al., 2016 ; Hermann,
2006 ; Gandré et al., 2017b). En effet, le recours
aux soins sans consentement n’est rétrospectivement pas perçu comme justifié ou bénéfique par
les patients (Katsakou et Priebe, 2006) et peut
nuire à la relation thérapeutique. Néanmoins, ces
variations traduisent également des situations
86
Atlas de la santé mentale en France
complexes pour les professionnels de santé qui
font face à des injonctions contradictoires, d’une
part, le devoir de protection des personnes et,
d’autre part, le respect de la liberté des individus
de consentir ou non aux soins. Enfin, les disparités importantes observées pour la modalité spécifique des SPI, qui connaît une explosion depuis sa
mise en place par la loi de 2011, interrogent. Elles
semblent davantage utilisées pour admettre de façon simplifiée une personne en soins sans consentement que pour permettre l’accès aux soins de
personnes désocialisées pour lesquelles une demande de tiers n’est pas disponible.
Depuis 2011, les soins sans consentement peuvent
prendre la forme de soins ambulatoires ou d’hospitalisation à temps partiel, via les programmes
de soins, ou avoir lieu plus classiquement en hospitalisation à temps plein (Légifrance, 2011). Cette
dernière est par ailleurs un préalable à la mise en
place d’un programme de soins sans consentement. Le taux d’hospitalisation à temps plein
en soins sans consentement, tous modes légaux
confondus, atteint 115 pour 100 000 habitants
(76 pour les SDT, 27 pour les SPI et 17 pour les
SDRE) en 2015 (carte 36). Ce taux présente des
variations dans un rapport de 1 à 8 entre départements. Là encore, ces variations sont particulièrement marquées pour les SPI (rapport de 1 à 68).
Ces données confirment les résultats de travaux
précédents (Coldefy et Fernandes, 2017 ; Coldefy
et Tartour, 2015) et questionnent les pratiques et
modes d’organisation des soins en urgence des
établissements de santé et des autres acteurs du
territoire. D’autres études ont en effet mis en évidence un lien entre les variations du taux d’hospitalisation à temps plein en soins sans consentement et l’offre de soins de santé mentale dans
la communauté, notamment une offre essentiellement centrée sur la psychiatrie publique spécialisée dans certains territoires (Coldefy et al., 2016)
et le développement des alternatives à l’hospitalisation à temps plein au sein des structures hospitalières (Gandré et al., 2017c).
Par ailleurs, plus de 42 000 personnes ont été suivies dans le cadre d’un programme de soins qui
permet leur prise en charge en alternatives à l’hospitalisation à temps plein (hôpital de jour ou de
nuit, CMP, visites à domicile, etc.) en planifiant les
modalités de cette prise en charge et sa périodicité, soit 40 % des patients en soins sans consentement. Les différences géographiques sont particulièrement marquées : la part des patients pris en
charge en soins sans consentement suivis dans le
cadre d’un programme de soins varie de moins de
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
3
CARTE 36
Taux d’hospitalisation à temps plein sans consentement en 2015
Tous modes légaux
36a
Pour 100 000 habitants
de 16 ans ou plus (hors UMD)
Départements et
régions d'outre-mer
200,1
A Guadeloupe
137,0
122,6
France
114,7
20 km
107,5
B Martinique
85,9
24,9
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Rim-P 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Soins en cas de péril imminent
Pour 100 000 habitants
de 16 ans ou plus (hors UMD)
Départements et
régions d'outre-mer
87,9
A Guadeloupe
44,0
France
26,5
20 km
28,2
17,7
B Martinique
10,2
0,0
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Rim-P 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
87
36b
3
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
10 % dans six départements à plus de 70 % dans
cinq autres. Cela suggère des disparités en fonction
des territoires dans la mise en œuvre de la loi du
5 juillet 2011 ayant introduit ces programmes de
soins (Légifrance, 2011) ainsi que dans l’accès aux
soins de santé mentale.
tableau 3
Les valeurs nationales des principaux indicateurs
caractérisant les prises en charge en établissement
de santé pour des troubles psychiques fréquents ou
sévères sont synthétisées dans le tableau 3.
Synthèse des indicateurs caractérisant les prises en charge spécialisées en établissements de santé
pour des troubles psychiques fréquents ou sévères en 2015
Troubles
névrotiques
et de
l’humeur
Taux de recours en hospitalisation à temps plein
standardisé sur le sexe et l’âge (pour 100 000 habitants)
Troubles
addictifs
Troubles
psychotiques,
bipolaires
ou dépressifs
sévères
Tous motifs
de recours
228
88
292
-
Part des admissions en hospitalisation à temps plein
réalisées suite à un passage aux urgences (%)
29
25
26
-
Durée moyenne annuelle d’hospitalisation
à temps plein (jours)
33
37
71
-
Taux de réhospitalisation à temps plein à 15 jours (%)
6
8
11
-
Taux de réhospitalisation à temps plein à 30 jours (%)
11
13
17
-
Taux de recours global aux soins sans consentement
(pour 100 000 habitants)
-
-
-
133
Taux d’hospitalisation à temps plein en soins
sans consentement (pour 100 000 habitants)
-
-
-
115
Sources : Rim-p 2015, Insee .
3.3
Articulation entre ville et hôpital
3.3.1 Suivi des troubles psychiques
Le système de santé mentale français a longtemps
été caractérisé par son hospitalo-centrisme. Par
ailleurs, le cloisonnement persistant entre l’offre
de soins de santé mentale publique et privée,
l’offre de soins primaires et spécialisés, et l’offre
médico-sociale et sociale pour la prise en charge
des troubles psychiques est régulièrement souligné (Laforcade, 2016). Pourtant, une articulation
adaptée entre les différents types d’offre est un
facteur susceptible de favoriser une bonne continuité des soins avec des conséquences bénéfiques
pour l’état de santé des personnes vivant avec
des troubles psychiques. Peu d’informations sont
néanmoins disponibles en France sur la coordination des différents types de soins pour la prise en
charge de ces troubles puisqu’elles se limitent aux
données du champ sanitaire et n’incluent pas les
motifs de consultation en soins primaires. Il est
cependant possible de mobiliser des indicateurs
de suivi en amont et en aval pour les personnes
ayant été hospitalisées au moins une fois pour
un motif psychiatrique afin de mieux caractériser
88
Atlas de la santé mentale en France
l’articulation entre les intervenants ambulatoires,
qu’il s’agisse de médecins généralistes ou de spécialistes, et les acteurs hospitaliers.
Ainsi, 43 % des patients hospitalisés pour des
troubles psychotiques, bipolaires ou dépressifs
sévères en 2012 ou 2013 n’ont pas eu de suivi
spécialisé en ambulatoire (psychiatre libéral ou
CMP) l’année précédant l’hospitalisation. Ce
chiffre est encore plus élevé pour les troubles fréquents : 53 % pour les troubles addictifs et 51 %
pour les troubles névrotiques et de l’humeur.
Une des explications vient du fait que leur traitement ne requiert pas systématiquement une prise
en charge spécialisée en psychiatrie. Ainsi, les
troubles addictifs sont la plupart du temps pris en
charge de façon transversale et pluridisciplinaire,
notamment dans des structures médico-sociales
ou sociales dédiées, tandis que les troubles névrotiques et de l’humeur non sévères et persistants
peuvent être pris en charge en soins primaires en
première intention. Quel que soit le groupe diagnostique considéré, la part de patients hospitalisés n’ayant pas eu de suivi spécialisé en ambula-
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
toire en amont de l’hospitalisation varie dans un
rapport de 1 à 3 entre les départements.
Les mêmes tendances sont observées pour la part
des patients hospitalisés en 2012 ou 2013 n’ayant
pas eu de suivi spécialisé en ambulatoire (psychiatre libéral ou CMP) l’année suivant l’hospitalisation : 40 % pour les troubles psychotiques,
bipolaires et dépressifs sévères, 42 % pour les
troubles névrotiques et de l’humeur, et 52 % pour
les troubles addictifs. Ces résultats sont relativement inquiétants en termes de continuité des
soins, notamment pour les troubles sévères qui
requièrent davantage de prises en charge spécialisées, même si une partie du relais peut être
réalisée par les médecins généralistes ou dans un
CMP autre que celui de l’établissement d’hospitalisation3. Les variations géographiques les plus
importantes sont observées pour les patients souffrant de troubles sévères avec une part de patients
sans suivi spécialisé en ambulatoire variant dans
un rapport de 1 à 4 entre départements (contre 1
à 3 pour les troubles fréquents). Bien que ces variations puissent refléter le manque d’observance
des prises en charge de la part des individus (notamment du fait d’une conscience altérée de leur
trouble ou de difficultés cognitives), elles pourraient également traduire l’absence de suivi proposé adapté aux besoins et attentes des personnes
ou des disparités dans l’offre de proximité disponible. La part plus élevée de patients hospitalisés
pour des troubles psychiques fréquents sans suivi
spécialisé en ambulatoire semble s’expliquer – au
moins en partie – par le fait que ces patients sont
davantage suivis par des médecins généralistes
que par une offre de soins spécialisée. En effet,
lorsqu’on inclut les consultations de médecins
généralistes avec prescription de psychotropes
dans le suivi ambulatoire un an en aval de l’hospitalisation, la part de patients non suivis devient
plus faible pour les troubles fréquents que pour
les troubles sévères. Ainsi, elle s’élève à 14 % pour
les troubles névrotiques et de l’humeur, 16 % pour
les troubles addictifs et 20 % pour les troubles
sévères. Les résultats concernant les troubles sévères pour lesquels un suivi spécialisé est recommandé demeurent inquiétants, surtout dans certains territoires où ils atteignent jusqu’à 41 %.
cologiques. Ainsi, la part de patients hospitalisés en 2012 ou 2013 pour des troubles sévères
ayant eu au moins neuf délivrances de thymorégulateurs (prescrits notamment dans la prise en
charge des troubles bipolaires, des épisodes dépressifs récurrents et de certains troubles schizophréniques) parmi les patients hospitalisés pour
trouble sévère ayant eu au moins une délivrance
de ce type de médicaments dans l’année suivant
l’hospitalisation s’élève en moyenne à 45 % sur le
territoire français. Ceci suggère une observance
moyenne pour ces traitements, avec des variations
départementales dans un rapport de 1 à 2, soit de
28 à 59 %.
De même, seule la moitié des patients hospitalisés
en 2012 ou 2013 pour des troubles psychotiques
sévères et ayant eu au moins une prescription
d’antipsychotiques dans l’année suivant l’hospitalisation ont eu au moins neuf délivrances de
ces médicaments cette année-là. Cela illustre des
problèmes aigus d’observance dans cette population avec un manque de suivi au long cours des
traitements prescrits. Ils pourraient s’expliquer
en partie par les importants effets secondaires
associés aux traitements antipsychotiques et par
la nature des troubles ou les conditions de vie qui
peuvent perturber la perception de la nécessité
des soins (Lingam et Scott, 2002). Les disparités
territoriales sont plus fortes pour ces traitements
que pour les thymorégulateurs puisqu’il y a des
variations entre départements dans un rapport de
1 à 4 (carte 37 p. 90). Elles illustrent là encore
la difficulté d’observance des traitements dans
certains territoires qui pourrait être liée tant aux
caractéristiques de la population de ces territoires
qu’à un suivi moins intensif ou moins adapté des
patients.
Les valeurs nationales des principaux indicateurs
caractérisant l’articulation ville/hôpital pour le
suivi des troubles psychiques fréquents ou sévères
sont synthétisées dans le tableau 4 p. 90.
D’autres indicateurs permettant de mesurer la
qualité du suivi en ville des troubles psychiques
des patients hospitalisés pour des troubles sévères
concernent l’observance des traitements pharma3
Rappelons qu’il n’est possible d’identifier qu’un même patient a été pris en charge en ambulatoire dans plusieurs
établissements que s’il a également été hospitalisé dans ces établissements.
Atlas de la santé mentale en France
89
3
3
CARTE 37
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
Part des patients hospitalisés pour des troubles psychotiques en 2012 ou 2013
ayant eu plus de neuf délivrances d’antipsychotiques dans l’année suivant l’hospitalisation
Pour 100 patients hospitalisés
ayant eu au moins une
délivrance d’antipsychotiques
Départements et
régions d'outre-mer
A Guadeloupe
60,0
52,6
48,8
45,7
20 km
France
46,2
B Martinique
41,6
16,7
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Rim-P, Sniiram 2012-2014. Infographie : Irdes 2019-20.
tableau 4
Synthèse des indicateurs caractérisant les prises en charge spécialisées en établissements de santé
pour des troubles psychiques fréquents ou sévères en 2011-2014
Pour les troubles
névrotiques
et de l’humeur
Pour les troubles
addictifs
Pour les troubles
psychotiques,
bipolaires ou
dépressifs sévères
51
53
43
Psychiatre libéral ou CMP* seulement
42
52
40
Psychiatre libéral, CMP* ou
consultation de médecin généraliste
avec prescription de psychotropes
14
16
20
Part de patients ayant eu au moins 9 délivrances
de thymorégulateurs parmi les patients ayant eu
au moins une délivrance de ce type de médicaments
dans l’année suivant l’hospitalisation (%)
-
-
45
Part de patients ayant eu au moins 9 délivrances
d’antipsychotiques parmi les patients ayant eu
au moins une délivrance de ce type de médicaments
dans l’année suivant l’hospitalisation (%)
-
-
46
Indicateur
Part des patients n’ayant pas eu de suivi spécialisé
en ambulatoire (psychiatre libéral ou CMP*)
l’année précédant l’hospitalisation (%)
Part des patients
n’ayant pas eu
de suivi spécialisé
en ambulatoire
l’année suivant
l’hospitalisation (%)
* Centre médico-psychologique
90
Atlas de la santé mentale en France
Sources : Rim-P, Sniiram 2011-2014.
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
3.3.2 Accès à la prévention
et aux soins somatiques
Si l’articulation entre ville et hôpital pour le suivi
spécialisé des individus atteints de troubles psychiques est primordiale afin de garantir la continuité des soins de santé mentale, le dépistage et
la prise en charge des comorbidités somatiques
de ces individus doivent également faire l’objet
d’une attention renforcée. En effet, ils présentent
souvent des facteurs de risque de nombreuses
maladies chroniques, notamment d’ordre comportemental, telles qu’une forte consommation
de tabac, une grande sédentarité ou une moindre
observance aux traitements (Berg et al., 2013 ;
DiMatteo et al., 2000). Les personnes vivant avec
un trouble psychique sévère et persistant sont par
ailleurs exposées aux effets secondaires des médicaments psychotropes (Mitchell et al., 2013).
Enfin, les données internationales montrent une
moins bonne prise en charge somatique que celle
de la population générale tout au long de la vie,
notamment en termes d’accès aux soins, de dépistage ou de qualité des soins délivrés (Wahlbeck et
al., 2011 ; Thornicroft, 2011; Graber et al., 2000 ;
Kodl et al., 2010; Ishikawa et al., 2016; Mitchell et
Lawrence, 2011). En conséquence, les personnes
vivant avec des troubles psychiques présentent
une surmortalité marquée qui a été objectivée
dans de nombreux pays et pour l’ensemble des
groupes diagnostiques, même si elle est plus forte
pour les troubles sévères (Nordentoft et al., 2013 ;
Coldefy et Gandré, 2018 ; Saha et al., 2007 ; Colton
et Manderscheid, 2006 ; Saxena, 2018 ; Chang et
al., 2011).
En France, la réduction de l’espérance de vie à
15 ans des individus suivis pour des troubles psychiques atteint en moyenne seize ans pour les
hommes et treize ans pour les femmes (Coldefy
et Gandré, 2018). Ces individus ont également
des taux de mortalité deux à cinq fois supérieurs
à ceux de la population générale, quelle que soit
la cause de décès, et un taux de mortalité prématurée* quadruplé. Par ailleurs, contrairement
aux idées reçues, le suicide ne représente pas leur
cause de décès principale, même si le risque de
décéder par suicide est 9 fois supérieur à la population générale pour les personnes suivies pour
des troubles psychiatriques (14 fois supérieurs
pour les troubles de l’humeur). Ainsi, le cancer et
les maladies cardiovasculaires sont les deux premières causes de décès des personnes suivies pour
des troubles psychiques (Coldefy et Gandré 2018),
d’où l’importance d’un repérage précoce et d’un
suivi adéquat de ces comorbidités somatiques.
Pourtant, la proportion de patients hospitalisés
pour des troubles psychiques sévères en 2012 ou
2013 n’ayant pas déclaré de médecin traitant
n’est pas négligeable. Elle atteint ainsi 15 % pour
les troubles psychotiques, bipolaires ou dépressifs sévères. Cette part est nettement supérieure
à celle observée en population générale puisque
seuls 7 % de la population âgée de 18 à 64 ans et
3 % des individus hospitalisés (tous motifs confondus) n’ont pas déclaré de médecin traitant. Elle est
également très supérieure à celle observée chez les
personnes hospitalisées pour un trouble névrotique ou de l’humeur (4 %) ou pour des troubles
addictifs (7 %). Or ce sont chez les personnes vivant avec un trouble sévère que les risques de comorbidités somatiques sont les plus importants.
Renforçant ces premiers constats, seul un tiers des
patients hospitalisés pour des troubles sévères en
2012 ou 2013 a consulté son médecin traitant dans
les deux mois qui suivent la sortie de l’hospitalisation, et 36 % l’ont consulté dans les deux mois qui
ont précédé ce séjour hospitalier. Chez les patients
hospitalisés pour des troubles fréquents en 2012
ou 2013, la place du médecin traitant est plus importante : 54 % des patients hospitalisés pour des
troubles névrotiques et de l’humeur et 46 % des
patients hospitalisés pour des troubles addictifs
l’ont consulté dans les deux mois précédant l’admission. Ces chiffres s’élèvent respectivement à
49 % et à 42 % les deux mois suivant la sortie.
La déclaration d’un psychiatre comme médecin
traitant est rare et ne concerne que 0,2 % des
personnes hospitalisées pour un trouble sévère
en 2012 ou 2013. La part des patients hospitalisés pour des troubles psychiques, qu’ils soient
modérés et fréquents ou sévères, n’ayant pas de
médecin traitant connaît de fortes disparités géographiques puisqu’elle varie au minimum dans un
rapport de 1 à 10 entre départements, montrant
que des efforts peuvent être faits dans certains
territoires. Dans les départements où la part des
patients hospitalisés pour des troubles psychiques
n’ayant pas déclaré de médecin traitant est la plus
élevée, elle atteint près d’un patient sur trois pour
les troubles psychotiques, bipolaires et dépressifs
sévères et les troubles addictifs, et un patient sur
cinq pour les troubles névrotiques et de l’humeur.
Les disparités territoriales observées sont relativement similaires pour l’ensemble des groupes
diagnostiques considérés (même si les variations
apparaissent particulièrement marquées pour les
troubles addictifs), les enjeux d’amélioration étant
particulièrement importants dans certains départements, plutôt situés dans la moitié nord du pays
Atlas de la santé mentale en France
91
3
3
CARTE 38
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
Part des patients hospitalisés pour des troubles addictifs en 2012 ou 2013
n’ayant pas déclaré de médecin traitant
Pour 100 patients hospitalisés
Départements et
régions d'outre-mer
34,0
A Guadeloupe
9,2
7,1
France
6,5
20 km
5,9
4,6
B Martinique
1,6
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
CARTE 39
Discrétisation : quintiles. Sources : Rim-P, Sniiram 2012-13. Infographie : Irdes 2019-20.
Part des patients hospitalisés pour des troubles psychiques sévères en 2012 ou 2013
n’ayant pas déclaré de médecin traitant
Pour 100 patients hospitalisés
Départements et
régions d'outre-mer
31,8
A Guadeloupe
18,2
France
14,5
14,4
12,6
20 km
10,7
B Martinique
2,0
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
92
Discrétisation : quintiles. Sources : Rim-P, Sniiram 2012-13. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
(cartes 38 et 39). Une partie de ces disparités
pourrait s’expliquer par des variations dans les
densités de médecins généralistes, pouvant se traduire par des difficultés à trouver un médecin traitant acceptant de nouveaux patients dans certains
territoires, ainsi que par un cloisonnement entre
les soins primaires et les soins spécialisés.
La Fédération française de psychiatrie-Conseil national professionnel de psychiatrie (FFP-CNPP) a
élaboré des recommandations de bonne pratique
pour améliorer la prise en charge somatique des
personnes ayant une pathologie psychiatrique sévère et chronique (schizophrénie et trouble bipolaire). Ces recommandations insistent sur l’importance du rôle du médecin généraliste pour assurer
le suivi somatique de ces patients, qui est d’autant
mieux assuré quand le médecin généraliste est le
médecin traitant. Elles soutiennent également le
développement de la prévention chez les individus
souffrant de troubles psychiques, notamment des
actions de dépistage des complications couramment associées aux traitements psychotropes. De
plus en plus d’études soulignent les risques associés aux antipsychotiques, dont la prise de poids
et des anomalies glucidiques et lipidiques pouvant se traduire par un syndrome métabolique.
En conséquence, les recommandations de bonnes
pratiques indiquent la nécessité de suivre l’évolution du risque métabolique et cardio-vasculaire
chez les individus atteints de troubles psychiques
(FFP-CNPP, 2015 ; Godin et al., 2017, 2015). Bien
que ces recommandations s’adressent davantage
aux patients souffrant de troubles psychiques
sévères du fait des traitements médicamenteux
associés, les actes de prévention classiques permettant de surveiller ce risque (bilan sanguin,
glycémie et cholestérol) sont davantage réalisés
chez les patients souffrant de troubles fréquents et
modérés. Ainsi, la part de patients hospitalisés en
2012 ou 2013 ayant eu l’ensemble de ces actes de
prévention classique dans les deux ans qui suivent
l’hospitalisation est plus élevée chez les patients
souffrant de troubles névrotiques et de l’humeur
(54 %) et de troubles addictifs (47 %) que chez
ceux souffrant de troubles psychotiques, bipolaires ou dépressifs sévères (44 %).
Dans le cadre des bonnes pratiques de prise en
charge des individus souffrant de troubles psychiques, des examens complémentaires sont
également recommandés pour les patients ayant
des traitements antipsychotiques. Ces examens
incluent notamment le bilan hépatique, l’ionogramme, le dosage de la protéine C réactive,
l’exploration de base de l’hémostase, le dosage
sanguin de la thyréostimuline et l’électrocardiogramme (FFP-CNPP, 2015). En pratique, une
très faible part de patients hospitalisés pour des
troubles psychiques fréquents ou sévères et persistants en 2012 ou 2013 a bénéficié d’au moins
trois de ces actes de prévention complémentaires (dont électrocardiogramme et bilan rénal)
dans les deux ans qui suivent l’hospitalisation.
Cette part s’élève en effet à 15 % pour les troubles
psychotiques, bipolaires ou dépressifs sévères,
17 % pour les troubles addictifs et 18 % pour les
troubles névrotiques et de l’humeur. Cependant,
ces faibles taux peuvent en partie s’expliquer par
le fait que les actes ayant lieu pendant les séjours
hospitaliers (notamment les bilans d’entrée systématiques) ne sont pas identifiés dans le système
d’information.
Concernant la part de patients hospitalisés ayant
eu des actes de prévention en termes de dépistage
(cancers du sein et du col de l’utérus), également
fortement soutenus par les recommandations de
bonnes pratiques (FFP-CNPP, 2015), et de vaccination (diphtérie, tétanos, poliomyélite) en ville
dans les deux années qui suivent l’hospitalisation,
cette proportion est plus élevée pour les patients
souffrant de troubles sévères (23 %) que pour ceux
souffrant de troubles addictifs (17 %) alors qu’elle
est similaire à celle de la population générale pour
les patients souffrant de troubles névrotiques et
de l’humeur (33 %). Lorsqu’on ne considère que
la population féminine, les tendances par groupe
diagnostique sont similaires : cette part atteint
51 % pour les patientes avec un trouble névrotique
ou de l’humeur, 43 % pour celles avec un trouble
psychique sévère et persistant et 40 % pour celles
avec un trouble addictif.
Plus généralement, les personnes vivant avec des
troubles psychiques recourent moins aux soins
somatiques courants que la population générale.
Parmi les personnes hospitalisées pour un trouble
psychique en 2012 ou 2013, seules 40 % des personnes ayant un trouble sévère, 41 % de celles
ayant un trouble addictif et 49 % de celles ayant
un trouble névrotique ou de l’humeur ont eu des
soins dentaires, ophtalmologiques ou gynécologiques en ville dans les deux ans qui ont suivi leur
sortie d’hospitalisation. A titre comparatif, 76 %
de la population générale âgée de 18 à 64 ans a
bénéficié de tels soins sur une période de deux
ans. Là encore des disparités territoriales importantes existent selon les départements (carte 40
p. 94). Ces variations peuvent être en partie
liées à la disponibilité de l’offre de soins en ville,
en particulier libérale, mais suggèrent également
Atlas de la santé mentale en France
93
3
3
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
Part des personnes hospitalisées pour un trouble psychique sévère en 2012 ou 2013
ayant eu des soins dentaires, ophtalmologiques ou gynécologiques
dans les deux ans suivant leur sortie
CARTE 40
Pour 100 patients hospitalisés
Départements et
régions d'outre-mer
52,4
A Guadeloupe
43,2
41,2
39,4
France
40,2
20 km
37,5
B Martinique
28,7
Non
disponible
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Rim-P, Sniiram 2012-13. Infographie : Irdes 2019-20.
tableau 5
Synthèse des indicateurs caractérisant l’accès à la prévention et aux soins somatiques
des personnes hospitalisées en 2012 ou 2013 pour des troubles psychiques sévères ou fréquents
Pour les troubles Pour les troubles Pour les troubles
névrotiques
addictifs
psychotiques,
et de l’humeur
bipolaires ou
dépressifs sévères
Indicateur
Part de patients n’ayant pas déclaré de médecin traitant (%)
4
7
15
Part de patients ayant eu l’ensemble des actes de prévention
classique1 dans les deux ans suivant l’hospitalisation (%)
54
47
44
Part de patients ayant eu au moins trois actes de prévention
complémentaires2 dans les deux ans suivant l’hospitalisation
(%)
18
17
15
Tous sexes confondus (%)
33
17
23
Chez les femmes (%)
51
40
43
49
41
40
Part de patients ayant eu des
actes de prévention en termes
de dépistage3 et de vaccination4
dans les deux ans suivant
l’hospitalisation (%)
Part des patients ayant eu des soins dentaires,
ophtalmologiques ou gynécologiques
dans les deux ans suivant l’hospitalisation (%)
bilan sanguin, glycémie et cholestérol ;
dont électrocardiogramme et bilan rénal ;
cancer du sein et cancer du col de l’utérus ;
4
diphtérie, tétanos, poliomyélite.
1
2
3
94
Atlas de la santé mentale en France
Sources : Rim-P, Sniiram 2012-2015 .
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
des variations dans la mise en œuvre des bonnes
pratiques de soins somatiques des individus souffrant de troubles psychiques.
Les valeurs nationales des principaux indicateurs
caractérisant l’accès à la prévention et aux soins
somatiques des individus hospitalisés pour des
troubles psychiques sévères ou fréquents en 2012
ou 2013 sont synthétisés dans le tableau 5.
***
Les données mobilisées dans le cadre de cet atlas, bien que ne permettant qu’une caractérisation parcellaire car essentiellement sanitaire des
soins de santé mentale, soulignent des prises en
charge hétérogènes pour les troubles psychiques
fréquents et les troubles sévères et persistants sur
le territoire français, avec des indicateurs de recours et de prise en charge variant fortement selon les départements. Ces variations interrogent
la qualité, l’équité et l’efficience des prises en
charge spécialisées pour les individus souffrant de
ces troubles en France. Elles restent néanmoins
à interpréter au regard des indicateurs mobilisés
qui ne tiennent pas directement compte de l’environnement des soins, dont les disparités d’offre
disponible en termes de structures médico-sociales ou complémentaires aux soins tels que les
groupements d’entraide mutuelle ou des dispositifs formalisés d’aide par les pairs. Les prises en
charge sanitaires doivent par ailleurs s’appuyer
sur une articulation forte entre soins hospitaliers
et soins de ville, dans une logique de décloisonnement de l’offre de soins à destination des personnes vivant avec des troubles psychiques. Cette
articulation semble encore limitée, notamment
pour les troubles psychiques sévères et persistants. Par ailleurs, le suivi des comorbidités somatiques des patients souffrant de troubles psychiques reste insuffisant en France, là encore plus
particulièrement pour les troubles psychiques
sévères, même si les indicateurs mobilisables ne
permettent pas de caractériser toutes ses dimensions, dont l’éducation thérapeutique. Les défauts
d’articulation entre soins somatiques et soins
psychiatriques pourraient en partie expliquer la
surmortalité récemment objectivée chez les individus suivis pour de tels troubles (Coldefy et
Gandré, 2018) et suggère une marge d’amélioration pour la prise en charge globale des personnes
vivant avec des maladies psychiques. Des évolutions à venir du SNDS, dont l’incorporation de
données sur le secteur médico-social et l’inclusion
d’un identifiant national unique pour les patients
pris en charge en ambulatoire en établissement
de santé, devraient permettre à terme de compléter cette première photographie de la prise en
charge des troubles psychiques fréquents, et des
troubles sévères et persistants à l’échelle nationale, dont l’exhaustivité reste liée aux données
disponibles.
Remerciements aux relecteurs : Guillaume Fond (Assistance publique-hôpitaux de Marseille, AP-HM), Alain Monnier
(Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques, Unafam), Nadia Younès
(Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines).
Atlas de la santé mentale en France
95
3
3
Troubles psychiques sévères et troubles psychiques fréquents chez les 18-64 ans
96
Atlas de la santé mentale en France
chapitre
4
Les personnes âgées
Miléna Spach1, Magali Coldefy2
1
D
Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees)
2
Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes)
’après l’Institut national de la statistique et des études économiques
(Insee), la France compte, au 1er janvier
2017, 12,8 millions de personnes âgées de 65 ans
et plus1, soit près d’un habitant sur cinq. De plus,
comme dans l’ensemble des pays occidentaux, l’espérance de vie* augmente d’une manière progressive et constante. Cet allongement de l’espérance
de vie s’accompagne d’une augmentation de la prévalence* des pathologies liées à l’âge et des besoins
spécifiques de prise en charge de ces populations
particulièrement vulnérables. En France, les territoires vont être différemment confrontés à cette augmentation de la population âgée. Les régions actuellement les plus âgées sont la Nouvelle-Aquitaine, la
Corse, la Bourgogne Franche-Comté, l’Occitanie et
la Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca), où la part des
65 ans ou plus excède 21 % de la population (Insee,
2013) [carte 41 p. 98]. Les projections de population de l’Insee (2017) prévoient que les personnes
âgées de 65 ans ou plus représenteront plus d’un habitant sur quatre (27 %) en 2050. Dans plusieurs départements, près de quatre habitants sur dix auront
plus de 65 ans : Martinique, Creuse, Lot, Cantal,
Dordogne. Or, la population âgée constitue une population spécifique dans le sens où, relativement à
la population générale, une plus grande partie de la
population souffre d’un problème de santé mentale
(Lôo et Gallarda, 2000 ; OMS, 2016). Ces évolutions
font de la prise en charge des troubles psychiques*
du sujet âgé un enjeu majeur de l’organisation des
1
soins et de l’accompagnement à destination de ces
personnes, particulièrement marqué dans certains
territoires ruraux du pays où se concentre la population âgée.
Pour l’étude de la santé mentale, les personnes
âgées se composent de deux sous-populations : les
personnes âgées sans antécédents de troubles psychiques et dont des troubles (dépression, anxiété,
troubles du sommeil) peuvent se développer lors du
vieillissement et être à l’origine d’une comorbidité
importante, et les personnes âgées avec antécédents
de troubles psychiques pour lesquelles le passage
des dispositifs adultes aux dispositifs pour les personnes âgées peut compromettre la continuité de
la prise en charge, et qui s’accompagne d’un risque
de handicap et de surmortalité (DGS, 2008). De
plus, les maladies neurodégénératives (Alzheimer,
Parkinson, sclérose en plaques, etc.), qui se traduisent par des troubles du comportement, de la
personnalité et des troubles cognitifs, surviennent
le plus souvent au-delà de 65 ans. Plus précisément,
le vieillissement est une période de vie qui s’accompagne de plusieurs facteurs de stress, sources
potentielles de souffrance psychologique, susceptibles d’avoir un impact sur la santé mentale (DGS,
2008). Pourtant, l’évaluation de la santé mentale
des sujets âgés a été longtemps négligée (Schuster
et al., 2013). D’après l’OMS (2016), plus de 20 %
de la population mondiale âgée de 60 ans ou plus
souffre d’un problème de santé mentale ou neuro-
Dans la suite du chapitre, nous emploierons le terme « personne âgée » pour désigner les personnes âgées de 65 ans ou
plus.
Atlas de la santé mentale en France
97
4
CARTE 41
Les personnes âgées
Pourcentage des 65 ans et plus dans la population générale, 2013
98
Atlas de la santé mentale en France
Les personnes âgées
logique, dont les plus courants sont la démence*
(maladie neurodégénérative*, maladie d’Alzheimer ou maladies apparentées) et la dépression*.
Plusieurs études françaises montrent une forte
prévalence des troubles psychiques, en particulier des troubles dépressifs chez les personnes
âgées. Pisarik et Rochereau (2017) observent, à
partir des données de l’Enquête santé européenne
(EHIS), la présence de symptômes dépressifs chez
15 % des personnes âgées de 75 ans ou plus vivant
à domicile (contre 7 % des 15 ans ou plus). L’étude
de Ritchie et al. (2004) observait quant à elle, chez
les plus de 65 ans, des prévalences ponctuelles de
troubles anxieux* de 14,2 %, d’épisodes dépressifs
majeurs* de 3 % et de troubles psychotiques* de
1,7 %. Selon Schuster et al. (2013), l’utilisation
d’instruments d’évaluation spécifiques aux sujets
âgés augmenterait encore ces mesures de prévalence du fait des spécificités cliniques de la dépression chez les sujets âgés (plaintes somatiques
souvent au premier plan, moindre expression des
affects dépressifs, etc.) [Thomas et Hazif-Thomas,
2008]. Les facteurs de risque les plus importants
sont les maladies chroniques et les douleurs physiques, l’isolement social, la précarité financière,
la perte du conjoint ou d’amis, ou encore l’approche de la mort.
À ce titre, les personnes âgées sont 6,6 % à résider
dans des communes rurales isolées (Insee, 2013),
potentiellement éloignées des services, et 31,6 %
des personnes âgées vivent seules (Insee, 2013).
Dans certains départements comme la Lozère
ou la Creuse, plus d’une personne âgée sur deux
vit dans une commune rurale isolée (carte 42a
p. 100). En revanche, les personnes âgées vivant
seules se situent davantage dans des départements
urbains (Paris, Hauts-de-Seine, Alpes-Maritimes)
(carte 42b p. 101). Si l’isolement constitue un
facteur de risque important de développement
des troubles psychiques, les personnes vivant en
institution sont également très concernées par
les troubles psychiques. Une étude récente de la
Drees fait état d’un état psychologique dégradé
par un tiers des personnes âgées vivant en institution (Abdoul-Carime, 2020). Cet écart s’explique
en partie par le fait que la dégradation de l’état de
santé de ces personnes a souvent conduit à l’entrée en institution. Dans ce sens, plusieurs études
montrent une prévalence* plus importante des
troubles psychiques chez les personnes âgées vivant en institution, notamment en Unités de soins
de longue durée (USLD)* et en Etablissements
d’hébergement pour personnes âgées (EHPA)*,
avec des conséquences importantes en termes de
qualité de vie et de morbi-mortalité somatique
(Schuster et al., 2013). D’après le rapport France,
portrait social (2018), la prévalence de la dépression chez les personnes âgées en institution est
estimée à 18 %, contre 7 % chez les personnes à
domicile. En France, 9,6 % des personnes âgées
de 75 ans ou plus (soit près de 600 000 individus)
vivent en institution (Insee, 2013), proportion qui
varie de 2,5 % en Guadeloupe à 17,4 % en Lozère.
Cette hétérogénéité est à mettre en regard avec les
disparités départementales d’offre d’hébergement
disponible pour les personnes âgées (encadré 3).
Offre d’hébergement disponible pour les personnes âgées
Trois principaux types d’hébergements
sont proposés aux personnes âgées
selon leur degré de dépendance : résidences autonomie*, Etablissements
d’hébergement pour personnes âgées
dépendantes (Ehpad),* Unités de soins
de longue durée (USLD)*. En 2017, on
compte en France 608 000 places
dans les Ehpad, soit 5,2 places pour
100 personnes âgées de 65 ans ou
plus (Finess, 2017 ; Insee, 2013). Ce
taux varie de moins de 5 places pour
100 personnes à Paris, dans les Dé-
4
partements et régions d’outre-mer
(Drom) et en Corse du Sud, à plus de
15 places pour 100 personnes âgées
dans l’Yonne, en Ardèche ou en Lozère. À côté de cette offre d’hébergement médicalisée pour les personnes
âgées dépendantes, elles peuvent
également être hébergées dans des
résidences autonomie*. On compte en
France 125 600 places dans ces structures, soit un taux d’équipement national de 1,1 place pour 100 habitants
de 65 ans ou plus (Finess, 2017 ; Insee,
2013). Ici, la Corse, l’Yonne, les Landes
et les Hautes Pyrénées apparaissent
très peu dotées de ce type de structures, alors que les départements de la
Seine-Maritime, du Maine-et-Loire, de
l’Oise, de l’Eure et de la Marne ont une
politique d’accueil plus importante
en la matière. Enfin, en 2017, pour les
personnes âgées de 65 ans ou plus, on
compte 31 600 places dans les USLD,
soit 0,3 place pour 100 habitants
(Finess, 2017 ; Insee, 2013).
Atlas de la santé mentale en France
99
ENCADRÉ 3
4
CARTE 42
Les personnes âgées
L’isolement social et spatial des personnes âgées
42a
Part des personnes âgées vivant dans des communes rurales isolées en 2013
100
Atlas de la santé mentale en France
Les personnes âgées
4
CARTE 42
L’isolement social et spatial des personnes âgées
Part des personnes âgées vivant seules en 2013
Atlas de la santé mentale en France
101
42b
4
Les personnes âgées
Parmi les autres facteurs liés à l’émergence et au
développement des troubles psychiques chez les
personnes âgées, la précarité est régulièrement
identifiée dans la littérature, par exemple au travers du fait d’être allocataire du minimum vieillesse (Pisarik, 2018). En effet, la population des
personnes âgées affiche un taux de pauvreté relativement important, bien qu’inférieur à la population totale. En 2013, en France métropolitaine,
8,9 % des plus de 75 ans (soit plus de 500 000
personnes) vivent sous le seuil de pauvreté, contre
14,5 % de la population totale. Ici encore, la variabilité entre départements est forte puisqu’en
Lozère, Creuse, Corse, Aude et Gers, plus de 17 %
des personnes âgées de 75 ans ou plus vivent sous
le seuil de pauvreté*, contre 5 % dans les Yvelines
ou l’Essonne (carte 43).
CARTE 43
Les facteurs géographiques et économiques sont
d’autant plus importants que les personnes isolées
ou en situation d’exclusion ou de précarité sont
davantage susceptibles d’être atteintes de troubles
psychiques non détectés par les services médicaux
ou sociaux (Labbé et al., 2007). Ainsi, des actions
de prévention, de lutte contre l’isolement social
des personnes âgées sont développées dans plusieurs territoires, à l’instar du projet Monalisa de
lutte contre l’isolement social des seniors via un
réseau de proximité très local de veille, repérage et
densification des liens sociaux. Ce dispositif a été
instauré en décembre 2015, dans le cadre de la loi
d’adaptation de la société au vieillissement.
Taux de pauvreté des personnes âgées de 75 ans ou plus, 2013
Pour 100 habitants
de 75 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
23,8
A Guadeloupe
13,4
11,4
9,8
8,3
20 km
France
8,9
B Martinique
4,9
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Insee Filosofi 2013. Infographie : Irdes 2019-20.
102
Atlas de la santé mentale en France
20 km
Les personnes âgées
4
4.1. Le recours aux soins de santé mentale des personnes
âgées
Les troubles psychiques des personnes âgées sont
souvent négligés et non traités, les symptômes
étant associés au vieillissement (Rigaud et al.,
2005), et les expressions cliniques spécifiques
et complexes souvent mal appréhendées par les
professionnels de santé. Par ailleurs, la stigmatisation des maladies mentales rend les personnes
âgées réticentes à consulter (OMS, 2016). De plus,
leur prise en charge est complexe du fait de la
fréquence des troubles cognitifs associés, d’une
symptomatologie différente, de la polypathologie
ou encore de la polymédication (Peyneau et al.,
2016), et la formation des professionnels n’est pas
toujours adaptée. C’est seulement en 2017 que
la psychiatrie du sujet âgé est reconnue comme
une sous-spécialité de la psychiatrie en France,
au même titre que la psychiatrie de l’enfant et de
l’adolescent, avec la mise en place d’une option
spécifique qualifiante. La France rattrape ainsi
un retard certain par rapport à ses voisins européens (Hanon et Camus, 2010). La mise en place
d’un enseignement spécifique devrait permettre à
terme de structurer l’offre de soins à destination
des personnes âgées, en améliorant la formation
des professionnels à la clinique du sujet âgé, et la
lisibilité de l’offre existante.
De nombreux professionnels et structures des
champs sanitaires et médico-sociaux, publics et
privés, spécialisés ou non dans la prise en charge
des maladies mentales, vont intervenir dans le
soin et l’accompagnement des personnes âgées
(détails dans la figure 6).
En 2015, 5,8 % des personnes âgées de 65 ans ou
plus ont été prises en charge pour une pathologie
psychiatrique identifiée via une hospitalisation
ou une Affection de longue durée (ALD)* [pour
lesquelles un diagnostic codé selon la Cim 10
est enregistré (Cnam, 2017)], soit 607 000 personnes. Ces chiffres ne prennent pas en compte
les 725 000 personnes de 65 ans ou plus prises
en charge pour une maladie neurodégénérative
(dont maladie d’Alzheimer) ou pour des troubles
cognitifs. Au sein de cette prise en charge pour
pathologie psychiatrique, les troubles névrotiques ou de l’humeur* sont majoritaires (2,6 %
de l’ensemble des personnes âgées), suivis des
troubles psychotiques* (0,8 %), et des troubles
liés à l’addiction* (0,3 %) [principalement l’alcool
et les psychotropes] (Cnam, 2016). Les disparités
montrent, pour les troubles névrotiques, des recours plus importants en Haute-Loire (4,9 %), en
Creuse (4,2 %) ainsi qu’en Lozère et dans le Puyde-Dôme (3,9 %), et plus faibles dans les Drom
(< 1,5 %) [carte 44a p. 104]. Néanmoins, pour
les troubles psychotiques, les Drom figurent parmi les départements dans lesquels le recours est
le plus important (Guadeloupe 1,6 %, Martinique
1,2 %, La Réunion 1,1 %), au même titre que la
Lozère (1,5 %), tandis que la Charente et Mayotte
affichent les taux les plus faibles (inférieurs à
0,5 %) [carte 44b p. 104].
Le recours aux soins de santé mentale des personnes âgées
Personne âgée
Réseaux et établissements sociaux ou médico-sociaux
contribuant au maintien à domicile ou à l’accueil résidentiel
Soins
non spécialisés
Soins
spécialisés
• Services de soins infirmiers à domicile (Ssiad)
• Services polyvalents d'aide et de soins à domicile (Spasad)
• Urgences
• Hospitalisation à domicile (HAD)
• Maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades Alzheimer
(Maia)
• Services de
médecine,
chirurgie,
obstétrique
(MCO)
• Plateformes territoriales d'appui (PTA)
• Gériatres
• Réseaux de santé gérontologiques
• Médecins
généralistes
• Centres locaux d'information et de coordination (Clic)
• Établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes
(Ehpad)
• Établissements
de santé publics
et privés autorisés
en psychiatrie
• Professionnels
de santé de ville :
psychiatres,
psychologues
Temps complet,
temps partiel,
ambulatoire
Atlas de la santé mentale en France
103
FIGURE 6
4
Les personnes âgées
Taux de personnes âgées de 65 ans et plus prises en charge
pour une pathologie psychiatrique en 2015
CARTE 44
44a
Pour troubles névrotiques ou de l’humeur
Pour 100 000 consommants
de 65 ans et plus
Départements et
régions d'outre-mer
4 867,6
A Guadeloupe
3 158,8
2 744,3
France
2 650,9
2 517,7
20 km
B Martinique
2 216,6
152,2
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Source : Cnam 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
44b
Pour troubles psychotiques en 2015
Pour 100 000 consommants
de 65 ans et plus
Départements et
régions d'outre-mer
1 610,6
A Guadeloupe
920,5
France
768,6
787,6
720,2
20 km
B Martinique
641,5
152,2
20 km
C Guyane
ENCADRÉ 1
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Source : Cnam 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
104
Atlas de la santé mentale en France
20 km
Les personnes âgées
En 2015, 2,4 % des personnes âgées de 65 ans
ou plus (soit près de 284 000 individus) ont été
prises en charge dans un établissement autorisé
en psychiatrie à temps complet, partiel ou en ambulatoire2. Les principales pathologies prises en
charge sont les troubles de l’humeur (29,4 % des
séjours) et les troubles névrotiques ou liés à des
facteurs de stress et les troubles somatoformes
(16,1 % des séjours) [Recueil d’information médicalisé en psychiatrie (Rim-P), 2015].
Le recours à un établissement autorisé en psychiatrie se fait majoritairement en ambulatoire (2,2 %)
[Rim-P, 2015]. Seules 0,5 % des personnes âgées
ont été hospitalisées en psychiatrie (Rim-P, 2015)
(carte 45a p. 106). Parmi les soins ambulatoires,
les soins à domicile (ou substitut de domicile) représentent 17,1 % des soins ambulatoires, mais
cette part est très variable d’un territoire à l’autre.
Les soins à domicile constituent plus d’un tiers
des actes dans certains départements (Corrèze,
Côte-d’Or, Creuse, Pas-de-Calais) contre moins
de 5 % dans d’autres (Vaucluse, Vendée, Vienne)
[Rim-P, 2015]. Par ailleurs, les équipes de psychiatrie peuvent également assurer une activité
de liaison vers le secteur médico-social. Cette activité représente 10,6 % des soins ambulatoires à
destination des personnes âgées, correspondant à
plus de 30 % des soins dans les Deux-Sèvres et le
Lot, contre moins de 1 % dans sept départements
(Haute-Corse, Creuse, Nièvre, Val-d’Oise, Paris,
Hauts-de-Seine, Guyane) [Rim-P, 2015].
En raison de la polypathologie souvent associée,
une partie du recours en établissement de santé
des personnes âgées pour des problèmes psychiques s’exerce également au sein de la filière
somatique et gériatrique. Ce recours est d’ailleurs
supérieur à celui qui s’exerce en hospitalisation en
psychiatrie. Ainsi, 112 000 personnes âgées sont
hospitalisées en Médecine, chirurgie et obstétrique (MCO) pour un motif psychiatrique (PMSIMCO, 2015), soit 1,0 % de la population âgée
(carte 45b p. 106). Les disparités départementales indiquent toutefois certains écarts importants puisque le taux de personnes âgées hospitalisées en MCO pour motif psychiatrique dépasse
1,5 % dans le Val-de-Marne, Haut-Rhin, Paris et
les Ardennes, contre 0,5 % en Corse, PyrénéesOrientales, Aude et Guyane.
Ainsi, pour les personnes âgées, le recours en hospitalisation pour motif psychiatrique se fait davan2
tage en MCO. Dans 7 départements, le taux d’hospitalisation en MCO pour motif psychiatrique est
cinq fois supérieur au taux d’hospitalisation dans
un service de psychiatrie (Corse-du-Sud, Aveyron,
Lot, Tarn, Haute-Loire, Creuse, Haute-Vienne)
[PMSI-MCO, 2015 ; Rim-P, 2015]. À l’inverse, le
recours se fait de manière plus équilibrée entre
les deux disciplines médicales pour les départements de la Haute-Corse, du Val-d’Oise, du Valde-Marne, de l’Essonne, de la Haute-Garonne,
des Ardennes, de la Haute-Savoie (PMSI-MCO,
2015 ; Rim-P, 2015). Ce recours différencié vers
la psychiatrie ou les soins somatiques et la gériatrie peut être lié à la nécessité de prise en charge
des comorbidités somatiques, fréquentes chez les
personnes âgées, mais également à la structuration de l’offre de soins sur les territoires. En l’absence d’une reconnaissance de la spécialité de la
psychiatrie du sujet âgé en France et d’une offre
associée identifiée, l’offre de soins à destination
des personnes âgées s’est développée de façon
hétérogène, parfois à l’initiative de la gériatrie,
parfois à celle de la psychiatrie. Cette organisation
a des conséquences sur les prises en charge, plus
ou moins centrées sur la question des démences
et des maladies neurodégénératives, ou sur une
véritable psychiatrie du sujet âgé (couvrant l’ensemble des troubles psychiques antérieurs ou
postérieurs au vieillissement : troubles dépressifs,
psychoses, addictions, etc.).
L’hospitalisation à temps plein des personnes
âgées n’est pas toujours réalisée dans des conditions d’accueil adaptées, notamment les passages
par les urgences doivent être évités autant que
possible. En effet, l’organisation classique des urgences n’est pas adaptée pour des patients âgés
présentant par exemple des troubles cognitifs ou
des risques liés au décubitus* prolongé (Sough et
al., 2012). Cependant, 10,4 % des personnes âgées
hospitalisées en psychiatrie sont admises via les
urgences, avec des disparités importantes entre
départements : deux départements (Ardennes
et Guadeloupe) affichent plus de 40 % de parts
d’admission par les urgences des personnes âgées
en psychiatrie (Rim-P, 2015). Lorsque l’hospitalisation a lieu dans un service somatique, la part
d’admission par les urgences des personnes âgées
s’élève quant à elle à 44,4 % (PMSI-MCO, 2015).
Chez les personnes âgées, la dépression est associée à un risque important de passage à l’acte suicidaire (Observatoire national du suicide, 2016),
Ici encore, les chiffres ne tiennent pas compte des personnes âgées atteintes de maladie neurodégénérative ou de
troubles cognitifs.
Atlas de la santé mentale en France
105
4
4
CARTE 45
Les personnes âgées
Taux d’hospitalisation des 65 ans ou plus en 2015
45a
En psychiatrie
Pour 10 000 habitants
de 65 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
123,9
A Guadeloupe
71,9
56,6
France
55,0
20 km
45,3
B Martinique
41,9
18,0
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Rim-P, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
45b
En MCO pour un motif psychiatrique
Pour 10 000 habitants
de 65 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
188,6
A Guadeloupe
110,6
89,8
France
96,2
20 km
79,4
B Martinique
68,0
35,5
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : PMSI-MCO, Insee 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
106
Atlas de la santé mentale en France
20 km
Les personnes âgées
y compris en Ehpad où le risque est accru dans la
première année qui suit l’entrée de la personne
(Anesm, 2014). D’après les données du Centre
d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc, 2011), 28 % des suicides survenus
en France ont concerné des personnes âgées, ce
qui représente plus de 2 900 personnes3. Le taux
de suicides est multiplié par 10 entre les 15-25
ans et les plus de 75 ans ; le taux de suicide étant
maximal chez les hommes âgés de plus de 85 ans
(Mouquet et Bellamy, 2006). La grande majorité (90 %) des suicides des personnes âgées sont
en lien avec un trouble psychiatrique (Anesm,
2014), notamment la dépression (Hawton et al.,
2013) dont le diagnostic est malaisé car il peut être
confondu avec d’autres maladies. Aussi, le taux de
recours en hospitalisation pour tentative de suicide des 65 ans ou plus est de 5,4 pour 10 000 habitants de 65 ans ou plus (PMSI-MCO, 2015). Le
taux de décès par suicide ou dépression est quant
à lui de 4,1 pour 10 000 chez les personnes de 75
ans ou plus (Irdes, 2015). Enfin, du fait de leur
plus grande fragilité, 4 % des personnes âgées
hospitalisées pour tentative de suicide décèdent à
l’hôpital, contre moins de 1 % des 18 ans ou plus
(PMSI-MCO, 2015).
Le recours en ville est plus difficile à appréhender par le système d’information disponible car
le motif de consultation n’est pas connu dans les
données de l’Assurance maladie. Il est donc indirectement appréhendé ici par la consultation de
professionnels spécialisés dans la prise en charge
des maladies mentales ou par la délivrance de médicaments psychotropes qui peuvent suggérer un
recours pour un problème de santé mentale. Les
personnes âgées consultent peu les psychiatres
libéraux. En 2015, 61 000 personnes âgées de
65 ans ou plus ont consulté un psychiatre libéral
(Sniiram, 2015), soit un taux de recours de 52
pour 10 000 habitants, ce qui est plus de trois fois
inférieur au recours des 18‑64 ans.
Par contre, la consommation de psychotropes (antidépresseurs, anxiolytiques, neuroleptiques, hypnotiques) est courante chez les personnes âgées
(Verger et al., 2017 ; Verger et al., 2018). En 2015,
plus d’une personne âgée sur quatre (28 %) a eu au
3
4
5
moins trois délivrances de psychotropes4 ; cela représente 2,9 millions de personnes (Cnam, 2017).
Globalement, les Drom se caractérisent par une
faible consommation de psychotropes, tandis que
la Creuse et la Haute-Vienne comptent parmi les
départements où le taux de personnes âgées ayant
reçu au moins 3 délivrances de psychotropes est
le plus élevé (Cnam, 2016)5. Plus précisément, en
2015, 13,3 % des personnes âgées ont eu au moins
trois délivrances d’antidépresseurs (avec un maximum à 20,3 % en Haute-Vienne, contre moins de
6,5 % pour les Drom), et 15,9 % au moins trois
délivrances d’anxiolytiques (culminant à 23,1 %
en Creuse contre moins de 10 % dans les Drom),
9,4 % au moins trois délivrances d’hypnotiques et
2,6 % des neuroleptiques (Cnam, 2016) [cartes
46a et 46b p. 108]. Ces taux sont supérieurs à
ceux observés dans la population âgée de 18 à 64
ans pour laquelle on observe respectivement les
fréquences suivantes : 6,0 % pour les antidépresseurs, 7,0 % pour les anxiolytiques, 3,0 % pour
les hypnotiques et 1,6 % pour les neuroleptiques
(Cnam, 2016).
La consommation de psychotropes chez les personnes âgées soulève plusieurs questions. D’une
part, les psychotropes sont à l’origine d’une iatrogénie* importante – en grande partie évitable
– et d’hospitalisations (chutes, etc.) car plus de
la moitié des traitements ne seraient pas indiqués (DGS, 2008). Les raisons sont notamment
la sur-prescription (consommation chronique de
benzodiazépines et hypnotiques, entraînant une
dépendance, avec des prescriptions non réévaluées régulièrement par le médecin généraliste),
les prescriptions inadaptées (Jardin et al., 2012),
et le fait que les personnes âgées constituent une
population fragile (problèmes de tolérance, d’effets secondaires, comorbidités associées, polymédication) [Schuster et al., 2013 ; Verger et al.,
2018] dont les pathologies psychiatriques peuvent
s’exprimer de manière atypique et conduire à un
problème d’inadéquation des traitements prescrits. D’autre part, la délivrance de psychotropes
serait insuffisante, notamment pour les personnes
âgées souffrant de dépression (DGS, 2008), du
fait du mauvais repérage des troubles.
À noter que la France figure parmi les pays dans lesquels le taux de suicide des personnes âgées est le plus élevé (DGS,
2008), même si celui-ci tend à diminuer ces dernières années comme pour les autres classes d’âge.
De plus, pour les personnes âgées résidant en Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes
(Ehpad), le recours aux psychotropes augmente dans l’année qui suit leur admission (Atramont et al., 2017).
Précisons toutefois qu’il est difficile de connaître le recours en ville, ceci en raison de l’absence d’information sur le
motif de consultation ; ce dernier étant seulement appréciable via les délivrances de médicaments lorsque le recours
ne se fait pas vers un psychiatre.
Atlas de la santé mentale en France
107
4
4
CARTE 46
46a
Les personnes âgées
Taux de 65 ans ou plus ayant eu des délivrances de psychotropes en 2015
Au moins 3 délivrances d’antidépresseurs
Pour 100 000 consommants
de 65 ans et plus
Départements et
régions d'outre-mer
20 331,1
A Guadeloupe
14 726,7
13 807,9
France
13 311,5
13 064,3
20 km
B Martinique
12 392,4
1 739,1
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Cnam 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
46b
Au moins 3 délivrances d’anxiolytiques
Pour 100 000 consommants
de 65 ans et plus
Départements et
régions d'outre-mer
23 084,2
A Guadeloupe
18 832,2
16 811,3
France
15 939,9
15 644,6
20 km
B Martinique
14 689,1
1 956,5
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Sources : Cnam 2015. Infographie : Irdes 2019-20.
108
Atlas de la santé mentale en France
20 km
Les personnes âgées
4
4.2. L’offre de soins et d’accompagnement médico-social
à destination des personnes âgées
Le système d’information national permet difficilement d’identifier l’offre de soins psychiatriques
et d’accompagnement spécifiquement dédiée
aux personnes âgées. La base de données de la
Statistique annuelle des établissements de santé
(SAE), recense 145 unités spécialisées dans la psychiatrie du sujet âgé (SAE, 2015). Ces dernières
sont présentes dans 81 départements.
psychiatrie du sujet âgé (intégrant notamment les
missions d’évaluation des cas complexes, d’enseignement et de recherche, d’information et de
communication) et le déploiement d’équipes mobiles de psychiatrie du sujet âgé, et pour Paris une
unité de liaison psychiatrique en lien avec les dispositifs sectoriels (consultations fléchées, équipes
mobiles de secteurs, etc).
Au sein des établissements de santé, les personnes
âgées ont accès aux services proposés pour la population générale. Dans certains territoires, une
offre spécifique a été développée avec des lits
d’hospitalisation dédiés ou encore des dispositifs
ambulatoires de secteur proposant des consultations fléchées au sein des Centres médico-psychologiques (CMP), des hospitalisations de jour
et des centres d’accueil thérapeutiques à temps
partiel spécifiques pour les personnes âgées. Des
équipes mobiles de psychiatrie du sujet âgé ont vu
le jour et se déplacent au domicile ou dans les institutions médico-sociales. C’est le cas notamment
en Île-de-France où l’offre de soins psychiatriques
à destination des personnes âgées s’est structurée autour d’un centre de ressources régional de
Au-delà du champ de la santé mentale, d’autres
acteurs interviennent dans le parcours de soins
des personnes âgées, qu’il s’agisse du médecin généraliste ou de spécialistes du sujet âgé comme les
gériatres. On recense, en 2015, 1 756 gériatres, soit
une densité de 15,1 pour 100 000 habitants âgés
de 65 ans ou plus (RPPS, 2015), avec une répartition très hétérogène sur le territoire national et
fortement concentrée sur l’Île-de-France (la densité de gériatres allant de 2 pour 100 000 dans le
Jura à 42 dans le Val-d’Oise) [carte 47].
Notons également l’importance de l’accompagnement et des soins à domicile pour les personnes
âgées, population peu mobile. En 2015, le taux
d’équipement en places dans les services de soins
Densité de gériatres en 2015
Pour 100 000 habitants
de 65 ans ou plus
Départements et
régions d'outre-mer
41,6
A Guadeloupe
18,4
France
15,1
12,9
20 km
10,5
B Martinique
8,4
1,9
20 km
Non
disponible
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Discrétisation : quintiles. Sources : RPPS 2015, Insee. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
109
CARTE 47
4
Les personnes âgées
infirmiers à domicile (Ssiad) et dans les Services
polyvalents d’aide et de soins à domicile (Spasad)
s’élève, pour 100 personnes âgées de 65 ans ou
plus, à 1,1 place, avec une certaine hétérogénéité
puisque deux départements (Martinique et BasRhin) ont, pour 100 personnes âgées de 65 ans ou
plus, un taux d’équipement inférieur à 0,8 ; et six
départements ont quant à eux un taux supérieur
à 1,6 (Hautes-Alpes, Creuse, Lozère, Paris, Aine,
Meuse) [Finess, 2015]. Enfin, différents dispositifs existent à destination des personnes atteintes
de la maladie d’Alzheimer ou maladies apparentées (encadré 4).
ENCADRÉ 4
Par ailleurs, au-delà de l’offre de soins, différents
dispositifs (non spécifiques à la santé mentale)
sont déployés pour les personnes âgées qui cumulent souvent plusieurs comorbidités et des
difficultés économiques ou sociales. Quatre types
de services peuvent être mentionnés : les points
d’information locaux, comme les Centre locaux
d’information et de coordination gérontologique
(Clic), qui sont des dispositifs médico-sociaux destinés aux personnes âgées et à leurs proches ; les
plateformes d’accompagnement et de répit, pour
répondre aux besoins des aidants ; les gestionnaires de cas relevant des méthodes d’action pour
l’intégration des services d’aide et de soins dans
le champ de l’autonomie (Maia), qui couvrent
Offre de soins et accompagnement médico-social à destination des personnes âgées
atteintes de la maladie d’Alzheimer ou maladies apparentées
Il existe des dispositifs de soins et
d’accompagnement spécifiques à la
prise en charge des troubles du comportement de la maladie d’Alzheimer
ou maladies apparentées. Ces dispositifs se trouvent en Etablissements
d’hébergement pour personnes
âgées dépendantes (Ehpad) ou en
Unités de soins de longue durée
(USLD) [uniquement en Unités d’hébergement renforcées (UHR)]. Ils se
composent des Pôles d’activités et de
soins adaptés (Pasa), des Unités d’hébergement renforcé (UHR) et Unités
de vie protégées (UVP), des Unités
cognitivo-comportementales (UCC),
des dispositifs d’accueil de jour, et des
Équipes spécialisées Alzheimer (Esa)
rattachées à des Ssiad. Les Pasa sont
présents dans tous les départements,
les UHR dans 80 départements (absents dans la quasi-totalité de l’Île-deFrance et les Drom), et les UCC dans
83 départements (Finess, 2017 ; SAE,
2015).
a) Les Pasa sont des espaces d’activités aménagés au sein des Ehpad.
Ils ne proposent pas d’hébergement
et sont destinés à accueillir durant
la journée des résidents de l’Ehpad
ayant des troubles du comportement
modérés. Les résidents qui y sont
accueillis à la journée peuvent éventuellement venir de l’extérieur. Les
activités proposées ont pour objectif
d’offrir un accompagnement spécifique et personnalisé en fonction des
besoins des résidents, notamment
pour faire diminuer les manifestations
de l’humeur et les troubles du com-
110
portement. D’après les données du
répertoire Finess, en 2017, on compte
1 517 Pasa, soit 1,3 pôle pour 10 000
habitants de 65 ans ou plus.
b) Les UHR ou les UVP sont implantées majoritairement au sein des
Ehpad mais aussi en USLD et proposent, sur un même lieu, l’hébergement, les soins, les activités sociales
et thérapeutiques, individuelles ou
collectives. Elles s’adressent à des résidents souffrant de troubles sévères
du comportement qui altèrent leur
sécurité et leur qualité de vie et celle
des autres résidents de l’Ehpad. Le
passage dans l’UHR a pour objectif de
trouver des réponses adaptées (médicamenteuses et non-médicamenteuses) pour atténuer les troubles
des personnes hébergées et leur permettre, dans la mesure du possible,
de retourner sur leur lieu de vie et de
soins habituel. Il existe actuellement
2 209 places, en fonctionnement en
Ehpad ou en USLD (Finess, 2017).
c) L’UCC, pour les patients ayant des
troubles du comportement sévères
(troubles du sommeil grave, agressivité, etc.), propose une prise en
charge à l’hôpital en Soins de suite et
de réadaptation (SSR). Elle vise à stabiliser les troubles du comportement
grâce à un programme individualisé
et à assurer les soins à l’origine de la
situation de crise en l’absence d’indication d’hospitalisation en court séjour (HAS, 2013). On dénombre 1 124
places en UCC (SAE, 2015).
d) L’accueil de jour s’adresse principalement aux personnes âgées atteintes
Atlas de la santé mentale en France
de la maladie d’Alzheimer ou de maladies apparentées et, pour certains accueils de jour, aux personnes atteintes
d’autres maladies neuro-dégénératives comme la maladie de Parkinson par exemple. Il peut également
être proposé aux personnes âgées
en perte d’autonomie physique. L’accueil de jour permet aux personnes
âgées de bénéficier d’un suivi régulier
et d’un accompagnement adapté,
d’entretenir leurs capacités grâce aux
activités adaptées proposées lors de
l’accueil de jour, de renouer des liens
et de sortir de chez elles. Solution de
répit, l’accueil de jour permet en outre
à leurs proches de pouvoir libérer du
temps durant la journée, de trouver
un soutien et des conseils auprès des
professionnels de l’accueil de jour et
de pouvoir échanger avec d’autres familles et proches.
e) Enfin, les Esa ont pour mission
d’accompagner les personnes malades d’Alzheimer vivant à domicile
et d’aider leurs proches. L’accompagnement des équipes spécialisées Alzheimer s’adresse aux personnes diagnostiquées au début de la maladie,
à un stade léger et modéré. L’objectif
est de les aider à maintenir leur autonomie en stimulant leurs capacités,
à diminuer les éventuels troubles du
comportement, à améliorer la relation patient-aidant. Une adaptation
du lieu de vie peut être proposée afin
de maintenir ou d’améliorer les capacités des personnes malades ainsi que
leur sécurité.
Les personnes âgées
98 % du territoire français ; les Plateformes territoriales d’appui (PTA) qui sont des dispositifs
sanitaires déployés dans le cadre de l’expérimentation Parcours santé des aînés (Paerpa) et dont
l’objectif est une meilleure coordination des parcours complexes.
De plus, dans l’objectif du maintien à domicile des
personnes âgées dans les meilleures conditions
sanitaires et sociales, il existe les réseaux de santé gérontologiques. Au nombre de 124 en France,
ces réseaux de santé regroupent un ensemble
d’intervenants, aux compétences sanitaires et sociales (médecins, infirmiers, assistants sociaux,
etc.), qui se coordonnent autour d’une personne
âgée dépendante. En dernier lieu, afin de prévenir les risques d’émergence et de développement
des troubles psychiques, des actions de prévention (lutte contre l’isolement social, prévention
du suicide, éducation pour la santé, atelier nutrition, etc.) envers les personnes âgées sont mises
en place dans certains territoires, que ce soit au
niveau national, régional ou communal.
Le vieillissement des personnes présentant des
troubles psychiques, ou l’apparition de troubles
accompagnant le vieillissement des personnes
handicapées, sont des problématiques identifiées
qui font l’objet de diverses modalités d’accompagnement ciblé dans les établissements et services
médico-sociaux dédiés aux personnes en situation
de handicap. En effet, le vieillissement est un facteur de risque de la survenue de pathologies cognitives et physiques. De ce fait, différentes modalités d’accompagnement au sein de ces structures
se développent, qui visent à cibler les besoins
particuliers des personnes handicapées vieillissantes présentant des troubles psychiques. Il peut
s’agir d’unités dédiées aux personnes handicapées
vieillissantes dans un établissement, dont l’équipe
peut être particulièrement formée et sensibilisée
aux problématiques de santé mentale de la personne handicapée. Il peut également s’agir de la
mise en œuvre d’une politique de formation des
personnels au sein d’un établissement accompagnant des personnes en situation de handicap
psychique à la problématique du vieillissement.
Des unités d’accueil de jour accueillant des personnes présentant différents types de handicaps,
notamment psychiques, sont également développées, à l’instar de ce qui est mis en œuvre pour les
personnes présentant des troubles neurodégénératifs. Ces unités, souvent adossées à un établissement accueillant des personnes en situation de
handicap, peuvent être des solutions de répit pour
les personnes et leurs proches.
***
Les changements démographiques en cours avec
l’augmentation du nombre de personnes âgées
et l’allongement de l’espérance de vie posent des
questions économiques, sociales mais aussi organisationnelles pour l’accompagnement et la prise
en charge de cette population, y compris dans le
champ de la santé mentale. Souvent sous-estimée
ou traitée de façon inappropriée, la souffrance
psychique des personnes âgées constitue un enjeu
de santé publique et nécessite d’adapter le système
de santé à cette population vulnérable qui requiert
des prises en charge spécifiques. Certaines populations sont particulièrement concernées : les personnes âgées isolées, en situation d’exclusion ou
de précarité, celles vivant en institution, ou encore
celles souffrant de pathologies chroniques. Les
données présentées dans ce chapitre montrent
l’hétérogénéité des besoins selon les territoires.
En effet, leurs caractéristiques sociales, écono-
miques, géographiques mais aussi historiques
sont déterminantes en termes d’implantation de
l’offre sanitaire et médico-sociale, d’existence ou
pas de services à destination des personnes âgées,
et de développement d’une offre spécifique en psychiatrie du sujet âgé ou d’une organisation plus
centrée sur la prise en charge des démences et
des maladies neurodégénératives. La France n’est
pas le seul pays confronté à ces problématiques.
Au niveau européen se développe un projet visant
l’amélioration des réseaux de professionnels pour
la santé mentale des personnes âgées atteintes
de troubles psychiques en Europe qui permet de
mutualiser et échanger sur les stratégies à mettre
en place pour répondre au mieux aux besoins des
personnes (www.arpa-europe.eu).
Remerciements aux relecteurs : Pr. Frédéric Limosin, Dr. Cécile Hanon (Centre ressource régional de psychiatrie du sujet âgé (CRRPSA)
d’Île-de-France), Dr. Evelyne Falip (Agence régionale de santé (ARS) - Provence-Alpes-Côte d’Azur), Fanny Bouarek, Violaine Eudier,
Danièle Steinbach, Catherine Perisset (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA)).
Atlas de la santé mentale en France
111
4
4
Les personnes âgées
112
Atlas de la santé mentale en France
chapitre
5
La population pénitentiaire
Miléna Spach
Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees)
L
a réforme de 1994 a confié l’organisation des soins en milieu pénitentiaire
au service public hospitalier afin que
les personnes détenues puissent avoir accès à une
qualité et une continuité de soins identiques à
celles de la population générale. Cependant, l’état
de santé des personnes placées sous main de justice* est mal connu. Cette méconnaissance provient en partie du fait qu’il existe très peu d’études
sur l’état de santé des individus en prison (GodinBlandeau et al., 2013), en particulier concernant
la santé mentale, pour laquelle les études longitudinales sont absentes (Lancelevée, 2017).
Pourtant, les détenus constituent une population
spécifique dans le sens où leur santé mentale est
plus mauvaise que celle de la population générale1
(Falissard et al., 2006). Plusieurs études ont en effet montré une plus forte prévalence des troubles
psychiques*, notamment sévères, et du besoin de
soins chez les personnes détenues par rapport à la
population générale, que ce soit dans les pays développés ou en développement (Fazel et Seewald,
2012). L’étude de Jakobowitz et al. (2017) montre
notamment que, sur 360 détenus londoniens,
80 % des femmes et 70 % des hommes incarcérés nécessitent une prise en charge psychiatrique
(majoritairement pour des problèmes d’addiction*, mais aussi pour des troubles dépressifs*,
des troubles de la personnalité* et des troubles
psychotiques*). En France, selon le dernier rapport de l’Inspection générale des affaires sociales
1
(Igas) et du ministère de la Justice (Branchu et al.,
2015), plus de la moitié des personnes détenues
ont un antécédent de troubles psychiatriques, et
un entrant sur six a déjà été hospitalisé en psychiatrie. L’étude conduite par Duburcq et al.
(2006) indique que 3,8 % des détenus souffrent
de schizophrénie* nécessitant un traitement (soit
4 fois plus qu’en population générale) et 17,9 %
présentent un état dépressif majeur (soit 4 à 5 fois
plus qu’en population générale). Si ces troubles
peuvent exister en amont de la détention, la privation de liberté peut également avoir un impact
sur la santé mentale des détenus, surtout dans le
cas de mauvaises conditions de détention (problèmes d’hygiène, surpopulation, éloignement
familial, etc.) [Lancelevée, 2017], mais aussi du
fait du stress lié à l’incarcération. Le stress peut en
effet déclencher des symptômes aigus ou induire
des souffrances réactionnelles* (crise suicidaire,
insomnie, etc.), favoriser une décompensation*
ou même révéler certaines pathologies psychiatriques comme la schizophrénie* ou le trouble bipolaire* (Fovet et al., 2015).
Par ailleurs, le taux de suicides des personnes
détenues est particulièrement élevé et a fortement augmenté depuis 1945 : près de la moitié
des décès survenus dans les prisons françaises
sont le fait de suicides (Duthé et al., 2014). En
2014, on dénombre 1 033 tentatives de suicides,
et 94 suicides (Direction de l’administration pé-
Plus généralement, les détenus sont caractérisés par un état de santé global plus mauvais que celui de la population
générale. Les catégories sociales en grande précarité, sans travail, sans domicile, avec un faible niveau éducatif, y sont
surreprésentées (Laurencin, 2013).
Atlas de la santé mentale en France
113
5
La population pénitentiaire
nitentiaire (Dap), 2015), soit un taux de suicides
7 fois supérieur à la moyenne nationale (autour de
15/10 000 en détention, contre moins de 2 pour
10 000 en population générale) [Branchu et al.,
2015]. De plus, un risque suicidaire a été repéré
chez 40 % des hommes et 62 % des femmes détenues, d’après l’étude de Duburcq et al. (2006).
Certains moments de la détention sont particulièrement sensibles : « Le risque suicidaire est 4 fois
plus élevé pour les prévenus que pour les condamnés. Environs 15 % des suicides surviennent dans
les dix premiers jours d’écrou » (Laurencin, 2013,
p. 28). Aussi, d’après le rapport Albrand (2009),
en 2008, 11 % des suicides se sont produits dans le
quartier disciplinaire alors même que cette structure ne représente que 2 % de la capacité totale du
parc pénitentiaire.
114
Atlas de la santé mentale en France
Enfin, les détenus représentent une population
spécifique au regard de leur consommation de
substances psychoactives*. En 2003, près de 80 %
des entrants en prison fument quotidiennement
du tabac, dont 15 % plus de 20 cigarettes par jour,
et près d’un détenu sur trois admet une consommation excessive d’alcool (Mouquet, 2005).
Concernant les stupéfiants (cannabis, cocaïne,
héroïne, etc.), un tiers des détenus en déclarent
une utilisation prolongée et régulière au cours des
douze mois précédant l’incarcération, et 7,5 % reçoivent un traitement de substitution aux opiacés
(Mouquet, 2005). Par ailleurs, 15 % des entrants
en 2003 indiquent bénéficier d’un traitement en
cours par médicaments psychotropes (anxiolytiques, hypnotiques, antidépresseurs, neuroleptiques)*.
La population pénitentiaire
5
5.1. La population carcérale
La population carcérale est inégalement répartie
sur le territoire français, en partie parce qu’elle
dépend de l’implantation et des capacités d’accueil des différents établissements susceptibles
de les héberger. Au 1er janvier 2017, l’administration pénitentiaire compte 186 établissements
pénitentiaires qui accueillent les personnes détenues : 82 maisons d’arrêt*, 11 centres de semi-liberté*, 6 maisons centrales*, 26 centres de
détention*, 54 centres pénitentiaires* et 6 établissements pénitentiaires spécialisés pour mineurs.
Les conditions de détention sont très différentes
d’un type d’établissement à l’autre et d’une région à l’autre. Au 1er janvier 2017, on dénombre
103 services pénitentiaires d’insertion et de probation* qui suivent les personnes condamnées à
une sanction ou une mesure de milieu ouvert. À
cette même date, au sein de ces établissements,
250 000 personnes étaient prises en charge par
l’administration pénitentiaire, dont environ
170 000 personnes suivies en milieu ouvert auxquelles s’ajoutent 80 000 personnes sous écrou.
Au 1er janvier 2017, sur les 80 000 personnes
écrouées, près de 70 000 sont en détention et
10 000 sont « écrouées non hébergées », c’est-àdire bénéficiant de mesures spécifiques comme
le placement sous surveillance électronique. Par
ailleurs, parmi les 70 000 personnes en détention, 50 000 sont condamnées et 20 000 sont en
attente de jugement (prévenues) [Ministère de la
Justice, 2017]. La durée moyenne sous écrou en
2016 est inférieure à un an (9,7 mois) et les personnes écrouées détenues sont majoritairement
des hommes (97 % au 1er janvier 2017). L’âge
moyen des écroués est de 34,7 ans, les mineurs
représentent 1 % (les moins de 16 ans 0,1 %) des
détenus. Les femmes représentent quant à elles
3 % des détenus (Dap, 2017).
Outre le nombre de personnes détenues à une date
donnée, 142 000 personnes ont été incarcérées
dans les établissements pénitentiaires français au
cours de l’année 2016 (carte 48). Cela correspond
au « stock », c’est-à-dire les détenus présents au
Nombre de personnes détenues (présents au 1er janvier et entrants dans l’année)
dans les établissements pénitentiaires français, en 2016
Nombre de détenus
Essonne
11 175
Val-de-Marne
6 524
Seine-et-Marne
2 948
Martinique
1 665
Côte d’Or
802
AHP*
89
* Alpes-de-Haute-Provence
Ile-de-France
100 km
20 km
Départements et régions d'outre-mer
A Guadeloupe
B Martinique
C Guyane
D Réunion
E Mayotte
Source : Direction de l’administration pénitentiaire, 2016. Infographie : Irdes 2019-20.
Atlas de la santé mentale en France
115
CARTE 48
5
La population pénitentiaire
1er janvier 2016, auquel s’ajoute le « flux », soit les
personnes entrées en détention au cours de l’année 2016 (Dap, 2016). Selon les territoires, la file
active en détention varie fortement : elle est nulle
dans les départements qui ne comportent pas
d’établissement pénitentiaire (Gers et Lot), alors
qu’elle varie de moins de 100 personnes dans les
Alpes-de-Haute-Provence à plus de 11 000 en
Essonne, département où se situe le plus grand
centre pénitentiaire de France : Fleury-Mérogis
(carte 48).
Un des principaux déterminants des conditions
de détention, en lien avec l’impact de la détention
sur la santé des personnes incarcérées, est la surpopulation pénale. Pour la population française
âgée de 15 ans ou plus, au 1er janvier 2016, on
compte 58 561 places opérationnelles, ce qui représente une densité de places opérationnelles de
106 places pour 100 000 habitants (Dap, 2016).
Le décalage entre le nombre de personnes incar-
CARTE 49
cérées et le nombre de places disponibles permet
d’évaluer la surpopulation pénale. Au 1er janvier
2016, la surpopulation carcérale est de 114 détenus pour 100 places opérationnelles (Dap, 2016)
[carte 49]. D’après l’Observatoire international des prisons, en France, la surpopulation se
concentre dans les maisons d’arrêt, qui accueillent
les personnes en attente de jugement et celles
condamnées à des courtes peines de prison. La
densité de détenus par place est hétérogène selon
les départements puisqu’elle est supérieure à 180
détenus pour 100 places dans le Gard, la Vendée
et les Côtes d’Armor, tandis qu’elle est inférieure à
75 dans la Drôme, l’Oise, l’Orne et Mayotte. Cette
hétérogénéité s’explique notamment par les différents types d’établissements présents sur chacun
des territoires. La surpopulation carcérale est en
effet plus élevée dans les maisons d’arrêt (établissements de courtes peines accueillant prévenus et
détenus) que dans les maisons centrales (établissements de longues peines).
Taux d’occupation effectif des places pour 100 places opérationnelles, en 2016
Pour 100 places opérationnelles
Départements et
régions d'outre-mer
196,4
A Guadeloupe
146,2
123,3
107,1
France
113,5
20 km
88,4
B Martinique
54,8
Non
concerné
20 km
C Guyane
Paris et petite
couronne
100 km
D Réunion
10 km
20 km
E Mayotte
100 km
Discrétisation : quintiles. Source : Direction de l'administration pénitentière (Dap) 2017. Infographie : Irdes 2019-20.
116
Atlas de la santé mentale en France
20 km
La population pénitentiaire
5
5.2. L’offre de soins en milieu pénitentiaire
Il existe une offre de soins adaptée au milieu pénitentiaire2. La prise en charge sanitaire des détenus s’organise selon trois niveaux : 1) les consultations et actes externes somatiques et psychiatriques, 2) la prise en charge hospitalière à temps
partiel, 3) la prise en charge hospitalière à temps
complet* (figure 7). Au sein de chacun de ces niveaux de prise en charge, l’organisation des soins
s’articule autour de deux dispositifs, l’un pour les
soins somatiques* et le second pour les soins psychiatriques*. La prise en charge psychiatrique des
détenus repose principalement sur les secteurs de
psychiatrie en milieu pénitentiaire institués par le
décret du 14 mars 1986, impliquant soit la prise en
charge des détenus par l’établissement hospitalier
de référence, soit la mise en place d’un Service médico-psychologique régional (SMPR)* au sein de
l’établissement pénitentiaire. La loi d’orientation
du 9 septembre 2002 a également créé les Unités
hospitalières spécialement aménagées (Uhsa)*
qui, rattachées aux secteurs de psychiatrie en
milieu pénitentiaire, ont vocation à prendre en
charge des personnes incarcérées nécessitant des
soins psychiatriques en hospitalisation complète,
au sein des établissements sanitaires3. Les Uhsa
visent à accueillir dans de bonnes conditions
d’accueil et de soins les personnes détenues relevant d’une hospitalisation à temps complet, avec
et sans leur consentement. Il s’agit ainsi d’offrir
une prise en charge de la même qualité que les
services de psychiatrie en population générale, en
y ajoutant une sécurité renforcée – assurée par
l’administration pénitentiaire – pour minimiser
les risques d’évasion (de Labrouche et al., 2017).
À côté de ce dispositif spécialisé, les Unités sanitaires en milieu pénitentiaire (USMP)* proposent
7
Unité sanitaire
de niveau 3
2
3
Unité sanitaire
de niveau 2
Unité sanitaire
de niveau 1
L’organisation des soins en milieu pénitentiaire
Soins
somatiques
Assurés en milieu pénitentiaire
ou parfois hospitalier (USMP)* :
consultations de médecine générale
et de spécialités,
dont consultations dentaires.
Soins
psychiatriques
Assurés en milieu pénitentiaire
ou hospitalier (SMPR* ou USMP) :
activités de consultations, d’entretiens
et activités thérapeutiques de groupe.
Soins
somatiques
Assurés en milieu hospitalier :
activités de chirurgie ambulatoire,
« séances » (dialyse, chimiothérapie...)...
Soins
psychiatriques
Assurés en milieu pénitentiaire :
cellule dédiée à l’hospitalisation
de jour (SMPR)*.
Soins
somatiques
Assurés en milieu hospitalier :
au sein des chambres sécurisées dans
l'établissement de santé de rattachement
(urgences et hospitalisation < 48 h)
et des UHSI*.
Soins
psychiatriques
Assurés en milieu hospitalier :
au sein des UHSA* (avec ou sans consentement),
et pour les soins sans consentement en Unités
pour malades difficiles (UMD)*
et en service de psychiatrie.
Consultations,
prestations et
activités ambulatoires
Prise en charge
hospitalière
à temps partiel
Prise en charge
hospitalière
à temps complet
Depuis la loi de janvier 1994, la prise en charge sanitaire et l’organisation des soins en milieu pénitentiaire relèvent
du ministère de la Santé. Toutes les personnes détenues sont immatriculées et affiliées à la Sécurité sociale, et doivent
bénéficier d’une prise en charge identique à celle proposée à l’ensemble de la population.
Pour une genèse des Unités hospitalières spécialement aménagées (Uhsa), voir Contrast et al. (2015).
Atlas de la santé mentale en France
117
FIGURE 7
5
La population pénitentiaire
un dispositif de soins somatiques et psychiatriques,
assurent la coordination des actions de prévention
ainsi que l’accueil et la prise en charge hospitalière.
psychiatriques avec ou sans consentement (Bron,
Toulouse, Nancy, Villejuif, Fleury-les-Aubrais,
Rennes, Seclin, Cadillac) [SAE, 2016]. Une neuvième Uhsa a ouvert à Marseille début 2018
(carte 50). Enfin, on compte en France 10 Unités
pour malades difficiles (UMD) – non spécifiques à
la population pénitentiaire – au sein desquelles les
détenus peuvent être hospitalisés5.
On peut ainsi recenser l’offre de soins réservée aux
détenus. Au total, on compte en 2016 207 unités
de santé ou hospitalières se répartissant entre 165
Unités sanitaires en milieu pénitentiaire (USMP)4,
8 Unités hospitalières sécurisées interrégionales
(Uhsi)* implantées dans les Centres hospitaliers
universitaires (CHU) pour les hospitalisations
programmées de plus de 48 heures (Nancy, Lille,
Lyon, Bordeaux, Toulouse, Marseille, Paris PitiéSalpêtrière, Rennes), 26 Services médico-psychologiques régionaux (SMPR), 8 Unités hospitalières
spécialement aménagées (Uhsa) implantées en
milieu hospitalier accueillant les hospitalisations
CARTE 50
D’après les travaux de l’Agence nationale d’appui
à la performance des établissements de santé et
médico-sociaux (Anap), les unités sanitaires sont
sous-dotées en surface, avec des surfaces de locaux
inférieures aux besoins de 30 % pour les maisons
d’arrêt et de 40 % pour les centres pénitentiaires
(Branchu et al., 2015). Par ailleurs, si les effectifs de
soignants ont doublé entre 1997 et 2013 (passant
Unités et services médicaux dédiés aux personnes détenues
Service médico-psychologique régional (SMPR)
Départements et
régions d'outre-mer
Unité hospitalière sécurisée interrégionale (UHSI)
Unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA)
Lille
Etablissement public de santé national de Fresnes (EPSNF)
Amiens
Rouen
Caen
Bois-d’Arcy
Rennes
4
1
2
3
4
Lyon
D Réunion
Nice
Perpignan
Source : Direction de l'administration pénitentière (Dap) 2017. Infographie : Irdes 2020.
5
100 km
Grenoble-Varces
Bordeaux
Toulouse
4
20 km
C Guyane
3
Pitié-Salpétrière
Paris-La Santé
Paris-Villejuif
Fresnes
20 km
Ducos
Dijon
Poitiers
1
Baie-Mahault
B Martinique
Orléans
Paris et petite
couronne
2
Metz
Châlon-en-Champagne
Nancy Strasbourg
Fleury-Mérogis
Nantes
10 km
A Guadeloupe
Lille-Annoeulin
Le Port
Marseille
20 km
E Mayotte
100 km
20 km
Les Unités sanitaires en milieu pénitentiaire (USMP) ont été créées par la loi du 18 janvier 1994. Elles sont dépendantes de l’hôpital public de proximité et leurs missions touchent le champ de la santé publique : les soins somatiques
et psychiatriques, l’hygiène, la prévention, les addictions, l’éducation pour la santé et la continuité des soins, etc. Si la
Statistique annuelle des établissements de santé (SAE 2016) recense 165 USMP, d’après la Direction de l’administration pénitentiaire (Dap) ces unités sont au nombre de 175.
D’après le décret n° 2016-94 du 1er février 2016, « les Unités pour malades difficiles (UMD) accueillent des patients relevant de soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète […] dont l'état de santé
requiert la mise en œuvre, sur proposition médicale et dans un but thérapeutique, de protocoles de soins intensifs et de
mesures de sécurité particulières ».
118
Atlas de la santé mentale en France
La population pénitentiaire
de 1 345 à 2 600 Equivalents temps plein (ETP)),
cette hausse a été modérée par l’augmentation de
plus de 25 % du nombre de personnes détenues
ainsi que par des postes budgétés non pourvus
(15,5 % des postes de psychiatres) [Branchu et al.,
2015]. En 2016, pour 10 000 détenus, la densité
en ETP de psychiatres en psychiatrie pénitentiaire
est de 13,5 et on compte 1,9 ETP pour le personnel médical autre en psychiatrie pénitentiaire
(SAE, 2016 ; Dap, 2016). De même, en 2016, pour
10 000 détenus, on dénombre 110,6 ETP de personnels des services de soins et socio-éducatifs
exerçant en psychiatrie pénitentiaire (SAE, 2016).
Enfin, l’hospitalisation pour un motif psychiatrique des personnes détenues peut se faire, soit
au sein des Uhsa récemment créées, soit au sein
des services classiques de psychiatrie générale,
sous un mode légal non consenti (Article D398 du
Code de procédure pénale). En 2016, les 8 Uhsa
ouvertes proposent 380 lits d’hospitalisation à
temps plein, soit une densité de 25 lits pour 10 000
détenus (contre 11 places en psychiatrie générale,
pour 10 000 habitants de 16 ans ou plus). La prise
en charge en hospitalisation à temps partiel, qui
correspond au deuxième niveau de l’organisation
graduée des soins en détention, est assurée, pour
les soins somatiques, en milieu hospitalier, et
pour les soins psychiatriques en milieu pénitentiaire, au sein des unités sanitaires6 des SMPR.
La SAE recense, en 2016, 355 places d’hospitalisation à temps partiel en milieu pénitentiaire, soit
24 places pour 10 000 détenus (contre 4 places
en psychiatrie générale, pour 10 000 habitants de
16 ans ou plus). Si ces taux peuvent paraître supérieurs à ceux observés en population générale,
l’hospitalisation à temps plein ou à temps partiel
des personnes détenues reste problématique du
fait de la couverture géographique limitée de cette
offre7, des contraintes liées aux transferts et déplacements de ces populations spécifiques, mais
aussi de par la prévalence élevée des troubles psychiques et donc des forts besoins de la population
concernée.
5.3. Recours aux soin