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Les Etats-Unis et le Proche-Orient

2008, Confluences en Méditerranée

Distribution électronique Cairn.info pour L'Harmattan. Distribution électronique Cairn.info pour L'Harmattan. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Article disponible en ligne à l'adresse Article disponible en ligne à l'adresse https://www.cairn.info/revue-confluences-mediterranee-2008-2-page-117.htm Découvrir le sommaire de ce numéro, suivre la revue par email, s'abonner... Flashez ce QR Code pour accéder à la page de ce numéro sur Cairn.info. Dossier Itinéraire Actuel Culture 118 Méditerranée Numéro 65 • Printemps 2008 L' Iran, une puissance virtuelle ? Vers une perpétuation des politiques sismiques ? Dossier Itinéraire Actuel Culture Vers une perpétuation des politiques sismiques ? Dossier Itinéraire Actuel Culture Vers une perpétuation des politiques sismiques ? Dossier Itinéraire Actuel Culture

Les Etats-Unis et le Proche-Orient Vers une perpétuation des politiques sismiques ? Barah Mikaïl Dans Confluences Méditerranée 2008/2 (N°65), pages 117 à 130 Éditions L'Harmattan © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Article disponible en ligne à l’adresse https://www.cairn.info/revue-confluences-mediterranee-2008-2-page-117.htm Découvrir le sommaire de ce numéro, suivre la revue par email, s’abonner... Flashez ce QR Code pour accéder à la page de ce numéro sur Cairn.info. Distribution électronique Cairn.info pour L'Harmattan. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) ISSN 1148-2664 ISBN 9782296054769 DOI 10.3917/come.065.0117 Dossier Itinéraire Actuel Culture Barah Mikaïl Chercheur à l’Institut de Relations internationales et stratégiques (IRIS) Les Etats-Unis et le Proche-Orient © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) L’histoire est cyclique par nature. C’est pourquoi rien ne permet de parier sur une prééminence ad vitam aeternam des Etats-Unis à l’international. Certes, Washington est une puissance dotée de capacités économiques et militaires sans précédent. Mais tout faîte de la gloire implique aussi une logique baisse de régime et de positionnement. Reste à savoir si Washington devra un jour l’étiolement de ses capacités à un déroulement naturel des événements ou aux conséquences d’une faille stratégique de sa part, à un moment où le bilan de sa politique au Proche-Orient met en exergue une franche montée d’anti-américanisme couplée à un potentiel conflictuel régional croissant et toujours plus inquiétant pour l’avenir de la région. I l y a cinquante ans, la France et la Grande-Bretagne signaient, avec la guerre de Suez (1956), la fin effective de leur longue ère impériale. L’arrogance et les erreurs par lesquelles l’Administration Bush a envisagé les perspectives proche et moyenorientales depuis l’accès du président républicain au pouvoir fait ainsi immanquablement penser à la possibilité qu’il y aurait pour cette région du monde d’être à son tour le réceptacle de la dépouille impériale américaine. Un scénario écrit d’avance ? Loin de là, tant Washington reste fort de ressources économiques, stratégiques et militaires que conforte amplement l’alignement d’une série de gouvernants régionaux à ses desiderata, toutes Administrations confondues1. Mais obéissance n’est pas pour autant synonyme de soumission aveugle, et la tournée entreprise par le président G. W. Bush au début du mois Numéro 65 ● Printemps 2008 Méditerranée 117 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Vers une perpétuation des politiques sismiques ? L’Iran, une puissance virtuelle ? de janvier 2008 dans quelques capitales proche et moyen-orientales2 aura bel et bien mis en évidence les réticences qu’avaient certains fidèles alliés de Washington à trop facilement faire de la « menace nucléaire iranienne » le prétexte au développement de stratégies aux lendemains hasardeux. © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Le Proche-Orient3, dans ses composantes israélo-palestinienne, syrienne et libanaise, illustre bien entendu à merveille la manière par laquelle les Etats-Unis ont cherché de tous temps à y développer des politiques bien plus conformes à la consolidation de leurs intérêts qu’à une quelconque profession de foi. Par extension, l’Iran, pays situé au carrefour du Moyen-Orient et de l’Asie d’un point de vue géographique, mais que l’on peut aussi identifier au Proche-Orient sur un plan plus purement politique, a prouvé au long de ces dernières années, avec sa quête d’un programme nucléaire civil, que les menaces affichées par les Etats-Unis à son encontre ne l’avaient pas cédé au développement par l’Administration Bush d’une stratégie militaire offensive à son encontre, malgré une rhétorique récurrente quant à la « nécessaire préservation de la sécurité internationale ». Il n’est certes qu’à se pencher sur les minutes du Congrès américain, et sur les innombrables déclarations d’officiels des Etats-Unis, pour noter que, depuis l’accès de Mahmoud Ahmadinejad au pouvoir très particulièrement, l’Iran a été considéré comme étant un pays qu’il fallait empêcher par tout moyen de prétendre à un renforcement de sa posture régionale. Néanmoins, l’Administration Bush est sur ses derniers mois et, à moins d’une surprise de dernière heure, qui ne manquerait d’ailleurs pas d’avoir pour corollaire une profonde mise à mal des intérêts américains dans la région, l’on voit mal comment Washington pourrait oeuvrer au développement d’une attaque militaire frontale vis-à-vis de l’Iran. D’un point de vue américain, Téhéran doit être étranglé, et définitivement dissuadé de constituer une menace pour la région, certes ; mais cela ne signifie pas pour autant que Washington soit prêt à y laisser des plumes supplémentaires, l’Iraq ayant suffi à lui seul à écorner considérablement et durablement son image comme ses ressources 118 Méditerranée Numéro 65 ● Printemps 2008 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Une propension à la contradiction Dossier Itinéraire Actuel Culture © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) auprès d’une bonne partie de l’opinion publique internationale4. Les principes affichés sont ainsi une chose, leur mise en application en est une autre. Et la raison d’Etat demeure quant à elle maîtresse des faits. Il n’y a d’ailleurs là rien de nouveau dans l’attitude américaine. D’un point de vue général en effet, il convient de noter que si, à l’origine de leur constitution, les Etats-Unis s’étaient voulu respectueux de la « Doctrine Monroe », ils ne se sont pas retenu de faire de l’ingérence à certains endroits de la planète, jouant pleinement la contradiction tout en donnant l’impression de vouloir justifier leur attitude par « les impératifs du moment ». On retrouvera d’ailleurs le même comportement de leur part durant la Guerre froide, officiellement régie par la doctrine Truman et son pan relatif à un soutien des « peuples libres qui résistent à des tentatives d’asservissement 5 », mais qui ne manquera pas pour autant de voir les Etats-Unis participer de la chute du président démocratiquement élu Salvador Allende, soutenir le dictateur iraquien Saddam Hussein, ou encore vendre des armes à l’Iran du peu démocratique ayatollah Khomeiny. Plus près de nous, c’est bien entendu l’attachement proclamé des Etats-Unis à la démocratisation des régimes, canalisée à son tour dès l’année 2004 au sein d’un package global plus connu aujourd’hui encore sous le nom de Great Middle East Project 6, qui mettra en exergue les contradictions américaines. Le Moyen-Orient pris dans un sens très large, et notamment sa composante proche-orientale, étaient ainsi censés connaître un nouveau tournant politique que caractériserait la mise en place d’élections régulières, libres, transparentes. Mais l’acquisition par des formations politiques profondément américano-sceptiques d’une posture non négligeable au Liban avec les élections parlementaires du printemps 2005, l’écrasant accroissement du nombre de députés parlementaires issus du courant des Frères musulmans en Egypte, et surtout l’accès du Hamas au pouvoir dans les Territoires palestiniens en janvier 2006, sont autant d’événements qui, à côté de la consécration par les Iraniens du président Ahmadinejad, et devant la montée en puissance des formations religieuses conservatrices dans les pays arabes du Golfe, pousseront plus encore qu’auparavant les Etats-Unis à faire de la communication basée sur les droits de l’homme tout en amputant leur rhétorique d’un quelconque principe tangible d’application. Une fois encore, la raison d’Etat américaine l’emportait, Washington ayant bien entendu intérêt à composer avec des gouvernants autoritaires mal- Numéro 65 ● Printemps 2008 Méditerranée 119 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Vers une perpétuation des politiques sismiques ? L’Iran, une puissance virtuelle ? léables plutôt que d’avoir à être confrontée à des acteurs légitimes sur le plan institutionnel, mais beaucoup plus hostiles à un relais des desiderata américains sur le plan pratique. Bien entendu, si la propension à la contradiction demeure l’une des attitudes les mieux mises en évidence par Washington, toutes périodes et toutes présidences confondues, cela ne préjuge en rien du caractère éventuellement plus cohérent susceptible de s’imposer à l’avenir sur l’agenda de la première puissance mondiale. Les modalités décisionnelles américaines sont déterminantes sur ce point, la principale difficulté consistant, pour l’observateur extérieur, à savoir qui décide de quoi et à quel(s) niveau(x) aux Etats-Unis. Néanmoins, dans le cas de G. W. Bush, deux mandats successifs nous auront aidé à comprendre que le chef de l’Exécutif américain décide en grande partie, en matière de politique internationale, en fonction de la perception qu’il a – ou qu’il se fait – des affaires internationales7. © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Quoiqu’il en soit, la scène moyen-orientale en général et procheorientale en particulier aura eu pour sort, sous la présidence de l’Administration Bush, de voir son triste état le céder à plus de motifs d’inquiétude encore. Si l’Administration Clinton avait échoué à résoudre le conflit israélo-palestinien, ce dernier ne fera en effet pas grandchose pour améliorer la donne. Le délaissement du conflit israélo-palestinien caractérisera très clairement les premiers mois de l’Administration Bush, au point de susciter l’ire du prince Abdallah d’Arabie saoudite, qui ne manquera pas d’en faire le reproche au numéro un américain. Ce dernier donnera alors des signes bonne volonté au prince saoudien, mais le 11-Septembre aura tôt fait de porter un coup d’arrêt à toute possible clarification de l’avenir de la question israélo-palestinienne, reléguant la grille d’interprétation des événements internationaux à une seule opposition entre les soutiens du terrorisme et ses détracteurs. Aller à l’encontre de la vision développée par l’Administration Bush, tous domaines confondus, portait le lourd risque de pouvoir dès lors être assimilé à un soutien d’al-Qaïda et 120 Méditerranée Numéro 65 ● Printemps 2008 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Un inquiétant éclatement des champs conflictuels proche-orientaux Dossier Itinéraire Actuel Culture © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) d’Ousama ben Laden ; la mise entre parenthèses des perspectives israélo-palestiniennes s’ouvrira dès lors, et avec elle l’octroi à l’Etat hébreu de toute latitude en matière de gestion du conflit régional le plus lourd et le plus empreint de tensions. Avec pour résultat ultime l’accès du Hamas au pouvoir en janvier 2006. Car, directement après l’invasion de l’Afghanistan à la fin de l’année 2001, c’est le dossier iraquien qui avait accaparé l’attention et les efforts de l’Administration Bush. Trois motifs seront avancés pour « justifier » l’invasion du pays : la détention présumée par le régime de Saddam Hussein d’Armes de destruction massives (ADM), accusation qui occupera pleinement l’espace médiatique le long du second semestre 2002 ; les connexions présumées entre le dictateur iraquien et l’organisation al-Qaïda, que « mettra en valeur » le Secrétaire d’Etat américain Colin Powell lors de sa célèbre prestation au Conseil de sécurité de l’ONU en date du 5 février 2003 ; et enfin, l’attachement de Washington à installer la démocratie en Iraq, objectif qui ne sera cependant formulé qu’au lendemain de l’invasion de ce pays. Certes, en classant dès le mois de janvier 2002 l’Iraq aux côtés de l’Iran et de la Corée du Nord dans le camp de l’ « Axe du Mal » (Axis of Evil 8), le président américain n’avait pas pour autant réussi à provoquer un consensus de la part de la communauté internationale en faveur de la chute de Saddam Hussein. Pour preuve, ce sont les seuls Etats-Unis, Grande-Bretagne et Espagne qui se mettront d’accord sur une telle opération, scellée à l’occasion du Sommet des Açores du 16 mars 2003. Mais dans le même temps, cette réticence internationale, relayée d’ailleurs par de puissants mouvements de contestation par les opinions publiques mondiales d’un scénario belliqueux si précipité à l’encontre de l’Iraq, n’empêchera en rien Washington de mener une telle attaque, soutiens régionaux comme internationaux à l’appui, et d’avancer dans un sens conforme à ses volontés initiales. Ce n’est qu’avec le passage du temps que les limites de la stratégie américaine transparaîtront, avec néanmoins une inconnue toujours d’actualité : celle de savoir ce qu’a vraiment sollicité l’Administration Bush en se lançant dans une telle aventure. Sur un plan factuel en effet, l’invasion de l’Iraq a eu pour conséquence une mise à mal durable et très probablement irréversible du sentiment d’unité nationale iraquien, Kurdes, Arabes sunnites et Arabes chiites aspirant pour la plupart d’entre eux à l’obtention d’une Numéro 65 ● Printemps 2008 Méditerranée 121 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Vers une perpétuation des politiques sismiques ? © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) assise territoriale à l’autonomie large. Serait-ce là le résultat escompté par Washington ? On ne peut entièrement l’exclure, notamment lorsque l’on porte attention aux éléments idéologiques qui ont pu motiver des néo-conservateurs omniprésents lors du premier mandat de G. W. Bush. Dans le même temps, on ne peut que constater que les Etats-Unis ont, avec cette aventure, porté un coup durable à leurs intérêts régionaux, et surtout à l’image qu’ils ont auprès des opinions publiques régionale comme internationale. En parallèle, l’argument selon lequel les Etats-Unis, motivés avant tout par la sécurisation de leur approvisionnement pétrolier à terme, auraient voulu tirer profit des réserves énergétiques iraquiennes afin de diminuer leur dépendance vis-à-vis d’une Arabie saoudite en proie à des courants fondamentalistes menaçants reste tout aussi bien un élément à prendre en compte, bien entendu, mais avec une nuance de taille : à savoir que l’Arabie saoudite n’a pas de raisons de renoncer à jurer fidélité à son allié américain tant que celui-ci lui garantit son soutien militaire. Reste ainsi l’argument selon lequel les Etats-Unis, mus par une volonté effective de démocratisation de la région, auraient voulu faire de l’Iraq un exemple réussi et amené à se propager par effet domino dans le reste des Etats de la région ; mais là encore, cela n’explique en rien pourquoi l’Administration Bush a, dès lors, choisi d’user de cet argumentaire de type idéologique après l’invasion de l’Iraq, et après avoir mis en exergue d’autres motifs et accusations vis-à-vis de Saddam Hussein. Les raisons ayant effectivement motivé l’invasion de l’Iraq seront ainsi peut-être révélées un jour, ouverture des archives diplomatiques et secrètes américaines aidant. Dans l’attente cependant, force est de constater que la stratégie américaine n’a nullement joué en faveur de la stabilisation des perspectives prévalant au Proche et au Moyen-Orient. C’est l’éclatement des champs conflictuels proche-orientaux qui a en effet d’ores et déjà caractérisé les deux mandats de l’Administration Bush, et l’exacerbation des tensions entre Syriens et Libanais n’est que l’une des preuves supplémentaires de cette situation. La domination exercée par la Syrie sur le Liban n’a en effet, durant longtemps, pas vraiment gêné les Administrations américaines, qui s’accommodaient de cette situation en ne regardant que la contrepartie et les bénéfices qu’ils pouvaient obtenir de Damas en échange. Ce n’est qu’en 2004, avec le rapprochement sollicité par la France des Etats-Unis aux fins de 122 Méditerranée Numéro 65 ● Printemps 2008 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) L’Iran, une puissance virtuelle ? Dossier Itinéraire Actuel Culture © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) récupérer la casse intervenue dans leurs relations au début de l’année 2003, que seront posées les conditions d’une réévaluation de la donne syro-libanaise. La résolution 1559 de l’ONU du 2 septembre 2004, fruit d’un rapprochement et d’un travail actifs entre Français et Américains9, participera ainsi de tiraillements extrêmes sur la scène politique libanaise, que ne contribuera en rien à apaiser la décision prise par les Syriens de pousser les députés parlementaires libanais à prolonger le mandat du président Emile Lahoud d’une durée de trois ans. Cinq mois plus tard, intervenait l’assassinat du Premier ministre nouvellement démissionnaire Rafic Hariri, qui mènera vite à un retrait des contingents syriens du pays. Mais le Liban ne connaîtra pas pour autant la stabilité, loin s’en faut. Les attentats ciblés à l’encontre de journalistes et intellectuels, de politiciens et de militaires d’une part, l’éclatement d’une guerre libanoisraélienne d’autre part, seront autant d’événements qui joncheront par la suite le quotidien d’un pays profondément désorienté. Si une idée abondamment relayée, en Occident comme dans les pays arabes, veut en effet qu’un jeu dominé par la Syrie et l’Iran soit à la base des évolutions cahoteuses connues par le Liban, cela ne laisse pas moins posée la question de savoir dans quelle mesure le positionnement des Etats-Unis vis-à-vis de la région prise dans son ensemble pourrait pour sa part être interprété à la seule lumière des vertus que Washington entretiendrait réellement au Moyen-Orient. Lors de la guerre de l’été 2006, les Etats-Unis n’avaient en effet en rien cherché à réfréner l’action pour le moins lourde développée par l’Etat hébreu vis-à-vis de zones libanaises habitées par des civils et/ou éloignées des positions militaires et stratégiques du Hezbollah. Et, plus largement, les motifs de tension qui ont entretenu la majorité parlementaire libanaise et ses homologues de l’opposition depuis les élections législatives du printemps 2005 ont constamment poussé les Américains à adopter une attitude de partisans impliqués dans les évolutions politiques libanaises, et non de médiateurs. Washington ne saurait d’ailleurs être blâmé à ce titre, étant donné que le fait pour lui de trouver un répondant au sein de l’échiquier politique libanais ne peut, naturellement, que l’encourager à aller plus avant dans la notification de ses souhaits vis-à-vis des évolutions politiques du pays. Par contre, le constat ainsi formulé implique de nommer les choses pour ce qu’elles sont, et de ne pas voir dans le Liban l’exemple d’un pays payant le seul Numéro 65 ● Printemps 2008 Méditerranée 123 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Vers une perpétuation des politiques sismiques ? © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) prix de politiques développées par des pays régionaux confortés par la présence d’alliés locaux. Les Etats-Unis, au même titre que l’Iran et la Syrie, ont pour chacun d’entre eux des alliés politiques libanais effectifs, avec lesquels ils partagent une large communauté de points de vue. En revanche, si l’idée d’un bras de fer engagé entre Washington d’une part, et Damas et Téhéran d’autre part, au travers de la scène libanaise est avérée, il convient néanmoins de demeurer conscients de ce que, plus que tout, ce sont bien les motifs d’opposition entre proAméricains et américano-sceptiques qui entretiennent l’essentiel de la polarisation politique installée dans ce pays aujourd’hui. Un phénomène que les médias occidentaux comme arabes sont très majoritairement prompts à occulter, mais qui saute pourtant aux yeux pour qui pointe un regard attentif aux motifs et à la rhétorique déployés par chacune des formations politiques membres de la majorité parlementaire et de l’opposition libanaises. De la situation israélo-palestinienne à l’état des lieux syro-libanais en passant par la donne iraquienne, l’éclatement des champs conflictuels proche-orientaux est ainsi bel et bien au rendez-vous. Qui plus est, un trait saillant s’impose dans ces trois situations : celui de la présence, chez les opinions publiques, d’un américano-scepticisme massif, qui explique en partie non négligeable l’accès du Hamas au pouvoir palestinien, la radicalité de la posture des partis libanais de l’opposition, l’absence de disposition d’une majorité de formations politiques iraquiennes à acquiescer à toute politique qui pourrait leur être dictée de près ou de loin par Washington, mais aussi le boulevard rhétorique qui s’est ouvert à l’Iran depuis que les Etats-Unis ont doublé leur stratégie politico-militaire hasardeuse de tentatives d’auto-justification qui restent bien loin d’emporter l’adhésion des opinions publiques concernées. Mutations des alliances régionales, ou consolidation du statu quo ? On a pu croire, pendant un moment, que les Etats-Unis allaient doubler leur aventure militaire iraquienne de l’ouverture de champs similaires en Syrie et en Iran. Si une telle hypothèse ne peut toujours pas être entièrement évacuée tant les mises en garde américaines vis-à-vis de ces deux pays restent réelles, il faut noter en parallèle la manière par 124 Méditerranée Numéro 65 ● Printemps 2008 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) L’Iran, une puissance virtuelle ? Dossier Itinéraire Actuel Culture © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) laquelle les diverses tentatives d’intimidation déployées par Washington n’ont pas obtenu les effets escomptés. Car la stratégie régionale américaine, qui a provoqué des craintes de la part de la Syrie plus que de l’Iran, a de surcroît eu pour effet incontestable un renforcement de la posture régionale de ce dernier. A la veille du 11-Septembre, les Talibans afghans et l’Iraquien S. Hussein comptaient au rang des ennemis honnis par Téhéran, qui avait déployé une stratégie politique et militaire fondée sur la nécessaire anticipation de toute menace susceptible d’être déployée par l’un d’eux à l’encontre de ses intérêts. Deux années plus tard, ni l’un ni l’autre de ces deux acteurs ne seront plus en place, et Washington se verra lui-même confronté à un impératif de Nation Building qui, doublé de violences locales exercées à l’encontre de ses intérêts et de ceux de ses alliés, concentrent à ce jour encore une grande partie de son attention et de ses efforts. Avec le temps, il va de soi que les motifs de contestation développés par une partie de l’opinion publique américaine elle-même vis-à-vis de la politique internationale de l’Administration en place ne faciliteront en rien la tâche des responsables américains, aussi attachés au développement de scénarii belliqueux puissent-ils – ou aient-ils pu – être. Par extension, si certaines hypothèses n’excluent en rien la possibilité pour l’administration Bush de tenter une attaque vis-à-vis de l’Iran quelques semaines avant la fin officielle du mandat du président, il faut cependant noter aussi que ce dernier, bien que ne se représentant plus, reste cependant le nécessaire garant des intérêts et de l’image du parti républicain. Ce qui laisse posée la question de savoir comment il pourrait en venir à lancer une nouvelle opération guerrière au MoyenOrient sans voir cette hypothèse rejaillir sur les chances des candidats républicains actuels à la présidence. C’est peu dire, en effet, que l’image du président Bush à l’international restera durablement écornée. Mais cette situation ne préjuge pas pour autant de la posture des Etats-Unis à l’échelle de la planète. Les Américains, quand bien même ils souffrent aujourd’hui d’un déficit de crédibilité et d’un relatif étiolement de leurs capacités de persuasion, n’en restent pas moins toujours aussi déterminants sur les évolutions du monde, faute notamment de concurrent à leur hauteur sur les plans diplomatique et militaire. Cette position enviable pourra-t-elle les pousser à mettre en place des stratégies plus constructives pour l’avenir du Numéro 65 ● Printemps 2008 Méditerranée 125 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Vers une perpétuation des politiques sismiques ? © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Moyen-Orient avec le renouvellement de l’Administration américaine ? Seul l’avenir le dira, même si l’on croit pouvoir se douter de ce que le/la successeur(e) de G. W. Bush, aussi louables pourront être ses intentions, n’aura que très peu de chances de vouloir chercher à modifier certaines constantes lourdes américaines. Parmi celles-ci : la pleine prise en considération des requêtes israéliennes dans l’esquisse des politiques proche et moyen-orientales ; l’érection des prétentions iraniennes à un programme nucléaire comme scénario profondément inquiétant justifiant des mesures et mises en garde sévères ; l’inscription du Hamas palestinien et du Hezbollah libanais au rang des forces radicales et extrémistes ne supportant que très peu l’ouverture d’un canal diplomatique ; ou encore, le soupçon de voir une présence syrienne derrière tous les maux libanais tout comme derrière certains maux iraquiens et, partant, la mise en accusation de ce pays comme préalable à toute discussion. Or, Washington aurait tout intérêt à changer la manière par laquelle il cherche à peser sur les évolutions proche et moyen-orientales, sans quoi il pourrait perdre son emprise sur cette région bien plus rapidement qu’on ne le croit. Bien entendu, les Etats-Unis sont loin d’être aussi affaiblis dans la région que ne le furent les Français et les Britanniques cinquante ans plus tôt10. Mais dans le même temps, le récent sommet d’Annapolis (2007), ainsi que la tournée de G.W. Bush au Moyen-Orient (2008), ont mis en exergue deux faits majeurs : la faible détermination de l’Administration américaine actuelle à vouloir oeuvrer à une résolution effective des conflits israélo-palestinien et israélo-arabes en général ; mais aussi l’échec du numéro un américain à rallier ses alliés de la région au développement d’une stratégie menaçante pour l’Iran. De l’Egypte à l’Arabie saoudite en passant par la Jordanie, les Emirats arabes unis ou encore le Koweït, Washington n’a que des amis fiables, certes. Mais cela n’entame pour autant en rien une réalité en gestation : celle de la présence de modalités concurrentielles renouvelées, impliquant Moscou et Pékin très spécifiquement, tous deux n’épargnant pas leurs efforts amenés à les rendre indispensables aux besoins économiques et militaires de la région11. Or, l’histoire récente a prouvé que si les Etats-Unis avaient réussi à solidifier les ressorts de leur influence politique au Moyen-Orient, c’était pour beaucoup grâce au savant alliage qu’ils avaient réussi à mettre en place par un maniement impeccable d’offres commerciales, financières et/ou militaires en pleine adé- 126 Méditerranée Numéro 65 ● Printemps 2008 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) L’Iran, une puissance virtuelle ? Dossier Itinéraire Actuel Culture Vers une perpétuation des politiques sismiques ? © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Un malaise durable Les Etats-Unis ont encore de beaux jours devant eux au MoyenOrient. Mais leur image s’y est considérablement affaiblie en l’espace de deux mandats présidentiels. Qui plus est, la profonde méfiance des opinions publiques à leur égard s’est doublée de craintes de la part d’une partie des gouvernants de la région, qui demeurent conscients de ce que les relations internationales et les logiques d’alliances peuvent être, par définition, extrêmement fluctuantes. Il ne faut néanmoins pas s’attendre à ce que l’un ou l’autre des gouvernants de la région cherche à évoluer vers une franche recomposition de ses relations stratégiques sur les court et moyen termes : Syrie et Iran savent en effet que leurs saluts respectifs restent déterminés par la manière dont ils joueront la partie d’échecs qui les opposent à Washington ; la classe politique au pouvoir en Iraq affiche pour sa part, chaos ambiant aidant, un grand attachement à voir les Etats-Unis maintenir leurs contingents militaires dans son pays aussi longtemps que la sécurité nationale et la Numéro 65 ● Printemps 2008 Méditerranée 127 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) quation avec les besoins et les demandes d’une région en quête perpétuelle de parrains étrangers. Outre leur impopularité régionale néanmoins, les Américains ont pour principale autre tare d’avoir fondé leur rhétorique de ces dernières années sur des motifs largement idéologiques, basés surtout sur leur supposé attachement à la promotion de la démocratie dans la région. Les événements récents ont bien sûr prouvé qu’il n’y avait là que pure démagogie qu’était venu annuler en large partie le constat suivant : celui d’une montée en puissance des forces radicales aux programmes inspirés par des motifs religieux. Mais les gouvernants de la région ont-ils des raisons de se sentir rassurés par l’action d’un acteur qui, pour des motifs annoncés idéologiques en partie, était allé jusqu’à écarter un S. Hussein pourtant naguère si conciliant avec les intérêts américains ? Il est à parier que non, et si la majorité des gouvernants de la région se savent encore sous étroite dépendance des Etats-Unis, ils ont cependant de fortes chances d’être de plus en plus tentés à terme par les offres d’acteurs chinois et russes qui ont, à leurs yeux, pour mérite non négligeable de n’être absolument pas regardants sur les questions relevant des questions politiques domestiques et du respect des droits de l’homme. © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) constitution efficace des corps sécuritaires iraquiens ne seront pas assurés, soit pendant très longtemps encore ; la majorité parlementaire libanaise, aussi soumise à pressions domestiques soit-elle, n’a pas moins fait de son alliance pro-américaine un pan stratégique inébranlable que Washington cherchera à préserver tant qu’il en aura besoin ; l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas n’envisage sérieusement pas d’autre médiateur que les Etats-Unis dans le conflit qui l’oppose à Israël ; quant à la situation régionale prise dans un sens plus large, elle demeure à l’avantage des Américains qui peuvent encore compter sur une série d’alliés fidèles et cordiaux. Mais cet état des faits cache mal un profond malaise régional, caractérisé par la manière dont les pôles conflictuels ont pu connaître une inquiétante prolifération ces dernières années, et que le manque de crédibilité des Américains au Moyen-Orient ne contribue absolument pas à apaiser. Plus que tout, les huit années qui viennent de s’écouler ont montré que les perspectives proche et moyen-orientales souffraient pour beaucoup de la nature et de la portée des ingérences étrangères qui s’exerçaient en son sein. Or, l’idée d’un Moyen-Orient indépendant et désarrimé d’influences étrangères est tout à fait illusoire12 ; sa soumission à influences russe et/ou chinoise n’est pas ce qu’il y a de plus souhaitable ; quant à la traduction par l’Union européenne de ses principes proclamés en actes concrets s’appliquant dans la région, elle ne semble en rien imminente. Il ne reste dès lors plus qu’à espérer que, devant le manque annoncé de perspectives concrètes en faveur d’une pacification du Proche-Orient, l’avenir de la politique américaine s’y exerçant puisse, à défaut d’une résolution des pôles déstabilisants y prévalant, ne pas participer d’un éclatement supplémentaire des champs conflictuels. Pour le reste, le salut de la région ne pourra être qu’à l’émanation de politiques concrètes voulues et promues en plein accord par les dirigeants de la région. Autant dire que l’attente risque d’être encore bien longue. ■ Notes 1. Les gouvernants moyen-orientaux actuels, qui sont pour beaucoup d’entre eux en place depuis des décennies, n’ont qu’à de menues et rares exceptions près mis en exergue les nuances qu’ils percevaient selon que les Etats-Unis avaient pu être dirigés par James Carter, Ronald Reagan, Bill Clinton, George W. Bush, entre autres. 2. Une première et probablement dernière tournée officielle au Moyen-Orient de la part du président américain durant ses deux mandats, qui le mènera en Israël, dans les Territoires palestiniens, au Koweït, au Bahreïn, aux Emirats arabes unis, 128 Méditerranée Numéro 65 ● Printemps 2008 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) L’Iran, une puissance virtuelle ? Dossier Itinéraire Actuel Culture © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) en Arabie saoudite et en Egypte. 3. Le Proche-Orient, expression de création médiatique occidentale datant de la fin des années 1970, désigne traditionnellement l’Etat d’Israël et les pays ou entités arabes qui ont connu des guerres puis des pertes territoriales à son profit, soit : les Territoires palestiniens, la Syrie, le Liban, l’Egypte et la Jordanie. Le Moyen-Orient désigne pour sa part, plus généralement, cette même région étendue aux pays du golfe arabo-persique, Iraq et Iran inclus ; voir à ce propos Alexandre Defay, Géopolitique du Proche-Orient, PUF/Que Sais-Je, 2006. Cette définition reste bien évidemment à nuancer, tant elle peut dépendre de critères d’appréciation purement subjectifs ; à titre d’exemple, la Turquie ne saurait en rien être entièrement exclue de la géographie comme des évolutions politiques de la région, sans en faire entièrement partie ; il en va d’ailleurs de même dans le cas de l’Iran. 4. Voir notamment le rapport du Pew Research Center Project, America’s Image Slips, but Allies Share Concerns over Iran, Hamas, 13 juin 2006, à l’adresse Internet : http://pewglobal.org/reports/pdf/252.pdf. Le tableau intitulé Dangers to World Peace y est des plus parlants, notamment pour ce qui relève de la proportion de personnes ayant estimé en 2006 que la présence américaine en Iraq constituait une menace pour la paix mondiale : 15% des Indiens seulement, mais une moyenne de 30 % pour les Chinois, les Japonais et les Américains eux-mêmes, et plus de la moitié des sondés en Turquie, en Egypte, en Jordanie... ou encore en Espagne. 5. Selon l’expression utilisée par le président Harry Truman devant le Congrès américain, 12 mars 1947. Bien entendu, c’était la nécessité qu’il y avait pour les Etats-Unis d’empêcher toute extension du communisme qui expliquait l’initiation par les Etats-Unis de la doctrine du containment ; mais on n’avait pas moins ici la représentation d’une posture officielle au sein de laquelle l’attachement proclamé à la « liberté des peuples » donnait l’impression de n’avoir pas beaucoup plus qu’une fonction de prétexte au développement de stratégies garantissant les intérêts américains à l’international. 6. Révélé à la suite de fuites du département d’Etat américain par le quotidien à capitaux saoudiens al-Hayat en février 2004, consacré par les Etats-Unis et le G8 quatre mois plus tard, le projet de Grand Moyen-Orient, vite rebaptisé Broader Middle East and North Africa Initiative (BMENA), se proposait de refondre les perspectives moyen-orientales à travers trois axes : l’encouragement à la démocratisation des régimes de la région ; l’amélioration des modalités de transmission des connaissances ; et la promotion du libéralisme économique. Le projet ne restera cependant pas longtemps d’actualité, l’Administration américaine ayant elle-même cessé de l’évoquer comme tel au lendemain de la réélection de G. W. Bush à la présidence du pays. Celui-ci évoquera certes ses projets concernant le Broader Middle East dans son discours sur l’état de l’Union du 2 février 2005 ; mais c’était là l’une des dernières références de sa part à ce qui s’apparentait encore à un réel projet. 7. Particulièrement parlante à cet égard est l’expression dont aurait usé Dan Bartlett, directeur de la communication de G. W. Bush, pour qui ce dernier « n’est pas un vérificateur des faits » (« The President of the United States is not a fact checker) ; voir les bonnes feuilles de l’ouvrage de Jacob Weisberg, From the Bush Tragedy, Random House Publishing Group, 2008, in Newsweek, 19 janvier 2008. 8. Expression utilisée par le président G. W. Bush à l’occasion du discours sur l’état de l’Union du 29 janvier 2002, consultable à l’adresse Internet : http://www.whitehouse.gov/news/releases/2002/01/20020129-11.html 9. Pour les détails de ce réchauffement dans les relations franco-américaines, voir Richard Labévière, Bagdad-Beyrouth : le grand retournement, Paris, Seuil, 2006. 10. La guerre de Suez (1956) avait en effet signifié la fin des politiques impériales française et britannique dans la région, et avait d’ailleurs été voulue et provoquée par des Etats-Unis en quête d’un positionnement stratégique confortable au Moyen-Orient ; voir Barah Mikaïl, La politique américaine au Moyen-Orient, Paris, Dalloz, 2006. Si Washington n’est pas à l’abri d’un tel Numéro 65 ● Printemps 2008 Méditerranée 129 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) Vers une perpétuation des politiques sismiques ? L’Iran, une puissance virtuelle ? © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) 130 Méditerranée Numéro 65 ● Printemps 2008 © L'Harmattan | Téléchargé le 03/06/2024 sur www.cairn.info (IP: 44.209.135.156) retournement de l’histoire, il a néanmoins, à ce jour, pour principal atout de ne pas connaître de concurrent international apte à prétendre à sa pleine succession dans la région. L’histoire demeure cependant en perpétuelle gestation. 11. Cette stratégie n’est d’ailleurs pas nouvelle, Pékin et Moscou ayant été accusés de vendre des armes à certains acteurs et pays de la région dès la fin des années 1990. La nuance à apporter aujourd’hui réside cependant dans le caractère assumé et en bonne partie officialisé de cette situation, comme le prouvent, entre autres exemples, la portée des accords militaires et/ou commerciaux entretenant la Russie et la Chine d’une part, et l’Iran, la Syrie et même l’Algérie de l’autre. 12. Et ce en dépit du caractère noble de cette idée, qui aurait le mérite de voir enfin les Etats du Moyen-Orient traiter de leurs propres problèmes entre eux et indépendamment de tout parasitage à l’origine externe ; voir à ce titre Etienne Balibar, L’Europe, l’Amérique, la guerre : réflexions sur la médiation européenne, Paris, La Découverte, 2005.