Monsieur Olivier Galland
Parler en famille : les échanges entre parents et enfants
In: Economie et statistique, N°304-305, Avril 1997. pp. 163-177.
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Galland Olivier. Parler en famille : les échanges entre parents et enfants. In: Economie et statistique, N°304-305, Avril 1997. pp.
163-177.
doi : 10.3406/estat.1997.2563
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/estat_0336-1454_1997_num_304_1_2563
Résumé
Parler en famille : les échanges entre parents et enfants
L'étendue des sujets abordés par les discussions entre parents et enfants parvenus à l'âge adulte est
un indicateur de l'intensité de leurs rapports. Il montre que davantage que l'âge, l'installation en couple
tend à amenuiser ces liens : une rupture plus nette se manifeste chez les jeunes femmes, plus enclines
que les garçons à nouer des échanges avec leurs parents. Deux thèmes soulèvent certaines réticences
: la vie sentimentale, au sujet de laquelle les garçons font preuve d'une particulière pudeur, et la
politique, qui suscite autant de réserves de la part des filles que des garçons. Les enfants se confient
plus volontiers à leur mère qu'à leur père, et les parents attirent plus souvent les confidences d'un
enfant de même sexe qu'eux. Le père semble particulièrement réfractaire à celles qui concer- nent la
vie sentimentale ou les amis : les conseils dans ce domaine sont l'apanage de la mère, alors que
l'intervention du père se limite à des questions plus objectives (études, travail, argent) ou à la politique.
Avoir un niveau de formation et une origine sociale élevés favorisent les échanges, même dans les
domaines qui n'exigent pas de connaissances. Dans tous les domaines l'intensité des relations verbales
est liée au capital scolaire. ...
Le chômage du père de famille avec son cortège de problèmes psychologiques s'accompagne d'une
anémie des
échanges des enfants avec leur mère qui se consacre plus exclusivement à son mari. L'inactivité de
cette dernière limite l'horizon des discussions avec elle et s'accompagne d'un report sur le père. Face
aux difficultés d'ordre familial (divorce) ou personnels (problèmes sentimentaux, financiers, judiciaires),
l'étendue du dialogue entre parents et enfants se maintient et peut même connaître une nouvelle
ampleur, notamment sur des thèmes en rapport direct avec ces problèmes.
Resumen
Hablar en familia : los intercambios entre padres e hijos
La extension de Ios temas evocados en las conversaciones entre padres e hijos ya adultos es un
indicador de la intensidad de sus relaciones. Este révéla que antes que la edad, la instalaciôn en pareja
contribuye a mermar esas relaciones. Se manifiesta una ruptura mâs franca entre las mujeres jôvenes,
mâs propensas que Ios varones a entablar intercambios con sus padres. Dos temas levantan ciertas
resistencias : la vida sentimental, que es objeto de un pudor especial por parte de Ios varones, y la
polftica, que suscita tantos reparos por parte de Ios muchachos como de las muchachas. Los jôvenes
se confian con mâs frecuencia a su madré que a su padre, y Ios padres atraen mâs a menudo las
confidencias de un hijo del mismo sexo que ellos. El padre parece especialmente refractario a las que
atanen a la vida sentimental o a Ios amigos : las recomendaciones en ese particular son patrimonio de
la madré, cuando la intervenciôn del padre se limita a unas cuestiones mâs objetivas (estudios, trabajo,
dinero) o a la polftica. Tener un nivel de formaciôn y un origen social elevados favorece Ios
intercambios, incluso en aquellas materias que no exigen conocimientos. En todas las materias, la
intensidad de las relaciones verbales esta relacionada con el capital escolar.
El para del jefe de familia con su séquito de problemas sicolôgicos esta acompanado por una anemia
de Ios intercambios de Ios hijos con su madré, la cual se dedica con mayor exclusividad a su marido.
La inactividad de esta limita el horizonte de las conversaciones con ella y se acompana con una
transferencia sobre el padre. Frente a dificultades de tipo familiar (divorcio) o personales (problemas
sentimentales, financieros, judiciales), la extension del diâlogo entre padres e hijos se mantiene y hasta
puede conocer nuevo alcance, sobre unos temas en relaciôn estrecha con estos problemas.
Zusammenfassung
Der Dialog innerhalb der Familie: der Austausch zwischen Eltern und Kindern
Der Umfang der Themen, die bei den Diskussionen
zwischen Eltern und ihren erwachsenen Kindern erôrtert werden, ist ein Indikator fur die Intensitàt ihrer
Beziehungen. Er veranschaulicht, daB das Zusammenleben mit einem Freund oder einer Freundin in
stàrkerem MaBe als das Alter diese Beziehungen lockert. Ein deutlicherer Bruch vollzieht sich bei den
jungen Frauen, die eher als die jungen Manner geneigt sind, mit ihren Eltern zu diskutieren. Bei zwei
Themen herrscht allerdings eine gewisse Zurûckhaltung: und zwar des Gefûhlslebens, bei denen die
jungen Manner eine besondere Scham an den Tag legen, sowie in der Politik, bei der die Mâdchen
genauso zurùckhaltend wie die jungen Manner sind. Die Kinder vertrauen sich eher ihrer Mutter als
ihrem Vater an, wâhrend die Eltern bei einem Kind gleichen Geschlechts oftmals mehr Vertrauen
finden. Der Vater zeigt, so scheint es, gegenùber Themen, die das Gefûhlslebens oder die Freunde
betreffen, eine grôBere Zurùckhaltung: die in diesem Bereich erteilten Ratschlàge sind seit jeher die
Domàne der Mutter, wâhrend sich der Vater auf objektivere Fragen (Studium, Arbeit, Geld) Oder die
Politik beschrânkt. Ein hôherer , Ausbildungsgrad und bessere soziale Verhâltnisse fôrdern den
Austausch, selbst auf Gebieten, die keine speziellen Kenntnisse voraussetzen. In alien Bereichen hângt
der Grad der Gespràchsbereitschaft vom Ausbildungsniveau ab.
Die Arbeitslosigkeit des Vaters mit alien sich daraus ergebenden psychologischen Problemen hat einen
Mangel an Austausch zwischen den Kindern und ihrer Mutter zur Folge, die sich dann hauptsàchlich
dem Vater widmet. Bei Nichterwerbstâtigkeit der Mutter kommt es nur zu wenigen Diskussionen mit ihr
und zu einer Hinwendung zum Vater. Familiàre Schwierigkeiten (Scheidung) oder persônliche Problème
(Liebeskummer, Schwierigkeiten finanzieller oder rechtlicher Art) beeintrâchtigen nicht den Dialog
zwischen Eltern und Kindern und kônnen ihn sogar vertiefen, vor allem bei Themen, die in einem
direkten Bezug zu diesen Problemen stehen.*
Abstract
Conversations between Parents and Children
The range of topics addressed in conversations between . parents and their adult children is an
indicator of how close a relationship they have/ It shows that these links tend to be weakened by
becoming part of a couple rather than age. A clearer break is found for young women, who are more
inclined than the boys to converse with their parents. Two subjects are somewhat sensitive: love life,
about which boys are particularly modest, and politics, which both boys and girls are equally hesitant to
talk about. Children confide more readily in their mother than their father and more often confide in the
parent of the same sex as they are. Fathers seem to be particularly seldom party to information on their
children's love lives and friends. Advice in these areas is the exclusive right of the mother. The father's
involvement is limited to more
objective questions (studies, work and money) and politics. A high level of education and a comfortable
social background are favourable to conversations, even in fields that require no knowledge. The extent
of verbal contact is linked to educational capital in all areas. If the father of the family is unemployed,
given all the psychological problems this entails, the children have few conversations with their mother,
who devotes more time to her husband. If the mother does not work, the scope for discussions with her
is limited and the children transfer to the father. In the case of family problems (divorce) or personal
problems (love, financial and legal problems), the extent of dialogue between parents and children is
sustained and may even increase, especially on subjects directly associated with these problems.
.
JEUNES
Parler en famille : les échanges
entre parents et enfants
Galland*
Olivier
àL'étendue
davantage
rupture
garçons
réticences
particulière
filles
l'âge
que
adulte
àplus
des
nouer
des
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lapudeui;
nette
garçons.
sujets
est
vie
l'âge,
des
un
sentimentale,
seet
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abordés
indicateur
manifeste
l'installation
Les
la politique,
enfants
par
avec
de
chez
aules
l'intensité
se
en
sujet
leurs
qui
discussions
les
confient
couple
suscite
jeunes
de
parents.
laquelle
tend
de
plus
autant
femmes,
leurs
entre
Deux
àvolontiers
amenuiser
lesrapports.
de
parents
garçons
thèmes
plus
réserves
enclines
àet
ces
leur
soulèvent
font
Ilenfants
de
montre
liens
mère
preuve
laque
part
: parvenus
une
qu'à
certaines
les
que
d'une
desleur
père, et les parents attirent plus souvent les confidences d'un enfant de même sexe
qu'eux. Le père semble particulièrement réfractaire à celles qui concernent la vie
sentimentale ou les amis : les conseils dans ce domaine sont l'apanage de la mère,
alors que l'intervention du père se limite à des questions plus objectives (études,
travail, argent) ou à la politique. Avoir un niveau de formation et une origine
sociale élevés favorisent les échanges, même dans les domaines qui n'exigent pas
de connaissances. Dans tous les domaines l'intensité des relations verbales
est liée au capital scolaire.
Le chômage du père de famille avec son cortège de problèmes psychologiques
s'accompagne d'une anémie des échanges des enfants avec leur mère qui se
consacre plus exclusivement à son mari. L'inactivité de cette dernière limite
l'horizon des discussions avec elle et s'accompagne d'un report sur le père. Face
aux difficultés d'ordre familial (divorce) ou personnels (problèmes sentimentaux,
financiers, judiciaires), l'étendue du dialogue entre parents et enfants se maintient
et peut même connaître une nouvelle ampleuç notamment sur des thèmes
en rapport direct avec ces problèmes.
'Olivier Galland est di
recteur
de recherche
au CNRS et fait partie
de l'Observatoire socio
logique du • change
ment,FNSP-CNRS.
Les noms et dates entre
parenthèses renvoient à
la bibliographie en fin
d'article.
Le premier cercle de la parenté - les parents en âge (Héran, 1988). Une enquête plus récente
et leurs enfants - est le foyer des échanges de la Caisse nationale d'assurance vieillesse
les plus intenses entre les individus. L'enquête sur trois groupes de générations (une générat
Contacts entre personnes avait montré que le ion
pivot née entre 1939 et 1943, la génération
niveau de fréquentation des parents (en dehors des parents et celle des enfants) montre, qu'à
du ménage) est remarquablement stable tout au l'intérieur du cercle familial, les relations sont
long du cycle de vie, le rétrécissement du ré beaucoup plus intenses entre les membres de la
génération pivot et leurs enfants qu'entre ceuxseau de sociabilité lui conférant même une im
portance
relative grandissante avec l'avancée
ci et leurs parents (Attias-Donfut, 1995).
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
163
'.
Sur un plan plus normatif, le sentiment des
obligations réciproques est d'autant plus élevé
que les individus sont proches parents : si l'on
mesure ces obligations par l'aide morale ou f
inancière
que l'on se sent tenu d'apporter à des
personnes en difficulté, ou par les cadeaux ou
les visites que l'on doit faire pour célébrer des
fêtes rituelles, le premier degré d'ascendance
ou de descendance directe se situe toujours au premier rang, devant la parenté collatérale ou
plus éloignée. Les amis ne viennent qu'ensuite
(Rossi et Rossi, 1990).
L'enquête Jeunes de 1992 confirme, dans un
domaine qui n'était pas directement abordé par
les enquêtes françaises précédentes - l'interac
tion
verbale entre parents et enfants (cf. enca-,
dré) -, l'importance des échanges familiaux.
Parmi une liste de six thèmes qui leur était pro
posée (les études, le travail1 ou la recherche "
d'emploi - les livres, la musique, la télévision y
ou le cinéma - les questions d'argent - les amis la vie sentimentale - la politique), 22 % des jeu-,
nés déclarent parler de temps en temps de l'e
nsemble
de ces thèmes avec leur père ou leur
mère (24 % de 5 sujets sur six et 20 % de 4 *
sujets). 4 %?seulement des jeunes n'abordent
aucun de ces sujets avec leurs parents. '
Plus que l'âge, l'avancée dans le cycle
de vie éloigne des parents
Toutefois, à mesure qu'ils vieillissent, les jeu
nes prennent leurs distances avec l'univers fa
milial.
La part de ceux qui ont de nombreuses
discussions avec leurs parents décroît assez
régulièrement entre 18 et 29 ans (cf. graphique
I). Plusieurs facteurs dont il est difficile d'iso
ler
l'effet, peuvent y contribuer. L'avancée en
âge peut créer, à elle seule, une distance psy
chologique
avec la génération précédente. Les
enfants et les adolescents partagent des sorties
avec leurs parents, regardent fréquemment la
télévision avec eux et restent, dans le domaine
culturel, sous l'emprise des goûts familiaux,
mais à mesure qu'ils s'émancipent, leurs inté
rêts vont se diversifier, et la sphère d'influence
de leurs autres relations va prendre une impor
tancegrandissante. ,
L'entrée dans la vie adulte, avec les change
mentsde statut qui l'accompagnent, contribue
également à cet éloignement progressif entre
les générations. Sur ce plan, la formation d'un
couple et plus encore la naissance d'un ou plu
sieurs enfants semblent constituer des facteurs
plus décisifs d'une restriction de l'étendue des
Encadré
LA MESURE DE L'INTERACTION VERBALE :,
ENTRE PARENTS ET ENFANTS DANS L'ENQUÊTE JEUNES 1992
On demandait aux jeunes (nés de 1947 à 1963
inclus) s'ils parlaient « de temps en temps » avec
leur père seulement, leur mère seulement, les deux
ou aucun des deux, d'une série de sujets (les étu
des, le travail ou la recherche d'emploi - les livres, la
musique, la télévision ou le cinéma - les questions,
d'argent - les amis - la vie sentimentale - la politique).
Un premier indicateur compte le nombre d'occurrences
où le jeune parle avec l'un ou l'autre (ou les deux) de
ses parents de chacun de ces sujets. Deux autres i
ndicateurs
comptabilisent les sujets de discussion
exclusifs avec le père ou avec la mère. Ces trois va
riables
ont été • dichotomisées » pour , pouvoir > être
introduites comme variables dépendantes dans les régressions logistiques : parle ou non de plus de trois
sujets avec l'un ou l'autre des parents (63 % oui, 37 %
non) ; parle ou non d'au moins un sujet avec le père
seul (21 % oui, 79 % non) ; parle ou non d'au moins
un sujet avec la mère seule (50 % oui, 50 % non). Les
jeunes dont le père et la mère sont tous deux inconnus
ou décédés ont été exclus de l'analyse.
L'analyse des échanges ainsi mesurés présente tou
tefois une double limite. Tout d'abord, il n'est pas
certain que le nombre de sujets abordés avec les pa
rents soit associé à la fréquence des échanges sur
chacun d'eux. A priori,- rien n'exclut qu'un jeune
164
parle très souvent avec ses parents sur un très petit
nombre de sujets. L'indicateur retenu mesure plus
l'étendue des champs d'intérêt communs aux jeunes
et à leurs parents que l'intensité proprement dite des
échanges. On constate toutefois que la fréquence
des échanges entre les jeunes non résidant chez
leurs parents et ces derniers, mesurée par les con
tacts téléphoniques, est fortement associée à
l'étendue des champs de discussion.
La deuxième limite tient au fait que l'indicateur
d'échanges retenu ne donne en aucune manière une
mesure de leur qualité. Bien s'entendre avec ses pa
rents ne suppose pas forcément de beaucoup parler
avec eux. Certains travaux suggèrent même que la
relation inverse se vérifierait. La relation mère-fille,
vecteur d'échanges plus intenses que la relation
mère-fils est également plus souvent l'occasion de
conflits (Bozon et Gokalp, .1994). Un fort courant
d'échanges peut traduire aussi bien une forme de
confiance qu'un contrôle et une intervention renfor
césdes parents sur leurs enfants. En mettant en
relation le niveau des échanges avec la situation des
jeunes ou de la famille, on ne fait donc aucune hy
pothèse
a priori sur l'interprétation de cette relation.
Seule la lecture - des résultats pourra suggérer
d'avancer telle ou telle hypothèse. '
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
•
relations verbales que l'indépendance résident
ielleproprement dite. Lorsqu'ils vivent dans
un logement différent de celui de leurs parents,
mais sans avoir formé un couple ni avoir d'en
fants (jeunes vivant seuls ou à plusieurs), les
jeunes parlent autant, voire plus, avec leurs pa
rents que ceux qui partagent le même logement
avec eux. L'appartenance à un type de ménage
intermédiaire entre la famille d'orientation que
le jeune a quittée, et la famille de procréation
qu'il n'a pas encore formée, est propice au
maintien de liens intenses avec les parents. À
l'inverse, les jeunes qui ont fondé une famille
précocement s'éloignent plus vite de leurs pa
rents et leur niveau de relations n'évolue plus
avec l'âge (cf. tableau 1).
Graphique I
Les filles plus bavardes que les garçons*
L'analyse « toutes choses égales par ailleurs »
(cf. tableau 2) confirme que le franchissement
des étapes du cycle de vie - et surtout la mise en
couple et la naissance d'un enfant - constituent
des facteurs limitatifs beaucoup plus puissants
des échanges verbaux entre parents et enfants
que l'âge proprement dit.
L'analyse de l'entraide entre parents et enfants
livre un diagnostic un peu différent. Celle-ci est
forte, surtout entre la génération pivot et celle
des enfants, mais elle ne se réduit pas, semblet-il, au moment où cette dernière a elle-même
des enfants. Au contraire, cette présence d'en
fants en bas âge est l'occasion d'importants
échanges intrafamiliaux : 82 % des grandsparents ont l'occasion de s'occuper de leurs
petits-enfants, soit dans la vie quotidienne, soit
durant les vacances (Attias-Donfut, 1995). Les
relations entre générations changeraient donc
sensiblement de nature à mesure que les jeunes
prennent leur autonomie : les échanges de ser
vices seraient plus nombreux, notamment au
moment où une nouvelle famille se constitue,
mais, sur un autre plan, celui de l'interaction
quotidienne, on enregistrerait plutôt une baisse
d'intensité des relations. À vrai dire, il n'y a
rien de vraiment contradictoire dans ces résul
tats, car l'aide familiale est fournie, précisé
ment,pour faciliter l'accès des jeunes ménages
à l'indépendance.
En%
80
....
75 /
70 y
\ Femmes
65
60
HommesX
55
50
45
D'une manière générale, les filles parlent
18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29
davantage avec leurs parents que les garçons et
Âge
la part d'entre elles qui ont des sujets de discus
* Parler de plus de trois sujets avec ses parents.
sionsnombreux s'amenuise moins rapidement
Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
Tableau 1
L'appartenance à un couple éloigne davantage des parents que l'âge
En%
Jeunes parlant de plus de trois sujets avec au moins l'un des parents
Le Jeune vit :
-seul(1)
- avec plusieurs personnes
- en couple sans enfant
- en couple avec enfant(s)
Le jeune est :
- enfant d'une famille monoparentale
- enfant d'un couple
Ensemble
18-20 ans
21-23 ans
24-26 ans
27-29 ans
82,6
68,4
66,7
n.s.
75,4
81,0
60,7
46,6
74,9
n.s.
62,7
47,7
67
n.s.
53,8
49,5
65,5
66,7
63,9
66,9
56,6
70,2
54,0
69,3
67,3
61,7
1 . Ou seul avec enfant(s). Les effectifs correspondant à cette situation sont trop faibles pour pouvoir être ventilés dans ce tableau.
Lecture : 82,6 % des jeunes de 18-20 ans vivant seuls parlent de plus de trois sujets avec au moins l'un des parents.
Champ : jeunes de 18 à 29 ans ayant au moins un parent vivant et connu.
Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
72,4
68,7.,
165
'i.•■
Tableau 2 .
Étendue des discussions avec les parents.
Régressions logistiques
Probabilité de référence
Ensemble
64,2
Écarts à la référence
En%
Hommes
58,2
Femmes
72,4
Sexe
Hommes
-8,1
Femmes
7,3
Age en 1992
18-20 ans i 2,5*
21-23 ans
1,7**
2,3
2,2"
24-26 ans
27-29 ans 5
-2,3
Age du père «
Moins de 48 ans
48-53 ans ■
3,1
4,6
54-60 ans -~
4,7*
Plus de 60 ans
Ne sait pas
-7,4
-8,1
-6,3
Nombre frères et sœurs y.c. l'enquêté(e)
Un'
2,7*
3,4*
Deux Trois •
Quatre ou plus
-7,2
-9,6
-4,8
Ne sait pas
Type de ménage de l'enquêté(e)
3,6**
Vit seul(e) *
4,2
Vit seul(e) avec enfant 1 f
Vit à plusieurs personnes
- 5,6**
Vit en couple sans enfant *
-5,2
-7,0
Vit en couple avec enfant r
-9,7
-10,5
-10,6
Est enfant de famille monoparentale
7,0
9,3
3,7*
Est enfant d'un couple 4,6
Niveau de formation de l'enquêté(e)
Inférieur ou égal au BEPC
-9,7
-9,5
-10,1
-3,7*
CAP-BEP
-4,3
-5,3
Baccalauréat ou équivalent
5,0
6,2
4,5*
Supérieur au baccalauréat r
7,7
6,5
En cours d'études
5,8
Situation du père
2,1**
3,3**
Travaille .
Chômage <
3,2*
4,7*
Retraite
-7,7*
-5,3**
Autre inactif" -6,8
Ne sait pas ■
Situation de la mère
Travaille
3,3
4,8,
Chômage
4,6*
Retraite i
-2,9**
Inactive ou ne sait pas
-4,2
-4,9
1,3*
Problèmes dans l'enfance
2,1
Un parent a été chômeur
Parents divorcés
Origine sociale
Agriculteurs
-7,2
-7,2
-6,6
Artisans, commerçants
Cadres
10,0
9,3
10,0
3,7*
Professions intermédiaires
4,8
5,5
Employés
-5,0^
Ouvriers
-6,2
-3,7*
-5,9
-4,9**
Ne sait pas
Commune de résidence
Commune rurale
-2,8
-5,0 l
2,0**
Unité urbaine de moins de 20 000 habitants
Unité urbaine de 20 000 à 200 000 habitants
Unité urbaine de plus de 200 000 habitants
Agglomération parisienne
9185
4410
4775
Effectif pris en compte Tous les coefficients sont significatifs au seuil de 1 %, sauf ceux suivis de * (seuil de 5 %) ou de ** (seuil de 1 0 %). Les modalités de r
éférence
sont indiquées en italique.
Lecture : voir page suivante.
Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
166
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
avec l'âge que pour ces derniers (cf. graphi
que
I). Cette inclination reste très marquée tant
que les jeunes filles n'ont pas fondé leur pro
pre famille. Elle s'atténue fortement lorsqu'el
les
appartiennent à un couple, et plus encore
lorsqu'elles ont un enfant (cf. tableau 3). Les
filles vivant seules avec l'un de leurs parents
parlent également beaucoup plus avec celui-ci
que les garçons placés dans la même situation;
II est vrai que les trois quarts d'entre elles vi
vent avec leur mère, et que ces dernières entre
tiennent dans toutes les situations des relations
plus fréquentes avec une fille qu'avec un fils. .
de vivre en couple ces derniers ont une probabil
ité
équivalente à la moyenne de discuter de
nombreux sujets avec leur parents quelle que
soit leur situation résidentielle (en famille,
seul, ou vivant à plusieurs en dehors d'une fa
mil e).
Les filles au contraire ont plus de chan
cesd'avoir de nombreux sujets de discussion
tant qu'elles ne vivent pas en couple, notam
mentlorsqu'elles vivent avec leurs parents (ou
un seul d'entre eux) (cf. tableau 2).
L'intimité et la politique :
des domaines moins partagés
Les changements de résidence et de situations
familiales introduisent une rupture dans l'éten La prise de distance des enfants se manifeste
due
des discussions entre générations plus mar également par le fait que certains domaines de
quée chez les filles que chez les garçons. Avant leur vie se « privatisent »; échappant progressiTàbleau 3
Les filles ont davantage d'échanges avec leurs parents que les garçons
En%
Jeunes parlant de plus de trois sujets
avec au moins l'un des parents
Le jeune vit :
-seul
- à plusieurs personnes
- en couple sans enfant
- en couple avec enfant
- seul avec enfant
Hommes
Femmes
Ensemble
65,4
55,9
51,7
42,3
n.s.
80,6
79,4
65,9
51,3
57,4 :
73,3
69
59,5
48,0
57,4
Odd ratio (1)
2,2
3,0
1,8
1,4
n.s.
Le jeune est :
- enfant d'une famille monoparentale
- enfant d'un couple
80,4
68,1
58,2
2,9
61,3
76,3
68,1
2,0
63,1
Ensemble
56,8
68,9
1,68
1 . Rapport des chances femmes/hommes : (80,6 x (100-65,4) / 65,4 x (100 - 80,6)) = 2,2.
Lecture : 80,6 % des femmes seules (ménage d'une seule personne) parlent de plus de trois sujets avec au moins l'un des parents.
Champ : jeunes de 18 à 29 ans ayant au moins un parent vivant et connu.
Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
Lecture des tableaux 2, 5, 6 et 9 : la régression logistique permet de séparer l'effet de chaque variable discrète sur
une caractéristique, ici le fait de parler fréquemment (aborder plus de trois sujets) avec ses parents (tableau 2), de
parler de tel ou tel sujet avec l'un ou l'autre de ses parents (tableaux 5 et 6), de parler exclusivement avec le père
ou la mère (tableau 9). Les effets propres de chaque modalité sont mesurés en points d'écart à la probabilité de
référence qui correspond à l'individu « moyen » pris en compte dans le modèle (contrastes de type déviation). Dans
le cas de variables indépendantes dichotomiques, seule une modalité a été reportée dans le tableau, la modalité
inverse correspondant au même coefficient affecté du signe moins.
Une variable rendant compte du type d'activité du jeune a également été introduite dans le modèle. Elle est présen
tée
dans l'article suivant.
Les individus dont les deux parents sont décédés ou inconnus ont été exclus de l'analyse.
La probabilité de référence est calculée selon la formule : p = 1 /(1 + é"") où a est la constante du modèle Logit.
Les écarts à la référence sont obtenus en appliquant ; A pp, = 1 /[1 + e~(a + Po] - p où Pi est le coefficient associé à la
variable p dans sa modalité i.
N. B. : les écarts à la référence ne se cumulent pas directement. Pour calculer l'effet de plusieurs changements dans
la situation de référence, il convient d'ajouter les coefficients fiidans la formule ci-dessus. Par exemple, l'effet d'un
double changement ($i etyj) est donné par la formule : A pp,,ïy = 1 /[1 + e~(a + Py+ ry)] - p
Alors que l'individu « moyen » pris en compte dans la régression a 64,2 % de chances de parler de plus de 3 sujets
avec ses parents, les hommes n'en ont que 56, 1 % (64,2 - 8, 1).
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
167
■
vement au contrôle et à l'intervention des pa
rents (^bunis et Smollar, 1985). Dans l'enquête
Jeunes, nous observons les effets de ce « pro
cessus d'individualisation » dans sa phase te
rminale,
la . période qui suit la •' fin 7 de a
l' adolescence.' La hiérarchie entre les domaines
fréquemment abordés avec les parents, les étu- 1
des, le travail ou la recherche d? emploi en pre
mier lieu, les questions d'argent, les amis et les
discussions sur les livres, la musique, la télévi
sionou le cinéma ensuite, et ceux qui le sont
peu (la politique et la vie sentimentale) est alors établie (cf. tableau 4) et ne varie guère de 18 à
29 ans (cf. graphique II).
peut expliquer que les discussions au sujet de la
politique, sujet où parents et enfants partagent
pourtant le plus souvent les mêmes idées,
soient moins fréquentes de crainte de déclen
cher
des conflits dans un domaine où la passion
s'exprime plus facilement qu'ailleurs.
L'ordre des domaines selon la fréquence des
discussions n'est pas très éloigné chez les gar
çons et chez les filles, mais l'écart entre les su
jets fréquemment et .peu abordés est moins
marqué chez ces dernières car elles ont moins
de réticences que les garçons à parler avec leurs
parents de sujets intimes.
Maintenir une certaine réserve dans les rela Cette plus grande confiance des femmes se man
tions sur les sujets les plus intimes peut être un
ifeste
chez les plus jeunes d'entre elles. Elles
gage de bonne entente. La même préoccupation >i parlent par exemple alors très fréquemment de
Tableau 4
La vie sentimentale et la politique : des sujets moins fréquents
Amis
Vie sentimentale
Études
En%
Livres
Politique
Argent
Hommes
68,7
32,4
87,8
62,7
43,3
78,688,9 Femmes
52,6
71,5
42,1
Ensemble
73,8
42,9
88,4
67,3
42,7
Lecture : 68 % des hommes ont une conversation au sujet de leurs amis avec l'un au moins de leurs parents.
Champ : jeunes de 18 à 29 ans ayant au moins un parent vivant et connu.
Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
Graphique II
Les jeunes préfèrent parler de leurs études
En%
100
72,0
76,7
74,5
90
80
70
60
19
20'
21
22
23
24
25
26
27
28
Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
168
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
Tableau 5
Discussions au sujet de la vie sentimentale selon les sexe des enfants.
Régressions logistiques
Probabilité de référence
Avec au moins un parent
Hommes
Femmes
36,6
60,0
Écarts à la référence
Avec la mère seule
Hommes
Femmes
13,9
39,2
En%
Âge en 1992
18-20 ans
3,3*
5,6
21-23 ans
3,5
24-26 ans
27-29 ans
-5,2
-7,7
Age du père
3,6*
Moins de 48 ans
4,8
4,2
3,7*
48-53 ans
5,1
54-60 ans
-3,1
2,9"
Plus de 60 ans
Ne sait pas
-6,2
-5,1
-10,5
Nombre d'enfants y.c. l'enquêté(e) 3,6*
Un
6,1
5,8
Deux
-3,0**
Trois
Quatre ou plus
-5,3
-5,6
Ne sait pas
Type de ménage de l'enquêté(e)
6,6*
5,2*
7,6
Vit seul(e)
Vit seul(e) avec enfant
Vit à plusieurs personnes
Vit en couple sans enfant
Vit en couple avec enfant
-14,2
-7
-5,2
Est enfant de famille monoparentale
-5,6**
2,9**
Est enfant d'un couple
Niveau de formation de l'enquêté(e)
-3,9*
Inférieur ou égal au BEPC
-2,9**
CAP-BEP
Baccalauréat ou équivalent
6,1
4,3**
Supérieur au baccalauréat
En cours d'études
-7,5
Situation du père
Travaille
-3,2
-6,5
-6,1*
Chômage
Retraite
-2,4*
Autre inactif
Ne sait pas
13,5
Situation de la mère
Travaille
7,2*
Chômage
Retraite
Inactive ou ne sait pas
-3,7
-5,3
Problèmes dans l'enfance
2,2
2,7
1,9
2,8
Un parent a été chômeur
Parents divorcés
3,2
3,2
4,0
Origine sociale
-4,4**
Agriculteurs
-8,3
3,6**
-5,4
2,8**
3,6"
Artisans, commerçants
4,5*
-4,2*
Cadres
4,1*
4,2*
4,4
Professions intermédiaires
4,5
Employés
-3,5*
-3,3*
Ouvriers
Ne sait pas
Commune de résidence
Commune rurale
Unité urbaine de moins de 20 000 habitants
Unité urbaine de 20 000 à 200 000 habitants
Unité urbaine de plus de 200 000 habitants
4,5
6,4
-2,4*
3,4
-5,1**
-3,8*
Agglomération parisienne
Effectif pris en compte
4309
4 309
4 665
4 665
Tous les coefficients sont significatifs au seuil de 1 %, sauf ceux suivis de * (seuil de 5 %) ou de ** (seuil de 10 %). Les modalités de ré
férence
sont indiquées en italique.
Lecture : alors qu'un homme en « moyenne », a 36,6 % de chances d'aborder la vie sentimentale avec au moins l'un des parents, la
probabilité passe à 41, 4% si son père a moins de 48 ans (36,6 + 4,8) ; cf. lecture du tableau 2. l
Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
169
•>■
Lecture : alors que l'ind
ividu « moyen » pris en
compte dans la régres
siona 86,7% de chan
cesde parler d'études
ou d'emploi avec ses
parents, les hommes
n'en ont que 84,1 %
(86,7 - 2,6) ; cf. lecture
du tableau 2.
Source : enquête Jeu
nes 1992 (Insee).
170
Tableau 6
Étendue des discussions avec les parents selon les sujets (parle du sujet avec au moins
En%
l'un des parents). Régressions logistiques
Vie
Livres,
Études.emploi musique, TV sentimentale Politique
Argent
Amis
Probabilité de référence
86,7
68,7
47,8
41,4
74,1
74
Écarts à la référence
Sexe
Hommes
-5,9
-11,1
-3,8
-6,4
-2,6
2,2
5,4
11,4
3,5
5,5
Femmes
Age en 1992
18-20 ans
-9,3
1,7*
2,6
2,0*
21 -23 ans
3,3
1,7"
24-26 ans
4,3
27-29 ans
-5,4
-2,9
-3,9
7,2
-2,5
Âge du père
Moins de 48 ans
4,6
-3,0
1,7*
2,2*
2,7*
1,7"
48-53 ans
3,4
1,5"
54-60 ans
-2,8
2,2"
Plus de 60 ans
2,6
3,6
Ne sait pas
-5,8
-5,3;,
-8,1
-6,1
-6,8
Nombre d'enfants yx. l'enquêté(e)
Un
6,1
2,0** '
1,9*
2,9*
Deux
4
3,7
-2,1"
1,8"
Trois
-2,3*
Quatre ou plus
-3,2
-6,6
-5,5
-5,0
-5,4
Ne sait pas
5,1
"type de ménage de l'enquêté(e)
9,6
5,0
Vit seul(e)
Vit seul(e) avec enfant
-4,5
-6*
Vit à plusieurs personnes
6,8
Vit en couple sans enfant
-5,2
-4,4
-8,5
Vit en couple avec enfant
-4,1
-7,9
-9,3
-5,5
-10,5
-5,3
3,0*
Est enfant de famille monoparentale
8,7
9,7
4,0
1,9"
2,7"
2,3**
Est enfant d'un couple
6,6,.
5,0
Niveau de formation de l'enquêté(e)
-2,1"
Inférieur ou égal au BEPC
-13,6 *
-7,5
-7,8
-1,9"
-7,7
-2,0*
-4,6
CAP-BEP
-3,9
-7,7
3,3*
2,6"
Baccalauréat ou équivalent
4,7
5,0
5,9
3,0*
Supérieur au baccalauréat
4,7
6,1
13,1
4,2
5,1
■
En cours d'études
3,1
-3,5
-3,6
Situation du père
2,8*
1,9"
Travaille
2,3
Chômage
-5,3
2,9*
Retraite
5,8
-4,8*
-4,8"
-4,9*
Autre inactif
Ne sait pas
-3,6 ■
2,3
Situation de la mère
Travaille
2,3
5,9
2,9
3,6
Chômage
-7,8
3,6*
Retraite
-1,8"
Inactive ou ne sait pas
-4,1
-2,5*.
-3,1
1,1"
Problèmes dans l'enfance
2,6 J
1,3
1,3"
1,6*
Un parent a été chômeur
Parents divorcés
-2,0
2,8
-2,4
-2,0
Origine sociale
Agriculteurs
-6,7
-10,0
Artisans, commerçants
4,0
2,7"
10,7
12,5
5,4
Cadres
2"
4,1.
2,2"
Professions intermédiaires
4,1
5,2
4,5
Employés
Ouvriers
-3,7
-5,2
-3,6
-9,0
-2,7
Ne sait pas
-3,4
-5,3
Commune de résidence
Commune rurale
-3,7
-3,7
Unité urbaine de moins
1,9"
de 20 000 habitants
Unité urbaine de 20 000 à
1,9*
200 000 habitants
Unité urbaine de plus
1,8"
-1,6"
de 200 000 habitants
2,8
Agglomération parisienne
•2,8
Effectif pris en compte
8990
9185
8 974
8977
9185
9185
Tous les coefficients sont significatifs au seuil de 1 %, sauf ceux suivis de * (seuil de 5 %) ou de ** (seuil de 1 0 %). Les modalités de ré
férence
sont indiquées en italique.
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
leur vie sentimentale avec leurs parents tandis
que les garçons restent beaucoup plus réservés
à cet égard. De 18 à 21 ans, le pourcentage de
jeunes filles abordant ce sujet s'accroît
même, avant de décliner au-delà de 24 ans
(cf. graphique III). Le contrôle des autres
variables, confirme cet effet de l'âge pour le
sexe faible, tandis qu'il demeure sans effet
notoire sur le sexe fort (cf. tableau 5).
Des relations familiales plus féminines
que masculines
La mère est beaucoup plus souvent que le
père la confidente privilégiée des enfants
(cf. tableau 7).' Comme les filles ont égale
menttendance à parler plus avec leurs parents
que les garçons, les relations exclusivement
féminines sont beaucoup plus fréquentes que
les relations exclusivement masculines. 45 %
Le franchissement de certaines étapes familial des filles ont au moins un sujet de discussion
es
a également une influence sur la probabilit exclusif avec leur mère, contre seulement
é
d'entamer une discussion « sentimentale »
15 % des garçons avec leur père (cf. tableau
avec son père ou sa mère. La vie commune 8). La mère est une confidente privilégiée
avec les parents n'exerce pas d'effet signifi pour les enfants des deux sexes, mais beau
catif.En revanche, le fait de vivre seul repré coup plus fréquemment pour les filles. Quant
sente pour un jeune, toutes choses égales par- au père, s'il est relativement délaissé comme
ailleurs, un facteur favorable à la fréquence interlocuteur exclusif, il l'est beaucoup
des discussions dans ce domaine (cf. tableaux moins par les garçons que par les filles. Au
5 et 6). Les jeunes qui vivent seuls ne sont pas trement
dit, la structure des relations entre
pour autant privés de relations sociales : ils
générations présente deux caractéristiques
font au contraire preuve d'une sociabilité in selon que l'on se place du point de vue des en
tense qui se manifeste notamment par des sor fants ou de celui des parents. Lorsqu'ils choi
ties, la fréquentation des bals et des dancings,
sissent un interlocuteur parmi leurs parents,
activités où se présentent des occasions d'en les enfants se confient beaucoup plus volont
gager des relations amoureuses (Galland et iersà leur mère qu'à leur père ; les parents
Garrigues, 1989). Il n'est donc pas étonnant quant à eux attirent plus souvent les confiden
que les parents reçoivent, plus que dans d'au ces
d'un enfant du même sexe.
tressituations, des confidences à ce sujet.
Par un effet mécanique, les jeunes qui vivent
Les jeunes qui ont formé un couple ont au cont dans une famille monoparentale (dont le chef
raire moins d'opportunités pour parler de leur
de ménage est le plus souvent la mère) con
vie sentimentale avec leurs parents, mais c'est
naissent
une probabilité beaucoup plus éle
surtout la naissance d' un enfant qui introduit un > vée qucla* moyenne d'avoir des relations
recul sensible des discussions à ce sujet (cf. t
exclusives avec leur mère. Par contraste, les
ableaux
5 et 6).
jeunes vivant dans d'autres situations ont
moins de chances d'avoir ces rapports parti
culiers (cf. tableau 9).
Graphique III
La structure des relations croisées entre parents
La vie sentimentale : un sujet peu abordé
et enfants selon le sexe se retrouve dans tous les
par les hommes
milieux sociaux avec quelques nuances. Par
exemple, les enfants de cadres ou de profes
En%
sionsintermédiaires pratiquent un peu plus
65
que les autres milieux sociaux une double
60
spécialisation, discutant avec le père et la
55
mère de sujets différents ; les enfants d'ou
50
vriers et d'employés ont plus fréquemment
"■--. Femmes
que les autres des discussions exclusives avec
45
leur mère ; la différence entre garçons et
40
filles dans l'orientation sexuée des discus
35
sionsavec les parents est plus marquée chez
Hommes
les enfants d'indépendants que de salariés
30
(cf. tableau 2). Les enfants d'agriculteurs no
18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28.29
tamment
ont une probabilité nettement infé
Âge
rieure à la moyenne d'avoir des relations
exclusives avec leur mère (cf. tableau 9).
"Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
171
,•
>i'*
.■
Certains sujets de discussion - la vie sentiment
ale,
les amis - ne donnent presque jamais lieu à
des échanges avec le seul père. Dans neuf cassur dix les discussions exclusives que les en
fants ont avec l'un de leurs parents sur ces su
jets ont lieu avec la mère. Le caractère sexué
des relations est donc encore plus marqué
lorsque sont abordés ces sujets intimes : il est <■
très rare que les garçons parlent, par exemple,
de leur, vie sentimentale avec leur père en par
ticulier,
alors qu'un tiers des filles se confient <
exclusivement à leur mère sur ce plan (cf.
bleau 7). Les garçons, qui abordent très peu ce
sujet avec leurs parents, le font plus volontiers
avec leur mère, mais. ces discussions restent
alors deux fois moins fréquentes que les échan
ges
entretenus à cet égard par les filles avec leur
mère. *
D'autres travaux ont mis en évidence ce carac
tèrefortement sexué des relations intergénérationnelles (Younis et Smollar, 1985). Le père
exerce plus souvent une forme d'autorité qui
accentue le caractère unilatéral des relations
Tableau 7
La mère confidente privilégiée des enfants
En%
Hommes .
Père et
mère
Père
Mère
seulement seulement
Femmes
Aucun
Père et
mère
Père j.
Mère
seulement seulement
Études, travail, -.
recherche d'emploi ,
58,7
8,9
20,2
12,2
56,4
5,1.
27,4
Livres,
musique,
TV
5,0"
cinéma^
35,2 ^
41,3
18,4
41,8
5,r
26,9
*
Argent
44,2
6,8
23,2
25,8
44,7
5,7
28,7
18,2 '
Amis
49,4
3,2
29,1
45,1
2,8
33,0
Vie sentimentale
16,7
1,8
14,0
67,6
16,7
2,2
33,7
26,0'
56,7 '
Politique 26,8
10,9
5,6
9,2
6,9
Lecture : 20,2 % des garçons parlent de leurs études, travail ou recherche d'emploi avec leur mère exclusivement.
Champ '.jeunes de 18 à 29 ans ayant au moins un parent vivant.
Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
Aucun
11,1
26,3
20,9
19,1
47,4
57,9
Tableau 8
Le père est moins délaissé par les garçons que par les filles
Origine sociale et sexe
Le père et la mère
(1)
Le père
seulement
La mère
seulement
en%
Aucun des deux
Total (2)
Indépendants
Hommes .
8,5
14,5
22,6
54,4
100
8,6 *
7,8.«
45,3
Femmes <
38,3
100
Cadres et intermédiaires
11.2
27,2
100
Hommes
15,0
46,6
Femmes '
14,2
8,2
40,8
36,8
100
Employés et ouvriers
6,9
14,2
30,2
48,7
Hommes
100
8,0
6,5
47,9
37,6
Femmes
100
Ensemble "
Hommes
8,4
14,5
27,9
49,2
100
Femmes
9,9
7,2
45,4
37,5
100
1 . Un sujet avec le père, un autre avec la mère. -.
2. L'exclusion des jeunes vivant en famille monoparentale du champ ne modifie que faiblement les proportions (la proportion d'hom
meset de femmes entretenant au moins une discussion exclusive avec leur mère est un peu moins élevée : 25,5 % et 44,1 %).
Lecture : 14,5% des garçons dont le père exerce une profession indépendante ont au moins un sujet de discussion exclusif avec
ce dernier.
Champ : jeunes de 18 à 29 ans ayant leurs deux parents vivants et connus. Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
172
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
.",•'-■
Tableau 9
Relations exclusives avec un parent selon le sexe des enfants
Régressions logistiques
Probabilité de référence
En%
Hommes avec père Femmes avec père Hommes avec mère Femmes avec mère
16,1
19,7
47,7
63
Écarts à la référence
Age en 1992
18-20 ans
3,8
3,4
2.5*
5,8
21-23 ans
-3.6*
3,7
24-26 ans
-2.3*
-2,3
-3.3*
27-29 ans .
-7,3
Âge du père ou de la mère
Moins de 48 ans
•2,7
-4
48-53 ans
54-60 ans
4.0*
4,8*
Plus de 60 ans
6,6
Ne sait pas ■
-4,8
Nombre d'enfants y.c. l'enquêté(e)
Un.
Deux
3,3*
Trois <
3,7*-2,5*
Quatre ou plus
5,4**
Ne sait pas
Type de ménage de l'enquêté(e)
Vitseul(e)
Vit seul(e) avec enfant
-7,3
Vit à plusieurs personnes
Vit en couple sans enfant
-8,9-5,9
Vit en couple avec enfant
-9,6
Est enfant de famille monoparentale
22,3
20,6
Est enfant d'un couple
-9,0
-5,6
Niveau de formation de l'enquêté(e) .
■1,9**
-4,4
Inférieur ou égal au BEPC
-4,3
CAP-BEP
-6,0
Baccalauréat ou équivalent
4,1*
Supérieur au baccalauréat
En cours d'études
7,4
Situation
du
père
Travaille
-6,0"
- 14,7 .
Chômage
4,6*
-4,6*
-7,4
Retraite
Autre inactif Ne sait pas .
17,1
12,8
Situation de la mère
2,8*
Travaille
Chômage -4,5*
5,0**
Retraite .
3,3*
-3,6*
Inactive ou ne sait pas
5,2
1,3"
1,5"
Problèmes dans l'enfance
1,8
3,1
1,4**
Un parent a été chômeur
3,6
3,2
Parents divorcés
7,0
3,1
Origine sociale
-13,0 •
Agriculteurs
Artisans, commerçants
2,8**
Cadres
5,4
-6,1
3,0**
4,0*
1,3 'Professions intermédiaires
Employés 7,7.
-2,1*
Ouvriers
4,3
Ne sait pas ■•
Commune de résidence
2,9**
Commune rurale
Unité urbaine de moins de 20 000 habitants
Unité urbaine de 20 000 à
-2,6*
200 000 habitants «
2,0*
3,0*
Unité urbaine de plus de 200 000 habitants
5,1
-7,5'
Agglomération parisienne
-8,2
Effectif pris en compte
4 276.
4299
3936
4655
Tous les coefficients sont significatifs au seuil de 1 %, sauf ceux suivis de * (seuil de 5 %) ou de ** (seuil de 10 %). Les modalités de ré
férence
sont indiquées en italique.
Lecture : alors qu'un homme a, en « moyenne », 16,1 % de chances de ne parler qu'avec son père, cette probabilité passe à 19,9%
s'il a entre 18 et 20 ans (16, 1 + 3,8) ; cf. lecture du tableau 2.
Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
173
vouées davantage aux prescriptions des adultes
vis-à-vis des enfants qu'à des échanges d'égal à
égal. Les relations avec la mère sont plus inten
seset quoique souvent asymétriques elles auss
i;- elles sont -s de ^nature très différente des
relations paternelles, les enfants (et surtout les
filles) se confiant à leur mère, ou celle-ci leur
donnant des conseils sur des sujets personnels.
L'intervention paternelle est plus souvent limi
téeaux domaines concernant les performances
objectives de l'adolescent, celles qui indiquent
qu'il devient un membre productif de la société
adulte, alors que la mère prend en charge le
bien-être personnel et émotionnel des enfants.
Cette opposition, cohérente avec les résultats
de l'enquête Jeunes, n'est pas sans rappeler la
distinction proposée par Talcott Parsons (Bales
et Parsons, 1955) entre la fonction instrument
ale
du père et la fonction expressive de la mère.
À côté des interactions verbales et des relations
éducatives, les aides matérielles entre parents
montrent également l'importance des échanges
entre femmes - notamment dans le domaine des
services domestiques - et la prédominance du
réseau de parenté de la femme sur celui de
l'homme dans le circuit d'échanges (Déchaux,
1994).
la politique était étroitement associé au niveau
scolaire. Parler de politique ou de littérature
suppose une compétence, que celle-ci soit
objective ou subjectivement ressentie, dont
certaines familles disposent ou croient disposer
alors que d'autres pensent ne pas en être dotée.
Les discussions sur la politique ou les sujets
culturels sont effectivement plus sensibles à la
variation du niveau d'études des membres de la
famille que les discussions sur la vie sentiment
ale
(cf. graphique IV).
L'analyse « toutes choses égales par ailleurs »
(cf. tableau 2) confirme que le niveau de format
ion
est la variable qui joue le plus fortement et
le plus systématiquement, la fréquence des di
scussions
avec les parents décroissant régulière
ment
avec le niveau d'études. Mais ce déficit ne
semble pas résulter uniquement de la compét
encescolaire puisqu'on l'enregistre dans tous
les domaines, y compris ceux qui ne sont pas de
nature culturelle (la vie sentimentale, les amis,
les questions d'argent) (cf. tableau 6), même si
les liaisons sont moins systématiques dans ce
cas. Le caractère assez général, quel que soit le
sujet abordé, d'un plus faible niveau d'échan
ges
chez les jeunes ayant le niveau de formation
le plus bas permet de penser qu'il ne résulte pas
uniquement de l'insuffisance - objective ou
Niveau de formation et origine sociale :
ressentie - du capital culturel : a pu jouer en ef
une forte influence sur les échanges
fet un niveau général de relations sociales plus
faible chez les jeunes qui ont interrompu le plus
verbaux entre parents et enfants
tôt des études, ou bien alors une moindre pro
La hiérarchie entre les domaines de discussion pension
ou une moindre capacité de leur part à
n'obéit pas qu'à un principe qui règle la fr engager des relations verbales avec les autres,
équence
des échanges en fonction inverse de même s'ils en sont proches. Parler beaucoup ne
l'intimité du domaine abordé. Si ce principe
suppose pas seulement d'avoir des connaissan
peut expliquer la faiblesse des discussions au ces
ou des informations à transmettre, mais
sujet de la vie sentimentale, il n'est, à l'év également de savoir ou de vouloir les transmett
idence, pas pertinent pour les questions polit re
verbalement. Il n'est pas très surprenant de
iquesaussi peu discutées que cette dernière. Par constater que les jeunes qui ont poursuivi leurs
ailleurs, les discussions autour des loisirs ou de études le moins loin sont précisément ceux qui
la culture (livres, musique, cinéma, télévision),
utilisent le moins la communication verbale,
aussi souvent abordés que les discussions sur même avec leurs parents. De nombreux travaux
les amis ou les questions d'argent à 18 ans, le de sociologie de l'éducation ont montré la lia
sont moins à partir de 25 ans (cf. graphique II).
ison entre la maîtrise de la langue maternelle et
Là encore, cette prise de distance peut difficil la réussite scolaire (Berstein, 1975). Un usage
ement
s'expliquer par la volonté des enfants de « restreint » du langage par ceux qui réussissent
protéger leur sphère personnelle.
le moins bien à l'école peut être transposé à
l'univers familial. Dans un contexte de faible
Dans ces domaines, c'est moins le type d'inter niveau scolaire, la famille ne semble pas un
action entre les parents et leurs enfants qui cadre plus favorable aux échanges verbaux que
constitue le facteur explicatif le plus probable l'école bien que les relations y soient moins
de la faible fréquence des discussions, qu'une directement soumises à la norme linguistique.
caractéristique générale des familles - le n
Rappelons s toutefois que la fréquence des
iveau d'instruction - inégalement distribuée échanges verbaux ne préjuge pas de la « quali
té
» des relations au sein des familles et que
dans la population. Les politologues ont depuis
longtemps montré que le niveau d'intérêt pour d'autres formes de communication peuvent
174
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
■
être cultivées avec bonheur : parents et enfants
peuvent pratiquer ensemble des activités qui ne
supposent pas de conversations approfondies et
qui ne seront donc pas répertoriées comme tel
les : par exemple, promenades, activités de bri
colage,
de jardinage, chasse, pêche.
mentale, ce qui peut s'expliquer par l'étroitesse
du cercle des fréquentation amoureuses propre
aux ruraux, et les loisirs, du fait, peut-être, de
l'éloignement des centres urbains dispensat
eurs
de l'offre en la matière. Quant aux enfants
de cadres dont les parents adoptent plus sou
vent un style éducatif « contractualiste » fondé
Quel que soit le niveau de formation, la fr sur une autorité plus négociatrice, ils ont tou
équence
des relations peut également dépendre jours des discussions plus nombreuses avec
du contexte culturel dans lequel elles s'enga-< leurs parents que les autres jeunes, sauf dans le
gent. Les styles éducatifs, et les modes de rela domaine de la vie sentimentale. Par ailleurs,
tions entre parents et enfants qui leur sont liés,
dans ce groupe social le déficit de relations
dépendent en effet fortement du milieu social. avec le père est en partie comblé, notamment
Ainsi, les familles populaires adoptent plus chez les filles (cf. tableau 9).
souvent un « style statutaire » fondé sur la
contrainte et la discipline et qui se caractérise
par une forte distance entre parents et enfants Un père âgé, une famille
(Kellerhals et al, 1992) Ce contexte éducatif de deux enfants :
est sans doute peu favorable à des discussions des facteurs favorables aux discussions
nombreuses au sein de la famille. De fait, à n
iveau d'études contrôlé, les enfants dïouvriers
L'influence d'autres facteurs sur le niveau des
discutent moins souvent avec leurs parents que discussions familiales s'explique aisément : il
les enfants d'autres milieux sociaux. Ce défaut se confirme que l'effet d'éloignement intergéd'échange concerne tous les domaines abordés,- nérationnel associé à l'avancée en âge des en
en dehors des questions d'argent (cf. tableau 6). fants
ne survient qu'assez tardivement.
Celui-ci peut également s'expliquer, sans faire Lorsqu'on contrôle la situation sociale et famil
d'hypothèses sur les styles éducatifs, par une iale des jeunes, la probabilité de parler d'un
moindre propension à engager des échanges grand nombre de sujets avec les parents ne dé
verbaux dans ces milieux sociaux. Les enfants croît fortement qu'après 26 ans (cf. tableau 2).
d'agriculteurs ont en moyenne aussi peu de su Ce déclin se manifeste sur l'ensemble des su
jets de discussions avec leurs parents que les jets sauf sur les discussions politiques qui sont
enfants d'ouvriers. Cette carence se manifeste d'autant plus probables que le jeune est âgé
dans deux domaines bien précis : la vie
(cf. tableau 6). Un autre effet de l'âge est plus
Graphique IV
Les échanges augmentent avec le niveau culturel familial
En%
100
Livres
Politique
Vie sentimentale
80
60
40
20
Aucun
Un
Deux
Trois
Nombre de membres de la famille ayant fait des études supérieures
ou encore en cours d'études
Source : enquête Jeunes 1992 (Insee).
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.,■
inattendu : avoir un père ou une mère âgés (plus
de 60 ans) contribue à accroître plutôt les dis
cussions
(dans le domaine des études, du travail
et dans celui des loisirs et de la culture), notam
mententre les hommes et leurs parents. Des pa
rents âgés pourraient renoncer plus que lesautres à transmettre leur système de valeurs à
leurs enfants (Percheron, 1981). Cela pourrait'
expliquer que ces derniers soient moins réti
cents à parler avec eux, les contraintes éducati
ves
étant moins fortes et les occasions de.
conflit moins fréquentes qu'avec des parents
plus jeunes. Toutefois, cette hypothèse ne cadre
pas toujours avec les données (cf. tableau 6). Les
enfants ont, par exemple, plus de chances de par
ler de leur vie sentimentale avec des parents jeu
nes qu'avec des parents âgés. Il s'agit pourtant
d'un domaine où le contrôle parental peut notok
rement s'exercer. Il est donc possible également
que la restriction des relations avec des parents
plus jeunes provienne des parents eux-mêmes et
non des enfants. Les parents les plus jeunes ont
peut-être moins de choses à transmettre à leurs
enfants dans les domaines où l'expérience accu-,
mulée compte le plus (l'emploi, la culture). Ils
hésiteraient moins à le faire dans le cas de la vie
sentimentale, sujet pour lequel la distance intergénérationnelle peut en revanche constituer un
obstacle aux échanges.
général des échanges mais contribue, en situa
tionde chômage ou de retraite, à restreindre
fortement les relations exclusives que les en
fants, et surtout les garçons, peuvent entretenir
avec leur mère. Une première explication serait
que la plus grande disponibilité du père entraî
nerait un rééquilibrage des relations en sa fa
veur ou bien des discussions plus fréquentes
avec les deux parents à la fois. Si l'on compare
la structure des échanges par sujets selon que le
père travaille ou qu'il est chômeur ou inactif,
cette interprétation n'est pas confirmée. Dans
presque tous les cas, la situation de chômage ou
de retraite du père est associée à la fois à la
baisse des relations avec la mère seule, à la
baisse des relations avec les deux parents et à la
croissance du pourcentage déjeunes qui ne dis
cutent avec aucun de leurs parents. Le seul sujet
pour lequel on enregistre un taux plus élevé de
discussion avec le père seul lorsqu'il est au chô
mage ou retraité concerne les discussions poli
tiques (seulement avec les garçons). Dans
certains cas, le tarissement des échanges avec
les parents est même très marqué : seule
ment 8 % des filles n'ont aucune discus
sionavec leurs parents au sujet de leurs
études ou de leur travail lorsque leur père a
un emploi ; elles sont 18 % dans ce cas lorsqu'il
est retraité ou chômeur. .
Par un effet en partie mécanique, le fait d'ap->
partenir à une famille » nombreuse restreint
l'étendue des discussions que chaque enfant
entretient avec les parents. Le capital de rela
tions doit se diviser en parts plus nombreuses et
n'augmente apparemment pas proportionnelle
ment
au nombre d'enfants. Ce ne sont pourtant
pas les enfants uniques qui bénéficient du ni
veau le plus élevé d'échanges avec les parents,
mais ceux qui appartiennent à une famille de
deux enfants, soit que les relations fraternelles
favorisent jusqu'à un certain point les relations
intergénérationnelles, soit que le fait de limiter
sa descendance à un individu dénote la volonté
de maintenir une certaine réserve à son égard.
Dans un seul domaine, la vie sentimentale, les
enfants uniques se confient plus volontiers à
leurs parents que ceux qui ont une fratrie. C'est
le cas notamment des fils uniques avec leur
mère (cf. tableau 5), proverbial attachement au
parent du sexe opposé.
L'explication principale de la baisse des échan
ges
particuliers avec la mère ne se trouve donc
pas dans une redistribution permise par la plus
grande disponibilité du père. L'ensemble des
échanges intergénérationnels se réduit, pro
bablement
parce que l'attention de la mère est
accaparée par le père présent au foyer, peut-être
soumis à des conditions psychologiques diffici
les,
et ne peut plus s'orienter aussi exclusive
ment
vers ses enfants. Les discussions que
ceux-ci entretiennent avec leurs deux parents à
la fois se trouvent elles-mêmes affectées par ce
resserrement des liens entre les parents.
Un père retraité ou chômeur :
moins de discussions avec la mère
La position du père à l'égard de l'activité
exerce relativement peu d'effets sur le niveau
176
Avoirune mère inactive restreint le niveau gé
néral des échanges avec les parents (cf. tableau
2) et les réoriente vers le père (cf. tableau 9).
Logiquement, les discussions qui sont liées à
une activité ou un univers extérieur au cercle
familial (études, emploi, chômage, politique,
argent, amis) sont plus probables lorsque la
mère est active. Mais, avoir une mère inactive
n'augmente pas les chances, au contraire,
d'avoir des discussions au sujet de thèmes plus
intimes ou plus liés à l'univers domestique et
qui sont généralement plus souvent abordés
avec les mères qu'avec les pères (vie sentiment
ale,
discussions sur les livres ou la télévision).
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 304-305, 1997 - 4/5
L'inactivité de la mère limite l'ensemble des
discussions, même et surtout sur les thèmes
spécifiquement féminins (cf. tableau 6).
Pas d'affaiblissement des discussions
dû aux difficultés familiales
Le fait que le jeune ait des parents divorcés
n'affecte pas le niveau général des échanges
intergénérationnels et ne semble pas, en tous
cas, contribuer à les restreindre (cf. tableau 2).
Mais, ce maintien du niveau global s'accompa
gne
d'un assez profond bouleversement de la
hiérarchie des thèmes abordés : les discussions
au sujet des loisirs ou de la culture, de la polit
iqueet des amis sont moins probables, tandis
que les discussions au sujet de la vie sentiment
ale
des enfants ont plus de chances de se pro
duire avec des parents divorcés, comme si une
sensibilité particulière à ce sujet, due au con
texte familial, favorisait les échanges (cf. ta
bleau
6). Par ailleurs, les relations exclusives
avec la mère sont, toutes choses égales par
ailleurs, beaucoup plus probables dans une
famille dont les parents sont séparés, ce qui
s'explique simplement par la corésidence beau
coup plus fréquente avec la mère seule (36 %
des garçons et 25 % des filles ayant des parents
divorcés sont dans ce cas, contre respective
ment
6 % et 3 % qui vivent avec le père seul).
Lorsque la famille a rencontré d'autres types de
difficultés - soit que le père ait connu le chô
mage, soit que l'enfant ait connu des problèmes
personnels importants (sentimentaux, finan
ciers, judiciaires ou autres) - les discussions
entre parents et enfants sont, toutes choses éga
lespar ailleurs, plus fréquentes, notamment à
propos des sujets ayant trait à ces difficultés
(vie sentimentale, question d'argent). Mais ce
sont surtout les enfants de sexe masculin qui
engagent ce type de relations plus intenses.
Comme l'ont montré d'autres travaux (Herpin,
1990), loin de se déliter sous l'effet des diff
icultés matérielles ou personnelles, les liens
familiaux sont plutôt revitalisés par les
épreuves que traversent les membres du
groupe familial.
□
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