Phanoclès
De Phanocles, nous ne savons rien1, si ce n’est ce que livre l’analyse de ses œuvres, dont
quelques données importantes peuvent être dégagées. Il est généralement rattaché à la première
moitié du IIIe siècle av. n. è. et se trouve donc placé aux côtés de Philitas, d’Hermésianax et
d’Alexandre d’Étolie2. Son style, de tendance archaïsante, riche d’homérismes et devant
beaucoup à la langue épique3, est le critère principal de datation. De nombreux points de contact
ont été observés entre les fragments élégiaques de Phanoclès et les poèmes d’Apollonios de
Rhodes4. Ces similitudes sont en général interprétées comme une reprise de Phanoclès par
Apollonios de Rhodes5.
« Les Amours ou les beaux gosses6 »
Fr. 1 Pow.7 [Stob. 4,20,47]
‘H wJ" Oijavgroio pavi>" Qrhi?kio" ∆Orfeu;"
ejk qumou' Kavlai>n stevrxe Borhi>avdhn,
pollavki de; skieroi'sin ejn a[lsesin e{zet∆ ajeivdwn
o}n povθon, oujd∆ h\n oiJ θumo;" ejn hJsucivh/,
ajll∆ aijeiv min a[grupnoi uJpo; yuch/' meledw'nai
e[trucon, θalero;n derkomevnou Kavlai>n.
To;n me;n Bistonivde" kakomhvcanoi ajmficuθei'sai
e[ktanon, eujhvkh favsgana θhxavmenai,
ou{neka prw'ton dei'xen ejni; Qrh/vkessin e[rwta"
1
N. Hopkinson, 1988, p. 178 : « Of Phanocles we know nothing ».
Voir e.g. A. Cameron, 1995, p. 381 ; E. Magnelli, 2000, p. 113-114 ; A. Villarrubia, 2002, p. 100.
3
L’étude la plus complète de la Sprachgebrauch du poète a été conduite par K. Alexander, 1988.
4
Cf. M. Marcovich, 1979, p. 360-361.
5
Cf. en particulier la remarque d’E. Magnelli, 2000, p. 114 n. 6.
6
Sur ce titre, que rapporte Clément d’Alexandrie, Stromates VI 2, 23, 6-7, cf. L. Alfonsi, 1953, p. 379. La deuxième
partie, « ou les beaux gosses », pourrait n’être qu’une explication ajoutée plus tardivement, peut-être par Clément
d’Alexandrie. Phanoclès inverse le thème du Catalogue hésiodique qui constitue son modèle (H. Asquith, 2005, p.
270).
7
Ce fragment forme une unité au sein d’un plus long catalogue des amours masculines des héros grecs. Il présente
une structure en chiasme (6/8/6/8) :
- v. 1-6 : l’amour d’Orphée pour Kalais.
- v. 7-14, qui s’ouvrent avec to;n me;n : le meurtre d’Orphée par les femmes thraces.
- v. 15-21, qui s’ouvrent par ta;" d∆ : l’arrivée de la tête et de la lyre d’Orphée à Lesbos et la pieuse attitude des
habitants.
- v. 22-30 : deux aitia.
Le poème s’ouvre et se clôt avec le nom d’Orphée, selon le principe de la composition circulaire (Cf. J. Stern, 1977,
p. 135-143 et M. Marcovich, 1979, p. 360-366).
2
a[rrena", oujde; povθou" h/[nese θhlutevrwn.
Tou' d∆ ajpo; me;n kefalh;n calkw/' tavmon, aujtivka d∆ uJph'n.
eij" a{la Qrhi>kivhn rJi'yan oJmou' cevlui>
h{lw/ kartuvnasai, i{n∆ ejmforevointo θalavssh/
a[mfw a{ma, glaukoi'" teggovmenai rJoθivoi".
Ta;" d∆ iJerh/' Levsbw/ polih; ejpevkelse θavlassa:
hjch; d∆ w}" ligurh'" povnton ejpevsce luvrh",
nhvsou" t∆ aijgialouv" θ∆ aJlimureva", e[nθa livgeian
ajnevre" ∆Orfeivhn ejktevrisan kefalhvn,
ejn de; cevlun tuvmbw/ ligurh;n θevsan, h} kai; ajnauvdou"
pevtra" kai; Fovrkou stugno;n e[peiθen u{dwr.
∆Ek keivnou molpaiv te kai; iJmerth; kiθaristu;"
nh'son e[cei, pasevwn d∆ ejsti;n ajoidotavth.
Qrh/'ke" d∆ wJ" ejdavhsan ajrhvi>oi e[rga gunaikw'n
a[gria, kai; pavnta" deino;n ejsh'lθen a[co",
a}" ajlovcou" e[stizon, i{n∆ ejn croi÷ shvmat∆ e[cousai
kuavnea stugerou' mh; lelavθointo povnou:
poina;" d∆ ∆Orfh'i> ktamevnw/ stivzousi gunai'ka"
eijsevti nu'n keivnh" ei{neken ajmplakivh".
Ou comme8 le fils d’Oiagros, le thrace9 Orphée10, chérit en son cœur Calais, le fils de Borée11, et
souvent s’asseyait dans les bois ombreux et chantait12 son aimé13 ; son cœur n’était pas en paix14,
8
‘H wJ" est une modification de la formule hésiodique è oiè. Pour les implications de cette modification et les
adaptations hellénistiques du catalogue hésiodique, cf. H. Asquith, 2005, p. 270-276. Cette formule devait dépendre
d’un verbe introductif.
9
Comme il est fréquent dans la poésie hellénistique, Phanoclès emploie des quantités variables, il faut donc scander
Qrhi?kio" avec le premier iota long et Qrhi>kivhn (v. 12) avec le premier iota bref (K. Alexander, 1988, p. 17 n. 2). La
leçon Qrhi>kivou des manuscrits A, S et M est tout aussi acceptable. Cependant, dans l’incertitude où nous sommes de
la chronologie de Phanoclès, il paraît difficile d’évoquer en ce cas une imitatio cum variatione d’Apollonios de
Rhodes, Argonautiques IV 905.
10
Pour une introduction au traitement littéraire du mythe d’Orphée, Cf. C. Segal, 1989. La réception du fragment de
Phanoclès chez Damagetos, AP VII 9, et dans les Métamorphoses d’Ovide a été finement étudiée en dernier lieu par
T. Gärtner, 2008.
11
Kalais et son frère Zétès furent au nombre des Argonautes et sauvèrent Phinée des Harpies, avant d’être tués par
Héraclès. Le thème de l’amour d’Orphée pour Kalais n’est pas attesté antérieurement à Phanoclès (cf. J. Stern, 1977,
p. 135-143). Selon N. Hopkinson, 1988, p. 178, après J. Stern, 1977, p. 135-143, Phanoclès aurait trois motifs pour
attribuer cet amour à Orphée : Kalais appartenait à la tradition argonautique, il était thrace et son nom rappelait le
qualificatif de kalos, dont usaient les homosexuels. Trois autres références à cet amour homosexuel sont attestées
dans la littérature antique : Ovide, Métamorphoses X 79-85, Hygin, Astronomiques II 7, Philargyrius, ad Virgile,
Géorgiques IV 520. L’amour d’Orphée pour Kalais présente des similitudes avec celui d’Héraclès pour Hylas (deux
autres Argonautes), bien connu par Théocrite, Idylles XIII, Apollonios de Rhodes, Argonautiques et Properce I 20.
mais les veilles soucieuses15 toujours le dévoraient16 par l’entremise de son âme17, voyant18 le
florissant Kalais19. Les malveillantes Bistoniennes l’enveloppèrent et après avoir aiguisé leurs
épées aiguës le tuèrent, car pour la première fois20 il avait montré chez les Thraces les amours
masculines21 et n’éprouvait aucun attrait pour les femmes. Alors, avec le bronze elles lui
tranchèrent la tête. Aussitôt elle s’enfonça22, car elles la jetèrent dans la mer thrace23, après
l’avoir assurée à la lyre par un clou, afin qu’elles fussent emportées par la mer, toutes les deux
ensemble, mouillées par les flots bleu clair. La mer blanche les drossa24 sur l’île sacrée de
Lesbos, de sorte que le son de la lyre mélodieuse25 emplit la mer26, les îles et les rivages battus
par les flots. C’est là que des hommes ensevelirent la tête mélodieuse d’Orphée27 et dans la tombe
ils déposèrent la lyre mélodieuse28 qui charma les pierres muettes29 et l’eau détestable du Port30.
C’est par lui31 que les chants et la lyre désirée possèdent l’île et que cette dernière est la plus
12
Ce vers comporte plusieurs topoi (K. Alexander, 1988, p. 26-29). En effet, Orphée en proie au trouble amoureux
s’assied pour chanter (cf. Od. XIX 518-523 pour l’origine de ce topos et les références données par J. Stern, 1977, p.
140 n. 18) et son chant est un remède à l’amour (cf. e.g. Théocrite XI1 et XVII). D’autre part, l’amoureux prise les
bois et autres endroits solitaires, cf. sur ces topoi G. Giangrande,1981.
13
Ou « son amour », les deux sens sont possibles.
14
Autre topos commun dans la poésie hellénistique.
15
Autre topos bien connu, cf. Théocrite X 10 ou d’Apollonios de Rhodes, Argonautiques III 751, IV 1060 (cf. G.
Giangrande, 1981, p. 482-482).
16
Le verbe truvc w exprime chez les poètes hellénistiques la consomption par les passions amoureuses, e.g. Théocrite
I 78 (K. Alexander, 1988, p. 36).
17
La psychè, le thumos et le kardia, sont conçus comme des entités à part entière, sièges des passions (sur cette
traduction cf. K. Alexander, 1988, p. 34).
18
Sur le motif du regard, cf. G. Giangrande, 1980, p. 283-285.
19
Ce passage a été imité par Virgile à l’incipit de la deuxième Bucolique.
20
Ces vers développent le motif du « prôtos euretès ». Mais, d’une manière typique de la poésie alexandrine, il évite
d’employer la forme plus attestée - l’adjectif prôtos-, qu’il remplace par l’adverbe prw'ton (K. Alexander, 1988, p.
45-46).
21
L’enjambement met en évidence l’adjectif. La recherche de la compagnie exclusive des hommes par Orphée est
connue par un autre aition rapporté par Pausanias IX 30,5.
22
Pour cette lecture et cette traduction, cf. K. Alexander, 1988, p. 55-58.
23
Phanoclès présente la plus ancienne attestation de ce thème relatif à la mort d’Orphée.
24
La forme ejpevkelse est un unicum homérique.
25
Pour l’association de l’eau avec la mort d’un héros et la création poétique, cf. C. Segal, 1975, p. 21 et sqq.
26
Le mot povnto" est toujours accompagné d’un adjectif épithète chez Homère, ce que les poètes hellénistiques, et en
particulier Apollonios de Rhodes et Théocrite, évitent souvent (K. Alexander, 1988, p. 71).
27
Sur le thème de la « tête chantante d’Orphée », cf. en particulier C. A. Faraone, 2004, p. 5-27.
28
La triple mention du son « mélodieux » de la lyre et de la tête d’Orphée trouve un écho chez Ovide,
Métamorphoses XI 50-55 et peut-être aussi chez Virgile, Géorgiques IV 523-527, cf. M. Marcovich, 1977, p. 364365..
29
Il s’agit probablement des pierres qui bordent le Léthé (K. Alexander, 1988, p. 79-81).
30
Selon G. Giangrande, 1987, p. 85-86, à la suite de K. O. Müller, Orchomenos und die Minyer, Breslau, 1844, p.
149 et de N. Bach, Philetae Coi Hermesianactis Colophonii atque Phanoclis Reliquiae, Halle, 1829, p. 198-199,
Fovrko" ne serait pas un des vieillards de la mer, mais le Port par excellence, l’Hadès. L’emploi de l’adjectif stugno;n
indique qu’il ne s’agit pas de la mer, mais bien de l’Au-delà.
31
∆Ek keivnou : cette formule introduit un aition.
harmonieuse de toutes. Mais lorsque les Thraces belliqueux eurent appris les sauvages 32
entreprises de leurs femmes, une terrible peine vint en eux et ils tatouèrent leurs femmes, afin
qu’ayant sur la peau une marque cyanée elles n’oublient pas leur acte cruel. De nos jours encore,
comme châtiment pour la mort d’Orphée, ils tatouent leurs femmes33 à cause de cette faute.
Fr. 2 Pow.
∆Alla; to; Moiravwn nh'm∆ a[lluton, oujdev † pw" † e[stin
ejkfugevein, oJpovsoi gh'n ejpiferbovmeqa.
La loi des Moires est indissoluble et il n’est point possible d’y échapper, pour nous tous qui
habitons la terre34.
Fr. 3 Pow. [Plutarque, Quaestiones convivales 4.5.3 = Mor. 671 B]
eijdw;" θei'on “Adwnin ojreifoivth" Diovnuso"
h{rpasen, hjgaθevhn Kuvpron ejpoicovmeno".
Sachant ce qu’il faisait35, Dionysos36 qui bat la montagne enleva37 le divin Adonis, après avoir
gagné l’agréable Chypre38.
Fr. 4 Pow.
Orose, Hist. I 12 :
nec mihi nunc enumerare opus est Tantali et Pelopis facta turpia, fabulas turpiores ; quorum
Tantalus, rex Frygiorum, Ganymedem Trois Dardaniorum regis filium cum flagitiosissime
32
L’adjectif a[gria qui est mis en valeur par l’enjambement est une surprise pour le lecteur, car d’ordinaire les erga
gunaikôn sont d’une toute autre nature (K. Alexander, 1988, p. 8).
33
Le tatouage des femmes thraces est un motif est bien attesté par l’iconographie, cf. K. Zimmermann, 1980. De tels
témoignages ne permettent cependant d’établir un lien entre cette pratique et la mort d’Orphée (cf. C. Santini, 1992,
p. 179-180). La version de Phanoclès trouve un écho chez Plutarque, de sera num. vind. 12, 557d.
34
Ce fragment exprime le topos de la mort inévitable.
35
Les manuscrits portent la leçon eijdw;" , qui a été souvent corrigée en ‘H wJ" (cf. en dernier lieu R. Hunter, 2005,
p. 263 n. 87), afin d’obtenir un rappel de la formule de transition, ce qui n’est pas nécessaire (K. Alexander, 1988, p.
107-108).
36
Dionysos se substitue à Aphrodite dans cette version du mythe. Plutarque cite Alexandre pour indiquer cette
variante, ce qui fait de ce fragment « un selecto testimonio para corroborar la importancia de la innovacion miticoliteraria en la epoca helenistica », R. J. Galle Cejudo, 2008, p. 647. Athénée, X 456 A-B, indique que Platon le
Comique, dans son Adonis, faisait d’Aphrodite et de Dionysos les amants du jeune homme.
37
Ce verbe possède une évidente connotation érotique héritée de la poésie archaïque, cf. G. Nagy, 1979.
38
La métonymie Cypris/Chypre, c’est à dire le nom du’une déesse employé pour le nom du lieu où son culte est très
important n’est pas rare. Elle se double ici d’un jeu verbal reposant sur l’ambigüité du sens du participe ejpoicovmeno"
et le syntagme peut être compris « après avoir assailli Cypris » (K. Alexander, 1998, p. 110-113).
rapuisset, maiore conserti certaminis foeditate detinuit, sicut Fanocles poeta confirmat, qui
maximum bellum excitatum ob hoc fuisse commemorat ; sive quia hunc ipsum Tantalum, utpote
adseculam deorum, videri vult raptum puerum ad libidinem Iovis familiari lenocinio praeparasse,
qui ipsum quoque filium Pelopem epulis eius non dubitaret impendere.
Eusèbe, Chroniques I 51, 17 Helm :
ob raptum Ganymedis troi patri ganymedis et Tantalo bellum exortum est, ut scribit Fanocles
poeta.
Syncelle, 305, 11 Bonn :
Ganumhvdhn oJ Tavntalo" aJrpavsa" uiJo;n tou' Trwo;" uJp∆ aujtou' katepolemei'to Trwov", wJ"
iJstorei' Divdumo" ejn iJstoriva/ xevnh/ kai; Fanoklh'".
Orose, Hist. I 12 :
Je n’ai pas besoin maintenant d’énumérer les actes honteux de Tantale et de Pélops et les récits
encore plus honteux les concernant. Des deux, Tantale, roi des Phrygiens, retint, alors qu’il
l’avait enlevé très ignominieusement, Ganimède, le fils de Tros, roi des Dardaniens, et ceci au
prix de la honte plus grande de l’engagement d’un conflit, comme l’établit le poète Phanoclès qui
rappelle que ce fut la cause d’une très grande guerre ; à moins qu’il ne veuille que Tantale luimême, en tant qu’acolyte des dieux, paraisse avoir préparé l’enfant enlevé pour le plaisir de
Jupiter, comme un proxénète domestique ; lui qui n’avait pas hésité à sacrifier son propre fils
Pélops pour le banquet de Jupiter.
Eusèbe, Chron. I 51, 17 Helm :
À cause du rapt de Ganimède un conflit éclata entre Tros, le père de Ganimède, et Tantale,
comme l’écrit le poète Phanoclès.
Syncelle 305, 11 Bonn :
Comme Tantale avait enlevé Ganimède, le fils de Tros, il fut combattu par Tros en personne,
comme le racontent Didyme dans son Histoire étrangère et Phanoclès.
Fr. 5 Pow.
Clément d’Alexandrie, Protreptique II 38, 2 :
Fanoklh'" de; ejn “Erwsin h] Kaloi'" ∆Agamevmnona to;n ÔEllhvnwn basileva ∆Arguvnnou new;n
∆Afrodivth" i{stasqai ejp∆ ∆Arguvnnw/ tw/' ejrwmevnw/.
Clément d’Alexandrie, Protreptique II 38, 2 :
Phanoclès dans les « Amours ou les beaux gosses » raconte qu’Agamemnon, le roi des Grecs,
érigea le temple d’Aphrodite Argynnis pour son amant Argynnos39.
Fr. 6 Pow.
Lactance Placide, à Ovide, Métamorphoses II 367 sqq. :
Cycnus, Stheneli filius, materno genere Phaethonti proximus, cum Liguriam incoleret, et in ripa
Eridani amnis cum vidisset corpus Phaethontis a sororibus eius ablui, pari calamitate est concussus.
Plus enim iusto deflendo propinquiinteritum, deorum voluntate in volucrem cygnum abiit, qui
perosus caelestes ignes, paludes ac flumina, quibus insenesceret, est secutus. Phanocles in
Cupidinibus auctor.
Alors que Cycnos, fils de Sthemelos, proche par la branche maternelle de Phaeton, habitait en
Ligurie, il vit sur les rives de l’Éridan le corps de Phaéton lavé par ses sœurs et fut affligé par un
désastre similaire. En effet, comme il pleurait la mort d’un proche, il se transforma en cygne par
la volonté des dieux, animal qui déteste les feux célestes et suit les marais et les fleuves dans
lesquels il vieillit. L’auteur est Phanoclès dans ses « Amours »40.
39
Ce fragment de Phanoclès est connu par le Protreptique de Clément d’Alexandrie. Plusieurs autres sources
tardives, qui présentent des informations supplémentaires et parfois divergentes, rapportent l’épisode qui met en
scène Agamemnon et Argynnos, descendant du roi de Béotie, Athamas : Properce III 7.21-24, Athénée XIII 603d,
Stéphane de Byzance, Ethnika s.v. Argynnos ( = p. 114,10 Meineke), Plutarque, Brut. Anim. 7 et peut-être le P.Oxy.
3723, 1-2 (cf. E. Magnelli, 1999, p. 87-90). Le passage de Clément d’Alexandrie comporte deux indications. Une
indication étiologique : le temple d’Aphrodite à Aulis fut édifié par Agamemnon en l’honneur d’Argynnos, ce
qu’indiquent également Athénée et Stéphane de Byzance. D’autre part, cet aition évoque des amours homosexuelles.
Les mythes étiologiques expliquant des épiclèses jouirent d’une grande faveur à l’époque hellénistique, cf. pour
Aphrodite Kallipygos, Archelaos SH 131 et Cercidas, fr. 14 Pow., pour Athéna Arakynthias, Rhianus, fr. 56 Pow.,
pour Artémis Apagchomenèn, Callimaque fr. 187 Pf. ; Cf. E. Calderon Dorda, 2003, p. 103 et R. J. Gallé Cejudo,
2006, p. 184 n. 2. Ce poème s’insère dans un moment mythique surtout connu chez les poètes épiques et tragiques
pour le sacrifice d’Iphigénie, que Properce, dans le passage cité ci-dessus et très discuté par les commentateurs, lie à
l’épisode d’Argynnos, cf. R. J. Galle Cejudo, 2006. C’est également pendant l’attente de la flotte grecque à Aulis que
se situe la querelle de Teuthis et d’Agamemnon, rapportée dans un cadre étiologique par Callimaque, Aitia fr. 110
M., E. Sistakou, 2008.
40
Phanoclès évoquait peut-être dans ses vers l’origine de melanoforei'n, caractéristique des habitants des bords du
Pô, selon Plutarque, de sera num. vind. 12, 557d, cf. G. Morelli, 1950, p. 2.
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