Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction (2011) 40, 593—611
ÉTAT DES CONNAISSANCES
Le syndrome d’hyperstimulation ovarienne :
physiopathologie, facteurs de risque, prévention
et prise en charge
Ovarian hyperstimulation syndrome: Pathophysiology, risk factors,
prevention, diagnosis and treatment
F. Lamazou a,∗,b,c, A. Legouez d, V. Letouzey e, M. Grynberg a,b,c,
X. Deffieux a,b,c, C. Trichot a,b,c, H. Fernandez b,c,f, R. Frydman a,b,c
a
Service de gynécologie-obstétrique et médecine de la reproduction, hôpital Antoine-Béclère, AP—HP, 157, rue de la
Porte-de-Trivaux, 92141 Clamart, France
b
Université Paris-Sud, 92140 Clamart, France
c
Inserm, U782, 92140 Clamart, France
d
Département d’anesthésie-réanimation, hôpital Antoine-Béclère, AP—HP, 92141 Clamart, France
e
Service de gynécologie-obstétrique, CHU Carémeau, place du Pr-Debré, 30006 Nîmes, France
f
Service de gynécologie-obstétrique, hôpital Kremlin-Bicêtre, AP—HP, 78, rue du Général-Leclerc, 94275 Le Kremlin-Bicêtre
cedex, France
Reçu le 21 février 2011 ; avis du comité de lecture 7 juin 2011 ; définitivement accepté le 14 juin 2011
Disponible sur Internet le 10 août 2011
MOTS CLÉS
FIV ;
SOHS ;
Complications ;
COH ;
Stimulation
ovarienne ;
Cabergoline ;
Human albumin ;
Prévention
∗
Résumé L’hyperstimulation ovarienne (OHSS) est une complication directe de la fécondation
in vitro avec une morbidité lourde et, dans quelques cas, même une mortalité. La physiologie
reste mal définie mais semble s’orienter vers une activation en cascade de la coagulation par
le biais du VEGF. Il existe des facteurs de risque propres aux patientes ou à la stimulation,
mais cette complication peut survenir en l’absence des ces facteurs. On peut en décrire deux
types : l’OHSS précoce liée au déclenchement de l’ovulation et la tardive liée à la grossesse. La
prise en charge est mal définie et doit s’adapter à la sévérité de l’OHSS en prenant en charge
les complications surajoutées. La complication majeure est thrombotique avec la particularité
d’atteindre à la fois les territoires veineux et artériels, pouvant induire des complications graves
comme des accidents vasculaires cérébraux ou des infarctus du myocarde. La prévention de ce
risque thrombotique reste donc la prioirité de la prise en charge de l’OHSS.
© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Auteur correspondant.
Adresse e-mail :
[email protected] (F. Lamazou).
0368-2315/$ – see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.jgyn.2011.06.008
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KEYWORDS
IVF;
OHSS;
Complications;
COH;
Ovarian stimulation;
Cabergoline;
Human albumin;
Prevention
F. Lamazou et al.
Summary The ovarian hyperstimulation syndrome is a major complication of ovulation induction for in vitro fertilization, with severe morbidity and possible mortality. Whereas its
pathophysiology remains ill-established, the VEGF may play a key role as well as coagulation
disturbances. Risk factors for severe OHSS may be related to patients characteristics or to the
management of the ovarian stimulation. Two types of OHSS are usually distinguished: the early
OHSS, immediately following the ovulation triggering and a later and more severe one, occurring in case of pregnancy. As no etiologic treatment is available, the therapeutic management
of OHSS should focus on its related-complications. Thrombotic complications that can occur in
venous or arterial vessels represent the major risk of OHSS, possibly conducting to myocardial
infarction and cerebrovascular accidents. Once the OHSS is diagnosed, prevention of thrombotic
accidents remains the major issue.
© 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction
L’incidence de l’hyperstimulation ovarienne est estimée
selon les études entre 3 et 6 % avec une forme sévère dans
0,1 à 3 % des cas [1—3]. Chez les patientes ayant des facteurs
de risque d’hyperstimulation, ce taux peut atteindre les 20 %
[4]. Cette complication iatrogène de la procréation médicalement assistée (PMA) se rencontre principalement au
cours des prises en charge en fécondation in vitro (FIV), surtout depuis la généralisation du co-traitement par analogues
de la GnRH. Des syndromes d’hyperstimulation ovarienne
(OHSS) ont déjà été rapportés au cours de grossesses spontanées sans anomalie associée [5,6], ou dans un contexte de
môle hydatiforme [7—9], d’hypothyroïdie [10—16], de mutation du récepteur de la follicle stimulating hormone (FSH)
[17,18] ou d’adénome hypophysaire [19—21].
Cette complication peut exposer la patiente à des
complications sévères, en particulier thromboemboliques
pouvant engager le pronostic vital, avec un taux de mortalité estimé entre un sur 45 000 et un sur 500 000 [1].
Dans le contexte d’augmentation constante de la pratique
de la PMA, cette complication rare pourrait devenir fréquente. Cette revue de la litératture détaille l’état actuel
des connaissances sur la physiopathologie, les facteurs de
risque, la classification, la prévention et le traitement des
OHSS.
Physiopathologie
L’hyperstimulation ovarienne associe un élargissement
important des ovaires et un ou plusieurs épanchements des
séreuses. Ce passage vers un troisième secteur s’associe
donc à une hémoconcentration, une oligurie et des phénomènes thromboemboliques. Les hormones et molécules
impliquées dans cette pathologie sont les suivants.
L’estradiol
Un taux d’estradiol élévé est considéré comme un facteur
de risque important d’OHSS. Aussi, l’estradiol a été initialement considéré comme un acteur de l’OHSS voire son
facteur déclenchant [22,23]. Mais, plusieurs publications ont
montré qu’un estradiol élevé n’était pas une condition indispensable à la survenue d’un OHSS. Pellicer et al. [24] ont
rapporté un OHSS après une FIV chez une patiente porteuse
d’un déficit en activité 17, 20 desmolase, et qui par conséquent, ne pouvait avoir d’élévation du taux d’estradiol. Des
OHSS ont été rapportés au cours de grossesses avec un taux
d’estradiol normal, voire bas comme dans le cas des grossesses spontanées. Par ailleurs, un estradiol élevé isolé ne
suffit pas pour déclencher un OHSS puisqu’il faut qu’il soit
obligatoirement associé à un taux élevé d’human chorionic
gonadotropin (hCG) [25]. De plus, l’estradiol n’a pas d’effet
vasoactif direct [26]. Donc, un estradiol élevé ou une élévation rapide du taux d’estradiol sont des facteurs de risque
d’OHSS mais non le facteur déclenchant [27].
La luteinizing hormone (LH) ou l’hCG
L’hCG possèdant la même chaîne bêta que la LH, elle se
fixe donc sur les mêmes récepteurs mais avec une affinité six à sept fois plus élevée et une demi-vie beaucoup
plus longue [28]. Ces hormones et, en particulier, l’hCG
sont donc considérées comme des facteurs déclenchants de
l’OHSS, expliquant les OHSS sur môles hydatiformes [7—9].
Toutefois, comme l’ont rapporté Nastri et al. [27], l’hCG
seule ne peut suffire à déclencher un OHSS. Dans l’étude de
Michaelson-Cohen et al. [29] portant sur 27 grossesses ayant
des taux d’hCG supérieurs à 150 000, aucune ne s’est accompagné d’un OHSS. De plus, l’hCG n’a pas de propopriétés
vasoactives directes [30,31]. L’hCG et la LH auraient donc
un rôle dans l’OHSS, mais ne peuvent être le seul facteur
déclenchant de cette cascade d’évenements.
Le vascular endothelial growth factor (VEGF)
Le VEGF augmente la perméabilité vasculaire et favorise,
dans le cadre de l’OHSS, une réduction du gradient osmotique à l’origine du passage extravasculaire [32]. Or ce
phénomène d’accentuation de la perméabilité vasculaire est
reconnu comme le mécanisme essentiel de l’OHSS. Chez
l’homme, cinq isoformes du VEGF ont été identifiés. Le
VEGF A, en particulier, est produit par l’ovaire [30]. Les deux
récepteurs VEGFR-1 et VEGFR-2, sont présents au niveau des
endothéliums mais aussi au niveau des follicules ovariens.
Wang et al. [33] ont montré que la perméabilité vasculaire, le taux de VEGF et de ces récepteurs sont augmentés
dès la phase de stimulation ovarienne par les gonadotrophines exogènes. Et, 48 heures après l’injection d’hCG, on
observe un pic d’expression de VEGF et VEGFR [34], en
Le syndrome d’hyperstimulation ovarienne
particulier, au niveau des vaisseaux ovariens. L’hCG exogène
(injection déclenchante) ou endogène (grossesse) stimule
la production de VEGF par les cellules de la granulosa
lutéinisée. C’est sa durée de vie supraphysiologique par
rapport à la LH qui en fait un acteur essentiel de cette cascade d’activation. Ce phénomène a été confirmé in vitro,
et, ce pic d’expression du VEGF s’est accompagné d’une
accentuation de la perméabilité vasculaire en rapport avec
la diminution de l’expression de la claudine cinq par les
cellules endothéliales [35]. Ces données font du VEGF le
principal promoteur de l’augmentation de la perméabilité
vasculaire dans le cadre de l’OHSS. Mais les mécanismes
de régulation de l’expression restent à éclaircir : le VEGF,
même s’il semble indispensable dans l’activation du processus ne peut être encore une fois le seul déclencheur de cette
cascade d’évenements.
Les interleukines
Les interleukines IL-2, IL-6, IL-8, IL-10 et IL-18 sont retrouvées dans le liquide folliculaire et dans le liquide d’ascite
de l’OHSS. Ces molécules sont impliquées dans le processus inflammatoire au cours de la maturation folliculaire,
de l’ovulation, de la lutéinisation et de l’implantation
embryonnaire [28]. Or ces molécules, en particulier l’IL-6,
sont observées à des taux élevés dans le cadre de l’OHSS
et, joueraient un rôle dans la cascade des évenements
nécessaires à l’apparition de l’OHSS, en particulier sur la
néovascularisation ovarienne, l’inflammation et l’inhibition
de la production d’albumine par le foie [36]. À l’inverse, IL10 augmentant après le début de l’OHSS aurait une action
anti-inflammatoire et donc correctrice de l’OHSS [37].
Le système rénine-angiotensine
Une corrélation directe entre l’activité rénine plasmatique
et la sévérité de l’OHSS a été rapportée par Navot et al.
[38]. Or, les ovaires ont la capacité de secréter la prorénine [39] et la rénine [40]. Les dosages d’angiotensine II sont
également élevés dans l’ascite et le liquide folliculaire des
patientes en OHSS [40]. Toutefois, ce mécanisme ne semble
pas jouer un rôle promoteur sur l’OHSS mais ne serait que
la conséquence de l’hypovolémie secondaire à la perméabilité vasculaire. Cette hypovolémie serait à l’origine de
l’activation du système rénine angiotensine [41].
En conclusion, la physiopathologie de l’OHSS reste incertaine. Toutefois, il semble se dégager de la littérature que
le VEGF et son récepteur VEGFR en seraient les principaux
acteurs sans pour autant que son activation et sa régulation
soient clairement établis. L’hCG semble jouer un rôle indispensable dans cette cascade d’évenements mais ne peut en
être le seul initiateur. Les interleukines, en particulier IL6, devraient également avoir un rôle dans cette cascade. Il
s’agirait donc d’un ensemble de médiateurs devant réunir
plusieurs conditions pour initier l’OHSS, ce qui expliquerait
que toutes les stimulations ovariennes, et que toutes les
patientes enceintes ne fassent pas d’OHSS malgrè des taux
élevés d’hCG.
595
Facteurs de risque
Facteurs de risque identifiables avant la
stimulation ovarienne
Âge maternel
Il a été montré sur plusieurs séries que les patientes faisant des OHSS étaient plus jeunes que celles n’en faisant
pas [42—46], avec un âge moyen autour de 27 ans. Âge qui
correspond d’ailleurs au meilleur taux de réponse à la stimulation et au meilleur taux de grossesse [47].
Indice de masse corporel (IMC)
D’après l’unique étude sur ce sujet [43], le BMI ne semble
pas être un facteur de risque [1].
Facteurs de risque thromboemboliques
Dulitsky et al. [48] ont rapporté un taux significativement
plus élevé de thrombophilies (antithrombine III abaissé,
mutation du facteur V Leiden, déficit en proétine C et S,
anticoagulant circulant ou anticorps anticardiolipines, résistance acquise à la protéine C) chez les patientes faisant un
OHSS sévère. Les études plus récentes semblent contredire
ce point : un antécedent de lupus érythémateux disséminé associé à un syndrome des antiphospholipides, ne
semble pas favoriser la survenue d’un OHSS [49]. Le syndrome des anticorps antiphospolipides, retrouvé positif chez
24 % des patientes en FIV, ne semble pas favoriser la survenue de l’OHSS [50,51]. Les autres thrombophilies ne sont pas
plus fréquentes chez les patientes ayant fait un OHSS [52],
aussi leur recherche systématique n’est pas recommandée
pour des raisons économiques. Elles doivent, toutefois, être
considérées comme des facteurs aggravants de l’OHSS et non
des facteurs de risque.
Anti-Müllerian hormone (AMH)
L’AMH est considérée comme un marqueur quantitatif de la
réponse ovarienne à la stimulation [53—56]. La Marca et al.
[57] ont rapporté un taux d’annulation pour risque d’OHSS
plus élevé pour un niveau d’AMH supérieur à 7 ng/mL. Toutefois, ce taux laisse supposer un terrain plus spécifique :
celui du syndrome des ovaires polykystiques (PCOS) [58].
Chez les patientes n’ayant pas un PCOS associé, le seuil
retrouvé est de 3,36 ng/mL avec une sensibilité de 90,5 % et
une spécificité de 81,3 % pour l’apparition d’un OHSS [59].
Compte des follicules antraux (CFA)
Il s’agit également d’un marqueur quantitatif de la réponse
ovarienne à la stimulation ovarienne [60,61] corrélé à l’AMH
[62]. Le seuil proposé pour prédire la survenue d’un OHSS
est de 14 follicules avec une sensibilité de 82 % et une sensibilité de 89 % [63]. La récente méta-analyse de Broer et al.
confirment ces chiffres et précisent que le CFA possède la
même valeur prédictive que l’AMH pour prédire la survenue
d’une OHSS [60].
Cause de l’infertilité
Les patientes ayant un syndrome des ovaires polykystiques
sont plus à risque d’OHSS, ces patientes ayant une AMH élevée (supérieure à 7 ng/mL) [58] et un CFA très supérieur à
14. Au cours des stimulations ovariennes de ces patientes,
596
le recrutement d’un très grand nombre de follicules induit
des élevations rapides et importantes du taux d’estradiol,
les exposant à un risque élevé d’OHSS (OR : 6,8, 95 % CI
4,9—9,6) [64]. En plus de l’élevation de l’estradiol, Kamat
et al. [65] ont rapporté une accentuation de la production de
l’ARNm du VEGF. La metformine pourrait diminuer ce risque
(OR : 0,27, 95 % CI 0,16—0,47) [66,67]. Les patientes ayant
un tableau incomplet de PCOS avec seulement une atteinte
clinique, biologique ou échographique seraient également à
risque d’OHSS. Ainsi, un aspect échographique de PCOS avec
une disposition en couronne des follicules et une hypertrophie stromale sans autre signe associé [68,69], un rapport
LH/FSH supérieur à deux isolé [70,71], ou une hyperandrogénie isolée [71,72] sont à considérer également comme des
facteurs de risque d’OHSS.
Terrain allergique
Delvigne et al. [1] ont rapporté, comme facteur de risque,
un terrain allergique d’après l’étude de Enskog et al. [73].
Toutefois, il s’agit de la seule étude sur ce facteur de risque,
mais l’influence des processus inflammatoires et immunologiques au cours de l’OHSS rend ce facteur de risque possible.
Il faudrait, toutefois, d’autres études sur ce sujet pour le
confirmer.
Le polymorphisme du récepteur à la FSH
De nombreux polymorphismes ont été rapportés dans la
littérature. Ces récepteurs situés sur les cellules de la granulosa auraient une influence sur la réponse à la stimulation
ovarienne [74—76]. Daelemans et al. [77] rapportent que
le polymorphisme S380 au niveau de l’exon 10 du récepteur,
pourrait augmenter la survenue de l’OHSS, mais le polymorphisme N380 serait un facteur de risque d’OHSS sévère,
sans pour autant en augmenter la fréquence [78]. Toutefois,
le faible nombre d’études sur le sujet et le coût économique
de ces analyses ne les rendent pas applicables en pratique
courante.
Hypothyroïdie associée
Plusieurs OHSS ont été rapportés dans un contexte
d’hypothyroïdie [10—16]. Les hypothèses pour expliquer ce
phénomène seraient la présence de récepteurs nucléaires
de la TSH au niveau de la cellule de la granulosa stimulés par
de très fortes concentrations de TSH [79], l’autre hypothèse
pourrait passer par des mécanismes auto-immuns.
Facteurs de risque pendant la stimulation
ovarienne
Œstradiol élevé ou ascension rapide de l’œstradiolémie
Plusieurs auteurs ont rapporté des taux élevés
d’hyperstimulation modérée pour des taux supérieurs
à 3500 pg/ml [80] et d’hyperstimulation sévère au-delà
de 6000 pg/ml [80,81]. Delvigne et al [1] rapportent un
likehood ratio (LR) de 6,37 pour un taux d’estradiol supérieur à 2642 pg/ml. Toutefois, d’authentiques OHSS ont été
rapportés avec des taux d’estradiol bas [82—84]. Aussi,
un taux d’estradiol élevé est associé à un augmentation
du risque d’OHSS mais isolé il n’a qu’une modeste valeur
prédictive, c’est pourquoi il doit être interprété en fonction
de la patiente et de ses facteurs de risque. L’ascension
F. Lamazou et al.
brutale du taux d’estradiol au cours de la stimulation est
considérée par différents auteurs comme un facteur de
risque [73,85].
Nombre d’ovocytes ponctionnés
Le nombre d’ovocytes et le taux d’estradiol ont été rapportés comme des facteurs prédicitfs d’OHSS précoces [44].
Mais, les taux d’OHSS en fonction du nombre d’ovocytes
sont extrêmement variables dans la littérature du fait des
différentes populations étudiées. Ainsi, pour un seuil à
30 ovocytes ponctionnés, les taux d’OHSS vont de 20 à 80 %
[23,81].
En conclusion, de nombreux facteurs de risque
d’hyperstimulation ovarienne ont été identifiés, sans
pour autant parvenir à une réelle valeure prédictive de
chacun pris indépendamment. Il faut donc considérer
la patiente et la stimulation dans son ensemble afin de
prévenir l’OHSS, sans oublier que 33 % des OHSS surviennent
sans aucun facteur de risque [84,86]. Delvigne et al.
recommandent, donc, que toute patiente soit considérée
comme à risque d’OHSS.
Prévention
Le préalable indispensable à la prise en charge en stimulation multifolliculaire est donc l’identification des facteurs
de risque afin de sélectionner les patientes à risque d’OHSS.
Pour ces patientes à risque, différentes mesures préventives
ont été proposées.
Choix du protocole en fécondation in vitro
stimulée
Les antagonistes de la Gn-RH, du fait de leur action à
la fois au niveau hypophysaire et ovarien, ont été proposés en prévention des OHSS [87]. Ils bloqueraient la FSH
et la LH endogènes sans avoir l’effet « flare up » des agonistes de la GnRH. Ils seraient également mieux tolérés que
les agonistes de la Gn-RH et auraient des taux de naissances
vivantes similaires [88—91]. L’antagoniste étant introduit au
cours de la stimulation quand les follicules atteignent une
taille comprise entre 12 et 14 mm, la FSH endogène présente
en début de stimulation permettrait de réduire les doses
de FSH nécessaires. Deux méta-analyses ont confirmé que
les protocoles antagonistes par rapport aux protocoles agonistes, seraient associés à une réduction de l’incidence des
OHSS (risque relatif [RR] : 0,61 ; 95 % CI 0,42—0,89, p = 0,01)
[90], et, des hospitalisations pour OHSS sévères (OR : 0,46 ;
95 % CI 0,26—0,82, p = 0,01) [92]. Il y aurait également moins
de coasting et d’annulations (OR : 0,44 ; 95 % CI 0,21—0,93,
p = 0,03) [90]. Le protocole antagoniste serait donc le protocole recommandé chez les patientes ayant des facteurs de
risque d’hyperstimulation [93].
La maturation in vitro (MIV)
Cette prise en charge, permettant de réaliser une ponction
d’ovocytes sans ou avec très peu de gonadotrophines exogènes, permet théoriquement d’éliminer le risque d’OHSS.
Elle a, pour l’instant, été principalement évaluée chez les
Le syndrome d’hyperstimulation ovarienne
patientes PCOS avec taux de naissances vivantes de 22,5 %
par transfert [94]. Les études, portant sur les patientes
non PCOS, ont été faites dans le cadre de la préservation
de la fertilité chez des patientes atteintes de cancer. Les
résultats rapportent 7,9 ± 6,6 ovocytes [95]. Toutefois, la
méta-analyse de Siristatidis et al. [96] ne recommandent
pas cette prise en charge en première intention par rapport aux cycles stimulés du fait de l’absence d’étude
randomisée.
Doses de gonadotrophines
Delvigne et al. [1] rapportent qu’il n’y pas de corrélation
entre la dose d’hMG et l’incidence de l’OHSS, et que au
contraire, les patientes faisant des OHSS recevaient moins
d’hMG. Mais dans l’ensemble des études citées, la majorité des patientes avaient des facteurs de risque d’OHSS et
avaient donc été prises en charge en conséquence avec des
doses plus faibles [43,45,73,97,98], aussi ce point doit être
nuancé, car bien entendu sur-stimuler une patiente l’expose
à un risque d’OHSS. Toutefois, cela montre que ces patientes
malgré des doses faibles font quand même des OHSS probablement dans le cadre d’une sensibilité accrue à la FSH.
Aussi, les proctocoles recommandés sont du type step-up
low dose [98—100], avec des doses d’hMG initiale réduites
de moitié [101] chez les patientes ayant des facteurs de
risque d’OHSS.
Coasting
Le coasting consiste à réduire les doses de gonadotrophines,
voire à arrêter les injections de gonadotrophines exogènes
en fin de stimulation chez les patientes à risque d’OHSS, en
particulier, en cas d’estradiol élevé ou en ascension rapide.
Cela permet de reporter le déclenchement tout en laissant le niveau d’estradiol baisser du fait de l’apoptose des
petits follicules FSH dépendants et de l’absence de stimulation exogène des follicules matures. Le risque de cette
stratégie est la baisse des taux d’ovocytes matures, de
fertilisation, d’embryons de bonne qualité et de grossesse
au-delà de 48 à 72 heures de coasting [1,102—104]. Ulug et
al. [105] recommandent la congélation des embryons en
cas de coasting prolongé plus de trois jours. Garcia-Velasco
et al. [102] confirment que le point le plus fondamental
du coasting est la durée de ceuli-ci et non la variation du
taux d’estradiol. Les auteurs suggèrent même qu’il est possible d’aller à la ponction d’ovocytes même avec une chute
d’estradiol supérieure à 50 % tant que l’on ne dépasse pas
deux jours de coasting. Deux importantes méta-analyses
[106,107] conclueront pourtant que cette stratégie isolée ne
suffit pas à éliminer un OHSS mais il en réduirait la fréquence
et la sévérité [1].
Annulation du cycle/congélation des ovocytes ou
des embryons
L’annulation du cycle sans déclenchement de l’ovulation
est la seule méthode de prévention ayant prouvé son
éfficacité [108,109], même si dans le cas des protocoles
antagonistes un pic de LH peut survenir spontanément, il
597
n’est pas rapporté d’OHSS en l’absence de grossesse d’où
l’importance des rapports protégés dans ces circonstances.
L’inconvénient de cette prévention est l’acceptabilité par
le couple, en particulier, en l’absence de prise en charge
financière par des assurances, sans oublier l’impact psychologique. L’autre option, pour ne pas annuler le cycle, est
de ne pas transférer les embryons et de faire une congélation soit d’ovocytes, soit d’embryons. Toutefois, cette
attitude prévient l’OHSS tardif provoqué par la grossesse
mais expose la patiente à l’OHSS précoce [25,87,110—113].
Wada et al. [114] rapportent, toutefois, des formes moins
sévères d’OHSS précoces après non-transfert. La congélation des embryons a un risque d’échec car tous les
embryons ne peuvent être congelés et les taux de grossesse par transfert d’embryons congelés sont plus faibles
par rapport au transfert d’embryons frais [115]. Toutefois,
Herrero et al. [116] rapportent des taux d’implantation de
32,1 % après vitrification par cette stratégie. En conclusion,
l’annulation avec nouvelle stimulation ultérieure semble
être la prise en charge la plus efficace en termes de prévention d’OHSS.
Modalités du déclenchement
Les modes de déclenchement actuellement proposés sont
soit l’hCG, soit la LH recombinante, soit les agonistes de
la GnRH par leur effet « flare up ». Comme nous l’avons vu,
l’hCG possède un effet biologique beaucoup plus intense que
la LH sur une durée de plus de six jours [117]. Gerris et al.
[118] rapportent des taux d’estradiol et de progestérone
beaucoup plus élevés après l’injection d’hCG par rapport
à un agoniste de la GnRH. Les doses d’hCG évaluées dans
la littérature vont de 2000 à 25 000 UI. Les taux de grossesses ne semblent pas varier pour des doses supérieures
à 5000 UI [119,120]. Shapiro et al. [121] confirment que la
survenue de l’OHSS est corrélée au taux plamsatique de
gonadotrophines chorioniques le lendemain du déclenchement. La dose de 5000 UI serait donc la dose recommandée
pour réduire le risque d’OHSS sans modifier le taux de
grossesse [68,104,122]. Cette stratégie isolée ne semble,
toutefois, pas suffisante pour éviter les OHSS [123,124] mais
son association au coasting pemettrait de le réduire significativement [125]. Le déclenchement de l’ovulation, dès
que les follicles atteignent les 12 mm chez les patientes à
risque, a été proposé par El-Sheik et al. [126] avec des taux
de grossesses de 40 %. Mais cette unique étude ne permet
pas de conclure à son efficacité. Parmi les autres modes de
déclenchement, l’utilisation de l’effet « flare up » des agonistes de la GnRH a été rapporté par de nombreux auteurs
[127—130]. Cet effet « flare up » s’observe 34 heures après
l’injection de l’agoniste et ne peut être appliqué qu’au
cours de protocoles n’utilisant pas d’agonistes au cours de
la stimulation folliculaire. Imoedemhe et al. [131] et Shalev et al. [132] rapportent des séries chez des patientes
à très haut risque d’OHSS sévère. Le protocole associant
antagoniste et agoniste de la GnRH pour induire le pic de
LH pourrait être un protocole de choix pour les patientes
à risque [133,134]. Mais, l’absence d’étude randomisée ne
permet pas de conclure formellement. Deux méta-analyses
ne recommandent pas ce mode de déclenchement en routine du fait d’une diminution significative des taux de
598
grossesses cliniques, mais serait à réserver uniquement aux
patientes à risque d’OHSS [92,135]. Enfin, le troisième mode
de déclenchement est l’utilisation de LH recombinante avec
une dose comprise entre 5000 et 15 000 UI, mais une seule
étude rapporte son efficacité dans la prévention de l’OHSS
[136] et le coût de cette molécule reste, à ce jour, très
élevé.
Supplémentation de la phase lutéale
L’élévation excessive des stéroïdes sexuels (estrogènes et
progestérone) au cours de la phase lutéale dans le cadre d’un
OHSS entraîne un rétrocontrôle négatif sur l’antéhypophyse
se traduisant par une chute de la LH endogène [137,138].
Ce qui expliquerait la chute des taux d’implantation et
l’augmentation des taux de fausses couches spontanées
(FCS) [139]. Afin de contrer ces effets, différentes supplémentations de la phase lutéale ont été proposées : l’hCG
n’est pas recommandée même si un bénéfice a été rapporté
versus placebo, à cause de l’augmentation du risque d’OHSS
lié à l’hCG [140,141]. La progestérone à l’inverse semble
atténuer ce risque tout en augmentant les taux de grossesses
[140—142].
Antidiabétiques oraux
Chez les patientes ayant un PCOS, une large méta-analyse
a confirmé un bénéfice de la metformine sur l’ovulation
mais surtout sur l’incidence de l’OHSS (OR : 0,21 ; 95 % CI
0,11—041, p < 0,00001) [143]. Elle est donc recommandée
chez les patientes à risque d’OHSS, en particulier les PCOS
[66].
La ponction folliculaire d’un ovaire en cours de
stimulation avant le déclenchement
Le principe consiste à ponctionner un ovaire en cours de stimulation de façon à aspirer les cellules de la granulosa et
d’induire une hémorragie intrafolliculaire, permettant de
« désactiver » l’ovaire, tout en poursuivant la stimulation
de l’ovaire controlatéral. Toutefois, cette méthode invasive
ne suffit pas à prévenir le risque d’OHSS [144—146].
F. Lamazou et al.
OHSS sévères restait, en revanche, identique dans les deux
groupes OR : 0,50 (95 % CI 0,20—1,26). La cabergoline, débutée juste après la ponction d’ovocytes, permettrait donc
de réduire l’incidence des OHSS légers et modérés, mais ne
suffirait pas empêcher les OHSS sévères [135,148—152].
Perfusion d’albumine
L’albumine permettrait de lier les agents vasoactifs responsables de l’OHSS [153], tout en maintenant une pression
osmotique élevée de façon à maintenir le volume intravasculaire, évitant l’hémoconcentration et l’hypercoagulabilité
[80,154]. Plusieurs études ont essayé d’évaluer l’effet de
l’albumine sur l’OHSS, toutefois, la variabilité des doses utilisées de 10 à 125 mg en un à cinq injections de la ponction
d’ovocytes à j5, ne permet pas de faire une méta-analyse
[155—161]. Delvigne et al. [1] concluent que l’albumine
ne semble pas avoir d’effet protecteur sur l’OHSS tardif
et un effet très faible sur L’OHSS précoce. De plus, il
ne faut pas négliger le risque de l’albumine avec comme
pour tout produit dérivé humain, un risque de transmission virale associé aux effets indésirables comme nausées,
vomissements, pics fébriles et allergies. Cette stratégie
n’est donc pas recommandée dans la prevention des OHSS
[162—164].
Perfusion d’hydroxyethyl starch (HAES)
L’HAES est un substitut ayant les mêmes effets osmotiques
que l’albumine mais sans les risques de transmission virale.
À ce jour, trois études ont évalué l’effet de 500 à 1000 ml
d’HAES [165—167]. Deux études versus placebo trouvent un
effet modéré sur les OHSS légers et modérés mais aucun
sur les OHSS sévères [165,166]. La troisième étude [167]
associe albumine (50 ml) et HAES (500 ml) versus placebo.
L’incidence de l’OHSS est, en effet, réduite dans le groupe
traitement. Ces trois études sont donc concordantes sur
l’effet de l’HAES, mais les études ne portent pour l’instant
que sur de petites cohortes et une véritable étude randomisée multicentrique est indispensable pour conclure sur
l’effet réel de l’HAES.
Les inhibiteurs de l’aromatase
Anti-inflammatoires non stéroïdiens
L’effet antiestrogénique des inhibiteurs de l’aromatase
pourrait réduire le risque d’OHSS. Mais, il existe très peu
d’étude sur ce sujet et une étude comparant les inhibiteurs
de l’aromatase à la progestérone conclue à une supériorité
de la progestérone sur la prévention de l’OHSS et sur les
taux de grossesses [147].
Une étude sur l’introduction de 100 mg d’aspirine par jour
débuté en même temps que la stimulation ovarienne pourrait avoir un effet protecteur chez les femmes à haut risque
d’OHSS [168]. Le Meloxican est un autre anti-inflammatoire
qui semble prometteur chez l’animal [169], mais qui reste
à évaluer chez l’homme.
Agoniste de la dopamine
Glucorticoïdes
Les agonistes de la dopamine inhibent la phosphorylation des
récepteurs VEGFR-2 [28]. Youssef et al. [148] dans une métaanalyse portant sur quatre études randomisées regroupant
570 femmes ont montré : une diminution significative de
l’incidence des OHSS dans le groupe traité par cabergoline
avec un OR : 0,41 (95 % CI 0,25—0,66). Mais l’incidence des
Les glucorcorticoïdes ont effet inhibiteur sur l’expression du
VEGF au niveau des cellules musculaires lisses des vaisseaux.
Une étude randomisée a comparé 100 mg d’hydrocortisone
après la ponction d’ovocytes suivi de 10 mg deux fois
par jour pendant trois jours, puis 10 mg/j pendant cinq
jours versus aucun traitement. L’incidence de l’OHSS était
Le syndrome d’hyperstimulation ovarienne
599
Tableau 1 Classification des syndromes d’hyperstimulation ovarienne à partir de la classification de Humaidan et al. et du
« Practice Committee of the American Society for Reproductive Medicine ».
Ovarian hyperstimulation syndrome classification among Humaidan et al. and the ‘‘Practice Committee of the American Society
for Reproductive Medicine’’.
OHSS
Forme légère
Forme modérée
Forme sévère
Douleur abdominale
Faible ou gêne
Modérées
Le plus souvent intenses
Nausées vomissements
±
±
±
Diarrhées
±
±
±
Ascite sous tension
Absence cliniquement
Non
Oui
Oligoanurie
Non
Non
Oui
Dyspnée
Non
±
Oui
Hyperleucocytose/mm3
Inférieure à 15 000
Entre 15 et 25 000
Supérieure à 25 000
Hématocrite
< 45 %
45—55 %
> 55 %
Cytolyse hépatique
Non
±
Oui
Hyponatrémie
Non
Non
Oui
Hyperkaliémie
Non
Non
> 5 mmol/l
Ascite à l’échographie
Limitée au cul de sac de douglas
Dépasse l’utérus
Présente dans la loge de Morrisson
Taille des ovaires
9—12 cm
> 12 cm
> 12 cm
Épanchement pleural
Non
Non
Oui
identique dans les deux groupes, montrant l’inefficacité de
ce traitement [170].
l’incidence des OHSS légers et ne préviennent pas les OHSS
sévères et tardifs.
Le drilling ovarien
Diagnostic et classifications
Plusieurs auteurs ont recommandé cette intervention chez
les patientes ayant un PCOS avec ou sans antécedents
d’OHSS [171—174]. Une étude prospective randomisée chez
des patientes PCOS en échec de FIV ou avec des antécédents
d’annulation pour OHSS a montré une diminution significative des OHSS dans le groupe drilling versus celles qui
n’avaient pas été opérées [172]. Aussi, chez les patientes
PCOS, un drilling ovarien préalable à la prise en charge en
FIV ou après annulation pour risque d’OHSS pourrait être à
considérer.
Comme nous l’avons vu, la prévention passe par
l’identification des facteurs de risque. En cas de PCOS, on
peut se poser la question du drilling ovarien ou de la MIV,
mais pour l’instant, ces deux stratégies sont surtout recommandées après un premier épisode d’OHSS. Pour les autres
patientes à risque, le choix du protocole semble s’orienter
vers un protocole antagoniste avec des doses faibles de
gonadotrophines et un déclenchement à l’aide d’agoniste
de la GnRH.
Pendant la stimulation, si l’on observe une réponse
excessive à risque d’OHSS, la meilleure prévention reste
l’annulation du cycle même si elle peut être difficile à faire
accepter aux couples. Dans le cadre d’un protocole agoniste, on peut essayer un coasting pendant 48 heures avec
un déclenchement de l’ovulation qui ne doit pas dépasser la
dose de 5000 UI, puis l’administration de cabergoline pendant 15 jours. Mais ces stratégies ne semblent réduire que
On distingue deux formes d’OHSS [44,175—177] :
• la forme précoce qui survient dans trois à sept jours
suivant le déclenchement de l’ovulation provoquée par
l’injection d’hCG. Sa persistance au-delà du septième
jour suggère une forme sévère ;
• la forme tardive qui survient une dizaine de jours après le
transfert embryonnaire et qui est le plus souvent provoquée par la grossesse. Cette forme est considérée comme
plus sévère du fait de son entretien par la grossesse et
le risque augmente avec le nombre de sacs gestationnels
[175,176].
On trouve, dans la littérature, des classifications des
OHSS en fonction de la gravité [147,178—180]. Toutefois, ces
grades sont difficiles à distinguer car il s’agit d’une pathologie évolutive. Ils sont résumés dans le Tableau 1.
L’OHSS léger se présente sous la forme d’une tension,
gêne ou douleur abdominale associée à des vomissements,
diarrhées. L’échographie objective une augmentation du
volume ovarien mais avec des ovaires dont le plus grand
axe est inférieur à 12 cm. Il n’y a pas d’épanchement des
séreuses à ce stade ou alors un épanchement limité au cul
de sac de Douglas. Sur le plan biologique, les estrogènes
urinaires sont supérieurs à 150 g/24 h et le prégnandiol urinaire supérieur à 10 mg/24 h. L’hématocrite, à ce stade, est
normale.
600
F. Lamazou et al.
L’OHSS modéré se présente avec des douleurs abdominales, des vomissements et des diarrhées associés à une
augmentation du périmètre abdominal. À l’échographie, le
plus grand axe des ovaires dépasse les 12 cm et on observe
des épanchements des séreuses. Sur la plan biologique, on
observe une hémoconcentration avec une hématocrite entre
40 et 55 % avec une hyperleucocytose inférieure à 25 000 par
millimètre cube.
L’OHSS sévère, pouvant menacer le pronostic vital, présente en plus :
• soit une ascite sous tension avec ou sans épanchement
pleural ;
• soit une complication thromboembolique ;
• soit un syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA) ;
• soit une insuffisance rénale avec une oligoanurie (inférieure à 600 ml/24 h) ;
• sur le plan biologique :
◦ une hémoconcentration avec une hématocrite supérieure à 55 %,
◦ une hyperleucocytose supérieure à 25 000 par millimètre cube,
◦ une cytolyse hépatique,
◦ une hyponatrémie inférieure à 135 mmol/L,
◦ une hyperkaliémie ;
• sur le plan échographique, les ovaires ont une taille supérieure à 12 cm de grand axe.
Sur le plan clinique, quelle que soit la gravité de l’OHSS,
des céphalées doivent impérativement faire réaliser une IRM
cérébrale à la recherche d’un AVC. Et il convient de rechercher systématiquement des signes thromboses artérielles
et/ou veineuses dans un contexte d’OHSS.
Sur le plan biologique, une hématocrite supérieure à
55 % fait passer les patientes dans le groupe avec menace
vitale [181,182]. Une hématocrite élevée doit être considérée comme un marqueur de gravité, car il existe une bonne
corrélation avec le taux de substances vasoactives dépendant du volume plasmatique.
La cytolyse hépatique est retrouvée chez 30 % des OHSS
sévères [178]. Elle est, en général, isolée mais peut être
parfois associée à une augmentation des gamma-glutamyltransferase ou des phosphatases alcalines [183]. Elle se
corrige spontanément avec l’amélioration du tableau.
La CRP pourrait être un marqueur de suivi de la pathologie et/ou un marqueur de gravité, mais la seule étude sur
ce sujet ne concerne qu’une faible population et doit être
encore évalué [184].
Complications
Les complications rapportées dans le cadre d’un OHSS sont
résumées dans le Tableau 2.
Complications thromboemboliques
Elles représentent la complication la plus redoutable des
OHSS, car elle peut être responsable du décès de la patiente
malgré un traitement approprié. L’incidence est difficile
Tableau 2 Complications liées au syndrome d’hyperstimulation ovarienne.
Complications associated to ovarian hyperstimulation syndrome.
Complications
thromboemboliques
Thromboses veineuses
Veine fémorale
Veine iliaque externe
Veine cave
Veine humérale
Veine jugulaire
Veine sous-clavières
Veines cérébrales
Thromboses artérielles
Artères coronaires : infarctus du myocarde
Artères cérébrales : accidents vasculaires cérébraux
Artère centrale de la rétine
Complications
pulmonaires
Pneumopathie lobaire
Embolie pulmonaire
Épanchement pleural
Atélectasie
Syndrome de détresse respiratoire aigu
Complications ovariennes
Rupture ovarienne
Torsion d’annexe
Compression des organes de voisinage
Complication abdominale
Syndrome du compartiment abdominal
Complication rénale
Insuffisance rénale aiguë
Complication hémodynamique
Dysfonction circulatoire
Le syndrome d’hyperstimulation ovarienne
à évaluer car il s’agit dans la majorité des cas de case
report [185—191]. Serour et al. [192] sur 3500 cycles de
FIV rapportaient une incidence de 10 %. Elles ne concernent
paradoxalement pas que les OHSS sévères mais également
les OHSS légers et modérés [181] et peuvent survenir même
après la guérison clinique de l’OHSS. Ces thromboses ont
la particularité de toucher les membres inférieurs mais
également les membres supérieurs et/ou le réseau cérébral ou coronaire [185—191]. L’autre particularité de ces
thromboses est une atteinte à la fois veineuse mais également artérielle [193,194]. Chan et Dixon [195] rapportent
un OHSS dans 95 % des cas de thrombose artérielle et 70 %
des cas de thrombose veineuse après FIV. Dans 54 % des
thromboses artérielles, des accidents vasculaires cérébraux
ont été rapportés avec deux décès [196,197] et une récupération complète seulement dans 47 % des cas dans le
cadre d’un OHSS [189]. Deux occlusions des artéres centrales de la rétine ont également été rapportées [198,199].
Chan et Dixon [195] rapportent également une incidence
plus précoce des thromboses artérielles par rapport aux
thromboses veineuses (10,5 versus 40 jours après le transfert d’embryons). La fréquence des embolies pulmonaires
est estimée entre 12 et 30 % [179].
Le mécanisme de ces thromboses inhabituelles semble
basé sur une hypercoagulabilité à laquelle s’associent le
repos forcé lié aux douleurs, l’augmentation de la pression
abdominale et la compression des vaisseaux rétropéritonéaux par les ovaires. Il y aurait une activation de
la cascade de coagulation [200] avec une diminution
de l’antithrombine III ou de la protéine S contemporaine
de l’hyperestrogénie [48,201,202]. Le VEGF pourrait également interagir avec le phénomène thrombotique par
l’activation plaquettaire [168] et l’augmentation du facteur
Von Willebrand [104]. Au total, quel que soit son mécanisme,
l’activation de la coagulation semble être la cause principale
des accidents thromboemboliques.
601
d’explication claire au mécanisme. Les germes en causes
sont le plus souvent Pseudomonas aeruginosa, Klebsiella
pneumoniae, Staphylococcus aureus et Streptococcus pneumoniae [181]. L’incidence est assez élevée, de 4 à 30 % ;
elle est rattachée à une hypoventilation alvéolaire sur les
atélectasies compliquant les épanchements pleuraux.
Le SDRA reste une complication rare du OHSS. Les prostaglandines et les cytokines jouent sans doute un rôle dans sa
physiopathologie. Associées à l’augmentation de la perméabilité vasculaire, elles vont contribuer à la destruction des
vaisseaux et de l’endothélium alvéolaire. Plus de 90 % des
patientes en OHSS sévère avec SDRA développent une fibrose
pulmonaire ou présentent un arrêt circulatoire en l’absence
de traitement du syndrome. Une récupération sans séquelle
est envisageable chez 50 % des patientes bien traitées [181].
Dysfonction circulatoire
Chez les patientes atteintes d’OHSS sévères, il est
constaté une augmentation de l’hématocrite, une diminution de la pression artérielle moyenne, une augmentation du débit cardiaque et une diminution des
résistances vasculaires périphériques. Ces modifications
hémodynamiques s’accompagnent d’une augmentation des
concentrations de rénine plasmatique, de norépinéphrine,
d’ADH et du peptide atrial natriuretic (ANP), surtout en
cas d’hémoconcentration. Ces éléments suggèrent qu’à
l’augmentation de la perméabilité capillaire s’associe une
vasodilatation artériolaire, qui expliquerait l’augmentation
du débit cardiaque malgré la contraction du volume sanguin circulant. Une dysfonction circulatoire secondaire à
l’augmentation majeure de la perméabilité capillaire avec
constitution d’un troisième secteur et à la vasodilatation artériolaire peut survenir et entraîner un collapsus en
l’absence de traitement.
Complications ovariennes
Les complications pulmonaires
Les manifestations pulmonaires sont multiples au cours du
OHSS sévère : pneumopathie lobaire, embolie pulmonaire,
épanchement pleural, atélectasies, SDRA. Les difficultés
respiratoires potentielles à type de dyspnée, sont à rattacher le plus souvent aux épanchements pleuraux qui peuvent
créer des atélectasies en regard [180]. Les épanchements
pleuraux surviennent avec une fréquence de 0,6 à 10 % dans
la littérature [203] et sont souvent unilatéraux à droite, par
transfert d’ascite via le canal thoracique ou les hiatus diaphragmatiques. Ils peuvent, cependant, être bilatéraux et
très abondants. Une des explications retenue est un transfert massif des liquides péritonéaux dans la cavité pleurale
par hyperpression intra-abdominale. Une autre hypothèse
met en jeu les facteurs vasoactifs et principalement le VEGF,
dont il existe de nombreux récepteurs sur les mésothélium
pleuraux et péritonéaux [204]. Une diminution de la course
diaphragmatique de part une ascite abondante, un syndrome
du compartiment abdominal (SCA), une augmentation de la
taille des ovaires, un iléus paralytique peuvent également
être à l’origine de cette dyspnée.
Les pneumopathies compliquant l’OHSS atteignent le
plus souvent le lobe inférieur gauche sans qu’il n’y ait
Les ovaires multikystiques peuvent augmenter de volume
avec un diamètre supérieur à 12 cm entraînant des risques
de complications à type de torsion (jusqu’à 16 % des OHSS),
rupture, hémorragie ou compression [181].
Syndrome du compartiment abdominal
L’ascite de grande abondance peut être la cause d’un véritable syndrome du compartiment abdominal (SCA) [205]. Ce
SCA est un syndrome compliquant classiquement les traumatismes fermés de l’abdomen ou les chirurgies extensives
de l’abdomen. Dans le SCA, on observe une diminution de
la diurèse, une distension abdominale, des manifestations
respiratoires et circulatoires. L’oligurie est précoce et est
considérée comme un signe nécessaire au diagnostic. Elle
est peu modifiée par les diurétiques, le remplissage vasculaire et survient dès que la pression intra-abdominale est
supérieure à 10 mmHg. Sur le plan respiratoire, on note une
tachypnée, une dyspnée importante et une diminution du
volume courant, associée à une hypoxie et une hypercapnie. La radiographie thoracique objective une ascension des
coupoles diaphragmatiques et une atélectasie des bases.
Sur le plan circulatoire, le tableau clinique serait d’autant
602
plus grave qu’il existerait au départ une hypovolémie. La
mesure de la pression intra-abdominale est remplacée en
pratique clinique par la mesure de la pression intravésicale
sur une sonde urinaire à demeure qui en est un excellent
reflet et d’interprétation plus fiable. Tous ces signes cliniques peuvent être retrouvés dans l’OHSS du fait de l’ascite
de grande abondance et des ovaires augmentés de volume.
Le SCA serait responsable de complications menaçant le pronostic vital [206,207].
L’insuffisance rénale aiguë
Elle peut être fonctionnelle avec une natriurie effondrée et une ascension rapide de l’urée, du fait de
l’hémoconcentration et du troisième secteur. Mais elle peut
être organique par un phénomène de compression [208] ou
de nécrose tubulaire aiguë.
F. Lamazou et al.
Toutefois, Raziel et al. [219] recommandent de considérer
ces grossesses comme des grossesses à risque.
Traitement
Il n’existe actuellement pas de recommandation pour la
prise en charge des OHSS. Le traitement sera donc fonction
de la sévérité de l’OHSS et de la survenue de complications.
Le traitement est principalement symptomatique et préventif. Il n’y a pas lieu d’interrompre les traitements substitutifs
de la phase lutéale car l’aspirine à faible dose et la progestérone pourraient avoir un effet protecteur sur l’OHSS
[140,142,168].
Il ne faut pas négliger le fait qu’un OHSS peut s’aggraver
rapidement, la surveillance faisant partie des éléments clés
de la prise en charge.
D’après les données de la littérature
Impact sur le taux de grossesses
Les observations rapportées dans la littérature divergent
sur ce sujet. Gildey-Baird et al. [209] rapportaient une
altération de la réceptivité endométriale en cas de taux
d’estradiol très élevé par rapport au taux de progestérone.
L’altération de la réceptivité endométriale peut également
être liée aux taux anormaux de cytokines observés dans les
OHSS [210,211].
En ce qui concerne le taux de grossesses, Meldrum [212]
n’a pas rapporté de différence entre un groupe de FIV ayant
un taux d’OHSS élevé et un groupe de don d’ovocyctes alors
que Raziel et al. [213] rapportaient un meilleur taux de
grossesse évolutive dans le groupe OHSS (30,6 versus 20 %).
Le taux de fausses couches rapporté dans la littérature est
très variable. Certains auteurs rapportent une augmentation
du taux de fausses couches entre 26,6 et 35 % [214—216].
Mathur et al. [175,176,217] et Courbieres et al. [218], à
l’inverse, rapportent des taux similaires dans les groupe
OHSS et contrôle.
En ce qui concerne le déroulement des grossesses après
OHSS, Abramov et al. [216] rapportent un taux élevé de
césariennes (24,1 % chez les singletons), de retard de croissance intra-utérin (34,5 % des singletons), de malformations
(1,9 %) associés à des taux élevés d’hypertension artérielle (13,2 %), de diabète gestationnel (5,9 %). Toutefois,
même s’il s’agit d’une cohorte de 163 OHSS, l’absence de
groupe témoin ne permet pas de conclure sur un impact réellement péjoratif sur la grossesse. Courbieres et al. [218],
dans une série récente, avec un groupe témoin retrouvent
quand même plus d’hypertension artérielle gravidique et de
menace d’accouchement prématuré dans le groupe OHSS
avec respectivement 21,2 % versus 9,2 % et 36 % versus
10,7 %.
Dans la quasi-totalité des études, les auteurs n’ont pas
distingué les OHSS précoces des tardifs. Aussi, il n’est pas
possible de conclure à un type plus péjoratif que l’autre,
alors que l’OHSS étant provoqué par la grossesse, une réduction du taux de fausses couches spontanées pourrait être
attendue.
En conclusion, les données de la littérature ne permettent actuellement pas de conclure à un risque de
fausse couche ou de complication obstétricale augmentés.
Hyperstimulation ovarienne léger
Le suivi en ambulatoire est le plus souvent possible du
fait des douleurs limitées. Le traitement repose principalement sur des antalgiques per os et des bas de contention
antithrombose. La surveillance sera bi-hebdomadaire avec
mesure du poids, du périmètre abdominal et croissance du
taux d’hCG.
Hyperstimulation ovarienne modéré
L’hospitalisation est, en général, recommandée au moins
à la phase initiale, du fait du risque d’aggravation et de
douleurs pelviennes plus intenses. Le repos au lit est non
strict, associé à des bas de contention antithrombose et
une anticoagulation à dose préventive forte comme des
HBPM (enoxaparine 40 mg/j) pendant six semaines du fait
du risque thrombotique. Il est, en général, recommandé une
alimentation hyperprotéinée. La restriction hydrique doit
être limitée même en cas d’ascite, à un litre par jour en
hiver et deux litres par jour en été afin de ne pas aggraver l’hémoconcentration. Il faudra, en revanche, surveiller
que le bilan entrées/sorties quotidien reste équilibré afin de
détecter une éventuelle insuffisance rénale aiguë fonctionnelle, voire organique.
La surveillance clinique comporte la surveillance du
poids, de la diurèse, du périmètre abdominal, de
l’apparition d’une dyspnée, de signes évocateurs d’une
thrombose artérielle ou veineuse, en particulier, des céphalées, des douleurs cervicales ou du membre supérieur. Sur
le plan paraclinique, la surveillance biologique régulière,
tous les trois jours environ, de l’hématocrite, du taux de
plaquettes, des électrolytes, de la créatinine, ainsi qu’une
échographie pelvienne, sera intensifiée en cas d’aggravation
des paramètres.
La prudence incite à l’hospitalisation initiale de ces
patientes. Bien que les formes moyennes évoluent favorablement en deux à trois semaines, un passage rapide
à la forme sévère est possible surtout en cas de grossesse. La poursuite de l’hospitalisation doit être envisagée
devant l’apparition d’un ou de plusieurs des signes suivants évoquant une forme sévère : douleur abdominale
sévère, signes péritonéaux, nausées résistantes au traitement, vomissements incompatibles avec une hydratation
Le syndrome d’hyperstimulation ovarienne
normale, anurie ou oligurie sévère, ascite en tension,
dyspnée ou tachypnée, hypotension et malaises, troubles
hydroélectrolytiques, hémoconcentration dont témoigne un
hématocrite supérieur à 45 % et perturbations du bilan hépatique.
Hyperstimulation ovarienne sévère
Dans les formes sévères, la première étape de la prise en
charge réside dans l’évaluation hémodynamique et respiratoire de la patiente dont dépendent le pronostic vital
et l’indication éventuelle d’une hospitalisation en unité de
soins intensifs. La recherche de complications thromboemboliques doit être soigneuse car elles peuvent également
engager le pronostic vital. Les formes sévères d’OHSS
requièrent la mise en place d’abords veineux périphériques de bon calibre pour permettre le traitement de
l’hypovolémie. L’accès veineux pourra se faire par un cathéter veineux central qui fournira de plus une mesure de la
pression veineuse centrale afin de guider le remplissage
vasculaire. Il en va de même pour la pose d’une sonde
urinaire, afin de monitorer de façon rapprochée la diurèse et de mesurer la pression intravésicale à la recherche
d’un SCA : son bénéfice doit être réévalué au quotidien
par rapport au risque infectieux. Chez une patiente en
ventilation spontanée, l’échographie cardiaque peut être
proposée pour guider le remplissage vasculaire et pour surveiller le débit cardiaque. Outre son caractère non invasif,
elle présente l’avantage d’être reproductible mais présente l’inconvénient d’être un monitorage discontinu et
opérateur-dépendant. La surveillance clinique se base sur
la mesure des constantes, du poids, du périmètre abdominal, de la diurèse, de la pression intravésicale. S’y associe la
recherche de signes d’hypovolémie, de détresse respiratoire
et de thrombose, y compris dans des localisations inhabituelles. La surveillance biologique doit être quotidienne
avec NFS, plaquettes, ionogramme sanguin et urinaire, urée,
créatinine sérique, transaminases, gamma GT, phosphatases
alcalines, bêta-hCG. La surveillance paraclinique consiste
en la réalisation d’échographies abdominales pour mesurer la taille des ovaires et détecter la présence d’ascite ou
de complications intra-abdominales (hémorragie, rupture de
kyste, torsion d’annexes).
Devant la survenue d’une dyspnée, il faut réaliser une
radiographie du thorax (sous tablier plombé) et des gaz du
sang artériels. Le dosage des d-dimères plasmatiques n’a pas
sa place dans l’algorythme diagnostique de thrombose car
les d-dimères sont augmentés dans tous les OHSS [181]. Une
forte suspicion d’embolie pulmonaire pose l’indication d’un
angioscanner spiralé ou d’une scintigraphie de ventilationperfusion (sous tablier plombé) [220]. Une échographie
cardiaque éliminera un épanchement péricardique pouvant
participer au tableau clinique. L’échographie, plus sensible que la radiographie thoracique [221], sera également
employée dans le diagnostic des épanchements pleuraux.
Traitements spécifiques
Hémoconcentration
Le but du traitement médical est de lutter contre
l’hypovolémie relative en mobilisant le troisième secteur,
en luttant contre l’hémoconcentration et en restaurant le
603
volume sanguin circulant et l’hémodynamique circulatoire.
Cette hypovolémie va nécessiter un remplissage vasculaire,
qui peut aggraver les épanchements des séreuses en raison de l’augmentation de la perméabilité vasculaire. Les
fonctions rénales et respiratoires doivent donc être soigneusement monitorées. Les apports per os doivent être
limités au maintien du confort de la patiente. Le but
du remplissage est de maintenir un état hémodynamique
satisfaisant, une diurèse supérieure à 20 mL/h et d’éviter
l’hémoconcentration. Le soluté de référence reste un cristalloïde (sérum physiologique avec ou sans glucose). Les
solutés contenant du potassium doivent être proscrits, en
raison du risque potentiel d’insuffisance rénale. L’albumine
ne fait plus partie des solutés de remplissage recommandés
par les sociétés savantes en raison de son origine humaine,
de son coût et de l’absence de preuve de sa supériorité
sur les colloïdes de synthèse [222]. Toutefois, les recommandations de la SFAR ne permettent pas de poser une
contre-indication formelle à l’emploi de l’albumine : « En
cas de sepsis grave, ou d’autres phénomènes pathologiques,
associés à des troubles de la perméabilité capillaire, il
n’y a pas d’indication à l’utilisation d’albumine, sauf en
situation de déséquilibre persistant entre les pertes et la
synthèse d’albumine, aboutissant à des concentrations plasmatiques inférieures aux valeurs seuil définies. L’albumine
étant un dérivé d’origine humaine, le risque biologique
ne peut pas être considéré comme étant égal à zero ».
Son emploi doit donc être discuté au cas par cas, dans
les OHSS menaçant le pronostic vital. L’effet d’une solution d’hydroxy-éthyl amidon (HEA) a été comparé à de
l’albumine dans une petite série de patientes atteintes
d’OHSS sévère, en termes d’efficacité sur la diurèse, sur la
réduction du nombre de paracentèses et sur la diminution de
la durée d’hospitalisation [223]. Les résultats apparaissent
en faveur de l’HEA, mais des études randomisées de plus
grande envergure seront nécessaires afin de confirmer ces
résultats.
Diurèse et insuffisance rénale
Les diurétiques peuvent être employés devant la survenue
d’une hyperkaliémie ou d’une dyspnée, mais ils peuvent
majorer une hypovolémie, une hémoconcentration et aggraver une insuffisance rénale fonctionnelle. Ils doivent donc
être employés très prudemment, de façon titrée, en monitorant l’hématocrite qui doit être inférieure à 38 %, la
protidémie et la natriurèse.
Épanchements des séreuses
Les épanchements pleuraux ou abdominaux peuvent
entraîner une dyspnée. L’évacuation de l’ascite par ponction abdominale suffit généralement à faire régresser
l’épanchement pleural. Cependant, une ponction pleurale
unique ou un drainage continu peut être nécessaire en cas
d’épanchement bilatéral ou sévère [180]. L’aggravation de
la dyspnée peut nécessiter une ventilation non invasive,
voire en cas d’échec, une intubation orotrachéale et une
ventilation mécanique. En cas de survenue d’un SDRA, les
réglages des paramètres de ventilation mécanique et les
traitements spécifiques seront débutés suivant les règles
de bonnes pratiques [224,225], sans oublier la recherche
de causes infectieuses. Le remplissage vasculaire de ces
604
patientes en SDRA et ayant un OHSS peut être problématique, le but étant de maintenir une pression de perfusion
systémique et rénale suffisante [224].
Complications thrombotiques
Le traitement par port de bas de contention est insuffisant
pour prévenir le risque majeur d’accident thromboembolique et un traitement anticoagulant prophylactique
de type héparine de bas poids moléculaire préventif fort (4000—4500 UI/j) doit leur être associé [181].
En cas d’insuffisance rénale (clairance de la créatinine ≤ 30 mL/min), les héparines calciques doivent leur
être préférées. Pour les patientes obèses (IMC > 30) ou
présentant des signes d’hémoconcentration sévère (hématocrite > 45 %), la dose d’héparine de bas poids moléculaire
doit être majorée [180]. Chez les patientes ayant un facteur de risque de thrombose, tels que l’obésité, une maladie
inflammatoire chronique, un antécédent personnel ou familial de thrombose, une thrombophilie connue ou en cas
d’antécédent personnel d’OHSS, le traitement par anticoagulant doit être institué avant l’apparition des symptômes
car la cascade de coagulation est activée dès le deuxième
jour après l’administration de l’hCG. La durée de cette
prophylaxie n’est pas clairement établie : certains auteurs
recommandent de la maintenir pendant tout le premier
trimestre de la grossesse, en raison de survenue de thromboses tardives. L’évolution naturelle du syndrome et la
persistance de l’activation de la cascade de la coagulation
pendant quatre à six semaines incitent à poursuivre ce traitement pendant au moins six semaines après le début des
symptômes. Le traitement curatif de ces évènements thrombotiques n’est pas modifié par l’existence de l’OHSS. Une
éventuelle grossesse prolonge la durée de cette anticoagulation jusqu’à trois mois du post-partum. Le caractère
inhabituel de ces évènements thromboemboliques de par
leur localisation ou leur caractère artériel justifie la poursuite de l’antiaggrégant plaquettaire classiquement débuté
avec l’implantation des embryons, ou à défaut, la discussion
de son institution, ainsi qu’une prise en charge multidisciplinaire.
Ascite
L’indication d’une ponction évacuatrice du liquide d’ascite
est une question constamment soulevée dans la prise en
charge des patientes présentant un OHSS. En effet, une
ascite importante crée un inconfort certain pour la patiente
qui va présenter une sensation de pesanteur, un ballonnement, des nausées et des vomissements. Une ponction
évacuatrice unique va permettre de soulager ces symptômes. Les autres indications habituelles de drainage de
l’ascite sont une détérioration respiratoire (74 %), une oligurie (11 %), une instabilité hémodynamique (2 %) ou une
association de plusieurs facteurs (13 %) [181]. Ces indications
s’expliquent par le fait que l’ascite de grande abondance
peut être la cause d’un véritable SCA [207]. Le traitement
habituel du SCA est chirurgical. Cependant, dans l’OHSS,
la chirurgie n’a pas sa place du fait d’un risque hémorragique augmenté et de l’évolution naturelle de l’OHSS
vers la guérison [206]. Son traitement repose donc sur
le drainage de cette ascite associé à un maintien de la
volémie [226]. Ce drainage va permettre de diminuer la
F. Lamazou et al.
pression intra-abdominale, d’améliorer la perfusion rénale,
le retour veineux et le débit cardiaque. Ces améliorations
pourraient s’expliquer également par la levée d’un certain degré de compression urétérale et par la suppression
des médiateurs présents dans le liquide d’ascite et induisant l’OHSS [181]. Ce mécanisme du SCA évoqué dans la
genèse des complications de l’OHSS peut être un argument
en faveur de ponctions précoces et répétées du liquide
d’ascite [207]. Cette ponction doit impérativement se faire
sous contrôle échographique en raison de l’augmentation
majeure de volume des deux ovaires. Dans la littérature,
les ponctions se font par voie transabdominale ou transvaginale [227,228]. Cependant, le risque infectieux déjà
majoré par l’OHSS fait préférer la voie transabdominale.
La voie vaginale est une alternative éventuellement indiquée lorsque l’accès à la grande citerne est interdit du
fait d’ovaires trop volumineux, d’un œdème sous-cutané
ou d’une obésité importante [227]. Il n’est pas établi de
façon claire quelle quantité d’ascite doit être ponctionnée
ni à quelle fréquence. Deux attitudes s’opposent : la paracentèse systématique ou la ponction réservée à un échec
du traitement médical. Chez 21 patientes ayant un OHSS
sévère, la ponction d’ascite systématique a raccourci la
durée d’hospitalisation de 11 à quatre jours [87,229]. De
plus, les auteurs ont mis en évidence que les perturbations électrolytiques disparaissaient plus rapidement dans le
groupe bénéficiant d’une paracentèse (un jour versus neuf).
S’il existe de façon rétrospective une confirmation que cette
ponction augmente la diurèse, améliore la fonction rénale et
diminue l’hémoconcentration en 24 heures [230], il n’existe
pas de corrélation entre le volume évacué et l’augmentation
de la diurèse. L’inconvénient principal de ces ponctions
itératives est la récurrence rapide de cet épanchement,
associé à un phénomène d’auto-entretien par aggravation de
la déplétion de protéines du compartiment intravasculaire
[227] ainsi qu’un risque d’hypovolémie. Certains auteurs
ont donc proposé des auto-réinjections de liquide d’ascite
après ultrafiltration, afin de compenser la perte protéique
[231]. Une solution alternative est d’effectuer la compensation par des colloïdes. L’albumine reprend alors peut-être
une place dans cette prise en charge. Une autre alternative proposée par certains auteurs est la mise en place d’un
cathéter « en queue de cochon » pour un drainage continu
du liquide d’ascite [232]. Cependant, le risque infectieux
apparaît suffisamment important pour ne pas recommander cette technique en première intention. En conséquence,
c’est la surveillance clinique rapprochée de la tolérance
respiratoire et hémodynamique, des épanchements, du périmètre abdominal, de la diurèse qui va permettre de poser
l’indication de ponctions itératives de liquide d’ascite. Par
analogie avec les recommandations de prise en charge du
SCA [233], la mesure de la pression intravésicale pourrait
être un paramètre supplémentaire pour poser l’indication
de drainage lorsqu’elle est supérieure à 20 mmHg. Enfin,
l’indication d’une ponction évacuatrice d’ascite peut reposer sur une hémoconcentration sévère par aggravation d’un
troisième secteur.
Traitements médicamenteux
Quelques
traitements
médicamenteux
tels
que
l’indométhacine, les anti-cox2 [169], la cabergoline
Le syndrome d’hyperstimulation ovarienne
(Dostinex® ) [234], les antihistaminiques et les inhibiteurs
de l’enzyme de conversion (IEC) ont été administrés dans
des études animales ou dans des études cliniques non randomisées ou rétrospectives. Il n’existe pas, à l’heure actuelle,
d’indication fiable de ces molécules dans la prise en
charge thérapeutique de ce syndrome en l’absence d’essai
randomisé. De plus, les IEC et les anti-inflammatoires non
stéroïdiens sont contre-indiqués pendant la grossesse et
chez les patientes en insuffisance rénale surtout si elle est
fonctionnelle.
La chirurgie
La place de la chirurgie est très limitée dans ce syndrome.
Seuls les rares cas de rupture de kyste de l’ovaire hémorragique ou de torsion de l’ovaire relèvent de la chirurgie. Il est
nécessaire d’assurer une hémostase soigneuse de ces ovaires
particulièrement fragiles et saignant au contact [227].
Évolution
Dans la majorité des cas, le syndrome s’estompe avec le
déclin du taux d’hCG plasmatiques et les patientes quittent,
en général, l’hôpital vers le septième—huitième jour en
l’absence de complications. Les OHSS sévères peuvent se
prolonger jusqu’à deux à quatre semaines, principalement
en cas de grossesse, surtout si elle est multiple.
Conclusion
Il existe des facteurs de risque d’OHSS qui correspondent à
des patientes ayant de bonnes réserves ovariennes, voire
excessives, comme dans le cadre des PCOS. Toutefois,
l’OHSS survient dans 33 % des cas sans facteur de risque
identifié. Il convient donc de monitorer avec prudence les
stimulations ovariennes dans le cadre de la FIV avec des
doses adaptées aux patientes et de ne pas oublier que
la meilleure prévention reste l’annulation du cycle sans
déclenchement. L’OHSS est une complication grave de la
PMA pouvant engager le pronostic vital, aussi la prise en
charge et la surveillance doivent être rigoureuses, adaptées à chaque stade de la maladie. La grande variabilité
des OHSS rend la réalisation de recommandations pour la
pratique clinique difficile et il convient donc d’adapter la
prise en charge en fonction de chaque patiente.
Déclaration d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en
relation avec cet article.
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