Le Comité du patrimoine mondial,
1. Ayant examiné les documents WHC-12/36.COM/8B et WHC-12/36.COM/INF.8B1,
2. Inscrit Rio de Janeiro, paysages cariocas entre les montagnes et la mer, Brésil, sur la Liste du patrimoine mondial sur la base des critères (v) et (vi) ;
3. Adopte la Déclaration de valeur universelle exceptionnelle provisoire suivante :
Brève synthèse
La ville de Rio de Janeiro, modelée par son interaction avec les montagnes et la mer, est située dans l’étroite bande de plaine alluviale qui s’étend entre la baie de Guanabara et l’océan Atlantique. C’est un paysage exceptionnel et spectaculaire, ponctué par une série de montagnes boisées surplombant la ville, qui s’élèvent jusqu’à 1 021 m d’altitude pour le plus haut pic du massif de Tijuca, et descendent en cascade jusqu’à la côte où les formes coniques abruptes du Pain de sucre (Pão de Açúcar), d’Urca, de Cara de Cão et de Corcovado encadrent les larges étendues de la baie de Guanabara, abritant Rio de Janeiro de l’océan Atlantique.
Niché entre ces montagnes et la baie de Guanabara, le paysage urbain, façonné par d’importants événements historiques et influencé par des cultures diverses, est perçu comme étant d’une grande beauté et célébré par les arts, en particulier la peinture et la poésie.
Le bien comprend la totalité des éléments naturels et structurels essentiels qui ont régi et inspiré le développement de la ville. Il s’étend des sommets montagneux du parc national de Tijuca avec sa forêt Atlantique restaurée, et descend vers la mer en passant par les jardins botaniques, créés en 1808, le mont Corcovado, avec la statue du Christ Rédempteur, et la chaîne de collines abruptes verdoyantes et spectaculaires, comme les pics du Pain de sucre, de Pico, de Leme et de Glória, autour de la baie de Guanabara, ou encore les vastes paysages aménagés sur des terres gagnées sur la mer le long de la baie de Copacabana qui, avec le parc du Flamengo et d’autres parcs, ont contribué à la culture de vie en plein air de la ville.
Les délimitations incluent tous les plus beaux points de vue qui permettent d’apprécier la manière dont la nature a été façonnée pour devenir un élément culturel important de la ville ainsi que le système des fortifications historiques de la baie de Guanabara qui a donné à Rio de Janeiro son caractère de ville fortifiée.
Le tissu bâti le plus dense de la ville couvre les étroites bandes de terre alluviale entre les montagnes et la mer, sous forme de groupes irréguliers de grands blocs blancs offrant un contraste frappant avec la verte végétation des montagnes et le bleu de la mer. Aucun de ces bâtiments n’est inclus dans la zone proposée pour inscription ; en revanche, bon nombre d’entre eux sont inclus dans la zone tampon.
Critère (v) : Le développement de la ville de Rio de Janeiro a été façonné par la fusion créative entre nature et culture. Cet échange n’est pas le fruit de processus traditionnels persistants mais plutôt le reflet d’un échange d’idées scientifiques, environnementales et paysagères qui a conduit à des créations innovantes à grande échelle au cœur de la ville pendant un peu plus d’un siècle. Ces processus ont créé un paysage urbain dont la beauté a fait l’admiration de nombreux auteurs et voyageurs et qui a façonné la culture de la ville.
Critère (vi) : Le paysage spectaculaire de Rio de Janeiro a inspiré de nombreuses formes d’art, littéraire, poétique et musical. Il ne fait aucun doute que les images de Rio, qui montrent la baie, le Pain de sucre et la statue du Christ Rédempteur, sont un important facteur de reconnaissance mondiale et ce depuis le milieu du XIXe siècle. Cette notoriété peut être positive comme négative. Dans le cas de Rio, l’image qui a été projetée et qui continue de prévaloir est celle d’un lieu d’une beauté incroyable pour l’une des plus grandes villes du monde.
Intégrité
Le bien comprend tous les éléments naturels et structurels essentiels qui ont régi et inspiré le développement de la ville de Rio, des sommets des montagnes de Tijuca jusqu’à la mer en passant par la chaîne de collines abruptes verdoyantes et spectaculaires autour de la baie de Guanabara et les vastes paysages aménagés des terres récupérées sur l’océan autour de la baie, qui ont contribué à la culture de la vie en plein air de la ville.
Aucun de ces éléments n’est menacé, bien que l’interface entre ces éléments naturels et la ville bâtie soit vulnérable aux pressions d’urbanisme, que les pics les plus hauts pâtissent de l’implantation d’une profusion d’antennes et que le lagon Rodrigo da Freitas (dans la zone tampon) et la mer subissent une certaine pollution de l’eau.
Authenticité
Les montagnes et les grands espaces verts du parc national de Tijuca, avec le Corcovado et les collines autour de la baie de Guanabara, associent toujours forêts et points de vue comme à l’époque de la colonisation, donnant accès depuis ces hauteurs à des panoramas sur la ville qui démontrent très clairement l’extraordinaire fusion entre culture et nature qui a présidé à son développement.
Les jardins botaniques ont conservé leur dessin néo-classique d’origine, avec leurs alignements particuliers, tandis que les forteresses entretiennent le souvenir des établissements portugais décrits par les voyageurs qui empruntaient les liaisons maritimes à destination de Rio.
Les paysages dessinés par Burle Marx autour de la quasi-totalité de la baie de Guanabara, dont le parc du Flamengo et le réagencement de la plage de Copacabana, conservent intégralement la morphologie paysagère de leur conception d’origine et apportent toujours de grands avantages sociaux à la ville.
Cependant, dans certains cas, des éléments du paysage aménagé sont vulnérables à des changements progressifs – le pavage et les plantations le long de Copacabana et le parc de Flamengo, où des arbres et des mosaïques disparus ont besoin d’être remplacés, et le Jardin botanique, où les palmiers impériaux le long de l’avenue principale sont morts et doivent être remplacés.
Éléments requis en matière de protection et de gestion
Le parc national de Tijuca a été créé par des décrets fédéraux en 1961. L’Institut de recherche du Jardin botanique a été créé par une autarchie fédérale sous les auspices du ministère de l’Environnement en vertu d’une loi de 2001 qui établit ses statuts juridiques, ses objectifs, sa structure de gestion et d’administration. Le Pão de Açúcar (Pain de Sucre) et l’Urca ont été déclarés monuments nationaux aux termes de la loi n° 9.985 du 18 juin 2000.
L’Institut du patrimoine historique et artistique national (IPHAN) et ses prédécesseurs ont catalogué, depuis 1938, l’intégralité des sites et des structures individuelles définies pour la protection nationale. Ils comprennent aussi bien le parc national de Tijuca et les jardins botaniques que le manoir du Parque Lage, le parc du Flamengo, les collines Cara de Cão, Babilônia, Urca, Pain de Sucre, Dois Irmãos et Pedra da Gávea, le fort de São João, le fort de Santa Cruz et le paysage urbain des plages de Leme, Copacabana, Ipanema et Leblon.
Le décret de l’IPHAN n°127 du 30 avril 2009 a établi la désignation de paysage culturel brésilien. Le Comité exécutif pour la proposition d’inscription a demandé en mai 2009 un examen par l’IPHAN de la désignation du paysage de Rio de Janeiro en tant que paysage culturel brésilien.
Au XXe siècle, la hauteur des bâtiments a été réglementée par la création d’une norme interdisant de construire sur plus de douze étages. Dans les années 1970, des instruments d’urbanisme ont été adoptés pour contrôler l’expansion urbaine en direction des collines, afin de protéger les zones de conservation naturelle, et ratifiés en 1976. De ce fait, la construction est interdite au-delà de 60 mètres au-dessus du niveau de la mer dans les environs du Pão de Açúcar (Pain de Sucre) et à Urca et au-delà de 100 mètres au-dessus du niveau de la mer sur les autres collines de la ville, considérées comme des zones de réserve forestière.
Un nouveau Plan directeur pour le développement urbain durable de la Ville de Rio de Janeiro est entré en vigueur en février 2011. Il déclare que le paysage de Rio de Janeiro représente l’atout le plus précieux de la ville.
Le Plan établit les principes et les directives en faveur d’un développement durable comme un moyen de promouvoir le développement économique, l’équité sociale et la préservation de l’environnement et du paysage ; l’utilisation durable de l’environnement, du paysage et du patrimoine naturel, culturel, historique et archéologique dans le développement et la gestion de la ville ; et le conditionnement de l’occupation urbaine en tenant compte de la préservation de l’identité et des paysages culturels de la ville.
Le Plan prévoit également que l’utilisation et l’occupation des sols soient règlementées par des limitations prescrites en termes de densité, d’activités économiques, du droit de profiter du paysage naturel de la ville et de la qualité de l’environnement urbain. La hauteur des immeubles sera définie par la préservation et la conservation de l’intégrité du paysage naturel.
La mise en œuvre du Plan doit progresser grâce à l’adoption de ses mesures dans les différents secteurs de la ville, y compris par des lois spécifiques.
La protection offerte par la zone tampon nécessite d’être renforcée par des recommandations plus strictes en matière de préservation et, si le Comité de gestion le préconise, par des paramètres plus restrictifs en termes d’utilisation et d’occupation des sols. La zone tampon doit assurer la protection des vues et du cadre d’ensemble du bien ainsi que l’interface avec le bien.
Tous les secteurs de la zone tampon doivent être désignés comme des Aires de protection de l’environnement culturel (APEC) et des plans de gestion de chaque APEC doivent être élaborés en fonction des clarifications à apporter dans ce qui est à gérer à l’intérieur de la zone tampon.
Un Comité de gestion chargé de coordonner la gestion des sites en série a été créé par le décret n°464 du 29 décembre 2011 afin de mettre en place et produire un plan de gestion global du bien. Le Comité de gestion, présidé par l’IPHAN, rassemble les acteurs clés aux niveaux fédéral, étatique et municipal, qui interviennent dans la gestion des différents secteurs du bien. Le Comité va déterminer la structure de gestion commune et développer le plan de gestion commun pour le bien et sa zone tampon.
Le Comité de gestion veillera à l’adoption de mesures de protection supplémentaires possibles des sites, qui seront appliquées grâce à des structures de préservation renforcées.
Un plan de gestion est à finaliser pour le bien et sa zone tampon qui est exposée à des menaces potentielles et d’éventuelles lacunes de protection de manière à pouvoir réaliser la préservation de l’ensemble du paysage culturel.
À la base du plan de gestion il convient de mettre en place un système de définition, d’enregistrement et de recensement des principales composantes du paysage culturel global, et de définir des indicateurs de suivi correspondant aux attributs de la valeur universelle exceptionnelle.
La gestion du bien doit traiter le problème de la pollution de l’eau autour de la baie de Guanabara par une action de suivi positive. Afin de conserver à la fois la longueur de vue et les particularités individuelles du bien il est nécessaire de mettre au point un plan de conservation global ou une approche de conservation du bien et des projets de conservation de plusieurs sites afin de conserver leurs particularités importantes.
4. Recommande à l’État partie de :
a) mettre en place un cadre de gestion global pour tous les éléments du bien en série, qui rassemble la gestion des sites constitutifs et impliquant toutes les parties prenantes essentielles, conformément aux exigences des Orientations, paragraphe 114,
b) compléter le plan de gestion du bien,
c) fournir des détails sur la manière dont la zone tampon va être protégée et géré,
d) mettre en place un système pour définir, enregistrer et inventorier les éléments essentiels du paysage culturel global,
e) définir les indicateurs de suivi relatifs aux attributs de la valeur universelle exceptionnelle,
f) fournir plus de détails sur les plans pour traiter la pollution de l'eau,
g) développer un plan de conservation global ou une approche de la conservation globale pour le bien ;
5. Demande à l’État partie de soumettre au Centre du patrimoine mondial un rapport sur les recommandations ci-dessus, en particulier sur la mise en œuvre du Plan de gestion du bien, d’ici le 1er février 2014, pour examen par le Comité du patrimoine mondial à sa 38e session en 2014.