L'oeuvre de Gaston Bachelard a toujours été présentée par ses exégètes comme double, duelle, voir... more L'oeuvre de Gaston Bachelard a toujours été présentée par ses exégètes comme double, duelle, voire schizomorphe. Les propos même de Bachelard n'ont pas manqué de
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2011
Peut-on considérer Bachelard comme un disciple ou un émule de Novalis ? A première vue, rien n'es... more Peut-on considérer Bachelard comme un disciple ou un émule de Novalis ? A première vue, rien n'est moins sûr. La pensée poétique et le style mystique d'un Novalis, ainsi que l'« idéalisme magique » qu'il professe, semblent peu compatibles avec les valeurs rationnelles de l'engagement rationaliste qu'exige le travail de l'historien et du philosophe des sciences, dont Bachelard endossa l'austère discipline pendant une grande partie de sa vie, que ce soit en tant que chercheur ou en tant qu'enseignant, tâches auxquelles il accordait le plus grand sérieux. De ce point de vue, le prisme de la réflexion épistémologique devrait réserver un sort peu enviable à la pensée romantique d'un Novalis, dont le destin sous la plume bachelardienne devrait être corrélatif à celui de l'alchimie. Dans une page suggestive, Bachelard dit en effet de Novalis qu'il représente le « grand psychologue de l'alchimie ». Or la critique de l'alchimie comme obstacle épistémologique sera récurrente dans les écrits épistémologiques de Bachelard, de La psychanalyse du feu de 1938 au Matérialisme rationnel de 1953. Si la pensée bachelardienne connaît bien des évolutions et des inflexions tout au long de son développement, on ne saurait pour autant en minimiser certaines constantes, qui semblent nous révéler des convictions profondes chez le philosophe champenois. Tel semble être le cas de la réception de l'alchimie ou de l'idéalisme romantique. Par ailleurs, les critiques récurrentes que l'épistémologie bachelardienne adresse, dans l'ordre du savoir objectif, aux philosophes de la nature – Hegel et Schelling en tête – et par extension aux représentants du romantisme allemand de façon générale, devraient nous fournir de sérieuses raisons pour renoncer à toute enquête qui se donnerait pour tâche de voir dans le poète inspiré qu'est Novalis, à l'« esprit expansif », le maître à penser ou l'illustre prédécesseur du rationaliste militant que demeurera toujours Bachelard, animé par une ironie autocritique et malveillante, « pour lequel l'antipathie préalable est une saine précaution ». Et pourtant, d'un autre côté, on ne peut manquer de constater que la poétique romantique constitue bien une source d'inspiration récurrente, pour la philosophie bachelardienne de la poésie, cette enquête continuée en direction des productions littéraires et poétiques de l'imagination, que Bachelard développera et approfondira en parallèle de son œuvre de philosophe des sciences. Cela a déjà été souligné à différentes reprises et par de nombreux exégètes. Mais il ne s'agit là, malheureusement, que de brefs passages, pour suggestifs et éclairant soient-ils, qui se contentent de rappeler ici et là, de façon épisodique ou circonstancielle, les relations complexes que Bachelard entretient avec les œuvres des romantiques allemands, surtout les poètes. De ce point de vue, il y a là un véritable manque dans le corpus de l'herméneutique bachelardienne et tout un travail de recherche approfondi et complet, documenté et informé, devrait être consacré à la réception, voire à au retentissement, de la pensée romantique chez Bachelard. C'est à un tel travail que contribue la présente étude
Avant tout, il faut savoir poser des problèmes. Et quoi qu'on en dise […] les problèmes ne se pos... more Avant tout, il faut savoir poser des problèmes. Et quoi qu'on en dise […] les problèmes ne se posent pas d'eux-mêmes. Gaston Bachelard 1 Nous proposons, dans le cadre de cette courte étude, des éléments d'analyse et des pistes de réflexion sur la pratique de la problématisation en classe de terminale, et ses difficultés. Partant du constat de la centralité des problèmes dans le programme officiel, fixant les finalités de l'enseignement de la philosophie au lycée, nous proposerons d'examiner les obstacles qui rendent cet aspect du travail de l'enseignant… problématique ! Au-delà de la formule et du jeu de mot, il s'agit plus sérieusement d'interroger la possibilité d'enseigner la problématisation elle-même, en partant du postulat que celle-ci désigne la capacité à identifier et à expliciter le caractère problématique d'une notion, d'un sujet ou d'un texte, et non la connaissance factuelle ou thématique des problèmes philosophiques majeurs, issus de la tradition. C'est ce qui explique la référence à peine masquée du titre de cet article à la question de Socrate concernant la vertu, mais en la transposant ici, voire en la détournant quelque peu pour les besoins de l'enquête, à la problématisation : si celle-ci dépend d'un exercice pratique et d'un usage concret, non pas d'une connaissance théorique et abstraite, peut-on vraiment l'enseigner, en supposant qu'on la possède déjà soi-même ? Dans quelle mesure le professeur de philosophie peut-il réellement transmettre le sens du problème à ses élèves ? Peut-on trouver une méthode fiable, simple à acquérir et facilement reproductible, pour poser des problèmes ? Suffit-il de suivre mécaniquement des règles techniques et de les appliquer correctement, comme on applique les instructions d'un protocole ou d'un rituel ? Ou faut-il en passer par un long et patient travail, fait d'exercices répétés, d'essais et d'erreurs rectifiés, permettant de s'incorporer le sens du problème, de savoir poser des problèmes, de problématiser les objets étudiés ? Voilà les questions directrices qui animent et qui orientent notre propos, dont l'enjeu principal est de mettre en évidence les conditions mais aussi d'expliciter les difficultés que peut rencontrer l'enseignant en philosophie quand il s'efforce de faire comprendre aux élèves de classe de terminale, que ce soit en série générale ou en série technologique, en quoi consiste problématiser, sans se limiter au seul cas de la dissertation et de l'analyse d'un sujet d'examen. Avant de passer à l'examen détaillé de nos hypothèses et arguments, un dernier postulat mérite d'être souligné, qui permet de préciser le sens et l'esprit de notre discours : les difficultés liées à l'acquisition du sens du problème en terminale ne dépendent pas uniquement des qualités et compétences de l'enseignant, ni même des capacités intellectuelles et bonnes dispositions des élèves. Il n'est donc pas question ici de pointer des « fautes » et des insuffisances individuelles. Ces deux aspects, cela va sans dire, interviennent, sachant que la pratique permet à l'enseignant d'inventer de nouvelles « façons de faire », et que les élèves peuvent progresser. Mais nous préférons insister ici sur des aspects structurels du problème, qui sont liés à une situation : le contexte scolaire et les orientations données à l'enseignement par le programme lui-même.
Imaginaire et praxis. Autour de Gaston Bachelard Type de publication: Revue Directeurs d'ouvrage:... more Imaginaire et praxis. Autour de Gaston Bachelard Type de publication: Revue Directeurs d'ouvrage: Hieronimus (Gilles), Lamy (Julien) Résumé: Éthique, politique, religions est une revue semestrielle de l'Institut de recherches philosophiques de Lyon (université Lyon 3), centrée sur l'étude philosophique des sociétés contemporaines et de leur généalogie. Nombre de pages: 191
Pour un historien des sciences une vérité trouvée est la conclusion d'une histoire, elle est le t... more Pour un historien des sciences une vérité trouvée est la conclusion d'une histoire, elle est le terme d'une ligne particulière de recherches. Gaston Bachelard 1
par Julien Lamy I raccomandati / Los recomendados/ Les récommendés/ Highly recommended Bachelard-... more par Julien Lamy I raccomandati / Los recomendados/ Les récommendés/ Highly recommended Bachelard-16/10/2012 I raccomandati / Los recomendados/ Les récommendés/ Highly recommended Bachelard-16/10/2012 257 ailleurs Bertrand Russell, si l'enjeu pour chaque homme est de rester amoureux et poète sans devenir fou, Bachelard est sans aucun doute un exemple inspirant de vigueur et de sincérité, de courage et de sympathie. La lecture de son oeuvre ouverte, aux ramifications plurielles, aux nuances subtiles, aux timbres délicats, constitue sûrement pour nous un fil d'Ariane pour s'orienter, et dans la pensée, et dans la vie. L'homme contemporain apprendra en suivant ses lignes de force à être amoureux et poète, sans risquer la folie… car la raison veille aux portes du rêve.
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2017
3 L'eau est un véritable élément psychique, un élément qui amasse les images dans nos rêves comme... more 3 L'eau est un véritable élément psychique, un élément qui amasse les images dans nos rêves comme dans nos pensées, un élément qui règne dans notre conscience comme dans notre inconscient, un élément que nous aimons en nous et en dehors de nous.
International audienceDiscours de soutenance de la thèse de doctorat intitulée "Le pluralism... more International audienceDiscours de soutenance de la thèse de doctorat intitulée "Le pluralisme cohérent de la philosophie de Gaston Bachelard", prononcé à l'Université de Lyon le mardi 14 octobre 2014 à 14h30, devant un jury composé de Robert Damien, Michel Fabre, Jean Gayon, Jean-Philippe Pierron, Frédéric Worms, et Jean-Jacques Wunenburger
L'oeuvre de Gaston Bachelard a toujours été présentée par ses exégètes comme double, duelle, voir... more L'oeuvre de Gaston Bachelard a toujours été présentée par ses exégètes comme double, duelle, voire schizomorphe. Les propos même de Bachelard n'ont pas manqué de
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2011
Peut-on considérer Bachelard comme un disciple ou un émule de Novalis ? A première vue, rien n'es... more Peut-on considérer Bachelard comme un disciple ou un émule de Novalis ? A première vue, rien n'est moins sûr. La pensée poétique et le style mystique d'un Novalis, ainsi que l'« idéalisme magique » qu'il professe, semblent peu compatibles avec les valeurs rationnelles de l'engagement rationaliste qu'exige le travail de l'historien et du philosophe des sciences, dont Bachelard endossa l'austère discipline pendant une grande partie de sa vie, que ce soit en tant que chercheur ou en tant qu'enseignant, tâches auxquelles il accordait le plus grand sérieux. De ce point de vue, le prisme de la réflexion épistémologique devrait réserver un sort peu enviable à la pensée romantique d'un Novalis, dont le destin sous la plume bachelardienne devrait être corrélatif à celui de l'alchimie. Dans une page suggestive, Bachelard dit en effet de Novalis qu'il représente le « grand psychologue de l'alchimie ». Or la critique de l'alchimie comme obstacle épistémologique sera récurrente dans les écrits épistémologiques de Bachelard, de La psychanalyse du feu de 1938 au Matérialisme rationnel de 1953. Si la pensée bachelardienne connaît bien des évolutions et des inflexions tout au long de son développement, on ne saurait pour autant en minimiser certaines constantes, qui semblent nous révéler des convictions profondes chez le philosophe champenois. Tel semble être le cas de la réception de l'alchimie ou de l'idéalisme romantique. Par ailleurs, les critiques récurrentes que l'épistémologie bachelardienne adresse, dans l'ordre du savoir objectif, aux philosophes de la nature – Hegel et Schelling en tête – et par extension aux représentants du romantisme allemand de façon générale, devraient nous fournir de sérieuses raisons pour renoncer à toute enquête qui se donnerait pour tâche de voir dans le poète inspiré qu'est Novalis, à l'« esprit expansif », le maître à penser ou l'illustre prédécesseur du rationaliste militant que demeurera toujours Bachelard, animé par une ironie autocritique et malveillante, « pour lequel l'antipathie préalable est une saine précaution ». Et pourtant, d'un autre côté, on ne peut manquer de constater que la poétique romantique constitue bien une source d'inspiration récurrente, pour la philosophie bachelardienne de la poésie, cette enquête continuée en direction des productions littéraires et poétiques de l'imagination, que Bachelard développera et approfondira en parallèle de son œuvre de philosophe des sciences. Cela a déjà été souligné à différentes reprises et par de nombreux exégètes. Mais il ne s'agit là, malheureusement, que de brefs passages, pour suggestifs et éclairant soient-ils, qui se contentent de rappeler ici et là, de façon épisodique ou circonstancielle, les relations complexes que Bachelard entretient avec les œuvres des romantiques allemands, surtout les poètes. De ce point de vue, il y a là un véritable manque dans le corpus de l'herméneutique bachelardienne et tout un travail de recherche approfondi et complet, documenté et informé, devrait être consacré à la réception, voire à au retentissement, de la pensée romantique chez Bachelard. C'est à un tel travail que contribue la présente étude
Avant tout, il faut savoir poser des problèmes. Et quoi qu'on en dise […] les problèmes ne se pos... more Avant tout, il faut savoir poser des problèmes. Et quoi qu'on en dise […] les problèmes ne se posent pas d'eux-mêmes. Gaston Bachelard 1 Nous proposons, dans le cadre de cette courte étude, des éléments d'analyse et des pistes de réflexion sur la pratique de la problématisation en classe de terminale, et ses difficultés. Partant du constat de la centralité des problèmes dans le programme officiel, fixant les finalités de l'enseignement de la philosophie au lycée, nous proposerons d'examiner les obstacles qui rendent cet aspect du travail de l'enseignant… problématique ! Au-delà de la formule et du jeu de mot, il s'agit plus sérieusement d'interroger la possibilité d'enseigner la problématisation elle-même, en partant du postulat que celle-ci désigne la capacité à identifier et à expliciter le caractère problématique d'une notion, d'un sujet ou d'un texte, et non la connaissance factuelle ou thématique des problèmes philosophiques majeurs, issus de la tradition. C'est ce qui explique la référence à peine masquée du titre de cet article à la question de Socrate concernant la vertu, mais en la transposant ici, voire en la détournant quelque peu pour les besoins de l'enquête, à la problématisation : si celle-ci dépend d'un exercice pratique et d'un usage concret, non pas d'une connaissance théorique et abstraite, peut-on vraiment l'enseigner, en supposant qu'on la possède déjà soi-même ? Dans quelle mesure le professeur de philosophie peut-il réellement transmettre le sens du problème à ses élèves ? Peut-on trouver une méthode fiable, simple à acquérir et facilement reproductible, pour poser des problèmes ? Suffit-il de suivre mécaniquement des règles techniques et de les appliquer correctement, comme on applique les instructions d'un protocole ou d'un rituel ? Ou faut-il en passer par un long et patient travail, fait d'exercices répétés, d'essais et d'erreurs rectifiés, permettant de s'incorporer le sens du problème, de savoir poser des problèmes, de problématiser les objets étudiés ? Voilà les questions directrices qui animent et qui orientent notre propos, dont l'enjeu principal est de mettre en évidence les conditions mais aussi d'expliciter les difficultés que peut rencontrer l'enseignant en philosophie quand il s'efforce de faire comprendre aux élèves de classe de terminale, que ce soit en série générale ou en série technologique, en quoi consiste problématiser, sans se limiter au seul cas de la dissertation et de l'analyse d'un sujet d'examen. Avant de passer à l'examen détaillé de nos hypothèses et arguments, un dernier postulat mérite d'être souligné, qui permet de préciser le sens et l'esprit de notre discours : les difficultés liées à l'acquisition du sens du problème en terminale ne dépendent pas uniquement des qualités et compétences de l'enseignant, ni même des capacités intellectuelles et bonnes dispositions des élèves. Il n'est donc pas question ici de pointer des « fautes » et des insuffisances individuelles. Ces deux aspects, cela va sans dire, interviennent, sachant que la pratique permet à l'enseignant d'inventer de nouvelles « façons de faire », et que les élèves peuvent progresser. Mais nous préférons insister ici sur des aspects structurels du problème, qui sont liés à une situation : le contexte scolaire et les orientations données à l'enseignement par le programme lui-même.
Imaginaire et praxis. Autour de Gaston Bachelard Type de publication: Revue Directeurs d'ouvrage:... more Imaginaire et praxis. Autour de Gaston Bachelard Type de publication: Revue Directeurs d'ouvrage: Hieronimus (Gilles), Lamy (Julien) Résumé: Éthique, politique, religions est une revue semestrielle de l'Institut de recherches philosophiques de Lyon (université Lyon 3), centrée sur l'étude philosophique des sociétés contemporaines et de leur généalogie. Nombre de pages: 191
Pour un historien des sciences une vérité trouvée est la conclusion d'une histoire, elle est le t... more Pour un historien des sciences une vérité trouvée est la conclusion d'une histoire, elle est le terme d'une ligne particulière de recherches. Gaston Bachelard 1
par Julien Lamy I raccomandati / Los recomendados/ Les récommendés/ Highly recommended Bachelard-... more par Julien Lamy I raccomandati / Los recomendados/ Les récommendés/ Highly recommended Bachelard-16/10/2012 I raccomandati / Los recomendados/ Les récommendés/ Highly recommended Bachelard-16/10/2012 257 ailleurs Bertrand Russell, si l'enjeu pour chaque homme est de rester amoureux et poète sans devenir fou, Bachelard est sans aucun doute un exemple inspirant de vigueur et de sincérité, de courage et de sympathie. La lecture de son oeuvre ouverte, aux ramifications plurielles, aux nuances subtiles, aux timbres délicats, constitue sûrement pour nous un fil d'Ariane pour s'orienter, et dans la pensée, et dans la vie. L'homme contemporain apprendra en suivant ses lignes de force à être amoureux et poète, sans risquer la folie… car la raison veille aux portes du rêve.
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2017
3 L'eau est un véritable élément psychique, un élément qui amasse les images dans nos rêves comme... more 3 L'eau est un véritable élément psychique, un élément qui amasse les images dans nos rêves comme dans nos pensées, un élément qui règne dans notre conscience comme dans notre inconscient, un élément que nous aimons en nous et en dehors de nous.
International audienceDiscours de soutenance de la thèse de doctorat intitulée "Le pluralism... more International audienceDiscours de soutenance de la thèse de doctorat intitulée "Le pluralisme cohérent de la philosophie de Gaston Bachelard", prononcé à l'Université de Lyon le mardi 14 octobre 2014 à 14h30, devant un jury composé de Robert Damien, Michel Fabre, Jean Gayon, Jean-Philippe Pierron, Frédéric Worms, et Jean-Jacques Wunenburger
Le Centre pour la Communication Scientifique Directe - HAL - Université Paris Descartes, 2016
Avant tout, il faut savoir poser des problèmes. Et quoi qu'on en dise […] les problèmes ne se pos... more Avant tout, il faut savoir poser des problèmes. Et quoi qu'on en dise […] les problèmes ne se posent pas d'eux-mêmes. Gaston Bachelard 1 Nous proposons, dans le cadre de cette courte étude, des éléments d'analyse et des pistes de réflexion sur la pratique de la problématisation en classe de terminale, et ses difficultés. Partant du constat de la centralité des problèmes dans le programme officiel, fixant les finalités de l'enseignement de la philosophie au lycée, nous proposerons d'examiner les obstacles qui rendent cet aspect du travail de l'enseignant… problématique ! Au-delà de la formule et du jeu de mot, il s'agit plus sérieusement d'interroger la possibilité d'enseigner la problématisation elle-même, en partant du postulat que celle-ci désigne la capacité à identifier et à expliciter le caractère problématique d'une notion, d'un sujet ou d'un texte, et non la connaissance factuelle ou thématique des problèmes philosophiques majeurs, issus de la tradition. C'est ce qui explique la référence à peine masquée du titre de cet article à la question de Socrate concernant la vertu, mais en la transposant ici, voire en la détournant quelque peu pour les besoins de l'enquête, à la problématisation : si celle-ci dépend d'un exercice pratique et d'un usage concret, non pas d'une connaissance théorique et abstraite, peut-on vraiment l'enseigner, en supposant qu'on la possède déjà soi-même ? Dans quelle mesure le professeur de philosophie peut-il réellement transmettre le sens du problème à ses élèves ? Peut-on trouver une méthode fiable, simple à acquérir et facilement reproductible, pour poser des problèmes ? Suffit-il de suivre mécaniquement des règles techniques et de les appliquer correctement, comme on applique les instructions d'un protocole ou d'un rituel ? Ou faut-il en passer par un long et patient travail, fait d'exercices répétés, d'essais et d'erreurs rectifiés, permettant de s'incorporer le sens du problème, de savoir poser des problèmes, de problématiser les objets étudiés ? Voilà les questions directrices qui animent et qui orientent notre propos, dont l'enjeu principal est de mettre en évidence les conditions mais aussi d'expliciter les difficultés que peut rencontrer l'enseignant en philosophie quand il s'efforce de faire comprendre aux élèves de classe de terminale, que ce soit en série générale ou en série technologique, en quoi consiste problématiser, sans se limiter au seul cas de la dissertation et de l'analyse d'un sujet d'examen. Avant de passer à l'examen détaillé de nos hypothèses et arguments, un dernier postulat mérite d'être souligné, qui permet de préciser le sens et l'esprit de notre discours : les difficultés liées à l'acquisition du sens du problème en terminale ne dépendent pas uniquement des qualités et compétences de l'enseignant, ni même des capacités intellectuelles et bonnes dispositions des élèves. Il n'est donc pas question ici de pointer des « fautes » et des insuffisances individuelles. Ces deux aspects, cela va sans dire, interviennent, sachant que la pratique permet à l'enseignant d'inventer de nouvelles « façons de faire », et que les élèves peuvent progresser. Mais nous préférons insister ici sur des aspects structurels du problème, qui sont liés à une situation : le contexte scolaire et les orientations données à l'enseignement par le programme lui-même.
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