Tests d'Evaluations Addictions

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Université de Poitiers

Faculté de Médecine et Pharmacie

ANNEE 2012 Thèse n° XXXX

THESE
POUR LE DIPLOME D'ETAT
DE DOCTEUR EN MEDECINE
(décret du 16 janvier 2004)

Présentée et soutenue publiquement


le 2 octobre 2012 à Poitiers
par Marie-Laure DANIEL

Comment évaluer le craving


chez les sujets alcoolodépendants ?

Composition du Jury

Président : Monsieur le Professeur Jean-Louis SENON

Membres : Monsieur le Professeur Marc AURIACOMBE


Monsieur le Docteur David BELIN
Monsieur le Professeur Ludovic GICQUEL
Monsieur le Docteur Nicolas VIBERT

Directeur de thèse : Monsieur le Docteur Nematollah JAAFARI


2
3
Je témoigne ma profonde reconnaissance au Président du jury, le Professeur Jean-Louis
Senon, et aux membres du jury, le Professeur Marc Auriacombe, le Docteur David Belin, le
Professeur Ludovic Gicquel, le Docteur Nicolas Vibert, ainsi qu’à mon directeur de thèse, le Docteur
Nematollah Jaafari, pour m’avoir fait l’honneur d’accepter de juger mon travail.

Dans le cadre de cette étude, je remercie David Belin qui est à l’origine des hypothèses qui l’ont
rendue possible, Nematollah Jaafari qui m’a accordé sa confiance et m’a témoigné son soutien en
acceptant de l’encadrer, ainsi que Nicolas Vibert et Julien Dampuré qui y ont contribué tant par des
connaissances précises que par des discussions riches.

J’exprime ma reconnaissance, pour leur participation active et leur disponibilité, au Docteur


Laurence Pérault et au Docteur Jean-Pierre Marnay, ainsi qu’à l’équipe de l’unité Paul Cézanne. Je
remercie pour leur aide le Docteur Mickaël Bacconnier, Christelle Boucher et l’équipe de l’unité
Calliope.

Je souhaite adresser toute ma gratitude à Aude Belin-Rauscent dont l’engagement,


l’intelligence et la rigueur dans chaque acte du quotidien sont un plaisir et un bonheur. Je la remercie
surtout pour m’avoir accordé son amitié ô combien précieuse, dont je veux me montrer digne.

J’exprime mon admiration et ma reconnaissance profondes à David Belin, qui par sa force, ses
qualités humaines, l’exigence et le respect qu’il a pour chacun, le soutien désintéressé qu’il apporte à
chacun, sait guider et fédérer vers des buts communs – qui, pour moi, ont changé ma vie. Il éveille
malgré lui des pensées whitmaniennes : "O Captain! My Captain!".

Mes pensées aimantes vont à Thérèse Daniel-Andréani dont le courage et le soutien


indéfectible m’ont été si indispensables. Forza.

Je remercie Naïs Boucain qui a su être là, toujours, de façon simple et sereine, sans faillir
malgré l’éloignement, ainsi que Pauline Stenger et Elodie Glandier, et l’ensemble de ma famille et de
mes amis.

Mes remerciements vont aux équipes avec lesquelles j’ai eu la chance de travailler, à Paris,
Bordeaux, La Rochelle, Poitiers et Fort-de-France. Je pense tout spécialement à l’équipe actuelle :
Emilie Dugast, Mickaël Puaud, Nathalie Vanhille, Marine Simon, Solène Ansquer, Eric Ducret
(l’homme qui, avec une macro, peut vous sauver la vie). Et à ceux qui, par leur passage, ont contribué
à de belles aventures.

J’exprime une reconnaissance particulière à Pierre Babilliot qui, par sa générosité et sa bonne
humeur, m’a été d’un grand soutien. Je remercie bien sûr ceux qui lisent leurs mails à quatre heures
du matin, et qui encouragent dans les dernières lignes droites, en somme the happy few qui savent
ce que tout cela représente.

4
Sommaire
Introduction .........................................................................................7
Méthodes .............................................................................................21
Déroulement ..................................................................................21
Participants ....................................................................................21
Vue d’ensemble de la procédure ......................................................22
Mesures cliniques et test psychotechnique ........................................23
Evaluation diagnostique ................................................................25
Symptômes dépressifs .................................................................26

! Inventaire de dépression de Beck (version abrégée) .............................26


Anxiété ...................................................................................................28
! Inventaire d'anxiété état-trait (version Y) .............................................28
Impulsivité ..............................................................................................28
! Echelle d’impulsivité de Barratt (version 11) ........................................28
Craving ..................................................................................................31
! Echelle de comportement et cognitions vis-à-vis de l’alcool ......................31
! Echelle visuelle analogique de craving ...................................................33
Insight..............................................................................................................33
! Echelle d’insight pour l’alcoolisme de Hanil .............................................33
Consommation alcoolique........................................................................34
! Questionnaire AUDIT............................................................................34
Dépendance nicotinique ..........................................................................35
! Test de dépendance nicotinique de Fagerström ......................................35
Test psychotechnique ..............................................................................35
! Test de latéralité manuelle d’Edinburgh ..................................................35

Tâche informatisée .........................................................................35


Principe ..................................................................................................35
Paradigme d’amorçage subliminal masqué ...............................................39
Sélection des stimuli ................................................................................42
Tâche de validation .................................................................................46
Analyses statistiques .......................................................................49

5
Résultats préliminaires ........................................................................50
Echantillons ....................................................................................50
Il n’y a pas de visibilité des stimuli subliminaux masqués dans les
conditions de l’étude ...............................................................................50
Les réponses sont plus lentes quand elles portent sur des pseudo-
mots .....................................................................................................52
Les réponses sont plus lentes chez les patients .................................53
L’effet d’amorçage est mis en évidence avec les mots de nature
appétitive...............................................................................................54
Patients et témoins ne diffèrent pas en termes de performance ..........55
Analyses dimensionnelles ...............................................................56
Discussion...........................................................................................60
Références ..........................................................................................65
Résumé ...............................................................................................80

6
Introduction
Deinde inter appetitum et cupiditatem nulla est differentia nisi quod cupiditas
ad homines plerumque referatur quatenus sui appetitus sunt conscii et
propterea sic definiri potest nempe cupiditas est appetitus cum ejusdem
conscientia. (Spinoza, Ethica)

Les addictions aux substances sont des comportements de consommation de produits


psychoactifs assortis de conséquences négatives, et face auxquels le sujet perd une partie
de sa liberté (Lejoyeux, 2009). Ce qui caractérise la transition vers l’addiction est la mise en
place d’un usage compulsif de la drogue, au détriment des autres activités (O’Brien et al.,
2006; Saunders, 2006; Martin et al., 2008).

La restriction du registre comportemental du sujet aux seules occupations associées à la


drogue s’accompagne de répercussions néfastes. Celles-ci sont durables, parfois
irréversibles – ce d’autant que cette forme de « centration » caractéristique de l’addiction peut
s’établir à des moments critiques de la vie, par exemple à des étapes essentielles du
développement, lors de l’adolescence ou lors de l’accès à l’âge adulte (Spear, 2011; Lopez et
al., 2009). En résultent des échecs scolaires, un défaut d’intégration sociale.

Certes les études épidémiologiques montrent que seule une minorité d’usagers de
drogue développe une addiction. Cependant, il s’agit in fine d’une population importante en
nombre, qui présente des problèmes médicaux et sociaux considérables (Uhl & Grow, 2004;
Nutt et al., 2007). Ce qui, dans ce contexte, est devenu l’objet de politiques de santé publique
s’avère rejoindre de fait des préoccupations sociales prégnantes, autour de la
consommation, de la relation de dépendance, des modèles contemporains de subjectivation
– jusqu’à la conception de l’addiction comme forme de dépendance avec « désindividuation
» dans une société addictive selon Stiegler (2004).

En se référant aux évolutions actuelles des nomenclatures psychiatriques (Maddux &


Desmond, 2000; O’Brien et al., 2006, 2011; Miller & Holden, 2010), on utilise le terme «
addiction » à la place du terme « dépendance », qui figure encore dans les manuels
diagnostiques internationaux, le Diagnostic and Statistical Manual (DSM) et la Classification
Internationale des Maladies (CIM ; en anglais, International Classification of Diseases, ICD).
Par extension, est acceptée la dénomination « addict », introduite dans le dictionnaire
français pour désigner le sujet dépendant.

D’autres éléments dans le vocable propre aux addictions font discussion. En particulier,
certaines manifestations cliniques présentes chez les sujets addicts sont qualifiées
7
d’obsessions, de compulsions, ou de craving. Il convient d’identifier ce à quoi renvoient ces
termes en psychiatrie, et de les discerner les uns des autres (Kozlowski & Wilkinson, 1987;
Goodman, 1990; Heyman, 1996; Heather, 1998; Orford, 2001; Foddy & Savulescu, 2006;
Hyman, 2007; Redish et al., 2008). Par exemple, le rôle de l’objet et le décours temporel du
symptôme diffèrent certainement dans le craving et dans l’obsession ; ou encore le concept
de compulsion est à interroger au regard des distinctions quant à la nature de la récompense
chez le sujet compulsif en général et chez le sujet addict en particulier – dès 1955, Louis
Lasagna et son équipe ont mené une étude examinant l’impact de l’histoire antérieure de
prise de drogue sur le vécu subjectif des effets des opioïdes.
Dans tous les cas, on retrouve une notion fondamentale clairement associée à
l’addiction : le sujet paraît avoir perdu le contrôle sur des pulsions qui le poussent de façon
récurrente à consommer la drogue. Il existe, entre certaines de ses résolutions, certains de
ses désirs d’une part, et ses actes ou autres désirs d’autre part, une rupture, un conflit interne
(McLellan et al., 2000; Bechara, 2005; Kalivas et al., 2005; Koob, 2006; Hyman, 2007;
Goodman, 2008; Martin et al., 2008; Redish et al., 2008).
L’alcoolodépendance est la forme la plus sévère, et la plus anciennement identifiée, parmi
les mésusages d’alcool. Les classifications actuelles, catégorielles, décrivent parallèlement
l’usage à risque, les consommations à problème et l’abus (DSM) ou usage nocif (CIM)
(Figure 1).

Elevée Elevée
alcooliques »
« maladies

Dépendance
Mésusages
Sévérité

Abus
Usage nocif Seuil clinique
Consommation

Consommation
à problème

Usage à risque Seuil de


consommation
Faible

Consommation à faible risque

Aucune
Abstinence

Figure 1. Description des conduites d’alcoolisation (adapté de Mallet & Llorca, 2007).
Les conduites d’alcoolisation suivent un continuum de sévérité évoluant d’une consommation à faible risque vers
l’alcoolodépendance. Le seuil de consommation à risque est pour l’homme de 21 verres par semaine ou cinq
verres par occasion (14 et 4 verres pour la femme). La consommation à problème se caractérise par des
problèmes occasionnels. L’abus (ou usage nocif) correspond à des problèmes spécifiques répétés.

8
Abus et dépendance représentent le seuil clinique des mésusages d’alcool. Leurs définitions
dans la CIM et dans le DSM sont superposables dans la pratique (Figure 2).

Dépendance
CIM-10 (code F10.2) DSM-IV-TR (code 303.90)

Ensemble de phénomènes comportementaux, cognitifs Mode d’utilisation inadapté d’une substance (ici l’alcool)
et physiologiques dans lesquels l'utilisation d’une conduisant à une altération du fonctionnement ou une
substance psycho-active spécifique (ici l’alcool) ou d’une souffrance, cliniquement significative, caractérisé par la
catégorie de substances entraine un désinvestissement présence de 3 (ou plus) des manifestations suivantes, à
progressif des autres activités. La caractéristique un moment quelconque d’une période continue de 12
essentielle du syndrome de dépendance consiste en un mois :
désir (souvent puissant, parfois compulsif) de boire de 1. Tolérance, définie par l’un des symptômes suivants :
l’alcool. Au cours des rechutes, c'est-à-dire après une • Besoin de quantités notablement plus fortes de la
période d’abstinence, le syndrome de dépendance peut substance pour obtenir une intoxication ou l’effet
se réinstaller beaucoup plus rapidement qu’initialement. désiré
Pour un diagnostic de certitude, au moins trois des • Effet notablement diminué en cas d’utilisation
manifestations suivantes doivent habituellement avoir continue d’une même quantité de la substance.
été présentes en même temps au cours de la dernière 2. Sevrage, caractérisé par l’une ou l’autre des
année : manifestations suivantes :
• Désir puissant ou compulsif d’utiliser une substance • Syndrome de sevrage caractéristique de la substance
psycho-active. (cf critères A et B du Sevrage ci-dessus)
• Difficultés à contrôler l’utilisation de la substance • La même substance (ou une substance très proche)
(début ou interruption de la consommation ou niveaux est prise pour soulager ou éviter des symptômes de
d’utilisation). sevrage
• Syndrome de sevrage physiologique quand le sujet 3. La substance est souvent prise en quantité plus
diminue ou arrête la consommation, comme en importante ou pendant une période plus prolongée que
témoignent la survenue d’un syndrome de sevrage prévu.
caractéristique de la substance ou l’utilisation de la 4. Il y a un désir persistant, ou des efforts infructueux,
même substance (ou d’une substance apparentée) pour diminuer ou contrôler l’utilisation de la substance.
pour soulager ou éviter les symptômes de sevrage 5. Beaucoup de temps est passé à des activités
• Mise en évidence d’une tolérance aux effets de la nécessaires pour obtenir la substance (ex :
substance psycho-active : le sujet a besoin d’une déplacement sur de longues distances), à utiliser le
quantité plus importante de la substance pour obtenir produit, ou à récupérer de ses effets.
l’effet désiré. 6. Des activités sociales, professionnelles ou de loisirs
• Abandon progressif d’autres sources de plaisir et importantes sont abandonnées ou réduites à cause de
d’intérêts au profit de l’utilisation de la substance l’utilisation de la substance.
psycho-active, et augmentation du temps passé à se 7. L’utilisation de la substance est poursuivie bien que
procurer la substance, la consommer ou récupérer de la personne sache avoir un problème psychologique ou
ses effets. physique persistant ou récurrent susceptible d’avoir été
• Poursuite de la consommation de la substance malgré causé ou exacerbé par la substance (ex : poursuite de
la survenue de conséquences manifestement nocives la prise de boissons alcoolisées bien que le sujet
(ex : atteinte hépatique due aux excès alcooliques). reconnaisse l’aggravation d’un ulcère du fait de la
La réduction de la variété des modes de consommation consommation d’alcool).
(ex : tendance à consommer toujours la même quantité,
tous les jours, quelles que soient les contraintes
sociales concernant la norme en matière de boisson) a
également été décrite comme étant caractéristique d’un
syndrome de dépendance.
On peut utiliser le 5ème caractère du code pour
spécifier le tableau clinique :
F10.20 : actuellement abstinent
F10.21 : actuellement abstinent mais dans un
environnement protégé (ex : hôpital, prison,
communauté thérapeutique)
F10.22 : suis actuellement un régime de maintenance
ou de substitution, sous surveillance médicale
F10.23 : actuellement abstinent, mais prend des
médicaments aversifs ou bloquants (ex: naltrexone ou
disulfirame)
F10.24 : utilise actuellement la substance (dépendance
active)
F10.25 : utilisation continue
F10.26 : utilisation épisodique (dipsomanie)

Figure 2. Critères diagnostiques de dépendance dans la CIM-10 et le DSM-IV.


La CIM-10 et le DSM-IV donnent des critères de diagnostic comparables pour la dépendance alcoolique :
existence d’une consommation régulière d’alcool ayant un retentissement négatif somatique ou psychologique ;
abandon au profit de l’alcool d’activités sociales ou de loisir ; désir persistant d’alcool ; perte de contrôle sur les
quantités d’alcool ingérées ; signes de sevrage et la tolérance.

L’abus est un mode d’utilisation inadéquat conduisant à une altération du fonctionnement


ou à une souffrance cliniquement significative, caractérisée par la présence d’au moins une
manifestation au cours d’une période de douze mois. Les manifestations retenues sont :

9
l’incapacité de remplir des obligations majeures, les mauvaises performances, l’utilisation
répétée physiquement dangereuse, les problèmes judiciaires, interpersonnels ou sociaux
répétés, persistants ou récurrents. Les symptômes ne doivent pas atteindre les critères de la
dépendance. Cette dernière est définie par une altération du fonctionnement ou une
souffrance significative à un moment quelconque d’une période de douze mois. Au moins
trois critères positifs sur sept proposés sont nécessaires au diagnostic de dépendance ; ils
correspondent aux notions de tolérance, de sevrage, de craving, et associent des aspects
socio-comportementaux.

S’agissant des propriétés psychométriques, la fiabilité et la validité de la section «


dépendance » du DSM-IV sont attestées par de multiples études (Grant et al., 1995; Hasin et
al., 1996, 1997a, 1997b; Chatterji et al. 1997; Canino et al. 1999; Grant et al., 2007) ; elles
sont moins claires s’agissant de l’abus et de l’usage nocif (Bucholz et al., 1994; Canino et al.,
1999; Chatterji et al., 1997; Hasin et al., 1996, 1997). On retrouve de bonnes fiabilité et
validité dans les études qui ont combiné les éléments diagnostiques du DSM et de la CIM
(Hasin, 2003; Hasin et al., 2006a).

Néanmoins, la représentation actuelle des critères diagnostiques de dépendance, sous-


tendue par des modèles catégoriels, se heurte à un certain nombre de limites (Muthen,
2006). Si les diagnostics catégoriels sont utiles, notamment pour faciliter la communication
entre soignants, chercheurs et public, on ne doit pas négliger les différences inter-
individuelles des sujets pour qui une même étiquette diagnostique a été retenue. Les « cas »
ne constituent pas un groupe homogène une fois le diagnostic posé.

La démarche de catégorisation est nécessaire mais elle doit s’accompagner d’une


évaluation de la sévérité clinique, de l’intérêt du traitement, et du choix de la nature de celui-ci.
Au quotidien, les cliniciens bien sûr vivent ces enjeux, y apportent des réponses. Cependant,
les réponses peuvent gagner en rigueur si les aspects de la prise en charge sont aussi
considérés de façon standardisée, grâce aux outils dont l’utilité et la pertinence sont fondées
sur des preuves empiriques établies.
Nombre de troubles psychiatriques participent d’un continuum. A partir d’un ensemble
cohérent, dans lequel on peut identifier des séquences et des progressions, on fait le choix
d’y délimiter des seuils, et d’en considérer, par abstraction, une partie isolée. Toutefois,
lorsque l’on est de façon claire au-delà du seuil du diagnostic catégoriel, il convient encore
d’examiner les différences de sévérité entre les cas ; quant aux formes infra-cliniques, elles
diffèrent elles aussi par la façon dont elles sont plus ou moins éloignées du seuil
diagnostique.
10
Il est suggéré par diverses études qu’abus et dépendance à l’alcool et aux autres
substances seraient des catégories hétérogènes se distribuant le long d’un continuum
(Helzer et al., 2006; Helzer et al., 2007). Dès 1960, le modèle des étapes du développement
de l’alcoolisme proposé par Jelinek comporte des éléments relevant d’une approche
dimensionnelle des troubles. De même, cet aspect figure dans les travaux sur l’Alcohol
Dependence Syndrome menés par Edwards et Gross (1976; Edwards, 1977; Edwards,
1986) : d’une part au travers de la dimensionnalité de chacun des axes : dépendance d’un
côté, incapacités liées à l’alcool de l’autre (figure 3) ; d’autre part, par la prise en compte de
l’intensité graduelle du syndrome lui-même. Skinner et son équipe, à partir d’études cliniques,
ont proposé une conceptualisation mixte du syndrome de dépendance alcoolique combinant
plusieurs catégories, organisées selon une dimension reflétant la « sévérité globale des
symptômes d’alcoolodépendance » (Morey et al., 1984; Morey & Skinner, 1986).
Incapacités
physiques Figure 3 : Distinction des incapacités liées à
l’alcool et de la dépendance dans l’Alcohol
*Hépatopathies Dependance Syndrome (adapté de Skinner &
* Neuropathies Allen,1982).
* Traumatismes
L’Alcohol Dependance Syndrome ou syndrome de
dépendance à l’alcool était un concept biaxial : (1)
processus de dépendance (en noir) et (2)
conséquences médicales, sociales et autres (en
blanc). C’est l’intégration de l’ensemble des
processus, physiologiques et psychologiques, qui
rendait compte de la prise de boisson alcoolisée
Syndrome de
dépendence
excessive du sujet, progressivement détachée des
alcoolique circonstances extérieures ou des conséquences
néfastes.

* Problèmes
* Anxiété légaux
* Altérations * Problèmes
intelluctuelles professionnels
* Dépression * Problèmes
familiaux

Incapacités Incapacités
psychologiques sociales

Après 1980, le DSM, qui avait jusque là proposé une approche catégorielle stricto sensu, a
intégré la nécessité de ne pas appréhender les troubles mentaux comme des entités
discrètes compartimentées de façon rigide. Les systèmes dimensionnels ont peu à peu
trouvé place dans les classifications nosographiques. Nombre de questionnements ont été
menés spécifiquement à propos de la notion d’alcoolodépendance, dans la perspective du
DSM-V (Hasin 2006b, Helzer et al., 2007). Les critères d'abus et de dépendance sont
amenés à être regroupés sous le terme « substance use disorder », avec des niveaux de
sévérité distincts. De plus, un nouveau critère, optionnel pour le diagnostic, serait introduit : le
craving.

11
Un grand nombre de travaux ont évalué à quel point l’ensemble de variables retenues
pour l’alcoolodépendance mesurait effectivement un construit théorique unidimensionnel.
Depuis les premières études descriptives de Rohan (1976), les approches méthodologiques
par analyse factorielle de onze symptômes d’abus et dépendance ont permis la mise en
évidence d’une solution à un facteur unique pour expliquer la covariance des variables
considérées (Hall et al., 1993; Hasin et al., 1994; Proudfoot et al., 2006). Les analyses en
variables latentes effectuées à partir des symptômes rapportés par les jumeaux ou des
proches de sujets alcooliques (Heath et al., 1994; Bucholz et al., 1996; Lynskey et al., 2005)
sont concordantes. On retrouve les symptômes rangés selon un continuum de sévérité plutôt
que dans des catégories unes et indivisibles (Helzer et al., 2007).

Si l’on avait des instruments objectifs, quantitatifs d’évaluation de la sévérité


symptomatique, cela permettrait donc de compléter de façon précieuse l’évaluation
diagnostique catégorielle. Notre connaissance du processus pathologique serait enrichie, et
l’on éviterait les écueils d’une approche catégorielle pure – la plupart des études soutenant
une approche dimensionnelle n’ont pu identifier un cut off spécifique discriminant clairement
les cas des non-cas (Helzer et al., 2006 ; Helzer et al., 2007).

Symptôme au coeur du processus addictif (de Bruijn et al., 2004), le craving est décrit
comme une « institution centrale » (Rankin et al., 1979) : un désir puissant, intense,
impérieux de consommer la drogue. Le craving, avec lequel le sujet addict engage une lutte
durable, se distingue nettement du manque, dont les symptômes le mettent en difficulté de
façon seulement transitoire. Cette définition large en termes d’état motivationnel rappelle
aussi à la distinction nécessaire du craving, d’une intention, d’une attente ou d’un habit
(réponse comportementale distinguée en particulier du comportement dirigé vers un but, en
ce qu’elle est sous le contrôle des stimuli externes au travers d’associations de type stimulus-
réponse établies par la répétition) (Litt & Cooney, 1999). Tiffany (2000) évoque un désir
puissant ou une tendance qui pousse vers la prise compulsive de drogue. D’une manière
générale, les descriptions du craving s’attachent : d’abord, au vécu de « urge », c’est à dire le
ressenti subjectif d’une forte incitation à l’action, relevant d’une séquence de processus
(déclenchement par un stimulus, traduction en un but, déploiement d’actions visant la
satisfaction de celui-ci) ; ensuite, à l’envahissement par des pensées pour le produit (Verheul
et al., 1999) – tous deux d’une extrême intensité. Enfin, son aspect dynamique est toujours
souligné. Phénomène fluctuant dans un environnement mouvant, serait-il comme la flèche
en vol dans le paradoxe de Zénon ? Ainsi considéré, on en conclurait alors à l’impossibilité
d’énoncer une vérité à son sujet. Si la CIM inclut le craving comme critère diagnostique

12
optionnel de la dépendance à l’alcool et aux autres substances, son absence du DSM est un
indice du manque de consensus quant à la compréhension de sa nature.

« Why do addicts crave drugs? », « Why does drug craving persist even after long
periods of abstinence? », « Is ‘wanting’ drugs (drug craving) attributable to ‘liking’ drugs (to the
subjective pleasurable effects of drugs)? », telles sont les trois grandes questions qui
inaugurent la théorie de l’incentive sensitization (Robinson & Berridge, 1993). Chercheurs et
cliniciens s’accordent sur l’importance du craving dans le développement et le maintien de
l’addiction.

Le craving serait un phénomène-clé dans la survenue de rechutes chez les sujets addicts
abstinents (Everitt, 1997). Il peut faire obstacle aux tentatives d’abstinence des sujets
dépendants (May et al., 2004). Il est également suggéré qu’il puisse a contrario participer des
efforts cognitifs conscients pour maintenir l’abstinence, agissant comme un signal d’alarme
pour le sujet (Drummond & Glautier, 2004; Monti et al., 1990).

Pour l’alcool et pour les autres substances, le rôle du craving dans la rechute reste objet
de controverses (Marlatt & Gordon, 1985; Heinz et al., 2009; Pickens et al., 2011). Plusieurs
études ne trouvent aucune corrélation positive entre craving pour l’alcool et rechute
(Drummond & Glautier, 1994; Grüsser et al., 2004; Junghanns et al., 2005; Kiefer et al., 2005;
Litt et al., 2000; Rohsenow et al., 1994) tandis qu’est rapporté un tel lien par d’autres
(Bottlender & Soyka, 2004; Cooney et al., 1997, Heinz et al., 2005, Monti et al., 1990). Ces
résultats contradictoires soulèvent des questions méthodologiques, en particulier quant à la
mesure du craving.

Dans ce cadre, déterminer les processus impliqués dans les relations de conditionnement
entre stimuli associés à la drogue, craving, et consommation de drogue constitue un enjeu
majeur pour la recherche. Les modèles impliquant une « sensibilité » du sujet addict à
l’environnement avec mise en jeu de processus automatiques non conscients dans les
comportements de recherche et de prise de drogue permettent en particulier d’éclairer la
faible corrélation observée en clinique entre rapport subjectif de craving et comportement
effectif de prise de drogue, ce dernier pouvant être déclenché par des indices
environnementaux associés à la drogue, en l’absence même de craving (Tiffany, 1990). C’est
sur cette notion, chez les sujets addicts, de réactivité aux signaux associés au produit (« cue
reactivity »), qui est modulée en fonction d’un certain nombre de facteurs cognitifs et
émotionnels, que se fondent un grand nombre d’études utilisant les apports de l’imagerie par

13
résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) (Braus et al., 2001; Drummond, 2000; George et
al., 2001; Grüsser et al., 2004).

Plusieurs modèles théoriques proposent une conceptualisation du craving. Bien qu’aucun


ne rende compte à lui seul de tous les aspects du craving, chacun comporte des éléments
qui, rassemblés, permettent une vue d’ensemble, compréhensive du phénomène. Des
revues de la littérature (Tiffany, 1999; Skinner & Aubin, 2010) en proposent un inventaire
détaillé.

Le modèle du renforcement repose sur la capacité de l’alcool à induire une élation de


l’humeur ou à soulager un état mental désagréable tel que le stress ou la colère (figure 4) : le
processus d’apprentissage non conscient conduit à la répétition du comportement de prise
d’alcool pour reproduire l’expérience positive (Singleton & Gorelick 1998; Verheul et al., 1999;
Heinz et al., 2003). Des objets, des éléments de l’environnement, des émotions, liés à la
consommation d’alcool, peuvent également produire une réponse comportementale similaire.
Il s’agit d’indices associés au produit ou « cues », comme la vue d’un bar, d’une publicité pour
boisson alcoolisée, ou encore la compagnie d’amis qui boivent. Les stimuli internes servent
aussi de cues : par exemple, sentiment de solitude, souvenir de situations conflictuelles en
lien avec l’alcool amenant à une recherche de soulagement par l’alcool (Drummond, 2000;
Heinz et al., 2003; Verheul et al., 2003). Un sujet alcoolodépendant, même abstinent depuis
une longue période, exposé à des cues pertinentes va expérimenter un craving pour l’alcool
(Drummond, 2001).

Verre à bière Bière Effet relaxant Craving Rechute


CS UCS UCR / CR CR CR

Figure 4. Modèle d’un craving pour l’alcool généré par des stimuli conditionnés (adapté de Heinz et al.,
2009).
Un stimulus neutre à l’origine, qui a été associé régulièrement à la consommation d’alcool (par exemple la vue
d’un verre à bière), peut devenir un stimulus conditionné capable de générer un craving pour l’alcool.

Selon le modèle de l’apprentissage social, le craving induit par les cues peut déclencher
des stratégies de « coping » conscientes destinées à maintenir l’abstinence. Le succès de
ces stratégies adaptatives dépend de la confiance du sujet en son aptitude à résister au désir
de boire (Anton, 1999). Ce modèle retient le craving comme un facteur pouvant, parmi
d’autres, induire un risque de rechute (Rohsenow & Monti, 1999).
Le modèle du traitement cognitif (Figure 5) soutient que le craving, au contraire de
nombre des séquences comportementales dans l’addiction, est un processus non
automatique, qui exige un effort mental.
14
Figure 5. Modèle du traitement cognitif (adapté de
Processus Tiffany, 1999).
automatique Chez un alcoolique qui ne cherche pas à arrêter de
consommer de l’alcool, la prise d’alcool est contrôlée par
Stimulus Usage de drogue des processus cognitifs automatiques. Dans ce cas, les
automatisé stimuli déclenchent des processus automatiques qui
résultent en une automatisation de l’utilisation de drogue, et
le craving ne joue aucun rôle dans le contrôle de la
consommation. Lorsque des séquences automatiques
d’utilisation d’alcool (se diriger vers son bar favori, s’asseoir
Obstacle au comptoir et commander un verre) sont bloquées par un «
obstacle » environnemental (le bar est fermé), l’alcoolique
Stimulus activera alors, après explicitation, des processus non
automatiques pour faire face au problème. Ceux-ci
génèreront un craving pour l’alcool.

Processus
non-automatique

CRAVING

Il est donc fonction des ressources cognitives du sujet, et se trouve limité. Ce modèle
implique que prise d'alcool et comportements de recherche puissent survenir en l'absence de
craving. De plus, on conçoit alors qu’un alcoolique motivé à rester abstinent éprouve un
craving tout en luttant pour éviter de rechuter (Rohsenow & Monti, 1999; Tiffany, 1999).

De façon générale, l’explication de l’expérience de craving reposerait sur l’identification


des mécanismes de génération des urges. Elle nécessite la prise en compte d’un ensemble
de manifestations, conscientes et non conscientes (Rohsenow & Monti, 1999; Anton, 2000).

En termes psychologiques, il existerait des équivalents cognitifs non conscients du


craving, résultant de la mise en jeu de processus automatiques, qui entravent la gestion
consciente des comportements consommatoires : traces mnésiques des expériences
positives d’alcoolisations antérieures, exposition aux cues associées à l’alcool (Anton, 2000).
De même, ces éléments feraient obstacle aux stratégies d’adaptation face aux urges (Anton,
2000).

Plus avant dans la compréhension, il faut considérer le niveau physiologique.


L’observation empirique des liens entre état d’éveil et d’excitation (en anglais, « arousal »
traduit par « activation ») et craving (Sinha et al., 2003; Breese et al., 2005) renvoie sur le
plan théorique à des concepts limites entre psychique et somatique. Certes, avec cela,
viennent les difficultés à proposer un exposé exhaustif du phénomène de craving, tant les
liens corps-esprit et leur énonciation font problème, se rapportant à des positions
épistémologiques aussi contrastées que diverses – le débat connaît une re-formulation en
15
termes contemporains dans la question du « mind-body problem » en philosophie de l’esprit.
Mais est soulignée de façon essentielle la nature pulsionnelle du craving.

L’évaluation clinique et la recherche expérimentale requièrent des méthodes fiables de


mesure du craving. Dans beaucoup d’études, celle-ci consiste en une simple cotation par le
sujet de l’intensité de son désir de boire (Sayette et al., 2000). Des mesures objectives
associées ont également été proposées (Litt & Cooney 1999; Rosenberg, 2009), par
exemple le relevé de changements physiologiques supposés accompagner le craving :
modifications de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle, ou de l’activité des glandes
sudoripares (Drobes & Thomas, 1999). Cependant, on ne retrouve pas alors de corrélation
claire avec les évaluations directes du craving (Rohsenow & Monti, 1999). Sans doute est-ce
en raison de l’absence de spécificité des fonctions considérées, et parce que la cotation
utilisée pour le craving ne s’effectue que sur un item, négligeant les autres aspects du
phénomène de craving (Drobes & Thomas, 1999).

Des instruments de mesure subjective à items multiples ont été développés. D’une part,
cela permet de gagner en précision dans l’identification des différentes composantes du
craving. D’autre part, par la répétition des questions sous formes diverses, sont contournés
des problèmes d’interprétation des énoncés (Flannery et al., 1999).

La Yale-Brown Obsessive Compulsive Scale for heavy drinkers (Y-BOCS-hd) (Modell et


al., 1992; Goodman et al., 1989a, 1989b) comporte dix items sous forme d’entretien
structuré. Des scores pour les sous-échelles « Alcohol obsessions » et « Compulsive
behaviors » peuvent être obtenus – rappel, par cette dichotomisation, de la parenté des
troubles du spectre obsessionnel-compulsif. Effectué par un clinicien expérimenté, l’entretien
dure quinze à trente minutes. Pour l’instrument dont elle est dérivée, la Y-BOCS, les
propriétés psychométriques rapportées sont bonnes ; s’agissant de la capacité de
l’instrument dérivé à discriminer populations alcooliques et non alcooliques, de hautes
sensibilité et spécificité assurent une bonne validité discriminante de la Y-BOCS-hd.

Reposant également sur un rapprochement entre certains aspects du craving et des


caractéristiques du trouble obsessionnel-compulsif, l’Obsessive Compulsive Drinking Scale
(OCDS) (Anton et al., 1995; Kranzler et al., 1999; Roberts et al., 1999) est une échelle à
quatorze items qui nécessite cinq à dix minutes de passation.

Développé par Bohn, l’Alcohol Urge Questionnaire (AUQ) (Bohn et al., 1995) est une
échelle unidimensionnelle de format Likert ; elle est composée de huit items destinés à
évaluer le craving aigu. L’auto-questionnaire s’effectue en une minute. La consistance interne

16
est élevée, et la fiabilité test-retest est haute. La validité de construit est démontrée par les
fortes corrélations avec les mesures de sévérité de l’alcoolodépendance et l’OCDS.

L’Alcohol Craving Questionnaire (ACQ) (Singleton et al., 1994; Love et al., 1998)
comprend quarante-sept items sous forme d’un auto-questionnaire nécessitant dix minutes. Il
existe une version courte à douze items. La fiabilité de facteur et de sous-échelle est
modérée à forte.

Enfin, des stratégies ambulatoires informatisées, telles que l’Ecological Momentary


Assessment (EMA) (Stone & Shiffman, 1994) et l’Experience Sampling Method (ESM)
(Csikszentmihalyi & Larson, 1987), sont proposées. Elles apportent grâce aux technologies
mobiles un relevé symptomatique et comportemental en temps et conditions réels. Elles
mettent à disposition des données valides bien que rappelant les problèmes éventuels de
compliance des sujets addicts (Serre et al., 2012). Elles ont fait l’objet d’études spécifiques
dans le cas de l’alcool (Litt et al., 1998; Magneberg, 1998; Hufford et al., 2002).

Les études évaluant abus et dépendance reposent sur des données déclaratives dans
des échantillons représentatifs de la population. Or on observe dans ce cadre que la
stigmatisation associée aux addictions peut susciter une minimisation des déclarations. Les
résultats de l’enquête européenne en population générale organisée par l’Organisation
Mondiale de la Santé, à domicile sur des échantillons représentatifs, portant en France sur
2894 sujets, font état, à partir du diagnostic DSM de dépendance, d’une prévalence assez
basse, 1,6 % de dépendance à l’alcool sur la vie (2,1 % des hommes et 1,1 % des femmes)
(Lépine et al., 2005), quand une revue de la littérature sur toutes les études européennes
réalisées en population générale en utilisant des critères de type DSM ou CIM permet de
retrouver une prévalence sur les douze derniers mois de la dépendance à l’alcool de 6,1 %
chez les hommes et 1,1 % chez les femmes (Rehm et al., 2005a, 2005b). On parle de biais
déclaratif (Lejoyeux, 2009). De façon similaire, ce type de biais pourrait aussi expliquer
l’absence de craving rapporté avant rechute (Tiffany, 1990).

Effectivement, la sous-estimation des conduites alcooliques affecte de façon majeure


l’évaluation de la sévérité symptomatique tant en clinique qu’en recherche, tout
particulièrement lorsque l’on s’intéresse au craving. Les auto-mesures de craving constituent
un indice imparfait de la motivation pour la drogue (Zinser et al., 1999). De façon plus large,
Franken (2003) souligne que les éléments motivationnels éveillés par les stimuli à valence
appétitive sont difficilement mesurables par les seules auto-mesures (Geier et al., 2000;
Mucha et al., 2000). Considérant que la même restriction s’applique pour toute expérience

17
individuelle subjective, il rejette les mesures auto-rapportées de craving en tant que gold
standard.

Il existe dans l’addiction une difficulté à reconnaître la présence de la maladie, une sous-
estimation de la sévérité de celle-ci, et des croyances erronées au sujet du contrôle de la
consommation de produit, y compris aux derniers stades évolutifs de la pathologie. Ces
éléments sont signes d’un faible insight chez les sujets addicts.

Les études ont souligné la différence entre ce qui est rapporté, en termes de sévérité des
consommations ou des atteintes cognitives, par les patients et par les aidants. La corrélation
entre ces écarts de mesure et la perturbation des tests neuropsychologiques (Rinn et al.,
2002) suggèrent en fait une possible association à des dysfonctionnements cognitifs et
cérébraux sous-jacents (Goldstein et al., 2009). Dès lors, l’atteinte de la conscience de soi
serait un écueil incontournable, en particulier pendant les périodes d’abus (Verdejo-Garcia &
Perez-Garcia, 2008). On ne pourrait attribuer aux explications proposées par le sujet un rôle
plein et causal dans le comportement comportemental de sa pathologie. L’insight « défaillant
» du sujet addict serait impliqué dans son mauvais contrôle des réponses émotionnelles,
cognitives et comportementales socialement appropriées (Belin et al., 2011) ; il le serait
également dans son appréciation imparfaite du craving et des éléments qui le sous-tendent.

On peut proposer, dans une compréhension du phénomène de craving intégrant


l’approche du modèle de traitement cognitif (Tiffany, 1999) et la notion d’insight (Belin et al.,
2011) (figure 6), l’hypothèse selon laquelle deux mécanismes psychologiques distincts
amènent le patient addict abstinent à un risque de rechute. Dans un premier cas, les
pulsions, générées par des stimuli externes ou internes, entraînent des comportements de
nature automatique : il y a recherche et prise de drogue, en fonction de processus implicites,
non conscients. Dans ce cadre, c’est si la drogue n’est pas disponible qu’il y a alors prise de
conscience des éléments pulsionnels, et genèse explicite d’un craving – comme alternative
au non-assouvissement pulsionnel. Dans un second cas, les éléments pulsionnels accèdent
à la conscience, via un insight pathologique – dans sa dimension obsessionnelle, le craving
est défini comme un manque de contrôle exercé sur l’intrusion de pensées concernant la
consommation de produit (Verheul et al., 1999). Il y a facilitation de l’émergence du craving.
En somme, le craving peut engendrer une rechute ; cependant, au prix d’efforts cognitifs
importants, le sujet peut également rester abstinent.

18
Emergence explicite de la pulsion Niveau d’insight 2
Domaine du contrôle comportemental
non conscient par les pulsions Niveau d’insight 1

Variations des états pulsionnels

Emergence explicite de la pulsion


n Niveau d’insight 2
Niveau d’insight 1
Domaine du contrôle comportemental
non conscient par les pulsions
Variations des états pulsionnels

Figure 6. Modèle des relations entre dynamique pulsionnelle et insight.


Chez le sujet sain (schéma du haut), il existe à l’état basal des fluctuations pulsionnelles. Des pulsions peuvent
revêtir un caractère explicite pour le sujet ; le niveau d’insight 2 renvoie à une connaissance de celles-ci, c'est-à-dire
que le sujet peut rendre compte de désirs conscients explicites. Le niveau d’insight 1 s’applique à un certain
nombre d’éléments pulsionnels non explicites (représentés ici encadrés entre les lignes hachurées rose et jaune)
que, par un effort cognitif, le sujet peut amener à un niveau d’explicitation (passage de l’état bleu à l’état rose). Ces
derniers exercent une influence implicite sur le comportement du sujet. Chez le sujet addict (schéma du bas), il
existe, du fait de la maladie, à la fois un élargissement de la zone de contrôle comportemental non conscient des
pulsions et un accès moindre à ces processus par l’insight de niveau 1. Aussi, on observe une modification du
contrôle du comportement qui devient de plus en plus dépendant des processus motivationnels implicites (dont les
facteurs déclenchants sont, pour une large part, des stimuli dont le sujet n’a pas conscience), et une altération de
l’insight. Les capacités d’insight se trouve également amoindries dans le domaine explicite (niveau 2). On observe
toujours une explicitation d’éléments pulsionnels à un niveau conscient, cependant avec un spectre d’intérêts
restreint au domaine de l’alcool et sous la forme d’un phénomène spécifique au vécu du sujet addict, le craving,
qui, par son intensité particulière, s’impose au sujet.

Des données d’IRMf soutiennent ce type de dualité implicite-explicite dans le contrôle des
pulsions sur le comportement de recherche de drogue dans des conditions de laboratoire
(Moeller et al., 2009; Childress et al., 2008).

Les échelles de craving relèvent d’une approche fondée sur le seul rapport subjectif de la
dimension explicite du craving. Or les patients alcoolodépendants, du fait des variations de
leur niveau d’insight, ne peuvent rendre compte correctement de cette dimension explicite. Il
n’y a par ailleurs pas de mesure fiable permettant d’accéder à la dimension implicite de l’urge,
et évaluant le contrôle comportemental par celle-ci. Enfin, aucune étude encore n’a mis en
évidence un lien qualitatif ou quantitatif entre dimensions explicite et implicite du craving.

Il semble par conséquent pertinent, afin de mieux comprendre la nature des mécanismes
pulsionnels sous-tendant la rechute d’une part, le craving d’autre part, et surtout l’implication
de l’insight dans l’un et l’autre de ces deux processus, de mettre en place une mesure
objective du contrôle comportemental de l’urge, que celui-ci soit explicite ou non.

Une meilleure compréhension des éléments psychiques sous-tendant le contrôle de


recherche et de prise de drogue ouvrirait de nouvelles voies de prise en charge des patients.
De plus, elle permettrait une prise en charge individualisée de la pathologie, en fonction du
19
niveau d’insight du sujet, et en fonction de la balance implicite-explicite de son contrôle des
pulsions dirigées vers la drogue.

Dans le cadre de l’alcool, aucune étude ne s’est intéressée à une analyse des relations
entre mécanismes implicites de traitement des urges et rapport subjectif explicite de craving
chez les patients.

En termes de recherche, il s’agit d’associer, et confronter, des mesures subjectives de


craving à une mesure objective mettant en jeu des processus cognitifs implicites et reflétant
un traitement non conscient de l’urge et son interférence avec les fonctions cognitives
explicites.

Dans ce contexte, est mise en place une étude ayant pour objectif principal l’élaboration
d’un test permettant une mesure objective du craving. Les objectifs secondaires sont
d’étudier les relations entre les mesures subjective et objective du craving d’une part, et entre
les mesures du craving et de l’insight d’autre part.

Le choix se porte sur la dépendance à l’alcool en raison de la facilité d’accès à cette


population de patients.

La démarche se fonde expérimentalement sur l’analyse des temps de réaction lors d’une
tâche de décision lexicale avec amorçage subliminal par des stimuli différant par leur contenu
sémantique spécifique. Trois conditions sont mises en contraste les unes avec les autres. On
s’attend à observer, dans le cas de la présentation subliminale de mots en lien avec l’alcool,
une augmentation des temps de réaction chez les patients alcoolodépendants,
comparativement aux sujets sains (interférence du traitement non conscient de l’urge avec
les fonctions cognitives explicites). En revanche, en présence de stimuli généralement
appétitifs mais d’une autre nature que l’attrait pour l’alcool, hypothèse est faite que les
patients alcoolodépendants vont alors être peu affectés, du fait d’une restriction des intérêts
et d’une centration sur l’objet d’addiction (moindre interférence dans la réalisation de la
tâche). La présence de paires de mots « Amorce – cible » sémantiquement liés sert de
contrôle dans la tâche (amorçage sémantique subliminal par un mot associé
sémantiquement largement étudié, reconnu comme efficient dans des présentations versus
amorce neutre).

20
Méthodes
If the doors of perception were cleansed every thing would appear to man as
it is, infinite. (Blake,The Marriage of Heaven and Hell)

Déroulement

Il s’agit d’une étude prospective, monocentrique, randomisée, en simple aveugle, qui a


débuté en juillet 2012 et qui se poursuivra jusqu’en juin 2013.

Participants

Les patients sont recrutés dans deux services d’hospitalisation de secteur du Centre
Hospitalier Henri Laborit à Poitiers. Le motif d’admission est la prise en charge d’une
alcoolodépendance ou d’une manifestation associée.

Les critères d’inclusion comportent : l’existence d’une alcoolodépendance selon les


critères DSM-IV ; un âge compris entre 18 ans et 65 ans ; la maîtrise de la langue française.

Un diagnostic de troubles psychotiques, l’existence de troubles moteurs ne permettant


pas la réalisation de la tâche informatisée, la présence de troubles de la compréhension
empêchant d’obtenir le consentement du sujet, ou bien d’une mesure d’hospitalisation sous
contrainte sont des critères d’exclusion.
Le comité d’éthique local a approuvé l’étude. L’ensemble des sujets reçoit une notice
d’information écrite et signe un formulaire de consentement éclairé pour participer à l’étude.

La prise en charge habituelle des patients n’est pas modifiée pendant l’étude. Est
respecté un délai de sept jours d’hospitalisation avant inclusion, de sorte que les individus
sont testés au plus tôt à la deuxième ou troisième semaine de leur séjour hospitalier, et ce
afin de s’assurer d’une stabilité de leur état psychoaffectif dans le contexte hospitalier.

Les témoins sont recrutés par « bouche à oreille » au sein des entourages des personnes
contribuant à l’organisation de l’étude. Outre le respect des exigences d’appariement avec les
patients (sexe, âge, niveau d’éducation), le critère d’inclusion des témoins est l’absence
d’alcoolodépendance et de pathologies psychiatriques connues. En raison de la nécessité de
se déplacer à deux reprises au centre hospitalier pour participer à l’étude, et des frais y
incombant, les participants se voient remettre un dédommagement en fin d’étude, sous la
forme d’un bon-cadeau de vingt euros fourni par le CeRCA.

21
Patients ou témoins, les sujets n’ont pas, avant inclusion, connaissance des conditions
particulières de l’étude.

L’échantillon actuel est composé de vingt-deux participants. Parmi les onze patients, sept
ont été pris en charge dans l’unité Paul Cézanne du Pavillon Pinel, et quatre ont été
hospitalisés dans l’unité Calliope du Pavillon Toulouse. Douze témoins ont été inclus ;
toutefois, un participant du groupe « Témoins » a été exclu des analyses en raison d’un score
au questionnaire Alcohol Use Disorders Identification Test (AUDIT) supérieur au seuil de 7,
suggérant une possible problématique alcoolique, avec en particulier des scores élevés aux
items du domaine « Symptômes de dépendance ».

Vue d’ensemble de la procédure

Il y a deux groupes de patients. Le premier groupe bénéficie de trois visites après


inclusion. La première visite est un entretien permettant la passation des questionnaires et
échelles. Quarante-huit heures après, est réalisée la tâche sur ordinateur qui se décompose
en deux sessions effectuées à vingt-quatre heures d’intervalle. Le second groupe suit le
même protocole expérimental, auquel s’ajoute une quatrième visite pour entretien vingt-
quatre heures après la dernière session de la tâche informatisée. L’inclusion dans l’un ou
l’autre groupe se fait de façon aléatoire (figure 7).

Les témoins, après rencontre ou contact téléphonique, sont reçus à deux reprises à vingt-
quatre heures d’intervalle afin d’effectuer la tâche sur ordinateur. C’est au décours de la
deuxième session qu’ils répondent au questionnaire qui leur est destiné (figure 7).

22
Protocole dans le groupe « Patients »

Groupe « Patients » n°1


Répartition
au hasard Entretien + échelles Test informatisé Test informatisé
Session n°1 Session n°2
Inclusion
48h 24h

Consentement Groupe « Patients » n°2


écrit
Test informatisé Test informatisé Echelles
Entretien + échelles
Session n°1 Session n°2 de craving

48h 24h 24h

Espacement temporel des éléments susceptibles d‛induire un état d‛activation,


par leur lien avec l‛alcool ou par leur valence appétitive générale

Protocole dans le groupe « Témoins »

Inclusion
Test informatisé Test informatisé Questionnaire
Session n°1 Session n°2 sur l’alcool
Consentement
écrit 24h

Espacement temporel respecté pour la réalisation de la tâche


+ Questionnaire au décours immédiat de la session n°2 du
test informatisé pour minimiser le nombre de visites, sans
interférer avec le déroulement du test

Figure 7. Vue d’ensemble de la procédure.


Le protocole chez les patients se décompose, après inclusion, en trois à quatre visites, en fonction de
l’attribution des patients dans les premier ou second groupes. La répartition au hasard entre groupes n°1 et n°2,
initialement prévue par le protocole, n’est pas totale, en raison d’un biais de sélection induit par une assignation
fondée sur le jour de l’entretien : selon le calendrier de l’étude, les patients sont vus en entretien le lundi ou le
mardi, et testés pour la tâche du mercredi au vendredi, de sorte qu’un patient qui est vu le mardi en entretien,
s’il est assigné au groupe n°2, fait les échelles de craving le samedi, ce qui est évité dans certains cas
particuliers où sont anticipées une permission ou une sortie probables le week-end.
Un point essentiel du design expérimental est l’espacement temporel des visites. Il est dicté par la nécessité
d’un non-chevauchement des états d’activation éventuellement induits par chacune des phases du protocole :
évocation directe de l’alcool lors de l’entretien ; passation de deux séries distinctes d’essais potentiellement «
excitateurs » lors de la tâche.
Les témoins suivent un schéma de protocole en deux visites, afin de minimiser les contraintes de déplacement
sur le lieu de l’étude. Ceci n’interfère pas avec le respect des précautions nécessaires à l’étude en termes
d’activation car le questionnaire sur l’alcool également susceptible de générer un tel effet est effectué en dernier.

Mesures cliniques et test psychotechnique

Parmi les participants, dans le premier groupe, les patients réalisent l’ensemble des
questionnaires et échelles cliniques lors de l’entretien initial. Le même ordre de présentation
et passation des tests est toujours respecté d’un sujet à l’autre. Le second groupe de patients
fait de même ; de plus, il est de nouveau évalué, lors d’une visite supplémentaire après la
tâche informatisée, pour les seules mesures de craving (figure 8).

Le choix des mesures clinique est dicté par la démarche théorique : évaluation de
dimensions psychopathologiques associés à l’addiction, évaluation du craving et de l’insight,
confirmation diagnostique et diagnostic de comorbidités (figure 8).
23
Groupe « Patients » n°1
Groupe « Patients » n°2
Entretien + échelles

Entretien + échelles

Inventaire de dépression de Beck


Même évaluation
pré-tâche Test de latéralité d‛Edinburgh

Inventaire d‛anxiété état-trait


+
Echelles
Echelle d‛impulsivité de Barratt
de craving

Ré-évaluation post-tâche
Echelle visuelle analogique
de craving Echelle visuelle analogique
de craving
Echelle de comportement et
cognitions vis à vis de l‛alcool Echelle de comportement et
cognitions vis à vis de l‛alcool
Echelle d‛insight pour l‛alcoolisme
de Hanil

Groupe « Témoins »
Questionnaire AUDIT
Questionnaire
sur l’alcool
Test de dépendance nicotinique
de Fagerström
Questionnaire AUDIT
Entretien MINI

* *
Test de latéralité d‛Edinburgh
Test de latéralité d‛Edinburgh

Figure 8. Mesures cliniques et test psychotechnique.


Chez les patients, l’entretien initial, d’une durée de 50 à 90 minutes, permet la passation des échelles et
questionnaires : ayant trait à des éléments psychopathologiques que l’on sait significativement présents au cours
des troubles addictifs, symptômes dépressifs, anxiété, et impulsivité (en gris) ; évaluant le craving, instantané et
basal (en rose) ; portant sur l’insight (en bleu) ; confirmant le diagnostic de dépendance à l’alcool et explorant des
comorbidités addictives et psychiatriques autres (en violet).
En fin d’étude, seul le groupe « Patients » n°2 bénéficie d’une ré-évaluation du craving, en cinq à quinze minutes,
afin d’examiner le décours temporel de celui-ci dans les conditions expérimentales.
Le groupe « Témoins » passe en trois à cinq minutes un questionnaire évaluant la consommation d’alcool.
L’objectif est de renforcer la fiabilité des critères de sélection de cet échantillon, critères qui sont exposés
préalablement à l’inclusion, et dont la vérification est de nature seulement déclarative.
Au regard des contraintes liées au mode de réponse sur boîte à boutons lors de la tâche informatisée, tous les
participants sont testés pour la latéralisation manuelle, de façon à identifier son effet éventuel sur les performances
observées.

Le groupe des témoins bénéficie du questionnaire AUDIT de l’Organisation Mondiale de


la Santé. Cet outil de première ligne permet une évaluation de la consommation alcoolique
(figure 9).

24
4ABLEAUß.€ßß,EßTESTß!UDITß!LCOHOLß5SEß$ISORDERSß)DENTI½CATIONß4EST ßßAUTOQUESTIONNAIREß
4RADUCTIONßFRANlAISEß3OURCEßß'ACHEßETßAL ß 
ßßߪßQUELLEßFRmQUENCEßVOUSßARRIVE T ILßDEßCONSOMMERßDESßBOISSONSß ßß!UßCOURSßDEßL´ANNmEßmCOULmE ßgßQUELLEßFRmQUENCE ßAPRnSßUNEßPmRIODEßß
CONTENANTßDEßL´ALCOOLß DEßFORTEßCONSOMMATION ßAVEZ VOUSßD}ßBOIREßDEßL´ALCOOLßDnSßLEßMATINßß
POURßVOUSßSENTIRßENßFORMEß

 ß*AMAIS  ß*AMAIS
 ßßFOISßPARßMOISßOUßMOINS  ß-OINSßD´UNEßFOISßPARßMOIS
 ßßgßßFOISßPARßMOIS  ß5NEßFOISßPARßMOIS
 ßßgßßFOISßPARßSEMAINE  ß5NEßFOISßPARßSEMAINE
 ß!UßMOINSßßFOISßPARßSEMAINEß  ß4OUSßLESßJOURSßOUßPRESQUEß

ßßß#OMBIENßDEßVERRESßSTANDARDßBUVEZ VOUSßAUßCOURSßD´UNEßJOURNmEß ßß!UßCOURSßDEßL´ANNmEßmCOULmE ßgßQUELLEßFRmQUENCEßAVEZ VOUSßEUßß


ORDINAIREßO|ßVOUSßBUVEZßDEßL´ALCOOLß UNßSENTIMENTßDEßCULPABILITmßOUßDEßREGRETßAPRnSßAVOIRßBUß

 ßOUß  ß*AMAIS
 ßßOUß  ß-OINSßD´UNEßFOISßPARßMOIS
 ßßOUß  ß5NEßFOISßPARßMOIS
 ßßgß  ß5NEßFOISßPARßSEMAINE
 ßßOUßPLUSßß  ß4OUSßLESßJOURSßOUßPRESQUEß

ßß!UßCOURSßD´UNEßMoMEßOCCASION ßgßQUELLEßFRmQUENCEßVOUSßARRIVE T ILß ßß!UßCOURSßDEßL´ANNmEßmCOULmE ßgßQUELLEßFRmQUENCEßAVEZ VOUSß


DEßBOIREßSIXßVERRESßSTANDARDßOUßPLUSßß mTmßINCAPABLEßDEßVOUSßSOUVENIRßDEßCEßQUIßS´mTAITßPASSmßLAßNUITß
PRmCmDENTEßPARCEßQUEßVOUSßAVIEZßBUßß

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 ß5NEßFOISßPARßMOIS  ß5NEßFOISßPARßMOIS
 ß5NEßFOISßPARßSEMAINE  ß5NEßFOISßPARßSEMAINE
 ß4OUSßLESßJOURSßOUßPRESQUEß  ß4OUSßLESßJOURSßOUßPRESQUEß

ßß!UßCOURSßDEßL´ANNmEßmCOULmE ßgßQUELLEßFRmQUENCEßAVEZ VOUSßCONSTATmß ßß6OUSßoTES VOUSßBLESSmßOUßAVEZ VOUSßBLESSmßQUELQU´UNßPARCEßQUEß


QUEßVOUSßN´mTIEZßPLUSßCAPABLEßDEßVOUSßARRoTERßDEßBOIREßUNEßFOISßQUEß VOUSßAVIEZßBUß
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 ß*AMAIS  ß.ON
 ß-OINSßD´UNEßFOISßPARßMOIS  ß/UIßMAISßPASßAUßCOURSßDEßL´ANNmEßmCOULmE
 ß5NEßFOISßPARßMOIS  ß/UI ßAUßCOURSßDEßL´ANNmEß
 ß5NEßFOISßPARßSEMAINE ß
 ß4OUSßLESßJOURSßOUßPRESQUEß ß ß

ßß!UßCOURSßDEßL´ANNmEßmCOULmE ßgßQUELLEßFRmQUENCEßLEßFAITßD´AVOIRßBUßß ßß%ST CEßQU´UNßAMIßOUßUNßMmDECINßOUßUNßAUTREßPROFESSIONNELßß


DEßL´ALCOOLßVOUSßA T ILßEMPoCHmßDEßFAIREßCEßQUIßmTAITßNORMALEMENTß DEßSANTmßS´ESTßDmJgßPRmOCCUPmßDEßVOTREßCONSOMMATIONßD´ALCOOLßß
ATTENDUßDEßVOUSßß ETßVOUSßAßCONSEILLmßDEßLAßDIMINUERß

 ß*AMAIS  ß.ON
 ß-OINSßD´UNEßFOISßPARßMOIS  ß/UIßMAISßPASßAUßCOURSßDEßL´ANNmEßmCOULmE
 ß5NEßFOISßPARßMOIS  ß/UI ßAUßCOURSßDEßL´ANNmEß ß
 ß5NEßFOISßPARßSEMAINE ß
 ß4OUSßLESßJOURSßOUßPRESQUEß ß ß

.OTEZßLEßTOTALßDESßITEMSßICI

 ßß'9.
Figure ACHEß0 ß-ICHAUDß0 ß,ANDRYß5
Questionnaire ß!CCIETTOß# ß!RFAOUIß3 ß7ENGERß/ ß$AEPPENß*"ß4HEß!LCOHOLß5SEß$ISORDERSß)DENTI½CATIONß4ESTß!5$)4 ßASßAßSCREE
AUDIT.
Les deux NINGßTOOLßFORßEXCESSIVEßDRINKINGßINßPRIMARYßCAREßRELIABILITYßANDßVALIDITYßOFßAß&RENCHßVERSIONß!LCOHOLß#LINß%XPß2ESßßß
premières questions du questionnaire AUDIT relèvent de la catégorie des questionnaires  
de fréquence
et de quantité, méthode la plus simple et la plus rapide pour identifier une consommation nocive d’alcool. Outre le
repérage d’une consommation d’alcool à risque ou nocive, l’AUDIT explore également d’éventuels épisodes de
consommation massive. La traduction française est de Gache  et al., (1998).

L’ensemble des participants effectue un test de latéralité manuelle. L’identification de


celle-ci est nécessaire pour contrôler son effet sur les performances dans la tâche.

Evaluation diagnostique

Les critères diagnostiques du DSM-IV pour les troubles liés à l’utilisation d’alcool et les
principaux troubles psychiatriques sont évalués grâce au Mini International Neuropsychiatric
Interview (MINI) (Sheehan et al., 1998). Il s’agit d’un entretien diagnostique structuré d’une
durée de passation brève. Il explore de façon standardisée dix-huit diagnostics psychiatriques
majeurs définis selon l’Axe I du DSM-IV (troubles anxieux, troubles de l’humeur, troubles

25
psychotiques, troubles addictifs, troubles du comportement alimentaire) et le diagnostic de
trouble de la personnalité antisociale.

Symptômes dépressifs

! Inventaire de dépression de Beck (version abrégée)


L’inventaire de dépression de Beck (Beck Depression Inventory, BDI) (Beck et al., 1988)
(figure 10) est une échelle d’auto-évaluation dont l’objectif est d’identifier la présence de
symptômes dépressifs et d’en évaluer la sévérité.
Dans la forme abrégée à treize items, n’ont été retenus que les items fortement corrélés
avec la note globale de l’échelle initiale à vingt et un items : tristesse, culpabilité, dégoût de
soi, pessimisme ; échec personnel ; insatisfaction ; tendances suicidaires ; anorexie ;
fatigabilité ; indécision ; modulation négative de l’image de soi ; difficultés au travail ; retrait
social.
Il s’agit de l’outil de choix pour une mesure subjective de la dépression. Il est composé de
treize catégories comprenant chacune quatre propositions. Au sein d’une catégorie, les items
sont notés de 0 à 3, de sorte que la note globale va de 0 à 39. Des notes seuils ont été
calculées : 0 à 3 = « Pas de dépression » ; 4 à 7 = « Dépression légère » ; 8 à 15 = «
Dépression modérée » ; 16 et plus = « Dépression sévère ». Si ces notes ne constituent en
aucun cas un diagnostic clinique, elles sont un indice de la sévérité de la symptomatologie
dépressive.

26
Pour chaque série, lisez les quatre propositions puis choisissez celle qui décrit le mieux votre état actuel.
Ne donnez qu'une réponse pour chaque proposition.

ACTUELLEMENT!:

Je ne me sens pas triste


Je me sens cafardeux(se) ou triste
Je me sens tout le temps cafardeux(se) ou triste, et je n'arrive pas à en sortir
Je suis si triste et si malheureux(se) que je ne peux pas le supporter

Je ne suis pas particulièrement découragé(e) ni pessimiste au sujet de l'avenir


J'ai un sentiment de découragement au sujet de l'avenir
Pour mon avenir, je n'ai aucun motif d'espérer
Je sens qu'il n'y a aucun espoir pour mon avenir, et que la situation ne peut s'améliorer

Je n'ai aucun sentiment d'échec de ma vie


J'ai l'impression que j'ai échoué dans ma vie plus que la plupart des gens
Quand je regarde ma vie passée, tout ce que j'y découvre n'est qu'échecs
J'ai un sentiment d'échec complet dans toute ma vie personnelle (dans mes relations avec mes parents, mon mari,
ma femme, mes enfants)

Je ne me sens pas particulièrement insatisfait(e)


Je ne sais pas profiter agréablement des circonstances
Je ne tire plus aucune satisfaction de quoi que ce soit
Je suis mécontent(e) de tout

Je ne me sens pas coupable


Je me sens mauvais(e) ou indigne une bonne partie du temps
Je me sens coupable
Je me juge très mauvais(e) et j'ai l'impression que je ne vaux rien

Je ne suis pas déçu(e) par moi-même


Je suis déçu(e) par moi-même
Je me dégoûte moi-même
Je me hais

Je ne pense pas à me faire du mal


Je pense que la mort me libérerait
J'ai des plans précis pour me suicider
Si je le pouvais, je me tuerais

Je n'ai pas perdu l'intérêt pour les autres gens


Maintenant, je m'intéresse moins aux autres gens qu'autrefois
J'ai perdu tout l'intérêt que je portais aux autres gens, et j'ai peu de sentiments pour eux
J'ai perdu tout intérêt pour les autres, et ils m'indiffèrent totalement

Je suis capable de me décider aussi facilement que de coutume


J'essaie de ne pas avoir à prendre de décision
J'ai de grandes difficultés à prendre des décisions
Je ne suis plus capable de prendre la moindre décision

Je n'ai pas le sentiment d'être plus laid qu'avant


J'ai peur de paraître vieux (vieille) ou disgracieux(se)
J'ai l'impression qu'il y a un changement permanent dans mon apparence physique qui me fait paraître disgracieux(se)
J'ai l'impression d'être laid(e) et repoussant(e)

Je travaille aussi facilement qu'auparavant


Il me faut faire un effort supplémentaire pour commencer à faire quelque chose
Il faut que je fasse un très grand effort pour faire quoi que ce soit
Je suis incapable de faire le moindre travail

Je ne suis pas plus fatigué(e) que d'habitude


Je suis fatigué(e) plus facilement que d'habitude
Faire quoi que ce soit me fatigue
Je suis incapable de faire le moindre travail

Mon appétit est toujours aussi bon


Mon appétit n'est pas aussi bon que d'habitude
Mon appétit est beaucoup moins bon maintenant
Je n'ai plus du tout d'appétit

Figure 10. Inventaire de dépression de Beck (version abrégée).


Les premières traductions françaises, à partir du questionnaire princeps de 1961, sont de Delay, Pichot,
Lempérière et Mirouze (1963), et Pichot et Lempérière (1964). Des versions modifiées du BDI ont suivi : révisions
dans les années 70 et en 1996 ; diverses formes proposées (variations du support, du nombre d’items).

27
Anxiété

! Inventaire d'anxiété état-trait (version Y)


L’inventaire d'anxiété état-trait (State Trait Anxiety Inventory, STAI) (Spielberger, 1983)
(figure 11) est un questionnaire d’auto-évaluation des aspects psychologiques de l’anxiété.

La version Y a été développée pour éliminer des items estimés plus en lien avec la
dépression.

Le test se compose de deux séries distinctes de vingt questions pour évaluer


respectivement l'état (STAI-YA) et le trait (STAI-YB). La première permet d’interroger la
personne sur son niveau d’anxiété au moment précis de la passation. Le degré d'accord ou
de désaccord vis-à-vis de chacune des affirmations proposées est exprimé à l’aide d’une
échelle de type Likert allant de « Pas du tout » à « Beaucoup ». C'est un indicateur des
modifications transitoires de l'anxiété provoquées par des situations particulières. En
revanche, la seconde demande du sujet une évaluation de son niveau d’anxiété habituel. La
réponse est indiquée à l’aide d’une échelle de type Likert variant de « Presque jamais » à «
Presque toujours ». Ceci a pour but de repérer l'anxiété comme disposition stable.

Chaque réponse à une proposition du questionnaire correspond à un score de 1 à 4 : 1


indique le degré d'anxiété le plus faible, et 4 le degré le plus fort. La note totale pour chaque
sous-échelle varie de 20 à 80.

Impulsivité

! Echelle d’impulsivité de Barratt (version 11)


L’échelle d’impulsivité de Barratt (Barratt Impulsiveness Scale, BIS) (figure 12), dont la
première version a été créée en 1959, est une échelle d’auto-évaluation de l’impulsivité
comprise comme un trait de personnalité.

La version 10 de la BIS distinguait trois sous-traits : l’impulsivité motrice (le fait d’agir en
l’absence de réflexion) ; l’impulsivité cognitive (la prise de décision cognitive rapide) ; la
difficulté de planification (l’orientation sur le présent et l’absence d’orientation vers le futur). Au
vu de l’absence du facteur « Impulsivité cognitive » dans les analyses factorielles de
différentes études, une révision s’est avérée nécessaire. L’analyse de corrélation sur
l’ensemble des items a mis en évidence plusieurs éléments pour lesquels les critères d’une
corrélation significative n’étaient pas retrouvés. En conséquence, la version 11 (Patton et al.,
1995) comporte désormais seulement trente items.

28
Plutôt Plutôt
Non Oui
non oui
1 Je me sens calme.
2 Je me sens en sécurité, sans inquiétude, en sûreté.
3 Je me sens tendu(e), crispé(e).
4 Je me sens surmené(e).
5 Je me sens tranquille, bien dans ma peau.
6 Je me sens ému(e), bouleversé(e), contrarié(e).
7 L’idée de malheurs éventuels me tracasse en ce moment.
8 Je me sens content(e)
9 Je me sens effrayé(e).
10 Je me sens à mon aise.
11 Je sens que j’ai confiance en moi.
12 Je me sens nerveux (nerveuse), irritable.
13 J’ai la frousse, la trouille (j’ai peur).
14 Je me sens indécis(e).
15 Je me sens décontracté(e), détendu(e).
16 Je suis satisfait(e).
17 Je suis inquiet, soucieux (inquiète, soucieuse).
18 Je ne sais plus où j’en suis, je me sens déconcerté(e), dérouté(e).
19 Je me sens solide, posé(e), pondéré(e), réfléchi(e).
20 Je me sens de bonne humeur, aimable.

Presque Presque
Parfois Souvent
jamais toujours
21 Je me sens de bonne humeur, aimable.
22 Je me sens nerveux (nerveuse), et agité(e).
23 Je me sens content(e) de moi.
24 Je voudrais être aussi heureux (heureuse) que les autres semblent
l’être.
25 J’ai un sentiment d’échec.
26 Je me sens reposé(e).
27 J’ai tout mon sang-froid.
28 J’ai l’impression que les difficultés s’accumulent à un tel point que je
ne peux plus les surmonter.
29 Je m’inquiète à propos de choses sans importance
30 Je suis heureux(se).
31 J’ai des pensées qui me perturbent.
32 Je manque de confiance en moi.
33 Je me sans inquiétude, en sécurité, en sûreté.
34 Je prends facilement des décisions.
35 Je me sens incompétent(e), pas la hauteur.
36 Je suis satisfait(e).
37 Des idées sans importance trottent dans ma tête, me dérangent.
38 Je prends les déceptions tellement à coeur que je les oublie
difficilement.
39 Je suis une personne posée, solide, stable.
40 Je deviens tendu(e) et agité(e) quand je réfléchis à mes soucis.

Figure 11. Inventaire d’anxiété état-trait (version Y).


En haut, le STAI-YA et, en bas, le STAI-YB évaluent respectivement anxiété-état et anxiété-trait. Les consignes se
rattachant à l’une et l’autre partie diffèrent par les niveaux d’évaluation considérés, synchronique dans un cas («
actuellement »), diachronique dans l’autre (« habituellement »). La traduction française est de Schweitzer et
Paulhan (1990).

29
Instructions : Les gens agissent et réfléchissent

OCCASIONNELLEMENT

PRESQUE TOUJOURS
différemment devant des situations variées. Ce

RAREMENT/JAMAIS
questionnaire a pour but d'évaluer certaines de vos
façons d'agir et de réfléchir.

SOUVENT
Lisez chaque énoncé et NOIRCISSEZ LE CERCLE
APPROPRIÉ situé à droite de l’affirmation.
Répondez vite et honnêtement.
1. Je prépare soigneusement les tâches à accomplir.......…..……. ! " # $
2. Je fais les choses sans réfléchir....................................……….. $ # " !
3. Je me décide rapidement..............................................………… $ # " !
4. Je suis insouciant…………………....................................…….... $ # " !
5. Je ne fais pas attention..................................................….….…. $ # " !
6. Mes pensées défilent très vite.........................................……… $ # " !
7. Je programme mes voyages longtemps à l'avance.........………. ! " # $
8. Je suis maître de moi.....................................................….…….. ! " # $
9. Je me concentre facilement..........................................…………. ! " # $
10. Je met de l'argent de côté raisonnablement..........…………….. ! " # $
11. Je ne tiens pas en place aux spectacles ou aux conférences.…. $ # " !
12. Je réfléchis soigneusement..........................................………... ! " # $
13. Je veille à ma sécurité d’emploi………………………………...... ! " # $
14. Je dis les choses sans réfléchir......................................………. $ # " !
15. J'aime réfléchir à des problèmes complexes...................……… ! " # $
16. Je change d'emploi...................................……………………..... $ # " !
17. J'agis sur un "coup de tête"..........................................………... $ # " !
18. Réfléchir sur un problème m'ennuie vite...........................…..... $ # " !
19. J'agis selon l'inspiration du moment...............................…….... $ # " !
20. Je réfléchis posément………........................................……….. ! " # $
21. Je change de logement ............................…………………….... $ # " !
22. J'achète les choses sur un "coup de tête".....................…….… $ # " !
23. Je ne peux penser qu'à un problème à la fois.................……... $ # " !
24. Je change de loisir....................….............…………………..….. $ # " !
25. Je dépense ou paye à crédit plus que je ne gagne.........……... $ # " !
26. Lorsque je réfléchis d’autres pensées me viennent à l’esprit.... $ # " !
27. Je m'intéresse plus au présent qu'à l'avenir....................……... $ # " !
28. Je m'impatiente lors de conférences ou de discussions..…..… $ # " !
29. J'aime les "casse-têtes"..............................................………… ! " # $
30. Je fais des projets pour l'avenir......................................……… ! " # $

Figure 12. Echelle d’impulsivité de Barratt (version 11).


Il s’agit de la forme à trente items du questionnaire de Barratt, avec cotation continue de 1 à 4. La traduction
française est de Baylé, Caci, Barratt, Guelfi, Jouvent et Olié.

30
L’analyse en composantes principales dans une approche exploratoire des items de la
version 11 identifie six facteurs primaires et trois facteurs de second ordre. Parmi ces
derniers, le facteur « Impulsivité attentionnelle » regroupe des items se rapportant à
l’instabilité cognitive et attentionnelle. Ensuite, le facteur « Impulsivité motrice » est composé
d’items ayant trait à l’impulsivité idéomotrice et aux attitudes de persévération. Enfin, le
facteur « Difficulté de planification » regroupe des items concernant le contrôle de soi,
l’organisation et la planification d’une action orientée vers le futur, et la capacité à traiter des
tâches cognitives complexes. Les items cognitifs qui composaient le facteur « Impulsivité
cognitive » de la BIS-10 se répartissent sur tous les facteurs.

Le mode de réponse correspond à une cotation de chaque item sur une échelle à quatre
points (« Rarement / Jamais » ; « Occasionnellement » ; « Souvent » ; « Presque toujours /
Toujours »). La révision de la BIS-10 a donné lieu également à une modification du mode de
cotation, avec l’introduction pour la BIS-11 d’une cotation continue allant de 1 à 4. L’absence
de réponse à un item est considérée comme une réponse non impulsive et est cotée en
conséquence. Le score total peut donc aller de 30 à 120. Il n’existe pas de normes
standardisées pour la BIS-11.

Craving

! Echelle de comportement et cognitions vis-à-vis de l’alcool


L’échelle de comportement et cognitions vis-à-vis de l’alcool (en anglais : Obsessive
Compulsive Drinking Scale, OCDS) (figure 13) (Anton et al., 1995) est l’échelle la plus
utilisée dans les protocoles de recherche sur le craving. Elle a été construite à partir de la
Yale-Brown Obsessive Compulsive Scale for heavy drinking (YBOCS-hd) se fondant sur la
nature obsessionnelle du craving.

Sous forme d’auto-questionnaire à quatorze items, elle a l’avantage de permettre une


interprétation individuelle de chaque item reproductible à chaque passation et d’améliorer
ainsi la fiabilité test-retest. Elle est composée de deux sous-échelles d’obsession et de
compulsion. Le score total compris entre 0 et 40 reflète le craving basal sur une période d’une
semaine.

Au vu de ses bonnes qualités psychométriques (Anton et al. 1996; Flannery et al., 2001;
Roberts et al., 1999), l’OCDS apparaît comme un instrument de choix dans l’évaluation de
l’évolution du patient et semble constituer un outil prédictif permettant de déterminer
l’éventualité d’une rechute (Anton, 2000).

31
OCDS Q4 Quelle est l’importance de la détresse ou de la perturbation que ces idées, pensées,
impulsions ou images liées à la consommation d’alcool génèrent lorsque vous ne
buvez pas?
! Les questions suivantes concernent votre consommation d’alcool et votre désir
de contrôler cette consommation dans les 7 derniers jours. 0 Aucune
Veuillez entourer le chiffre en face de la réponse qui s’applique le mieux à 1 Légère, peu fréquente et pas trop dérangeante
votre état. 2 Modérée, fréquente et dérangeante mais encore gérable
3 Sévère, très fréquente et très dérangeante
Q1 Lorsque vous ne buvez pas d’alcool, combien de votre temps est occupé par des 4 Extrême, presque constante et bloquant les capacités
idées, pensées, impulsions ou images liées à la consommation d’alcool?

0 A aucun moment Q5 Lorsque vous ne buvez pas, à quel point faites-vous des efforts pour résister à ces
1 Moins d’une heure par jour pensées ou essayer de les repousser ou de les détourner de votre attention quand
2 De 1 à 3 heures par jour elles entrent dans votre esprit? (Evaluez vos efforts faits pour résister à ces
3 De 4 à 8 heures par jour pensées, et non votre succès ou votre échec à les contrôler réellement)
4 Plus de 8 heures par jour
0 Mes pensées sont si minimes que je n’ai pas besoin de faire d’effort pour y résister.
Si j’ai de telles pensées, je fais toujours l’effort d’y résister
Q2 A quelle fréquence ces pensées surviennent-elles? 1 J’essaie d’y résister la plupart du temps
2 Je fais quelques efforts pour y résister
0 Jamais 3 Je me laisse aller à toutes ces pensées sans essayer de les contrôler, mais je le fais
1 Pas plus de 8 fois par jour avec quelque hésitation
2 Plus de 8 fois par jour, mais pendant la plus grande partie de la journée je n’y 4 Je me laisse aller complètement et volontairement à toutes ces pensées
pense pas
3 Plus de 8 fois par jour et pendant la plus grande partie de la journée
4 Ces pensées sont trop nombreuses pour être comptées et il ne se passe que Q6 Lorsque vous ne buvez pas, à quel point arrivez-vous à arrêter ces pensées ou à
rarement une heure sans que plusieurs de ces idées ne surviennent vous en détourner?

0 Je réussis complètement à arrêter ou à me détourner de telles pensées


Q3 A quel point ces idées, pensées, impulsions ou images liées à la consommation 1 Je suis d’habitude capable d’arrêter ces pensées ou de me détourner d’elles avec
d’alcool interfèrent-elles avec votre activité sociale ou professionnelle (ou votre quelques efforts et de la concentration
fonction)? Y a-t-il quelque chose que vous ne faites pas ou ne pouvez pas faire à 2 Je suis parfois capable d’arrêter de telles pensées ou de m’en détourner
cause d’elles? (Si vous ne travaillez pas actuellement, à quel point vos capacités 3 Je n’arrive que rarement à arrêter de telles pensées et ne peux m’en détourner
seraient-elles atteintes si vous travailliez?) qu’avec difficulté
4 Je n’arrive que rarement à me détourner de telles pensées même momentanément
0 Les pensées relatives à la consommation d’alcool n’interfèrent jamais. Je peux
fonctionner normalement
1 Les pensées relatives à la consommation d’alcool interfèrent légèrement avec mes Q7 Combien de verres de boissons alcooliques buvez-vous par jour?
activités sociales ou professionnelles, mais mes performances globales n’en sont
pas affectées 0 Aucun
2 Les pensées relatives à la consommation d’alcool interfèrent réellement avec mes 1 Moins d’un verre par jour
activités sociales ou professionnelles, mais je peux encore m’en arranger 2 De 1 à 2 verres par jour
3 Les pensées relatives à la consommation d’alcool affectent de façon importante 3 De 3 à 7 verres par jour
mes activités sociales ou professionnelles 4 8 verres ou plus par jour
4 Les pensées relatives à la consommation d’alcool bloquent mes activités sociales
ou professionnelles

Q8 Combien de jours par semaine buvez-vous de l’alcool? Q12 A quel point faites-vous des efforts pour résister à la consommation de boissons
alcooliques? (Evaluez uniquement vos efforts pour y résister et non votre succès
0 Aucun ou votre échec à réellement contrôler cette consommation)
1 Pas plus d’un jour par semaine
2 De 2 à 3 jours par semaine 0 Ma consommation est si minime que je n’ai pas besoin d’y résister – si je bois, je
3 De 4 à 5 jours par semaine fais l’effort de toujours y résister
4 De 6 à 7 jours par semaine 1 J’essaie d’y résister la plupart du temps
2 Je fais quelques efforts pour y résister
3 Je me laisse aller presque à chaque fois sans essayer de contrôler ma consommation
Q9 A quel point votre consommation d’alcool interfère-t-elle avec votre activité d’alcool, mais je le fais avec un peu d’hésitation
professionnelle? Existe-t-il des choses que vous ne faites pas ou ne pouvez pas faire 4 Je me laisse aller complètement et volontairement à la boisson
à cause de cette consommation? (Si vous ne travaillez pas actuellement, à quel
point vos capacités professionnelles seraient-elles affectées si vous travailliez?)
Q13 A quel point vous sentez-vous poussé à consommer des boissons alcooliques?
0 Le fait de boire n’interfère jamais – je peux fonctionner normalement
1 Le fait de boire interfère légèrement avec mon activité professionnelle mais 0 Je ne me sens pas poussé de tout
l’ensemble de mes capacités n’en est pas affecté 1 Je me sens faiblement poussé à boire
2 Le fait de boire interfère de manière certaine avec mon activité professionnelle, 2 Je me sens fortement poussé à boire
mais je peux m’en arranger 3 Je me sens très fortement poussé à boire
3 Le fait de boire affecte de façon importante mon activité professionnelle 4 Le désir de boire est entièrement involontaire et me dépasse
4 Les problèmes d’alcool bloquent mes capacités de travail

Q14 Quel contrôle avez-vous sur votre consommation d’alcool?


Q10 A quel point votre consommation d’alcool interfère-t-elle avec votre activité
sociale? Existe-t-il des choses que vous ne faites pas ou ne pouvez pas faire à cause 0 J’ai un contrôle total
de cette consommation? 1 Je suis habituellement capable d’exercer un contrôle volontaire sur elle
2 Je ne peux la contrôler qu’avec difficulté
0 Le fait de boire n’interfère jamais – je peux fonctionner normalement 3 Je dois boire et je ne peux attendre de boire qu’avec difficulté
1 Le fait de boire interfère légèrement avec mes activités sociales, mais l’ensemble 4 Je suis rarement capable d’attendre de boire même momentanément
de mes capacités n’est pas affecté
2 Le fait de boire interfère de manière certaine avec mes activités sociales, mais je
peux encore m’en arranger
3 Le fait de boire affecte de façon importante mes activités sociales
4 Les problèmes d’alcool bloquent mes activités sociales

Q11 Si l’on vous empêchait de boire de l’alcool quand vous désirez prendre un verre,
à quel point seriez-vous anxieux ou énervé?

0 Je n’éprouverais ni anxiété ni irritation


1 Je ne deviendrais que légèrement anxieux ou irrité
2 L’anxiété ou l’irritation augmenterait mais resterait contrôlable
3 J’éprouverais une augmentation d’anxiété ou d’irritation très importante et
dérangeante
4 J’éprouverais une anxiété ou une irritation très invalidante

Figure 13. Echelle de comportement et cognitions vis-à-vis de l’alcool.


La distinction de sous-échelles, « Pensées obsessionnelles » et « Envies compulsives », rappelle l’appartenance
de l’addiction aux désordres du spectre obsessionnel-compulsif, avec dimension obsessionnelle du craving pour
l’alcool. La traduction française est de Chignon, Jacquesy, Mennad, Terki, Huttin, Martin et Chabannes (1998).
32
! Echelle visuelle analogique de craving

Sur le modèle des procédés utilisés dans la prise en charge de la douleur, l'auto-
évaluation par échelle visuelle analogique (EVA) consiste à demander directement au patient
au moment de l’entretien le niveau de son craving, qui se trouve représenté à l’aide d’une
réglette graduée seulement en son dos. Cela nécessite une bonne compréhension. Le sujet
positionne le curseur mobile sur la réglette, la position à gauche étant l'absence de d’envie («
Pas du tout envie ») et la position à droite une envie maximale (« Très envie »). Le soignant
identifie au dos la graduation choisie, comprise entre 0 et 10 en fonction de l’intensité du
niveau instantané de craving.

Insight

! Echelle d’insight pour l’alcoolisme de Hanil


L’échelle d’insight pour l’alcoolisme de Hanil (Hanil Alcohol Insight Scale, HAIS) (figure
14) (Kim et al., 1998) est un auto-questionnaire à vingt items évaluant l’acceptation ou le rejet
par le sujet de ses difficultés avec l’alcool. Le questionnaire est composé d’énoncés
suggérant soit un bon insight soit un faible insight quant à une problématique alcoolique
actuelle. En fonction de son degré d’agrément (« D’accord », « Incertain », « Pas d’accord »)
avec chaque affirmation dans l’une ou l’autre de ces catégories, le patient obtient un score
par item respectivement de 2 à 0 ou de 0 à -2. Le score total est donc compris entre -20 et
20.

Les énoncés se répartissent en cinq catégories : reconnaissance d’un problème avec


l’alcool ; acceptation de la notion d’une perte de contrôle sur la consommation d’alcool, ou
d’une alcoolodépendance ; intentionnalité vers l’abstinence ; reconnaissance de la nécessité
d’un traitement.

Des notes seuils sont suggérées : -20 à 3 = « Insight faible » ; 4 à 15 = « Insight correct » ;
16 et plus = « Bon insight ». L’article princeps (Kim et al., 1998) rapporte avec ces critères
une sensibilité comprise entre 76,9 et 100,0 % et une spécificité de 83,3 à 94,9 %. Le
coefficient alpha de Cronbach de la HAIS est de 0,82 à 0,89 (Kim et al., 1998, 2007).

33
D’accord Incertain Pas
d’accord
1 . Ma consommation d’alcool me cause beaucoup de
problème.
2 . Je peux contrôler ma consommation à n’importe quel
moment si j’en ai envie.
3 . Tous mes problèmes seraient résolus si j’arrêtais de
boire.
4 . Ma consommation d’alcool ne pose pas problème aux
membres de ma famille.
5 . J’ai été hospitalisé (e) (je suis en cours de traitement) à
cause d’une consommation excessive.
6 . Je ne me sens pas bien quand les gens me considèrent
comme un buveur à problèmes.
7 . Je suis alcoolique.
8 . Je ne peux pas me passer d’alcool.
9 . Je suis vraiment désolé (e) pour la souffrance que j’ai
pu infliger aux autres à cause de ma consommation.
10 . Je déteste la personne qui m’a hospitalisé (e) (m’a mis
(e) sous traitement).
11 . Je ne vois pas où est le problème dans ma
consommation d’alcool.
12 . Lorsque je commence à boire, je ne peux plus
m’arrêter.
13 . J’ai juste besoin d’une certaine modération plutôt que
l’on m’empêche de boire.
14 . Beaucoup de gens autour de moi souffrent de ma
consommation d’alcool.
15 . Ma seule consommation d’alcool ne devrait pas
justifier mon hospitalisation (mon traitement).
16 . La consommation d’alcool m’a enlevé des choses
importantes.
17 . Me traiter d’alcoolique n’a pas de sens.
18 . Vivre sans alcool est le seul moyen de me sauver du
désastre.
19 . Je déteste tous les gens et l’environnement qui m’ont
conduit (e) à boire.
20 . J’ai de la chance de pouvoir être hospitalisé (e) pour
bénéficier d’un traitement.

Figure 14. Echelle d’insight pour l’alcoolisme de Hanil.


La traduction française est de Jaafari (2007).

Consommation alcoolique

! Questionnaire AUDIT
L’AUDIT est questionnaire mis au point par l’OMS pour dépister les consommations
d’alcool à risque, nocives ou massives (figure 9). Outil de première ligne, il comporte dix
questions couvrant les trois modalités d’usage de l’alcool : consommation d’alcool

34
dangereuse, consommation d’alcool nocive et alcoolodépendance. Il explore les douze
derniers mois.
Pour chaque question, plusieurs réponses sont proposées et à chaque réponse
correspond une notation de 0 à 4. Le total est la somme de toutes les notes des différentes
réponses. Avec un seuil de 5 ou plus, la sensibilité est de 84 % et la spécificité de 90 % pour
le repérage des trois conduites d’alcoolisation combinées. Les valeurs-seuils de la version
française ne sont pas définies de façon univoque. Cependant, on retient qu’un score
supérieur ou égal à 6 pour les femmes, et 7 pour les hommes, correspond à une
consommation à risque ; un score supérieur ou égal à 13 correspond à une
alcoolodépendance probable.

Dépendance nicotinique

! Test de dépendance nicotinique de Fagerström


La version française du Fagerström Test for Nicotine Dependence est une adaptation du
questionnaire de Heatherton, Kozlowski, Frecker et Fagerström (1991), qui évalue le niveau
de dépendance à la nicotine à l’aide de six questions. Le score compris entre 0 et 10, en
croissant, indique un degré de dépendance plus fort.

Test psychotechnique

! Questionnaire de latéralité manuelle d’Edinburgh


Il s’agit d’un questionnaire portant sur la préférence manuelle, et la force de celle-ci, au
cours d’une série d’activités (écrire, lancer, tenir une cuillère...). Un quotient de préférence est
calculé, compris entre -100 et 100 : -100 = « Gauche extrême » ; 100 = « Droite extrême ».

Tâche informatisée

Principe
Le principe de la tâche repose sur une épreuve de décision lexicale, c'est-à-dire la
classification d’une suite de lettres en « Mot » (mot appartenant à la langue française) ou «
Non-mot » (cas inverse), avec une présentation sérielle des suites de lettres au cours
d’essais successifs.

Le dispositif expérimental consiste en un ordinateur comportant le logiciel E-Prime®


(figure 15) et une boîte à boutons (figure 16).

35
Figure 15. Installation matérielle permettant la tâche informatisée : l’ordinateur (mis à disposition par le
CeRCA).
Au vu du faible encombrement et de la facilité d’utilisation du dispositif informatique, le matériel de test est installé
au sein d’un pavillon de l’hôpital, dans un bureau calme à l’écart des lieux mêmes de soins. Le trajet des unités
d’hospitalisation à la salle de test est fait à pied en quelques minutes, avec l’accompagnement de l’investigateur.
Le participant est assis face à l’écran, dans des conditions contrôlées de distance (distance yeux-écran : environ
60 cm, systématiquement évaluée pour chaque sujet ; port des lunettes de vue si nécessaire) et de lumière
(source de lumière diurne avec horaires de passage similaires ; minimisation des reflets sur l’écran).
Les contraintes techniques tiennent en particulier au type de moniteur, dont le taux de rafraîchissement doit être
adapté aux conditions du test (réglages de la résolution : 800x600 ; 100 Hz).

Figure 16. Installation matérielle permettant la tâche


informatisée : la boîte à boutons (mise à disposition par
le CeRCA).
Les réponses sont effectuées grâce à la boîte à boutons situé
à droite du participant, de sorte que la sélection des réponses
peut se faire avec l’index et le majeur de la main droite,
stratégie adoptée spontanément par l’ensemble des
participants après la série des essais d’entraînement.
C’est le logiciel E-Prime® qui permet le recueil, avec un
enregistrement à la milliseconde, des données caractérisant
les réponses. Ce même logiciel est conçu pour programmer
la présentation des séquences d’essais, avec un contrôle du
décours temporel de celles-ci.

Sur l’écran d’ordinateur, les lettres, en caractères d’imprimerie blancs sur fond noir, sont
présentées de façon centrale en un point, pendant trois secondes − ce temps est la durée
maximale du stimulus, effective en l’absence de réponse du sujet.

Les consignes données aux participants sont explicites seulement concernant ces
premiers éléments.

Tout au long du test, est effectué à chaque essai, avant présentation de la cible de
décision lexicale, un amorçage subliminal masqué par un mot.

Le mot amorce possède les mêmes caractéristiques typographiques que la cible.

36
Aucun participant n’est préalablement informé de cette disposition.

Un essai (figure 17) est décomposé en :


• Une croix de fixation présentée au centre de l’écran (700 ms) ;
• Un masque antérieur composé de symboles dièses qui apparaissent en lieu
et place de la croix (200 ms) ;
• Un mot-amorce subliminal (30 ms) ;
• Un masque postérieur composé de symboles dièses contribuant à la non-
visibilité de l’amorce (70 ms) ;
• Un écran noir (100 ms) qui participe de l’asynchronie d’apparition du stimulus
entre amorce et cible (200 ms) ;
• Un mot ou un pseudo-mot, cible qui fait l’objet de la réponse du sujet quant à
sa nature lexicale dans un temps maximal de 3 s ;
• Une étoile blanche qui annonce l’essai suivant.

Figure 17. Principe de la tâche :


déroulement d’un essai au cours d’une
série.
Chaque série de la tâche principale
comporte des consignes écrites, cent
soixante essais et des remerciements.
Un essai se décompose en :
• Une croix de fixation présentée au
centre de l’écran pendant 700 ms ;
16 • Un masque antérieur composé de
0e symboles dièses pendant 200 ms ;
ss
ais • Une amorce subliminale, c'est-à-dire
un mot présenté pendant 30 ms ;
• Un masque postérieur composé de
symboles dièses pendant 70 ms ;
• Un écran noir de 100 ms ;
• Une cible, mot ou pseudo-mot, qui fait
l’objet de la réponse du sujet, dans un
temps maximal de 3 s ;
1e • Une étoile blanche qui annonce l’essai
700 ms ss suivant.
ai Le stimulus onset asynchrony (SOA) entre
200 ms
amorce et cible, durée entre début de
présentation de l’amorce et début de
30 ms
présentation de la cible, correspond à 200
70 ms ms.

SOA
100 ms

max 3 sec

2 sec

37
La tâche comporte trois séries (figure 18), dont la passation complète se fait sur deux
jours. Chaque série est conçue de la façon suivante :
• Quarante paires « Amorce spécifique - cible mot » ;
• Quarante paires « Amorce neutre - cible mot » ;
• Quatre-vingts paires « Amorce neutre - cible pseudo-mot ».

Jour 1 Jour 2

SERIE Alcool SERIE Semantique


160 essais 160 essais

Entraînement Entraînement Entraînement Validation


10 essais SERIE Appétitif vérification du subliminal
10 essais
160 essais
Voir Figure 24
SERIE Semantique SERIE Alcool
160 essais 160 essais

160 ESSAIS randomisés

40 essais amorce SPECIFIQUE cible = MOT


SERIE 40 essais amorce NEUTRE cible = MOT
80 essais amorce NEUTRE cible = NON-MOT

Voir Figure 17

Figure 18. Principe de la tâche : déroulement de la séquence des séries.


Le premier jour de la tâche informatisée, lors de la session du jour 1 (en haut), le participant se voit expliquer les
consignes de décision lexicale et l’utilisation de la boîte à boutons ; il effectue alors dix essais d’entraînement en
présence de l’investigateur afin de s’assurer de sa bonne compréhension du déroulement du test. Le sujet est
alors laissé seul dans la pièce et passe les séries « Sémantique » et « Alcool » (avec contrebalancement de l’ordre
de ces séries entre les sujets).
Le second jour (en haut), le participant bénéficie d’un rappel du déroulement des essais et réalise la série «
Appétitif ».
Une fois la tâche principale achevée, la tâche de validation est effectuée, avec une explication préalable des
nouvelles conditions de test, ainsi que la formulation des consignes adaptées. Cette étape dure moins de dix
minutes.
Le déroulement détaillé d’une série de la tâche principale (en bas) comprend la présentation sérielle, selon un
ordre aléatoire, de quarante essais « Amorce spécifique - cible mot », de quarante essais « Amorce neutre - cible
mot », et de quatre-vingts essais « Amorce neutre - cible pseudo-mot ». La durée d’une série est d’une dizaine de
minutes.

On désigne comme spécifique une amorce possédant l’une des caractéristiques


suivantes :
1. Ayant un lien sémantique avec la cible, c'est-à-dire qu’il existe une association de sens
entre les deux mots, non arbitraire, collectivement reconnue (ce sont les amorces
spécifiques de la série d’essais appelée « Sémantique ») ;
2. Appartenant à une catégorie sémantique qui renvoie à la consommation d’alcool (ce
sont les amorces spécifiques de la série d’essais appelée « Alcool ») ;

38
3. Ayant une valeur particulière sur le plan appétitif, hors domaine de l’alcool, parce que
le mot a trait à un contenu sémantique agréable, plaisant, suscitant un attrait, provoquant
une envie, c'est-à-dire avec une valence émotionnelle positive ou bien une force à induire
un état d’activation physiologique (ce sont les amorces spécifiques de la série d’essais
appelée « Appétitif »).

L’ensemble des amorces neutres est composé de mots sans dénotation ou connotation
explicite collectivement identifiée permettant de les rapporter à l’une ou l’autre des catégories
spécifiques citées ci-dessus.

Un mot est désigné comme tel dans l’étude s’il appartient à la langue française.

Un pseudo-mot est une chaîne de caractères ressemblant à un mot réel mais n'ayant
aucun sens. Les pseudo-mots respectent les conventions orthographiques de la langue
française et sont donc, à l'instar des mots, prononçables (par exemple, « ZOL » ou «
GOBIRIT »). Les pseudo-mots se distinguent des non-mots dont ils sont une sous-classe. Un
non-mot est une chaîne de caractères ne respectant pas obligatoirement les règles
phonologiques d'une langue (par exemple, « DGFTUB »). Il s’agit de suites de lettres
dépourvues de sens et souvent imprononçables.

Cette dernière distinction n’est pas pertinente pour le participant lors de la réalisation de la
tâche. Aussi, bien que l’investigateur ait seulement utilisé des pseudo-mots dans les essais
concernés, ceux-là ont été désignés pour le participant sous le terme générique « Non-mot ».

Il y a trois séries de cent soixante essais, désignées de la façon suivante : « Sémantique


», « Alcool » et « Appétitif ». L’agencement des séries au cours de la tâche respecte toujours
les règles suivantes :
• Les séries « Alcool » et « Appétitif » ne sont pas présentées lors de la même
session, pour les raisons précédemment explicitées ;
• L’ordre des séries « Sémantique » et « Alcool », qui sont effectuées le même
jour, est contrebalancé au sein des participants.

Paradigme d’amorçage subliminal masqué

L’amorçage, en général, désigne un ensemble de paradigmes expérimentaux reposant


sur la présentation d’un stimulus amorce et d’un stimulus cible, l’effet d'amorçage
correspondant dans les résultats expérimentaux à un effet de la présence et / ou de la nature
de l’amorce sur les variables dépendantes caractérisant le traitement de la cible. L’amorçage
39
conscient repose sur la perception consciente de l’amorce mais sans conscience de ses
effets sur le comportement ultérieur – on parle d’« automaticité post-consciente » (Fiske &
Taylor, 2001). L’amorçage non conscient s’appuie sur des amorces non conscientes en
termes cognitifs.

Il existe diverses façons de rendre une information non consciente : cécité induite par le
mouvement, rivalité binoculaire, masquage, cécité inattentionnelle. Le paradigme d'amorçage
subliminal masqué (figure 19) est une technique employée pour étudier les mécanismes
impliqués dans la reconnaissance des mots. Il consiste à présenter au sujet pendant un très
court laps de temps une amorce, mot ou pseudo-mot, suivie d'un mot ou pseudo-mot cible
sur lequel porte la tâche. Cet amorçage présente deux caractéristiques : non seulement
l'amorce est présentée pendant une durée très brève, moins de quatre-vingts millisecondes
(présentation subliminale) mais elle est aussi masquée par des symboles présentés avant et
après celle-ci (masquage visuel). Le masquage visuel est un type particulier de stimulus
subliminal : on réduit la visibilité du stimulus subliminal en présentant un autre stimulus dans
une proximité temporelle et spatiale.

L'objectif de ce paradigme est de manipuler les caractéristiques de l'amorce et les


relations à la cible afin d'étudier des mécanismes associés à la reconnaissance de mots. Ont
été étudiés les aspects orthographiques, phonologiques, morphologiques contribuant à la
reconnaissance des mots, ainsi que des caractéristiques supposant un accès au sens des
mots.

Modèle d’un amorçage subliminal avec masquage visuel


Masque postérieur Stimulus amorce Masque antérieur Stimulus cible
######## AMORCE ######## CIBLE

Moins de 80 msec

Asynchronie d‛apparition du stimulus

Figure 19. Paradigme de l’amorçage subliminal masqué.


La présentation très brève d’un stimulus suppose la perception de celui-ci en deçà du niveau de conscience.
On désigne sous le terme d’asynchronie d’apparition du stimulus (« stimulus onset asynchrony », SOA) le délai
entre début de la présentation de l’amorce et début de la présentation de la cible.
La présentation de masques, immédiatement antérieure et postérieure à celle du stimulus amorce, renforce la
non-visibilité de ce dernier.
Le stimulus cible, consciemment visible, est celui sur lequel porte directement la tâche dans laquelle le sujet est
engagé (par exemple, dans les études ayant trait au traitement des mots : dénomination, décision lexicale,
catégorisation lexicale).

40
Ce type d’amorçage a suscité des controverses, tant sur son existence que sur sa nature
– pour une approche détaillée de la question, on peut se référer aux revues de Kouider &
Dehaene, 2007 et van den Bussche et al., 2009. Les enjeux de ce débat concernent :
l’effectivité de l’amorçage masqué ; les caractéristiques techniques et méthodologiques
requises pour ce type d’amorçage ; la nature du traitement de l’information présentée de
manière subliminale.

Un point essentiel est de savoir s’il existe un traitement sémantique de l’information


subliminale ou bien une spécification motrice directe avec mise en place d’une stratégie
stimulus-réponse – éventuellement avec des substrats cérébraux différents, une régulation
top-down différente selon la voie considérée (Kiefer, 2007). Dans une tâche de comparaison
de nombres (identifier si le nombre cible est plus petit ou plus grand qu’une constante
donnée) avec amorçage subliminal par un autre nombre en notation arabe ou verbale
(Dehaene et al., 1998), on observe des distributions différentes des temps de réponse selon
la congruence ou non du couple amorce-cible au cours des essais, c'est-à-dire un effet
d’amorçage inconscient. L’amorce subliminale peut affecter une tâche sémantique. Des
éléments vont contre l’hypothèse d’une réponse correspondant à un mapping stimulus-
réponse : ni l’effet d’amorçage ni l’effet de distance ne varient avec l’entraînement des sujets,
et l’effet d’amorçage existe dès le premier bloc d’une nouvelle série d’essais avec
changement de l’instruction de réponse (Dehaene et al., 1998). On observe également que
l’effet d’amorçage subliminal peut s’étendre à des amorces nouvelles, jamais vues au cours
de l’expérience (Naccache & Dehaene, 2001).

Le traitement sémantique de l’information est l’hypothèse forte (van den Bussche et al.,
2009). Ces conclusions sont renforcées par les études avec couplage à des techniques
morphologiques, procédés électrophysiologiques ou imagerie. Pendant une tâche de
décision lexicale, on observe des modifications de la N400, index électrophysiologique de
traitement sémantique, en lien avec la présentation d’un stimulus subliminal sémantiquement
associé à la cible (Kiefer & Brendel, 2006). Dans une étude d’IRMf reposant sur le même
type de tâche, est mise en évidence une réduction d’activation dans le gyrus temporal
médian gauche, région impliquée dans le traitement sémantique (Devlin et al., 2004).

C’est au regard des standards de rigueur méthodologique ressortant de la méta-analyse


de van den Bussche et al. (2009), et des études ayant trait aux aspects affectifs ou
motivationnels de stimuli subliminaux dans des populations de sujets malades (par exemple,
dans la dépression, Dannlowski et al., 2006 ; dans les addictions : Franken et al., 2000;
Leventhal et al., 2008), que les paramètres de l’étude mise en place ont été définis tels
41
qu’exposés dans la description de la tâche. Dans ce cadre, il est à noter que l’on sait peu de
choses de la durée d’effet de tels amorçages. Sweeny et al. (2009) observent chez des
sujets sains que la présentation subliminale de visages exprimant une émotion plusieurs
heures avant test influe sur la réalisation ultérieure d’une tâche portant sur ces mêmes
visages exprimant une autre émotion, suggérant dans ce cas des effets non éphémères.
Dans le cadre de l’étude, des précautions quant à l’espacement potentiellement activatrices
en termes d’attractivité ont été respectées (figure 7).

Sélection des stimuli


La conception de la tâche a nécessité la détermination de l’ensemble des stimuli amorces
et cibles employés au cours des essais.
Il a été nécessaire d’établir des listes :
• Des mots cibles : il s’agit toujours de mots neutres ;
• Des pseudo-mots cibles ;
• Des amorces : il s’agit toujours de mots ; ils sont neutres ou spécifiques
(sémantiquement associés à la cible ; en lien avec l’alcool ; ou encore à valence
appétitive).

armée → guerre louche → cuillère


bain → douche mémoire → souvenir
bobine → fil monarchie → roi
bol → tasse navire → bateau
bravoure → courage parapluie → ombrelle
canard → cygne parent → enfant
casserole → poêle peigne → brosse
cerise → orange penderie → armoire
chèque → monnaie pratique → théorie
cité → ville rage → colère
collant → bas rire → comédie
égalité → liberté sacoche → cartable
enfer → diable saucisson → jambon
épingle → aiguille short → pantalon
erreur → faute stylo → crayon
évier → lavabo tenaille → pince
fauteuil → canapé torchon → serviette
gilet → pull vélo → moto
horloge → montre verrou → serrure
jupe → robe violon → guitare

Figure 20. Couples de mots ayant un lien sémantique.


Dans la série « Sémantique », quarante essais portant sur des mots sont composés de paires de
mots, une amorce subliminale masquée (à gauche dans chaque colonne) et une cible (à droite
dans chaque colonne), ayant ensemble un lien sémantique.

42
Les critères généraux de sélection des mots sont les suivants :
• Catégorie grammaticale : nom commun ;
• Longueur : entre 3 et 10 lettres ;
• Fréquence lexicale dans les livres : supérieure à 1 par million d'occurrences.

Pour cela, les caractéristiques lexicales des mots ont été explorées grâce à l’outil Lexique
3 (www.lexique.org). Il s’agit d’une base de données mettant à disposition pour 135 000 mots
du français les représentations orthographiques et phonémiques, la syllabation, la catégorie
grammaticale, le genre, le nombre, les fréquences, les lemmes associés, etc.

Les critères spécifiques de sélection des mots dépendent de la catégorie considérée.

Dans la catégorie « Sémantique », les couples de mots « Amorces - cibles » ayant un lien
sémantique (figure 20) ont été suggérés par la littérature (Ferrand, 2001; Ferrand & Alario,
1998), ainsi que par des associations d’idées effectuées par les trois « juges » pour la
sélection, l’investigateur et deux personnes collaborant à l’étude.
Dans la catégorie « Alcool », les mots amorces en lien avec l’alcool (figure 21) ont été
d’abord choisis à partir d’associations d’idées spontanées parmi les personnes interrogées
dans l’entourage de l’investigateur, ainsi que de recherches documentaires, tout
particulièrement sur internet : articles généraux sur le sujet, vocabulaires établis autour de la
thématique sur des sites spécialisés, forums de passionnés, forums de sujets
alcoolodépendants.
De là, ont été éliminés les mots potentiellement aversifs, renvoyant par exemple à des
maladies en lien avec l’alcool tels que « cirrhose » ou « cancer ». Le faible corpus de mots
restants a obligé à ne pas pousser plus avant une opérationnalisation du mode de sélection
des mots. Ce sont alors les critères lexicaux, et les critères statistiques d’équilibration des
séries qui ont été déterminants.
Dans la catégorie « Appétitif », aucune base de données de mots français de nature
appétitive n’a été retrouvée. L’étude conjointe de la liste établie pour la catégorie sémantique
« Emotion » (Niedenthal et al., 2004.) et de la base de données Valemo 735 de Syssau &
Font (http://www.lexique.org/docAutresBases.php), proposant une évaluation standardisée
des caractéristiques émotionnelles d'un corpus de six cents mots, a permis une première
sélection. Toutefois, observant l’insuffisance de l’aspect hédonique des mots ainsi retenus, et
leur caractère le plus souvent abstrait, l’ensemble des personnes collaborant à l’étude, à
partir d’associations d’idées spontanées autour du plaisir et de l’envie dans différents
domaines de la vie quotidienne, a établi une nouvelle liste de cent soixante mots. Dans cette
liste, quelques mots neutres, comme « passoire », ont été adjoints de façon à servir de

43
contrôle. Elle a alors servi de base à un questionnaire soumis à l’ensemble de l’entourage
personnel et professionnel de l’équipe. A la question « Est-ce que ce mot éveille en vous une
envie ? », consigne était donnée de répondre par une note allant de 0 (« Pas du tout ») à 5 («
Enormément ») pour chaque item. L’aspect appétitif a été considéré comme collectivement
reconnu pour des moyennes de scores supérieures à 3.

alcool demi
anisette gin
apéritif glaçon
bar gnôle
bière ivresse
bistrot liqueur
boisson martini
bouchon pastis
bouteille pinard
brasserie porto
carafe punch
cave raisin
champagne rhum
chope rosé
chopine troquet
cidre verre
cocktail vigne
cognac vin
comptoir vodka
cuite whisky

Figure 21. Mots amorces en lien avec l’alcool.


Dans la série « Alcool », quarante essais portant sur des mots sont précédés d’une amorce subliminale
masquée en lien avec l’alcool. En l’absence de base de données standardisée sur le thème, et en raison du
faible corpus lexical commun disponible si l’on s’intéresse à un lien direct et évident avec l’alcool, ces amorces
ont fait l’objet d’une sélection par l’investigateur en fonction des contraintes expérimentales de l’étude.

Cela a permis, après dépouillement anonyme de cinquante questionnaires, d’établir une liste
des mots de la catégorie pour l’étude (figure 22).

Les mots neutres, figurant pour certains parmi les amorces, pour d’autres parmi les cibles,
ont été sélectionnés de façon directe grâce à des recherches documentaires sur des articles
de la presse quotidienne, ou bien par élimination de catégories précédentes lors du
processus de sélection décrit ci-dessus. Enfin, quand des questions d’équilibration statistique
le requéraient, des listes obéissant aux critères attendus ont été générées dans Lexique.

44
agréable fruit
ambition gaieté
astuce génie
beau gloire
bien honnêteté
calme humour
capacité intuition
chant justice
chocolat maîtrise
clair miracle
confort paradis
création passion
douceur qualité
entrain repos
espérance richesse
facilité santé
fantasme sécurité
fête sieste
fleur souplesse
franchise stabilité

Figure 22. Mots amorces à valence appétitive.


Dans la série « Appétitif », quarante essais portant sur des mots sont précédés d’une amorce subliminale
masquée à valence appétitive. En l’absence de base de données standardisée en langue française sur le thème,
ces amorces ont fait l’objet d’une sélection par l’investigateur au travers d’une enquête auprès de cinquante sujets
volontaires en population générale.

Les mots amorces neutres précédant des cibles mots et les mots cibles sont propres à
leur série d’attribution. En revanche, les mots amorces neutres précédant des cibles pseudo-
mots (figure 23) sont répétés d’une série d’essais à l’autre. C’est donc le seul assortiment de
stimuli qui est présenté à plusieurs reprises au cours de la tâche.

actualité coton gravité publicité


aliment débat grève rappel
alliance défi gros raton
année délire grue réforme Figure 23. Mots neutres amorçant
archives densité handicap rencontre les pseudo-mots.
art destin idole revenu Dans chaque série de la tâche
atelier discours inflation risque informatisée de décision lexicale, les
bac document influence saut quatre-vingts essais portant sur les
balai édition instance seau pseudo-mots sont précédés d’une
bloc éducation intention sénateur amorce subliminale masquée à
bus étudiant joue serpent valence neutre. Les amorces neutres
carburant explosion leçon structure des pseudo-mots sont identiques
cerveau farine lin taxe d’une série à l’autre. Seuls les pseudo-
chanteur figue objet technique
mots cibles varient, en fonction des
chiffre film officine totalité
propriétés lexicales des mots cibles de
la liste concernée.
classe fonction ouvrier tuteur
coiffeur fraise paralysie tyran
conduite friture paye venue
conseil fruit poids vol
contrôle grandeur prologue vue

45
S’agissant des critères de nombre de lettres et de fréquence écrite, la non-différence
statistique des listes de mots ainsi établies pour les trois séries a été contrôlée.

Afin de définir les pseudo-mots cibles, l’investigateur a, premièrement, établi, à l’aide d’un
générateur de non-mots (http://www.lexique.org/toolbox/toolbox.pub/), des listes de non-
mots. Dans chaque série considérée, les cibles mots ont servi de base ; ils ont été modifiés
par changement de deux lettres grâce au programme, qui vérifie dans le même temps
l’adéquation des suites de lettres générées à la langue française. Ensuite, une relecture de
ces items a permis d’identifier les seuls pseudo-mots, ces derniers étant définis par leur
caractère prononçable. Le mode de détermination des pseudo-mots cibles respecte donc le
nombre moyen de longueur de mot précédent de la liste de mots dont ils sont issus, de sorte
que les listes ainsi établies sont équilibrées pour le critère.

Des listes de mots et pseudo-mots ont également été nécessaires pour les dix essais
d’entraînement inaugurant chaque session et pour la tâche de validation qui clôture la tâche
informatisée. Les mots choisis ici sont toujours de nature neutre.

Tâche de validation
Etape essentielle de l’étude, il est nécessaire de vérifier le caractère subliminal de la
présentation des stimuli supposés tels. Divers procédés de mesure de visibilité existent.

Le plus simple consiste en une description verbale par le participant de l’étude de sa


propre perception à partir d’un rapport conscient. Il repose sur un accès subjectif à
l’information. Cependant, les problèmes posés par ce mode de validation sont nombreux
(Merikle & Danneman, 1998), au point que cela illustrerait seulement des idées préconçues
individuelles au sujet de la perception subliminale. Par exemple, si le sujet détecte l’objectif de
l’étude, sa réponse est sous l’influence des attentes qu’il suppose de la part de
l’expérimentateur – ce d’autant qu’il existe toujours parmi les essais des cas limites,
intermédiaires, incertains en termes de visibilité, de sorte que l’affirmation de la visibilité ou
non du stimulus subliminal se fera alors avec un certain degré de liberté, en fonction des «
préjugés » du participant.

Parmi les mesures objectives, on retrouve des tâches que le sujet essaie de réaliser
directement sur les stimuli supposés invisibles. Néanmoins, les conditions (c'est-à-dire
l’impossibilité du sujet à parvenir à faire la tâche, avec les problèmes de motivation qui s’y
attachent) et le caractère paradoxal de la démarche (la démonstration de cette impossibilité)
sont à souligner.
46
Il faut considérer les variations de performance observées en fonction de la tâche choisie,
des compétences cognitives mises en jeu. Ainsi, après présentation extrêmement brève (une
milliseconde) de formes, sont mises en évidence des performances variables aux deux
tâches demandées : s’agissant du jugement direct sur la reconnaissance de forme, il y a,
face à deux formes proposées, 50 % de choix vers la forme présentée auparavant, soit le
niveau du hasard ; en revanche, le choix dans une tâche indirecte de formulation d’une
préférence pour l’une ou l’autre forme se porte de façon significative vers la forme familière
déjà présentée (Kunst-Wilson & Zajonc, 1980).

En la matière, des critiques méthodologiques majeures ont été adressées (Holender,


1986) : défaut de rigueur des mesures ; incohérences quant au moment choisi pour celles-ci ;
défaut de similarité des stimuli (compound dans l’expérience principale et stimulus isolé en
tâche de vérification) ; modification de cadence des essais ; nombre insuffisant d’essais.
Reingold & Merikel (1988) s’attachent à la notion de la difficulté à trouver une mesure
exhaustive de la conscience du stimulus.

Un point litigieux au décours du test de validation est le choix du seuil définissant une non-
visibilité consciente. Si l’on considère que 50 % définit la référence d’un choix aléatoire,
Dehaene souligne l’intérêt à considérer qu’il puisse y avoir même pour des scores assez
proches de 50 % mais légèrement plus élevés une forme de « conscience partielle » des
essais avec perception fragmentaire (ou bien une conscience totale sur une fraction des
essais). Et des performances meilleures que le hasard traduisent elles un traitement
conscient, ou bien un traitement subliminal ?

Il existe en dernier lieu des mesures de visibilité reposant sur la théorie de détection du
signal (Greenwald et al., 2003).

La mesure objective de visibilité choisie au cours de l’étude (figure 24) repose sur les
capacités de discrimination des sujets dans une tâche de catégorisation « Mot » ou « Non-
mot » avec des conditions de présentation légèrement modifiées. D’une part, la cible, au
cours de chaque essai, est un stimulus masqué unique, mot ou pseudo-mot. D’autre part, la
tâche de vérification se compose d’une série unique de quatre-vingts essais, dans un design
incluant quatre durées possibles de présentation en fonction des essais (en ordre aléatoire,
soit au total vingt essais par durée). La moitié vise des mots, l’autre moitié des pseudo-mots.

47
1
es
sa
i

ms
30 0 ms
6 ms
90 0 ms
12

20 x 30 ms - cible MOT ou NON-MOT


1
es
sa
i

20 x 60 ms - cible MOT ou NON-MOT


80 x ms
30 0 ms
6 ms
90 0 ms
12

20 x 90 ms - cible MOT ou NON-MOT

20 x 120 ms - cible MOT ou NON-MOT

Figure 24. Tâche de validation.


Au décours de la tâche principale, une mesure de non-visibilité des stimuli subliminaux précédemment utilisés
est effectuée. Il s’agit toujours d’une tâche de décision lexicale mais elle porte sur des essais avec
présentation de mots ou pseudo-mots en condition masquée, et, selon un ordre aléatoire, à des vitesses
diverses : d’une part avec la même durée de présentation que celle de l’amorce subliminale dans la tâche
principale, c’est à dire 30 ms ; d’autre part à des durées progressivement croissantes, 60 ms, 90 ms et 120
ms.
Un essai se décompose ici en :
Une croix de fixation présentée au centre de l’écran ;
Un masque antérieur composé de symboles dièses ;
Une suite de lettres, mot ou pseudo-mot, sur laquelle porte la réponse du sujet ;
Un masque postérieur composé de symboles dièses ;
Une étoile verte qui permet encore de répondre, dans un temps maximal de 3s ;
Une étoile blanche qui annonce l’essai suivant.
Afin de s’assurer de la validité des conditions de l’étude, on s’attend à observer une performance équivalente
au niveau du hasard pour la durée de 30 ms (soit 50 %), et des performances croissantes pour les autres
durées.

48
Dans les consignes écrites et orales de la tâche de validation, l’investigateur encourage
les participants à un choix forcé : le sujet doit se forcer à répondre même s’il a l’impression de
n’avoir aucune information pour prendre la décision. Cependant, sans inciter les participants
à une stratégie particulière par défaut (en particulier, une orientation vers la réponse « Non-
mot » n’est pas explicitement préconisée) : le sujet doit donner au hasard l’une ou l’autre
réponse s’il est incertain.

Analyses statistiques
Les données brutes recueillies ont été lissées en éliminant individu par individu, série par
série, les essais pour lesquels le temps de réaction s’éloignait de plus de deux déviations
standards de la moyenne des essais de la série. De la sorte, dans chaque série, un à douze
essais ont été retirés des analyses : 6,27 en moyenne dans la série « Sémantique » ; 7,00 en
moyenne dans la série « Alcool » ; 6,74 dans la série « Appétitif » ; soit 4,17 % du total des
essais, avec une prédominance d’essais portant sur des pseudo-mots.
Les données sont exprimées en moyennes ± erreurs standards à la moyenne.
Leur analyse est effectuée avec le logiciel Statistica® en utilisant les groupes « Patients »
versus « Témoins » comme facteur inter et la nature des essais, incluant les mesures du
temps de réaction et les pourcentages de réponses correctes, comme facteur intra en
mesures répétées d’analyses de variances (ANOVA). Après confirmation des effets
principaux, les différences entre moyennes sont analysées par les tests post hoc appropriés,
indiqués dans les résultats.
Des analyses de corrélation paramétriques ont été réalisées afin de déterminer, sur le
plan dimensionnel, les relations entre mesures psychiatriques et performances dans la tâche.

49
Résultats préliminaires
"Excellent!" I cried. "Elementary," said he.
(Watson et Holmes, The Adventure of the Crooked Man)

Echantillons

Les résultats préliminaires portent sur vingt et un participants. Les onze patients, dix
hommes et une femme, ont une moyenne d’âge de 45.36 ans (± 1.87) pour un niveau
d’étude de 11.18 années (± 0.44 années). Ils ont tous un diagnostic d’alcoolodépendance
confirmé par les critères du MINI. Les dix témoins, huit hommes et deux femmes, ont une
moyenne d’âge de 47.50 ans (± 2.82) pour un niveau d’étude de 12.50 années (± 0.64
années). Leur score AUDIT, pour le dépistage en première ligne de problèmes avec l’alcool,
est en moyenne de 2.40 (± 0.52), un onzième témoin ayant été exclu des analyses en raison
d’une notation évocatrice d’une consommation problématique. Deux patients et un témoin
sont considérés comme gauchers (test de latéralité manuelle < 0).

L’appariement actuel est imparfait. En effet, les échantillons ne permettent un


appariement simple individuel de chaque patient avec un témoin. On s’intéressera donc aux
différences globales observables. En résulte une perte de puissance statistique.

Il n’y a pas de visibilité des stimuli subliminaux masqués dans les


conditions de l’étude

Lors de la tâche de validation, il existe des différences significatives de performances en


fonction de la durée de présentation [Fdurée de présentation=26.41, p<0.001 ; Fgroupe=2.61, p=0.12;
Fdurée de présentation x groupe=1.31, p=0.28] (figure 25 A-C). Pour un stimulus de 30 ms, soit la
durée utilisée dans l’étude pour le subliminal, les réponses correctes totales des participants
sont, comme attendu afin de valider les conditions de la tâche principale, au niveau du
hasard (figure 25 A), indiquant la non-visibilité des stimuli et l’impossibilité de donner une
réponse orientée par la nature réelle de la cible.

Quand on détaille ce niveau de performance, on observe que, bien que la stratégie


préconisée par l’investigateur soit de répondre au hasard, les participants ont, en l’absence
de visibilité, préférentiellement effectué des réponses sur la touche « Non-mot » : 70 % des
cas. Ainsi, la performance dans la condition cible mot est de 30 %, et de 70 % dans la
condition cible pseudo-mot. L’amplitude de cette préférence va diminuant à mesure que la

50
présentation est plus longue [Fcible=19.83, p<0.001; Fcible x durée de présentation=21.83, p<0.001]
(figure 25 B et C). Dans le même temps, le pourcentage de réponses correctes totales pour
les durées de 60, 90 et 120 ms s’élève à 73.32, 71.63 et 75.82% chez les patients et 75.06,
79 et 83.57% chez les contrôles (figure 25 A). L’ensemble de ces résultats est en faveur
d’une visibilité croissante pour ces seuils de présentation qui sont au-delà de la durée de
présentation choisie dans l’étude.

A B C

D E F

Figure 25. Il n’y a pas de visibilité des stimuli subliminaux masqués dans les conditions de l’étude.
Pourcentage de réponses correctes (rang du haut) et temps de réaction en milliseconde (ms) lors des réponses
correctes (rang du bas) au cours de la tâche de validation, en fonction des différentes durées de présentation de
la cible, chez patients et témoins, pour l’ensemble des essais (A et D), pour les essais avec cibles mots (B et E)
et pour les essais avec cibles pseudo-mots (C et F).
Observées les différences significatives de performances en fonction de la durée de présentation [effet durée
F3,57=26.41, p<0.001 ; effet groupe F1,19=2.61, p=0.12; interaction durée x groupe F3,57=1.31, p=0.28] (A-C), on
retrouve bien à 30 ms des réponses totales au niveau du hasard (A).
Les réponses sont préférentiellement portées vers la touche « Non-mot » en l’absence de visibilité, l’amplitude de
cette préférence allant diminuant à mesure que la présentation est plus longue [effet cible F1,19=19.83, p<0.001;
effet cible x durée de présentation F3,57=21.83, p<0.001] (B et C).
En parallèle, en fonction de la durée de présentation, les temps de réponse décroissent pour l’ensemble des
cibles (D) [effet durée F1,19=3.49, p=0.02 ; interaction durée x présentationF3,57=1.15, p=0.34] et pour les mots (E)
[effet durée F3,57=10.75, p<0.001 ; interaction durée x groupe F3,57<1], en faveur d’une facilitation à répondre chez
les participants en présence de stimuli mieux visibles.
La meilleure visibilité n’a pas le même type d’effet en termes de temps de réaction pour mots et pour pseudo-
mots [effet cible F1,19=37.55, p<0.001 ; interaction cible x durée F3,57=8.19, p<0.001 ; interaction cible x groupe
F3,57=4.12, p=0.06] (E-F).
Dans le cas des pseudo-mots (F), il y a des fluctuations non significatives des temps de réaction en présence de
stimuli plus visibles mais générant plus d’incertitude [effet durée F1,19<1 ; effet groupe F1,19=6.44, p=0.02 ;
interaction groupe x durée F3,57=1.75, p=0.17].
Les données représentées sont moyennes ± SEM

51
En parallèle, en fonction de la durée de présentation, les temps de réponse décroissent
pour l’ensemble des cibles (D) [Fdurée de présentation=3.49, p=0.02 ; Fdurée de présentation x groupe=1.15,
p=0.34] et pour les mots (E) [Fdurée de présentation=10.75, p<0.001 ; Fdurée de présentation x groupe<1], en
faveur d’une facilitation à répondre chez les participants en présence de stimuli mieux
visibles.

La meilleure visibilité n’a pas le même type d’effet en termes de temps de réaction pour
mots et pour pseudo-mots [Fcible=37.55, p<0.001 ; Fcible x durée=8.19, p<0.001 ; Fcible x

groupe=4.12, p=0.06] (E-F).

Dans le cas des pseudo-mots (F), il y a des fluctuations non significatives des temps de
réaction en présence de stimuli plus visibles mais générant plus d’incertitude [Fdurée de

présentation<1 ; Fgroupe=6.44, p=0.02 ; Fgroupe X durée de présentation=1.75, p=0.17].

Les réponses sont plus lentes quand elles portent sur des pseudo-
mots

Lorsque l’on s’intéresse aux temps de réponse des participants lors des essais corrects,
les réponses pour les pseudo-mots sont plus lentes que celles pour les mots (figure 26). Les
temps de réaction pour les essais dont la cible est un mot, et pour les essais dont la cible est
un pseudo-mot, dans les trois séries de la tâche diffèrent significativement [Fcible=23.92,
p<0.001 ; Fcible x groupe=1.07, p=0.31 ; Fcible x série<1].

52
A

Figure 26. Les réponses pour les pseudo-mots sont


plus lentes que celles pour les mots, chez les
patients et chez les témoins.
Temps de réaction en milliseconde (ms) pour
l’ensemble des essais dont la cible est un mot, et pour
B les essais dont la cible est un pseudo-mot, dans les
séries « Sémantique » (A), « Alcool » (B) et « Appétitif
» (C).
On observe dans l’ensemble des séries (A-C) un
ralentissement pour les pseudo-mots comparativement
aux mots [effet cible:F1,19=23.92, p<0.001 ; interaction
cible x groupe F1,19=1.07, p=0.31 ; interaction cible x
série F2,38 <1 ; interaction cible x série x groupe F2,38 <1].
Les données représentées sont moyennes ± SEM.

Les réponses sont plus lentes chez les patients

Les réponses chez les patients sont plus lentes que chez les témoins. Lors de l’analyse
des temps de réaction pour l’ensemble des essais corrects, il y a un ralentissement significatif
chez les patients comparativement aux témoins, présent dans l’ensemble des séries
[Fgroupe=7.02, p=0.02 ; Fgroupe x série=1.31, p=0.31].

53
Notamment, dans le cas des essais « Amorce spécifique – mot » (figure 27), on retrouve
bien un ralentissement significatif chez les patients comparativement aux témoins
[Fgroupe=7.88, p=0.01 ; Fgroupe x série<1].

Figure 27. Les réponses des patients sont plus


lentes que celles des témoins.
Temps de réaction en milliseconde (ms) pour les essais
« Amorce spécifique – mot » corrects dans chacune des
séries effectuées, « Sémantique », « Alcool » et «
Appétitif ».
On observe dans l’ensemble des séries un
ralentissement chez les patients comparativement aux
témoins [effet groupe F1,19=7.88, p=0.01 ; interaction
groupe x série F2,38<1].
Les données représentées sont moyennes ± SEM.

L’effet d’amorçage est mis en évidence avec les mots de nature appétitive

Toutes séries confondues, les participants ont bénéficié pour les cibles mots d’un
amorçage spécifique versus un amorçage neutre. Dans l’ensemble de la population testée, il
existe une tendance en faveur d’un effet de l’amorçage spécifique [Famorce=9.93, p=0.06 ;
Famorce x série=1.50, p=0.24 ; Famorce x groupe<1] (figure 28). L’analyse post hoc permet de mettre
en évidence que c’est le fait de la série « Appétitif » : le temps de réaction des patients pour
les amorces dans cette série diffère de l’ensemble des autres variables [Newman-Keuls :
p≤0.02].

Compte tenu de l’absence d’effet d’amorçage dans la série sémantique, une analyse des
séries « Alcool » et « Appétitif » permet alors de mettre en évidence un fort effet d’amorçage
spécifique [Famorce=6.49, p<0.02].

Dans la série « Appétitif », chez patients et témoins (figure 28 C et F), il existe un effet
d’amorçage [Famorce=9.99, p=0.005 ; Famorce x groupe=3.61, p=0.07]. Cependant, et bien que
cette observation ne soit pas soutenue en l’état actuel des données par un résultat
statistique, il est à noter que les temps de réaction pour les réponses correctes après
présentation d’une amorce neutre dans les séries « Alcool » et « Appétitif » sont légèrement
supérieurs à ceux observés dans la série « Sémantique », suggérant qu’au sein des deux
premières, une légère « contamination » subliminale puisse exister entre les différents essais
– cela est d’autant plus important dans le groupe « Patients » pour la série « Alcool ».

54
A B C

D E F

Figure 28. L’effet d’amorçage est mis en évidence avec les mots de nature appétitive.
Temps de réaction en milliseconde (ms) pour les essais dont la cible est un mot chez les patients (rang du haut) et
chez les témoins (rang du bas) dans les séries « Sémantique » (A et D), « Alcool » (B et E) et « Appétitif » (C et
F). Toutes séries confondues (A-F), dans l’ensemble de la population, il existe une tendance en faveur d’un effet de
l’amorçage spécifique [effet amorce F1,19=9.93, p=0.06 ; interaction amorce x série F2,38=1.50, p=0.24 ; interaction
amorce x groupe F2,38<1]. L’analyse post hoc révèle que le temps de réaction des patients pour les amorces dans
la série « Appétitif » diffèrent de l’ensemble des autres variables [Newman-Keuls : p≤0.02]. Dans la série « Appétitif
», chez patients et témoins (C et F), on observe un effet d’amorçage [effet amorce F1,19=9.99, p=0.005 ; interaction
amorce x groupe F2,38=3.61, p=0.07].
Les données représentées sont moyennes ± SEM.

Patients et témoins ne diffèrent pas en termes de performance

Les niveaux de performances sont équivalents (figure 29) dans les deux groupes dans
toutes les séries [Fgroupe<1 ; Fsérie=1.29, p=0.29 ; Fgroupe x série=1.74, p=0.19], et ce quelle que
soit la nature de l’amorce [Famorce<1 ; Famorce x série=1.83, p=0.18]. L’analyse post hoc confirme
que les pourcentages de réponses correctes des patients et témoins toutes conditions
considérées ne diffèrent pas les uns des autres [Newman-Keuls : p>0.05].

55
Figure 29. Patients et témoins ne diffèrent pas en termes de performance.
Pourcentage de réponses correctes pour les essais dont la cible est un mot chez les patients et chez les
témoins, dans les séries « Sémantique », « Alcool » et « Appétitif ».
On observe des niveaux de performances équivalents dans les deux groupes dans toutes les séries [effet
groupe F1,19<1 ; effet série F2,38=1.29, p=0.29 ; interaction groupe x série F2,38=1.74, p=0.19], et en fonction de la
spécificité de l'amorce [effet amorce F1,19<1 ; interaction amorce x série F2,38=1.83, p=0.18].
L’analyse post hoc confirme que les pourcentages de réponses correctes des patients et témoins toutes
conditions considérées ne diffèrent jamais un à un [Newman-Keuls : p>0.05].
Les données représentées sont moyennes ± SEM.

Analyses dimensionnelles
Selon l’approche clinique de l’étude, on attend de l’analyse des mesures cliniques des
relations positives entre différentes dimensions. On obtient effectivement une matrice de
corrélation objectivant de tels liens (figure 30). Cela nous assure qu’au regard de l’évaluation
objective, les critères cliniques retenus sont pertinents.

Figure 30. Matrice de corrélation des mesures cliniques.


Les abréviations désignent les tests précédemment décrits dans notre évaluation clinique : questionnaire AUDIT
pour l’évaluation de la consommation alcoolique ; BDI (Beck Depression Inventory) pour les symptômes
dépressifs ; STAI-YA et STAI-YB (State-Trait Anxiety Scale, Form Y, A and B) pour, respectivement, l’anxiété état et
l’anxiété trait ; BIS (Barratt Impulsiveness Scale) pour le trait impulsif ; EVA (Echelle Visuelle Analogique) pour le
craving instantané ; OCDS (Obsessive Compulsive Drinking Scale) pour un craving plus basal, sur les derniers
jours écoulés ; HAIS (Hanil Alcohol Insight Scale) pour l’insight ; Test de Fagerström pour la dépendance
nicotinique.
Sont représentés les coefficients de corrélation entre les dimensions étudiées. En rouge (et en gras en cas de forte
présomption contre l’hypothèse nulle), les coefficients supérieurs à 0,50 désignent une relation positive entre :
consommation alcoolique et anxiété-trait (r=0.54, p=0.08) ; consommation alcoolique et insight (r=0.82, p=0.002) ;
consommation alcoolique et dépendance nicotinique (r=0.58, p=0.06) ; symptômes dépressifs et anxiété-état
(r=0.87, p<0.001) ; symptômes dépressifs et anxiété-trait (r=0.82, p=0.002) ; symptômes dépressifs et trait impulsif
(r=0.73, p=0.001) ; symptômes dépressifs et craving basal (r=0.63, p=0.04) ; anxiété-état et anxiété-trait (r=0.91,
p<0.001) ; anxiété-état et trait impulsif (r=0.72, p=0.01) ; anxiété-état et craving basal (r=0.59, p=0.06) ; anxiété-état
et insight (r=0.71, p=0.01) ; anxiété-trait et trait impulsif (r=0.66, p=0.03) ; anxiété-trait et insight (r=0.79, p=0.004) ;
craving instantané et craving basal (r=0.88, p<0.001) ; insight et dépendance nicotinique (r=0.75, p=0.007).
56
Confronter, dans une approche dimensionnelle systématique, les scores cliniques aux
performances de la tâche est une démarche ancillaire. Cependant, cela met en lumière, de
façon remarquable considérant l’approche de l’étude, une relation importante entre score
AUDIT de consommation alcoolique et temps de réaction des essais « Amorce neutre - mot
» de la série « Sémantique » [r=0.45, p=0.04] (figure 31).
Cette relation est très nette sur l’ensemble de la cohorte en incluant patients et témoins.
En revanche, elle n’est plus retrouvée si l'on considère les uns et les autres
indépendamment. Une telle observation, associée à la démonstration du continuum au sein
de la corrélation (figure 31), permet de mettre en évidence un continuum entre témoins et
patients.
Figure 31. Continuum entre témoins et patients au sein de
la corrélation entre temps de réaction des « Amorce
neutre – mot » de la série « Sémantique » et score AUDIT.
Analyse de corrélation entre temps de réaction en milliseconde
(ms) pour les essais « Amorce neutre - mot » de la série «
Sémantique » et score AUDIT.
Les données représentées le sont individu par individu, témoins
(en gris) et patients (en noir).
Il existe une relation positive entre les variables (r=0.45,
p=0.04). La représentation graphique permet d'observer le
continuum entre témoins (en gris) et patients (en noir).

On s’intéresse ensuite aux corrélations mises en évidence chez les patients.


Dans la série « Alcool », on observe une tendance vers une relation négative entre
l’ensemble des temps de réaction dans cette série et la dimension anxieuse (figure 32).

57
A B C

D E F

Figure 32. Analyse de corrélation entre temps de réaction de la série « Alcool » et dimension anxieuse.
Analyse de corrélation entre temps de réaction en milliseconde (ms) dans les essais corrects « Amorce spécifique
- mot » (A et D), « Amorce neutre - mot » (B et E) et « Amorce neutre - pseudo-mot » (C et F) de la série « Alcool »
et dimension anxieuse, représentée par les scores STAI-YA d’anxiété-état (rang du haut) et STAI-YB d’anxiété-
trait (rang du bas).
Sont retrouvés inférieurs à -0.50 les coefficients de corrélation entre les variables représentées : temps de réaction
des essais corrects « Amorce spécifique - mot » et anxiété-état (r=-0.59, p=0.06) ; temps de réaction des essais
corrects « Amorce neutre - mot » et anxiété-état (r=-0.54, p=0.09) ; temps de réaction des essais corrects «
Amorce neutre - pseudo-mot » et anxiété-état (r=-0.53, p=0.10) ; temps de réaction des essais corrects « Amorce
spécifique - mot » et anxiété-trait (r=-0.52, p=0.10) ; temps de réaction des essais corrects « Amorce neutre - mot »
et anxiété-trait (r=-0.53, p=0.09) ; temps de réaction des essais corrects « Amorce neutre - pseudo-mot » et
anxiété-trait (r=-0.58, p=0.06).

Aucune tendance de cette nature n’est en revanche identifiée entre temps de réaction de
la série « Alcool » et symptômes dépressifs ou trait impulsif. De plus, on observe, ce sur les
essais corrects avec pseudo-mots de la série, un lien similaire entre temps de réaction et
niveau d’insight [r=-0.57, p=0.07] (figure 33).

Figure 33. Analyse de corrélation entre temps de


réaction des essais visant des pseudo-mots dans la
série « Alcool » et niveau d’insight.
Analyse de corrélation entre temps de réaction en
milliseconde (ms) dans les essais corrects « Amorce neutre
- pseudo-mot » de la série « Alcool » et score HAIS.
On observe sur les essais corrects avec pseudo-mots de
cette série une tendance vers une relation négative entre
temps de réaction et niveau d’insight (r=-0.57, p=0.07).

58
Lorsque l’on considère la seule condition « Amorçage spécifique » dans la série « Alcool », il
existe une tendance vers une relation positive entre temps de réaction pour ces essais et le
score EVA des patients [r=0.51, p=0.11] (figure 34).

Figure 34. Analyse de corrélation entre temps de


réaction des essais avec amorces spécifiques
dans la série « Alcool » et niveau de craving.
Analyse de corrélation entre temps de réaction en
milliseconde (ms) dans les essais « Amorce
spécifique - mot » de la série « Alcool » et score EVA.
On observe sur les essais avec amorces spécifiques
de cette série une tendance vers une relation positive
entre temps de réaction et niveau de craving (r=-0.51,
p=0.11).

Le niveau de craving instantané tend également à être corrélé à l’aspect appétitif si l’on
considère les deux types d’essais visant des mots de la série « Appétitif » [r=0.58, p=0.06 ;
r=0.57, p=0.07] (figure 35).

A B

Figure 35. Analyse de corrélation entre temps de réaction des essais visant des mots dans la série «
Appétitif » et niveau de craving.
Analyse de corrélation entre temps de réaction en milliseconde (ms) dans les essais « Amorce spécifique - mot
» (A) et « Amorce neutre - mot » (B) de la série « Appétitif » et score EVA.
On observe sur les essais avec cibles mots de cette série une tendance vers une relation positive entre temps de
réaction et niveau de craving : pour les amorces spécifiques (r=0.58, p=0.06) (A) ; pour les amorces neutres
(r=0.57, p=0.07) (B).

59
Discussion
I have looked in the mirror every morning and asked myself: "If today were the last
day of my life, would I want to do what I am about to do today?" And whenever the
answer has been "No" for too many days in a row, I know I need to change
something. (Jobs, Discours à l’Université de Stanford)

A partir du modèle de traitement cognitif du craving (Tiffany, 1999) et du modèle intégratif


d’insight (Belin et al., 2011), l’hypothèse selon laquelle deux mécanismes psychologiques
distincts, soit implicite soit explicite, amènent le patient addict abstinent à un risque de rechute
a conduit à mettre en place une tâche visant une mesure objective du contrôle
comportemental de l’urge.

L’ étude, effectuée chez des sujets alcoolodépendants, se fonde sur les temps de réaction
au cours d’essais de décision lexicale amorcés de façon subliminale par différents stimuli à
contenu sémantique spécifique en lien ou non avec l’alcool (trois conditions mises en
contraste : l’une, contrôle en matière d’amorçage subliminal, « Sémantique » ; les deux
autres identifiées pour leur potentielle attractivité dans la population étudiée, « Alcool » et «
Appétitif »).

Les arguments à l’encontre des seules mesures subjectives dans l’évaluation du craving,
qui ont dicté la nécessité de l’étude, sont illustrés par certaines observations effectuées lors
de celle-ci.

S’agissant des modalités techniques, les conditions de l’étude sont validées. Comme
requis, est respectée la non-visibilité des stimuli subliminaux masqués, attestée par la tâche
de vérification, ce qui permet une analyse des résultats préliminaires de la tâche principale.
Ceux-ci portent sur vingt et un participants, onze patients et dix témoins.

On observe des réponses plus lentes : d’une part, quand celles-ci portent sur des pseudo-
mots par rapport aux mots ; d’autre part, chez les patients comparativement aux témoins,
sans différence de performance en pourcentage de réponses correctes entre les deux
groupes.

On observe, dans l’ensemble de l’échantillon, un effet d’amorçage avec les mots de


nature appétitive générale.

Les analyses dimensionnelles systématiques mettent en lumière en particulier un


continuum dans la relation consommation alcoolique – temps de réaction.

60
Ayant prévalu à la mise en place de l’étude, les arguments pour une remise en question
de l’usage des seules mesures subjectives de craving comme gold standard (Franken, 2003)
sont illustrés par les observations de l’investigateur lors de la réévaluation post-tâche par
OCDS et EVA. Le groupe n°2 de patients, certes d’effectif réduit actuellement (quatre patients
parmi les onze inclus), effectue une cotation secondaire remarquablement diminuée, ce pour
les deux échelles choisies, qui renvoient d’ailleurs à des conditions temporelles différentes
(craving instantané et craving basal des derniers jours). Ceci témoigne de la state-
dependency du rapport subjectif de craving, notion qui est au fondement de nos hypothèses.

Dans le détail, on constate que la diminution du score OCDS affecte à la fois des items
divers et les questions 7 et 8. Or ces dernières visent la quantification de la consommation
alcoolique (quantité et rythme). Dans un premier temps, lors de l’entretien initial, tous les
patients (groupes n°1 et n°2) ont spontanément répondu à ces questions en prenant en
considération leur consommation avant hospitalisation, ou bien – rarement – ont effectué une
double cotation en précisant une consommation nulle pour la période d’hospitalisation
(respectant en cela les consignes de l’échelle c’est-à-dire une évaluation sur les sept derniers
jours) et le niveau de consommation antérieur au séjour hospitalier. Dans un second temps,
chez les quatre sujets réévalués, la cotation de la consommation s’est orientée alors
systématiquement vers les réponses « Consommation nulle ». Cette distinction dans les
stratégies de réponse peut avoir différentes explications. En psychologie sociale, elle
interroge les recherches sur les normes d’internalité (Beauvois, 1995, 2003) et renvoie plus
précisément à un biais de désirabilité sociale incitant le sujet à donner les réponses qu’il
pense attendues dans le contexte du séjour hospitalier et de l’étude. Notablement, elle
renvoie aussi au modèle des fluctuations de l’insight chez le sujet addict .

S’agissant de la présentation subliminale masquée, la validation de son usage dans le


laboratoire permet d’envisager son extension à d’autres études, et également une ouverture
à d’autres modes de présentation comme la présentation d’images, en lieu et place de mots.
Ceci aurait l’avantage de proposer en test une modalité autre de la réactivité aux stimuli des
sujets dépendants, comme réalisé dans un certain nombre d’études (Moeller et al., 2009 ;
Childress et al., 2008 ; Kang et al., 2012). Les enjeux éthiques soulevés par de tels dispositifs
expérimentaux sont fondamentaux. La considération des faibles risques qu’ils présentent,
avec activation peu intense dans des conditions contrôlées, au regard de l’environnement
habituel pour les sujets addicts, est reconnue (Carter & Hall, 2012).

61
La latence de réponse retrouvée sur les pseudo-mots est une observation habituelle. En
présence de mots, il y a une performance accrue comparativement aux non-mots, pour
lesquels il n’existe pas d’entrée lexicale, et qui suscitent une recherche de signification
(Bodner & Masson, 1997).

On peut avancer différentes hypothèses pour expliquer le ralentissement global dans la


population de patients, telles que contexte pathologique ou influence des traitements
psychotropes. L’ensemble de l’échantillon de patients a au moins une prescription
d’anxiolytiques type benzodiazépine, et le plus souvent une association avec un
antidépresseur. Dans une perspective plus large, il sera fondamental de vérifier, en l’utilisant
comme co-variant, l’influence du traitement sur les relations observées dans cette étude
présente.

Concernant les effets d’amorçage, les résultats actuels sur échantillon réduit sont
encourageants, considérée en outre la perte de puissance statistique liée à l’approche non
encore appariée. Il faudra nécessairement augmenter le nombre de participants et respecter
les conditions d’appariement pour élargir les résultats.

L’analyse des séries « Alcool » et « Appétitif » met en évidence un fort effet d’amorçage
spécifique. Selon les hypothèses de l’étude, on peut le rapporter au caractère appétitif de
l’ensemble des amorces concernées, l’attractivité du stimulus amorce venant perturber le
traitement cognitif de la cible.

Chez les témoins, la sensibilité aux amorces liées à l’alcool tient à la nature appétitive des
stimuli choisis. Qui plus est, elle est à considérer au regard du produit particulier choisi dans
l’étude. L’alcool a des fonctions culturelles, et il est l’objet d’usages socialement reconnus.
C’est une drogue certes mais légale, dont la consommation ne génère pas la stigmatisation
associée par exemple au cannabis ou à la cocaïne. Ainsi, en population témoin, un tel effet
d’activation appétitive déclenché par les stimuli liés au produit ne serait sans doute pas
observé concernant des substances donnant lieu à des addictions autres, « marginalisées ».

Dans ces séries, « Alcool » et « Appétitif », l’augmentation des temps de réaction après
amorçage neutre évoque une légère « contamination » de l’effet entre essais différents.

Or dans le groupe « Patients », on remarque que cette observation est marquée


précisément pour la série « Alcool », ce qui va dans le sens de l’hypothèse de l’interférence
entre urge implicite et traitement cognitif, et d’une quantification possible de son intensité. De
plus, c’est pour cette condition dans la série « Appétitif » que les patients sont alors au plus

62
bas niveau. Ce profil est à confronter à la notion congruente de restriction d’intérêt pour les
autres sources de renforcement, qui est propre à l’addiction.

Pour autant, chez les patients, le contraste entre les temps de réaction « Amorce
spécifique » versus « Amorce neutre » au sein même de la série « Appétitif » suggère une
nette activation en présence des amorces appétitives. Pour en rendre compte, il y aurait donc
à établir une distinction entre attrait implicite et intérêt explicite pour les renforçateurs
alternatifs chez les sujets. On peut s’interroger sur la façon dont la représentation consciente
amène à une distinction de l’appétit et du désir, sur le rôle de la subjectivité, et d’une
subjectivité malade, avec un insight altéré, dans celle-ci. Sur le plan expérimental, demander
aux participants, patients et témoins, d’effectuer, au décours de la tâche, une cotation des
mêmes mots appétitifs présentés cette fois consciemment (sur le modèle du questionnaire
employé dans la sélection des stimuli) permettra, une fois mis en place, de contraster les
scores explicites aux effets d’amorçage observés.

De façon complémentaire, il faut réfléchir à l’intérêt d’un design alternatif des séries. En
effet, comme le suggère l’augmentation du temps de réaction après amorçage neutre dans
les séries « Alcool » ou « Appétitif », le choix d’une composition aléatoire, au sein d’une
même série, faite de mots amorcés par amorce spécifique et de mots amorcés par amorce
neutre, peut amener à des effets de « contamination » liés aux conditions mixtes.

En outre, dans la catégorie « Sémantique », la proportion des essais avec amorce


sémantiquement liée par rapport à l’ensemble des essais de la série pourrait moduler
l’orientation stratégique des participants dans la tâche. En-deçà d’un certain seuil, il n’est pas
utile de « prendre en considération » cette information pour effectuer la tâche (Bodner &
Masson, 2003). Cette hypothèse devra donc être testée de façon rapide dans une étude en
conditions bloquées sur un petit nombre de sujets sains.

L’approche dimensionnelle générale appliquée à l’ensemble de la cohorte testée a été


menée dans la perspective d’une analyse des liens entre craving et insight, avec l’hypothèse
que l’on pourrait objectiver quantitativement le déficit d’insight du sujet alcoolodépendant à
partir d’un certain degré de sévérité clinique, via un décrochage observable de façon directe
entre score au rapport subjectif de craving et mesure objective dans la tâche de la
composante implicite de l’urge. Cependant, la population n’est pas assez large ici, et cette
approche nécessitera des analyses dimensionnelles non linéaires spécifiques.

Pour l’heure, l’analyse dimensionnelle a révélé un continuum dans la relation


consommation alcoolique – temps de réaction dans la tâche. Cette observation nous semble
63
présenter un intérêt majeur en ce qu’elle supporte l’idée de l’intérêt de la démarche
dimensionnelle en psychiatrie, et illustre l’utilité de l’approche objective, par endophénotype,
de ces dimensions. En effet, même si cette relation reste à conforter avec une population
plus large, en mettant en évidence une absence de rupture entre l’individu considéré sain et
celui diagnostiqué malade, la distribution des témoins et patients sur la droite de corrélation
vient figurer les limites de l’approche nosographique actuelle, et du diagnostic catégoriel qui y
est associé.

A la lumière de cette observation, le ralentissement précédemment décrit chez les


patients n’est pas essentiellement attribuable au traitement ou à la maladie mais il peut tenir
précisément à ce continuum dont participe l’ensemble de la population.

Chez les patients, les tendances observées sont en premier lieu une relation négative
entre temps de réaction dans la série « Alcool » et dimension anxieuse. La dimension
anxieuse pourrait susciter per se une anticipation des stimuli environnementaux, qui
interagirait alors avec un phénomène de enhancement attentionnel dû à la significativité
particulière des mots liés à l’alcool. Cependant, il est aussi envisageable qu’il y ait, chez les
sujets les plus anxieux, une inhibition de l’efficience de l’amorçage appétitif avec une
indistinction des essais en raison d’un ceiling effect lié à l’anxiété.

Dans cette même condition « Alcool », s’observe une implication de l’insight lors des
essais avec pseudo-mots, sous forme d’une relation négative entre temps de réponse et
score HAIS. Cela suggère un lien entre altération de l’insight et intensité de la perturbation
comportementale provoquée par l’état d’incertitude, via une impossibilité du sujet à identifier
les signaux, externes et internes, de nature ambiguë.

Enfin, chez les patients, la tendance vers une relation positive du score de craving
instantané avec l’amorçage par des mots en lien avec l’alcool, et avec la nature appétitive de
la série d’essais vient témoigner du lien entre composante implicite de l’urge et craving
rapporté, et de l’intérêt de coupler les évaluations afin d’adapter la prise en charge en fonction
de la balance implicite-explicite du contrôle des pulsions dirigées vers la drogue.

De façon plus large, les perspectives directes suite à cette étude sont, compte tenu des
limites liées à l’analyse des temps de réaction, de travailler sur ces mêmes hypothèses grâce
aux procédés de eye-tracking : en utilisant l’enregistrement des mouvements oculaires
comme un indice de la composante implicite de l’urge, on se propose de quantifier cet
aspect, et de le confronter au craving explicité par les patients.

64
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Résumé
Les addictions aux substances sont des comportements de consommation de
produits psychoactifs assortis de conséquences négatives, et face auxquels le sujet
perd une partie de sa liberté (Lejoyeux, 2009). La fiabilité et la validité de la section «
dépendance » du DSM-IV sont attestées par de multiples études (Grant et al., 1995;
Hasin et al., 1996, 1997a, 1997b; Chatterji et al. 1997; Canino et al. 1999; Grant et
al., 2007). Néanmoins, la représentation actuelle des critères diagnostiques de
dépendance, sous-tendue par des modèles catégoriels, se heurte à un certain
nombre de limites (Muthen, 2006). La démarche de catégorisation doit en particulier
s’accompagner d’une évaluation de la sévérité clinique.
Symptôme au coeur du processus addictif (de Bruijn et al., 2004), le craving est
décrit comme une « institution centrale » (Rankin et al., 1979) : un désir puissant,
intense, impérieux de consommer la drogue. Il serait un phénomène-clé dans la
survenue de rechutes chez les sujets addicts abstinents (Everitt, 1997). S’il peut faire
obstacle aux tentatives d’abstinence des sujets dépendants (May et al., 2004), il est
également suggéré qu’il puisse a contrario participer des efforts cognitifs conscients
pour maintenir l’abstinence, agissant comme un signal d’alarme pour le sujet
(Drummond & Glautier, 2004; Monti et al., 1990).
Les échelles actuelles de craving reposant sur un rapport subjectif s’avèrent
insuffisantes sur un certain nombre de points. Intégrant l’approche du modèle de
traitement cognitif du craving (Tiffany, 1999) et le modèle intégratif d’insight (Belin et
al., 2011), l’hypothèse selon laquelle deux mécanismes psychologiques distincts, soit
implicite soit explicite, amènent le patient addict abstinent à un risque de rechute a
conduit à mettre en place une tâche visant une mesure objective du contrôle
comportemental de l’urge. Cette étude, effectuée chez des sujets
alcoolodépendants, repose sur une tâche de décision lexicale avec amorçage
subliminal sémantique par différents stimuli, associés ou non à l’alcool. Parmi les
résultats préliminaires sur un échantillon réduit, l’observation d’un continuum dans la
relation consommation alcoolique – temps de réaction souligne l’intérêt de la démarche
dimensionnelle en psychiatrie, dans une approche objective par endophénotype.
Cette voie ouvre à l’élaboration d’une mesure objective de craving, permettant
des stratégies de prise en charge ciblées, individu par individu, en fonction de la
balance implicite-explicite du craving, et du niveau d’insight du sujet.

Mots-clés : Addiction – Alcool – Craving – Insight

80
SERMENT

En présence des Maîtres de cette école, de mes chers


condisciples et devant l'effigie d'Hippocrate, je promets et je
jure d'être fidèle aux lois de l'honneur et de la probité dans
l'exercice de la médecine. Je donnerai mes soins gratuits à
l'indigent et n'exigerai jamais un salaire au-dessus de mon
travail. Admis dans l'intérieur des maisons mes yeux ne
verront pas ce qui s'y passe ; ma langue taira les secrets qui me
seront confiés, et mon état ne servira pas à corrompre les
mœurs ni à favoriser le crime. Respectueux et reconnaissant
envers mes Maîtres, je rendrai à leurs enfants l'instruction que
j'ai reçue de leurs pères.

Que les hommes m'accordent leur estime si je suis fidèle


à mes promesses ! Que je sois couvert d'opprobre et méprisé
de mes confrères si j'y manque !

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