Odonto 2018 Zaremba
Odonto 2018 Zaremba
Odonto 2018 Zaremba
D’ODONTOLOGIE
Le 04 décembre 2018
ODONTOLOGIE PÉDIATRIQUE :
QUELS INTÉRÊTS À L’UTILISATION DE
LA TECHNOLOGIE CFAO ?
Revue systématique de la littérature
Membres du jury :
Mme le Professeur Caroline BERTRAND Présidente
Mme le Docteur Audrey AUSSEL Directeur
M. le Docteur Patrick ROUAS Rapporteur
Mme le Docteur Noélie THEBAUD Assesseur
Mme le Docteur Elsa GAROT Assesseur
6
2
3
Remerciements
Je vous remercie pour l’honneur que vous me faites en acceptant de présider le jury de cette
thèse. Veuillez trouver dans ce travail l’assurance de ma sincère reconnaissance et de mon
profond respect pour votre dévouement à la direction de cette faculté ainsi que pour la
qualité de votre enseignement.
Au cours de nos vacations hospitalières, vous m’avez transmis votre passion pour le métier
de chirurgien-dentiste et le sens des relations humaines qui compte tant dans cette
profession. Je vous adresse mes chaleureux remerciements pour votre soutien et votre
disponibilité durant la rédaction de cette thèse. Merci également pour la confiance que vous
m’avez accordée et de la bienveillance dont vous avez fait preuve à mon égard.
4
A Notre Rapporteur de thèse
Monsieur le Docteur Patrick ROUAS
Maitre de Conférences des Universités – Praticien hospitalier
Sous-section Odontologie pédiatrique 56-01
Tous mes remerciements pour votre participation à l’évaluation de ce travail, ainsi que pour
votre enseignement de qualité au cours de ma formation. Soyez assuré de ma profonde
gratitude.
Vous faites partie des personnes qui m’ont fait aimer mon métier et en particulier
l’odontologie pédiatrique. Votre dévouement, votre patience et votre humanité sont un
exemple pour moi. Merci d’avoir participé à ma formation et accepté de participer à ce jury
de thèse.
5
A ma famille,
Merci pour votre amour et votre soutien à toute épreuve. C’est à vous que je dois tout, et
notamment d’en être arrivée là.
A mes amis,
Je savoure chacun des moments passés avec vous et je vous souhaite, du fond du cœur, le
meilleur.
A Thibaud,
Merci pour ton aide précieuse, que notre route ensemble soit belle et longue…
6
Table des matières
7
3.2.2. Cas cliniques ............................................................................................. 44
3.3. Discussion ....................................................................................................... 49
3.3.1. Analyse de la pertinence des articles sélectionnés .................................. 49
3.3.1.1. Biais de l’étude .................................................................................... 49
3.3.1.2. Pertinence des articles retenus ........................................................... 49
3.3.2. Analyse des études expérimentales ......................................................... 50
3.3.2.1. L’empreinte optique ............................................................................ 50
3.3.2.2. Les matériaux usinables en CFAO ....................................................... 51
3.3.3. Analyse des cas cliniques.......................................................................... 52
3.3.3.1. Qualité des articles de cas cliniques .................................................... 52
3.3.3.2. Discussion ............................................................................................ 53
Annexes ........................................................................................................................ 57
Bibliographie ................................................................................................................. 59
8
Table des illustrations
9
Abréviations
PEK : Pekkton®
10
Introduction
Actuellement, la CFAO semble surtout être appliquée aux soins dentaires de l’adulte.
Aujourd’hui, comment la CFAO est-elle ou peut-elle être utilisée plus spécifiquement en
odontologie pédiatrique ? La CFAO pourrait-elle être un outil de choix dans la prise en
charge de l’enfant au cabinet dentaire et, plus particulièrement, lors de la conception de
prothèses pédiatriques?
Après des rappels sur les moyens de prise en charge des enfants en cabinet dentaire
et sur le principe de la technologie CFAO, cette thèse se propose de réaliser une revue
systématique de la littérature afin de répondre à ces interrogations. Au travers d’une analyse
détaillée de la littérature, les champs d’application de la CFAO en odontologie pédiatrique
seront mis en évidence, ainsi que les avantages et inconvénients de cette utilisation.
11
1. La prothèse pédiatrique
Aujourd’hui, il est acquis que la santé bucco-dentaire d’un enfant a non seulement
une implication fondamentale dans sa santé générale, mais qu’elle détermine celle de
l’adulte qu’il deviendra1 . Malheureusement, la carie dentaire constitue la plus fréquente des
maladies chronique de l’enfance2. Il apparait donc primordial d’assurer une bonne santé
bucco-dentaire à nos enfants afin de favoriser leur développement.
Lorsque les manœuvres de prophylaxie échouent ou qu’un élément extérieur
(maladie génétique, traumatisme…) vient altérer l’état de santé dentaire d’un patient, il faut
souvent recourir à des thérapeutiques restauratrices, voire à la réalisation de prothèses
pédiatriques.
Cependant, la réalisation de prothèses pédiatriques et, plus généralement, le fait de
soigner un enfant en cabinet dentaire, peut susciter de l’appréhension dans notre
profession. En effet, l’exercice de l’odontologie pédiatrique implique non seulement de
prendre en charge des pathologies dentaires, mais également de savoir gérer le
comportement et la coopération du patient.
Dans cette première partie, nous exposerons les indications cliniques aux prothèses
pédiatriques.
1.1. Objectifs
12
Ce concept, développé chez l’adulte3, est aussi applicable chez l’enfant mais dans une
autre mesure. Il prend alors en compte des facteurs particuliers tels que le risque carieux
individuel, la coopération de l’enfant et la motivation de celui-ci et de ses parents face aux
traitements.
Pour décrire l’atteinte carieuse, le score ICDAS (International Caries Detection and
Assessment System)4 qui s’applique aux dents permanentes et lactéales peut être utilisé
(Figure 2).
13
Les objectifs de la prothèse pédiatrique sont multiples. Le délabrement dentaire, quel
qu’en soit l’étiologie, peut être à l’origine de douleurs et d’infections buccales nocives pour
l’état général de l’enfant. Il peut provoquer des difficultés à la mastication et donc à
l’alimentation. Il est alors important de restaurer rapidement la fonction afin d’éviter un
amaigrissement et les répercussions d’un déficit nutritif sur la croissance.
La coloration de dents cariées ou l’absence de dents antérieures a un impact sur
l’esthétique et sur l’image que l’enfant renvoie en société. Un défaut esthétique dentaire
peut provoquer des moqueries à l’école, compliquer l’intégration de l’individu en collectivité
et causer des dommages d’ordre psychologique dès l’enfance : acceptation de soi, confiance,
aisance dans les relations avec les autres, etc.
De plus, chez l’enfant en cours de croissance, il existe de nombreux mouvements
inter et intra-arcades, du fait de la croissance des maxillaires et de l’éruption des dents
lactéales ou permanentes. Le délabrement important ou l’absence d’une ou plusieurs dents
peut aboutir à des migrations ou des retenues dentaires qui sont responsables du
bouleversement du cycle normal de dentition. Toutes ces perturbations mènent souvent à
des désordres occlusaux et/ou squelettiques nécessitant à posteriori des traitements plus ou
moins longs d’orthopédie dento-faciale.
Les étiologies possibles des pathologies nécessitant une thérapeutique par prothèse
dentaire pédiatrique sont variées : perte prématurée ou fracture dentaire suite à un
traumatisme, délabrement ou avulsion précoce due à des lésions carieuses, agénésies,
malformations de l’émail ou de la dentine (MIH, amélogenèse ou dentinogénèse imparfaite)
et problèmes d’ordre esthétique (colorations dues aux tétracyclines). La figure 3 résume les
indications des prothèses pédiatriques. En fonction de la situation clinique, certains types de
prothèses sont préférentiellement utilisés.5
14
secondaire), c’est au professionnel de santé d’évaluer si l’enfant et son entourage seront en
mesure d’apporter l’attention nécessaire aux prothèses (nettoyage, conservation, visites de
contrôle régulières). Il est par exemple déconseillé de réaliser des prothèses fixées en cas
d’hygiène défavorable.
Prothèse amovible partielle - Absence de plusieurs dents dont le défaut est non
et/ou mainteneur d’espace compensable par un mainteneur d’espace fixe
amovible - Perte prématurée de plusieurs dents avec risque de
mouvement distal ou mésial des dents restantes,
- Perte bilatérale des premières et deuxièmes molaires
temporaires.
Prothèse
- Alternative à l’arc palatin en cas d’hygiène insuffisante
amovible
Prothèse complète - Anodontie
- Avulsion précoce de toutes les dents d’une arcade
15
1.2.1. La prothèse fixée
Le bridge antérieur
Cette solution prothétique est rarement mise en œuvre chez l’enfant. Elle nécessite
une coopération très importante du patient et présente des risques d’inhalation et
d’ingestion. Les bridges collés sont contre-indiqués en denture temporaire car
l’émail offre de mauvaises possibilités de collage.
16
L’arc palatin ou lingual
C’est le type de prothèse le plus utilisé en cas de perte d’incisives chez l’enfant. Il
joue également le rôle de mainteneur d’espace fixe.
Un arc en acier inoxydable est fixé à l’arcade sur des CPP ou des bagues scellées sur
les molaires du patient. La ou les dents manquantes sont remplacées par des dents
en résine montées sur de la résine rose et solidarisées à l’arc.
On déconseille ce type de prothèse pédiatrique en cas d’hygiène bucco-dentaire
insuffisante car, mal entretenue, elle peut être à l’origine de caries iatrogènes ou
d’inflammations muqueuses.
La facette préformée
La facette préformée en résine composite (figure 5) peut être utilisée chez l’enfant
sur dents permanentes en tant que solution transitoire de longue durée. Avant l’âge
adulte, le parodonte n’étant pas encore stable, il est recommandé d’attendre avant
de proposer une solution définitive par facettes céramiques dont le résultat
esthétique ne serait pas satisfaisant à long terme.
Il existe des facettes préformées de différentes formes et teintes. Elles sont
adaptables au support dentaire restant et permettent des retouches en cas de
modifications du parodonte. Tout en étant moins onéreuses que des facettes
céramiques, elles peuvent être satisfaisantes esthétiquement.6
17
Le mainteneur d’espace
Le mainteneur d’espace fixe est constitué d’un fil métallique soudé sur une coiffe
pédodontique préformée ou sur une bague scellée à une molaire permanente ou
lactéale. Il peut comporter une ou plusieurs dents en résine remplaçant la ou les
dents manquantes.
La prothèse complète
Elle est réalisée en cas d’anodontie ou d’avulsion précoce des toutes les dents d’une
arcade.
18
La prothèse supra-implantaire
La pose d’implants intra-buccaux est rare chez l’enfant, et constitue une
thérapeutique de deuxième intention en cas de grands syndromes. Lorsque les
solutions prothétiques non implantaires ne sont pas satisfaisantes ou qu’elles ne sont
pas tolérées par le patient, on peut parfois envisager une solution implantaire. Ces
implants peuvent, par exemple, stabiliser une prothèse complète pédiatrique en cas
d’anodontie.
Les phénomènes de croissance des maxillaires empêchent d’obtenir des résultats
fiables dans le temps (risque de déplacement ou de rotation des implants). De plus, il
est inconcevable de poser un implant dans la bouche d’un enfant s’il existe un germe
dentaire sous-jacent. Jusqu’à la fin de la croissance, on évite donc d’implanter. Il est
préconisé de temporiser jusqu’à l’âge adulte par des solutions provisoires de moyen
terme lorsque la situation le permet.
19
1.3.1. Le développement de l’enfant
C’est la « phase orale », durant laquelle l’enfant découvre le monde avec la bouche à
travers la succion. La relation avec la mère est primordiale : l’attachement se créé. Le bébé
est en proie à ses premières peurs, provoquées par les stimuli bruyants ou lumineux et la
crainte d’être séparé de sa mère.
En cabinet dentaire, la coopération est difficile car l’enfant ne peut comprendre
réellement tout ce qui se passe dans sa bouche et autour de lui. Les soins se font au fauteuil,
le patient allongé sur sa mère. Les pleurs sont signes d’inconfort plus que de douleur ou de
peur.
20
La préadolescence et l’adolescence de 11 à 15 ans
A chaque âge correspond une approche comportementale particulière lors d’un soin
en odontologie pédiatrique13. La réaction du patient face au soin dentaire dépend également
de son vécu, de son tempérament, de l’environnement familial et social dans lequel il
évolue, de son éducation et de la transmission éventuelle parents-enfant de la peur du
dentiste.
Il semble également important de souligner que les patients atteints de déficiences
comportementales d’origine congénitale ou acquises, dits « patients à besoins spécifiques »
peuvent nécessiter une prise en charge plus particulière, proche de celle préconisée en
odontologie pédiatrique mais adaptée à leur pathologie et leur capacité de coopération aux
soins.
Une des difficultés rencontrée lorsqu’il s’agit de soigner un enfant, est que la relation
de soin ne s’établit pas comme à l’ordinaire entre le patient et le praticien. En effet, elle
concerne également le ou les parents, dont le rôle est prépondérant dans le déroulement du
traitement. Chaque individu impliqué dans la relation de soin doit interagir avec l’autre en
respectant un certain équilibre qui sera indispensable au bon déroulement du ou des
rendez-vous.
Tout l’enjeu de la réussite d’un soin va se baser sur le fait de placer l’enfant au centre
de l’intérêt. Dès le moment de l’accueil dans cabinet, il s’agira de décoder toutes ses
attitudes (paroles, regards, position sur le fauteuil, gestes des mains et des pieds) et de s’y
adapter.
L’enfant peut exprimer de la peur, de l’anxiété, de l’angoisse, voir même de la
phobie. Le praticien aidé de son assistante devront faire preuve d’empathie et adapter leur
attitude en rassurant et encourageant le patient dans toutes les situations. Des mesures
21
pourront être prises en cas de difficultés de coopération et afin de limiter le stress du
patient: prémédication sédative, sédation MEOPA, hypnose14, etc.
Les parents doivent être présents à la première consultation, ne serait-ce que pour
les informations administratives et médicales.
Concernant la suite des soins et uniquement à partir de 2 ans, la présence du ou des
parents au sein de la salle de soin est jugée souhaitable ou non par le praticien en fonction
de l’attitude et l’influence qu’il a sur le patient : le parent doit idéalement se tenir en retrait
de la zone du fauteuil, tout en encourageant son enfant s’il en manifeste le besoin.
Dans certains cas, il sera préférable de demander au parent de rester dans la salle
d’attente :
Dans la majorité des cas, le parent reste dans la salle de soin et contribue à renforcer
la relation entre le praticien et le patient. Cette présence doit être bénéfique et bienveillante
pour l’enfant mais en aucun cas perturbatrice du bon déroulement de la séance.
1.3.2.3. Le praticien
Du côté du praticien, soigner un enfant peut s’avérer être une épreuve stressante : il
faudra répondre au mieux aux besoins du patient, sans tomber dans l’acharnement en cas
d’échec du traitement. Le praticien devra également établir un lien affectif avec l’enfant sans
toutefois s’attacher de manière excessive.
22
1.3.3. Gestion de l’enfant au cabinet dentaire
Pour un enfant, le cabinet dentaire est souvent un lieu nouveau qui peut parfois être
associé au phénomène de douleur, générateur de stress. De plus, l’imagination de l’enfant
joue un rôle prépondérant qui le pousse à interpréter le réel d’une manière telle qu’il pense
être en danger. Un enfant qui s’agite veut se soustraire à une menace, c’est une tentative de
fuite.14
La communication non verbale constitue 70% de notre message : c’est notre langage
corporel. Elle est véhiculée par notre posture, nos gestes et nos expressions faciales
qui doivent être calmes, posés et mesurés. Nos mouvements doivent être sûrs et
notre voix rassurante afin de mettre en confiance le patient. Il faut également avoir
conscience de la notion d’espace corporel, espace dans lequel un chirurgien-dentiste
est amené à pénétrer lors du soin. Une intrusion trop brutale dans cet espace peut
mener à un rejet de la part du patient. Il faudra donc procéder par étapes, discuter
en amont avec l’enfant pour faire connaissance, respecter son espace corporel et ne
pas se précipiter sur la cavité buccale dès les premières minutes d’une première
consultation.
23
La technique qui a le mieux fait ses preuves chez l’enfant est celle du « TELL-SHOW-
DO », soit « expliquer-montrer-faire »1. Elle se déroule en trois étapes et peut être présentée
comme un jeu afin de renforcer l’attention. Elle consiste en premier lieu à expliquer de
manière imagée et adaptée à l’enfant ce qui va être réalisé (TELL). Le praticien stimule
ensuite tous ses sens de l’enfant en lui montrant les différents instruments et leur
fonctionnement : présentation visuelle d’un objet, possibilité de le toucher, de le voir et
l’entendre en action, stimulation olfactive et/ou gustative pour certains produits (SHOW).
Lors de la dernière étape de cette méthode, le praticien met en œuvre l’acte préalablement
décrit de la manière la plus fidèle possible, tout en répétant les mêmes explications afin
d’éviter les surprises (DO).
Aujourd’hui, dans une société ou l’apparence revêt une importance grandissante, les
patients sont de plus en plus demandeurs d’esthétique. Cette exigence est également
présente chez les parents qui deviennent réticents face à restaurations du type coiffes
pédiatriques préformées métalliques de couleur grise. L’offre de prothèse pédiatrique doit
donc évoluer.
Les prothèses pédiatriques par ailleurs sont une solution thérapeutique encore trop
rarement proposée en cabinet libéral en France, probablement pour des raisons techniques
(formation des professionnels) et financières. Le service rendu aux patients est pourtant très
important.
Comme nous pouvons le constater, les méthodes actuelles de réalisations de ces
prothèses imposent toujours l’utilisation de matériaux à empreintes conventionnelles
(hydrocolloïdes, polyéthers). Ces biomatériaux sont insérés en bouche à l’aide de porte-
empreintes volumineux et dont l’emploi est désagréable pour le patient, qu’il soit enfant ou
adulte. Partant de ce constat, nous nous sommes demandés dans quelle(s) mesure(s) la
technologie CFAO, en plein essor actuellement, pourrait nous affranchir des ces
inconvénients.
24
2. La Conception et Fabrication Assistées par
Ordinateur (CFAO)
2.1. Généralités
Pour commencer, la période dite « des pionniers » amorcée dans les années 1960
avec le début de l’informatique, de l’exploitation des phénomènes ondulatoires (lasers,
hologrammes…) et de l’usinage automatique. Tous les ingrédients sont alors réunis pour que
la CFAO apparaisse, tout d’abord dans les secteurs de l’automobile et de l’aéronautique.
La thèse d’exercice de François DURET en 1973, intitulée « L’empreinte optique »,
est le point de départ de ce qui apparait aujourd’hui comme la révolution du XXIe siècle en
dentisterie. Durant les années qui suivent, de nombreux laboratoires en France, au Japon et
aux Etats-Unis développent le concept et tentent de créer une machine alliant numérisation
25
d’une empreinte, modélisation et conception informatique de la prothèse, et usinage
commandé par informatique.
C’est ainsi que s’enclenche, au début des années 1980, la deuxième période, dite
« des démonstrations », période durant laquelle les porteurs du projet doivent prouver au
milieu dentaire et aux industriels que la technologie qu’ils développent a de l’avenir.
En 1983 a lieu la première présentation en congrès de l’empreinte optique, combinée
à une conception (via le logiciel « EUCLID® ») et une fabrication pilotées par informatique. Là
encore, le Docteur Duret est aux commandes, mais les trois composants de l’invention sont
dissociés.
En 1985, François Duret et son équipe font une présentation au salon de l’ADF : en
une heure, la première couronne dentaire en CFAO est créée (couronne métallique sur
prémolaire destinée à sa femme).
De nombreux chercheurs et laboratoires se penchent alors sur le principe de
l’invention. En Suisse avec l’équipe du Pr MOERMANN, en Allemagne avec celle de
l’ingénieur M.BRANDESTINI et dans d’autres pôles de recherche scientifiques européens se
développent des technologies innovantes visant à améliorer les prototypes (systèmes
CEREC®, PROCERA®). Paradoxalement, c’est aux Etats-Unis et au Japon que les chirurgiens-
dentistes accueillent avec le plus d’engouement la nouvelle évolution du métier, tandis que
les praticiens européens restent sceptiques face à de tels changements.
Vers la fin des années 1980, près d’une trentaine de systèmes CFAO complets de la
marque HENNSON® fonctionnent dans le monde à des fins de recherche clinique. Le CEREC
1® est également commercialisé en Allemagne dès 1987.
26
2.2. Technologie
Chaque maillon de la chaine numérique est un moyen numérique qui peut être relié
aux autres par un logiciel en formant une intégration. Ces intégrations sont alors
commercialisées sous forme de système ou de package. A ce jour, certains systèmes peuvent
être désolidarisés et vendus séparément (par exemple le système de l’empreinte optique et
celui de la CAO) alors que d’autres fonctionnent de manière indissociables (système de FAO
et machine à commande numérique). Tous les fichiers issus de la technologie CFAO sont
dématérialisés, donc transférables via internet ou sur port USB.
L’informatique est donc indispensable à tous les niveaux de la chaine de CFAO et
intervient sur tout le cycle de production.
27
2.2.2. L’empreinte optique (numérisation)
Dans l’industrie, il existe deux types de méthodes pour acquérir les données en trois
dimensions d’un objet : la méthode avec contact physique (mécanique) et la méthode sans
contact.
Dans la méthode avec contact, c’est un palpeur qui enregistre la forme de l’objet en
le touchant. Les premiers systèmes de numérisation en laboratoire dentaire fonctionnaient
ainsi mais cette méthode est difficilement applicable en bouche, les appareils de mesure ne
pouvant être utilisés dans le milieu buccal.
Si le contact physique est impossible, la technologie sait désormais exploiter les
phénomènes optiques (ondulatoires), acoustiques ou magnétiques afin d’enregistrer ces
données tridimensionnelles. En cabinet, les techniques magnétiques et acoustiques posent
d’insurmontables problèmes de mise en œuvre et c’est donc l’empreinte optique qui a été
appliquée au domaine dentaire.
Principe de la technologie
Chaque rayon lumineux est une onde électromagnétique caractérisée par une
longueur d’onde et une phase qui lui est propre. Le principe de fonctionnement d’une
caméra optique repose sur la mesure de ce rayonnement lumineux : un rayon incident (dont
les caractéristiques sont connues) est projeté sur l’objet à numériser. Ce rayon incident peut
être un rayon laser (une seule longueur d’onde et une seule phase) ou une lumière blanche
dite polychromatique, composée de plusieurs rayons de différentes valeurs de longueur
d’onde et de phase. L’objet renvoie alors une partie du rayonnement dont la valeur sera
enregistrée puis comparée à celle du rayonnement incident.
Un logiciel analyse alors la différence entre les deux mesures. En traitant toutes les
données acquises, il établit une reconstruction « 3D » de l’objet de départ, que l’on
nommera acquisition.
Lors de la saisie, les images peuvent être enregistrées de deux manières différentes :
Soit par superposition de toutes les images statiques : c’est l’acquisition point and
click.
Soit par capture en continu, à la manière d’un film, en balayage : c’est l’acquisition
full motion.
Les caméras, ou scanners, sont les appareils que le praticien va introduire en bouche
afin d’effectuer les mesures (figure 8)17. Ce sont des machines complexes et fragiles qui
enregistrent et transmettent les données recueillies à l’ordinateur de CAO18. Les éléments
qui les composent changent en fonction de la technologie d’émission, de capture et
d’analyse choisis par les fabricants et des différents systèmes disponibles sur le marché.
28
Figure 8 : Caméra intra buccale (type Trios®)17
L’étape suivante est réalisée par le logiciel de CAO qui va produire une proposition de
reconstitution (ou prothèse) pour la dent à restaurer. Cette proposition est un projet virtuel
qui concilie au mieux les contraintes imposées par la conception d’une prothèse
dentaire (points de contact avec les dents adjacentes, occlusion, adaptation à la préparation
dentaire, épaisseur du matériau de restauration, etc) et peut être modifiée par l’opérateur
(praticien ou prothésiste) grâce à de nombreux outils du logiciel.
29
La reconstitution proposée par le logiciel peut être établie selon différentes méthodes:
Une fois la CAO réalisée, un autre logiciel dit de FAO pilote, à partir des données
informatiques issues de la conception, une machine-outil, matérialisant le projet prothétique
dans un matériau choisi. Dans certains cas, l’objet fabriqué par la machine peut également
être une maquette de modélisation, parfois destinée à être modifiée manuellement ou
transformée ultérieurement.
Cette étape peut avoir lieu soit au sein même du cabinet, soit dans le laboratoire de
prothèse, soit encore de manière délocalisée dans un centre de production lorsque le
laboratoire sous-traite une partie de la production (système Procera® par exemple) 19.
Il existe deux procédés de fabrication en CFAO : la méthode soustractive et la
méthode additive, dite méthode d’usinage.
30
2.2.4.1. Fabrication par soustraction
C’est le procédé d’usinage : on obtient l’objet par usure d’un bloc de matériau brut à
l’aide de fraises, diamantées ou non, de formes et de tailles différentes. La machine-outil
dans laquelle se déroule cette opération est une usineuse ou fraiseuse à commande
numérique (figure 9)20.
31
Il existe trois principaux procédés d’impression 3D : la stéréolithographie, la polymérisation
sélective ou le frittage laser.
Les pièces fabriquées par addition CFAO en dentisterie sont essentiellement des
maquettes de fonderie en résine calcinable, des gouttières, des prothèses transitoires et des
guides radiologiques ou chirurgicaux. Le frittage laser permet d’obtenir des pièces
métalliques telles que des châssis, et des éléments implantaires en titane.18 21
32
La CFAO semi-directe exploite également l’empreinte optique mais est destinée aux
praticiens qui ne sont pas équipés d’usineuse au cabinet. Le praticien peut concevoir la
prothèse au cabinet. Le fichier est transmis au laboratoire de prothèse (ou au centre de
production) qui fabrique la pièce prothétique de manière externalisée par addition ou
soustraction. Le laboratoire peut également être en charge de la conception de la prothèse
le cas échéant.
33
2.3. Avantages et inconvénients de la technologie CFAO
2.3.1. Avantages22
Le système CFAO peut permettre un gain de temps non négligeable, notamment lors
des étapes de prise d’empreinte. Dans le cadre de la CFAO directe, le nombre de
rendez-vous du patient est réduit grâce à l’usinage dans la séance et au cabinet de la
pièce prothétique, et le complexe dentino-pulpaire n’est pas agressé par de multiples
ré-interventions sur la même dent.
34
On peut aussi prêter des qualités écologiques à la dématérialisation de l’empreinte :
suppression de l’emploi de matériaux d’empreintes et de coulée, donc moins de
déchets potentiellement polluants ; pas de coursiers circulant en véhicules, ce qui
évite les conséquences environnementales qui peuvent en découler.
2.3.2. Inconvénients22
Néanmoins, il serait illusoire de prétendre que cette technologie n’apporte que des
améliorations à notre exercice.
35
Les matériaux utilisés en CFAO directe (usinage à partir d’un modèle virtuel) ne sont
pas toujours satisfaisant esthétiquement. Même si les fabricants tentent de remédier
à cela, il est couramment admis que les blocs de céramiques à usiner pré-teintés ne
permettent pas toujours de reproduire les teintes de dents naturelles qu’un
prothésiste est capable de mimer en stratifiant à la main sa céramique. Il est
toutefois possible de maquiller la céramique issue d’un usinage.
Le système CFAO, comme tout système informatique, est soumis aux bugs et aux
dangers des pertes de données accidentelles ou des vols. Les sauvegardes et les
mises à jour doivent donc être régulières et fiables.
36
3. Revue systématique de la littérature
Actuellement, très peu de praticiens osent concilier techniques de CFAO et soins des
enfants. Dans cette revue de littérature, nous souhaitons étudier les parutions s’intéressant à
cette association afin d’examiner s’il existe des raisons rationnelles à une telle défiance, et
quels pourraient être les modalités, les bénéfices ou les inconvénients de cette application.
Cette première recherche a alors suggéré 789 résultats pour la première formule et
87 pour la seconde.
- Articles dont la date de publication ne peut être supérieure à 10 ans (pas avant
février 2008), et
- Articles ne concernant que des études sur l’espèce humaine.
Après application de ces filtres, la base de données a fourni un total de 410 résultats
pour la première formule de mots MeSH et 66 pour la seconde.
37
En parallèle, une recherche à été menée sur le serveur de la bibliothèque de
l’Université de Bordeaux (qui recense des parutions papiers en français et en anglais) en
intégrant les termes : « CFAO » et « dent » et « enfant ».
Ont donc été rejetés les articles correspondant aux caractéristiques suivantes :
Une première sélection a été réalisée par la lecture des titres, puis des résumés de
chaque article en fonction des critères d’éligibilité. Les articles ont été retenus si toutes les
informations relevant de ces critères étaient disponibles dans le titre et le résumé.
Ainsi, à la lecture des résumés :
- 4 articles ont été exclus car ils ne mentionnaient pas l’utilisation de la technologie
CFAO,
- 17 articles ont été exclus car ils ne concernaient pas l’odontologie pédiatrique
mais plus généralement la prothèse dentaire chez l’adulte,
- 2 articles ont été exclus car ils se rapportaient à la chirurgie chez l’enfant,
- 1 article a été exclu car il ne traitait que de l’orthopédie dento-faciale chirurgicale.
38
Des recherches complémentaires ont été menées à partir des bibliographies des
articles sélectionnés comme cité ci-dessus. 4 autres articles pertinents ont été sélectionnés
pour lecture complète grâce à leur titre et leur résumé.
13 articles ont donc été retenus pour lecture complète, parmi lesquels 3 ont été
27,28,29
exclus car ils n’étaient pas disponibles sous forme de texte intégral. Apres lecture
complète, 9 articles ont été retenus pour cette revue systématique (figure 11). En effet, un
article supplémentaire30 a été écarté car il traitait d’un cas clinique durant lequel la
technologie CFAO n’a été employée qu’aux 18 ans du patient. Il ne concernait donc pas
l’odontologie pédiatrique.
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39
3.2. Résultats
1. Burhardt L, Livas C, Kerdijk W, van der Meer WJ, Ren Y. Treatment comfort, time
perception, and preference for conventional and digital impression techniques: A
comparative study in young patients. Am J Orthod Dentofac Orthop Off Publ Am Assoc
Orthod Its Const Soc Am Board Orthod. 2016 31
Objectifs :
L’objectif était d’évaluer les différences de ressenti de jeunes patients en terme de
confort, de perception du temps et de préférence entre empreinte numérique et
empreinte classique à alginate. L’étude était destinée à la base à une application en
orthopédie dento-faciale.
Matériel et méthodes :
L’échantillon de sujets concerné par l’étude était constitué de 38 enfants ayant de 10
à 17 ans, dont 16 garçons et 22 filles. Ils n’avaient jamais subi d’empreinte dentaire
auparavant, quelle que soit la méthode.
Les auteurs de l’étude ont utilisé un hydrocolloïde irréversible (alginate) ainsi que
deux caméras intra buccales CEREC Omnicam® et Lava COS®.
Les empreintes ont été réalisées par le même examinateur, lors de trois visites
différentes à quatre semaines d’intervalle pour chaque participant. Il a été réalisé
pour chacun une empreinte classique à l’alginate et deux empreintes numériques
avec les deux caméras intra-buccales utilisées dans l’étude. Une randomisation a été
réalisée en fonction de l’ordre d‘utilisation des différentes techniques d‘empreintes
afin de créer trois groupes randomisés de sujets. La durée de prise de chaque
empreinte a été mesurée afin de pouvoir la comparer à la perception du temps de
l’empreinte par chaque enfant.
Quatre questionnaires ont été élaborés afin de mesurer le ressenti de chaque
participant. Deux d’entre eux concernaient l’apparition d’un reflexe nauséeux, d’une
sensation de malaise, d’un état de stress ou d’une difficulté à respirer, la sensation
d’inconfort et la perception de la durée de l’empreinte (mesurés par une échelle de
Likert) ainsi que la préférence pour l’une ou l’autre des techniques d’empreinte. A
l’issue des séances d’empreinte, les questionnaires ont été remplis par les
participants.
40
Résultats :
Aucune différence significative n’a été observée entre les trois groupes. De plus,
l’empreinte optique avec le Cerec Omnicam® a semblé provoquer de façon
significative moins d’inconfort que celle à l’alginate. En revanche, en ce qui concerne
les autres ressentis (reflexe nauséeux, sensation de stress, de malaise, d’inconfort ou
d’étouffement), aucune différence significative n’a été observée entre les trois
techniques.
En termes de temps mésuré, la durée de la manipulation a été significativement plus
courte lors des empreintes à l’alginate et à l’aide du Cerec Omnicam® qu’avec la
caméra Lava C.O.S.®. En termes de perception, aucune différence significative n’a été
ressentie par les patients entre les durées des différentes empreintes.
Concernant le ressenti des patients, 51% ont déclaré avoir préféré le relevé par
caméra optique (dont 44% à l’aide de la caméra Cerec Omnicam® et 39% n’ont pas
perçu de différence entre les deux caméras) que par empreinte physico-chimique
(29%). 20% ont déclaré n’avoir aucune préférence entre les techniques numériques
et conventionnelles.
L’utilisation de la poudre lors des empreintes CFAO a été remarquée par les sujets
dans respectivement 64% et 74% des cas pour les caméras Lava C.O.S.® et Cerec
Omnicam®. Parmi ces pourcentages, cette utilisation a été perçue comme gênante
respectivement à hauteur de 14% et 18% pour chaque caméra.
Conclusion :
Selon les résultats obtenus, les jeunes patients ont, en majorité, éprouvé une
préférence pour la technique de l’empreinte numérique qu’ils ont jugée « plus
facile » et « plus rapide ».
41
2. Simsek H, Derelioglu S. In Vitro Comparative Analysis of Fracture Resistance in Inlay
Restoration Prepared with CAD-CAM and Different Systems in the Primary Teeth. BioMed
Res Int. 2016 32
Objectifs :
L’objectif était de comparer in vitro la résistance à la fracture en compression des
composites en méthode directe, des onlays composites en méthode indirecte et des
onlays issus de CFAO en Vita Enamic ®. Cette étude a été réalisée sur des molaires
temporaires extraites.
Matériel et méthodes :
Douze deuxièmes molaires temporaires non cariées extraites ont été utilisées.
Quatre groupes de dents ont été constitués. Le groupe 1 correspondait au groupe
témoin sur lequel aucune cavité n’a été réalisée ; sur les dents des groupes 2, 3 et 4,
des cavités standardisées de classe II occluso-proximales ont été réalisées. Les cavités
du groupe 2 ont été restaurées, in vitro, par matériau composite collé en technique
directe (composite Gradia Direct Posterior®), les cavités du groupe 3 par onlay en
composite en technique indirecte classique (Gradia Indirect Composite®) et les
cavités du groupe 4 par onlay issu de CFAO directe (Cerec Omnicam® et Cerec MC
XL®) en matériau PICN (Vita Enamic®). Après sablage, mordançage et silanisation
selon les indications du fabricant, les restaurations ont été collées dans les cavités
grâce à une colle auto-adhésive (RelyX Unicem®, 3M Espe), selon le même protocole
de collage pour les groupes 2, 3 et 4. Les restaurations ont ensuite été polies.
Des tests de résistance à la fracture par compression ont été réalisés pour chaque
dent grâce à une machine (Instron®), appliquant les forces simultanément sur les
cuspides linguales et vestibulaires.
Résultats :
La meilleure résistance à la fracture a été observée sur le groupe 1 (témoin). Aucune
différence significative n’a été observée entre les groupes 3 (restaurations indirectes
par techniques de laboratoire) et 4 (restauration CFAO). Le groupe 2 (restauration
directe au composite) a montré la plus faible résistance à la fracture au cours de ce
test.
Conclusion :
Au-delà des avantages des restaurations dentaires indirectes par rapport aux
restaurations directes (meilleures adaptation marginale et anatomique, points de
contact plus efficaces, etc.), il semble également plus intéressant mécaniquement de
proposer des restaurations indirectes chez l’enfant. Les techniques de CFAO
permettent, d’après cette étude, d’obtenir des restaurations aussi satisfaisantes que
les techniques classiques d’onlay en laboratoire sur le plan de la résistance à la
fracture.
42
3. Choi J-W, Song E-J, Shin J-H, Jeong T-S, Huh J-B. In Vitro Investigation of Wear of
CAD/CAM Polymeric Materials Against Primary Teeth. Materials. 2017 33
Objectifs :
L’objectif de l’étude est de mesurer in vitro l’usure des dents lactéales causée par
des matériaux polymères issus de technologie CFAO dans le cas d’un antagonisme.
Matériel et méthodes
Des canines lactéales intactes et non usées ont été utilisées pour l’étude. Différents
matériaux, utilisés en position antagoniste, ont été testés : Vipi Block Monocolor®
(VBM, résine PMMA commercialisé au brésil et amérique du sud), Yamahachi
PMMA® (YAP, résine PMMA), Mazic Duro® (MZD, résine composite nano céramique),
Vita Enamic® (ENA, céramique hybride, trame ceramique renforcée par infiltration
d’un polymère) et Pekkton® (PEK, Polymère à hautes performances). Ce sont des
matériaux usinables appartenant soit à la famille des céramiques infiltrées de résines
(PICN), soit à la famille des polymères à hautes performances. Dans le cadre de
l’étude, ils ont été usinés sous forme de cylindres et en dix exemplaires par
matériau. Tout d’abord, une caractérisation précise des canines lactéales et des
matériaux antagonistes ont été réalisées, en termes de dimensions et de poids. Les
différents matériaux et les dents ont été fixés sur un simulateur de mastication
assisté par ordinateur (Chewing Simulator CS-4.8® de SD Mechatronics). Afin de
simuler les contraintes d’usure subies lors de la mastication. Les échantillons ont
ensuite été soumis à une charge verticale de 50N, à une fréquence de 1,7Hz et à un
mouvement de glissement de 0,7mm pendant 120 000 cycles. Un stress thermique a
également été imposé grâce à une immersion dans des bassins d’eau distillée, à des
températures de 5°C et 55°C, durant des cycles de 60 secondes. Les conséquences
de la simulation sur les dents et les matériaux antagonistes ont été évaluées en
étudiant l’état de surface de ces éléments par microscopie électronique et en
déterminant leur poids et leurs dimensions.
Résultats :
In vitro, les matériaux VBM® et YAP® (résines PMMA) ont semblé être à l’origine
d’une usure plus importante des dents lactéales, suivi de l’ENA® (céramique hybride).
Ces résultats pourraient être expliqués par le fait que ces derniers matériaux
produisent de micro-débris, ajoutant au mécanisme d’attrition (abrasion à deux
corps) un processus d’usure à trois corps. Ce n’est pas le cas du PEK®, matériau qui
produit le moins de débris d’attrition, minimisant ainsi le phénomène d’usure à trois
corps. En ce qui concerne l’usure du matériau lui-même, dans cette étude, le PEK®
était plus usé par l’antagoniste que tous les autres matériaux testés. La céramique
hybride ENA® a perdu significativement moins en masse que le matériau PEK®. Les
différences n’étaient pas significatives entre les résultats obtenus avec les autres
matériaux PMMA (VBM®, YAP® et MZD®).
43
Conclusion
Compte tenu de ces résultats, le choix du matériau de restauration semblerait plus lié
au contexte biologique dans lequel la restauration va être réalisée.
Le tableau 2 en annexe résume les données des articles présentant des cas cliniques.
Contexte :
Le cas a été réalisé en Italie. La patiente était une fille de douze ans. L’objectif de ce
cas clinique était de restaurer l’esthétique du sourire et l’occlusion, dans le cas d’une
agénésie d’incisive latérale maxillaire (22) accompagnée d’une microdontie de
l’homologue gauche (12 rhiziforme). Ce traitement a été assorti d’une thérapeutique
orthodontique visant à stabiliser l’occlusion. Une thérapeutique définitive et durable
ne pouvait être envisagée à cause de l’immaturité du parodonte, l’objectif était donc
de proposer à la patiente une solution peu onéreuse, fonctionnelle, esthétique et
facile à mettre en œuvre.
Réalisation :
Tout d’abord, la 12 rhiziforme à été avulsée et les deux incisives latérales ont alors
été substituées par les canines, ainsi que des canines par les premières prémolaires.
Un éclaircissement externe et une chirurgie muco-gingivale d’alignement des collets
et d’allongement coronaire ont été réalisés. Six facettes antérieures (pour 14, 13, 11,
21, 23 et 24) ont été collées. Elles ont été réalisées sans préparation, par technique
de CFAO directe et usinage de matériau en céramique hybride (Vita Enamic®).
Suivi :
Aucun suivi n’a été rapporté.
44
2. Demirel A, Bezgin T, Akaltan F, Sarı Ş. Resin Nanoceramic CAD/CAM Restoration of the
Primary Molar: 3-Year Follow-Up Study. Case Rep Dent. June 2017 35
Contexte :
Le cas a été réalisé en Turquie. La patiente était âgée de treize ans. La deuxième
molaire temporaire (85) était délabrée, avec absence du germe sous-jacent de la
dent définitive (45). Une coiffe a donc été réalisée pour la 85, afin de restaurer la
fonction et l’esthétique. L’objectif était également de conserver l’espace entre 44 et
46 jusqu’à la majorité, période à laquelle il serait possible de proposer une solution
de remplacement implantaire.
Réalisation :
Tout d’abord, une biopulpectomie a été effectuée sur la 85 (obturation au MTA,
ProRoot®, Dentsply). La cavité a été scellée à l’aide d’un verre ionomère (Ionofil
Plus®, Voco). Puis une préparation périphérique de la dent a été effectuée, en vue de
réaliser une couronne de diamètre mésio-distal égal à celui d’une seconde
prémolaire (dont le diamètre est inférieur à celui d’une molaire déciduale). Enfin,
après une empreinte optique, une coiffe à été élaborée par CFAO directe en résine
nanocéramique (3M Lava Ultimate®) usinée. La coiffe a été scellée à l’aide d’un
ciment adhésif à base aqueuse (Adhesor Carbofine®, Spofa Dental).
Suivi :
Des examens cliniques et radiographiques ont été réalisés tous les six mois durant 3
ans et ont révélé que l’adaptation marginale restait intacte. Aucune sensibilité ou
infraclusion n’a été mis en évidence, ni aucune pathologie aux niveaux osseux ou
parodontal.
45
3. Zimmermann M, Koller C, Hickel R, Kühnisch J. Chairside treatment of amelogenesis
imperfecta, including establishment of a new vertical dimension with resin nanoceramic
and intraoral scanning. J Prosthet Dent. 2016 36
Contexte : Le cas a été réalisé en Allemagne. Le patient était âgé de huit ans et
présentait une amélogenèse imparfaite sévère de type II (hypomature), ayant
engendré un délabrement important des secteurs postérieurs. Une réhabilitation de
la cavité buccale a été réalisée, plus particulièrement des deuxièmes molaires
lactéales et des premières molaires définitives. Les objectifs étaient multiples :
compenser la perte de dimension verticale d’occlusion, diminuer les sensibilités
dentaires importantes, rétablir la fonction masticatoire et améliorer l’aspect
esthétique des dents du patient.
Réalisation :
Une étude avec des modèles sur articulateurs a été réalisée. L’élaboration d’un wax-
up sur les secteurs postérieurs du plâtre permettait de préfigurer le résultat. Un
mordu a également été conçu afin de pouvoir retrouver l’occlusion envisagée lors de
l’empreinte optique. La dimension verticale d’occlusion a été surélevée de 5 mm, au
cours de ce traitement. Le protocole de restauration a ensuite été réalisé sous
anesthésie générale et en une séance (« one-visit chairside ») à cause de l’âge de
l’enfant, la durée de la séance et les possibilités d’hypersensibilités en inter-séances.
Au cours de l’anesthésie, les dents ont été préparées, isolées de la salive et scannées.
Durant la période de conception et d’usinage CFAO des coiffes postérieures, les
secteurs antérieurs (incisives) ont été restaurés en bouche par technique de collage
de composite direct. Une fois l’usinage achevé, les coiffes en nanocéramique (Lava
Ultimate®) ont été collées en bouche sous digue et polies (Variolink II®, Ivoclar
Vivadent) selon un protocole rigoureux.
Suivi :
Aucun suivi n’a été rapporté.
46
4. Bilgin MS, Erdem A, Tanrıver M. CAD/CAM Endocrown Fabrication from a Polymer-
Infiltrated Ceramic Network Block for Primary Molar: A Case Report. J Clin Pediatr Dent.
2016 37
Contexte :
Le cas a été réalisé en Turquie. Le patient était âgé de sept ans. Sa deuxième molaire
mandibulaire lactéale présentait un délabrement important, liée à une lésion
carieuse. Une restauration adhésive classique par matériau inséré en phase plastique
étant impossible pour des raisons mécaniques (délabrement conséquent), la
réalisation d’une endocouronne a été envisagée.
Réalisation :
Une pulpotomie a été pratiquée (ZnOE de Cavex® en fond de cavité) et une couche
de ciment verre ionomères appliquée (Ketac Molar Easymix®, 3M Espe). Un
comblement des contre-dépouilles de la chambre pulpaire par collage de composite
fluide, puis les préparations interne et externe ont été réalisés. Enfin, une empreinte
au silicone a été effectuée. Après le transfert de l’empreinte au laboratoire de
prothèses, un modèle positif de la dent en plâtre a été élaboré. Le modèle obtenu a
été scanné et l’endocouronne réalisée par technique CFAO indirecte, usinée dans un
bloc de résine hybride PICN (Vita Enamic®). L’endocouronne a ensuite été collée au
RelyX U200®.
Suivi :
Le patient a été suivi jusqu’à neuf mois après la pose de l’endocouronne, période
durant laquelle aucun descellement ni aucune complication pulpaire ou péri-
radiculaire n’ont été rapportés.
47
5. Halal R, Nohra J, Akel H. Conservative anterior treatment with CAD-CAM technology and
polymer-infiltrated ceramic for a child with amelogenesis imperfecta: A 2-year follow-up.
JPD. 2017 38
Contexte :
Le cas a été réalisé en Liban. Le patient était âgé de douze ans et atteint
d’amélogenèse imparfaite sévère sur denture définitive avec présence de tâches
colorées noirâtres dans un contexte de béance antérieure. Le traitement envisagé
consistait à réaliser des coiffes destinées à rétablir l’esthétique du sourire du patient.
Réalisation :
Une empreinte optique a été réalisée et un projet prothétique proposé par analyse
informatisée à l’aide du DSD (Digital Smile Design®). Il visait à rétablir l’esthétique des
secteurs antérieurs sans modifier l’occlusion (pas de création de guidage antérieur
avec la pose des coiffes). Les coiffes ont été usinées en résine hybride (Vita Enamic®),
puis collées sous champ opératoire (RelyX Unicem®, 3M Espe).
Aucune description du traitement des dents avant collage n’a été communiquée dans
l’article.
Suivi :
A deux ans, le contrôle semblait n’être qu’esthétique. On a pu noter une faible
dyschromie des coiffes et des migrations dentaires menant à des diastèmes.
Contexte :
Les cas rapportés ont été réalisés en France et concernaient deux patientes âgées de
sept ans. Elles présentaient un délabrement coronaire important sur les 74 et 54. Des
restaurations par onlays CFAO ont donc été envisagées.
Réalisation :
Pour les deux patientes, une pulpotomie a été réalisée (matériaux d’obturation non
précisés), et suivie d’une préparation périphérique supra ou juxta gingivale des dents.
Une empreinte optique a été effectuée, en vue de la réalisation d’onlays en
composite usiné (Lava Ultimate®). Après essayage, les pièces ont été polies collées
(RelyX Unicem®, 3M Espe) sans champ opératoire, mais à l’aide d’un système porte-
coton isolant de la salive (Automaton®, Meba). Pour terminer, l’ensemble de la
restauration été polie.
Suivi :
La visite de contrôle à huit mois ne révèle aucune pathologie sur ces dents et une
entière satisfaction des patientes et de leurs parents.
48
3.3. Discussion
L’étude que nous avons menée peut avoir été biaisée par plusieurs éléments. Tout
d’abord, elle n’a été réalisée que par un seul opérateur, ce qui engendre un potentiel biais
de classement des articles lié à la subjectivité dans la sélection de ces articles par
l’examinateur. Afin d’éviter ce biais, il serait nécessaire que la sélection des articles de la
revue soit accomplie par au moins deux opérateurs différents.
D’autre part, il existe un biais de confusion à la sélection des articles du à la
dénomination de ceux-ci : un article au titre peu évocateur peut ne pas avoir été retenu pour
lecture, alors qu’une analyse du résumé aurait pu l’inclure dans notre travail.
La base de données utilisée (PubMed) est le principal moteur de recherche de
l’ensemble des domaines scientifiques en médecine et biologie. Cependant, il ne contient
qu’un ensemble d’articles parus dans des revues internationales et ne regroupe pas
l’intégralité des parutions existant sur un sujet. Il était donc difficile, en n’employant que
cette source d’informations, de regrouper tous les articles intéressant notre propos. Malgré
une recherche sur le serveur de la bibliothèque de l’Université, dont les résultats ont été
restreints (1 article inclus), une recherche sur plusieurs bases de données aurait pu élargir le
panel de parutions retenues pour cette étude.
Enfin, le biais de parution pourrait diminuer le nombre de résultats, car tous les cas
cliniques concernant notre sujet n’ont peut être pas été publiés.
Lors de notre recherche, nous avons délibérément écarté les articles traitant de
chirurgie chez l’enfant ou de traitements en orthopédie dento-faciale faisant appel à la
technologie CFAO pour une intervention de chirurgie orthognatique. En effet, notre étude
concerne essentiellement l’utilisation de cette technique en pratique « courante » de
cabinet dentaire chez l’enfant. Il faut néanmoins souligner que la modélisation en 3D est
largement employée dans les domaines de la chirurgie dentaire ou maxillo-faciale
pédiatrique 40 et de l’orthodontie. On remarque d’ailleurs que l’étude de Burhardt et al 31 sur
la perception par les patients des techniques d’empreintes a été publiée dans une revue
d’orthodontie.
49
d’intérêt témoigné à ce sujet. Il s’agissait, pour la majorité d’entre eux, de cas cliniques (n=6)
avec peu ou pas de suivi postopératoire, ayant donc un bas niveau de preuve scientifique
(grade C). Les autres articles étaient des études expérimentales randomisées sur de petits
échantillons (n=3), constituant des preuves scientifiques de niveau plus élevé (grade B) mais
réalisées in vitro pour deux d’entre-elles, leurs conclusions étaient donc à envisager avec
prudence.
Avec de tels résultats, il serait présomptueux de vouloir tirer des conclusions fermes,
car elles n’auraient que peu de valeur scientifique. Toutefois, il nous sera possible de
desceller certaines tendances et de trouver des pistes de réflexions pour d’autres études à
venir qui nécessiteront des essais cliniques randomisés.
Les articles d’études expérimentales retenus pour cette étude traitaient tous les trois
d’aspects différents de l’application de la CFAO en odontologie pédiatrique. Il serait par
conséquent infondé de vouloir comparer leurs résultats. Ils comportaient néanmoins des
similitudes et il est possible d’en tirer certaines tendances.
50
3.3.2.2. Les matériaux usinables en CFAO
Les deux autres études expérimentales 32,33 incluses dans notre recherche visent à
évaluer les propriétés mécaniques de nouveaux biomatériaux dentaires usinables utilisés en
CFAO. Dans chacun de ces deux articles, les auteurs ont pour objectif d’éprouver les
matériaux constituant des solutions alternatives à l’emploi de restaurations peu esthétiques
(couronnes pédiatriques préformées en métal), peu durables ou difficilement mises en
œuvre chez l’enfant (résines composites collée en méthode directe). Ainsi, plusieurs types
de matériaux sont testés en usure et en compression dans le but de savoir si leurs propriétés
s’accorderaient aux conditions biomécaniques imposées par la denture lactéale.
Ces deux études sont réalisées in vitro, ce qui nous incite à modérer l’importance des
résultats obtenus, les conditions biologiques réelles de la cavité buccale étant hostiles aux
biomatériaux dentaires et difficilement reproductibles en laboratoire. En effet, l’usure des
dents ne dépend pas uniquement du phénomène d’attrition, mais également de nombreux
autres facteurs tels que la nature abrasive des aliments, les propriétés intrinsèques de
l’émail de l’individu, la composition chimique de la salive, d’éventuelles parafonctions et le
schéma d’occlusion42. Les simulateurs in vitro de compressions dentaires ne peuvent pas non
plus reproduire exactement les forces appliquées sur une restauration. Les études in vitro
ont néanmoins l’avantage de dépendre dans une moindre mesure du facteur humain que les
études cliniques. Leurs protocoles de mise en œuvre sont donc, à priori, plus rigoureux.
Dans l’article de Choi et al 33, plusieurs matériaux différents sont testés dans le but
d’évaluer l’usure causée ou subie par des dents lactéales antagonistes. Ces matériaux
étaient des résines composites, des polymères à hautes performances et des céramiques
hybrides ayant été mis sur le marché récemment. Il est important pour un biomatériau de
résister à l’usure et de ne pas en causer de manière trop importante afin d’éviter les effets
néfastes d’une perte de dimension verticale d’occlusion : fatigue musculaire, perturbations
fonctionnelles et occlusales pouvant créer des parafonctions, perlèches.
51
D’après les conclusions de l’étude, la céramique hybride Vita Enamic® s’usait peu
mais était à l’origine d’une usure plus importante des dents lactéales que les autres
matériaux, à cause d’un phénomène induit d’usure à trois corps. A l’inverse, les matériaux
polymériques (notamment le Pekkton®) s’usaient facilement mais provoquaient moins
d’usure de l’antagoniste. Afin de préserver l’intégrité tissulaire au maximum dans le cas de
restaurations par matériaux en CFAO, il conviendrait donc de ne pas employer de résines
hybrides dans le cas d’usures prononcées des dents naturelles, mais plutôt d’opter pour des
matériaux polymériques moins abrasifs. Il est cependant important de noter que les coiffes
pédiatriques préformées métalliques provoquent encore moins d’usure des dents naturelles
que les matériaux testés ici 43.
Ces deux dernières études sont complémentaires. Elles ouvrent la voie à la recherche
sur l’utilisation des nouveaux biomatériaux usinables en odontologie pédiatrique. Ces
matériaux permettraient une mise en œuvre plus aisée qu’un matériau composite par
méthode directe et une esthétique accrue par rapport à une coiffe pédiatrique préformée en
métal. Les résines hybrides semblent être des matériaux prometteurs dans ce domaine :
elles sont esthétiquement satisfaisantes et possèdent de grandes propriétés mécaniques,
proches de celle des tissus dentaires 44,45 .
Afin de confirmer ces appréciations en denture déciduale, il serait bénéfique de
réaliser de plus amples recherches, en tenant compte des véritables conditions biologiques
présentes en bouche.
La qualité des articles retenus est disparate. Nous pouvons desceller quelques
incohérences et défauts.
D’une part, seule la moitié d’entre eux rapportent un suivi, dont la durée varie de
huit mois à trois ans, et dont les modalités et les conclusions sont peu détaillées. Les
protocoles sont également décrits avec plus ou moins de précision selon les articles.
D’autre part, l’article de Halal et al 38 est peu détaillé et contient certaines des
imprécisions, notamment en termes de diagnostics : classe d’occlusion du patient, perte
éventuelle de dimension verticale due à l’amélogenèse imparfaite et absence de prise en
charge des secteurs postérieurs délabrés.
52
3.3.3.2. Discussion
Les six articles de cas cliniques pris en compte pour notre recherche correspondaient
à trois types d’indications à la restauration par CFAO chez l’enfant :
D’après les cas cliniques exposés dans ces parutions et en ce qui concerne la
facilitation des soins au fauteuil et la coopération du patient, la technologie CFAO semble
être un outil de choix en odontologie pédiatrique. En effet, en CFAO directe, la caméra
optique facilite la prise d’empreinte chez l’enfant car des zones mal enregistrées sont
aisément retouchables. Elle transforme la conception de la prothèse en étape ludique et
maintient l’intérêt du patient. Une seule séance peut être suffisante pour créer et mettre en
place une prothèse, ce qui accélère la durée du traitement par rapport à des procédures
standard de conception prothétique et évite de lasser l’enfant 39.
Dans le cas de pathologies sévères de l’émail telle que l’amélogenèse imparfaite,
Zimmermann et al 36 ont montré que l’usage la technologie CFAO est fortement bénéfique.
L’âge de l’enfant et ses sensibilités dentaires ne permettent pas de réaliser de traitement
satisfaisant sans anesthésie générale. De plus, la mise en place de couronnes pédiatriques
préformées n’aurait peut-être pas permis d’augmenter la dimension verticale d’occlusion du
patient de manière aussi précise et stable que rapporté dans l’article. Dans ce cas particulier,
il semble que l’apport de la nouvelle technologie soit indéniable.
53
sera de l’ordre de quelques mois ou années. Il faut donc trouver des solutions matérielles et
techniques conciliant qualité du soin et prix abordable.
La technologie CFAO pourrait, d’après les articles sélectionnés, apporter une aide
dans la poursuite de ces objectifs. En effet, d’après les cas rapportés par Patroni et al 34 et
Halal et al 38, les restaurations à visée esthétique sont satisfaisantes et durables sur les plans
de l’esthétique, de la préservation tissulaire (« no-prep ») et du coût par rapport à des
restaurations en céramique classiques mises en place chez l’adulte.
Les matériaux usinables en CFAO sont variés et peuvent s’adapter aux contraintes
fonctionnelles et esthétiques. Seuls deux types de matériaux usinables apparaissent dans
notre sélection : les résines nano céramiques (Lava Ultimate®) et les céramiques hybrides
(Vita Enamic®).
54
L’utilisation de la technologie CFAO en odontologie pédiatrique pourrait donc
s’avérer bénéfique pour de nombreuses applications. Elle simplifierait certaines procédures
en pratique courante, concourrait à obtenir la coopération des enfants et faciliterait les
traitements chez des patients atteints de certaines pathologies : amélogenèse imparfaite,
fluoroses, MIH, patients à besoins spécifiques…
55
Conclusion
L’odontologie pédiatrique est une discipline complexe. Elle nécessite des techniques
particulières de soins et de prise en charge comportementales des patients. Or, il est
indéniable que l’arrivée sur le marché de la technologie CFAO a apporté des solutions
techniques à de nombreuses difficultés prothétiques chez l’adulte. A travers une analyse de
la littérature scientifique, l’objectif de notre étude était de dresser un état des lieux des
connaissances et des usages de la CFAO appliquée à l’enfant. Nous souhaitions porter une
attention particulière à la manière dont cette technologie pourrait faciliter au quotidien la
pratique de l’art dentaire chez le jeune patient.
Tout d’abord, l’empreinte numérique serait une avancée en termes de confort lors de
la prise d’empreinte. Cet élément représente un avantage dans la prise en charge du
comportement de l’enfant en cabinet dentaire. D’autre part, l’utilisation de l’empreinte
optique en tant qu’outil pédagogique n’est que peu développée dans la littérature. La
communication avec le patient, grâce à la modélisation 3D, pourrait être grandement
facilitée et nous supposons qu’elle favoriserait ainsi la coopération. En outre, les procédés
de CFAO directe permettraient de réduire le nombre de séances de traitement ce qui est un
avantage majeur dans la prise en charge.
Les parutions retenues indiquent que les matériaux usinables employés constituent
une alternative intéressante aux restaurations habituellement employées chez l’enfant
(couronnes pédiatriques préformées, restaurations foulées). Certains inconvénients de ces
thérapeutiques, qu’ils soient d’ordre esthétique, biologique ou mécanique, pourraient être
solutionnés par la réalisation de pièces prothétique par technique CFAO. L’abrasion causée
par les nouveaux biomatériaux étudiés ici pourrait néanmoins constituer un obstacle à une
utilisation plus large de pratique courante.
Toutes les observations que nous formulons doivent être considérées avec prudence.
De plus amples recherches sont nécessaires afin d’établir des conclusions et des
recommandations.
56
Annexes
6
2. Synthèse des articles de type « Cas cliniques »
Matériaux de
Auteur Age du Appareil et
Indication/application Dents concernées restauration Apports Suivi
principal patient procédé de CFAO
utilisés
CEREC Omnicam
34 Esthétique, agénésie d’incisive 14, 13, 11 et 21, ® Esthétique,
Patroni 12 ans et SW Vita Enamic® Non mentionné
latérale, facettes 23, 24 Contention orthodontique
Technique directe
Restauration d’une dent lactéale CEREC Bluecam Contrôle à 3 ans (peu
35 ® Maintient de l’espace,
Demirel dans le cas d’agénésie du germe 13 ans 85 et MCXL Lava Ultimate® détaillé) : esthétique et
Fonction masticatoire
sous-jacent. Technique directe fonction satisfaisantes
Aide dans la prise en charge
CFAO directe utilisée pour le e
1 molaires CEREC Omnicam d’un syndrome sévère chez
36 traitement d’un enfant atteint 8 ans ®
Zimmermann définitives et et MCXL Lava Ultimate® un jeune enfant, Non mentionné
d’amélogenèse imparfaite sous
molaires lactéales Technique directe Réalisation de prothèse
anesthésie générale
sous anesthésie générale
® Contrôle à 9 mois : RAS*
Réalisation d’une endocouronne CEREC MCXL
37 Economie tissulaire au niveau pulpaire et
Bilgin sur dent lactéale en matériau 7 ans 85 Technique Vita Enamic®
Esthétique périradiculaire, ajustage,
PICN indirecte
et coloration stables
Restauration de secteur CEREC Software
38 de 13 à 23 et de ® Solution simple et rapide Suivi à 2 ans : décoloration
Halal esthétique, patient atteint 12 ans et MCXL Vita Enamic®
33 à 43 d’exécution mineure du matériau
d’amélogenèse imparfaite. Technique directe
Deux ® Economie tissulaire
39 Deux cas de réalisation d’onlays CEREC Omnicam Contrôle à huit mois :
Dursun patientes 74 et 54 Lava Ultimate® Esthétique par rapport à
CFAO sur dents lactéales Technique directe RAS*
de 7 ans une CPP
*RAS : Rien A Signaler
58
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62
Vu, Le Président du Jury,
Date, Signature :
63
64
Titre : Odontologie pédiatrique : Quels intérêts à l’utilisation de la
technologie CFAO ? Revue systématique de la littérature
Résumé :
La technologie CFAO (Conception et Fabrication Assistée par Ordinateur) a permis une
évolution dans la manière de concevoir et de fabriquer la prothèse fixée en odontologie
(empreinte optique, modélisation 3D, ajustage, communication...). Ces techniques sont
de plus en plus mises en œuvre chez les patients adultes, mais restent peu utilisées
chez l'enfant. L’objectif de ce travail était de déceler, dans la littérature scientifique, les
intérêts à l’utilisation de la CFAO en odontologie pédiatrique prothétique. Une recherche
dans la base de donnée PubMed complétée par une recherche personnelle, a permis de
sélectionner 9 articles correspondant à nos critères d’inclusion. Malgré un niveau de
preuve scientifique globalement faible, il apparait que l’usage de la technologie CFAO
pourrait aider à améliorer la pérennité des restaurations et faciliter la communication
avec l’enfant ainsi que sa prise en charge lors des étapes d’empreintes.
Mots clefs :
Odontologie pédiatrique, CFAO, prothèse dentaire, odontologie conservatrice, revue
systématique de la littérature.
Summary :
The CAD-CAM technology (Computer-Aided Design - Computer-Aided Manufacture) led
to an evolution in the way of conceiving and producing dental prosthesis (optical prints,
numerical modelling, fit, communication…). These techniques are increasingly used in
the adult patients but remain little employed in children. The aim of this study was to
identify within the scientific literature, the interests of using the CAD-CAM technology in
prosthetic paediatric odontology. A research in the PubMed database supplemented by
a personal research, allowed the selection of 9 articles meeting our inclusion criterias.
Despite a low standard of proof, it appears that the use of CAD-CAM technology may
improve the sustainability of restaurative dental procedures and make easier the
communication with children as well as facilitate their care in impressions making.
Key words :
Paediatric dentistry, CAD-CAM, dental prosthesis, conservative dentistry, systematic
literature review.
65