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OCÉANOGRAPHIE BIOLOGIQUE
ET BIOLOGIE MARINE
1
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EUCLIDE
INTRODUCTION AUX ÉTUDES SCIENTIFIQUES
Collection fondée p a r
MAURICE C A U L L E R Y et CHARLES M A U R A I N
Membres de l'Institut

PREMIÈRE SECTION :
Mathématiques et Astronomie mathématique
dirigée par N.
DEUXIÈME SECTION :
Physique du Globe, Astronomie physique
et Sciences de la Terre
dirigée par Charles MAURAIN
Membre de l'Institut
TROISIÈME SECTION !
Physique
dirigée par Gustave RIBAUD
Membre de l'Institut
QUATRIÈME SECTION :
Chimie
dirigée par Louis HACKSPILL
Membre de l'Institut
CINQUIÈME SECTION :
Biologie animale
dirigée par Louis FAGE
Membre de l'Institut
SIXIÈME SECTION :
Biologie végétale et Agronomie
dirigée par Roger HEIM
Membre de l'Institut
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« EUCLIDE »
INTRODUCTION AUX É T U D E S S C I E N T I F I Q U E S
B I O L O G I E A N I M A L E

SECTION DIRIGÉE PAR LOUIS FAGE

OCÉANOGRAPHIE
BIOLOGIQUE
ET BIOLOGIE
MARINE
par

J.-M. PÉ RÈS
Professeur à la Faculté des Sciences de Marseille

TOME P R E M I E R

LA VIE BENTHIQUE

P R E S S E S U N I V E R S I T A I R E S DE F R A N C E
108, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, P A R I S

1961
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DU M Ê M E A U T E U H

M a n u e l Binnoniie Uenlhique de la mer Méditerranée (avec J. PICARD), Gap.


L o u i s - J e a n , 1958.

D É P O T LÉGAL
lre édition 3e trimestre 1961
TOUS DROITS
de traduction, de reproduction et d'adaptation
réservés pour tous pays
G) 1961, Presses Universitaires de France
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PRÉFACE

Cet ouvrage vient à son heure.


Malgré l'importance théorique et pratique de l'Océanographie,
celle discipline, depuis longtemps en honneur dans les pays étran-
gers, n'a acquis que fort récemment son droit de cité dans les éta-
blissements d'enseignement supérieur et les universités de notre
pays. Et la France qui, avec MARION, PRUVOT, CHARCOT, fit autre-
fois figure de pionnier dans ce domaine s'est trouvée largement
distancée par les institutions des nations voisines.
Il fallut la générosité du prince ALBERT IER de Monaco, son
amour des sciences de la mer, pour pallier cette carence en créant
l'Institut océanographique, fondation privée qu'il remit, voilà un
demi-siècle, à la France.
Et voici que maintenant les pouvoirs publics prennent conscience
de la nécessité d'encourager l'élude des Océans, de s'associer à
l'effort international fait dans celle voie. Une chaire d'Océanographie
physique a été créée au Muséum national d'Histoire naturelle,
une chaire d'Océanographie biologique à la Faculté des Sciences
de Marseille, et l'Océanographie fait partie désormais de l'ensei-
gnement du troisième cycle.
Il est urgent de former des élèves, d'attirer les jeunes vers une
science qui, par son objet, ses moyens d'investigation, l'ampleur
des problèmes qu'elle pose est bien faite pour retenir leur attention.
Encore faut-il qu'ils aient, en dehors de l'amphithéâtre et en complé-
menl des leçons du maître, des ouvrages sur lesquels ils peuvent se
pencher avec la certitude d'y trouver un guide indispensable à
leurs recherches fulures.
C'est donc à eux que s'adressenl d'abord ces Éléments d'Océano-
graphie biologique.
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Mais, c'est aussi à tous ceux qui, loin des établissements,


trop rares encore, où se donne cet enseignement, désirent savoir ce
qu'est celle science dont ils ne connaissent souvent que les résultats
spectaculaires et ne savent pas quels en sont les fondements. C'est
parmi eux que l'on peut espérer faire de nouveaux adeptes, former
les jeunes recrues indispensables à une discipline dont on veul
assurer le développement.
L'ouvrage de M. J.-M. PÉRÈS répond entièrement à ces buts
divers. Successivement directeur adjoinl du laboratoire du Muséum
à Dinard, puis directeur de la station marine d'Endoume, el enfin
premier titulaire de la chaire d'Océanographie de la Facullé des
Sciences de Marseille, toute sa carrière s'est faile en contact étroit
avec la Mer. Que ce soil à bord des baleaux de ces laboratoires ou,
pour des croisières lointaines, à bord de la Calypso, que ce soit au
cours de ses nombreuses plongées en bathyscaphe, dans la Méditer-
ranée, dans l'Atlantique, dans les mers du Japon, c'est toujours de
choses vues dont il écrit ou dont il parle. Cela donne à son livre un
accenl de véracité qu'on ne trouve point dans les ouvrages de compi-
lalion. L'Océanographie, même restreinte à la partie biologique, a
un horizon si vaste que nul ne peut l'embrasser dans son entier el
M. J.-M. PÉRÈS fait de nombreux emprunls à ses devanciers donl
il connaît parfaitement les travaux. Mais leurs conclusions ne
sont pas adoplées d'emblée, il les discute, il les justifie, il les amende
suivant le cas avec toute l'aulorilé que lui donne sa parfaile connais-
sance de la Mer.
C'esl donc bien une œuvre dans laquelle on relrouve partout
son accenl, une œuvre originale que nous livre l'auleur que nous
devons remercier de mellre ainsi à la disposition des élèves, des
chercheurs, des fulurs maîtres qui auronl à leur lour, dans un
avenir que je souhaite prochain, à enseigner eux-mêmes l'Océa-
nographie.
; Décembre 1959.
: Louis FAGE,
Membre de l'Institut.
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AVANT-PROPOS

Au moment où j'achève ce modeste volume, il peut être


considéré, je crois, comme à peu près à jour. J'y ai tenu compte
des plus récentes contributions apportées, notamment, au
Ier Congrès océanographique international tenu à New York
au mois de septembre 1959.
Je suis toutefois sans illusions, et je sais qu'au moment où
il paraîtra effectivement en librairie ce livre appellera déjà des
additions ou des rectifications. Sans doute faut-il s'en réjouir,
car cela prouve que les Sciences de la Mer sont en plein essor
actuellement, au même titre que les sciences spatiales d'ailleurs,
qui frappent évidemment beaucoup plus l'imagination du grand
public.
Ces pages sont une partie du cours que je professe à la Faculté
des Sciences de Marseille pour les étudiants du Troisième Cycle
d'Océanographie et représentent le premier ouvrage de Biologie
marine écrit en français depuis le petit volume de JOUBIN, très
élémentaire, paru en 1928. J'ai fait de larges emprunts à divers
ouvrages généraux modernes, américains et russes notamment,
et aussi au Manuel de Bionomie benthique de la mer Médilerranée
que j'ai publié en 1958 avec mon collaborateur Jacques
PICARD. J'adresse mes remerciements à mes collaboratrices :
Mme AUGARDE et Mlle LUCIANI qui m'ont largement aidé dans
la mise au net du manuscrit et des dessins.
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Mais je veux dire surtout toute ma gratitude à mon Maître,


le pr Louis FAGE, qui a bien voulu honorer d'une préface ce
modeste livre et m'a fait profiter de ses conseils et de ses critiques.
Marseille, le 1er novembre 1959.
J.-M. P.
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CHAPITRE PREMIER

INTRODUCTION

1. 1. Généralités sur les milieux océaniques

Quand on compare les milieux océaniques aux milieux


continentaux on est frappé de prime abord par deux caractères
essentiels qui sont propres aux premiers et les différencient des
seconds :

— la continuité, quoique certaines mers intérieures ou méditer-


ranéennes ne communiquent que de façon précaire avec les
grands océans formant la « mer planétaire » ;
— l'uniformité relative des conditions de milieu notamment
en ce qui concerne la température, l'écart extrême à l'échelle
annuelle avoisinant 90° pour les milieux continentaux et
ne dépassant guère 300 pour les milieux océaniques considérés
dans leur ensemble.

En fait, cette continuité et cette uniformité sont plus appa-


rentes que réelles. S'il n'y a pas de frontières pour les navires,
il y en a, à l'échelle planétaire, pour les organismes et même
pour les eaux, car les eaux marines sont loin d'avoir partout les
mêmes caractéristiques physiques et chimiques. Ces eaux
présentent d'ailleurs, parfois, une certaine indépendance les
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unes par rapport aux autres, et le principe de l'immixtibilité


des eaux de densités différentes, lorsqu'elles sont en masses
importantes, principe dont on a souvent exagéré l'importance
d'ailleurs, n'en a pas moins une certaine valeur.
On doit noter aussi que le milieu océanique (comme d'ailleurs
le milieu dulcaquicole) est, contrairement au milieu continental,
peuplé dans les trois directions de l'espace (la faune terrestre
endogée n'étant que très superficielle).
Les milieux océaniques sont peuplés de façon riche et variée.
Tous les grands groupes du règne végétal y sont représentés, y
compris les Phanérogames, et la plupart des grands groupes du
règne animal y sont représentés également. Il y a même bon
nombre de grandes subdivisions zoologiques qui sont uniquement
constituées de formes marines.
Puisque, comme je l'ai dit plus haut, les conditions ambiantes
dans le milieu océanique sont plus diverses qu'on ne peut le
croire de prime abord, on pourra envisager la séparation d'un
certain nombre d'aires ou de zones des milieux océaniques
(lesquelles comportent des peuplements biologiques différents)
suivant les variations de ces conditions ambiantes.
On pourra ainsi distinguer :
1° En faisant intervenir l'élément topographique (d'impor-
tance capitale pour les organismes) : des régions situées au
voisinage des côtes et des régions situées au large.
2° En fonction de la latitude (au moins en gros) : de grandes
régions océaniques de surface, basées essentiellement sur les
températures de surface.
3° En fonction de la profondeur : des couches superficielles,
moyennes et profondes où les conditions physiques essentielles
(température, lumière et agitation notamment) présentent de
grandes différences.
Il convient de détailler rapidement ces trois modes de divi-
sions des milieux océaniques.
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1. 1. 1. Subdivision des milieux océaniques


en considéralion de la lopographie
1. 1. 1. 1. Océans el mers. — Tout d'abord on peut distinguer
les océans et les mers.
Les océans sont caractérisés par :
— leur surface élevée (en millions de km2 : 180 pour le Pacifique,
106 pour l'Atlantique, 75 pour l'océan Indien) ;
— leurs communications larges les uns avec les autres, aussi
bien en surface qu'en profondeur ;
— leurs rivages formés par des masses continentales assez éloi-
gnées et appartenant toujours à des continents différents ;
— leur profondeur moyenne élevée.
Les mers sont moins importantes au point de vue de la
superficie, et présentent toujours, par rapport aux océans, des
conditions en partie anormales : profondeur moyenne moins
grande ; plus grande proximité des continents ; présence d'îles
ou presqu'îles plus nombreuses ; communications entre elles ou
avec les océans moins largement ouvertes ou moins profondes.
On peut, parmi les mers, distinguer plusieurs catégories qui
sont reliées d'ailleurs par tous les intermédiaires :
Les mers bordières : Situées sur le bord des grandes étendues
océaniques, elles communiquent avec elles de façon suffisamment
large, aussi bien dans le plan horizontal que dans le plan vertical,
pour participer dans une certaine mesure à la « vie » de ces
océans. Exemples : mer d'Arabie, mer du Bengale, mer du
Nord, etc. Ce sont, en général, des mers que, dans un paragraphe
suivant, nous qualifierons d'épicontinentales.
Les médilerranées : Ce sont des mers qui sont plus profondé-
ment engagées que les mers bordières dans l'intérieur des conti-
nents, ou entre un continent et des groupes d'îles, et surtout qui
ne communiquent avec ce que C. VALLAux a appelé la « mer
planétaire » que par des détroits d'étendue restreinte et dont la
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profondeur est moindre que celle de la mer elle-même. Certaines


de ces méditerranées sont parfois distinguées sous le nom de
« mers de guirlandes insulaires », vocable qui se dispense d'expli-
cations. Parmi les méditerranées on peut citer : la Méditerranée
(de l'Ancien Monde), la mer Rouge, la mer des Caraïbes, la
mer de Chine, la mer du Japon, la mer de Corail, etc. Ces méditer-
ranées présentent évidemment une circulation profonde déficiente,
et ceci d'autant plus que le ou les détroits sont plus exigus et
moins profonds. Elles présentent souvent des anomalies de la
salinité par rapport aux océans et surtout ont une remarquable
anomalie en ce qui concerne la température en profondeur.
Dans les océans la température décroît avec la profondeur (à
l'exception des très grandes profondeurs où il y a un léger
réchauffement dû à l'augmentation de pression). Au contraire,
les méditerranées ont, jusqu'à leurs plus grandes profondeurs,
une température qui est voisine de celle qu'a la mer ouverte à
la profondeur du seuil de communication. Par exemple la
Méditerranée a environ 13° depuis 350 m (profondeur du seuil
de Gibraltar) et jusqu'à ses plus grandes profondeurs (environ
5 100 m dans une des fosses de Matapan). Cependant pour que
cette loi se vérifie il faut que la température des eaux de surface
pendant le mois le plus froid de l'année reste supérieure à la
température des eaux océaniques à la profondeur du seuil. En
vertu de cette restriction, par exemple, la mer du Japon, enca-
drée, partiellement au moins, par des régions à climat rigoureux,
ne suit pas la règle d'homothermie profonde des méditerranées.
D'ailleurs, il semble que, dans beaucoup de cas, la température
des eaux profondes d'une méditerranée soit conditionnée en
réalité par la température de surface du mois le plus froid de
l'année et non par celle des eaux océaniques à la profondeur du
seuil. Parmi les méditerranées la mer Glaciale Arctique (ou
méditerranée arctique) occupe une place un peu à part par sa
surface élevée (14 millions de km2).
Le classement de certaines aires maritimes dans la catégorie
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des mers bordières ou dans celle des méditerranées présente


forcément une part d'arbitraire, surtout lorsqu'il s'agit de mers
de guirlandes insulaires, car tous les intermédiaires existent
entre les deux catégories principales.
Des mers comme la Baltique ou la mer Noire, qui s'ouvrent
par un seuil étroit et peu profond non pas sur un océan mais sur

FIG. 1 a FIG. 1 b
FIG. 1. — Représentation schématique des courants au niveau d'un seuil
séparant un océan ou une mer à gauche, d'une méditerranée ou d'une mer
intérieure à droite. L'aire maritime la plus interne peut avoir une balance
des eaux déficitaire (1 a) ou excédentaire (1 b). Le courant principal, compen-
sateur, est en flèche continue ; le contre-courant, induit, en flèche interrompue.
(Simplifié d'après DIETRICH et KÂLLE.)

une mer, p e u v e n t être considérées c o m m e c o n s t i t u a n t une


c a t é g o r i e s p é c i a l e : les mers i n t é r i e u r e s .
A u n i v e a u d u seuil q u i f a i t c o m m u n i q u e r u n e m é d i t e r r a n é e
avec une mer quelconque, on observe p r a t i q u e m e n t toujours
u n e c o m b i n a i s o n de d e u x c o u r a n t s de s e n s o p p o s é . L ' o r d r e d e
s u p e r p o s i t i o n d e ces d e u x c o u r a n t s e s t f o n c t i o n d e la « b a l a n c e
des e a u x » c ' e s t - à - d i r e d u c a r a c t è r e e x c é d e n t a i r e o u d é f i c i t a i r e
d e celle des d e u x m e r s q u i e s t le p l u s loin d e l ' o c é a n . L a v i t e s s e
de ces c o u r a n t s , e t s u r t o u t d e celui q u i a s s u r e la c o m p e n s a t i o n ,
e s t f o n c t i o n d e l ' i m p o r t a n c e d u d é f i c i t o u de l ' e x c é d e n t . L e s
figures 1 a e t 1 b r é s u m e n t les d e u x c a s e s s e n t i e l s .
E n f i n les mers fermées, c o m m e la m e r C a s p i e n n e o u l a m e r
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d'Aral, ont des caractères si particuliers que leur étude est du


domaine de la limnologie plutôt que de l'océanographie.
1. 1. 1. 2. Profil des fonds sous-marins. — L'étude du relief
sous-marin des océans et des mers montre que, dans beaucoup de
cas, en partant du rivage, la pente des fonds est généralement
faible et que, jusqu'à une distance plus ou moins grande de la
côte, s'étend une plate-forme immergée, descendant en pente
douce, qui forme en somme un prolongement du relief immergé.
Cette plate-forme constitue ce qu'on appelle le plateau continental
(anglais : shelf).
Parvenue du côté du large à une profondeur variable (de 120
à 350 m environ suivant les cas, avec une valeur moyenne corres-
pondant à l'isobathe 200), la pente de la plate-forme augmente
brusquement pour former ce qu'on appelle le talus continental
ou pente continentale (anglais : slope) qui descend jusque
vers 1 500 à 2 000-2 500 m, profondeur où la pente redevient faible.
Il y a cependant des régions où cette rupture de pente n'existe
pas, par exemple une partie des côtes algériennes. Mais ce type
de topographie paraît rare. Il y a également des cas où il y a,
non pas une, mais deux ruptures de pente.
Au delà du pied du talus continental, la pente s'adoucit à
nouveau pour former la grande « plaine » profonde (dite abyssale).
Celle-ci n'est interrompue que localement par les grandes fosses
et ravins profonds qui sont à nouveau à pentes accusées et
dépassent 6 000-7 000 m pour atteindre 11 100 m, profondeur
maxima actuellement reconnue dans les océans (en 1958 dans
la fosse des îles Marshall, par une expédition russe).
En fait ce profil des fonds sous-marins ne peut être séparé de
celui des terres émergées. L'ensemble s'inscrit dans la courbe
hypsographique bien connue (KOSSINNA), obtenue en portant
en ordonnées les altitudes ou les profondeurs et en abcisses les
surfaces occupées (fig. 2). La forme de cette courbe permet de
distinguer, dans l'ensemble de la croûte terrestre, 5 parties dis-
tinctes : les cîmes au-dessus de + 1 000 m (avec une altitude
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moyenne de + 2 110 m) ; le plateau continental sensu lalo, dit


aussi parfois « marge continentale » de + 1 000 m à — 200 m
(avec une altitude moyenne de + 270 m) ; la pente continentale
de — 200 à — 2 500 m au maximum (avec une profondeur moyenne

FIG. 2. — Courbe hypsographique (imitée et simplifiée d'après KOSSINNA)

de — 1 270 m) ; la plaine abyssale de — 2 500 à — 6 000-7 000 m ;


les fosses et ravins profonds au delà de — 6 000-7 000 m. BOUR-
CART (1958) propose de grouper la marge continentale et la pente
continentale en une entité unique : le « Précontinent » (fig. 2).
Le maximum de fréquence par rapport au niveau de la mer
(niveau 0) est très différent pour les continents (entre + 200
et + 500 m) et pour les océans (entre — 4 000 et — 5 000 m).
KOSSINNA tire argument de cette différence de l'ordre de 5 000 m
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entre le plateau continental sensu laiD et le fond de l'océan pour


conclure que ces deux parties de l'écorce terrestre sont de
constitution fondamentalement différente.
La largeur du plateau continental immergé est très variable.
A peu près inexistant le long des côtes occidentales de l'Amérique
du Sud, notamment au large du Chili et aussi du Mexique, il
est au contraire très développé par exemple au sud de Terre-
Neuve (les Fameux Bancs s'étendent sur 300 milles — soit
plus de 500 kilomètres d'ouest en est). Sur les côtes de Norvège,
le plateau continental a 200 km de large, et 300 km au large
des côtes de Bretagne par le travers de Lorient.
L'unité du plateau continental sensu laiD vient de ce que les
extensions respectives de ses parties émergée et immergée sont
essentiellement changeantes à l'échelle géologique des temps, au
rythme des transgressions et régressions, et aussi en fonction
des variations de la flexure continentale (BOURCART). Les vallées
émergées se poursuivent souvent sur le plateau continental
immergé ; par exemple en Manche les vallées sous-marines des
fleuves du bassin de la Seine et de la Tamise, la vallée du Rhin
en mer du Nord, etc., et aussi certaines vallées glaciaires. J'ajou-
terai enfin que le plateau continental dans sa partie profonde
et le talus sont, en beaucoup de régions du monde, entaillés par
des canyons, profondes gorges sous-marines ayant parfois plu-
sieurs centaines de mètres de profondeur, et dont l'origine est
encore discutée, quoique beaucoup de faits paraissent plaider
en faveur de leur origine fluviale (BOURCART, 1958).
Les mers qui couvrent le plateau continental sont dites
parfois mers épicontinentales et leurs contours sont sujets,
au cours des époques géologiques, à des variations plus
grandes et surtout plus fréquentes que celles qui affectent les
océans.
L'ensemble des mers épicontinentales constitue au point
de vue biologique, ce qu'on appelle la Province néritique, par
opposition à la Province océanique qui englobe toutes les autres
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aires maritimes. La Province néritique est caractérisée par la


richesse et la variété de ses peuplements et par la variété de la
nature des fonds. La Province océanique a des peuplements
moins variés et moins riches, et les fonds qu'elle comporte sont
souvent formés de vases ou de boues de très faible consistance.
Bien que la Province néritique ne représente que 7 % de la
surface totale des milieux océaniques, elle est la plus peuplée,
et aussi, il faut le dire, la mieux connue.

TABLEAU I

Données numériques relalives à quelques mers


(en partie d'après K. KÂLLE, 1951)

Surface Profondeur
(en milliers moyenne
de km2) (en mètres)

Mers bordières :
Mer du Nord 575 94
Manche 75 54
Mer d'Irlande 103 60
Golfe du Saint-Laurent 238 127
Mer d'Hudson 1 232 128
Golfe de Californie 162 813
Méditerranées (y inclus les mers de guirlandes
insulaires) :
Méditerranée américaine 4 320 2 216
Méditerranée de l'Ancien Monde 2 967 1429
Mer des Andaman . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 798 870
Mer de Behring 2 268 1437
Mer d'Okhotsk 1528 838
Mer du Japon 1 008 1 350
Mers intérieures :
Mer Baltique 420 55
Mer Noire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 413 1197
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TABLEAU II

(d'après K. KÃLLE, 1951)

Surface et profondeurs
des plateaux continentaux (partie immergée) les plus importants

I (enmUliLdekm*) (en mètre s)

N.-W. de l'Europe (global) . . . . 1 050 Généralement moins


de 100.
Mer de Barentz 830 200-300.
Terre-Neuve 345 150-200.
Guyane 485 Généralement moins
de 50.
Côtes sud du Brésil 370 Généralement moins
de 50.
Au large de Bombay 230 50-100.
Java-Bornéo 1 850 50-100.
Mer de Behring . . . . . . . . . . . . . . 1 120 Pour moitié moins
de 50.

1. 1 2. Subdivision des milieux océaniques


en considération de la température de surface
Divers systèmes ont été proposés, pour la subdivision des
milieux océaniques en fonction de la température de surface,
notamment ceux de A. VAUGHAN (1940) et de T. A. STEPHENSON
(1947). Tous ces systèmes ont un côté conventionnel en raison
du caractère progressif des variations de cette température, et
celui que je propose ci-après n'échappe pas à cette critique.
Mers polaires : température toujours inférieure à 5° C.
Mers subpolaires : température toujours inférieure à 10° C
et le plus souvent (sauf durant de courtes périodes) inférieure
à 80 C.
Mers tempérées : température comprise entre 8° C et 23° C.
On peut y distinguer des mers tempérées-froides (8-180 C) et
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des mers tempérées-chaudes (12-230 C, atteignant parfois 25° C


pour de courtes périodes).
Mers tropicales : température toujours supérieure à 23°,
et le plus souvent à 25° C.

D'une manière générale la température moyenne annuelle


croit des pôles vers l'équateur mais, en raison des courants,
le tracé des isothermes est loin de coïncider avec celui des paral-
lèles. A latitude égale on peut avoir des températures moyennes
annuelles très différentes. L'étude des courants en fournit de
nombreux exemples. Par exemple à latitude égale les rives orien-
tales de l'Atlantique-Nord et du Pacifique-Nord sont plus chaudes
que les rives occidentales des mêmes océans, en raison du Gulf-
Stream pour le premier et du Kuro-Shio pour le second. Le courant
du Labrador vient refroidir la côte Est des États-Unis jusqu'à
des latitudes assez basses, et il en est de même de l'Oyashio,
le long des côtes du Japon.
Il apparaît que, dans l'ensemble, les températures extrêmes
(écart annuel entre l'été et l'hiver) atteintes par les eaux d'une
aire maritime déterminée jouent un rôle plus important que la
moyenne annuelle. Dans les mers tropicales et les mers polaires
la variation annuelle est souvent faible : généralement 4°-5° C
au plus, et souvent moins ; les êtres qui peupleront les eaux
superficielles de ces mers seront donc sténothermes (« chauds »
ou « froids »). Au contraire, dans les mers tempérées l'écart
annuel est souvent élevé. Par exemple : en Manche on relève 9°
en février et 17° en août (écart : 8° C) ; en Méditerranée occi-
dentale 12° (localement 10° C) en février et 25° en août (écart =
13-15° C). Les animaux qui peuplent les eaux superficielles des
mers tempérées sont donc nécessairement eurythermes.
Mais il faut bien insister sur le caractère arbitraire de cette
subdivision des milieux océaniques. Certaines aires maritimes
ne s'y intègrent nullement, notamment celles qui sont le siège
d'un conflit (d'intensité variable avec la saison) entre un courant
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FIG. 3. — Les grands ensembles biogéograpH,


A, Ensemble arctique (y compris les eaux subpolaires) ; M
T, Ensemble tropical ; S, Ensemble tempéré-chaud du Sud ; t , Ensemble
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o es fondés sur les températures de surface


a,,;nsemble boréal ; N, Ensemble tempéré-chaud du Nord
tnntiboréal ; V, Ensemble antarctique (y compris les eaux subpolaires)
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chaud et un courant froid ; par exemple, sur les côtes de la


Nouvelle-Écosse, au large de Halifax, la température de surface
descend au-dessous de 0° en février pour atteindre 160 C en août.
Transposée sur le plan géographique, c'est-à-dire en tenant
compte de la distribution respective des masses continentales
et océaniques, la classification des mers proposée plus haut
permet de reconnaître un certain nombre de grands « ensembles »,
chacun subdivisé en « régions », dont les plus communément
admis sont les suivants :
ENSEMBLE ARCTIQUE.

ENSEMBLE BORÉAL (ou tempéré froid du Nord) avec deux


régions : Boréale-Atlantique et Boréale-Pacifique.
ENSEMBLE TEMPÉRÉ-CHAUD DU NORD avec deux régions : Cen-
trale Atlantique-N., et Centrale Pacifique-N.
ENSEMBLE TROPICAL avec quatre régions : Indo-W.-Pacifique,
E.-Pacifique, Atlantique-Tropicale-Américaine, Atlantique-
Tropicale-Africaine. Les faunes de ces diverses régions de
l'ensemble tropical ne se mélangent pas et ont peu d'affinités.
Cependant il existe, dans une certaine mesure, un fond
commun très ancien (surtout à l'échelle des familles ou à la
rigueur des genres), ce qui est dû au fait que la Telhys, vaste
mer circumtropicale ceinturant le globe, a été un des traits
dominants de la structure de celui-ci pendant la plus grande
partie de son histoire.
ENSEMBLE TEMPÉRÉ-CHAUD DU SUD avec trois régions : S. et
S.-W.-Africaine ; S.-Australienne ; Péruvienne et N.-Chilienne.
ENSEMBLE ANTIBORÉAL (ou tempéré froid du Sud) avec deux
régions : S.-Américaine et Australe-insulaire (cette dernière
pour les îles éparses dans les mers du Sud).
ENSEMBLE ANTARCTIQUE.

A vrai dire, seuls les « ensembles » peuvent être interprétés


comme découlant directement de la classification des milieux
océaniques en fonction de la température indiquée p. 10-11.
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La délimitation des régions implique la prise en considération


des peuplements, ce qui est naturel puisque ce livre est avant
tout axé sur l'Océanographie biologique. Les régions, à leur tour,
peuvent être subdivisées en provinces. Je ne poursuivrai pas plus
avant dans cette voie qui est celle de la biogéographie propre-
ment dite, me réservant d'y revenir ultérieurement. Toutefois
je ferai remarquer que les provinces, et même dans certains cas
les régions, concernent essentiellement les espèces liées au fond,
c'est-à-dire benthiques (cf. p. 19). Pour les espèces pélagiques,
vivant librement au sein des milieux océaniques (p. 19) l'indé-
pendance relative des grandes masses d'eaux du globe et leurs
mouvements respectifs sont les facteurs déterminants de la
distribution.

1. 1. 3. Zonalion des milieux océaniques


en considération de la balhymélrie

Au fur et à mesure que l'on s'enfonce dans les eaux océa-


niques, trois facteurs essentiels subissent une décroissance plus
ou moins rapide (d'ailleurs variable pour les deux premiers en
fonction de la latitude) : la lumière, la température et l'agitation.
En fonction de ces divers facteurs, les auteurs ont proposé
de nombreux systèmes de zonation verticale des eaux qui
varient aussi bien par les noms donnés aux diverses zones que
par l'extension accordée à chacune d'elles (cf. HEDGPETH, 1957,
fig. 1 et texte).
Personnellement, je proposerai le système suivant basé essen-
tiellement sur l'éclairement, et qui, tout en conservant des bases
strictement abiotiques, me paraît présenter l'avantage de ne
pas présenter de divergences radicales avec le système d'éta-
gement que je proposerai plus loin (cf. p. 27) d'après divers
auteurs pour les peuplements pélagiques, et de ne pas faire
intervenir de critères de température, lesquels ne peuvent évidem-
ment être valables qu'aux latitudes moyennes et basses.
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1. 1. 3. 1. Zone eupholique ou éclairée. — Elle est limitée


par une profondeur qui varie de 20 à 120 m environ, avec une
valeur moyenne de 50 m. Cette profondeur (dite profondeur de
compensation pour les végétaux chlorophylliens cf. p. 153) est
telle que toutes les radiations du rouge et une partie des radia-
tions du bleu soient absorbées. Dans cette zone euphotique,
les végétaux chlorophylliens autotrophes disposent de l'énergie
solaire pour faire la synthèse de la matière organique à partir
du C02 en solution dans l'eau et des sels minéraux (nitrates,
nitrites, sels d'ammonium, phosphates). Ces végétaux constituent
une source d'aliments pour les herbivores, eux-mêmes utilisés
par les carnivores, et sont donc en dernière analyse à l'origine
de la vie dans les milieux océaniques. On a cru longtemps que les
végétaux étaient ainsi à la source de toute vie. Cela est, en fait,
inexact car les Bactéries sont également susceptibles de créer
de la matière vivante organisée, non seulement à partir de
matières minérales (Bactéries autotrophes), mais aussi à partir
de matières organiques qui existent sous divers états très dispersés
dans l'eau de mer (Bactéries hétérotrophes). J'y reviendrai plus
loin, me bornant à indiquer ici que l'extension en profondeur
de la zone euphotique dépend à la fois de la trajectoire du
soleil au-dessus de l'horizon et de la transparence propre de
l'eau (fonction de son agitation et de sa teneur en matières en
suspension).
Bien entendu la zone euphotique présente, d'autre part,
des conditions de températures très diverses qui sont propres
aux eaux superficielles (cf. p. 10). Enfin c'est la zone d'agitation
maxima ; les mouvements des houles et des vagues par exemple
paraissent influer au moins jusque vers 50 m de profondeur.
La caractéristique essentielle de cette zone euphotique est
l'ampleur des fluctuations des conditions ambiantes. A l'échelle
quotidienne même, la plupart des facteurs ambiants sont suscep-
tibles de varier : la lumière, la température, la salinité (par le
jeu de l'évaporation et des précipitations), la teneur en oxygène
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dissous (par l'action simultanée des populations végétales et


animales), etc.
1. 1. 3. 2. La zone oligopholique. — J'appelle oligophotique,
ou crépusculaire, une zone dans laquelle le spectre solaire n'est
représenté que par sa fraction la plus pénétrante. Je lui assigne
comme limite inférieure (faute de données plus précises) la
profondeur maxima à laquelle l'œil humain perçoit une sensation
lumineuse lorsque le soleil est au point le plus haut de sa course.
D'après diverses observations, et notamment d'après ce que j'ai
pu voir en bathyscaphe, il semble que cette profondeur, limite
de la zone oligophotique, varie de 300 à 600 m environ avec une
valeur moyenne de 500 m. Par ailleurs la zone oligophotique jouit
d'une température plus uniforme, à l'échelle géographique
comme à l'échelle annuelle (car la variation annuelle diminue
rapidement d'amplitude avec la profondeur). Enfin, c'est une
zone de calme relatif, les courants issus des marées n'y existent
pas, non plus que les mouvements des houles ou des vagues.
En revanche, les courants issus d'autres causes (convection,
densité, etc.) y sont sensibles.
La zone oligophotique a été considérée longtemps comme
dépourvue d'autotrophes et tributaire de la zone épipélagique
au point de vue des matières organiques. Ceci est doublement
inexact. La seule chose qu'on puisse dire c'est que les végétaux
chlorophylliens classiques y font défaut. Mais il y a cependant
deux sources de matières organiques : a) les Bactéries, d'ailleurs
peu nombreuses mais qu'on ne doit cependant pas négliger ;
b) les Coccolithophorides, pour lesquels F. BERNARD a démontré
récemment qu'il existe des formes profondes, lesquelles, grâce
à un pigment rouge (sensibilisateur), pourraient utiliser les
radiations les plus pénétrantes. Ces Coccolithophorides présentent
peut-être même des formes hétérotrophes.
1. 1. 3. 3. La zone apholique. — Au dela de la limite inférieure
proposée au paragraphe précédent pour la zone oligophotique
commence la zone aphotique ou d'obscurité totale. La tempéra-
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ture y est généralement basse, et, en gros, d'autant plus basse


que la profondeur est plus grande, sauf bien entendu dans les
méditerranées. La viscosité de l'eau y est élevée, car elle varie
en raison inverse de la température. Quant aux courants ils sont
très souvent lents, comme l'ont montré de récentes expériences
de datation par des radioéléments qui ont donné couramment
des chiffres de séjour d'une masse d'eau dans une aire donnée
de l'ordre de quelques centaines d'années. Mais en ce qui concerne
ce dernier point, il faut bien se garder de généraliser. Des mesures
directes par la méthode des flotteurs (SWALLOW) ont permis de
mesurer en 1957 et 1958 les courants profonds (et d'ailleurs de
sens inverse) correspondant au Gulf-Stream dans les eaux super-
ficielles. L'observation directe en bathyscaphe m'a permis éga-
lement à diverses reprises d'observer des courants très nets dans
le canyon de Setubal en 1956, à 1 150 m de profondeur, et
à 1 000 et 1 650 m au large du Japon. G. HOUOT et Th. MONOD
avaient fait une observation analogue à 1 450 m au large de
Dakar. La zone aphotique est donc loin d'être toujours une zone
d'eaux immobiles.

1. 2. Les êtres vivant dans les milieux océaniques

1. 2. 1. Définilions

Jusqu'ici j'ai envisagé essentiellement les milieux océaniques


eux-mêmes, sans faire beaucoup allusion aux êtres qui les
peuplent. Le premier aspect de la biologie marine que l'on doit
envisager est celui des rapports qu'ont les organismes avec les
masses d'eaux marines et avec les fonds marins.
On dit d'une espèce qu'elle est benthique quand elle vit en
liaison intime avec le fond, soit qu'elle y soit fixée, soit qu'elle
le fouisse, soit qu'elle rampe ou marche à sa surface, soit même
qu'elle nage à son voisinage immédiat sans jamais s'en écarter
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notablement. Les espèces benthiques constituent ce qu'on appelle


le benthos.
A la notion de benthos s'oppose celle de pélagos. On dit
d'une espèce qu'elle est pélagique quand elle vit en pleine eau,
libre de tout contact avec le fond, et ne dépend ni de celui-ci,
ni des êtres benthiques pour sa nourriture. La vie pélagique
elle-même présente deux modalités. Les êtres planctoniques
(constituant le plancton) vivent librement au sein des eaux et
sont passivement entraînés par elles ; ils sont capables de dépla-
cements mais ces déplacements (sauf peut-être certains dépla-
cements verticaux) ne peuvent jamais l'emporter sur les dépla-
cements des masses d'eaux elles-mêmes. Les êtres nectoniques
(constituant le necton) sont, au contraire, capables, par leur
mobilité propre, de se déplacer malgré les courants ; ils sont
susceptibles de déplacements actifs.
On distingue parfois sous le nom de neuston les êtres qui
reposent ou se déplacent sur la surface de l'eau. Assez nombreux
dans les eaux douces, ils ne comprennent guère dans les milieux
marins que les Hémiptères du g. Halobales.
Tout récemment SAVILOV (1956 a, b) a proposé le nom de
pleiston pour des formes flottantes dans les déplacements
desquelles le vent joue le rôle essentiel ; il y inclut évidemment
les Velella et aussi les Janlhina ce qui est tout à fait admissible,
ainsi que les Halobales (ce qui ramène alors le neuston au rang
de simple subdivision du pleiston) ; mais il y range également les
Lepas qui, quoique fixés à divers corps flottants, sont effective-
ment immergés, les Glaucus, certains JEolis, Idolhea melallica,
et même une espèce de Penseus. Le cas des Planes, petits Bra-
chyoures qui vivent à la surface des épaves ou sur le radeau
de bulles construit par les Janlhina ou encore sur le « plateau »
des Velella, est également compris par SAVILOV dans son pleiston.
La distinction entre benthos et pélagos est beaucoup moins
absolue qu'il ne le paraît au premier abord. En effet une même
espèce peut être, à diverses périodes de son cycle biologique et
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tour à tour, benthique et pélagique. Beaucoup d'Invertébrés


benthiques ont des larves pélagiques d'une part, et d'autre
part il y a des formes benthiques, par exemple certaines Annélides
Polychètes, qui passent par des stades pélagiques au moment
de l'apparition de la sexualité (épitoquie) ; certains Cumacés
sont benthiques le jour et planctoniques la nuit, etc.
Quoi qu'il en soit, si on examine les milieux océaniques sous
l'angle biologique, on peut les subdiviser en deux grands
domaines : le domaine pélagique et le domaine benthique. Le
domaine benthique comprend les fonds eux-mêmes et le domaine
pélagique comprend toutes les eaux qui surmontent le domaine
benthique.
1. 2. 2. Le domaine pélagique
Je ne traiterai que brièvement le domaine pélagique puisque
celui-ci doit faire l'objet d'un volume à part. Il me faut cepen-
dant pour conserver à ce chapitre d'introduction son unité, en
donner les principes d'étagement biologique.
De nombreux systèmes d'étagement ont été proposés pour
les peuplements pélagiques notamment celui de BRUUN (1956)
qui a eu le mérite de l'associer à un système parallèle concernant
les peuplements benthiques. Toutefois, il me paraît que la base
essentielle ne peut être autre que le travail de BIERSTEIN, VINO-
GRADOV et TSCHINDONOWA (1956) qui a l'immense mérite d'être la
conclusion d'une enquête méthodique, locale certes, mais poussée
à la fois du point de vue qualitatif et du point de vue quantitatif
depuis la surface jusqu'à 10382 m dans le ravin des îles Kouriles.
A mon sens on peut distinguer dans le domaine pélagique les
zones suivantes :
a) La zone épipélagique de 0 à 50 m (20-120 m), limitée par
la profondeur moyenne de compensation pour les organismes
autotrophes classiques (Diatomées et Dinoflagellés notamment).
Cette zone épipélagique correspond exactement à ce que j'ai
appelé p. 16 la zone euphotique.
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b) La zone mésopélagique de 50 (20-120) m à 200 (100-300) m


qui est limitée vers le bas aux latitudes moyennes par l'isotherme
de 10° C.
Ces deux premières zones pour lesquelles je reprends les
termes classiques (mais parfois employés avec d'autres accep-
tions) de zones épipélagique et mésopélagique ont été réunies
par BIERSTEIN, VINOGRADOV et TSCHINDONOWA en une « zone
superficielle » unique allant de 0 à 200 m et qui est caractérisée,
dans le cas particulier de l'aire du Pacifique septentrional étudiée,
par un intense refroidissement hivernal. On y observe un abon-
dant développement de phytoplancton et de zooplancton avec
forte prédominance d'un petit nombre d'espèces de Copépodes.
c) La zone infrapélagique, de 200 à 500-600 m, que les auteurs
russes cités considèrent, pour l'aire qu'ils ont étudiée, comme
formant une transition entre des eaux de surface froides et des
eaux océaniques plus chaudes. La biomasse (1) du plancton y
diminue notablement, quoique le nombre des espèces repré-
sentées reste élevé. D'après les observations que j'ai pu faire
en bathyscaphe je pense que cette zone infrapélagique est celle
où se réfugient le jour beaucoup d'espèces dont les populations
la nuit peuvent atteindre les eaux superficielles ; c'est en somme
une zone de « refuge diurne » (PÉRÈS, 1959).
d) La zone bathypélagique de 500-600 m à 2 000-2 500 m
où la biomasse est encore à prédominance de Copépodes, et dont
la limite inférieure correspond à peu près, aux latitudes moyennes,
à l'isotherme de 40 C (BRUUN).
e) La zone abyssopélagique de 2 000-2 500 m à 6 000-7 000 m
où l'élément dominant, au point de vue quantitatif, est repré-
senté par des macroplanctontes.
f) La zone hadopélagique (cf. étage hadal, p. 33 et 50) de
6 000-7 000 m jusqu'aux plus grands fonds, caractérisée par un
peuplement pélagique qualitativement et quantitativement
(1) Poids frais de matière vivante par unité de volume d'eau de mer
(m3 en général).
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extrêmement pauvre et comportant surtout des Copépodes et


des Amphipodes.
Il convient de noter en passant qu'il est un peu plus difficile
d'établir un étagement basé sur les peuplements dans le domaine
pélagique que dans le domaine benthique en raison de l'aptitude
élevée de migration verticale que possèdent bon nombre de
formes pélagiques. Mis à part même les déplacements commandés
par le rythme nycthéméral, qui ne paraissent guère sensibles
que jusque vers 800 ou 1 000 m, BIERSTEIN a souligné récem-
ment (1958) à propos de divers Malacostracés pélagiques que,
en dehors des migrations ontogénétiques dont on connaît un
certain nombre d'exemples (les jeunes se trouvant toujours à des
profondeurs moins importantes que les adultes), il peut y avoir
des migrations verticales trophiques très importantes ; diverses
Mysidacées montent pour se nourrir vers 200-500 m et redes-
cendent ensuite jusque vers 4 000-6 000 m. En revanche, l'indi-
vidualité de la zone hadopélagique est largement confirmée
par l'auteur soviétique qui signale de nombreuses formes péla-
giques endémiques de divers ravins.

Comme je l'ai dit plus haut, ce domaine pélagique peut être


subdivisé topographiquement en deux Provinces : néritique et
océanique.
La Province néritique est censée s'arrêter au plan vertical
correspondant à l'isobathe 200 ; en fait il est plus juste de lui
assigner comme limite le plan vertical passant par l'isobathe
qui limite le plateau continental (c'est-à-dire la rupture de
pente). Cette province néritique est évidemment aussi variable
quant à son extension que le plateau continental lui-même.
Les eaux de la Province néritique sont :
— relativement peu transparentes (car plus riches en matières
en suspension du fait de la proximité des terres émergées et
du fond) ;
— relativement peu pénétrables à la lumière, à cause du carac-
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tère ci-dessus mentionné et des êtres vivants eux-mêmes ;


— assez variables dans leurs propriétés en raison de la faible
profondeur et de l'influence des continents (ruissellements,
fleuves, glaciers) ;
— riches en substances minérales nécessaires aux végétaux (pro-
ximité des continents et des fonds, agitation, vie animale
et végétale benthiques riches). De plus, en raison de la
profondeur relativement faible, il y a une grande facilité
de renouvellement et de circulation de ces aliments
minéraux.

La Province océanique occupe tout le reste des océans et


des mers, c'est-à-dire tout ce qui se trouve au large de la limite
verticale correspondant à l'isobathe du bord du plateau conti-
nental.
Les eaux de la Province océanique sont :
— transparentes, car pauvres en matières en suspension et aussi
en général en organismes (en tout cas plus pauvres que les
eaux néritiques). Ce sont souvent des eaux bleues, et, pour
les milieux océaniques, le bleu est la couleur du désert ;
— très pénétrables à la lumière (du fait des caractères indiqués
ci-dessus) ;
— relativement constantes au point de vue physicochimique
dans l'espace comme dans le temps, et de salinité généralement
assez élevée ;
— assez pauvres en aliments minéraux pour les végétaux ; de
plus ces sels minéraux sont difficilement renouvelables dans
les couches superficielles en raison de la profondeur des eaux
de la Province océanique.

Il résulte de cette dernière observation que le plancton de la


Province océanique est en général beaucoup plus pauvre que
celui de la Province néritique, sauf dans les aires où des mouve-
ments verticaux importants (upwelling) amènent en abondance
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des aliments minéraux dans les eaux superficielles où peut


s'exercer la photosynthèse.
Ces questions seront reprises en détail dans le volume II
relatif à la Vie pélagique.

1. 2. 3. Le domaine benlhique

Le domaine benthique comprend tous les fonds depuis la


ligne de rivage jusqu'aux plus grandes profondeurs. Les êtres
benthiques sont, dans certains cas, susceptibles d'apporter aux
fonds sur lesquels ils vivent des modifications non négligeables
(dépôts organogènes).
En dehors de ces dépôts organogènes, le domaine benthique
est couvert, depuis le zéro jusqu'aux abysses, soit par des roches
(éruptives ou sédimentaires) en place, soit par des sédiments
sur lesquels je reviendrai plus loin, mais qu'on peut classer som-
mairement comme suit :
a) Dépôts terrigènes issus de l'érosion des terres émergées ;
b) Boues organiques ou pélagiques ;
c) Argile rouge des grands fonds.
L'épaisseur de ces sédiments peut atteindre plusieurs cen-
taines de mètres et même, comme l'a démontré la récente expé-
dition suédoise de l'Albalross, plusieurs milliers de mètres.
La nature solide ou meuble du substratum conditionne lar-
gement le peuplement benthique. En ce qui concerne les sédiments
meubles, ils interviennent dans la répartition de la faune ben-
thique par deux facteurs essentiels : a) leur consistance (dimen-
sion des particules et présence éventuelle d'un lien colloïdal) ;
b) leur teneur en matières organiques.
Nous avons vu précédemment que la densité de la vie péla-
gique décroît assez rapidement quand on s'éloigne des côtes.
Les zones peu profondes, où la vie benthique elle-même est
d'ailleurs la plus riche (et pour les mêmes raisons que la vie péla-
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gique), seront donc aussi celles qui verront tomber des eaux
qui les surmontent la plus riche pluie de matières organiques
sous forme de cadavres d'êtres pélagiques. Le benthos de la
Province néritique sera donc riche en espèces et en individus,
tandis que le benthos des régions situées plus profondément
sera plus pauvre en espèces et surtout en individus.
Le problème de l'étagement des formations benthiques
a plus encore que celui des formations pélagiques suscité l'intérêt
des spécialistes. A l'occasion d'un colloque consacré à ce sujet
(PÉRÈS, 1957), j'avais recensé une vingtaine de systèmes différents.
Je n'y reviendrai pas ici. Celui qui, sans doute, a connu la fortune
la plus grande a été celui élaboré par EKMAN (1953) repris notam-
ment par SVERDRUP, JOHNSON et FLEMING (1949) dans un livre
de diffusion mondiale. Les systèmes proposés par ZERNOV (1949)
et par ZENKEVITCH (1956) sont assez directement inspirés et
améliorés de celui d'EKMAN.
EKMAN mettait l'accent sur l'isobathe 200 pour séparer les formations
littorales des formations profondes ; cet isobathe 200 représentait pour
lui à la fois la limite du plateau continental, et la limite de la zone
éclairée par rapport à la zone obscure. En fait, cet isobathe 200 est
parfaitement arbitraire. La rupture de pente qui sépare le plateau conti-
nental de la pente continentale est beaucoup plus souvent (quand elle
existe) vers 120 m que vers 200 m. D'autre part le chiffre de 200 m,
nettement supérieur à la profondeur de compensation (1) des algues
marines de la plupart des mers, ne saurait être retenu non plus d'un
point de vue biologique. EKMAN divisait son « système profond » en
deux zones (archibenthique et abyssobenthique) séparées par l'isobathe
arbitrairement choisi de 1 000 m. En revanche, dans le «système littoral »,
il plaçait vers 50 m la limite séparant une zone eulittorale au-dessus,
et une zone sublittorale au-dessous, parce que cette profondeur est,
en moyenne, celle où cessent les peuplements végétaux benthiques
denses. Mais, à l'exception de la séparation entre les « zones » eulittorale
et sublittorale, le système d'EKMAN restait un système dépourvu de
bases biologiques, essentiellement conventionnel.
En ce qui concerne les niveaux marins supérieurs, situés au voisi-

(1) Cf. p. 153.


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nage immédiat du rivage, de nombreuses tentatives avaient été faites


pour les systématiser, tentatives qui, à l'exception de celles de T. et
T. A. STEPHENSON, avaient un caractère local.

Il nous a paru, à mon collaborateur J. PICARD et à moi-même,


que si les bionomistes spécialistes du domaine benthique vou-
laient arriver à comparer les peuplements qu'ils étudient,
chacun dans les mers b o r d a n t son pays, il était indispensable
q u ' u n accord fût réalisé sur un système d'étagement. C'est cette
tâche qui fut entamée au Colloque de Gênes (cf. J.-M. PÉRÈS,
1957 ; J.-M. PÉRÈS et R. MOLINIER, 1957) et poursuivie au cours
d'une discussion du XVe Congrès de Zoologie de Londres. E n
fonction de nos idées et des vues dont nous ont fait p a r t un
certain nombre de collègues à l'occasion de ces réunions, nous
avons établi un système d'étagement des formations benthiques
que je présente ci-après et qui nous paraît de nature à rallier
l'assentiment des spécialistes, en même temps que susceptible
d'une application mondiale.
Avant d'exposer notre système il convient de faire un certain nombre
de remarques concernant les facteurs invoqués pour la délimitation
des étages. Ils sont au nombre de deux principaux :
a) L'humectation, pour les deux étages supérieurs, le terme d'humec-
tation étant ici entendu au sens large c'est-à-dire qu'il peut s'agir aussi
bien d'une véritable humectation au sens propre du terme par des
embruns, que d'une immersion temporaire plus ou moins prolongée.
b) L'éclairement, pour les autres étages, éclairement qui conditionne
la vie végétale, source première de la matière organique (aux Bactéries
autotrophes chimiosynthétiques près). Les peuplements peuvent être
divisés en photophiles (tolérant ou exigeant un éclairement vif) et
sciaphiles (tolérant ou exigeant un éclairement modéré). Tous les degrés
existent évidemment entre ces deux catégories. Il faut remarquer,
d'ailleurs, que la répartition des peuplements photophiles et sciaphiles
ne doit cependant pas être envisagée comme dépendant absolument
de la bathymétrie ; le facteur déterminant en est l'éclairement. Lorsque
celui-ci est localement diminué pour des raisons topographiques, les
peuplements sciaphiles apparaissent en enclaves à des niveaux qui,
normalement, en raison de leur bathymétrie devraient présenter des
peuplements photophiles (grottes, surplombs, fissures, etc.) (fig. 11).
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En l'absence (provisoirement) d'appareils de mesure pratiques per-


mettant d'arriver à des données numériques, ces deux facteurs ne sont
pas envisagés en tant que tels, mais uniquement en fonction de l'influence
qu'ils ont sur les peuplements.
Il est possible, et même très probable, qu'aux très grandes profon-
deurs un troisième facteur intervient : le facteur pression, mais nous ne
savons pratiquement rien de son action.
La classification est donc basée non sur tel ou tel facteur abiotique
mais sur les peuplements qui sont la résultante des actions antagonistes,
cumulatives, ou interférentes, de tous les facteurs. Les trois facteurs
ci-dessus mentionnés ne sont que les facteurs essentiels ou supposés tels.
Quelques définitions préalables s'imposent.
En ce qui concerne le problème de l'étagement vertical des formations
benthiques, la notion fondamentale est évidemment celle d'étage. Les
participants du Colloque de Gênes se sont mis d'accord sur la définition
suivante de ce terme : « L'étage est l'espace vertical du domaine ben-
thique marin où les conditions écologiques, fonction de la situation
par rapport au niveau de la mer, sont sensiblement constantes ou varient
régulièrement entre les deux niveaux critiques marquant les limites
de l'étage. » Ces étages ont chacun des peuplements caractéristiques et
leurs limites sont révélées par un changement de ces peuplements au
voisinage des niveaux critiques marquant les conditions-limites des
étages intéressés.
Les étages peuvent être subdivisés en horizons, subdivisions verti-
cales élémentaires qui peuvent localement apparaître au sein d'un étage.
Des horizons présentant un certain nombre de caractéristiques communes
peuvent être groupés de façon à constituer un sous-étage.
Enfin un système est constitué par un ensemble d'étages présentant
des caractères écologiques communs.

Le Colloque de Gênes avait arrêté à neuf le nombre des


étages. Depuis, des recherches nouvelles ont conduit (PÉRÈS et
PICARD, 1959) à ramener ce nombre à sept, qui seront étudiés,
ci-après, dans l'ordre des profondeurs croissantes.
A) Supralilloral : L'étage supralittoral est celui où se loca-
lisent les organismes qui supportent ou exigent une émersion
continue. C'est, en somme, un étage d'humectation par l'eau de
mer, qui ne subit de véritable immersion qu'exceptionnellement,
par exemple, pour les mers à fortes marées, au m o m e n t des
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P.M.G.V.E. (1) correspondant aux équinoxes. A ces immersions


très temporaires mais régulières, se substituent, pour des mers
à marées faibles comme la Méditerranée, des immersions très
irrégulières, dues à l'intervention des houles soulevées par les
coups de vents (et donc plus fréquentes à la mauvaise saison).
B) Médiolilloral : L'étage médiolittoral est caractérisé par
des peuplements qui supportent ou exigent des émersions quelque
peu prolongées en tant que phénomène normal, sans supporter
d'immersion continue ou presque continue. L'étage médiolittoral
peut être considéré comme renfermant une partie des peuple-
ments intertidaux (2) et plus précisément de ceux des peuple-
ments de l'espace intertidal qui en sont en quelque sorte spé-
ci fiques, parce que leur niveau est tel qu'ils sont les plus réguliè-
rement soumis aux alternances d'émersion et d'immersion.
Ordinairement les auteurs, même les auteurs modernes comme
STEPHENSON, considèrent que la zone intertidale (comprise entre les
P.M.G.V.E. et les B.M.G.V.E.) constitue une entité, entité dans laquelle
STEPHENSON reconnaît trois niveaux supralittoral fringe, midlittoral
zone, infralittoral fringe.
Cette conception de la zone intertidale est fondée, en fait, sur des
considérations strictement marégraphiques. Or, ce qui importe au
point de vue biologique ce n'est pas que la mer arrive quelques jours
par an à immerger ou à humecter un niveau élevé donné ; et c'est pour-
quoi il me paraît préférable de faire de la frange supralittorale de
STEPHENSON un étage supralittoral indépendant. De même il est sans
grande importance pour les peuplements que, lors des B.M.G.V.E., les
niveaux les plus inférieurs de la « zone intertidale » soient brièvement
émergés ; l'identité presque parfaite des peuplements de l'infralittoral
fringe de STEPHENSON et des aires qui ne découvrent jamais prouve que
cette frange infralittorale est partie intégrante de l'étage situé immé-
diatement en dessous c'est-à-dire de l'étage infralittoral.

(1) D a n s t o u t le cours de cet o u v r a g e j'utiliserai, p o u r les marées, les m ê m e s


a b r é v i a t i o n s . P.M. : pleine m e r ; B.M. basse m e r ; G.V.E., M.V.E., P . V . E . :
g r a n d e , m o y e n n e , p e t i t e v i v e - e a u ; P . M . E . , M.M.E., G.M.E. : p e t i t e , m o y e n n e ,
g r a n d e m o r t e - e a u ; N.M. : n i v e a u m o y e n .
(2) J ' é l i m i n e v o l o n t a i r e m e n t le t e r m e d ' i n t e r c o t i d a l , utilisé c o m m u n é m e n t
p a r les a u t e u r s français e t q u i est d é p o u r v u de sens, p o u r lui s u b s t i t u e r le
t e r m e d ' i n t e r t i d a l , pure e t simple f r a n c i s a t i o n d u m o t anglais.
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Il est logique de ne considérer comme vraiment intertidal que


l'espace vertical soumis sinon en permanence, du moins pendant la
plupart du temps, à l'alternance des émersions et des immersions. Dans
les mers à marées (sur les côtes françaises de la Manche par exemple)
cet espace proprement intertidal formant l'étage médiolittoral s'étend
depuis les P.M.P.M.E. (ou au maximum les P.M.P.V.E.) jusqu'aux
B.M.P.M.E. (incluses). Dans les mers à très faibles marées (la presque
totalité de la Méditerranée par exemple) l'étage médiolittoral est limité
vers le haut par le niveau le plus élevé des immersions (du fait des vagues
ou des variations de niveau de la mer calme) et vers le bas par le niveau
inférieur des émersions normales. La restriction qu'implique le quali-
ficatif de « normales », appliqué aux émersions dans cette définition, a
une certaine importance.En effet, dans certaines circonstances peu fré-
quentes, notamment une pression atmosphérique anormalement élevée
conjuguée éventuellement avec des vents soufflant de terre, les émersions
peuvent intéresser, dans ces mers sans marées appréciables, la partie
supérieure de l'étage infralittoral. Mais il s'agit là d'un phénomène
aussi exceptionnel que l'émersion des plus bas niveaux de la « zone inter-
tidale » de Manche au moment des grandes basses mers des équinoxes.
C) Infralittoral : Sa limite supérieure est, comme nous venons
de le voir à propos de l'étage médiolittoral, le niveau à p a r t i r
duquel les peuplements sont, soit toujours immergés (dans le
cas des mers intérieures où les variations de niveau sont prati-
quement nulles), soit très r a r e m e n t émergés (toute immersion
trop prolongée e n t r a î n a n t la m o r t des espèces c o n s t i t u a n t le
peuplement). Sa limite inférieure est celle qui est compatible
avec la vie des Zostéracées ou des Algues photophiles. Le pro-
blème du classement des Algues en photophiles et sciaphiles
est résolu par l'étude des passages latéraux, par r a p p o r t aux
Phanérogames prises comme base de référence. Cette limite
inférieure se situe vers 15-20 m pour les hautes latitudes, vers
30-40 m pour la Méditerranée, et p a r a î t descendre jusque vers 80 m
pour certains herbiers de Thalassia de quelques aires tropicales.
Il importe de préciser que, lors du Colloque de Gênes, il a
été admis que toute latitude est laissée aux auteurs pour a d m e t t r e
l'existence, localement, au sein de l'étage infralittoral, de deux
sous-étages.
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D) Circalilloral : L'étage circalittoral s'étend depuis la


limite extrême de la vie des Phanérogames marines (ou des
Algues photophiles) jusqu'à la profondeur extrême compatible
avec la végétation des algues les plus tolérantes aux faibles
éclairements c'est-à-dire les plus sciaphiles. Il faut d'ailleurs
bien préciser que la présence d'Algues est très loin d'être obli-
gatoire dans les divers biotopes circalittoraux ; la nature du
substrat (et notamment les conditions locales de sédimentation)
et la composition de la flore algale locale jouent un rôle prépon-
dérant dans l'importance respective, pour une aire donnée, des
biotopes circalittoraux avec ou sans végétation.

Il convient de signaler, à propos de cet étage circalittoral, que le


Colloque de Gênes avait adopté, sur la base de données fournies par
A. ERCEGOVIC (1957), un étage supplémentaire, dit bathylittoral, et
correspondant, immédiatement en dessous de l'étage circalittoral (consi-
déré alors comme caractérisé par la présence d'algues multicellulaires),
à des peuplements comportant uniquement des algues unicellulaires.
Nous avions retenu (PÉRÈS et PICARD, 1958) comme appartenant à cet
étage, pour la Méditerranée et le proche-Océan : le peuplement à Dendro-
phyllia cornigera (« Coraux jaunes ») pour les substrats durs, et le peuple-
ment à Cidaris cidaris et grands Brachiopodes ( Terebratula vitrea et
Terebratulina caput-serpentis) pour les graviers et sables plus ou moins
vaseux. Sur les vases nous avions dû renoncer à caractériser un peuple-
ment de l'étage bathylittoral. En fait une étude plus poussée des peu-
plements en question nous a permis de considérer le peuplement à
Dendrophyllia comme un simple faciès profond et appauvri de la bio-
cœnose coralligène (cf. p. 496) appartenant à l'étage circalittoral, tandis
que le peuplement à Cidaris et grands Brachiopodes doit être interprété
comme un faciès vaso-sableux de la biocœnose des vases bathyales
(cf. p . 93) (PÉRÈS et PICARD, 1959).
En définitive il paraît impossible de reconnaître comme propre à
l'étage bathylittoral une quelconque biocœnose, non plus qu'aucune
espèce caractéristique. Il subsiste toutefois une légère incertitude car
cet étage avait été créé pour tenir compte, au delà des dernières algues
multicellulaires, de peuplements d'algues unicellulaires benthiques.
Malheureusement celles-ci n'ont pas été étudiées. Rien ne prouve,
d'ailleurs, dans le cas de l'unique signalisation connue de ces peuple-
ments d'algues unicellulaires, qu'il ne s'agit pas simplement de Diato-
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mées vivant normalement dans l'étage circalittoral, et qui, à la belle


saison, s'étendent temporairement plus profondément en raison de
l'éclairement plus important. L'espace vertical précédemment considéré
comme représentant un étage bathylittoral se présente donc comme une
simple zone de transition entre les étages circalittoral et bathyal.

L'ensemble des quatre étages précédemment définis, et dont


le nom renferme le suffixe -littoral (supra-, médio-, infra-, circa-
littoral) constitue le système littoral, ou encore, puisqu'il est
caractérisé par la présence de végétaux benthiques chlorophyl-
liens, le système phytal. J ' a t t i r e r a i t o u t particulièrement
l'attention sur le fait que la délimitation des étages ne fait inter-
venir aucune notion b a t h y m é t r i q u e mais invoque u n i q u e m e n t
des types fondamentaux de peuplement qui (avec des genres
et des espèces différents bien entendu) se r e t r o u v e n t dans toutes
les mers du monde.
L'amplitude verticale du gradient des deux facteurs essen-
tiels : humectation pour les deux étages supérieurs (supra-
et médiolittoral), éclairement pour les deux étages inférieurs
(infra- et circalittoral) pourra varier très largement, et motiver
des différences considérables dans l'extension verticale des peu-
plements, sans que soit altérée la définition d ' u n étage puisque
celle-ci est basée sur la présence même de ces peuplements. P a r
exemple, sur substrat dur, l'étage supralittoral pourra avoir
50 cm d'amplitude verticale en mode calme et 3 ou 4 m en mode
agité sans que le peuplement en soit changé. P a r exemple encore,
les peuplements algaux sciaphiles sur s u b s t r a t subhorizontal
de l'étage circalittoral pourront commencer à 30 m de profondeur
dans les eaux de turbidité moyenne et à 60 m dans des eaux à
forte transparence, etc.
L'indication en mètres d ' u n niveau altitudinal (au-dessus
ou au-dessous de zéro) n'aura qu'une signification locale ou au
plus régionale, et la notion de niveau b a t h y m é t r i q u e ne sera
jamais invoquée pour caractériser un étage. Cette conception
non bathymétrique mais biologique de l'étagement est le meilleur
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argument en faveur d'une valeur mondiale du système proposé.


E) Balhyal : L'étage bathyal correspond aux peuplements
qui occupent le talus continental et la portion des fonds à pente
adoucie qui se trouve immédiatement au pied de ce talus.
Primitivement (PÉRÈS, 1958 ; PÉRÈS et PICARD, 1958) une
distinction avait été faite entre les formations du talus lui-même
(étage épibathyal) et celles du pied du talus (étage mésobathyal).
J'indiquerai plus loin (p. 93), au chapitre consacré au benthos
profond, pourquoi j'ai réuni ces deux étages en un seul. La limite
inférieure de l'étage bathyal paraît correspondre à la fois à la
limite inférieure d'extension de la plupart des espèces circalit-
torales eurybathiques et à un renouvellement assez radical des
peuplements (VINOGRADOVA, 1958 ; PÉRÈS et PICARD, 1959),
et paraît se situer un peu au delà de 3 000 m. Il me paraît
souhaitable, ici encore, de chercher des critères biologiques de
séparation des étages bathyal et abyssal, plutôt que de leur
assigner comme le fait BRUUN (1956) une séparation corres-
pondant à l'isotherme de 4° C, dont la profondeur dépend
malgré tout assez largement de la latitude.
F) Abyssal : L'étage abyssal correspond aux peuplements
de la grande « plaine » à pente très faible qui s'étend depuis la
pente adoucie du pied du talus jusque vers 6 000-7 000 m,
profondeur à laquelle commencent les grands ravins (ou les
grandes fosses) de l'étage suivant. Il paraît être essentiellement
caractérisé comme il a été dit plus haut par un renouvellement
assez radical de la faune, portant notamment sur les Holothuries
Élasipodes (cf. p. 97), l'appauvrissement général du peuplement,
et par la disparition quasi totale des espèces eurybathiques en
provenance du plateau continental.
VINOGRADOVA dans une remarquable mise au point (1958) a noté
également des changements app réciables des peuplements vers 4 500 m
de profondeur. Dans l'état actuel de nos connaissances on ne peut préciser
s'il s'agit d'une possible subdivision de l'étage abyssal en deux sous-
étages : un supérieur de 3 000 à 4 500 m, un inférieur de 4 500 à 6 000-
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7 000 m ou si la zone comprise entre 3 000 à 4 500 m représente une très


large zone de transition entre les deux étages. Cette dernière interpré-
tation n'est pas à rejeter a priori, car les gradients verticaux de divers
facteurs sont d'autant plus étalés que la profondeur est plus grande,
et c'est une loi assez générale que l'amplitude verticale de la transition
entre deux étages soit fonction de la profondeur.

G) Hadal : L'étage hadal (BRUUN, 1956), dit aussi ultra-


abyssal par les auteurs russes, englobe les fonds des ravins et
des fosses dépassant 6 000-7 000 m. Il est caractérisé p a r u n
appauvrissement q u a n t i t a t i f et qualitatif du peuplement (absence
d ' u n certain nombre de grandes unités systématiques) et par
la présence de Bactéries, dites barophiles, adaptées à vivre sous
des pressions dépassant 600-700 atmosphères (cf. p. 115).
Les trois derniers étages : bathyal, abyssal, hadal, constituent
le système profond ou système aphytal caractérisé p a r l'absence
de lumière donc de végétation chlorophyllienne et aussi par des
pressions élevées (et d ' a u t a n t plus élevées que la profondeur est
plus grande).

1. 3. Rappel de quelques notions d'écologie m a r i n e benthique

Pour faciliter la compréhension des pages qui v o n t suivre


il me paraît nécessaire de rappeler quelques notions fondamen-
tales utilisées dans les recherches d'écologie marine du domaine
benthique, et de bionomie (étude de la distribution des peuple-
ments benthiques). J ' e m p r u n t e l'essentiel de ce qui suit à la partie
générale du Manuel de bionomie benthique de la mer Médilerranée
(PÉRÈS et PICARD, 1958).
Tout d'abord il importe de rappeler la signification du
concept de biocœnose tel que l'a défini son créateur, MÔBIUS,
précisément à propos d ' u n groupement d'espèces marines ben-
thiques. La biocœnose est un « groupement d'êtres v i v a n t s
correspondant par sa composition, p a r le nombre des espèces
et des individus, à certaines conditions moyennes du milieu,
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groupement d'êtres qui sont liés par une dépendance réciproque


et se maintenant en se reproduisant dans un certain endroit de
façon permanente ». La notion de biocœnose est inséparable de
celle de biotope. Celui-ci est défini comme une aire géographique
de surface ou de volume variable, soumise à des conditions dont
les dominantes sont homogènes. Le terme de communauté,
employé notamment par PETERSEN lors des recherches sur le
benthos de la mer Danoise, est, à notre sens, à peu près synonyme
de biocœnose, bien que son auteur base cette notion essentiel-
lement sur des considérations quantitatives, en l'espèce sur
les animaux numériquement et pondéralement dominants (cf.
chapitre 5 pour la discussion des notions de biocœnose et de
communauté). Il est cependant un peu moins précis en ce sens
qu'il ne sous-entend pas le lien d'interdépendance entre les
espèces, lien que postule pour la biocœnose la définition de
MOBIUS. Il semble que la nuance soit d'ailleurs de peu
d'importance, car, même lorsque la nature des liens d'inter-
dépendance entre les espèces ne nous est pas connue, il n'en reste
pas moins que ces liens existent, et il est évident qu'ils existent
pratiquement toujours. D'autre part, le terme de biocœnose
implique la prise en considération simultanée de la flore et de
la faune, cette dernière subsistant seule à partir d'une certaine
profondeur.
Nous pensons que le terme d'association doit être rejeté.
En effet, si ce terme est employé dans un sens très précis par les
phytosociologues des milieux terrestres, il a été, en revanche,
employé par des botanistes et des zoologistes ,dans des acceptions
trop variées pour qu'on puisse songer à en limiter l'emploi futur
par une définition précise.
Par enclave, nous entendons l'existence, locale et pour des
raisons microclimatiques, d'une biocœnose à l'intérieur d'une
surface occupée par une autre biocœnose. Il peut y avoir des
enclaves d'un étage dans un autre étage, mais, dans ce cas,
et en règle générale, les enclaves que l'on observe dans un étage
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déterminé sont constituées par des peuplements de l'étage qui


vient immédiatement en-dessous de lui.
Une biocœnose présente un faciès particulier lorsque la
prédominance locale de certains facteurs écologiques entraîne
l'exubérance d'une ou d'un petit nombre d'espèces (que cette
ou ces espèces soient ou non caractéristiques de la biocœnose),
sans que pour cela la composition qualitative de la biocœnose
en soit affectée.
Dans les horizons superficiels, une ceinture n'est pas autre
chose qu'un faciès provoqué par l'humectation : comme cette
dernière décroît progressivement à mesure que l'on monte en
altitude, la ceinture se présentera sous forme d'une bande plus
ou moins parallèle à la ligne de rivage, à une altitude corres-
pondant à une humectation déterminée ; lorsqu'une ceinture
est très dense, elle peut raréfier notablement les espèces carac-
téristiques de la biocœnose qu'elle masque. Étant donné que
les termes faciès et ceinture n'ont de signification qu'en fonction
d'une ou d'un petit nombre d'espèces déterminées, on dira
donc faciès de telle espèce (alors qu'on dit biocœnose à telle
espèce).
En fonction de la périodicité des saisons, les biocœnoses
marines peuvent présenter des aspects saisonniers. Dans le
domaine marin, les aspects saisonniers essentiels ne sont pas
concommitents de ceux du domaine terrestre : en effet, l'eau
de mer joue un rôle de « volant thermique » et son refroidissement
comme son réchauffement se trouvent retardés par rapport
à l'air ; les deux aspects saisonniers les plus répandus corres-
pondent ainsi à l'hiver-printemps et à l'été-automne. Les mois
d'agitation maxima des eaux superficielles peuvent aussi déter-
miner des aspects saisonniers en fonction de l'intensité de
l'humectation, mais ces aspects saisonniers correspondent
précisément, sauf exceptions locales, à la période hiver-printemps
(dans les mers baignant l'Europe tout au moins).
Par strate, il faut entendre toute division nettement tranchée
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dans l'épaisseur même d'un peuplement ; on peut distinguer,


en bien des cas, une sous-strate et une strate élevée, et parfois
même une ou des strates intermédiaires. La sous-strate et la
strate élevée n'appartiennent à la même biocœnose que dans la
mesure où la seconde ne modifie pas sensiblement les conditions
écologiques en dessous d'elle. Ainsi, dans la biocœnose coralligène
(cf. p. 496), une strate élevée à Gorgones minces et peu denses
ne joue aucun rôle modificateur dans le développement de la
sous-strate encroûtante ; par contre, dans les prairies denses
de la biocœnose à Posidonies (cf. p. 496), la frondaison de ces
dernières joue le rôle d'un écran diminuant la luminosité en
dessous, ce qui provoque l'installation, en sous-strate sur les
rhizomes, de la biocœnose précoralligène (biocœnose sciaphile
qui appartient même à un étage différent de celui de la biocœnose
photophile à Posidonies, et qui s'installe alors en enclave sous
cette dernière).
Les stades initiaux d'une biocœnose correspondent à l'instal-
lation successive et progressive de diverses espèces jouant le rôle
de pionniers de la biocœnose, c'est-à-dire, généralement, des
espèces les plus tolérantes.
Les stades de dégradation d'une biocœnose correspondent à
la survivance momentanée, dans des conditions devenues défa-
vorables, de certaines espèces particulièrement résistantes de la
biocœnose, ces espèces étant alors souvent en concurrence
avec celles d'une autre biocœnose qui tend à supplanter la
précédente.

Lorsqu'on analyse un ensemble de biocœnoses pour s'efforcer


de délimiter chacune d'elles, la comparaison des listes floris-
tiques et faunistiques doit permettre de classer les espèces en
trois catégories fondamentales.
— Caractéristiques, c'est-à-dire préférentielles d'un biotope
considéré, qu'elles soient abondamment représentées en individus
ou bien par exemplaires isolés, qu'elles soient constantes ou
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sporadiques (les espèces strictement inféodées à une biocœnose


n'existent pratiquement pas).
— Accompagnatrices, c'est-à-dire dont la présence est aussi nor-
male dans le biotope considéré que dans certains autres. Ce sont :
a) des espèces localisées à l'étage de la biocœnose envisagée
(caractéristiques d'étage) ;
b) des espèces indicatrices d'un facteur édaphique (cf. plus loin)
déterminé (ce qui peut se cumuler avec a) ;
c) des espèces indifférentes, à très large répartition écologique
à travers les étages et les biocœnoses, c'est-à-dire ubiquistes.
— Accidentelles, c'est-à-dire caractéristiques d'une autre
biocœnose et présentes, soit en petit nombre et sporadiquement
dans un biotope considéré, soit en état de vitalité réduite (chétives
ou stériles car développées en dehors de leur biotope normal).
Quant aux symbiotes, parasites, commensaux, épiphytes
et épizoaires spécialisés, ils doivent évidemment être classés
dans la catégorie de l'espèce qui les supporte normalement,
dans la mesure où ils accompagnent cette espèce dans tous les
biotopes où elle-même se rencontre.
Il convient de prèndre essentiellement en considération les
espèces sessiles, ou tout au moins douées d'une très faible mobi-
lité, car les espèces suffisamment mobiles sont souvent capables
de quitter une biocœnose déterminée pour se rendre dans une
autre soit au cours des stades successifs de leur développement,
soit pour se reproduire, soit pour bénéficier d'une nourriture
plus abondante.
Par substrat, nous entendons, évidemment, le support de
tout peuplement benthique. Ce substrat peut être solide (roches,
carènes de navires, épaves, troncs d'arbres, organismes
divers, etc.) ou meuble (galets, graviers, sables, vases, fonds
détritiques divers, etc.). En ce qui concerne les substrats meubles
des zones superficielles, il convient de noter que les peuplements
que l'on rencontre dans les grèves de galets de taille moyenne en
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mode faiblement battu ne se rencontrent que dans les grèves


de gros galets en mode battu ; ce n'est pas le diamètre du matériel
sédimentaire qui compte ici, mais bien les possibilités de brassage
de ce matériel par les vagues.
Par épiflore et épifaune (c'est-à-dire, globalement, par épi-
biose), on désigne la totalité des espèces sessiles et vagiles qui se
trouvent à la surface du substrat ; par endoflore et endofaune
(c'est-à-dire, globalement, par endobiose), nous entendons la
totalité des espèces sessiles et vagiles qui se trouvent dans
l'épaisseur ou dans des cavités, fissures ou interstices du substrat.
Dans le cas de substrats constitués par des roches, on distingue
encore les formes épilithes, vivant à la surface de la roche ou
dans ses cavités naturelles, et les formes endolithes, vivant dans
des cavités ou galeries qu'elles se creusent elles-mêmes. Dans le
cas des substrats sableux, les espèces épipsammiques sont celles
qui se déplacent à la surface du sédiment, les espèces endopsam-
miques sont celles qui vivent dans l'épaisseur du sédiment en
déplaçant les grains de sable lorsqu'elles se meuvent (elles
appartiennent à la macrofaune), et enfin les espèces mésopsam-
miques sont celles qui se déplacent dans les interstices des grains
de sable (elles appartiennent à la microfaune).
Le terme de mode est employé pour qualifier l'intensité des
actions hydrodynamiques superficielles d'une station considérée ;
tous les intermédiaires existent, évidemment, entre les modes
très abrité et très battu.

Quant aux facteurs conditionnant les peuplements marins,


il nous a paru utile de chercher à les classer simplement en
fonction de leurs conséquences présumées, en attendant que
soient entreprises, quand l'appareillage futur le permettra, des
mesures précises mettant en évidence leurs incidences réciproques.
A) FACTEURS ABIOTIQUES : Ce sont les facteurs, inhérents
aux conditions externes des peuplements, qui fixent les limites
d'extension des étages, des biocœnoses et des faciès.
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a) Fadeurs climatiques : On appelle facteurs climatiques des


facteurs généraux qui régissent la localisation d'un étage déter-
miné dans une région naturelle déterminée. Ce sont essentielle-
ment :
— la pénétration quantitative et qualitative des radiations
solaires et les facteurs qui lui sont associés (éclairement,
température, situation en latitude) ;
— l'humectation, résultant de la combinaison de l'apport d'eau
de mer et de l'évaporation (seulement pour les étages super-
ficiels) ;
— la pression et d'autres facteurs à définir (pour les étages du
système profond seulement).
Si les facteurs climatiques existaient seuls, il n'y aurait qu'une
seule biocœnose climatique par étage d'une région naturelle,
ou bien une succession des biocœnoses climatiques déterminée
par des facteurs biotiques (série évolutive climatique) aboutis-
sant toujours à une biocœnose climatique ultime et stable (encore
appelée climax) : en réalité, la multiplicité et l'instabilité des
biocœnoses sous-entendent l'intervention d'autres facteurs, les
facteurs édaphiques envisagés ci-après. Il est, d'autre part,
évident que l'ensemble de ces facteurs climatiques doit être
reconsidéré pour chaque Province ou Sous-Province biogéo-
graphique : du fait d'impératifs paléogéographiques, hydro-
logiques, etc., les peuplements sont plus ou moins différents d'une
Province ou Sous-Province à l'autre, tout en présentant généra-
lement des homologies ou des équivalences plus ou moins nettes.
Ces homologies seront traduites au chapitre 6 où sera esquissé
un panorama des unités de peuplement du domaine ben-
thique à l'échelle mondiale, panorama qui viendra s'inscrire
dans le système d'étagement proposé dans les pages qui
précèdent.
b) Facteurs édaphiques : On appelle facteurs édaphiques des
facteurs locaux qui viennent perturber ou supplanter les facteurs
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climatiques en agissant au niveau du substrat (eSoccpoç = sol).


Par exemple :
— courants de fond trop violents ; trop forte agitation des
eaux superficielles ; stagnation exagérée des eaux ;
— pollution des eaux (entraînant le développement de faciès
et de biocœnoses nitrophiles) ; turbidité des eaux ;
— apports d'eaux douces importants ; évaporation relevant
exagérément la salinité ;
— nature physique (solide ou meuble, avec, dans ce dernier
cas, calibrage granulométrique) ou chimique du substrat ;
déséquilibre momentané d'un rythme sédimentaire ;
— contact de masses d'eaux anormalement refroidies ou
échauffées (rôle des vents dominants, etc.) ;
- - action modificatrice ou destructrice des entreprises hu-
maines, etc.
La multiplicité des biocœnoses résulte, en fait, de l'action
combinée des facteurs climatiques et édaphiques : si certaines
biocœnoses sont purement climatiques ou édaphiques, beaucoup
résultent de la combinaison des deux types de facteurs et sont
alors localisées à un étage au même titre que les biocœnoses
purement climatiques. Dans une biocœnose à prépondérance
des facteurs climatiques, l'intervention des facteurs édaphiques
provoque : si elle est modérée, des faciès particuliers ; si elle
est forte, une dégradation ; et si elle est très forte un remplacement
par une biocœnose à prépondérance des facteurs édaphiques.
De même, dans une biocœnose à prépondérance des facteurs
édaphiques et conditionnée par un seul ou un petit nombre
de ces facteurs, si ce ou ces facteurs déterminants sont perturbés
ou supplantés par d'autres facteurs édaphiques, cette biocœnose
édaphique peut présenter des faciès, être dégradée, ou même
remplacée par une autre biocœnose édaphique. Ce sont aussi
les facteurs édaphiques qui déterminent les stagnations ou les
reculs dans l'enchaînement des biocœnoses d'une série évolutive
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climatique, et ce sont eux également qui peuvent stopper l'épa-


nouissement d'une biocœnose quelconque en ne permettant que
l'installation de quelques pionniers. Enfin, certains facteurs
édaphiques agissant sur un facteur climatique déterminé (tels
que turbidité de l'eau agissant sur l'éclairement, ou l'intensité
hydrodynamique — mode — agissant sur l'humectation) sont
susceptibles de faire varier les limites bathymétriques ou alti-
tudinales de certaines biocœnoses et même de certains étages.
B) FACTEURS BIOTIQUES : Ce sont les facteurs, inhérents aux
peuplements eux-mêmes, qui, soit modifient les facteurs abio-
tiques, soit conditionnent l'équilibre de la biocœnose. Par
exemple :
a) Modification de la nature du substrat par une biocœnose,
ce qui entraîne obligatoirement, au bout d'un laps de temps
déterminé, le remplacement de la biocœnose d'origine par une
autre. C'est par exemple ce qui se produit lorsque l'activité
concrétionnante envahissante d'un organisme (Algue calcaire,
Anthozoaire, Bryozoaire, etc.) conduit à la consolidation d'un
fond meuble, par exemple d'un gravier coquillier, qui se trouve
ainsi transformé en un substrat solide d'origine biologique, tel
le « Coralligène de plateau » de la Méditerranée (cf. p. 498).
Il y a obligatoirement alors remplacement d'une biocœnose de
substrat meuble par une autre de substrat solide. L'évolution
inverse est possible également par action des organismes litho-
phages qui peuvent s'attaquer non seulement aux roches mais
aussi aux édifices calcaires d'origine biologique.
b) Dates et vitesses d'installation des diverses espèces d'une
biocœnose, entraînant des interactions lors de l'accaparement
du substrat, ont un rôle déterminant dans l'installation succes-
sive des diverses espèces pionnières d'une biocœnose ;
c) Modification de l'équilibre entre prédateurs et proies
(par exemple, dans certaines biocœnoses de substrat meuble,
équilibre entre Echinodermes et Pélécypodes), qui interviennent
à l'intérieur d'une biocœnose pour y créer des pseudofaciès,
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obligatoirement momentanés, et qui sont trop souvent consi-


dérés à tort comme des biocœnoses ou communautés indivi-
dualisées par certains auteurs qui ne pratiquent que l'étude
quantitative. En fait, l'étude quantitative, si elle joue un
rôle non négligeable dans l'étude de la productivité des mers,
doit, dans les recherches bionomiques et biocœnotiques, être
subordonnée à la délimitation qualitative préalable des peu-
plements.
d) Déplacements nutriciels ou liés à la reproduction chez
certaines espèces suffisamment mobiles pour se concentrer
localement (parfois hors de leur biotope normal) et temporaire-
ment en foules, ce qui exclut également la possibilité d'une déli-
mitation quantitative des biocœnoses.
Il reste enfin à préciser que la délimitation entre les
divers étages et les diverses biocœnoses ne s'effectue que très
rarement suivant une ligne précise : du fait de l'atténuation
progressive des divers facteurs vers les limites des biotopes, il
y a presque toujours une marge de contact entre les divers
peuplements, marge plus ou moins large et dans laquelle se
trouve un mélange de peuplements, et j'ai dit précédemment que
l'ampleur de la transition est fonction de l'intensité des gradients
des facteurs (essentiellement des facteurs abiotiques d'ailleurs).

1. 4. Benthos phytal et aphytal. Traits généraux


Il y a, entre le benthos du système phytal ou littoral et
celui du système aphytal ou profond des différences relativement
importantes, qui m'ont conduit à développer à part ce qui concerne
le second, qui fait l'objet du chapitre 2 du présent ouvrage.
En revanche, les chapitres 3 et 4 relatifs à l'écologie des végétaux
et des animaux benthiques concernent plus particulièrement le
benthos phytal, trop riche et trop varié pour faire l'objet d'un
chapitre unique, et sur lequel il est plus aisé d'étudier-la plupart
des problèmes d'ordre général.
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1. 4. 1. Caraclères généraux du benthos littoral

Le caractère essentiel du benthos phytal ou littoral est sa


richesse et d'abord ce qu'on pourrait appeler sa richesse quali-
tative, c'est-à-dire sa richesse en espèces. Toutes les espèces
végétales autotrophes y sont bien entendu localisées, mais,
même pour les espèces animales, on peut dire que au moins
99 % des espèces marines benthiques connues sont des espèces
appartenant au benthos littoral considéré dans son ensemble
(c'est-à-dire sur l'ensemble du Globe).
Cette dominance, en nombre d'espèces, du benthos littoral
sur le benthos profond repose sur des motifs de trois ordres :
A) C'est dans le système phytal que, à l'échelle du Globe,
sont réalisées les conditions de température les plus variées.
Toutes les exigences thermiques peuvent s'y trouver satisfaites.
Une espèce sténotherme chaude se localisera dans les régions
tropicales, une espèce sténotherme froide dans les régions polaires,
et, entre ces deux termes extrêmes, il y aura place pour toutes
les exigences écologiques intermédiaires en matière de tem-
pérature.
B) C'est dans le système phytal que les conditions de substrat
connaissent leur variété maxima. Roches diverses, galets, gra-
viers, sables, vases, sont des substrats qui ont chacun, pour une
aire maritime donnée, leur peuplement caractéristique.
C) C'est dans le système phytal que les sources de matières
organiques nécessaires à l'alimentation des animaux sont les
plus nombreuses. Ceci tient à trois causes : a) On y voit prospérer
la végétation fixée, productrice, comme nous le verrons ultérieu-
rement, d'une bonne part des matières organiques utilisées
directement ou indirectement par les animaux benthiques ;
b) Le plancton néritique est généralement plus dense que le
plancton océanique, d'où une véritable pluie de matières orga-
niques, issues des cadavres, sur le fond ; c) Le domaine benthique
du système phytal est, par sa proximité des terres émergées,
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soumis aux apports continentaux. Ceux-ci se traduisent par des


apports minéraux utiles aux végétaux, mais peuvent aussi se
traduire par des apports de matières organiques directement
utilisables par des animaux, ou indirectement utilisables en
fournissant une possibilité de pullulation à des populations
bactériennes hétérotrophes. Les Bactéries peuvent, soit être
utilisées directement comme nourriture par des animaux, soit,
en dégradant les matières organiques, amener un enrichissement
en matières minérales qui profite, en dernier ressort, aux végétaux
autotrophes.
Le dernier facteur de l'abondance spécifique joue aussi en
faveur de l'abondance numérique des individus. Ce n'est guère
que dans le système phytal que l'on peut trouver des populations
extrêmement nombreuses d'une ou plusieurs espèces.
Cependant, la vie benthique dans le système phytal n'est
pas sans inconvénients. En effet cette zone est celle où, tout
d'abord, se rencontrent les courants les plus énergiques ce qui
crée, pour les espèces à développement larvaire pélagique, le
risque de voir leurs larves entraînées dans des zones éloignées où
les conditions du milieu ne sont pas favorables à la métamor-
phose. C'est aussi la zone où se rencontrent les variations les
plus fortes des facteurs physicochimiques, par exemple de la
salinité (du fait des apports fluviaux ou de ruissellement) ; la
plupart des espèces du benthos littoral seront donc des espèces
dotées d'une certaine euryhalinité. C'est enfin, aux moyennes
latitudes du moins, la zone où se produisent les plus fortes
variations de température ; le benthos littoral des mers tempérées
sera donc formé d'une majorité d'espèces eurythermes.

1. 4. 2. Anomalies du benlhos phylal

Lorsque les facteurs édaphiques régnant dans une aire donnée


du benthos littoral deviennent, sous l'un de leurs aspects, trop
rigoureux, par exemple dans l'ensemble littoral des mers polaires
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à cause de la température, ou bien au voisinage d'une source


très importante en matières organiques donnant naissance à des
vases réductrices, ou bien encore quand la fréquence et l'inten-
sité des mouvements sur un fond sableux entraînent au contraire
une grande pauvreté en matières organiques et une grande
instabilité du substrat, ou bien dans les eaux peu profondes à
circulation médiocre et qui sont surchauffées ou suréclairées, etc.,
en bref, toutes les fois que règnent des conditions excessives,
c'est-à-dire qu'il y a très large prédominance d'un facteur
édaphique, le benthos littoral s'appauvrit en espèces.
En revanche on assiste alors à une pullulation extrême de
l'espèce ou du petit nombre d'espèces qui ont réussi à s'accommo-
der de ces conditions excessives. En effet, à ce moment, la
concurrence interspécifique pour la place disponible et pour la
nourriture ne joue plus. On peut donc observer, au sein du benthos
littoral, une sorte de « balancement » entre le nombre d'espèces
et le nombre d'individus de chaque espèce.

En résumé le benthos littoral est riche et varié. Il présente


encore une autre caractéristique par rapport au benthos profond :
la présence d'un plus fort pourcentage de formes animales
sessiles. Ceci est normal pour deux raisons : a) parce que c'est
l'ensemble littoral qui, par l'abondance des substrats rocheux
et végétaux présente les meilleurs possibilités de fixation pour
les formes sessiles ; b) parce que les formes sessiles étant réduites
à attendre (plus ou moins activement — p. 227) la nourriture,
leurs chances de recevoir celle-ci en quantité suffisante sont
d'autant plus grandes que les eaux sont susceptibles de plus de
mouvements (courants et houles), et d'autant plus grandes aussi
que la quantité totale de nourriture disponible en suspension
est elle-même plus élevée ; or, ces deux conditions sont précisé-
ment réalisées dans l'ensemble littoral.
Même à l'intérieur du système phytal c'est-à-dire, en gros,
sur le plateau continental le pourcentage des formes animales
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sessiles décroît, et ceci pour les mêmes raisons que ci-dessus


quand on passe de l'étage infralittoral à l'étage circalittoral.
En revanche il ne semble pas qu'il y ait une diminution de la
valeur globale des populations animales quand la profondeur
croît, du moins d'une façon générale et accusée. Si la compo-
sition des peuplements change évidemment quand on passe,
par exemple, de l'infralittoral au circalittoral, il semble que la
diminution du nombre total d'espèces animales et d'individus
soit faible, et que, si l'on envisage l'ensemble de la faune (Poissons
compris), le poids total de matière vivante animale rapporté à
l'unité de surface soit du même ordre. La chose est à peu près
impossible à apprécier exactement, mais elle se dégage assez
objectivement des récoltes pratiquées suivant des méthodes et
avec des engins suffisamment divers.
Les chapitres 3 et 4 illustrent largement ces quelques notions
générales et mon but, en les écrivant, a été que leur somme soit
la contrepartie du chapitre 2 relatif au benthos profond.
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CHAPITRE II

LE BENTHOS DU SYSTÈME APHYTAL

2. 1. Historique sommaire. Rappel des limites et subdivisions


La connaissance du benthos du système aphytal ou benthos
profond est relativement récente et, par là même, très impar-
faite, encore que la question ait toujours passionné les chercheurs.
Jusque vers le milieu du xixe siècle on avait sur le benthos
profond des idées très arrêtées, mais fausses. PÉRON avait avancé,
en extrapolant aux profondeurs croissantes la diminution de
température connue pour les quelques centaines de mètres
superficiels, que les fonds de l'océan étaient occupés par des
glaces éternelles. FORBES, tirant argument de l'insuccès de
quelques dragages faits en Méditerranée (il n'avait pas de chance
d'avoir commencé précisément par cette mer) entre 300 et
700 m affirmait que la mer était azoïque à partir de ces profon-
deurs. Et cette assertion paraissait naturelle en raison des
conditions qu'on savait déjà régner en mer profonde : tempéra-
ture basse, pression élevée, absence de lumière donc de végétation.
Cependant, peu à peu, au fur et à mesure que se perfec-
tionnaient les techniques, quelques résultats, encore bien fragmen-
taires, permettaient de mettre en doute l'opinion orthodoxe. John
Ross en baie de Baffin ramenait divers animaux de 800 et 1 000 m,
James CLARK Ross dans l'Antarctique en ramenait de 1 800 m
de profondeur, et en 1851 Michaël SARS fournissait la liste
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Collection « EUCLIOE »

Guy EMSCHWILLER. — CHIMIE PHYSIQUE :


T. I . . . NF. 18 » T. I I . . . (sous presse) T. I I I . . . (en réimpr.)
Jules HAAG. — LES MOUVEMENTS VIBRATOIRES :
T. I NF. 18 » T. II NF. 20 »
Jean BARRIOL. — MÉCANIQUE Q U A N T I Q U E . . . . NF. 18 »
Raymond QUELET. — P R É C I S D E CHIMIE (S.P.C.N.) I
T. I . . . NF. 15 » T. I I . . . NF. 12 » T. III NF. 15 »
Louis GENEVOIS. — TRAITÉ DE CHIMIE BIO-
LOGIQUE :
T. I NF. 18 » T. II : Partie. NF. 14 » ; 2e Partie. NF. 22 »
Jean CHAZY. — MÉCANIQUE CÉLESTE NF. 18 »
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Robert GUILLIEN. — ÉLECTRONIQUE :
T. I NF. 44 » T. II NF. 40 »
Philippe L'HÉRITIER. — TRAITÉ DE GÉNÉTIQUE Î
T. I . . . NF. 18 » T. II . . . NF. 12 » T. I I I . . . (en préparation)
Albert CHATELET. — ARITHMÉTIQUE ET ALGÈBRE
MODERNES :
T. I . . . NF. 16» T. I I . . . NF. 22 » T. III (en préparation)
Georges VALIRON. — FONCTIONS ANALYTIQUES NF. 18 »,
Édouard BOUREAU. — ANATOMIE VÉGÉTALE :
T. I . . . NF. 24 » T. I I . . . NF. 15 » T. I I I . . . NF. 15 »
Maurice JANET. — PRÉCIS DE CALCUL MATRICIEL
ET DE CALCUL OPÉRATIONNEL NF. 22 »
Léon HIRTH et Joseph STOLKOWSKI. — BIOLOGIE
CELLULAIRE NF. 24 »
Henri WAHL. — PRÉCIS DES MATIÈRES COLO-
RANTES SYNTHÉTIQUES :
T. I . . . NF. 24 » T. I I . . . NF. 28 » T. I I I . . . (en préparation)
Louis HACKSPILL, J e a n BESSON et Albert HÉROLD. —
CHIMIE MINÉRALE s
T. I NF. 36 » T. II NF. 36 »
Jean-Marie SOURIAU. — CALCUL LINÉAIRE . . . . NF. 22 »
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J.-M. PÉRÈS. — OCÉANOGRAPHIE BIOLOGIQUE
ET BIOLOGIE MARINE : T. 1 NF. 30 »
Pierre GRIVET. — ONDES CENTIMÉTRIQUES (en préparation)
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