257FR-Corruption-and-Anti-Corruption-in-DRC
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Question
Qu’en est-il de la corruption en République démocratique du Congo ? Veuillez dresser un panorama des
évolutions récentes des mesures et structures nationales de lutte anti-corruption.
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Panorama de la corruption et de la lute anti-corruption en
République démocratique du Congo (RDC)
à l’activité économique au sein du pays et conduisent à de trente-sept entreprises publiques par ses propres
l’accroissement du secteur informel. relations, resserrant ainsi son emprise sur le pouvoir
économique et politique (Matti, S. A., 2010).
Formes de corruption L’attribution des postes clés de l’administration est, en
outre, fondée sur le copinage et le favoritisme plus que
En RDC sévissent à la fois la corruption à petite sur le mérite. Il est probable que cela sape les
échelle et la grande corruption, impliquant un large processus démocratiques et l’établissement
éventail d’agents publics, allant des fonctionnaires d’institutions transparentes, sachant que la recherche
subalternes aux membres les plus hauts placés du de rentes et l’accès au pouvoir constituent les
gouvernement. principaux facteurs qui incitent à entamer une carrière
politique.
L’inefficacité des structures gouvernementales, la
faiblesse des capacités administratives ainsi que les
bas salaires, associés à l’absence de surveillance,
Secteurs les plus affectés par la
fournissent aux fonctionnaires tant d’opportunités que corruption en RDC
d’incitations à extorquer des fonds à la population Exploitation minière
(Global Integrity, 2008). Reflétant cette réalité, les
formes de corruption bureaucratiques et La RDC est dotée de ressources minérales
administratives sont largement répandues dans considérables, notamment de grandes réserves de
l’ensemble des services et des départements publics. diamants, de cuivre, de cobalt, d’or et d’uranium.
Par exemple, selon le rapport de l’Enquête sur les Cependant, l’abondance de ces richesses naturelles ne
entreprises de la Banque mondiale de 2006, plus de profite pas aux citoyens ordinaires d’un point de vue
80 % des sociétés interrogées s’attendaient à devoir économique, comme l’indique le Rapport sur le
effectuer des paiements informels pour faire avancer développement humain du PNUD de 2009, selon lequel
les choses ou obtenir un marché public. Près de 70 % la RDC réalise un très mauvais score sur la plupart des
doivent faire des dons afin de se voir octroyer une indices de développement humain (UNDP, 2009).
licence d’exploitation.
De nombreux rapports illustrent la longue tradition de
L’absence de transparence et de surveillance est tout gestion abusive des ressources naturelles. Global
particulièrement manifeste dans la gestion financière Witness a notamment montré que les grandes
publique. L’audit et le suivi des dépenses sont rares et richesses naturelles de la RDC étaient dès l’origine
la RDC est le pays le moins bien classé selon l’Indice exploitées au profit commercial d’un petit nombre
d’ouverture budgétaire de 2008, avec un score de d’entreprises et d’acteurs politiques et au détriment de
0%. Le gouvernement ne fournit aucune information au la population (Global Witness, 2004). Les rapports de
public concernant le budget du gouvernement central et Global Witness ont également dénoncé d’autres
l’activité financière au cours de l’exercice budgétaire, problèmes liés au secteur des ressources naturelles, y
ne permettant pas aux citoyens de demander des compris une corruption généralisée, un manque de
comptes au gouvernement sur la gestion des deniers transparence et des conditions de travail extrêmement
publics. Par conséquent, les ressources publiques dangereuses.
peuvent aisément être détournées à des fins privées ou
politiques. Un des rares audits publiés en 2008 Le dernier rapport de Global Witness sur la RDC fait
indiquait que différentes agences publiques et état de la militarisation de l’exploitation minière
parapubliques avaient détourné 1,8 milliards de dollars dans les zones de conflit de l’Est du pays. Il décrit
(Bertelsmann Foundation, 2010a). comment toutes les parties belligérantes exploitent les
ressources naturelles illégalement pour consolider leur
Sur un autre plan, l’héritage politique des régimes base économique et piller les richesses minières du
précédents – au sein desquels les deniers publics ont pays aux dépens de la population (Global Witness,
été détournés pour maintenir divers réseaux népotiques 2009). D’après un rapport de 2001, rédigé par un panel
– continue d’assombrir le paysage politique actuel. d’experts de l’ONU, les acteurs du conflit ont vendu des
Diverses formes de népotisme politique et de minerais et signé des contrats avec des multinationales
clientélisme perdurent dans l’ensemble du système et d’autres sociétés minières en vue de lever des fonds
politique, comme en témoigne la surreprésentation des pour la guerre. Ceci a impliqué un large éventail de
membres du Cabinet proches du Président. Le pratiques telles que l’octroi de monopoles en échange
président Kabila a également remplacé les dirigeants de pots-de-vin, le détournement de fonds issus
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d’entreprises publiques, la création d’entreprises économique. D’après une note de synthèse U4, les
communes dont les politiciens étaient des actionnaires, sociétés d’abattage industriel contribuent à moins d’1 %
et l’approbation de dispositions contractuelles du PNB et il semblerait que les exportations effectives
défavorables à l’État en échange de pots-de-vin de bois pourraient être jusqu’à sept fois plus élevées
(International Crisis Group, 2006). Parallèlement, que les chiffres officiels ne l’indiquent (International
l’armée congolaise et les groupes rebelles ont Crisis Group, 2006).
largement eu recours au travail forcé et à l’extorsion, et
ont perçu des impôts illégalement auprès de la Plusieurs tentatives ont été engagées pour réformer la
population civile. gouvernance forestière à l’aide de la communauté
internationale, mais sans réel succès jusqu’à présent.
Suite à l’accord de paix de 2002, une commission En 2002, le président Kabila a déclaré un moratoire sur
dirigée par Christophe Lutundula, un parlementaire de l’allocation de nouvelles concessions forestières, résilié
l’opposition, a produit un rapport incriminant sur la 163 contrats existants, et promulgué un code forestier.
gestion du secteur minier. En 2002, la Banque Cependant, des études ultérieures ont montré que de
mondiale a contribué à la rédaction de nouveaux codes nouvelles concessions avaient été octroyées et que 2,4
miniers et d’investissement, et en 2007, le ministre des millions d’hectares avaient été rétablis. Sept sociétés
Mines a annoncé la création d’une commission dotées de concessions couvrant un total d’un million
gouvernementale chargée d’évaluer les contrats d’hectares opéraient grâce à des dispositions
miniers, entraînant l’annulation de 61 contrats et la contractuelles fictives (International Crisis Group,
renégociation de nombreux accords (Freedom House, 2006). De plus, des ONG locales s’inquiètent de la
2010a). À cette occasion, Global Witness a publié un procédure d’examen de la légalité de l’ensemble des
rapport exprimant de l’inquiétude quant à l’absence de contrats d’exploitation, notamment concernant la
transparence et de clarté du processus d’évaluation, participation limitée des représentants de la société
aux garanties insuffisantes d’indépendance de la civile et de la communauté locale. Une procédure
commission d’évaluation, et au manque d’implication de d’examen a finalement conduit à l’annonce, en octobre
la société civile (Global Witness, 2007). 2008, de la résiliation de nombreux contrats et de
l’établissement d’un moratoire permanent sur
En outre, la contrebande de minerais prive l’État de l’allocation de nouvelles concessions (Freedom House,
ressources précieuses. Le rapport de 2006 de 2010a).
International Crisis Group a estimé que des diamants
d’une valeur d’environ 80 millions USD sortiraient du La note U4 sur la gouvernance forestière en RDC
pays chaque année. À l’Est du pays, la cassitérite conclut que : (U4, 2010).
provenant des mines artisanales contrôlées par
d’anciennes factions rebelles de la RDC a été • Le code forestier de 2002 assorti du décret
transportée vers le Rwanda via Goma pour y être présidentiel n’ont rencontré que peu de succès
raffinée. Le commerce illégal de l’or est également une dans l’amélioration de la gouvernance de
source d’inquiétude et d’insécurité sur la frontière l’exploitation industrielle du bois ;
ougandaise. Selon International Crisis Group, des
groupes armés congolais, soutenus par des officiers et • Le nouveau cadre réglementaire, qui fixe des
négociants ougandais, ont exploité les mines d’or pour exigences majeures de consultation publique, a
financer une grande partie de leurs opérations au Nord- accentué les déséquilibres sociaux et n’offre guère
Est du Congo. En outre, l’armée congolaise aurait aussi de possibilités de s’exprimer aux femmes et aux
était impliquée dans le trafic d’or (International Crisis peuples autochtones;
Group, 2006).
• Les mécanismes de contrôle administratif,
Ressources forestières logistique et institutionnel envisagés en matière de
La République démocratique du Congo abrite le gestion forestière sont soit insuffisants, soit
deuxième massif forestier tropical du monde après le inexistants.
bassin amazonien : le bassin du Congo (U4, 2010).
L’exploitation industrielle des forêts est largement Cette note souligne de surcroît que l’impact limité des
susceptible d’engendrer des recettes publiques, mais réformes de gouvernance forestière est principalement
les défis que posent l’abattage illégal et la contrebande imputable à un manque de mesures incitant les divers
empêchent de transformer ce potentiel en croissance acteurs à réformer un système dont ils bénéficient sous
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République démocratique du Congo (RDC)
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des militaires sont notamment légion ; il s’agirait se les ait guère appropriées. Une loi anti-corruption
potentiellement de près de la moitié des fonds alloués adoptée en 2005 a transposé les dispositions de la
à l’alimentation et la rémunération des soldats. Le Convention des Nations Unies contre la corruption
gonflement de la masse salariale par le biais de soldats (CNUCC) et de la Convention de l’Union Africaine sur
fantômes constitue également une source de la prévention et la lutte contre la corruption dans le
préoccupation (International Crisis Group, 2006). contexte national. Dans une large mesure, il est perçu
que cette loi fournit un cadre réglementaire approprié
Le rapport de International Crisis Group démontre que pour combattre la corruption (Freedom House, 2010a).
la corruption rend encore plus difficile les conditions de Ainsi, Global Integrity a noté dans sa grille d’évaluation
vie des soldats, sachant que leur solde est indûment de la RDC de 2006 que la loi anti-corruption est « très
versée, et que dans certaines régions, ils reçoivent solide ». La plupart des rapports, toutefois, s’accordent
moins de la moitié de ce qui leur revient. Privés de à dire qu’il existe peu d’indications d’une volonté
salaires décents, ils sont incités à harceler et extorquer politique forte de remédier à la corruption et de faire
la population civile ainsi qu’à piller les villages pour appliquer les dispositions juridiques de lutte contre la
survivre. Les soldats constituent ainsi une grande corruption efficacement. Jusqu’à présent, ce cadre
menace pour les populations locales. Les réglementaire solide n’a pas permis de poursuivre les
détournements ont diminué depuis 2006 grâce à faits de corruption avec efficacité, y compris dans les
l’introduction d’un mécanisme de versement des cas où des preuves solides d’abus sont fournies (Kodi,
salaires plus indépendant et à une surveillance accrue M., 2007).
des autorités congolaises. En revanche, il est difficile
de mesurer l’étendue du succès de ces efforts, dans la D’autres dispositions juridiques de lutte anti-corruption
mesure où les forces armées continuent d’être connexes sont prévues par la Constitution et le Code
affectées par un grand manque de discipline dans d’éthique des agents publics de 2006, qui exigent que
plusieurs régions du pays (International Crisis Group, le chef d’État, les représentants du gouvernement et les
2006). Il semblerait que le gouvernement tente de fonctionnaires soumettent des déclarations de
remédier à cette situation, comme en témoigne le patrimoine à la cour constitutionnelle. Ces dispositions
budget national de 2010, qui accorde la priorité aux sont, néanmoins, mal mises en œuvre. Le manque
salaires de la police, de l’armée, des fonctionnaires et d’accès du public à ces déclarations entrave le suivi
des enseignants (U4, 2010). efficace du patrimoine des agents de l’État et limite
l’impact de ces mesures.
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notamment la loi de 2004 sur le blanchiment d’argent, d’audit de la RDC s’avère largement inefficace
aux termes de laquelle la RDC coopère avec des (Freedom House, 2010a).
organisations africaines et européennes de lutte contre
la criminalité. En septembre 2007, la RDC a aussi Pouvoir judiciaire
ratifié un protocole d’accord avec la Communauté de Le pouvoir judiciaire doit surmonter de nombreuses
développement de l’Afrique australe (CDAS) sur la lutte difficultés qui sapent sa capacité à poursuivre la
anti-corruption. Depuis 2008, la RDC est candidate à corruption de manière efficace ; il est subordonné au
l’Initiative pour la transparence dans les industries pouvoir exécutif depuis l’ère Mobutu. On estime que le
extractives (ITIE), mais le pays doit mettre en oeuvre nouveau gouvernement n’a pas vraiment fait évoluer
une série de mesures visant à promouvoir la les choses, et peu d’avancées sont à signaler en
transparence avant d’y être éligible (Freedom House matière de réforme judiciaire. Le pouvoir judiciaire
2010a). souffre d’un manque d’indépendance ainsi que d’une
ingérence politique généralisée et d’une corruption
Cadre institutionnel endémique (Bertelsmann Foundation, 2010). Un audit
du système judiciaire, réalisé en 2004, a révélé que
Commission d’éthique et de lutte contre
seul 20 % de la population avait accès aux services de
la corruption justice, notamment en dehors de Kinshasa (Matti, S. A.,
Créée en 2003, la Commission d’éthique et de lutte 2010).
contre la corruption (CELC) constituait l’une des cinq
institutions « citoyennes » mandatées par la La constitution de 2006 a transféré le pouvoir de
constitution de transition. Dès sa mise en place, elle a nommer les juges et les magistrats, de l’exécutif au
été confrontée à de grandes difficultés en termes de Conseil supérieur de la magistrature (CSM),
ressources et de logistique, auxquelles la communauté institutionnalisant de cette façon le principe
internationale a tenté de remédier. Comme pour d’indépendance judiciaire. Cependant, le CSM n’a été
d’autres entités de transition, son conseil était composé instauré qu’en 2008 et n’était toujours pas opérationnel
de représentants de l’ensemble des signataires de à la mi-2009 (Freedom House, 2010a). Dans la
l’accord de paix, ce qui a entraîné un sureffectif, des pratique, les juges sont toujours assujettis à l’influence
processus décisionnels complexes et l’absence de indue des représentants du gouvernement. En février
vision commune et de stratégie cohérente (Kodi, M., 2008, le président Kabila a mis 89 juges en retraite,
2007). Le travail de la CELC a été, en outre, freiné par notamment le président de la Cour suprême de justice
un faible leadership, une expertise technique et le Procureur général, et les a remplacés par 28
insuffisante et un manque d’indépendance. Paralysée nouveaux magistrats très peu qualifiés. Bien qu’il ait
par ces différents enjeux, la CELC n’a pas été justifié sa décision en invoquant l’élimination de la
reconduite dans la nouvelle constitution (Freedom corruption, la plupart des analystes estiment qu’il s’agit
House, 2010a). d’une ingérence indue au sein de l’appareil judiciaire
(Freedom House, 2010a).
Cellule des renseignements financiers
En vue de garantir l’application de la législation anti- Outre l’interventionnisme généralisé de l’État dans
corruption par les fonctionnaires et les membres du l’administration de la justice, le pouvoir judiciaire
gouvernement, le président Kabila a lancé une manque de ressources matérielles et financières. Son
campagne de « tolérance zéro » en septembre 2009. personnel est sous-payé, les infrastructures sont de
Dans ce cadre, il a instauré la Cellule des piètre qualité et les moyens et capacités élémentaires
renseignements financiers en octobre 2009 pour font cruellement défaut, notamment les textes
combattre le blanchiment d’argent et le détournement juridiques. Par conséquent, en dépit d’un cadre
des deniers publics (US Department of State, 2010). réglementaire anti-corruption solide, peu de titulaires de
Ceci étant, l’efficacité de cette institution n’a pas encore charge ont été poursuivis et condamnés pour des délits
été établie. liés à la corruption, ce qui alimente une culture
d’impunité, mais aussi de cynisme au sein de la
Vérificateur de l’État population (Kodi, M., 2007).
Le vérificateur de l’État est chargé d’évaluer les
Autres institutions
dépenses publiques et d’auditer les entreprises
publiques. Freedom House estime que l’organisme La RDC ne dispose pas d’un médiateur national ou
d’un mécanisme de plainte efficace pour permettre aux
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République démocratique du Congo (RDC)
citoyens de signaler les cas de corruption (Freedom de catalyseur pour la société civile ; une multitude
House 2010a). d’ONG apparaissent pour proposer des services
élémentaires visant à combler les lacunes laissées par
Dans le cadre du protocole d’accord de coopération sur le gouvernement. Cependant, la liberté de réunion et
la lutte contre la corruption avec l’Afrique du Sud et d’association est limitée par des dispositions liées au
l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime maintien de l’ordre public. Ainsi, les groupes qui
(ONUDC), signé en 2008, la RDC a organisé un Forum organisent des événements publics sont tenus d’en
National sur la lutte contre la corruption en décembre informer les autorités locales au préalable (Freedom
2009. Le Forum a recommandé la création d’un certain House, 2010b).
nombre de structures de lutte anti-corruption, dont un
organe consultatif, le Conseil national d’éthique, une Lorsqu’elles jouent sur le terrain politique, les
Commission indépendante d’éthique et de lutte contre organisations de la société civile courent un risque
la corruption, un organisme gouvernemental anti- élevé d’intimidation, d’arrestation et de harcèlement.
corruption et un médiateur (FONALC, 2009). Selon la Fondation Bertelsmann, le gouvernement a
intensifié les mesures répressives vis-à-vis des groupes
Autres acteurs de l’opposition depuis les élections de 2006. Celles-ci
ont contribué aux restrictions limitant l’espace politique
Médias du pays (Bertelsmann Foundation, 2010). Plus
La liberté d’expression et la liberté de la presse sont particulièrement, un rapport de Human Rights Watch de
garanties par la Constitution de 2006. Dans la pratique, 2008 fait état de l’utilisation accrue de la violence et de
toutefois, l’efficacité des médias en tant qu’observateur l’intimidation en vue d’éradiquer l’opposition politique, le
critique est entravée par le contrôle et les restrictions président Kabila donnant lui-même le ton en sommant
non négligeables émanant du gouvernement. Ce d’ « écraser » ou de « neutraliser » les « ennemis de la
dernier utilise un large éventail d’exigences en matière démocratie » (Human Right Watch, 2008).
de licences, ainsi que des lois répressives relatives à la
sécurité et à la diffamation afin de restreindre la liberté Lorsqu’elle s’attache à lutter contre les problèmes de
de la presse (Freedom House, 2009). Fort de ces corruption, la société civile est confrontée à de fortes
constats, l’organisme Reporters Sans Frontières a pressions exercées par le gouvernement et des
classé la RDC au 146e rang sur 175 pays évalués dans groupes d’intérêt puissants. Un rapport de Freedom
son Indice de liberté de la presse de 2009 (Reporters House de 2010 fournit de nombreux exemples
Sans Frontières, 2009). d’arrestation, de harcèlement et d’incarcération de
défenseurs des droits de l’homme lorsqu’ils s’attaquent
Les journalistes et diffuseurs critiques sont à la corruption. En 2009, par exemple, le président du
régulièrement harcelés, intimidés, arrêtés ou groupe des droits de l’homme Asadho-Katanga a été
incarcérés. Les services de radiodiffusion peuvent condamné à un an de prison après avoir publié un
également être frappés d’interdiction d’antenne ou voir rapport alléguant que le gouvernement aurait obtenu
le contenu de leurs programmes censuré. En 2007, par des pots-de-vin grâce à l’exploitation illégale d’une
exemple, le gouvernement a interdit quarante chaînes mine. La même année, un dirigeant syndical a été
de télévision et stations de radio en raison de licences arrêté suite à la rédaction d’une note dénonçant un
« frauduleuses ». Plus récemment, en mars 2009, le détournement de fonds publics par le ministre de
maire de Likasi a exigé la fermeture d’une radio et l’Économie nationale et du Commerce (Freedom
d’une chaîne de télévision locales accusées de House, 2010a). Malgré toutes ces difficultés, la
diffamation. La même année, au mois de juillet, le Fondation Bertelsmann signale qu’un nombre croissant
gouvernement a interdit la transmission de Radio d’organisations de la société civile s’efforcent de
France Internationale (RFI), une radio française réaliser un suivi du budget public et de sensibiliser la
publique (Freedom House, 2010b). En dépit de ces population au taux élevé de corruption (Bertelsmann
contraintes et restrictions, les médias offrent un espace Foundation, 2010).
de vif débat sur des questions sociales et politiques
(Bertelsmann Foundation, 2010). Communauté internationale
La RDC est un pays très endetté, dont le budget est
Société civile grevé par un taux d’endettement qui représente un
Les défis en matière de gouvernance, associés au quart de l’ensemble des dépenses annuelles du pays
quasi-effondrement des institutions publiques, ont servi (U4, 2010). Par conséquent, et au vu de la faible
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Panorama de la corruption et de la lute anti-corruption en
République démocratique du Congo (RDC)
capacité de collecte de revenus de la RDC, le pays est World Bank Institute, World Wide Governance
largement tributaire de l’aide qui alimente la moitié du Indicators, http://info.worldbank.org/governance/wgi/sc_
budget (U4, 2010). country.asp
Heritage Foundation, 2010, Index of Economic
La pression internationale a joué un rôle moteur dans
Freedom, http://www.heritage.org/index/country/Democ
les réformes, passées et présentes, menées en matière
raticRepublicCongo
de gouvernance. Cependant, les analystes estiment
également que les partenaires internationaux ont une
World Bank, 2006, Enterprise
part importante de responsabilité dans l’échec du
surveys, http://www.enterprisesurveys.org/
gouvernement à apporter des changements
significatifs. Lors de la période de transition, plusieurs Global Integrity, 2008, Democratic Republic of Congo
auteurs ont affirmé que la communauté internationale a country report,
fermé les yeux sur le taux croissant de corruption afin
de ne pas compromettre le fragile processus électoral, Bertelsmann Foundation, 2010, BTI 2010 Democratic
tandis que les partenaires internationaux et le Republic of Congo country
gouvernement approuvaient le programme de lutte anti- report, http://www.bertelsmann-transformation-
corruption du bout des lèvres (Kodi, M., 2007). Au-delà index.de/fileadmin/pdf/Gutachten_BTI2010/WCA/Cong
du processus de transition, l’absence d’appropriation o__Republic_of_the.pdf
constitue un obstacle majeur au succès des réformes
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République démocratique du Congo (RDC)
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