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Allocution
de
Son Excellence Monsieur Michel Joseph MARTELLY
Président de la République d'Haïti
Mes premiers propos s'adressent à vous, Monsieur le Président, pour vous féliciter de votre
élection à la présidence de cette 66" session ordinaire de l'Assemblée générale.
Monsieur le Président,
En prenant la parole devant vous aujourd'hui, au nom d'Haïti, je veux joindre ma voix à celle
de tous les autres pays membres, qui, comme nous, connaissent la gestion du lourd fardeau
des situations post-catastrophes ou post conflits, pour dire que les plus faibles et les plus
vulnérables gardent l'espoir.
Ils gardent l'espoir de renaitre, parce qu'ils ont pris conscience que les situations d'avant-
crises ne sont désormais plus possibles.
Ils savent que le changement, changement dans leur mentalité, dans leur gestion politique,
économique et sociale, doit être leur seul credo.
Et dans le cas d'Haïti, c'est parce que, justement, tout un peuple en a eu l'intime conviction
que j'ai été élu avec un mandat bien précis: celui de matérialiser ce changement.
Je reste convaincu que ces sursauts de conscience, dont la genèse est la souffrance, sont
ceux qui, en général, prévalent à un nouvel ordre mondial.
Tel fut le cas au début du XIXème (19") siècle quand St Domingue brisa ses chaines, faisant
naitre Haïti.
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Tel fut le cas en 1945, quand les nations de bonne volonté, dont Haïti, s'unirent pour forger
cette instance qui nous réunit cette semaine autour d'idéaux nobles.
Tel semble le cas actuellement au vu d'une dynamique politique touchant l'Afrique du Nord.
Monsieur le Président,
Je peux vous dire que quand, hélas, dans un pays du Sud, dont l'indice de développement
humain est déjà préoccupant, survient une catastrophe majeure, alors se reposent très
brutalement toutes les questions de responsabilité: qu'elle soit locale en termes de
gouvernance, ou qu'on la veuille quelque part imputable à l'ordre mondial.
Quand, de surcroit, dans certains cas, tous ces facteurs se conjuguent, les réponses se
doivent d'être encore plus mûrement réfléchies, plus responsables, plus concertées, plus
audacieuses et plus déterminées.
Je crois fermement qu'il appartient d'abord, aux pays concernés, de rechercher et de trouver
des pistes de solutions; car toutes celles imposées, généreuses ou non, ne produiront à
moyen terme que des effets adverses.
Il appartient aux peuples du Sud de décider de leurs richesses, de leurs matières premières
et de leur destin.
Dans le cas d'Haïti, je dois dire que la communauté internationale, par le biais des Nations
Unies, en accompagnant 6 mois après le séisme, des élections présidentielles à risques, en
a compris l'urgence. Qu'elle en soit remerciée.
Mais tout aussi fermement, je pense qu'il serait irresponsable, pour un pays victime de
catastrophes, de se priver de l'aide, de l'expertise, de la coopération des nations sœurs,
qu'elles soient du Sud émergent ou du Nord supposé nanti.
Et c'est ce juste équilibre, disais-je, entre une gouvernance adulte et une assistance
internationale bien pensée, qu'il convient de rechercher, de codifier, sans fard et en toute
vérité.
Qu'il me soit permis ici, de citer, à titre d'exemple, les nombreuses Missions de Paix et de
Stabilisation des Nations Unies, en de multiples points de la planète, dont Haïti.
Une constante se dégage: accueillies avec soulagement aux premiers jours, ces Missions à
moyen terme s'essoufflent. Pourquoi? Parce qu'entr'autres les attentes des pays hôte d'une
part, sont surdimensionnées, d'autre part, parce que ces Missions ne peuvent évoluer, figées
qu'elles sont dans des termes de références peu souples.
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Et c'est dommage, car rien n'est plus irresponsable et dangereux que de laisser partir ces
Missions, sans alternative nationale efficace.
Dans le cas d'Haïti, à quoi aurait servi cette Mission, si aujourd'hui, sans coup férir, sans
préavis, elle se retirerait. Certes, je suis conscient que des bavures inacceptables ont
entaché le prestige de la Mission, mais les arbres ne devraient pas cacher la forêt.
Et je crois justement, que la stabilisation politique passe par plusieurs étapes. Elle ne saurait
se réduire à une simple force d'interposition ou en un rôle d'observateurs plus ou moins
neutre.
C'eut été une vision bien réductrice du rôle premier des Nations Unies.
Stabiliser, c'est justement bien plus que cela. Et, c'est la politique de Gouvernement que je
préconise, ce sont mes 4 axes majeurs à savoir: l'Education, l'Emploi, l'Environnement,
l'Etat de droit.
Comment consolider la paix sans l'éducation de base universelle et gratuite, dans un pays ou
l'analphabétisme prime. Comment promouvoir le développement durable, sans une
éducation de qualité, qui magnifie les vertus citoyennes, assure l'égalité entre les sexes,
valorise l'identité culturelle, qui ouvre sur le monde et emmène à la tolérance.
L'emploi: je veux le dire, on aura beau parler de dignité humaine, de droits de l'homme, de
stabilisation et de paix: Ventre affamé n'a point d'oreille. C'est par la création d'emplois
décents, justement rémunérés, qui respectent les droits des catégories vulnérables que
commence la justice.
C'est par une juste rétribution du prix des matières premières, que cessent l'étranglement
des pays du Sud et les spéculations déstabilisantes pour la démocratie.
Sur ces thèmes majeurs il faut que les nations s'unissent et s'unissent bien plus encore.....
Il n'y aura pas de paix dans le monde, tant que le cadre de vie des pays comme le mien,
Haïti, sera aussi dégradé, rendant les catastrophes encore plus dramatiques, les inondations
encore plus sévères, les sécheresses encore plus meurtrières, l'exode rural encore plus
massif.
Stabiliser aujourd'hui, c'est aussi et surtout la construction d'un Etat de droit, mais l'état de
droit suppose entr'autres une justice forte, indépendante et responsable.
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Elle s'entend également comme une construction inlassable, difficile mais inévitable,
d'institutions fortes qui priment sur les privilèges et groupes d'intérêts.
Monsieur le Président,
Le monde ne sera que plus beau, quand se tairont les "je condamne" d'un côté et les
"j'accuse" de l'autre. Haïti peut en témoigner.
Mais Haïti peut aussi dire, que dans l'aide post catastrophes, les décaissements de fonds qui
échappent aux procédures immuables, complexes et lourdes, restent les plus adaptés. Il
faudrait que ces procédures, quand bien même accompagnées, permettent aux pays
concernés de s'approprier l'initiative stratégique sur leur destin.
Justement, parlant de fonds mis à disposition des populations victimes, il serait souhaitable
que les promesses ne restent pas lettre morte, que les projets de reconstruction voient le
jour!
ln fine, je le dis, il serait fort triste que la main gauche reprenne ce que la main droite a
donné!
Et cette tentation existe, elle est le fruit d'une conjoncture économique mondiale difficile. Mais
là encore, seule la vérité devrait prévaloir, car quand la reconstruction attend, l'attente peut
devenir impatiente et dommageable.
Dans le cas d'Haïti, tout comme dans tous les post-conflits, il s'agira pour les nations amies,
pour les nations unies, de nous aider à reconstruire, à reconstruire plus qu'un espace
physique, mais des Hommes et des Femmes.
Des Hommes et des Femmes auxquels il faut rendre l'Espoir, car par delà des concepts, des
abstractions, il ne s'agit de rien d'autre que d'une Histoire Humaine.
Et remettre l'Homme au cœur des grands débats, c'est de ce nouvel ordre qu'il s'agit
aujourd'hui, c'est cette mouvance qui est la nôtre, celle que partagent aussi le milliard d'êtres
humains en proie aux catastrophes, aux déplacements, aux conflits, aux pandémies.
Monsieur le Président,
A ces populations victimes, le peuple haïtien, solidaire, adresse de cette tribune des Nations
Unies un message très clair.
Tant qu'il y aura des Hommes, des Hommes de bonne volonté, l'Espoir existe.
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Car, nous en Haïti, nous avons tout connu, toutes les catastrophes, toutes celles que
l'Homme peut imposer à l'Homme, toutes celles de la Nature que nous les Hommes, nous
aggravons par notre destruction systématique et irresponsable. Nous avons connu les
pandémies, la faim, l'exclusion, mais Haïti est désormais DEBOUT, prête à se reconstruire,
prête pour un nouveau départ, Haïti kampe tèt kale.
.- au monde,
.- aux investissements
.- à la coopération
.- à la reconstruction
.- au dialogue et à la Paix