Cours 3 L2 S2

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Chapitre 3

Indépendance et probabilités
conditionnelles

3.1 Notion d'indépendance en probabilité

Denition : Soit (Ω, ℘(Ω), p) un espace probabilisé. On dit que deux événements
A et B sont indépendants si et seulement si p(A ∩ B) = p(A)p(B).

Attention à ne pas confondre indépendance et incompatibilité ; A et B sont


incompatibles si et seulement si p(A ∩ B) = 0 c'est à dire si l'événement A ∩ B
est presque impossible.

Exemple d'indépendance en probabilité :

On lance un dé à 6 faces deux fois de suite. Soit A l'événement : "le premier


lancer amène 4" et B l'événement "le second lancer amène 6".
La réalisation ou non de l'événement A ne nous apprend rien sur la réalisation
de l'événement B. Ainsi A et B sont indépendants et p(A ∩ B) = p(A) ∗ p(B).

En revanche l'événement C "la somme des résultats des deux lancers vaut
5" n'est indépendant ni de A ni de B. (Il sut pour s'en convaincre de penser à
ce qu'apporte la connaissance du résultat de A "le 6 est sorti" sur la réalisation
de C)
Soit l'événement D = A ∩ C
Il peut se traduire par D: "le premier lancer amène 4, le second lancer amène
1" et ainsi p(A ∩ C) = p(D) = 61 ∗ 16 = 36
1

Etudions maintenant le nombre de cas où C est réalisé :

il est réalisé pour les couples suivants : {(1, 4), (2, 3), (3, 2), (4, 1)} ainsi,
comme on est dans un cas d'équiprobabilité, p(C) = nombredecasf avorables
nombredecaspossibles =
4 1
36 = 9
On a donc p(A) ∗ p(C) = 16 ∗ 19 = 54
1 1
6= 36 = p(A ∩ C)
Ainsi A et C ne sont pas indépendants.

1
On peut également constater que B et C sont incompatibles ; en eet si le
second lancer amène 6, la somme des deux lancers ne pourra être 5 et ainsi
p(B ∩ C) = p(∅) = 0 6= p(B) ∗ p(C)

Proposition : Si A et B sont indépendants, il en est de même pour A et B ,


B et A et A et B .

⇒ B = (A ∩ B) ∪ (A ∩ B) (décomposition de B sur deux incompatibles)


Alors p(B) = p(A ∩ B) + p(A ∩ B)(*)
or,
p(B) − p(A ∩ B) = p(B) − p(A) ∗ p(B) − indépendance de A et B
= p(A ∩ B) − en invoquant (∗)

Ainsi p(A ∩ B) = (1 − p(A)) ∗ p(B) = p(A) ∗ p(B)


d'où l'indépendance de A et B .

idem pour B et A, AetB en prenant A et B comme événements indépendants.

3.2 Probabilités conditionnelles

Partons d'un exemple : le tableau ci-dessous comptabilise le nombre d'étudiants


ayant eu la moyenne lors de leur dernier partiel de math L2 sur une promotion
de 800 étudiants :

Note S Cursus bac S Cursus bac ES


Note≥ 10 220 200
Note< 10 80 300

L'univers Ω choisi est ici ni, il est composé des 800 étudiants catégorisés
par leur note au dernier partiel et leur lière. Ainsi, d'après ce tableau, la prob-
abilité pour un étudiant d'avoir eu moins de 10 au dernier partiel sachant qu'il
a passé le bac ES est
|M ∩ ES| 300
= = 0, 6
|ES| 500

en posant M l'événement "obtenir moins de 10 au dernier partiel" et ES l'événement


"avoir passé un bac ES".
De même la probabilité pour un étudiant d'avoir moins de 10 au dernier partiel
sachant qu'il a suivi un cursus S est :
|M ∩ S| 80
= ' 0, 27
|S| 300

2
Soient Ω un univers ni muni d'une probabilité p et A et B deux événements de
Ω tels que p(B) 6= 0. On suppose comme dans notre exemple, que tous les événe-
ments élémentaires de Ω sont équiprobables. La probabilité que l'événement A
se réalise sachant que l'événement B est réalisé est notée pB (A) ou p(A/B) et
vaut :
|A ∩ B| p(A ∩ B)
=
|B| p(B)
égalité obtenue en remarquant que
|A ∩ B| |B|
p(A ∩ B) = et p(B) =
|Ω| |Ω|

De façon générale, soit (Ω, ℘(Ω), p) un espace probabilisé et B un événement de


probabilité non nulle (i.e. qui n'est pas quasi impossible), alors le nombre
p(A ∩ B)
pB (A) =
p(B)

est appelé probabilité de A sachant B.


Vérions que l'application pB : ℘(Ω) → R+ telle que
p(A ∩ B)
A→
p(B)

est une probabilité sur Ω :


p(Ω ∩ B) p(B)
pB (Ω) = = =1
p(B) p(B)

Soient (An )n∈N une suite d'événements 2 à 2 incompatibles de ℘(Ω),


[ p((∪An ) ∩ B) p(∪(An ∩ B))
pB ( An ) = =
p(B) p(B)
n∈N

Les (An ) sont deux à deux disjoints ainsi les An ∩ B également d'où il vient par
dénombrable additivité de p :
X
p(An ∩ B)
n
X p(An ∩ B) X
pB (∪An ) = = = pB (An )
p(B) n
p(B) n

Ainsi pB dénit bien une probabilté sur Ω.

La probabilité de A sachant B se note désormais pB . Certains livres font


encore apparaître la notation p(A/B) qui avait le désavantage de ne pas mettre
en valeur qu'il s'agit alors d'une nouvelle loi de probabilité sur Ω diérente de
p. (on pouvait penser que c'était la probabilité p appliquée à l'événement A/B,
A sachant B ce qui n'est pas exact.

3
Exemple : Une urne U1 contient 3 boules blanches et 5 boules noires, une
urne U2 4 boules blanches et 4 boules noires. On s'intéresse à l'expérience
aléatoire suivante :
On choisit au hasard une urne puis on y pioche deux boules. L'univers est donc
Ω = {(i, j, k)/1 ≤ i ≤ 2, j, k ∈ [1..8]}
i représente l'urne Ui choisie, j et k les numéros des boules tirées si on les
numérote de 1 à 8.
Comme on l'a remarqué ci-dessus, pU1 est une nouvelle probabilité qui n'opère
pas nécessairement sur le même espace probabilisable. En eet dans le cas de
pU1 , on dénit un Ω0 associé à cette nouvelle probabilité qui est Ω0 = {(i, j)/i, j ∈
[1..8], i 6= j}
Ainsi sur Ω, le nombre d'issues possibles était C21 ∗ C82 soit
2∗8∗7
= 56
2

Sur Ω0 associé à pU1 et pU2 , le nombre d'issues possibles est C82 soit 28 issues
possibles.

La probabilité de l'événement A : "obtenir une boule blanche et une boule


noire" sachant que l'urne U1 est choisie est donc :
C31 ∗ C51 3∗5 15
pU1 (A) = = =
28 28 28

sachant que l'urne U2 est choisie elle est :


C41 ∗ C41 16 4
pU2 (A) = = =
28 28 7

Remarque : l'indépendance de deux événements A et B en probabilité a été


dénie par p(A ∩ B) = p(A) ∗ p(B). Elle peut maintenant se noter avec les
probabilités conditionnelles comme : A et B indépendants en probabilité ssi :
pA (B) = p(B) en eet

p(A ∩ B) p(A) ∗ p(B)


pA (B) = = = p(B)
p(A) p(A)

3.3 Notion d'indépendance mutuelle

Dénition : Soit (Ω, ℘(Ω), p) un univers probabilisé. On dit que n événements


A1 , ...An sont mutuellement indépendants si et seulement si :
∀k ∈ [1..n], ∀(i1 ...ik ) ∈ [1..n]k , les ij tous distincts, p(Ai1 ∩ Ai2 , .. ∩ Aik ) =
p(Ai1 ) ∗ p(Ai2 ) ∗ ... ∗ p(Aik )

4
Proposition : L'indépendance mutuelle de n événements entraîne leur in-
dépendance deux à deux.
⇒ il sut de prendre dans la dénition précédente k = 2 et tous les Ai sont
indépendants deux à deux.

Attention : La réciproque n'est pas vraie : soit l'expérience aléatoire suivante


: on lance deux dés discernables, le dé rouge N°1 et le dé vert N°2. Ω = {(i, j) ∈
[1..6]2 } avec i résultat dé rouge, j résultat dé vert.
On s'intéresse aux événements :
ˆ A : "la somme des lancers est paire

ˆ B : "le lancer N°1 est pair"

ˆ C: "le lancer N°2 est pair"

il est clair que


3∗6 1
p(B) = = (cardinal des cas f avorables lancer 1 et lancer 2 sur cardinal de Ω
36 2

de même
1
p(C) =
2
.
Listons les événements élémentaires favorables à A :
{(1, 1), (2, 2), (3, 3), (4, 4), (5, 5), (6, 6), (1, 3), (3, 1), (5, 1), (1, 5), (2, 4), (4, 2),
(2, 6), 6, 2), (3, 5), (5, 3), (4, 6), (6, 4)}
et ainsi
|A| 18 1
p(A) = = =
|Ω| 36 2

p(A ∩ B) = p(B ∩ C) = p(A ∩ C) (par construction des événements)


or
3 3 1
p(B ∩ C) = ∗ = = p(B) ∗ p(C)
6 6 4

Ainsi, A,B et C sont indépendants deux à deux. Il nous manquerait pour mon-
trer l'indépendance mutuelle d'après la dénition : p(A ∩ B ∩ C) = p(A) ∗ p(B) ∗
p(C).
Or la réalisation de B et C rend A certain ce qui se traduit ainsi p(A ∩ B ∩ C) =
p(B ∩ C) = p(B) ∗ p(C) , comme p(A) 6= 1 , on a donc p(A ∩ B ∩ C) 6=
p(A) ∗ p(B) ∗ p(C)
Ceci prouve que A et B ∩C ne sont pas indépendants et donc prouve que, malgré
l'indépendance deux à deux l'indépendance mutuelle n'est pas acquise.

5
3.4 Formule des probabilités composées

Lemme : soit (Ω, ℘(Ω), p) un espace probabilisé et A et B deux événements tels


que p(B) 6= 0 alors p(A ∩ B) = p(A) ∗ pA (B).
Ce lemme découle directement de la dénition de pB . On peut néanmoins le
généraliser à n événements comme ci-dessous :

Théorème , formule des probabilités composées : Soient (Ω, ℘(Ω), p) un espace


probabilisé et A1 , ..An n événements tels que p(A1 ∩ A2 ∩ ... ∩ An−1 ) 6= 0. Alors
p(A1 ∩ A2 ∩ ... ∩ An ) = p(A1 ) ∗ pA1 (A2 ) ∗ ... ∗ pA1 ∩A2 ∩...∩An−1 (An )

Pour le montrer on réécrira le second membre ainsi :


p(A1 ∩ A2 ) p(A1 ∩ A2 ∩ .. ∩ An )
p(A1 ) ∗ ∗ ... ∗ = p(A1 ∩ A2 ∩ .. ∩ An )
p(A1 ) p(A1 ∩ A2 ∩ .. ∩ An−1
Les dénominateurs se simplient avec le numérateur de la fraction suivante et
il ne reste que le premier membre de l'égalité du théorème.

Exemple d'application de la formule des probabilités composées :

Quelle est la probabilité qu'il y ait deux personnes nées le même jour dans
une assemblée de n personnes?
On s'intéresse à l'événement A : "il n'y a pas deux personnes nées le même
jour". L'événement A est la réponse attendue.
Pour tout i ∈ [1..n] notons Ai l'événement "il n'y a pas deux personnes nées le
même jour parmi les i premières personnes du groupe (de n personnes, i ≤ n ).
Il vient
(365 − (i − 1))
pA1 ∩...∩Ai−1 (Ai ) =
365
en eet le numérateur représente le nombre de jours favorables (reste après i-1
dates anniversaire déjà attribuées) et le dénominateur le nombre de cas totaux.
En appliquant la formule des probabilités composées, on a alors :

p(A1 ∩ A2 ∩ ... ∩ An ) = p(A1 ) ∗ pA1 (A2 ) ∗ ... ∗ pA1 ∩A2 ∩...∩An−1 (An )
364 363 365 − n + 1
=1∗ ∗ ∗ ...
365 365 365
364!
=
365n−1 ∗ (365 − n)!

Revenant à l'événement recherché A on obtient :


364!
p(A) = 1 −
365n−1 ∗ (365 − n)!

On présente dans le tableau ci-dessous les résultats pour n variant de 10 à 60 ;


la probabilité est exprimée en % :

6
n 10 20 30 40 50 60

p(A) 11,7 41,1 70,6 89,1 97 99,4

Sur une classe de 30 étudiants, il y a 7 chances sur 10 que 2 d'entre eux aient
la même date anniversaire.

Remarque ou exercice : On aurait aussi pu résoudre ce problème par dénom-


brement.

3.5 Formule des probabilités totales

On appelle système complet d'événements de Ω une famille nie ou dénombrable


d'événements {Bi }i∈I telle que :
(i) ∀i ∈ I, Bi 6= ∅

(ii) ∀i, j ∈ I, (i 6= j ⇒ Bi ∩ Bj = ∅) ( les Bi sont incompatibles 2 à 2)


(iii) ∪i∈I Bi = Ω
En termes ensemblistes, les (Bi ) forment une partition de Ω.

Théorème : Formule des probabilités totales :


Si (Bi )i∈I est un système complet d'événements tel que p(Bi ) 6= 0 pour tout
i ∈ I alors :
X
∀A ∈ ℘(Ω), p(A) = pBi (A) ∗ p(Bi )
i∈I

⇒ Par construction, Ω = Bi ainsi A = A ∩ Ω = A ∩


[ [ [
Bi = (Bi ∩ A)
i∈I i∈I i∈I
les Bi étant
[disjoints, il en
Xest de même pour
X A ∩ Bi et ainsi
p(A) = p( (A ∩ Bi )) = p(A ∩ Bi ) = pBi (A) ∗ p(Bi ) 
i∈I i∈I i∈I

Remarque : très souvent, on utilise le système complet d'événements à 2 élé-


ments {B, B} pour l'application de la formule.
La formule des probabilités totales est très souvent utilisée pour la résolution
d'exercices.

Exemple d'application de la formule des probabilités totales : exercice 5 TD


3

7
p(E) = pA (E) ∗ p(A) + pB (E) ∗ p(B) + pC (E) ∗ p(C) + pD (E) ∗ p(E) d'après la
formule des probabilités totales sur le système complet d'événements {A, B, C, D}
avec Ω ensemble des produits sortis de l'usine.
Ainsi p(E) = 0, 06 ∗ 0, 1 + 0, 05 ∗ 0, 2 + 0, 03 ∗ 0, 3 + 0, 01 ∗ 0, 4 = 0, 029.

On peut facilement visualiser la formule des probabilités totales sur un arbre :

0,06 E
0,94 E
0,1 A
0,05 E
0,2 0,95
le chemin pour arriver aux diérents E
B E est très clair avec l'arbre et on retrouve
0,3 0,03
E le calcul précédent
0,4 C 0,97

0,01 E
D E
0,99

3.6 Le théorème de Bayes

Théorme de Bayes : Si {Bi }i∈I est un système complet d'événements tels que
p(Bi ) 6= 0 pour tout i ∈ I , soit A ∈ ℘(Ω) tel que p(A) 6= 0 alors :
pB (A) ∗ p(Bk )
∀k ∈ I, pA (Bk ) = P k
i∈I pBi (A) ∗ p(Bi )

p(Bk ∩ A)
⇒ pA (Bk ) =
p(A)

comme P
{Bi }i∈I est un système
P complet d'événements,
p(A) = i∈I p(A ∩ B i ) = i∈I pBi (A) ∗ p(Bi ) (Th proba totales)
de même p(Bk ∩ A) = pBk (A) ∗ p(Bk )
p (A) ∗ p(Bk )
et ainsi la formule de Bayes : pA (Bk ) = XBk
pBi (A) ∗ p(Bi )
i∈I

Interprétation : les événements (Bi )i∈I forment un système complet d'événements,


l'un d'eux et seulement un est réalisé à coup sûr lors de l'expérience aléatoire.
C'est pourquoi on peut les envisager comme des "causes" de l'expérience aléa-
toire. A événement qui se produit ultérieurement en est le "résultat". Ainsi
pA (Bk ) va à l'encontre chronologiquement parlant de notre expérience aléatoire,
la probabilité que ce soit la cause Bk qui se produise sachant que l'eet A a eu
lieu. En inversant le "sachant que" on envisage la probabilité que l'événement

8
A ait lieu sachant que la cause Bk soit réalisée, ce cheminement va dans le sens
de notre expérience.

Exemple d0 application du théorème de Bayes :

Trois urnes indiscernables contiennent des boules blanches B et noires N


selon la répartition ci-dessous :
U1 : 2 boules N et 5 boules B
U2 : 3 boules N et 1 boule B
U3 : 7 boules N et 7 boule B
On tire une boule blanche ; quelle est la probabilité qu'elle provienne de l'urne
U3 ?
On a une illustration de l'interprétation précédente: On cherche ici pB (U3 ),
nous remontons clairement le sens de l'expérience chronologique qui nous donne
facilement pU3 (B) , l'événement B a lieu après le choix de U3 . B est un eet
de l'expérience, les Ui peuvent être ainsi considérés comme des causes. On est
ainsi, grâce à la formule de Bayes, en mesure d'inverser le sens de l'expérience
en utilisant le système complet d'événements {U1 , U2 , U3 } et on a d'après la
formule :

pU1 (B) ∗ p(U1 )


pB (U1 ) =
pU1 (B) ∗ p(U1 ) + pU2 (B) ∗ p(U2 ) + pU3 (B) ∗ p(U3 )
5
∗1
= 5 1 17 13 7 1
7 ∗ 3 + 4 ∗ 3 + 14 ∗ 3

=
5

3 ∗ 28
21 (20 + 7 + 14)
=
20
41
un peu moins de 50%

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