Important Pour La Culture General 2
Important Pour La Culture General 2
Important Pour La Culture General 2
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UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR
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FACULTÉ DES SCIENCES ÉCONOMIQUES ET DE GESTION
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CENTRE DE RECHERCHES ÉCONOMIQUES APPLIQUÉES
Rap p or t f i n al
DIAGNE , Ab d ou l aye
THIAM , M ab ou sso
WANE , Ab d ou l Azi z
Janvier 2003
1
INTRODUCTION
En dépit de l’engouement qu’elle a toujours suscité depuis les années de lutte pour
l’indépendance politique sous la colonisation, l’intégration économique en Afrique de l’ouest n’a
engrangé jusqu’à présent que des résultats fort modestes. Le faible volume du commerce intra-
régional est une belle illustration des progrès limités qu’elle a enregistrés. Le Sénégal, par exemple,
ne réalise que 5,5 % de ses importations avec les pays de l’Union économique et monétaire de
l’Afrique de l’ouest (UEMOA) et 12 % avec l’ensemble des quinze pays de la Communauté
Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Quant à ses exportations, celle-ci n’a
absorbé que les 16 % dont 10 % vont aux pays de l’UEMOA. L’Europe, en particulier l’Union
européenne, demeure son principal partenaire commercial avec lequel il effectue 55 % de son
commerce extérieur (DPS, 2002). Les autres pays de la CEDEAO, à des degrés divers,
présentent le même tableau d’ensemble de leurs relations commerciales extérieures. Diverses
explications ont été avancées pour rendre compte de la faiblesse du commerce intra-régional. i)
L’accent a été mis sur la trop grande similarité des dotations factorielles des pays de l’espace
ouest-africain. ii) Certains ont préféré insister sur l’insuffisance, voire l’absence d’infrastructures
de communication adéquates (routes, ports…) qui connectent les différents pays. Les coûts de
transport élevés deviennent alors la principale contrainte à l’expansion du commerce intra-
régional. iii) Les barrières tarifaires et non tarifaires (y compris la multiplication des contrôles
douaniers le long des axes routiers) ont été régulièrement mises en cause par les opérateurs
économiques de la sous-région comme une entrave à la libre circulation des biens. iv) L’existence
d’une pluralité de monnaies nationales non convertibles entre elles obligeant les opérateurs
économiques à recourir à des devises internationales comme le dollars américain, a été invoqué
comme une source majeure de difficultés du commerce sous-régional.
Les différents facteurs cités ci-dessus constituent sans doute autant de contraintes à l’expansion
du commerce sous-régional dans la mesure où ils se traduisent tous par des coûts de transaction
si élevés que seules très peu d’opérations sont à la fois rentables et sûres. Mais le facteur sur
lequel on voudrait insister dans ce papier est l’imperfection du système des instruments de
règlement des transactions intra-régionales à la disposition des opérateurs économiques. Comme
les facteurs précités, cette imperfection contribue à l’augmentation des coûts de transaction donc
freine le développement du commerce ouest-africain.
L’expérience du Sénégal est choisie comme cas d’étude. La présente réflexion s’inscrit dans le
cadre d’une analyse globale des conditions de développement d’un système de paiements dans les
pays de la CEDEAO facilitant leur intégration économique. La première section présente la
situation de l’économie sénégalaise ainsi que les politiques commerciales et monétaires mises en
uvre au cours des années 1990. La troisième section décrit la réglementation des changes dans
l’UEMOA et les autres pays membres de la CEDEAO. La deuxième section étudie les entraves
au développement des transferts entre le Sénégal et les pays de la CEDEAO. Les réponses
privées et publiques aux dysfonctionnements sont également présentées. La conclusion présente
les principales leçons de l’étude.
2
I SURVOL DES PERFORMANCES MACROECONOMIQUES DU SENEGAL
De 1960 à la fin des années 1970, la croissance du PIB a été assez lente ; son taux annuel moyen a
été de 2,2 % à prix constants. Il s’est ensuite élevé à 3 % en 1970-79, avant de retomber à 1,8 %
en 1980-84 et de se redresser à 2,2 % en 1985-93. Depuis la dévaluation, la croissance
économique apparaît moins erratique que par le passé, mais son taux (4,9 % en 1994-2000) est
encore inférieur au seuil jugé nécessaire à la réduction de la pauvreté (DPS, 2001).
La productivité globale des facteurs a enregistré une croissance annuelle variant entre 0,5 % et
0,75 %. Si sa contribution à la croissance du PIB a été plus élevée au Sénégal (20 %) que pour
l’ensemble des pays d’Afrique subsaharienne (6 %) , elle est inférieure à celle de la moyenne des
pays en développement (26 %). Le stock de capital par actif a connu une baisse, variant de 0,2 %
à 0,8 %, résultat d’une croissance du taux de l’emploi plus rapide que celle du stock de capital par
actif (A. Diagne, G. Daffé, 2002).
L’économie sénégalaise se caractérise par un poids anormalement élevé des activités tertiaires. En
2000, alors que les parts des secteurs primaire et secondaire représentaient respectivement 19,4%
et 21,1% du PIB, le secteur tertiaire contribuait pour 50,6%. On a en outre estimé à 54,2% la
contribution du secteur informel au PIB en 1996.
Une des caractéristiques les plus marquantes de l’économie sénégalaise est le faible taux de
l’épargne intérieure : 13,3% du PIB en 1997 contre 24,7% en Côte d’Ivoire et 16,2% dans
l’UEMOA (UEMOA, 2000). On note parallèlement d’importants transferts de ressources vers
l’étranger. Ce bas niveau de l'épargne intérieure explique le recours constant aux ressources
extérieures pour financer l’investissement. A ce titre, le Sénégal fait partie des pays d’Afrique
subsaharienne qui ont reçu le plus d’aide par habitant : sur la période 1975-97, le volume d’aide
par habitant est évalué à plus de 1500 dollars. D’ou les difficultés de remboursement de la dette
extérieure dont le service est passé de 19,7% des exportations en 1981 à 50,8% en 1988.
De 1992 à 1995, la proportion des ménages pauvres est passée de 33% (selon l’Enquête sur les
priorités - ESP) à 58% (selon l’Enquête sénégalaise auprès des ménages - ESAM).
Aussi, tandis que 10% des ménages les plus riches reçoivent 44%, 40% des plus pauvres
reçoivent à peine 17% des revenus.
3
conditions d'une croissance sans modification du taux de change. La seconde, dite d’ajustement
global, sera notamment marquée par la dévaluation du franc CFA par rapport au franc français.
Les réformes mises en uvre avant la dévaluation du franc CFA n’ont pas non plus eu les effets
attendus sur les comptes extérieurs. A l’instabilité des recettes d’exportation ont correspondu une
augmentation continue des importations et leur forte composition en produits alimentaires et
pétroliers et en consommations intermédiaires.
Un des objectifs immédiats des mesures adoptées à la suite du changement de parité du franc
CFA a été de contenir les tensions inflationnistes, ce qui a été rendu possible grâce à la bonne
maîtrise des agrégats monétaires et des coûts salariaux.
La reprise des aides budgétaires intervenue par la suite a également permis de compenser le
déficit budgétaire global et la faiblesse des ressources internes destinées à financer les
investissements publics. La dévaluation a surtout entraîné un accroissement du volume total des
exportations grâce au tourisme et à la forte augmentation des prix des exportations
traditionnelles.
Si les réformes entreprises dans la période 1985-93 ont permis de porter le taux de croissance du
PIB à 2,2% par an, il a fallu attendre la dévaluation du franc CFA de 1994 pour assister à une
véritable relance de la croissance qui est passée à 5% en moyenne dans la période 1994-2000. Le
4
taux de croissance du PIB par tête a en conséquence augmenté en passant de –0,9% dans la
période 1985-92 à 2,1 % entre 1994 et 2000 (tableau A 2.1, p. 207).
Quant à la Nouvelle politique industrielle (NPI), son application s'est finalement limitée à la
libéralisation des prix et du commerce. Quant aux mesures relatives à la déréglementation du
marché du travail, à l'amélioration du cadre juridique et administratif, à la réduction du coût des
facteurs et à l'octroi de subvention à l'importation, elles n'ont été exécutées que partiellement.
La réforme du secteur bancaire a été considérée comme l’une des mieux réussies de celles qui
ont été entreprises au Sénégal. Elle a notamment entraîné la fermeture de sept banques sur les
quinze que comptait le pays. On doit l’exécution des mesures prévues à la forte implication de la
BCEAO dans le processus de réforme. Mais si la restructuration du secteur a permis aux banques
de retrouver des niveaux de solvabilité et de rentabilité acceptables, elle ne leur a pas fait jouer un
rôle accru dans le financement du développement.
En ce qui concerne la réforme du secteur parapublic, si de 1987 à 1991, seules 19 entreprises sur
les 40 prévues ont pu être privatisées ou liquidées, le mouvement s’est intensifié par la
restructuration/privatisation, entre 1996 et 1999, de 12 des plus grandes entreprises publiques
dont la Société Nationale des Eaux et la Société Nationale des Télécommunications.
Après la dévaluation du franc CFA, les pressions inflationnistes ayant été plus défavorables aux
produits locaux qu’aux produits importés, ces derniers sont restés globalement plus compétitifs
sur le marché domestique que les premiers. Contrairement aux attentes, il n’y a donc pas eu de
substitution des productions locales aux importations. D’où la forte croissance des importations
observée après 1994.
Par ailleurs, rien dans l’environnement dans lequel évoluent les agents économiques n’ayant
réellement changé (infrastructures, procédures administratives et judiciaires, etc.), peu
d’investisseurs ont été attirés par le marché sénégalais. Faute d’une réelle volonté politique pour
préserver l’ordre public et pour combattre la corruption, l’insécurité dans la vie quotidienne et
5
l’anarchie dans les espaces publics, les performances des entreprises sont de plus en plus
affectées.
Le net recul des banques de développement 2 dont la qualité de la gestion était de plus en plus
décriée a coïncidé avec une plus forte implication des investisseurs privés nationaux et étrangers
dans le capital des institutions financières. Cet intérêt du secteur est motivé par la réorientation de
la politique communautaire de gestion de la monnaie et du crédit qui privilégie les instruments de
marché au détriment des mécanismes administratifs.
Par ailleurs, l’activité bancaire est nettement concentrée autour d’un faible nombre de banques.
Les banques opèrent ainsi dans un marché oligopolistique où très peu d’institutions collectent
l’épargne et octroient du crédit. En outre, les principales banques sont des filiales de banques
françaises telles que la Société Générale, la Banque Nationale de Paris (BNP) et le Crédit
Lyonnais. Ceci n’est pas sans conséquence sur la structure du commerce international du Sénégal.
La BCEAO a cherché à introduire une plus grande concurrence dans le système financier grâce à
l’adoption en 1993 d’une réglementation spécifique aux mutuelles d’épargne et de crédit.
L’avènement du marché financier régional constitue aussi un pas dans cette direction. En ce qui
concerne les banques, les nouvelles orientations de la BCEAO ont permis l’arrivée de nouveaux
intermédiaires : ECOBANK et la Bank of Africa (BOA) ont récemment déjà ouvert chacune une
agence à Dakar.
A la date du 30 juin 2001 le secteur bancaire sénégalais comporte 10 banques représentées par 54
agences à travers le pays pour un total de bilan de 623 milliards. La répartition géographique des
banques laisse apparaître leur forte concentration dans les zones urbaines. Les zones rurales sont
très faiblement bancarisées. Les banques assurent quasiment l’exclusivité des transactions
financières liées au commerce international. Elles sont en majorité des filiales de banques
françaises avec un réseau de banques correspondantes dans les pays de la sous-région,
notamment au sein de l’UEMOA.
La participation des banques sénégalaises dans le financement de l’économie est réputée faible.
Par exemple, la part du crédit bancaire dans le PIB fluctue autour d’une moyenne de 13% depuis
la restructuration du secteur bancaire en 1986.
1
Histoire de l’UMOA, Bilan et Perspectives , tome 3
2
La distinction entre banques commerciales et banques de développement a disparu dans les textes de la
BCEAO depuis 1975, mais dans la réalité, certaines institutions de la zone remplissent des missions autrefois
dévolues aux banques de développement.
6
I.2. LES POLITIQUES ECONOMIQUES ET COMMERCIALES
Quatre objectifs principaux sont assignés à la politique des réserves obligatoires dans
l'UEMOA:assurer le contrôle quantitatif de la liquidité bancaire ; faciliter la nouvelle politique des
taux d’intérêt ; accroître la sécurité du système financier ; orienter la structure de l’épargne et du
crédit.
A l’instar de la politique d’open market, cet instrument n’a jamais été utilisé par la BCEAO.
Les objectifs de la nouvelle politique des taux d’intérêt sont généralement ceux prêtés à la
politique monétaire, à savoir : l’allocation optimale des ressources financières des états, la stabilité
interne et externe de la monnaie en vue de favoriser une croissance durable de l’activité
3
La BCEAO a la possibilité de conduire des opérations d’open market ; cependant elle ne l’a encore jamais fait.
Elle vise les objectifs théoriques de l’open market grâce au système d’adjudication qui est une forme particulière
de cet instrument de politique monétaire.
7
économique permettant de concilier le plein emploi et la consolidation de la situation des
paiements extérieurs.
La nouvelle politique des taux d’intérêts s’appuie sur les instruments que sont : une utilisation des
taux directeurs propres à l’institut d’émission, la libéralisation des conditions de banque et le
marché monétaire rénové.
Le marché monétaire
Le marché monétaire de l’UEMOA a été institué depuis le 1er juillet 1975 avec pour principaux
objectifs de fournir aux intervenants un outil de gestion de leur trésorerie, de promouvoir la
mobilisation de l’épargne intérieure grâce à une politique appropriée de taux d’intérêt et de
favoriser le maintien ainsi que le recyclage optimal des ressources excédentaires dans l’Union.
Depuis octobre 1993, le marché monétaire fonctionne selon une procédure d’adjudication à la
française, dite d’enchères régionales, organisée au niveau de l’ensemble de l’UEMOA. Il s’agit
d’un système de double enchères ouvert simultanément aux offreurs et aux demandeurs de
ressources. Ce système permet de dégager le profil de l’offre et celui de la demande et de
déterminer le volume échangeable de liquidités ainsi que le taux d’intérêt correspondant à ce
volume.
Les intervenants sont les banques primaires, la Banque Ouest Africaine de Développement
(BOAD), les caisses d’épargne ayant une autonomie de gestion, les sociétés de capital risque ou
de caution mutuelle, les fonds de bonification et de garantie à statut d’établissement financier, les
institutions financières mutualistes ayant un compte courant à la BCEAO. La réforme du marché
monétaire vise une mobilisation et une allocation optimale de l’épargne intérieure dans le but de
réduire la contribution de la monnaie centrale dans le financement du développement.
Pour assurer la stabilité financière du marché et la protection des investisseurs, la BCEAO a érigé
des critères d’admission des entreprises à la côte officielle4. La sévérité de ces critères a bridé le
dynamisme attendu de ce marché dont le bilan d’étape montre qu’il n’intéresse qu’une faible
proportion des entreprises et des épargnants.
4
• avoir un capital supérieur à 100 millions de francs CFA;
• avoir un chiffre d’affaires supérieur à un milliard de francs CFA;
• avoir des états financiers certifiés pour les trois derniers exercices;
• avoir de bonnes perspectives de rentabilité;
• avoir distribué au moins un dividende lors des trois derniers exercices.
8
Le système des accords de classement
Le système des accords de classement remplace le régime des autorisations préalables. Les
accords de classement permettent le contrôle a posteriori des crédits distribués par le système
bancaire. L'objectif est d'inciter les banques à détenir des actifs sains et à veiller à la qualité de leur
portefeuille. Un accord de classement est nécessaire à toute banque, chaque fois qu'elle voudra
émettre un crédit à un même bénéficiaire portant l'encours total des crédits à ce dernier au-delà
d'un certain seuil, variable selon les pays. En deçà de ce seuil, la faculté est laissée au banquier de
solliciter ou non un accord de classement. Toutefois, il est exigé des banques que l'encours des
crédits bénéficiant d'accords de classement couvre au moins 60% de l'encours total des crédits
bruts octroyés. Ce ratio prudentiel est appelé ratio de structure de portefeuille.
La mise en application du système des accords de classement est très récente. Il est donc difficile
d'en faire une analyse factuelle. Cependant, sur les trois années où ce système a été effectivement
appliqué, les banques n'ont pas respecté le ratio de structure de portefeuille.
C'est dans un tel contexte que la NPI a été adoptée au milieu des années 1980. Elle avait pour
objectifs d'améliorer la compétitivité des entreprises industrielles ainsi que leurs performances en
termes de valeur ajoutée et de création d'emplois. Les mesures de politique économique prévues à
cet effet consistaient à libéraliser le secteur par la suppression des barrières non tarifaires et la
baisse des tarifs douaniers, diminuer le coût des intrants, rendre plus aisé l'accès au crédit (mise en
place d’une ligne APEX), et simplifier les procédures administratives (création d’un guichet
unique).
Dans son contenu global, la réforme est cohérente et conforme à son objectif initial d’améliorer
le système d’incitations industrielles dans le cadre de l’ajustement. Les résultats de la NPI n'ont
pas cependant répondu aux attentes. En effet, si certaines mesures positives (dé-protection et
exposition à la concurrence) ont été appliquées rapidement, d’autres (diminution du coût des
intrants, accès au crédit) ont été soit mal appliquées, soit ajournées.
En conséquence, tout au long des années 1990-1998, le taux de croissance de l'industrie a été
inférieur à celui du PIB. La part de la valeur ajoutée manufacturière dans le PIB n’a pas dépassé
15%. On est loin du seuil critique de 25 % qui caractérise les pays émergents. Cette situation est
9
d'autant plus dommageable que le développement des activités manufacturières est un des
principaux moyens de résorber le chômage et de faire reculer la pauvreté.
Le cadre institutionnel mis en place avec les opérateurs économiques sénégalais effectuent des
transactions avec les autres pays de l’Afrique de l’Ouest dans le cadre de réglementation et de
mécanismes officiels. Ils rencontrent cependant des entraves qui rendent longs et coûteux les
transferts de capitaux.
Cependant, des initiatives sont prises aussi bien par la BCEAO que les institutions financières de
la sous-région pour mettre en place des systèmes de paiement efficaces.
Les 16 pays de l'espace CEDEAO ont au total 9 monnaies dont l'une, le Franc CFA, est
commune à 8 pays regroupés dans la zone monétaire UEMOA. Il paraît indiqué de rappeler
brièvement les dispositions essentielles de la réglementation des changes dans quelques uns des
principaux pays de la CEDEAO.
10
2.1.1.1 La réglementation des changes dans les pays de l'UEMOA
La réglementation des changes dans les pays de l’UEMOA distingue entre les opérations
courantes et les opérateurs de capital.
1. Opérations Courantes
Les formalités de change en vue d'une importation consistent à domicilier l'opération auprès
d'une banque en fournissant une facture du fournisseur et à obtenir une autorisation de change.
Sur ce point, les banques commerciales bénéficient de la délégation des autorités monétaires pour
la délivrance de l'autorisation de change. Le ministère des Finances de chaque pays membre et la
BCEAO procède maintenant par un contrôle ponctuel a posteriori.
En conséquence, l'obtention des devises pour les opérations d'importation se fait promptement.
Il est à noter que le système d'autorisation préalable n'est plus requis pour un versement
d'acomptes en vue d'une importation. Les banques commerciales ont délégation pour accorder
cette autorisation. Toutefois, une autorisation préalable reste requise pour des paiements anticipés
au titre des importations. Celle-ci n'est en fait nécessaire que pour les pays hors Zone franc,
puisque les mouvements de capitaux et les transferts sont libres à l'intérieur de la Zone franc. 5
La réglementation des changes est légèrement plus contraignante en ce qui concerne les
exportations, notamment pour celles effectuées hors de la Zone franc. Ces dernières doivent être
domiciliées auprès d'une banque commerciale et les recettes d'exportation doivent être
intégralement rapatriées sur le compte domiciliataire. Elles doivent être cédées à la BCEAO dans
un délai d'un mois suivant la date d'exigibilité du paiement.
A noter toutefois que les exportations à destination de la Zone franc ne sont soumises ni à
l'obligation de domiciliation, ni à l'obligation de rapatriement des recettes.
2. Opérations en Capital
En revanche, les investissements effectués hors Zone Franc par des résidents dans l'UEMOA,
qu'ils soient directs ou de portefeuille (y compris les investissements directs effectués par
l'intermédiaire de sociétés étrangères qui sont sous le contrôle, direct ou indirect de personnes
résidentes et ceux qui sont effectués par les succursales ou filiales) sont soumis à autorisation
préalable.
5
Il est pour le moins curieux que le rattachement du F.CFA à l’Euro par le biais du Trésor
français n’ait pas favorisé l’extension de ces dispositions à tous les pays européens membres
de l’Euro.
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Quant aux personnes morales et physiques résidentes en Zone UEMOA, elles ont la possibilité
d'ouvrir des comptes en devises auprès des banques résidentes. Cette possibilité est soumise a
l'autorisation préalable de la BCEAO.
C'est au cours de la période 1983/87 que le Gouvernement ghanéen a mis en uvre des
politiques de réformes commerciales et de changes. La surélévation du Cédi au début des années
80 a conduit à une demande excédentaire de devises sur le marché officiel de changes, problème
auquel le Gouvernement a fait face en rationnant les devises étrangères.
La dévaluation du Cédi intervenue en 1983 (de plus de 90%) n'aura pas permis d'éliminer l'écart
entre le marché officiel et le marché parallèle; le Gouvernement fut donc obligé de maintenir un
système de rationnement.
Suite aux dévaluations intervenues entre 1984 et 1987, le Gouvernement a instauré un mécanisme
d'enchères pour l'allocation des devises. Ce mécanisme a permis de réduire sensiblement les
écarts entre les marchés officiel et parallèle.
Le taux de change du cédi est déterminé par le marché interbancaire des devises. Le taux moyen
de change sur ce marché constitue le taux de référence pour les transactions officielles mais n’est
pas toujours utilisé par les banques commerciales dans leurs opérations avec la clientèle. Les taux
sont plutôt déterminés par les négociants en devises en utilisant des cotations journalières basées
sur les valeurs d’achat et de vente du dollar sur les marchés internationaux.
La Banque du Ghana, par le biais de son service des transactions internationales, enregistre et
confirme les mouvements de capitaux et administre les transactions officielles. Toutes les
opérations du secteur privé sont approuvées et effectuées par les banques commerciales.
L'essentiel des importations est effectué par lettres de crédit confirmées établies par les banques
commerciales.
La loi sur le Centre de Promotion des Investissements garantit la liberté des transferts des
dividendes et des bénéfices liés à l'investissement.
La réglementation sur le contrôle des changes au Nigéria remonte à 1962. Le taux de change du
naira était alors déterminé de manière administrative et l'allocation des devises étrangères était
basée sur le rationnement. L'Etat exerçait de même un contrôle sur les mouvements de capitaux
touchant à la fois les investissements de portefeuille et les investissements directs.
La réglementation des changes a connu plusieurs évolutions dont les plus significatives sont les
suivantes:
12
officielles devaient s'effectuer dans ce second compartiment où les allocations en devises se
faisaient par un système de quotas prédéterminés avec appel d'offres.
- juillet 1987: les deux compartiments du marché des changes sont fusionnés en un seul.
- août 1989: le Gouvernement autorise l'ouverture des bureaux de change marquant ainsi la
reconnaissance officielle des petits négociants en devises et la reconnaissance de facto du marché
parallèle.
- 1994: Face à la crise de trésorerie en devises qui frappe le pays, le Gouvernement décide la
suspension des bureaux de change; le marché parallèle n'est plus toléré; la Banque Centrale se voit
chargée du contrôle du mouvement des capitaux ainsi que du contrôle des changes. Ces contrôles
ont entraîné des restrictions sur les mouvements monétaires à l'intérieur et à l'extérieur du pays
ainsi que sur les prises de participation dans les sociétés établies au Nigéria.
C’est en janvier 1995 que des réformes fondamentales interviennent. Deux décrets rentrent en
vigueur mettant fin au contrôle des capitaux et libéralisant le taux de change. Ces décrets
éliminent le contrôle des capitaux et des changes au titre des investissements directs et de
portefeuille tout en maintenant un double marché de changes.
Sur un segment, la valeur du naira est déterminée par le marché, avec des interventions
occasionnelles de la Banque centrale, alors que sur l’autre segment du marché, la parité est fixe.
La parité fixe est utilisée pour les transactions officielles.
De nouvelles modifications ont été récemment introduites avec l'élimination du double marché
des changes; en outre, le contrôle des transactions en devises est assuré désormais par les banques
commerciales. Le naira a subi depuis de nouvelles dévaluations conduisant à une réduction
sensible des écarts entre le marché officiel et le marché parallèle.
Concernant les opérations en capital, le rapatriement des bénéfices et des dividendes est libre.
Pendant de longues années, il existait, dans la zone UEMOA, un « protocole interbancaire » qui
fixait les conditions débitrices et créditrices des banques. Les principales dispositions de ce
protocole, signé par la grande majorité des banques, étaient affichées dans les banques et
servaient de référence à toutes les opérations y compris les opérations liées aux transferts.
Au début des années 1990, les autorités monétaires ont décidé de mettre un terme à des pratiques
qui constituaient de véritables ententes telles que prohibées par les dispositions des différents
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codes de commerce. Par ailleurs, le protocole interbancaire vidait de toute sa substance le
principe de la concurrence puisque toutes les banques appliquaient les mêmes barèmes. Par
ailleurs, ce protocole renforçait, dans la zone UEMOA, l’image de cartel des banques,
essentiellement françaises.
Désormais libres, les transferts font l’objet, dans chaque banque, de tarifications particulières en
général basées sur une commission fixe et une autre proportionnelle au montant.
Il importe toutefois de préciser que ces conditions ne sont le plus souvent pas connues de la
clientèle qui les constate lorsque son compte est débité du montant du transfert et des « frais ».
Par ailleurs, et dans la pratique, même si ces conditions doivent être affichées, elles le sont très
rarement rendant ainsi difficile la comparaison entre les différentes banques. Il est toutefois admis
que les banques répercutent jusqu’à 10 fois les prestations postales et multiplient
traditionnellement par deux le coût des envois par courrier express (DHL ou autres). Tant que les
opérateurs privés ne sauront pas défendre davantage leurs intérêts et que les prestations
demandées – et facturées - seront souvent assimilées à un service rendu par la banque concernée,
la situation perdurera.
Toutefois, les opérateurs économiques rencontrés estiment que la question du coût est finalement
d’une importance marginale et la plupart des entreprises estiment être en mesure de défendre
leurs intérêts et de procéder à des arbitrages entre leurs différentes banques. Pour ce qui est en
revanche des ménages ou des petites entreprises, les conditions sont imposées et leur capacité de
négociation est pour le moins réduite.
Il s’agit essentiellement des transferts effectués entre les grandes banques françaises telles que la
BNP (Réseau des BICI), la Société Générale (Réseau des Sociétés Générales) et, à un degré
moindre, le Crédit Lyonnais.
C’est aussi le cas de certaines banques africaines à vocation régionale telles que Bank of Africa
(BOA) dont le réseau couvre actuellement le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, le Mali et le
Niger et le Sénégal. Il convient également de mentionner le groupe Ecobank qui fera l’objet d’une
présentation particulière. Les transferts effectués par ces banques à l’intérieur de la Zone
UEMOA et, plus largement, à l’intérieur de la Zone franc, s’effectuent pratiquement sans
difficultés particulières. Théoriquement au moins, les banques assurent pouvoir exécuter
rapidement les transferts ordonnées par la clientèle et avancent des délais maxima de 72 heures.
Selon ces banques, la synergie de groupe joue pleinement et la trésorerie accordée par rapport au
solde débiteur des comptes entretenus par les réseaux est en général suffisamment large pour
permettre d’effectuer les opérations par un simple jeu d’écritures.
Mieux, ces banques affirment disposer de lignes de crédit en faveur des banques membres du
réseau pour une meilleure souplesse dans la trésorerie. Cependant, depuis la première dévaluation
et suite aux rumeurs entretenues autour d’une nouvelle modification de la parité du Franc CFA,
les filiales africaines des réseaux bancaires français sont appelées à plus de vigilance dans la
gestion des positions débitrices de leurs comptes.
14
Il demeure toutefois que dans la pratique, les opérateurs économiques affirment que les délais de
dénouement des transferts dépassent très largement les maxima annoncées6.
Interrogées, les banques commerciales mettent la responsabilité des retards constatés sur la
BCEAO systématiquement jugée responsable de cette situation (cf infra identification des goulots
d’étranglement).
Par banques indépendantes, on entend des institutions à caractère national et non affiliées à un
réseau international. C’est le cas de la Compagnie bancaire de l’Afrique de l’ouest (CBAO) au
Sénégal, de la Banque internationale pour l'Afrique (BIA) au Togo, de la Banque internationale du
Mali (BIM)…
Dans les pays où elles ne sont pas installées, ces banques s’appuient sur leurs réseaux de
correspondants. Ces correspondants peuvent être des banques de réseaux ou non. Elles sont
tenues dans tous les cas, d’entretenir des comptes qui fonctionnent en ligne créditrice auprès de
leurs correspondants.
En d’autres termes, à moins d’une dérogation exceptionnelle, les ordres de transferts reçus de ces
banques ne seront exécutés que si la position du compte le permet. Cette rigidité, qui limite la
possibilité d’octroi de facilités entre banques, constitue très souvent une source de retard dans
l’exécution des transferts.
L'exemple donné ici concerne une opération de transfert entre la BICIS qui est une filiale du
groupe BNP au Sénégal, et la SGBCI, filiale du groupe Société Générale en Côte d'Ivoire.
Dans ce cas de figure, l'ordre de transfert est transmis à la filiale BNP de Côte d'Ivoire qui crédite
le compte de la SGBCI par le biais de la compensation interbancaire au niveau de la BCEAO
Abidjan. C’est par la suite que la SGBCI crédite le compte de son client.
Il est reconnu que cette procédure occasionne un retard dans l'exécution et la réception du
transfert en raison des délais liés à la compensation.
6
Il existe ainsi de nombreux cas où les transferts dans la zone UEMOA et au sein du même réseau se sont
dénoués en plus d’un mois (45 jours entre la BICI-Sénégal et la BICI-Burkina).
15
sont souvent libellés en francs français. Dans le cas où le transfert est réalisé entre deux filiales
d’une banque de réseau, par exemple la BNP, les opérations se déroulent comme suit:
a. l’importateur sénégalais donne un ordre à la BICIS laquelle débite son compte;
b. la BICIS demande à la BNP de créditer le compte de sa filiale mauritanienne, la BMCI;
c. la BMCI crédite le compte de son client.
La durée minimum pour le dénouement de l’ensemble de l’opération est estimée à quatre (4)
jours. Ce délai s’avère plutôt théorique, car au sein de la maison mère (BNP en l’occurrence),
ces opérations sont tout à fait marginales et souvent traitées avec beaucoup de lenteur. Dans
le cas où le transfert implique la BICIS et une autre banque non membre du réseau BNP,
cette dernière crédite le compte du correspondant en France de la banque mauritanienne par
le biais de la compensation interbancaire. La banque mauritanienne, une fois avisée par son
correspondant, crédite alors le compte de son client.
La durée minimum pour le dénouement de l’opération est estimée à 7 jours. Cette estimation
appelle les mêmes observations émises auparavant, les opérateurs annonçant pour leur part
des délais bien plus importants.
En deuxième lieu, on a les transferts entre un pays membre de l’UEMOA et un pays comme
le Ghana. Dans ce cas le dollar est généralement choisi comme monnaie de règlement. La
banque du donneur d’ordre s’adresse à son correspondant à New York qui est chargé de
l’achat des dollars, et du virement au profit de la banque de l’exportateur ghanéen.
En troisième lieu, on a les transferts entre un pays comme le Nigéria et le Ghana. Ce cas de
figure rejoint celui traité précédemment. Généralement, les contrats commerciaux sont
libellés en dollars, et dans ce cas il faut passer par New York; si le contrat était libellé en livres
sterling, Londres en serait le passage obligé.
Des développements qui précèdent, quelques enseignements majeurs doivent être retenus :
16
iv. Les banques justifient en général les retards constatés par les défaillances de la BCEAO
alors que cette dernière n’est pas directement impliquée lors de chacune des
opérations.
Les mécanismes de paiement internationaux n’ont pas connu d’évolutions majeures au cours des
dernières décennies dans la zone UEMOA. Ils restent marqués par l’obsolescence de la
technologie utilisée qui tourne essentiellement autour du télex.
Les banques continuent à n’être astreintes à aucune réglementation7 et se contentent, lorsque les
délais enregistrés sont jugés déraisonnables par la clientèle, d’accuser la BCEAO. Pourtant, les
mécanismes tels que décrits montrent clairement que la BCEAO n’intervient pas directement
dans l’exécution des transferts. Le rôle de la BCEAO, au sein de l’UEMOA, est de niveler les
comptes des banques en fin de période et non pas d’exécuter au cas par cas lesdits transferts. Ce
nivellement est effectué sur la base des justificatifs fournis par les banques commerciales. Si ces
documents sont conformes et que la banque désireuse de transférer des ressources dispose d’une
provision suffisante dans les livres de la BCEAO, la disposition est effectuée immédiatement.
Alors, le siège de la BCEAO, par son compte de liaison, crédite le compte de l’agence nationale
BCEAO concernée laquelle alimente le compte de la banque bénéficiaire. Ces opérations ne
sauraient dépasser 48h00 et ne peuvent pas être valablement saisies comme prétexte pour justifier
des transferts qui mettent plus de 30 jours à se dénouer.
Pour les opérateurs économiques, l’ouverture de lettres de crédit ou encore de simples transferts
d’argent constituent encore de graves préoccupations en raison de l’incertitude des délais, des
coûts souvent jugés exorbitants et enfin de l’absence de recours. Ils ont souvent le sentiment
d’être les otages impuissants des banques (commerciales comme centrales) d’autant qu’il leur est
extrêmement difficile de faire prévaloir leurs droits, faute d’un cadre juridique approprié mais
également en raison de la difficulté à identifier, dans l’ensemble de la chaîne des intervenants, les
vraies responsabilités.
Dans nombre de cas et quand l’information arrive à bien circuler, la banque émettrice renvoie à
sa banque centrale laquelle certifie avoir procédé au transfert auprès de son homologue qui
confirme avoir crédité le compte de la banque bénéficiaire. Dans ce jeu de ping-pong, l’opérateur
dépense une énergie considérable pour remonter la filière avec le risque, en raison de
l’imprécision des explications qui lui sont données, de perdre une partie de sa crédibilité auprès
de son créancier. De façon plus générale, les difficultés rencontrées dans la zone sont
incompatibles avec les exigences des affaires et certaines pratiques de la sous région sont
particulièrement archaïques.
7
Notamment en ce qui concerne le délai de dénouement des opérations.
17
Il convient toutefois de reconnaître qu’il arrive parfois que la BCEAO diffère l’exécution de
certains transferts lorsqu’ils ne sont pas suffisamment causés (ce qui est parfaitement normal), ou
encore lorsque des objectifs macroéconomiques (position des avoirs extérieurs par exemple)
doivent être impérativement atteints. La BCEAO peut également refuser d’exécuter un ordre
lorsqu’elle estime que la banque concernée n’a pas respecté les règles en matière de rapatriement
des recettes d’exportation. Ces cas sont toutefois exceptionnels et ce n’est que par ricochet que la
BCEAO ralentit les transferts.
Si une critique doit être faite à la BCEAO, elle concerne non pas les transferts mais bien le fait
qu’elle n’ait pas su recourir plus tôt aux nouvelles technologies de l’information pour moderniser
les instruments de paiement.
Les rencontres organisées avec quelques opérateurs économiques attestent du caractère obsolète
des mécanismes en vigueur et les délais de compensation méritent d’être revus au plan technique.
C’est en partie l’objet de la mission de modernisation des instruments de paiements (cf infra).
La MTOA est une société française appartenant au Groupe Bolloré. La MTOA travaille dans
nombre de pays ouest africains (Guinée, Gambie, Burkina Faso, Guinée Bissau, Bénin, Togo la
Côte d'Ivoire). Elle est également présente en Afrique Centrale.
a) Sur le Bénin : La MTOA travaille essentiellement avec trois (3) gros clients importateurs, qui
ont des comptes respectivement avec Ecobank, la BOA et la Financial Bank.
Avec le client dont le compte est domicilié à Ecobank, le paiement s'opère par lettre de crédit; la
MTOA ne rencontre donc aucune difficulté avec ce type de règlements.
Avec les deux autres clients dont les comptes sont domiciliés à la BOA et à Financial Bank, le
paiement intervient par virement. Dans ce cas, l'opération est dénouée sur une période de 7 à 10
jours, ce qui est jugé excessif. Selon notre interlocuteur, ce délai pourrait être encore plus long
pour des petites sociétés exportatrices qui ne disposent pas d'une logistique de suivi. En effet, la
MTOA a mis en place un système de Minitel qui lui permet d'obtenir la confirmation de l'ordre
de transfert de son client et de suivre l’opération jusqu’à son dénouement.
b) Sur la Gambie
Les opérations de la MTOA avec la Gambie sont facilitées par le fait que le fournisseur (MTOA)
et le client travaillent avec la même banque. L'opération de transfert se dénoue généralement en
48 heures.
c) Sur la Guinée
18
La MTOA exige du client le paiement intégral de la facture en francs français. Le client procède
au virement sur la BNP Paris. C'est une fois que le virement est effectué et confirmé par
réception de l'avis de crédit que la marchandise est livrée. Les délais de dénouement sont très
variables et dépassent parfois 15 jours. Il ne s’agit pas d’un crédit documentaire mais bien d’un
paiement anticipé avec toute les conséquences négatives qu’il comporte pour la trésorerie de
l’importateur. Par ailleurs, ce type de relation n’est possible que lorsque l’importateur a une
grande confiance en l’exportateur …ou n’a pas d’autre choix !
d) Sur la Mauritanie
Le client est obligé de venir au Sénégal après s'être procuré des Francs CFA auprès du marché
parallèle des devises. Il ne s’agit donc pas de transfert !
La MTOA travaille essentiellement avec des filiales du groupe Bolloré; en conséquence, les
opérations de transfert s'effectuent avec des filiales du même réseau bancaire. Les opérations se
dénouent entre 48 et 72 heures.
Cette société sénégalaise, qui exploite le sel marin, exporte une bonne partie de sa production
vers plusieurs pays africains. Au plan sous régional, ses exportations sont destinées au Mali, à la
Côte d'Ivoire et au Burkina, tous des pays membres de l'UEMOA. La Direction comptable et
financière rapporte qu'elle ne rencontre aucune difficulté majeure pour l'encaissement de ses
recettes d'exportation.
En dehors de la zone UEMOA, la société a exporté vers le Nigeria en 1996/97. Avec ce pays, la
société se faisait payer par lettre de crédit confirmée; cette opération s’est dénouée dans le cadre
du mécanisme AMAO.
Toutefois, la firme a arrêté ses exportations depuis lors en direction de ce pays en raison du
risque juge élevé qui entourerait ses transactions avec son client nigérian, notamment en ce qui
concerne la confirmation des lettres de crédit.
SEDIMA
La SEDIMA est une entreprise sénégalaise spécialisée dans la production avicole. Elle exporte
une partie de sa production dans la sous-région qui représente sans aucune doute l’avenir de
l’entreprise en termes de croissance.
19
b) Sur la Gambie et la Guinée: dans ce cas de figure, c'est le client qui fait le déplacement et paie
en francs CFA au moment de la livraison. Ce type de relations commerciales est vivement
déploré par les deux parties. Une solution envisagée par la SEDIMA est d'ouvrir un compte
bancaire en Gambie.
Sur le Mali: les exportations vers ce pays sont réglées par virement bancaire; toutefois, l'avis de
crédit est reçu que deux (2) ou trois (3) semaines après notification de l'ordre de transfert du
client. Cet état de fait crée d’inutiles tensions commerciales. La Sédima déplore particulièrement
l'absence de communication de sa banque.
Ces exemples sont d’autant plus révélateurs de la réalité des transferts monétaires qu’il s’agit
d’entreprises importantes ayant la capacité de suivre et de contraindre les banques à faire preuve
de diligence. En dépit de leur poids relatif, elles éprouvent les pires difficultés et certains
entrepreneurs ont avoué que les incertitudes notées en matière de transferts expliquent leur
prudence en ce qui concerne le développement de leurs activités dans la zone CEDEAO en dépit
d’un potentiel reconnu.
Il est remarquable de noter que les pesanteurs constatées ne concernent pas spécifiquement la
zone CEDEAO hors UEMOA et qu’il existe des cas où les transferts entre le Ghana et le Sénégal
sont plus rapides qu’entre deux banques appartenant au même réseau à l’intérieur de l’UEMOA.
Les mécanismes de paiements internationaux sont lents, coûteux et incertains parce qu’aucun
effort particulier n’a été fait pour moderniser les systèmes, les banques étant orientées vers les
opérations entre le nord et le sud, le commerce régional ne faisant pas partie des priorités.
Plus grave, le commerce invisible entre les pays de la CEDEAO n’est pas appréhendé
statistiquement et accroît la non transparence des économies. Des conséquences dommageables
en découlent pour celles-ci.
D’abord, il est difficile d’estimer correctement les flux et donc les potentialités de développement
de certaines filières. A titre d’exemple, une entreprise sénégalaise préfère importer 15.000 tonnes
de maïs des Etats Unis plutôt que de prendre des risques inconsidérés avec des producteurs
20
maliens8. L’exemple vaut pour le riz entre les deux pays. Il est finalement choquant que ces pays
réputés pour la faiblesse de leurs exportations continuent à ne pas pouvoir saisir les opportunités
alors que les marchés existent.
Enfin, au plan fiscal, cette informalisation est également forte de dangers dans des pays où plus
de 50 % des recettes de l’Etat proviennent de la douane.
Si les difficultés du commerce sous-régional ne sont pas à mettre intégralement sur le compte des
dysfonctionnements notés en matière de paiements, à l’évidence, l’archaïsme des moyens utilisés
handicape très sérieusement le développement des échanges sous-régionaux. Il est ainsi sans
aucun doute beaucoup plus facile de procéder à une importation d’Europe, des Amériques ou de
l’Asie que d’un pays voisin.
Cette réalité se reflète dans la structure de la balance commerciale d’un pays comme le Sénégal
dont la propension à importer est croissante – malgré la dévaluation intervenue en 1994. C’est le
lieu de s’interroger sur les choix arrêtés en matière d’intégration économique, très institutionnels,
alors que dans les pays d’Asie du Sud Est, la régionalisation des marchés a été préférée.
Dans tous les pays du monde, les banques centrales poursuivent un objectif majeur, celui de
l’accélération de la scripturalisation de la monnaie. Cette scripturalisation vise à réduire le poids
relatif de la monnaie fiduciaire dont les coûts d’entretien sont exorbitants. Par ailleurs, elle permet
une plus grande sécurité dans les paiements, quelque soient les montants.
Dans la zone CEDEAO, les difficultés liées aux transferts monétaires et surtout le peu
d’instruments disponibles font que la préférence pour la liquidité est une réalité coûteuse pour les
banques centrales. S’il est très difficile d’obtenir des chiffres précis, la BCEAO reconnaît que le
budget annuel lié à l’entretien de la circulation fiduciaire est très élevé puisque se situant entre 10
et 15 milliards de francs CFA soit ….% de la circulation fiduciaire dans l’univers en 2001. Ainsi et
en raison de l’importance en volume des billets de banque et des altercations qui leur sont
infligées, la BCEAO consacre d’importantes ressources au traitement des billets (comptage,
destruction et remplacement).
Il est donc indispensable de mettre en uvre des mécanismes permettant à la fois l’augmentation
du volume des paiements scripturaux et la baisse de l’usage de la monnaie scripturale.
8
Ces importations représentent un montant moyen annuel de plus d’un milliard de F.cfa
21
que les revenus générés. Il n’est pas inutile de rappeler que c’est par ce type de mesure que la
scripturalisation de la monnaie a été accélérée en Europe (obligation d’acquitter les factures
d’électricité par chèque en France après la Seconde guerre mondiale).
Par ailleurs, il est important que les banques soient motivés à augmenter l’usage des moyens de
paiement scripturaux. Cela suppose cependant que des campagnes de promotion et d’information
démontrent la crédibilité des moyens scripturaux, que des sanctions exemplaires soient prises en
cas d’utilisation frauduleuse et surtout que les lois de commerce soient modifiées afin d’interdire
l’usage du fiduciaire pour tout paiement au-delà d’un certain montant. Il n’est pas inutile de
rappeler qu’au terme des dispositions du code sénégalaise des obligations civiles et commerciales,
au delà de 80.000 francs CFA, toutes les transactions doivent faire l’objet d’une préconstitution
de preuve, c’est à dire d’un écrit.
Des mesures coercitives sont nécessaires d’abord pour fixer des seuils et veiller au bon
fonctionnement des mécanismes. Cela présente un grand intérêt pour les banques, assiégés en fin
de mois pas des clients qui retirent leur virement mensuel alors qu’il est plus indiqué de favoriser
le paiement par chèque mais surtout par carte bancaire. Par ailleurs, les banques devraient être
invitées non seulement à favoriser le développement des cartes bancaires mais également à
harmoniser leurs investissements de façon à ce que les terminaux de paiement installés chez les
commerçants tout comme les distributeurs de billets soient compatibles. L’absence de dialogue
actuel entre les terminaux des différentes banques réduit le potentiel d’exploitation de ces
techniques et renchérit le coût des transactions puisque chaque banque procède à ses propres
investissements.
Les difficultés des banques à effectuer des transferts ainsi que le faible taux de bancarisation ont
grandement favorisé le développement des services de transferts express qui, adossés à des
banques conventionnelles, mettent à la disposition des particuliers des services rapides et dans
l’ensemble, efficaces. Ces services rencontrent actuellement un grand succès quoique leur coût
soit très élevé. Ainsi, dans la zone UEMOA, un transfert portant sur un montant de F.CFA
500.000 sera facturé à environ 30.000 soit 6 % du montant, ce qui est considérable. Le succès de
ces services montrent toutefois que le besoin est réel.
Il est impossible de préciser le volume des flux ainsi effectués puisque les transferts rapides, dans
la zone UEMOA, sont adossés aux banques et apparaissent dans les comptes de trésorerie au
même titre que les autres opérations de transferts notamment. De l’avis général des banquiers, ces
transferts rapides constituent une excellente source de revenus ne remplace pas dans les
transactions commerciales. Les transferts rapides sont surtout destinés aux particuliers et sont de
peu d’utilité pour les entreprises.
Ecobank est un groupe bancaire fondé en 1985, ayant son siège au Togo. Il s’agit, à l’origine,
d’une initiative de la Fédération des Chambres de Commerce de l’Afrique de l’Ouest qui voulait
apporter une contribution au développement inter-régional en Afrique de l’Ouest. La première
banque a été créée au Togo en 1988. Aujourd’hui, le groupe est opérationnel dans les pays
suivants : Côte d’Ivoire, Ghana, Togo, Bénin, Nigéria, Burkina Faso, Mali, Sénégal, Niger,
Guinée, Libéria et Cameroun. ECOBANK couvre donc 7 pays de l’UEMOA, trois pays
anglophones membres de la CEDEAO, la Guinée ainsi qu’un pays membre de la CEMAC.
22
La stratégie d’Ecobank est de devenir l’institution financière de référence en Afrique de l’ouest,
d’utiliser cette position comme tremplin pour une expansion dans d’autres pays africains, et dans
le monde. Pour les entreprises ayant des activités dans l’espace CEDEAO, Ecobank, s’efforce de
se positionner comme banque partenaire unique. Un accent particulier a été mis par ECOBANK
sur le développement d’un système de transfert rapide au sein de son réseau.
Les performances d’Ecobank en matière de transfert sont excellentes ; les opérations entre filiales
du groupe sont effectuées dans la journée. Avec une institution financière non membre du
groupe, les transferts sont exécutés et dénoués en 48 heures. Des exemples récents nous ont été
communiqués, notamment le cas d’un transfert pour le compte d’une société pétrolière entre le
Sénégal et la Côte d’Ivoire pour un montant de CFA 500 millions, un cas de transfert entre Dakar
et une ville de l’intérieur du Nigéria où le groupe dispose d’un réseau d’agences très dense.
Les performances de la banque tiennent aux facteurs suivants : i. Chaque filiale du groupe est
dotée d’un bureau spécial dénommé Rapid Transfer ; ii. Toutes les agences et filiales du groupe
sont reliées par un système de communication par satellite (VSAT) ; iii. Le Groupe est en outre
connecté au Reuter, lui assurant ainsi une présence sur toutes les principales places financières du
monde ; iv. La forte synergie existant entre le groupe et les filiales permet aux filiales de procéder
à des opérations de transferts en s’appuyant sur le pool de trésorerie géré par le siège du groupe
sans attendre la couverture de la banque centrale.
Il est important de noter que l’émergence d’une banque à vocation régionale a bouleversé la
réalité des transferts dans la sous-région. Alors que par le passé nombre d’arguments ont été
avancés pour justifier le maintien du statu quo – et partant des maigres performances – ,
ECOBANK a apporté la preuve que les questions de convertibilité des monnaies, les barrières
liées à la langue… étaient hautement artificielles et pouvaient être facilement supprimées.
Parce qu’ECOBANK a décidé de faire de la sous-région son fonds de commerce, elle a investi
dans les nouvelles technologies de communication pour pouvoir, au sein de son réseau, effectuer
des transferts en moins de 24 heures. Il s’agit d’une révolution silencieuse qui a véritablement
changé la vie de nombre d’entrepreneurs.
En effet, à côté des transferts, ECOBANK a développé des produits parfaitement adaptés à la
réalité du marché comme les chèques de banque. Au lieu de voyager avec de gros montants, un
opérateur peut verser à ECOBANK une somme en échange de laquelle lui est remis un chèque
de banque que l’opérateur pourra tirer sur n’importe quelle agence ECOBANK, le tout sans
même disposer nécessairement de comptes bancaires.
Dans la zone UEMOA, les performances d’ECOBANK sont cependant limitées par les
restrictions de la BCEAO en matière de position extérieure. ECOBANK a toujours milité pour
un contrôle a posteriori et donc une autorisation à la fois globale et préalable permettant au
groupe de procéder sans limitation aux transferts demandés par la clientèle avec nivellement par
période convenue. ECOBANK souhaite que le règlement des soldes résiduels soit facilité, ne
nécessite pas d’autorisation préalable, puisse être effectué en monnaie locale et dans les limites
d’un quota fixé banque par banque.
L’instrument chèque de voyage a été récemment lancé et, comme tout chèque de voyage, permet
d’obtenir des espèces ou d’acquérir des biens et services. Libellé en UCAO, il est destiné à
faciliter les échanges dans la sous-région et à éviter le transport physique d’espèces.
23
Les premiers résultats enregistrés ne sont guère encourageants. Vendu par les banques, cet
instrument semble être pour l’instant boudé par les voyageurs pour des raisons pas toujours
clairement exprimées. Il semble que ces banques n’assurent pas une promotion réelle de ce type
de chèque. Par ailleurs, certaines banques se plaignent de l’appellation CEDEAO souvent
assimilée par des opérateurs à bureaucratie et qui a donc une connotation péjorative. Certaines
banques admettent cependant que cet instrument ne présente aucun intérêt particulier par
rapport aux chèques de banque type ECOBANK, à l’exception des pays où cette dernière n’est
pas présente et, même dans ce cas, d’autres instruments existent.
Par ailleurs, certains opérateurs reconnaissent que ce type d’instruments, parce qu’il est officiel, ne
permet pas de jouer sur les différents taux de change. Enfin, et de façon confidentielle, certains
banquiers reconnaissent qu’il manque l’essentiel à ce support, à savoir la confiance parce que son
impression au Nigéria suscite de grandes appréhensions.
Parce que les systèmes de paiement sont globalement inefficaces dans la sous-région, un certain
nombre d’initiatives importantes sont en cours.
Comme on l’a expliqué ci-dessus, les relations entre la banque et sa clientèle ne sont pas régies au
Sénégal par des dispositions spécifiques depuis la disparition du protocole interbancaire. Il résulte
de ce vide juridique qu’aucune règle écrite n’existe notamment en ce qui concerne les obligations
des banques qui, de façon très discrétionnaire (mais concertée entre elles), fixent d’autorité des
règles pas toujours connues à l’avance par la clientèle. Ainsi, en matière de transfert par exemple,
les banques ne sont astreintes à aucune performance et en cas de retard, le client n’a pas d’autre
recours que de se rendre régulièrement auprès de sa banque laquelle est maître de l’information
qu’elle lui donne. Dans tous les cas de figure, le compte du client est débité dès que la demande
de transfert est acceptée par la banque.
Le seul autre recours possible est de nature contentieuse. D’une part, cette procédure compromet
définitivement la relation commerciale l’entrepreneur s’exposant à des mesures de rétorsion
parfois dommageables pour lui, avec très peu de chance de rentrer dans ses droits. En effet, et
parce que la banque n’est pas tenue d’effectuer ladite opération dans des délais spécifiés, le juge
apprécie la situation en fonction des « usages commerciaux ». Cela lui laisse une très grande
liberté d’appréciation. D’autre part, la défense des banques est renforcé puisqu’il leur sera
toujours possible de montrer de pires exemples.9
Pour cette raison, le Comité de Réforme juridique (CRJ) mis en place avec l’appui de la Banque
mondiale, a entrepris la rédaction d’une nouvelle charte bancaire ayant pour mission de codifier
les relations entre la banque et sa clientèle de manière à clarifier les droits et obligations de
chaque partie. Cette charte n’est toutefois qu’un projet. Il est souhaitable qu’à terme et si les
résultats étaient probants, cette expérience puisse être généralisée. Ce projet touche à sa fin et
aucune assurance n’a été donnée quant à sa poursuite. Il serait dommage que les travaux menés
dans le cadre du CRJ n’entrent pas dans le droit positif sénégalais et des autres pays d’Afrique de
l’ouest.
9
Sur cette question, le contentieux né entre les entreprises et les banques lors de la dévaluation n’a certainement
pas renforcé la confiance du secteur privé. Pour beaucoup d’entrepreneurs, à tort ou à raison, l’idée d’une
complicité entre les banques, centrale comme commerciale est désormais bien ancrée avec la conviction de
toujours devoir faire les frais de leur entente cordiale.
24
2.4.2 Le projet de modernisation des instruments de paiement de la BCEAO
La BCEAO est sensible aux critiques émises. Elle reconnaît qu’il n’existe pas à l’heure actuelle
dans la zone UEMOA un système suffisamment organisé pour opérer les transferts de montants
élevés avec sécurité et rapidité. Elle admet également que les paiements transfrontaliers font
l’objet d’un traitement administratif trop lourd avec comme conséquence des délais
anormalement longs. Les mécanismes en place sont essentiellement basés sur un système de
compensation qui ne traite que partiellement les instruments de paiement.
Face à toutes ces insuffisances, la BCEAO a décidé de bâtir un nouveau système, cohérent et
sous-régional, dont les principaux objectifs sont les suivants : accroissement de la sécurité des
paiements ; développement du marché interbancaire ; réduction des coûts de gestion ; réduction
des délais de paiement ; réduction de l’utilisation de la monnaie fiduciaire ; augmentation du taux
de bancarisation ; généralisation de l’interbancarité à l’ensemble des moyens de paiement ;
adaptation du système de paiement aux besoins des utilisateurs et aux exigences de la
globalisation des marchés.
La réforme des instruments de paiement telle qu’envisagée s’articule autour de trois axes
essentiels : modernisation du système d’échange et de règlement des transactions de gros
montants : virement de trésorerie, transferts, opération du marché monétaire, règlement des
opérations de bourse ; modernisation du système d’échange et de règlements des transactions de
petits montants à savoir les paiements de masse (virements, chèques) ; développement d’un
système de carte interbancaire.
Ces trois systèmes devront être accompagnés d’un cadre juridique et réglementaire. Leur gestion
devra naturellement respecter les normes internationales en matière de sécurité, de délais de
paiement et de gestion des risques.
La direction et le pilotage de cette réforme ambitieuse ont été confiés au sein du siège de la
BCEAO à une mission ad hoc « Mission pour la réforme des systèmes et moyens de paiement
qui bénéficie de deux structures de validation : les comités consultatifs des paiements (mis en
place dans chaque pays de l’UEMOA) qui sont tenus informés de l’avancement du projet et
formulent des observations et remarques) ; le comité des experts.
Il n’est naturellement pas possible de porter un jugement pour ce qui n’est qu’un projet et dont
les termes de référence ne sauraient être sérieusement discutés. Il demeure toutefois que la
multiplication des initiatives en la matière peut raisonnablement faire craindre non seulement une
grande dispersion d’énergie mais également la mise en place de mécanismes incompatibles entre
eux. Enfin, il paraît juste de s’interroger sur la pertinence d’une réforme limitée aux seuls pays
membres de l’UEMOA.
L’Association des banques ouest africaine a pris l’initiative de lancer un vaste projet de création
d’un mécanisme privé de compensation qui viendrait se substituer aux systèmes actuellement en
cours et aurait pour mission de pallier les insuffisances constatées dans le cadre de l’AMAO. C’est
le lieu de préciser que les banques centrales estiment que la vocation de l’AMAO n’est
certainement plus d’être une chambre de compensation réformée mais bien un instrument
privilégié de la coopération monétaire ouest africaine. Depuis les libéralisations intervenues au
cours des années 1990 en matière de réglementation des changes, le volume des opérations de
25
l’AMAO est en constante baisse, preuve s’il en était du besoin de développer d’autres
mécanismes.
La réponse à ces interrogations est d’autant moins évidente que nombre de banquiers
reconnaissent que les deux mécanismes doivent nécessairement être conçus ensemble afin que les
deux mécanismes puissent être compatibles.
Enfin, il serait extrêmement intéressant de connaître l’opinion des autres banques centrales tant
l’interconnexion du système bancaire interpelle tous les acteurs.
Une nouvelle fois, les efforts de l’UEMOA d’une part et des autres pays de la CEDEAO d’autre
part, devraient faire l’objet d’une plus grande concertation d’autant que les marchés naturels
(Sénégal/Gambie, Ghana/Burkina, Niger et Bénin/Nigéria) vont au delà des barrières
artificielles.
26
CONCLUSION
Au cours des années 1980 et 1990, l’économie sénégalaise s’est engagée dans un long processus
d’ajustement interne, puis monétaire, qui s’est traduit par une plus forte ouverture sur l’extérieur.
Les importations et les exportations, en termes du PIB, ont augmenté. La structure commerce
extérieur a changé aussi, la part de l’Afrique devenant relativement plus importante. Mais dans
l’ensemble, le commerce intra-régional est encore marginal. Beaucoup de facteurs ont été mis en
avant pour expliquer le faible volume des transactions commerciales dans la CEDEAO. L’objet
de ce papier était de mettre l’accent sur l’une des contraintes au développement du commerce
intra-régional : l’absence d’un système de paiements internationaux efficients. En étudiant le cas
du Sénégal, on a cherché à documenter le système de paiements auxquels recourent importateurs
et exportateurs résidents au Sénégal dans leurs échanges avec leurs partenaires des autres pays de
la CEDEAO.
On a montré que les banques françaises, présentes dans les pays francophones depuis la
colonisation, n’ont développé aucun produit destiné à faciliter les échanges dans la sous-région.
Par ailleurs, l’existence de réseaux bien implantés dans différents pays de la CEDEAO et formés
par des banques traditionnelles ne constitue pas un avantage particulier. Enfin, les transferts au
sein de l’UEMOA ne sont pas plus rapides que ceux avec les pays hors UEMOA. S’agissant des
coûts de transaction, les banques n’étant astreintes à aucune réglementation et le nombre
d’institutions financières étant limité, les opérateurs ont peu de moyens d’échapper à de longs
délais de transferts et à des coûts très élevés. En l’absence d’un système de paiements
internationaux performant, les entreprises recourent à des solutions telles que le commerce
informel, le paiement comptant. Du côté des institutions bancaires, des innovations ont vu le jour
comme les services de transfert express ou le chèque voyage CEDEAO. Mais soit leurs coûts
sont élevés, soit ils ne sont pas largement acceptés faute d’une confiance suffisante. L’expérience
d’ECOBANK constitue l’innovation majeure des années 1990. Investissant dans les nouvelles
technologies de la communication et implantée dans 12 pays dont 11 appartiennent la CEDEAO,
elle effectue des transferts en 24 heures. Elle a montré que l’inconvertibilité des monnaies, les
barrières linguistiques sont des obstacles au commerce intra-régional plutôt artificielles. Des
initiatives sont en cours comme la modernisation des instruments de paiement de la BCEAO ou
le projet de compensation privé au sein de l’Association des banques ouest africaines. Ces
initiatives ne contribueront pas cependant à l’instauration d’un système de paiements sous-
régional efficient si elles ne sont pas coordonnées. Le transfert de moyens de paiement d’un pays
à un autre revêt un rôle crucial dans le commerce sous-régional dans la mesure où il est un
préalable au mouvement de marchandises. De l’existence ou non d’institutions assurant le
fonctionnement d’un tel système de paiement dépendra en conséquence, dans une large mesure,
le développement du commerce sous-régional.
27
BIBLIOGRAPHIE
A. Greif (1996) : “Contracting, enforcement and efficiency : economics beyond the law”. Dans
M. Bruno et B.P leskovic (sous la direction de), Annual World Bank Conference on
Development Economics, pp 239-778, Washington D.C., World Bank.
Abdoulaye Diagne et Gaye Daffé (éds) (2002) : Le Sénégal en quête d’une croissance durable,
CREA-Karthala, Dakar, Paris.
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