10 Thalass

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Hématologie biologique (Pr Marc Zandecki) Faculté de Médecine – CHU 49000 Angers France

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Les syndromes thalassémiques

Les thalassémies sont des maladies héréditaires (autosomales) de l’hémoglobine


caractérisées par la diminution ou l’absence de production de l’une des chaînes de globine normales
(le plus souvent α ou β).
Le déséquilibre du rapport entre la quantité de chaîne synthétisée normalement et la quantité
de chaîne déficitaire induit une érythropoïèse inefficace, responsable de la physiopathologie.

Il existe deux catégories majeures, en fonction du type de chaîne de globine atteinte :

• les α thalassémies, dans lesquelles un ou plusieurs gènes de la globine α sont


déficitaires, s’observent plus fréquemment en Afrique et en Asie du sud-est

• les β thalassémies, dans lesquelles un ou deux gènes de la globine β sont


déficitaires, sont observées plutôt dans le bassin méditerranéen et en Asie du SE.

Les thalassémies constituent la maladie génétique la plus fréquente au


monde, avec plus de 300 millions de porteurs. La répartition géographique des α-thalassémies se
superpose à celle du plasmodium falciparum, et les patients homozygotes sont plus résistants au
paludisme.

Les signes cliniques sont en grande partie fonction du nombre de chaînes de


globine mutées ou déficientes, allant de l’affection inapparente (hétérozygote) jusqu’à des
formes très sévères d’anémie hémolytique microcytaire, dépendant de transfusions sanguines
répétées (une partie des homozygotes). En outre, l’affection étant fréquente, il existe de nombreux
doubles hétérozygotes pour la thalassémie et une hémoglobine anormale, avec ou sans expression
clinique.

En France, les thalassémies asymptomatiques sont relativement fréquentes et se caractérisent


essentiellement comme des microcytoses sans anémie ou avec anémie modérée ; les formes sévères
sont surtout observées au bord de la Méditerranée.

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Les β thalassémies.
Sommaire :

- Physiopathologie
- β thalassémie majeure, homozygote (M de Cooley)
- β thalassémie intermédiaire
- β thalassémie hétérozygote
- formes apparentées aux β thalassémies

1. Physiopathologie
1.1. Aspects moléculaires
Au cours de l’ontogenèse :
Lors du passage de l’état embryonnaire à l’état fœtal :
Commutation ε → γ et ζ → α (vers 10 semaines de gestation)

Lors du passage de l’état fœtus à celui de nouveau-né (adulte) :


Commutation γ → β (peu avant la naissance)

Les divers gènes de globine sont petits (3 exons et 2 introns) et régulés de manière classique (avec
promoteurs, activateurs, silencers) et des facteurs de transcription (FT ; GATA-1 et NF-E2) activent
ces gènes. Un grand nombre d’anomalies moléculaires peut perturber l’expression d’un ou plusieurs
gènes de globine.

Il y a un seul gène β sur chaque chromosome 11 (qui porte aussi les gènes ε, δ, et γ) ; la
région régulatrice particulière appelée LCR (locus central region) contient les sites hypersensibles sur
lesquels se fixent les FT.

Plus de 200 anomalies géniques différentes sont connues, conséquence de


nombreux mécanismes moléculaires reliés essentiellement à des mutations, et
touchant une région particulière (promoteurs, LCR, introns, exons, …), et aboutissant :

• soit à une absence totale de production de la β globine par le gène


• soit à une perte importante de la capacité à produire la β globine

Remarque : les délétions complètes de gènes β sont rares, à l’inverse des α thalassémies

1.2. Les diverses β thalassémies


* thalassémie β hétérozygote : la mutation responsable d’un défaut de synthèse de chaîne β
porte sur un seul gène β

* thalassémie β homozygote : la mutation porte sur les deux gènes β ;

• β thalassémie quand il a absence totale de production de chaîne β


0

• β+ thalassémie quand il existe une production résiduelle de chaîne β.

* une forme clinique particulière : β thalassémie intermédiaire.

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L’inactivation totale ou partielle d’un ou des 2 gènes β aboutit aux divers phénotypes.

Remarques.
- A côté des mutations il existe plusieurs anomalies structurales. Les plus importantes sont le
résultat d’un crossing over inégal entre les gènes δ et β, aboutissant à la formation des gènes Lepore
(produisant une globine avec partie N terminale de δ et C terminale de β) et anti Lepore (l’inverse).
Ces 2 gènes ayant également diverses sous structures, ils donnent naissance à plusieurs types d’Hb
anormales. Les gènes Lepore et anti Lepore ont une aptitude à la production de chaîne de globine
respectivement 10 et 5 fois moindre que celle du gène β globine normal.

1.3. Conséquences sur l’érythropoïèse


Les anomalies géniques induisent une diminution ou une absence de production de
chaîne β , alors que la production de chaînes α est normale, aboutissant à un excès et la
formation de tétramères α4 instables.

Les tétramères α4 s’oxydent et précipitent dans le cytoplasme des érythroblastes


(inclusions particulières appelées hémichromes), qui induisent l’apoptose excessive des
érythroblastes. En outre des altérations membranaires des érythroblastes libèrent des lipides à effet
procoagulant et prothrombotique, et sont responsables d’une rigidité excessive des GR (éliminés plus
rapidement du sang périphérique).

Chez l’hétérozygote la diminution de synthèse d’Hb se traduit par la production d’hématies de taille
réduite (microcytose) et un peu hypochromes.

Chez l’homozygote l’érythropoïèse médullaire est inefficace, aboutissant à une amplification


compensatrice : hyperplasie érythroblastique et médullaire (1à 30 fois > à la normale) qui est
responsable des déformations squelettiques.

2. β thalassémie homozygote, majeure, ou maladie de


Cooley.
Maladie fréquente dans tout le pourtour méditerranéen (thalassa = mer)

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2.1. Aspects cliniques


- L’anémie apparaît 3 à 6 mois après la naissance (à la naissance, l’hémoglobine F est
majoritaire) conséquence du non remplacement de la chaîne γ par la chaîne β.

- pâleur cutanéo-muqueuse
- subictère ou ictère.

- Hépatosplénomégalie

- Aspect particulier du faciès (mongoloïde) avec déformation mandibulaire et implantation des


dents anormale. L’hyperplasie médullaire entraîne un épaississement de la voûte du crâne, (aspect en
poils de brosse à l’imagerie), un amincissement global des corticales osseuses avec élargissement
des canaux médullaires, une ostéoporose ou une ostéopénie associée.

- Infections à répétition, retard staturo-pondéral et pubertaire.

L’anémie a un caractère central (hémolyse intra-médullaire, érythropoïèse inefficace),


un caractère hémolytique, et une hémodilution (liée à l’hépatosplénomégalie) ; il y a
en outre hypersécrétion d’EPO.

2.2. Hémogramme
- Anémie majeure (4 à 7 g/dl), microcytaire (60 – 70 fl) et hypochrome ; liée à une érythropoïèse
inefficace et une hyperhémolyse.
Réticulocytes en nombre normal (< 100 giga/l).
- Sur frottis, microcytes, poïkilocytose avec annulocytes, leptocytes (= hématies en cible aplaties,
de grande taille et très pâles), hématies cible, ponctuations basophiles, et érythroblastémie.

- Plaquettes : nombre normal ou discrètement augmenté, ou diminué (hypersplénisme).

- Leucocytes : nombre normal (veiller aux érythroblastes qui peuvent perturber la numération
leucocytaire) ; parfois hyperleucocytose d’entraînement.

2.3. Myélogramme.
Hyperplasie érythroblastique considérable (60 à 90% d’érythroblastes). On peut observer des
dysmorphies des érythroblastes (présence d’une région claire dans le cytoplasme, correspondant à la
chaîne α précipitée). L’excès de chaîne α favorise l’apoptose des érythroblastes. Erythropoïèse
inefficace. Les histiocytes macrophages sont nombreux et surchargés en fer (en pratique : moelle peu
utile au diagnostic).

2.4. Biochimie.
Sidérémie et ferritinémie élevées, et bilan d’hémolyse perturbé (bilirubine libre, haptoglobine
et LDH sont augmentées)

Electrophorèse de l’hémoglobine :
β 0 thalassémie :
HbF = 50 à 95 % (cette Hb a une affinité accrue pour l’O2)
Hb A2 = 3 à 7%
β+ thalassémie (et double hétérozygote (β 0/β+):
Hb F = 50 à 80%
Hb A = 5 à 45 %
Hb A2 = 3 à 7 %

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2.5. Autres.
- Résistance globulaire osmotique : augmentée.

- Recherche de corps de Heinz (coloration avec cristal violet) positive : précipitation de l’excès
de chaînes α normales dans les GR.

- Test de Kleihauer. Résistance de l’Hb F à la dénaturation acide ou alcaline : ici on retrouve une
répartition hétérogène de l’HbF dans les hématies.

2.6. Evolution et pronostic


- L’évolution naturelle est marquée par l’augmentation de l’hépatosplénomégalie, la
survenue d’une insuffisance cardiaque et l’importance de l’hémosidérose.
Il existe également un excès d’accidents thrombotiques, liés aux effets procoagulants des
phospholipides de la membrane des GR ( 4% des pts)

- Traitement transfusionnel : hypertransfusions pour ramener l’Hb à des valeurs


subnormales (= 9-10 g/dl), pour réduire l’hypersécrétion d’EPO et les conséquences de l’hyperplasie
érythroblastique), associé au traitement de l’hémosidérose (chélateur de fer de type desferrioxamine).
Il permet d’obtenir une espérance de vie > 30 ans.

- L’allogreffe est possible avec un donneur familial, même si ce dernier est hétérozygote
(greffe de sang de cordon ou médullaire) : c’est la seule technique curatrice.
- Réactivation de la synthèse d’Hb F : avec l’azacytidine ou ses analogues, ou l’hydrea, ou la
5 fluorouracile. Mais effets carcinogènes. Encore au stade expérimental.

- Thérapie génique (recherche)

- Surveillance : carence vitaminique, réaliser un groupage et un phénotypage complet pour


les transfusions et penser à l’allo-immunisation rouge leucocytes et plaquettes.
- Le diagnostic anténatal est possible mais difficile.

3. β thalassémie intermédiaire
Correspond à un ensemble de situations génotypiques pour lesquelles il n’y a pas de
dépendance transfusionnelle :

- homozygotes ou hétérozygotes combinés pour des mutations de β thal modérée


- parfois : hétérozygotes avec 1 seul gène β anormal mais présentant une anémie

La maladie est cliniquement hétérogène (anémie ± marquée), et le point commun est


l’absence de dépendance transfusionnelle. On y retrouve les critères des β thal majeures
(anomalies osseuses, splénomégalie), l’ictère, le risque thromboembolique accru (9% des pts) et
encore augmenté après splénectomie. Mais la croissance staturo-pondérale est normale.
L’anémie est cliniquement découverte plus tardivement (vers 1-2 ans) que dans la β thal majeure.

Hémogramme : hémoglobine > 7.5 g/dl (jusque 11 – 12 g/dl)


Microcytose, hypochromie
(thrombopénie et neutropénie d’hypersplénisme dans une partie des cas).

Remarques :

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- L’association α thal avec une β thalassémie homozygote induit un phénotype atténué pouvant
correspondre à celui d’une β thal intermédiaire (surtout quand il s’agit d’une α thal mineure et d’une β+
thalassémie
- Un hétérozygote composé avec 2 gènes de β thal sévère et persistance héréditaire de l’Hb fœtale
présente un phénotype de β thal intermédiaire.

4. β thalassémie hétérozygote.
Etat asymptomatique.

Il a été rapporté un nombre accru de complications thrombotiques dans les β thal mineures.

4.1. Hémogramme.

Anémie modérée ou absente :


femme : hémoglobine = 10-12 g/dl
homme : hémoglobine = 12-15 g/dl].
Avec microcytose (60-70fl), sans hypochromie (CCMH = 32 – 34 g/dl)
Parfois, il y a pseudo-polyglobulie (NR = 5.5 à 6.5 Téra/l).

Sur frottis : microcytose, hypochromie, quelques cellules cibles, pas ou peu d’anisopoïkilocytose ;
parfois 1-2% d’érythroblastes.

Réticulocytes < 120 G/l

Leucocytes et plaquettes : nombre normal.

Remarques.
- quelques hématies ponctuées chez les pts d’origine méditerranéenne, mais pas chez les
noirs et les asiatiques.
- Hb un peu plus faible chez l’hétérozygote β0 (11.5 g/dl) que chez l’hétérozygote β+ (12.5
g/dl), expliquant l’anémie modérée chez certains patients.

On ne réalise pas de myélogramme.

4.2. Electrophorèse de l’hémoglobine.

Adulte : augm. HbA2 (3,5 - 8 %)


Hb F (1 à 2 %)

Il existe souvent une augmentation de l’absorption du fer, qui aggrave la surcharge en fer chez les
patients hémochromatosiques.
En cas de carence martiale associée (rare), il y a parfois diminution de synthèse de toutes les
chaînes, et le profil électrophorétique peut redevenir transitoirement normal. A contrôler après
correction du déficit en fer.

Un conseil génétique en pays d’endémie peut être proposé : un taux d’Hb A2>3,5% et un
hémogramme avec microcytose suffisent à détecter un porteur hétérozygote de β thalassémie.

5. Formes apparentées aux β thalassémies.


5.1. L’hémoglobine Lepore.
La forme homozygote ressemble à la maladie de Cooley,
et la forme hétérozygote ressemble à une pseudo-polyglobulie microcytaire.

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Un crossing over inégal aboutit aux chaînes de globines fusionnées δβ (Lepore) et βδ (anti-Lepore).
A l’électrophorèse, l’hémoglobine Lepore migre près de l’hémoglobine S (et un peu plus rapidement
que A2).

Chez l’homozygote, absence d’Hb A et A2, présence d’Hb F (75%) et d’Hb Lepore.
Chez l’hétérozygote : entre 10 et 20 % d’Hb anormale et 2-5% d’Hb F.

5.2. δβ thalassémies et δ thalassémies.

- Thalassémies δβ. Reliées le plus souvent à la délétion d’une partie du cluster génique qui
implique les gènes δ et β, on observe une production réduite ou absente des chaînes δ et β. La
conséquence en est une augmentation de la synthèse de chaîne γ pour essayer de compenser le
déficit en β globine. (assez grande fréquence en Grèce).

* homozygote : très rare (= maladie de Cooley atténuée)

* hétérozygote :
Pas de signes cliniques.
Hémogramme subnormal (pas ou très peu d’anémie)
Electrophorèse de l’Hb : Hb A2 : N ou dim. et Hb F : 5 – 20 %

- Thalassémies δ . Diverses mutations sur les gènes δ aboutissent à une diminution (δ+ thal) ou à
une absence totale (δ0 thal) de synthèse de chaîne δ. Il n’y a pas de traduction clinique.

5.3. Doubles hétérozygotes β thal mineure / α thal mineure (2gènes défectueux)


Asymptomatiques
Pas ou peu d’anémie
Attention : VGM normal

5.4. Hémoglobinose S / β thalassémie.

Manifestations cliniques variables, allant de formes quasi asymptomatiques à des drépanocytoses


très sévères.
La splénomégalie est fréquente, à l’opposé de l’Hb SS où il y a atrophie splénique

S / β 0 thalassémie : pas de synthèse d’Hb A

Maladie souvent sévère.


Hémoglobine : 8 – 10 g/dl
Microcytose (différence avec drépanocytose)
Réticulocytes 150 – 250 G/L (souvent > 300 G/L dans l’Hb SS)
Electrophorèse de l’Hb : augm. Hb A2 (4 – 6%) (pas d’augm. A2 dans l’ Hb SS)

S / β + thalassémie : synthèse d’Hb A en quantité faible

Maladie peu symptomatique (mais quelques formes sévères)


Hémoglobine = 10 – 11 g/dl
Splénomégalie

5.5. Persistance héréditaire de l’hémoglobine fœtale.

Etat non pathologique au cours duquel les gènes γ demeurent actifs au cours de la vie
adulte : il persiste une quantité élevée (5 – 30 %) d’HbF chez un adulte en l’absence de toute
anomalie hématologique.

Elle est liée à divers types de délétions (qui retirent) ou de mutations (qui inhibent) les gènes δ et β.

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Cliniquement asymptomatique, s’observe surtout dans la population noire :

L’hémogramme est sub normal (hétérozygote).


Il est possible d’observer jusqu’à 30% d’hémoglobine F dans la forme hétérozygote (et jusqu’à 100%
d’hémoglobine F chez les sujets homozygotes)
Le test de Kleihauer montre une répartition homogène de l’HbF dans les GR.

Remarque : il existe des formes délétionnelles (délétion des gènes β et δ) où les gènes Gγ et Aγ sont
simultanément exprimés (rapprochement d’une séquence activatrice « enhancer » située en 3’ et
normalement trop éloignée pour agir sur ces gènes) et des formes non délétionnelles où soit le gène
Gγ soit le gène Aγ demeure actif (mutation ponctuelle du promoteur d’un des deux gènes).

Les α thalassémies.
Sommaire :
- Physiopathologie
- 4 gènes α atteints : α° thalassémie homozygote (hydrops fœtal )
- 3 gènes α atteints : Hémoglobinose H :
- 2 gènes α atteints : α thalassémie mineure ou de type 1
- 1 gène α atteint : α thalassémie silencieuse ou de type 2
- Association α thalassémie et drépanocytose
- Diagnostic différentiel des syndromes thalassémiques, et conseil génétique

1. Physiopathologie
On trouve sur chaque chromosome 16 (16p13.3) 2 gènes α, presque identiques l’un à l’autre. Le gène
α1 est en 3’ et le gène α2 est en 5’ : le niveau de transcription est 2,5 fois plus élevé pour le gène α 2.

Les • thalassémies sont le plus souvent de nature délétionnelle :

• La région chromosomique qui porte les 2 gènes α contient plusieurs segments


homologues, ce qui permet une recombinaison facile aboutissant à la délétion d’un gène α et
l’absence de la synthèse de la chaîne correspondante. La production de chaîne α est plus ou moins
bien compensée selon que le gène qui persiste est α1 ou α2.
• Plusieurs types de délétions retirent tout ou partie du cluster α : le chromosome
correspondant ne peut plus synthétiser de chaîne α (perte simultanée des 2 gènes).

La délétion d’un ou plusieurs gènes α aboutit à divers phénotypes.

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Remarque : les α thal ont rarement une origine non délétionnelle : mutations ponctuelles ou
altérations oligonucléotidiques. La plus fréquente est la mutation Constant Spring (Asie du SE) où un
codon « stop » est changé, aboutissant à une chaîne α plus longue. Le phénotype est celui d’une
absence de synthèse de chaîne α par le chromosome correspondant.

Conséquences pour l’érythropoïèse.

Excès relatif de production des chaînes γ et β lié au défaut plus ou moins majeur de chaîne α :
Il se forme des tétramères γ4 (Hb Bart) et β4 (Hb H), relativement stables.

L’érythropoïèse inefficace est moins intense que pour les β thal, mais la composante hémolytique
est plus nette. Les GR sont rigides et hyperhydratés : ils contiennent des tétramères β4 (Hb H) ce qui
induit une élimination plus rapide par la rate. Ces tétramères sont colorables avec les colorants
supravitaux (bleu de crésyl brillant) : les GR apparaissent avec de nombreuses grosses ponctuations,
avec parfois un aspect en balle de golf (aspect plus net chez les splénectomisés).

2. Les 4 gènes sont atteints : Hydrops fœtal. --/--


α° thal homozygote : aucun gène n’est fonctionnel (incompatible avec la vie extra-
utérine)

Surtout en Asie du SE, où le gène « -- » est fréquent.

Cliniquement : tableau d’anasarque foeto-placentaire avec mort in utero ou très rapidement


après la naissance (hépatosplénomégalie, œdème généralisé, insuffisance cardiaque).

Le fœtus ne peut produire ni Hb F ni Hb A, et l’Hb Bart γ4 ne fixe pas l’O2, ce qui explique
l’incompatibilité avec la vie extra utérine.

Hémogramme : anémie majeure, avec hémoglobine = 3 – 8 g/dl ; VGM < 80 – 90 fl. Erythroblastose
sanguine majeure > 100 / 100 leucocytes), avec anisopoïkilocytose majeure, hématies cibles,
hypochromie…

Electrophorèse de l’Hb :
Hb Bart’s (γ4), Hb H (β4) et Hb Portland chez le fœtus ou à la naissance.

3. Hémoglobinose H : 3 gènes α atteints -α/--


Trois gènes α sont perdus

Chez ces patients on estime que la synthèse de chaînes α est diminuée de 40 - 80 %.

La synthèse excessive de chaîne β par rapport au défaut de chaîne α entraîne la formation de


complexes β4 (= Hb H) peu stables qui précipitent.

Fréquente en Asie du SE (gène « -- » fréquent), un peu moins au Moyen Orient et rare en Afrique
(gène « -- » rare).

3.1. Clinique
Anémie hémolytique dès la naissance.
Splénomégalie constante, hépatomégalie moins nette.
Ictère.

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Le traitement est rarement nécessaire, mais il faut surveiller le risque infectieux et l’utilisation
de médicaments oxydants qui peuvent amplifier l’anémie, et provoquer des crises hémolytiques. La
grossesse majore l’anémie.

3.2. Hémogramme et corps de Heinz.

Anémie avec microcytose (55 – 65 fl) et hypochromie (28 – 31 g/dl)


Majorité des patients : anémie d’importance moyenne (8 – 11 g :dl)
Minorité des patients : anémie très sévère (6 – 8 g/dl)

Le nombre des réticulocytes est augmenté : 100 – 200 G/L.

Sur frottis : hypochromie, cellules cibles, anisopoïkilocytose.

On retrouve les corps de Heinz : l’incubation des globules rouges une heure à 37° C dans le
bleu de crésyl brillant montre des précipités ponctués ayant parfois un aspect en balle de golf dans
quelques GR ( = précipités d’hémoglobine H (=β4) instable).

Le nombre de GR avec précipités est plus nombreux après splénectomie

3.3. Electrophorèse de l’Hb :

Chez l’adulte : 1 à 30% d’hémoglobine H β4.


Chez le nouveau-né, 10 à 30 % d’hémoglobine Bart’s γ4.

3.4. Autres.

Test de précipitation à l’isopropanol : précipité signalant une hémoglobine instable; non


spécifique

Bilan d’hémolyse : LDH, bilirubine sont augmentés et l’haptoglobine est abaissée.

3.5. Hémoglobine Constant Spring.

Il existe une mutation α particulière appelée Constant Spring, fréquente en Extrême-


Orient : elle correspond à une mutation sur le codon non sens terminal et aboutit à une chaîne α
allongée de 31 résidus. Le tableau se rapproche d’une hémoglobinose H peu sévère.

L’hépatosplénomégalie est retrouvée dans 50% des cas

L’anémie est modérée (9 - 11 g/dl) sans microcytose

Electrophorèse : présence d’ Hb Constant Spring

Surveiller les complications : lithiases vésiculaires, hyperuricémie, hypersplénisme.

(maladie plus grave si double hétérozygote CS et α thal mineure de type 1)

3.6. Hémoglobinose H acquise.

S’observe au cours de LAM, érythroleucémies, SMD (ARSI), LAL. Surtout sujets âgés et hommes ;
pas d’anomalie de structure des gènes alpha, mais diminution de la quantité de mRNA des chaînes
alpha
Aspect de double population érythrocytaire à l’hémogramme

Electrophorèse de l’Hb : 5 à 70 % d’Hb H


Présence de quelques GR d’aspect en balle de golf au bleu de crésyl.

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4. α thalassémie mineure ou de type 1 --/αα ou -α/-α


Deux gènes α sont perdus : α 0 thalassémie hétérozygote (--/αα), ou α+ thalassémie homozygote (-α/-
α) (hémogramme identique dans les 2 cas)
Chez ces patients on estime que la synthèse de chaînes α est diminuée de 20 – 25 %.

Cliniquement asymptomatique, souvent découverte à un hémogramme de routine.

Hémogramme : microcytose sans anémie (ou diminution modérée) ;


Aspect de pseudopolyglobulie microcytaire hypochrome (idem thal β hétérozygote).
Sur frottis : microcytose, hypochromie, cellule cibles, pas ou peu d’anisopoïkilocytose.

Electrophorèse :
A la naissance jusqu’à 5 % d’hémoglobine Bart’s.
Normale chez l’adulte (quelquefois diminution de A2 : < 2%, et hémoglobine F normale)

Diagnostic de certitude : soit sur les antécédents familiaux, soit étude in vitro de la biosynthèse
des chaînes α (irréalisable en routine), soit biologie moléculaire.

Pour le conseil génétique il faut bien séparer l’ α thal mineure et les thal β et δ mineures

5. α thalassémie silencieuse ou de type 2 -α/αα


Perte d’un seul gène α
Chez ces patients on estime que la synthèse de chaînes α est diminuée de 10 -15%.

Il s’agit de porteurs silencieux, totalement asymptomatiques sur le plan clinique.

Biologiquement : hémogramme normal (parfois discrète microcytose).


Electrophorèse de l’hémoglobine normale chez l’adulte ; on peut mettre en évidence 1%
d’hémoglobine Bart’s à la naissance (utile pour le diagnostic de porteur silencieux).

6. Association α thalassémie - hémoglobinose S


L’association d’une α thal avec une hémoglobinose S diminue la quantité d’HbS de l’hétérozygote :
absence d’anémie, mais microcytose et hypochromie

Quantité d’Hb S à l’électrophorèse

Hb S hétérozygote sans thalassémie 35 – 45 %

Hb S hétérozygote et -α/αα 30 – 35 %
Hb S hétérozygote et -α/-α 20 – 30 %
(le gène -- est très rare dans la race noire et l’HbS avec hémoglobinose H est très rare)

Hb S homozygote et -α/-α tableau de drépanocytose biologiquement moins


franc (pas de drépanocytes, hyperréticulocytose
moins franche)
mais pas de diminution de la sévérité clinique

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Diagnostic différentiel, conseil génétique

Diagnostic différentiel

Eliminer les autres causes d’anémie hémolytique avec la réaction de Coombs, la résistance
osmotique, l’autohémolyse (hémoglobinose H acquise !), les enzymopathies.
Eliminer les autres causes de microcytose : carence martiale, inflammation, les
hémoglobinoses C, D, et E (exceptionnellement une anémie sidéroblastique, mais il y a souvent une
double population de GR)

Conseil génétique et dépistage

Les techniques moléculaires permettent chez les pts dépendants des transfusions une définition
précise de l’anomalie en cause, étape essentielle au ttt le plus approprié.
Elles aident aussi le conseil génétique, en sachant qu’il n’y a pas toujours une relation étroite entre
phénotype, et génotype : dans toutes les situations difficiles il faut associer clinique, hématologie et
génétique.
L’analyse de la synthèse des chaînes de globine in vitro est réalisable (laboratoires très spécialisés)
Le diagnostic anténatal ainsi que celui des 4 niveaux de délétion est possible par PCR.
Le prélèvement de villosités chorioniques permet un diagnostic anténatal à 10 – 12 semaines.

(M Zandecki, décembre 2006)

MAJ : décembre 2006 Page 12 sur 12

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