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w 57 Le scénario

du film ,de
court métrage

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Om
w
E8

Unesco
I
L e s cahiers de la série Etudes et documents d'information sont publiés par le Département des
moyens d'information. Sauf indication contraire, les informations qu'ils contiennent peuvent être
reproduites en tout ou en partie, sous réserve que le n o m de l'Unesco soit mentionné. L e s cahiers
déjà parus, dont les titres sont énumérés ci-après, sont disponibles chez les agents généraux de
l'Unesco dans les différents Etats membres, ainsi qu'au Département des moyens d'information,
Unesco, place de Fontenoy, P a r i ~ - 7 ~ .

ETCTDES ET DOCUMENTS D'INFORMATION

NWTléto
17 Normes internationales établies pour le catalogage des films et des films iixes de caractère éducatif, scientifique
et culturel. Edition préliminaire; juin 1956 ($0,40; 2/- (stg.); 1 F). Edition espagnole : N o r m a s infernacionales
para la caialogaci6n de pelfculas y peliculas fijas. de carncier educativo. cientifico y cultural.
18 L'Appréciation des films et films fixes, m a i 1956 ($0,40;2/-(stg.); IF). Edition espagnole : Manual para la
evaluacidn d e peliculas y pelfculas fijas.
19 Liste des films recommandés pour les enfants et les adolescents jusqu'à 16 ans d'après les sélections faites dans
22 pays (épuisé).
20 Catalogue de 50 films de vulgarisation scientifique, septembre 1956 (épuisé).
21 Recherches actuelles S U T les moyens d'information, 1, avril 1957 ($1.;.5/-(stg.); 2,50F). (épuisé).
22
23
24
--
D e s périodiques pour nouveaux alphabèies Méthodes de rédaction, luln 1957 ($0,75;3/6 (stg.); 2F).
L e s programmes culturels radiophoniques Quelques expériences. d é c e m b r e 1956 ($0,40; 2/- (stg.) ; 1 F).
LeS.périodiques pour nouveaux alphabèies -Sept expériences, n o v e m b r e 1957 (épuisé).
25 L e s groupes d'éducation populaire et les techniques audio-visuelles, 1958 ($0,75; 3/6 (stg.); 2 F): (épuisé).
Edicion espagnole : Los grupos de educacion popular y las técnicas audiovisuales (épuisé).
26 L e kinescope et l'éducation populaire, 1958 (épuisé).
27 L e s auxiliaires visuels dans l'éducation de base et le développement communautaire, 1959($0,75;3/6(stg.); 2,50F).
28 L e s programmes cinématographiques pour la jeunesse, 1959 (épuisé).
29 C o m m e n t réaliser des films à peu de Irais, 1960 ($0,50; 3/6 (slg.) ; 1,75F).
30 L e développement des moyens d'information en Asie, 1960 ($1,50;7/6 (stg.) ; 5,25F).
31 L'influence du cinéma sur les enfants et les adolescents. Bibliographie internaiionale annotée, 1961 (épuisé).
32 L e film et la télévision au service de l'opéra. du ballet et des musées, 1961 (épuisé).
33 L e s moyens d'information dans les pays en voie de développement. Rapport de l'Unesco à l'Organisation des
Nations Unies, 1961. ($0,50; 2/6 (stg.) ; 1,75F). Edition espagnole : L o s medios d e informacich en América
Latina :factor de desarrollo economico y social. (épuisé).
34 L e rôle de la coopération internationale dans la production cinématographique, 1961 ($0,50;2/6 (stg.) ; 1,75F).
35 Répertoire mondial du cinéma. Institutions s'intéressant aux films éducatifs, scientifiques et culturels. 1962
($1 ; 5/-(stg.) ; 3,50FI.
36 L e s méthodes d'encouragement à la production et à la distribution des films de couri métrage destinés à une
exploitation commerciale, 1962 ($0,50;2/6 (stg.); 1,75F).
37 L e développement des moyens d'in/ormation en Alrique. Presse, radio, iilm, télévision, 1962 ( $ 1 ; 5/- (stg.); 3,50F).
38 L'éducation sociale par la télévision, 1963 ($0,50;2/6 (stg.); 1,75 F).
39 La contribution du film à l'enseignement du premier degré, 1963 ($1; 5/- (stg.) ; 3,50 F).
40 Etude SUT la création de centres nationaux de calaIogage de films et de programmes de télévision,1963 ($0.50;2/6
(stg.); 1,75FI.
41 L e s communications spafiales et les moyens de grande information. 1963 ($0.50;2/6 (stg.); 1,75F).
42 lnitiaiion aux arts de l'écran, 1964 ($1 ; 5/- (stg.); 3,50F).
43 L'influence de la télévision sur les enfants et les adolescents. Bibliographie annotée ($1; - ',5 (stg.); 3,50F).
44 Catalogues d e courts métrages et de films fzxes: liste sélective. Edition 1963 ($0.75; 4/- (stg.); 3 F).
45 La formation prolessionnelle en matière d'information, 1965 ($0.75; 6/- (stg.); 3 F).
46 L e s journaux ruraux multicopiés, 1965 ($0.75; 4/-(stg.); 3F).
47 D e s livres pour les pays en voie de développement (Asie, Afrique), 1965 ($0.50:3/- (scg.); 2,oo F).
48 La radiodiffusion au service du développemeni rural. 1966 ($0.75; 4/-(stg.); 3 F?.
49 La radiodiffusion-télévisionau service de l'éducafion ef du développement en Asie. 1967 ($1.00;5/- (stg.); 3,50F).
50 La télévision et l'éducation sociale des femmes. 1967 $1.00; 5/-(stg.) ; 3,50F).
51 U n e expérience africaine de tribune radiophonique au service du développement rural. Ghana-19 6 4 A 965 ( E n préparation).
52 La promotion du livre en Asie. Rapport sur la production et la distribuiion des livres dans la région. 1967,
($1.25;7/-(Stg.); 4F).
53 Satellites de télécommunications pour l'éducation. la science et la culture. 1968, ($ 1.00 ; 6/-(stg.) ; 3,50F).
54 L e film de 8 m m pour le public adulte. 1969,(S 1 ; 6/-(stg.)c€ O,307; 3,50F.
L'emploi de la télévision pour la ionnation technique supérieure des salariés. Premier rapport relatif à u n projet pilofe
55
en Pologne. 1966,($1.25 ; 7/-(stg.) cE0.351; 4 F.
56 L a promotion du livre en Airique. Problèmes et perspeciives ($ 1 ; 6/-(stg.)C E 0.301; 3,50F.
Le scënario
du film de
court métrage
par J a m e s A. Beveridge

Unesco
Achevé d'imprimer dans les Ateliers de
l'organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science ei la culture.
place de Fontenoy, Paris-7e
0 Unesco 1969

COM/ 69.XVII.57 F
PREFACE

U n bon scénario est indispensable à la réalisation à consacrer des cours à cette technique. U n cours
d'un bon film, qu'il s'agisse d'un court métrage de ce genre a été organisé au Film Institute of India
documentaire ou pédagogique ou d'un long métrage (Poona)en août 1967. L'Unesco a prié M. James
de fiction. L e travail de scénariste demande des Beveridge, professeur invité ayant participé à ce
compétences particulières ;il est un véritable m é - cours, de rédiger laprésente étude. M. Beveridge
tier, au m e m e titre que la direction d'acteurs, la a eu une longue et brillante carrière de producteur,
photographie ou le montage. Dans le cadre deson de scénariste et de réalisateur de films pour le Na-
programme de développement et d'amélioration tional Film Board of Canada, le Shell Film Unit en
des moyens de grande information, l'Unesco encou- Inde et le North Carolina Film Board aux Etats-Unis
rage les instituts et centres spécialisés dans le d'Amérique ;il a également été professeur à 1'Insti-
domaine de l'information à inscrire la formation tute of Film de l'universitéde N e w York. Les opi-
des scénaristes dans leur programme d'études et nions qu'il exprime ici sont bien entendu personnelles.

3
TABLE D E S MATIERES

A quel public le film s'adresse-t-il ? . . . . . . . . . . . . . . 7


Quel est l'objectif du film ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
Quel est le commanditaire du film ? . . . . . . . . . . . . . . 8
Rapports entre le scénariste et le commanditaire . . . . . . . . 9
Les recherches . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
Forme et présentation du scénario . . . . . . . . . . . . . . . 12
L e scénariste .autorité et responsabilités . . . . . . . . . . . 14
Scénario et budget . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
Scénario et équipe technique .................. 17
Dans quelle mesure le réalisateur doit-il respecter le scénario
(esquisse. plan précis ou carcan) ? . . . . . . . . . . . . . . . 18
Qualités et faiblesses du film à acteurs . . . . . . . . . . . . . 19
Les dialogues . ........................ 20
Le commentaire ....................... 22
Rythme et continuité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
Le style cinématographique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
L e contact avec le public . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
Recommandations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
Apprenez à analyser les films qui vous plaisent . . . . . . . . . 28
Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
29

Appendices :
1. Scénario original du film documentaire "JAI JAWAN" réalisé par
les services du Gouvernement de l'Inde (extrait) . . . . . . . . . 33
II. Découpage final de la m é m e séquence du film "JAI J A W A N " après
tournage et montage ; cet extrait permet d'apprécier les modifications
apportées aux idées du scénario original . . . . . . . . . . . . 35
III. Scénario original d'un dessin animé indien destiné à un public rural
et traitant de la planificationnationale ("LESREVES DE MAUJIRAM")
. extrait . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
IV . Découpage final (après montage) du film documentaire "PHOEBE"
de l'Office national du film canadien .extrait . . . . . . . . . . 41

5
V. Découpage final (après montage) du documentaire :'LESPOISONS.
L E S NUISIBLES ET L'HOMME"produit pour la télévision par
l'Office national du film canadien .extrait . . . . . . . . . . . . 44
VI. Films remarquables par l'efficacité de leur commentaire . . . . 46
VI1. Deux extraits de découpages illustrés . . . . . . . . . . . . . . 47
Les dessins stylisés. qui rappellent ceux des dessins animés.
tiennent lieu de texte écrit .

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A QUEL PUBLIC LE FILM S'ADRESSE-T-IL ? du changement social ? La question de la propriété
foncière, le charnage, les coutumes locales strictes,
Dès qu'il se met au travail, le scénariste doit sa- une certaine résistance aux autorités centrales,
voir à qui il s'adresse. Si le film est destiné à tout cela a-t-il créé des situations ou posé des
être projeté enpublic, le scénariste doit apprendre problèmes particuliers ? Il faut tenir compte de
à connaître son auditoire, c'est-à-direse mêler multiples €acteurs, posséder de multiples clés
au public, s'asseoir dans les premiers rangs, dans pour savoir ce que pense et ressent un "public".
les derniers rangs, se promener dans le hall pen- Le "public" est un groupe de personnes apparte-
dant l'entracte, écouter les commentaires des nant le plus souvent au m ê m e milieu, vivant dans
spectateurs qui quittent la salle après la projection. les m ê m e s conditions. Quel est ce milieu ? Quelles
Quelle impression les histoires qu'on lui raconte sont ces conditions ? L e scénariste, s'iln'appar-
font-elles au public ? Quels sont ses goûts - ? tient pas lui aussi à ce milieu, doit s'efforcer de
Qu'est-ce qui l'amuse 3 Quand reste-t-il silen- le connai'tre,de se familiariser avec les attitudes,
cieux, absolument attentif, captivé ? Quand le les sentiments, les goûts et les répugnances de
sent-on agité, géné, quand entend-on tousser ou ses membres. Bref, savoir à qui il s'adresse.
murmurer les spectateurs dont le film ne captive L'orateur qu'on invite à prononcer un discours
que partiellement l'attention 7 en public veut savoir d'une part à quel groupe il
Peut-être s'agit-il d'un auditoire scolaire. va s'adresser et, d'autre part, quelle en est la
Quelle est sa moyenne d'8ge 7 Combien de films composition. Il tiendra certainement compte de
les élèves voient-ils à l'école 3 D e quel type d'éta- ces renseignements dans le fond et la forme de
blissement s'agit-il ? Le maître a-t-il l'habitude son discours. L a m ê m e question se pose quand
de présenter les films 3 Toutes les classes se on fait un film. A quel public s'adresse-t-il, où
rassemblent-elles dans une salle centrale ou un sera-t-ilprojeté 7 Sur ce point, le scénariste
lieu de réunion pour assister à une projection col- doit avoir des idées fort nettes et précises.
lective ? Ou bien les films sont-ils projetés dans
les différentes classes à de petits groupes d'élèves ?
Peut-être s'agit-il d'un public villageois, et le QUEL E S T L'OBJECTIF DU FILM 7
film traite-t-ild'une question concernant la santé
publique, ou la technique agricole, ou l'alphabéti- Quelle est la raison d'etre du film :expliquer, con-
sation des adultes. Ce public est-il déjà familia- vaincre, divertir, montrer la vie dans d'autres
risé avec le cinéma ? Est-il déjà très initié 7 parties du monde ? A-t-ilpour but d'apprendre
S'agit-il d'un vaste public, rassemblant une foule aux gens comment voter aux élections locales ?
d'hommes, de femmes et d'enfants autour de l'écran, Doit-il les renseigner sur ce qu'est la planifica-
la nuit, à ciel ouvert ? Ou au contraire de groupes tion familiale, ses raisons, ce que doivent faire
restreintsde spectateurs, assistant à la projection les familles intéressées Doit-il expliquer ce
sous la direction d'un spécialiste de la santé pu- que sont des maladies c o m m e le paludisme ou le
blique, d'un véterinaire, d'un expert en matière pian, les microbes et les virus, les produits phar-
d'agriculture ou de nutrition, ou d'un médecin 7 maceutiques et les médicaments utilisés pour
L'auditoire s'intéressera-t-ilà des situations prévenir ou guérir la maladie '>
nouvelles pour lui ? Acceptera-t-illes solutions L a plupart des courts métrages sont faits pour
nouvelles proposées par un film dans différents communiquer quelque information ; d'autres, évi-
domaines - santé, alimentation, élevage, cultures demment, sont faits pour divertir. Mais le diver-
nouvelles - si les exemples montrés lui sont étran- tissement est généralement l'apanage des films de
gers ? A-t-ildes attitudes particulières à l'égard longmétrage. Ce qui ne veut pas dire que le court

7
métrage ne doit pas divertir. Il doit au contraire autre métier ou vit dans une autre partie du monde.
le faire autant que possible, que le sujet traité soit n existe, bien entendu, une autre catégorie de
la danse, le paludisme, la politique ou la planifi- films (certainementbeaucoup moins nombreux)
cation familiale. Qu'il s'agisse d'un film fonction- qui sont des oeuvres purement personnelles ; le
nel, pédagogique, de propagande politique, scolaire scénariste et le réalisateur (il s'agit d'ailleurs
ou d'information, il faut divertir, si l'on entend généralement de la m & m e personne) n'ont dans ce
par là raconter quelque chose de façon vivante et cas d'autre préoccupation que de faire partager
intéressante. S'il n'y parvient pas, le film aura leurs sentiments personnels, de communiquer
dans une certaine mesure manqué son but. Aucun leurs propres idées. Il s'agit toujours de com-
public ne peut vraiment s'intéresser à une ques- munication, mais de communication subjective,en
tion si le film qui l'expose est ennuyeux. quelque sorte "à la première personne". Mais
Mais il ne suffit pas qu'un film soit divertissant. dans le présent manuel, il sera essentiellement
Scénariste et réalisateur doivent aussi connaître question de communication objective : comment
leur public et ses conditions de vie pour pouvoir exprimer, traduire, exposer et communiquer à
déterminer avec plus de précision comment pré- d'autres personnes des faits, des situations réelles,
senter ce qu'ils ont à dire de manière efficace et des renseignements nouveaux, de manière qu'elles
réaliste. puissent assimiler et comprendre cette informa-
L e but visé par le film et la composition du pu- tion et l'utiliser dans la vie quotidienne.
blic, tels sont donc les facteurs principaux que le Ces deux modes d'expressioncinématographique,
scénariste doit prendre en considération avant de l'expression subjective personnelle et la commu-
se mettre à l'oeuvre. Ces deux exigences sup- nication objective, supposent que le réalisateur
-
posent des reeherches visites, enquêtes, entre- soit rompu à de nombreuses techniques et denom-
tiens avec des personnes appartenant aux m&mes breuses disciplines. Dans le cas qui nous inté-
catégories sociales que celles qu'on retrouve dans resse, c'est-à-direavant tout celui du scénariste
le public. Visites, enquêtes, entretiens, lectures (qui peut parfois se charger aussi de la réalisa-
- ces activités devront également s'orienter vers tion du film)il s'agit des techniques de recherche,
les spécialistes de la question dont traite le film : d'enquête, de reportage et d'analyse, de la rédac-
santé, politique, pédagogie ou quelque sujet cultu- tion de notes et de l'assimilation et de la "cristal-
rel mettant en valeur un aspect du patrimoine ar- lisation" des faits et des attitudes sous une forme
tistique national - peinture, musique, danse, intelligible et intéressante.
sculpture. Dans ce processus, l'objectif du film doit être
Si le film a un but précis, s'il traite d'un sujet parfaitement compris, et c'est en fonction de cet
ignoré du public ou combat un préjugé de ce public objectif que le scénariste doit trouver des idées
(résistance, par exemple, à la planification fami- et proposer une manière de traiter le sujet. L'ima-
liale), le scénariste doit se renseigner avec pré- gination, le sens du spectacle,tous les talents que
cision sur les attitudes existantes. Après s'être suppose la réalisation du film, doivent être mis
familiarisé avec elles, il peut commencer à éla- en oeuvre pour atteindre l'objectif particulier du
borer un scénario qui présentera l'information -
film cet objectif qui est, à l'origine, la raison
avec clarté et vigueur, en fonction des attitudes et d'être m ê m e de ce film.
des sentiments qu'on sait étre ceux du public.
Lorsqu'il élabore son scénario et la façon de
présenter le sujet du film, le scénariste ne doit QUEL E S T LE COMMANDITAIRE DU FILM ?
jamais perdre de vue le but qu'il se propose d'at-
teindre. Pour y parvenir, que ce soit en informant Qui est-ce qui finance le film ? C'est le comman-
le public sur une question particulière ou en sus- ditaire. Qui est-il et quels sont ses mobiles ?
citant, par le film, des attitudes et des sentiments Nous venons de parler de l'objectif du film. Quel
déterminés, le scénariste doit avoir une idée de est celui du commanditaire ? Est-ce le m ê m e
ce que le public (quel qu'il soit) pense de cette que celui que vise implicitement le film ? Ou
question ; de ce que ce public pensera de cette bien le film n'est-il qu'un moyen, un instrument
question, et non pas nécessairement de ce que lui, utilisé à d'autres fins, qui dépassent les siennes
le scénariste, en pense. L e scénariste et le réa- proprement dites ?
lisateur sont des agents d'information. Avec ce Une institution gouvernementale peut décider
-
type de films films "fonctionnels", ou pédago- de produire un film consacré à de nouvelles m é -
giques, ou documentaires - on cherche presque thodes culturales. Les objectifs sont alors va-
toujours à renseigner, à communiquer une opinion. riés : on cherche à augmenter la production de
Aussi le scénariste doit-il savoir quelle significa- denrées alimentaires, à accroftre la prospérité
tion le but visé peut revêtir en fonction du modede des cultivateurs, à créer de nouvelles industries
vie et des attitudes du public. Pour cela, il faut agricoles - produits chimiques, machines, ins-
comprendre le point de vue d'autrui, avec intelli- truments et produits prévus dans les plans natio-
gence et sympathie, m é m e si ce point de vue est naux, qui contribueront à leur tour à renforcer
celui d'une autre classe, d'une autre race, d'une l'économie nationale.
autre caste, qui parle une autre langue, fait un Une compagnie pétrolière, une société de

8
fabrication de savon ou de textiles, peuvent pro- le faire. L e réalisateur doit alors se demander,
duire des films dont le sujet a peu de points com- en toute conscience professionnelle, si la décision
muns avec la vente des produits pétroliers, du sa- prise par le commanditaire est la bonne, ou si la
von ou du tissu. Les films produits par ces socié- forme qu'il propose de donner au film risque, à
tés peuvent avoir pour unique but de divertir le pu- certains égards, de ne pas avoir l'efficacité
blic de villages ou de salles de cinéma. On cherche escomptée.
simplement à faire connaftre le nom de la société L'aide qu'apportent à ce stade le scénariste et
au public qui ira voir le film dans les villages ou le réalisateur au commanditaire est généralement
dans les salles de cinéma des villes. C e n o m se considérable. L e sujet choisi obligera très souA-
gravera ainsi dans la mémoire des spectateurs, vent le scénariste à se déplacer pour voir les
associé à des souvenirs agréables, à l'idée dedi- choses par lui-m ê m e , en visitant une usine dans
vertissement, de détente, d'amusement. A une une autre ville, un hapital ou une clinique, une
époque où le catch (à l'occidentale)était chose re- ferme expérimentale, une école, une université.
lativement nouvelle en Inde, une grande marque de Après s'être rendu sur place, avoir eu de longues
pneus en caoutchouc fit projeter sur les marchés conversations avec les intéressés et obtenu, dans
de village un film très vivant sur cette forme de toute la mesure possible, les renseignements qui
lutte. L e seul élément "publicitaire" du film était pourront lui être utiles, le scénariste rencontre à
de souligner, de façon divertissante, l'analogie nouveau le producteur et fait le point du résultat
entre la force et la résistance des catcheurs et de ses recherches et de ses impressions. Il peut
celles des pneus à solidité accrue fabriqués par la ensuite réfléchir de son côté à la façon de présen-
société. Mais le film cherchait surtout à associer ter ou de raconter l'histoire qu'on lui confie. C e
le n o m du fabricant à un spectacle vivant et appré- projet de scénario est débattu avec le commandi-
cié du public pour que celui-ci réagisse favorable- taire (defaçon aussi simple et directe que possible)
ment à l'avenir. et aussi souvent qu'il le faut pour que le scénariste
Lorsque le film est produit par l'Etat, l'institu- ait enfin l'impression d'avoir solidement fondé son
tion ou le porte-parolequi le représente peut n'avoir scénario, trouvé quelque chose d'intéressant à
d'autre but que d'instruire (filmpédagogique des- dire et donné une forme satisfaisante au film.
tiné aux instituteurs, film sur la santé publique). L e scénariste doit apprendre à connaftre le
Parfois 1'Etat cherche à faire une propagande vi- commanditaire et à comprendre pleinement son
goureuse en faveur d'un programme déterminé point devue et ses besoins. Il lui faudrapeut-être
- lutte contre l'inflation, vaccination contre une remonter bien au-delà des "représentants" du
maladie épidémique, alphabétisation générale des commanditaire, c'est-à-diredu spécialiste des
adultes, etc. Ce genre de programme exige des "relations avec le public''ou du porte-parole dé-
films particulièrement persuasifs, peut-être pré- signés par ce dernier. Il devra peut-être s'entre-
sentés sous une forme "dramatique" ; ils devront tenir avec de nombreux autres membres du per-
éveiller un sentiment d'urgence chez le spectateur, sonnel de l'organisation intéressée : ingénieurs,
constituer un appel exaltant au citoyen et lui faire spécialistes des travaux d'analyse, agents locaux,
saisir l'importance de l'enjeu, de manière qu'il se administrateurs ayant tous une longue expérience
souvienne personnellement du message du film et des problèmes envisagés. Si le scénariste doit
contribue pour sa part au succès de la nouvelle po- se familiariser avec le sujet du film par des re-
litique ou du nouveau programme. cherches destinées à donner une forme appropriée
Dans la plupart des cas, le commanditaire a un au scénario, il doit également bien connaftre son
problème particulier à résoudre, ou vise un objec- commanditaire et comprendre ses besoins, ses
tif déterminé et souhaite utiliser le cinéma en rai- désirs et ses problèmes. Si ce dernier ne parvient
son de son efficacité, de son caractère visuel et pas à les définir avec toute la précision souhai-
explicite, et du fait qu'il peut toucher des milliers table (du moins pour ce qui touche au film à réa-
et m ê m e des millions de personnes. Aussi le liser), le scénariste devra parfois, dans leur in-
commanditaire souhaite-t-ils'entretenir avec le térêt mutuel, l'y aider.
scénariste et le réalisateur pour trouver une forme
d'expression qui plaise au public et le convainque
de l'importance de la "leçon" du film. Cette "le- R A P P O R T S ENTRE LE SCENARISTE
çon", on le comprend, peut se rapporter à bien ET LE C O M M A N D I T A I R E
-
des domaines différents enseignement sanitaire,
enseignement scolaire, formation agricole, maté- Il importe, pour de multiples raisons, que lescé-
riel pédagogique fonctionnel (technique, industriel, nariste comprenne le commanditaire et noue avec
etc. ). L e scénariste doit se renseigner sur la si- lui des relations satisfaisantes. Cela est tout
tuation du commanditaire : les problèmes et diffi- d'abord indispensable au succès du film en chan-
cultés qui se présentent, les raisons qu'il a de tier. Et puis, cet effort peut mener à la réalisa-
vouloir faire un film et l'idée directrice de ce film. tion d'autres films dans d'autres secteurs d'acti-
Beaucoup de commanditaires ont une idée très vité du commanditaire.
nette de ce qu'ils souhaitent communiquer au spec- Pendant les années quarante et cinquante, les
tateur, et m ê m e de la manière dont il convient de réalisateurs de cours métrages commencèrent à

9
s'intéresser à beaucoup de nouveaux domaines, et fruit immédiatement étant donné que le coniman-
notamment (au Canada) à la puériculture (soins à ditaire ou son représentant, s'ils connaissentbien
donner aux nourrissons et aux très jeunes enfants) le processus de réalisation d'un film et ont vu le
et à l'enseignement relatif à la santé mentale (dia- leur prendre progressivement forme, peuvent
gnostic des formes communes de maladie mentale, donner une interprétation du film et m ê m e le dé-
explication de ces maladies, thérapeutique). On fendre, le cas échéant, devant un comité ou un
procéda, dans chacun de ces deux domaines, à la groupe plus nombreuxformé au sein de leur orga-
réalisation d'un ou deux films expérimentaux ini- nisation et dont les membres connaissent peut-être
tiaux, supposant chaque fois l'établissement de relativement mal le film et ne font pas nécessai-
rapports nouveaux entre commanditaire et produc- rement montre de compréhension et de patience
teur. Ces rapports s'étant révélés dans chaque envers les problèmes cinématographiques. Il ar-
cas excellents, le premier film fut suivi d'un se- rive souvent en effet, lorsque le film est comman-
cond, puis d'un troisième, début d'une longue sé- dité par 1'Etat ou par une société commerciale,
rie de films de ce genre. C e résultat fut obtenu qu'un comité soit nommé, du caté des commandi-
grâce à la collaboration véritable et à la compré- taires, pour "surveiller" le progrès de la réali-
hension et au respect réciproques des commandi- sation de ce film. Or, c o m m e les réalisateursle
taires (qui représentaient un service de santé de savent bien, la compétence d'un comité dans ce
1'Etat) d'une part, et des producteurs de l'autre. domaine n'est pas évidente. Les décisions sont
L e réalisateur (ou le scénariste) doit chercher laborieuses et consistent parfois enautant de com-
à comprendre le mieux possible le commanditaire. promis. U n film réalisé pour un commanditaire
Il doit s'efforcer de saisir l'importance de son ac- et jugé par un comité manque généralement de re-
tivité, de ce qu'il produit, du rBle qu'il joue dans lief et représente clairement un compromis entre
la société, et de comprendre la nature des pro- des points de vue divergents. Il est bien préfé-
blèmes qui se posent à lui ou des objectifs qu'il rable que le commanditaire accepte, pour sa part,
s'est fixés. D e m ê m e , le commanditairedoit faire de déléguer ses responsabilités à un représentant
un réel effort pour comprendre les exigences du ou un porte-parole unique. Si celui-ci est intelli-
travail cinématographique. Il doit assister à la gent et s'intéresse au film, il pourra collaborer
projection de films et réfléchir aux problèmes dans de bonnes conditions avec le réalisateur,
inhérents au mode d'expression et d'information pour leur plus grand profit réciproque et dans
cinématographique. l'intérêt du film même. Des rapports directs
Dans beaucoup de jeunes nations, où se créent entre un représentant du commanditaire et le réa-
des services nationaux et où le cinéma et la télé- lisateur permettent une entente plus grande, une
vision sont d'autre part utilisés aux fins d'informa- connaissance plus poussée du processus de réali-
tion et d'&éducation du public, il existe d'excellentes sation cinématographique et une meilleure com-
possibilités de coopération fructueuse entre spé- préhension des activités du commanditaire et de
cialistes des services gouvernementaux et produc- ses vues que ne le permettent des rapports entre
teurs de films. le réalisateur et un comité représentant le
Si, devant ces possibilités, les producteurs commanditaire.
adoptent une attitude superficielle et opportuniste, Ces rapports directs, le réalisateur doit s'ef-
les résultats seront décevants. Si les fonctionnaires forcer de les créer. C e n'est pas toujours pos-
adoptent, à l'égard des producteurs de films, une sible, car il existe des difficultés inhérentes aux
attitude arrogante, irréfléchie ou autoritaire, il relations de travail entre réalisateur et comman-
en sera de m ê m e . E n revanche, si les uns et les ditaire. Mais c'est au réalisateur - et plus par-
autres font un effort honnête pour étudier ensemble -
ticulièrement au scénariste qu'il incombe de
les problèmes qui se posent et y apporter des so- faire l'effort initial de compréhension. C'est en
lutions, ils pourront réaliser de très intéressants s'efforçant de comprendre le sujet de l'intérieur
films documentaires, pédagogiques ou de fiction que le scénariste rend le film possible et en as-
qui contribueront au développement du pays, au sure le succès.
processus de "constructionde la nation".
n est évident que les rapports entre le scéna-
riste et le commanditaire peuvent, ou devraient, LES RECHERCHES
se poursuivre pendant toute la réalisation du film.
Ici, les questions de personnes et les rapports hu- L e scénariste doit être un bon journaliste. 11
mains sont très importants. Il est extrêmement n'écrit certes pas pour être publié, mais sa con-
utile pour le scénariste et pour le réalisateur d'éta- naissance du sujet traité est utile au réalisateur
blir et de "cultiver" des rapports véritablement du film,au producteur et, en définitive, aupublic.
satisfaisants avec le commanditaire, si cela est L e scénariste doit savoir faire des recherches
humainement possible. Si le commanditaire peut efficaces. C'est un journaliste, un observateur,
s'intéresser sincèrement à la réalisation du film, un espion ; il analyse, il prend des notes, il re-
et le voir prendre forme au cours des semaines, garde, il "visualise", il résume. Pour reprendre
cet intérêt pourra ouvrir la voie à la réalisation le jargon actuel, c'est un "grand reporter". Ses
ultérieure d'autresfilms. Cette attitude peut porter rapports et comptes rendus ne sont lus par personne,

10
mais sont la matière du scénario à élaborer et en lui fournira de l'information toute prête sur la
assurent l'exactitude et la profondeur. question à traiter, mais ces renseignements ne
Supposons que le chercheur ait rassemblé toute seront pas suffisants. Après la lecture et la con-
l'information disponible sur son sujet. Dix pour sultation des ouvrages de bibliothèque (encyclo-
cent seulement de cette information peuvent être pédies, périodiques, revues de sociétés savantes,
utilisés dans le film, que ce soit dans le scénario manuels), vient la phase très importante des in-
ou dans le commentaire qui accompagne les images. terviews directes de personnes compétentes et
Néanmoins, le scénariste a besoin de tous les connaissant depuis longtemps les problèmes posés.
autres renseignements recueillis pour pouvoir sou- Supposons que nous ayons à écrire le scénario
tenir à juste titre (et la conscience tranquille !) d'un film de vulgarisation agricole et que nous
que sa documentation - cette documentation sur voulions savoir quelle sera la réaction et les sen-
-
laquelle le film se fonde est complète et exacte. timents de la population rurale si on lui propose,
Pour employer une image, l'information qui par exemple, un changement radical dans les m é -
passe réellement dans le film - c'est-à-direcelle thodes culturales, associé à l'utilisation de nou-
que donnent le récit, le dialogue et les commen- velles semences d'importation qui viendront rem-
-
taires est proportionnellement égale à la partie placer les semences locales utilisées jusqu'alors.
émergée d'un iceberg. Nous ne voyons qu'un hui- Quelles sont les sources d'information, les
tième del'iceberg au-dessusde la surface de l'eau ; autorités locales ou régionales, les représentants
le reste est immergé et échappe à notre regard. du monde scientifique, les spécialistes de la pla-
Il en va de m ê m e pour le contenu documentaire nification ou de la politique nationale, les agricul-
d'un film. Seule une petite partie des faits estg- teurs et les marchands locaux que le scénariste
fectivement vue ou entendue dans le film ; mais le devrait consulter ? Sans doute devrait-il s'en-
chercheur a rassemblé et étudié une documentation tretenir avec des représentants de chacune de ces
beaucoup plus considérable. Ces recherches sont catégories.
nécessaires parce qu'un film (à quelque catégorie Il lui faut notamment savoir quels résultats ont
qu'il appartienne) est avant tout l'exposé simplifié été obtenus avec les nouvelles semences dans les
d'une question et présente une grande quantité d'in- régions où on les a déjà utilisées. Dans quelle
formations sous une forme condensée. Mais cet mesure l'expérience a-t-elle été concluante ?
exposé, malgré sa brièveté, doit être équilibré, Pendant combien de temps ? L'utilisation de nou-
correctement structuré et exact, que ce soit dans velles semences a-t-elle eu des effets secondaires
sa teneur explicite ou dans ce qu'il laisse entendre ou des résultats imprévus ou préjudiciables ? Les
- en un mot, fidèle au sujet traité. C'est là un récoltes ont-elles réellement été plus abondantes ?
travail qui exige beaucoup d'intégrité et de talent : Cet accroissement de la production a-t-ilvalu des
dans quelle mesure le scénariste réussira-t-ilà bénéfices accrus aux cultivateurs ? Ceux-ci ont-
simplifier le sujet, à le rendre intelligible et à en ils continué à vendre localement leurs récoltes
mettre en lumière la signification réelle sans dé- aux m ê m e s marchands de gros et de détail ? L e
former ni falsifier quoi que ce soit pour obtenir changement dans les méthodes culturales accepté
un effet dramatique ou pour faciliter l'exposé des par les fermiers du moment qu'ils utilisaient de
faits ? nouvelles semences a-t-ilentraîné d'autres chan-
Ce processus de sélection est peut-êtrele meil- gements, techniques ou sociaux, dans leur mode
leur critère de la capacité du scénariste. Il est de vie ? E n d'autres mots, le chercheur doitêtre
relativement facile de donner une forme "drama- pr&t à poser de multiples questions suggérées par
tique" à un sujet, ou de le rendre intelligible et le sujet à traiter. Il est vain de faire l'éloge de
significatif pour les auditoires locaux, dans leur nouvelles semences ou de nouvelles méthodes de
langue ou leur environnement ; d'isoler deux ou culture si leur adoption entraîne d'autres difficul-
trois points d'importance fondamentale et de les tés - appauvrissement des sols, apparition de
exposer avec vigueur et précision pour que le pu- nouvelles maladies des plantes ou'consommation
blic s'en souvienne pendant longte-mps. Mais le excessive des eaux locales. L e scénariste doit
scénariste ne doit pas, ce faisant, fausser, défor- avoir connaissance de tous ces facteurs, afin
mer ou dénaturer tout autre élément de son exposé, d'étayer son travail sur des faits réels et nonsur
ni lui donner une importance qu'il n'a pas ou qui de simples suppositions ou des espoirs optimistes
risque d'induire le spectateur en erreur. C'est mais sans fondement.
-
là la tâche fondamentale du scénariste apprécier Il est souvent utile de prendre contact avecune
à sa juste valeur l'importance relative de chaque personne bien informée et de jugement sQr qui,
élément, tout en simplifiant et en interprétant le sans être nécessairement spécialisée dans le do-
sujet, afin de présenter un exposé intelligible et maine particulier que le film se propose de trai-
frappant, en quelques minutes de projection, à un ter, a une vue synoptique de nombreuses autres
public qui, au départ, ne savait peut-être rien du questions. Les rédacteurs en chef des journaux
sujet traité. entrent souvent dans cette catégorie, car ils ont
Comment le scénariste se documente-t-il ? D e l'habitude d'examiner et d'évaluer des événements
la façon habituelle, et, au besoin, par d'autres de nature très différente et qui sont cependant
moyens moins conventionnels. L e commanditaire tous liés les uns aux autres par un m ê m e contexte.

11
Cette vision globale des choses peut Atre très utile Quel est le sujet du film, son contenu ?
pour le scénariste, qui se sent parfois complète- S'agit-il d'un récit, d'un documentaire, ou d'un
ment étouffé et paralysé par les aspects techniques autre type de film 7
ou très spécialisés de son scénario. Y a-t-ildes acteurs, professionnels ou non
Dans une phase ultérieure, celle du tournage, professionnels ?
le réalisateur se fiera sans doute entièrement à L e film sera-t-iltourné en son synchrone 3
l'information et à l'interprétation des faits que le Ou tourné sans le son et postsynchronisé
scénariste lui a fournis. Celui-ci est le seul à ultérieurement ?
avoir le temps, la possibilité et le devoir d'appro- Combien de temps durera le tournage ?
fondir la question en se livrant à des recherches. Combien de jours de tournage sont prévus ?
Il peut arriver que le scénariste ne communique Combien l'équipe compte-t-elle de techniciens :
jamais la plus grande partie de sa documentation deux, cinq, douze ?
à quelqu'un d'autre ; le réalisateur et le produc- Y aura-t-il des prises de vues en intérieur ou
teur du film ne prendront connaissance que des des prises de vues de nuit ? Faudra-t-ilun
conclusions et recommandations résumées et sim- matériel d'éclairage considérable 3
plifiées du scénariste touchant la façon de traiter L'endroit où se font les prises de vues est-il
le scénario. Mais c'est dans l'esprit du scénariste électrifié ? L'éclairage et la recharge des
que le sujet traité prend ses véritablesdimensions batteries pourront-ilsse faire sur le secteur ?
et c'est à lui surtout qu'il incombe, en dernière Ou faudra-t-ildisposer d'un groupe électro-
analyse, de veiller à l'exactitude,à l'équilibre et gène ou de toute autre source auxiliaire de
à la justesse du film. courant ?
On voit que la recherche joue un rôle capital L e film comporte-t-ildes scènes censées se
dans la réalisation d'un film. Il ne s'agit pas seu- passer autrefois 3 Faudra-t-ildes costumes,
lement de recherches livresques dans des biblio- du mobilier de style, des armes, des che-
thèques et des revues savantes, mais plutôt de re- vaux, des perruques ?
cherches faites sur place, d'interviews et de ques- L e film a-t-ilpour but d'expliquer une tech-
tions posées directement à toutes sortes de gens nique à l'aided'unedémonstration (unetech-
dans toutes sortes de situations concernant le su- nique agricole, par exemple) ? Contient-il
jet central du film. A partir de cet ensemble de des séquences ou des graphiques d'anima-
faits, d'opinions, d'expériences, d'actions, de ju- tion 3 D e nombreux dessins ? Des photo-
gements analytiques, le scénariste se forme une graphies fixes ? Des microphotographies ?
opinion personnelle, avant d'écrire un scénario Des plans pris au ralenti ou en accéléré,
qui est aussi une interprétation de la réalité telle pour montrer la croissance des plantes ou
qu'il veut la montrer au public. C'est le scéna- d'autres processus ?
riste, et lui seul, qui se charge de cette phase Si le film comporte un commentaire, celui-ci
importante du travail. sera-t-ildit parunprofessionnel ? L e com-
mentaire est-il long ? Ou très court 3
S'il y a une partition musicale, de quel genre
FORME ET PRESENTATION DU SCENARIO de musique s'agit-il, et combien de temps
durera-t-elle ? S'agit-il de musique origi-
Il est tout à fait exact qu'on peut tourner un film nale spécialementenregistrée pour le film,ou
sans scénario et que la réalisation de bien des d'enregistrements pris dans une sonothèque ?
films célèbres a commencé dans ces conditions,
ou avec un scénarioembryonnaire. Cette méthode Cette liste de questions est loin d'êtreexhaustive.
est excellente si le réalisateur finance lui-mAme U n scénario complet répondra à beaucoup d'entre
le projet, s'il ne se préoccupe pas de la commer- elles et indiquera avec précision, ou suggérera
cialisation ultérieure du film avant de le tourner clairement, les méthodes et techniques à adopter
et s'il ne doit de comptes à personne pour ce qui pour réaliser le film.
est de la durée, du style, du contenu, du climat et U n scénario compte généralement deux versions.
de l'impact final de son oeuvre. Il y a d'abord la description générale du film, qui
L e plus souvent, cependant, le réalisateur est donne un certainnombre de renseignements précis :
responsable de la qualité du film achevé envers contenu, style, acteurs et rôles (le cas échéant),
d'autres personnes et, dans la plupart des cas, ce dialogues (le cas échéant), commentaire parlé.
n'est pas lui qui finance. N e serait-ce que pour On élabore ensuite une version détaillée du scé-
ces raisons, un scénario sera vraisemblablement nario original qui en décrit chaque séquence en
indispensable. précisant quels acteurs ou quels personnages y
Mais il y a bien d'autres raisons encore d'écrire figurent, quel en est le dialogue (sitel est le cas),
un scénario avant de commencer le tournage. Un ou le commentaire (s'ils'agit d'un film documen-
certain nombre de personnes s'intéressent géné- taire ou pédagogique sans dialogue). L e second
ralement au film qui va se faire et souhaitentavoir, scénario, appelé "découpage", est un document
avant le premier tour de manivelle, des rensei- de travail qui permet à l'équipe et au régisseur
gnements sur les points suivants : d'évaluer très précisément tous les besoins

12
techniques (matériel, équipe, durée du tournage). supériorité sur une présentation purement écrite :
C e découpage est le document qui permet d 'évaluer ce document permet aux commanditaires et autres
le coût matériel de la réalisation du film, car il personnes intéressées, qui connaissent peut-être
fournit les renseignements détaillés requis pour mal les problèmes de la réalisation cinématogra-
établir un devis estimatif global - traitements, phique, de comprendre facilement la suite des
services, cachets, frais de location ou d'achat du images et, dans une certaine mesure, l'effet qui
matériel et autres dépenses afférentes à la réali- sera obtenu, alors qu'il est difficile de le faire en
sation du film. lisant simplement une longue descriptionde chaque
O n voit donc qu'il sera nécessaire et extrême- plan, de l'action qu'il contient et des mots ou des
ment utile, pour de multiples raisons, de fournir sons qui l'accompagnent. Grâce à une présenta-
un scénario. L a raison d'êtreprincipale de ce do- tion en images, la liaison entre les plans apparaît
cument est de permettre à toutes les parties inté- beaucoup plus clairement, ainsi que le rapport
ressées de se faire une idée commune de l'argu- entre les dialogues, ou le commentaire, et chaque
ment du film et de préciser les idées qui serviront plan.
à sa construction. S'il n'existe pas de scénario, Pour établir ce découpage illustré, il faut sa-
le scénariste devra passer des heures entières à voir dessiner, ou alors s'adjoindreun dessinateur.
répéter à chacun ce qu'il faut savoir du film. Ces dessins sont bien entendu des esquisses très
Comment faut-il élaborer le scénario, et quelle libres, analogues aux images d'un dessin animé ;
forme faut-illui donner ? le fini et la précision ne sont pas nécessaires. Ils
11 n'y a pas, en cette matière, de règle stricte; peuvent être tracés au crayon, au feutre, àl'encre
il y a les méthodes courantes, et d'autres qui le ou au Conté. Les proportions de l'image doivent
sont moins. L a forme adoptée pour la présentation être les m ê m e s que celles de l'image cinémato-
du scénario peut avoir son importance si le film est graphique standard (ou de l'écran de télévision, si
consacré à une question peu connue ou très tech- le film est destiné à être diffusé ainsi).
nique. L e scénario est en lui-même une sorte de Une autre solution plus complexe est de faire
"réalisation" et peut exiger autant de réflexion et des photographies fixes des scènes importantes du
d'effort que le tournage même. L'important est projet de film. A u moment du repérage des dé-
de faire comprendre aussi clairement et simple- cors, par exemple, le scénariste ou le réalisateur
ment que possible l'idée maîtresse du film par une peut prendre un certain nombre de photographies
description de son contenu et, dans toute la m e - - lieux, gens, procédés, instruments, bâtiments,
sure possible, de son effet escompté sur le public. récoltes ou tout autre détail pouvant être utilisé
L a présentation traditionnelle du découpage con- dans le film. Ces photographies fixespeuvent être
siste à diviser une feuille de papier Tellière (for- incorporées au découpage illustré, les dessins
mat standard) en deux colonnes verticales ; lades- remplaçant les photographies manquantes ou
cription de l'image(p1an par plan ou séquence par inutilisables.
séquence) se fait dans la colonne de gauche et celle Une méthode encore plus perfectionnée serait
des dialogues ou du commentaire correspondant à de faire des diapositives en couleurs de toutesles
chaque plan figure, à la m ê m e hauteur, dans la scènes importantes (personnages, décors, action,
colonne de droite. L e lecteur peut ainsi se faire accessoires). Ces diapositives pourraient ensuite
une idée de la suite des images et savoir exacte- être agencées dans un certain ordre et projetées,
ment ce qui sera dit dans chaque séquence, d'un accompagnées d'un commentaire, à l'aide d'un
bout à l'autre du film (voir l'Appendice). projecteur de vues fixes de type "automatique".
Bien qu'assez laborieuse, cette méthode per- L a s o m m e de travail requise pour la préparation
met d'exprimer très clairement et complètement d'une suite complète de diapositives, et le coût de
le contenu (image et son) du film projeté. U n scé- cette opération, serait beaucoup trop considérable
nario moins détaillé n'est pas vraiment un décou- pour de nombreux projets. L e projecteur de dia-
page mais un aperçu, un synopsis, une continuité positives à système automatique n'en reste pas
dialoguée du film. Il est d'ailleurs souvent utile de moins un précieux auxiliaire qui permet de mon-
rédiger un résumé ou un synopsis de ce genre trer de façon saisissante et efficace les décors,
pour les premiers entretiens avec les commandi- les personnages, les bâtiments, les accessoires
taires ou d'autres parties intéressées. et les processus qu'on se propose de monter dans
Il est néanmoins possible de décrire l'idée maî- le film achevé. Une projection de ce genre, com-
tresse du film autrement qu'à l'aide d'un scénario plétant un scénario détaillé un découpage illus-
écrit, L a meilleure forme de présentation est tré présentant d'autres images (photographies ou
peut-être alors le découpage illustré, sorte de livre dessins), serait un moyen très complet et efficace
d'images, de bande dessinée, qui donne une idée de faire saisir les intentions du scénariste aux
visuelle précise de toutes les scènes importantes commanditairesou aux autres parties intéressées.
du pro jet, chaque image étant accompagnée d'une Soulignons que le scénario n'est pas un texte
description ou du dialogue correspondant (voir littéraire, mais un document de travail dont l'ob-
l'Appendice). jet est d'exposer clairement le contenu projeté de
Un découpage illustré ou toute autre méthode séries de plans ou de séquences cinématogra-
de présentation visuelle du scénario a une nette phiques. L a première qualité d'un scénario est

13
la clarté et l'intelligibilité, non l'excellencelitté- (ministère,service gouvernemental ou société in-
raire. Aussi, les auteurs et journalistes de métier dustrielle), attend également du scénariste l'as-
ont-ils parfois du mal à écrire de bons scénarios. surance que leurs propositions communes pour le
Le scénario est en effet avant tout une présentation projet de film sont fondées, et étayées par les
visuelle ; c'est là son objet fondamental, ce qui lui faits.
donne sa signification et son intérêt. Il sera bien L e scénariste doit avoir assez d'imagination
entendu plus facile à un auteur qualifié d'exposer pour indiquer deux ou trois façons différentes
clairement ses intentions en décrivant l'action d'aborder le sujet à traiter, m ê m e si ce sujet se
d'une séquence et l'effet qu'elle doit avoir sur le révèle difficile. L'histoire peut être "dramatisée':
spectateur. Mais il n'est nullement besoin d'avoir à l'aided'acteurs et d'undialogue ;peut-être doit-
une très grande culture pour pouvoir écrire un bon elle prendre la forme de récit d'un cas particulier,
scénario de films. E n effet, c'est la clarté avec concernant des personnes réelles dans une situa-
laquelle les plans et leur signification sont décrits tion donnée prises dans la réalité ;peut-être faut-
qui compte, non la qualité du texte m é m e ;la clarté il choisir de présenter directement les faits à
et l'intelligibilité, non l'élégance formelle. l'aide de séquencesanimées expliquant clairement
U n autre but du scénario est de donner à tous des phénomènes techniques.
ceux que concerne le projet de film une vision com- Les idées et le sujet du film peuvent être diffi-
mune de celui-ci avant le début du tournage. L e ciles à exposer en termes clairs et ramassés. Il
scénario peut être distribué à ces differentes per- peut être nécessaire d'utiliser les techniques d'ani-
sonnes, qui peuvent à leur tour noter leurs obser- mationd'un bout à l'autredu film,et non des prises
vations ou leurs suggestions en marge des plans ou de vues directes. Prenons un exemple : en Inde,
séquences du scénario, ou donner une opinion géné- le Service cinématographique gouvernemental fut
rale après l'avoir lu attentivement. Le scénariste chargé d'élaborer le scénario d'un court film do-
peut ainsi être sQr que tous les intéressés ont bien cumentaire, destiné au grand public, sur les tra-
compris le projet, et les possibilités de malentendu vaux de la Commission nationale de planification.
sont minimisées. L a planification est une activité bureaucratique
L e scénariste doit évidemment être présent lors difficile à décrire ou à expliquer simplement.
de l'examen du premier projet de scénario par les C o m m e sujet d'un documentaire traditionnel réa-
commanditaires ou leurs conseillers. Fort de ses lisé en prises de vues directes, le problème de la
recherches et de sa connaissance de la question planification semblait très difficile et rebutant.
traitée, il doit pouvoir répondre aux questions avec Les scénaristes eurent finalement l'idée d'utiliser
assurance et donner la certitude aux commanditaires un célèbre personnage comique traditionnel,
et aux autres parties intéressées que le film s'ap- Maujiram, et d'en faire le protagoniste et le per-
puie sur des bases solides et que les recherches sonnage central d'un film d'animation. A travers
et la préparation ont été bien faites. A ce stade, les aventures de Maujiram, personnage folklorique
le scénariste peut avoirune meilleure connaissance légendaire ou "Monsieur-tout-le-monde",les scé-
du sujet du film que le réalisateur ou le producteur. naristes purent formuler et expliquer de façon
Sa responsabilité est donc considérable pendant simple et attrayante, mais précise, divers con-
cette phase importante, où seront prises les déci- cepts de la planification économique nationale. Il
sions fondamentales concernant le film. s'agissait de condenser des faits relativement com-
plexes en un récit simple, plein d'humour et de
fantaisie, mais donnant leur importance relative
LE SCENARISTE aux divers facteurs et ne dégénérant pas en inter-
- AUTORITE ET RESPONSABILITES prétations déformées ou superficielles (voir à
l'Appendice III le synopsis de ce film).
Il ressort clairement des paragraphes précédents L e réalisateur, en tant qu'artiste créateur,
que le scénariste est responsable du projet de film aura tendance à voir d'abord les possibilités dra-
dans la double acception de ce terme : d'une part, matiques du sujet sans se soucier de l'équilibre
les recherches approfondies qu'il a faites, sa con- général du documentaire ni de l'importance rela-
naissance du sujet et sa documentation très com- tive de ses divers éléments. C'est au scénariste
plète lui confèrent une certaine autorité ; d'autre qu'il incombe de veiller à ce que le scénario res-
part, il est chargé de résumer et d'élucider les pecte cet équilibre dans la présentation des faits.
résultats de ses recherches et de les présenter Il faut trouver le moyen de montrer des images et
sous une forme vivante, claire et documentée, de d'exposer des faits qui n'ont rien d'essentiellement
traiter le sujet du film sous une forme précise et dramatique, mais sont nécessairesà la bonne com-
équilibrée. préhension du sujet. Cette exigence pourra impa-
C'est du scénariste que le réalisateur (à suppo- tienterle réalisateur;le scénariste, par conscience
ser qu'il s'agisse de deux personnes distinctes) professionnelle et souci d'exactitude, doit veiller
attendra des renseignements exacts et une version à ce que le scénario accorde l'importance voulue
intelligente et condensée des faits. à tous les aspects essentiels du sujet, qu'ils aient
L e producteur, responsable de la gestion et du ou non un intérêt dramatique en eux-mêmes.
financement du film devant les commanditaires Lorsque le scenario aura été établi et adopté,

14
c'est au réalisateur qu'incomberala responsabilité percevoir le sens, c'est-à-diredeviendra moins ré-
de l'interpréter et de lui donner une forme cinéma- ceptif au film tout entier et se contenterad'attendre
tographique. Mais c'est d'abord au scénariste de la fin de la projection avec toute la passivité et le
veiller à ce que tous les aspects essentiels du su- manque de sympathie de celui qui s'ennuie.
jet traité figurent dans le scénario et que le film,
par sa structure et son contenu généraux (quelle SCENARIO ET BUDGET
que soit la forme adoptée) en donne une image
exacte et juste. C o m m e nous l'avonsdit dans une section antérieure
Bien entendu, le scénariste doit toujours pen- ("Forme et présentationdu scénario"), le scénario
ser en termes cinématographiques. Il n'est ni un sert à évaluer le coat du film envisagé. Pour être
essayiste, ni un journaliste, ni un pamphlétaire, ni exact, c'est le "découpage", deuxième version du
un rédacteur de manuels. Il doit penser en images, scénario original intégral, qui permet cette éva-
écrire pour l'écran. E n fait, il s'agit moins luation. L e réalisateur ou le directeur de produc-
d'l'écrire''que de "traduire en images" des idées, tion peuvent dépouiller le découpage pour faire ap-
des concepts et des faits. L e scénariste peut d'ail- paraître avec une très grande précision les ren-
leurs choisir de faire des dessins ou de prendre seignements suivants :
des photographies du sujet exposé, au lieu de rédi- nombre de décors nécessaires pour les
ger un texte. prises de vues
Sur le chapitre du langage et des risques que nombre de jours de tournage
court celui qui l'utilise pour exprimer des idées, nombre de prises de vues en extérieur et
il faut noter ceci : dans le cas du court métrage, en intérieur
et notamment du documentaire ou de l'essai, par matériel d'éclairage requis et durée de
opposition aux films de fictionjoués par des acteurs son utilisation
et présentant des situations "dramatisées", l'un matériel requis pour les prises de vues
des dangers principaux est le manque de concision, -
- durée du tournage frais de location en
les descriptions verbeuses. Bien entendu, un écri- fonctionde la période de tournageenvisagée
vainprofessionnel aime les mots, qui sont sa mon- dialogue - longueur du dialogue, nombre
naie d'échange, ses instruments de travail. Les de plans dialogués, nombre de jours de
mots éveillent chez lui des sentiments, et les uti- tournage (c'est-à-dire durée des prises
liser Sour forme orale ou écrite est pour lui un de vues en son synchrone)
réel plaisir. Pour le cinéaste, en revanche, les nombre de techniciens requis pour le
mots sont plutôt des ennemis que des alliés. Untexte tournage
trop fourni ne fait que nuire à l'efficacité d'unfilm. déplacements nécessaires pour le tour-
Dire qu'un film est fait pour être regardé plutôt nage dans les décors choisis, ou trans-
qu'écouté est une lapalissade,mais qui mérite d'être ports dans la zone principale de tournage
répétée. C'est à l'oeilque s'adresse d'abordleciné- défraiements dans les divers lieux de
ma, non à l'oreille. Ce que le spectateurentend dans tournage
la bande sonore, notamment s'ils'agitd'uncommen- effets sonores spéciaux indiqués dans le
taire "off" dit par un narrateur, n'est que partielle- scénario (à enregistrer, ou à acheter
ment entendu et retenu. L'oreillene saisitpas de fa- dans une sonothèque)
çon aussi aiguë ce qui est dit que l'oeilce qui est vu. partition musicale indiquée dans le scé-
C'est en premier lieu à l'oeil, et à travers lui au cer- nario (enregistrement d'une partition
veau, que s'adresseunfilmquelqu'ilsoit. L'oreille originale, ou achat dans une sonothèque
n'est qu'unauxiliaire,un canal secondaire. Aussi est- spécialisée),
il inutile de dépasser, dans la bande sonore, le nombre Tels sont les éléments du découpage qui permettent
minimal de mots requis pourl'oreille. L e scénario ne au directeur de production ou au producteur délé-
doit pas dépendre essentiellement de ce qui est dit dans gué d'établir avec exactitude un devis estimatif
le commentaire de la bande sonore, mais il faut veiller global pour la réalisation du film.
en revanche à ce que tout fait important soit communi- L e scénariste doit évidemment connaître dans
qué efficacement au spectateur par l'image. C'est une certaine mesure le travail de réalisation d'un
l'oeilqui comprendra et retiendrales points essen- film et son coQt s'il veut fournir au réalisateur un
tiels du film,non l'oreille. Aussi le scénaristea-t-il scénario dont le tournage soit possible. Imaginons
pour tâche principale de tout mettre en oeuvre pour le plan suivant :
donner au contenu du filmune forme visuelle enutili- Plan 100 Gros plan des deux amants enlacés.
sant des exemples et une actionvisuels. L a parole ne U n bruit leur fait lever la t&te. Travelling
peut qu'étayer et renforcer ce qui est dit par les arrière optique très lent. L e couple est en-
images. Il ne faut pas utiliser la bande sonore, et plus -
touré par une rangée de soldats une ving-
particulièrementle commentaire dit par le narrateur, taine d'hommes. A partir de ce plan d'en-
pour communiquer des renseignements essentiels au semble du groupe, la caméra amorce un pa-
spectateur. E n outre, sile film est trop bavard, le noramique vertical qui découvre, en contre-
spectateur, agacé par cet interminabletorrent de pa- plongée, la paroi de la falaise surplombant
roles, cessera d'écouter la bande sonore et d'en les amants d'une vingtaine de mètres. Tout

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en haut de la falaise, se détachant contre la détruit les mauvaises herbes, on répand des poudres
lumière de lampes de poche, on voit d'autres insecticides sur les plantes. Nouvelle irrigation.
soldats et deux ou trois cavaliers. L a récolte faite est comparée aux récoltes de type
L e tournage de ce plan supposerait notamment les traditionnel. Il apparaît clairement qu'elle est
moyens suivants : plus abondante et va donc rapporter davantage à
U n plateau de studio (location) ou un décor en l'agriculteur.
extérieur (frais de transport pour l'équipe). Où ces scènes seront-ellestournées - dans une
E n studio, la construction d'un décor (menuise- ferme expérimentale ou sur les terres de fermes
rie, peinture) et son éclairage. réelles ? Dans un cas c o m m e dans l'autre,l'équipe
E n extérieur, frais de transport des projecteurs, devra se rendre à plusieurs reprises sur les lieux
location d'un groupe électrogène, matériel de tournage, tout au long de la période requise
d'éclairage supplémentaire et accessoires. pour que la récolte arrive à maturité. Quels sont
Equipe plus nombreuse pour le tournage en ex- les frais de déplacement de l'équipe, du point de
térieur, beaucoup plus difficile que le tournage départ à la ferme en question, pour chaque voyage ?
en studio. Où les techniciens seront-ils hébergés pendant le
Costumes, armes, chevaux, lampes. travail ? Quel sera le coût de cette location ?
E n écrivant une telle scène, le scénariste devrait L e scénariste n'est certes pas directement res-
(ne serait-cequ'inconsciemment) ne pas perdre de ponsable de ces aspects de la production, mais il
vue le coût de la location d'un studio, de la cons- doit avoir, de façon générale, le sens de ce que
tructiond'undécor, de la fourniture des accessoires, coûtera la réalisation de ses idées. Toute idée
de la location d'un groupe électrogène, des trans- est finalement destinée à être filmée, ce qui im-
ports, ainsi que les défraiements à prévoir pour plique toutes sortes de choses : engagement d'un
les repas des nombreux comédiens et figurants, et opérateur et d'une équipe ; location de matériel ;
les heures supplémentaires que nécessite parfois déplacements ; achat de pellicule ; frais de labo-
le tournage de séquences complexes. ratoire ; prise en considération des facteurs m é -
E n d'autresmots, le scénariste doit tenir compte, téorologiques, etc. Il y a un abîme entre écrire
dans son travail, des incidences financières des un scénario et écrire un roman.
séquences qu'il invente. Faute de quoi, le libre Tout cela signifie que le scénariste doit bien
jeu de son imagination n'aura aucun intérêt pour le connaftre, ou apprendre à connaftre, les aspects
producteur du film. Une fantaisie débridée dans pratiques du travail de réalisation cinématogra-
1 'invention entraînera des dépenses inconsidérées, phique. Ii doit assister à des prises de vues, voir
ou peut-être le rejet du scénario par le producteur, comment les travaux s'organisent et quels pro-
ce qui contribue également à grever le budget du blèmes se posent sur les lieux mêmes. Il doit vi-
film lorsqu'il faut engager un second scénariste siter les studios et y suivre les progrès du tour-
plus conscient des exigences du métier. nage, s'enquérir du nombre de techniciens, des
D e même, le scénariste doit avoir une idée pré- équipes, de l'organisationdu travail, de la direc-
cise de la durée d'unfilm. Combien de plans compte, tion des acteurs. Il doit, par-dessus tout, colla-
en moyenne, un film documentaire (essai) d'une borer au montage d'un film, voir ce qui arrive
seule bobine de dix minutes ? Deux cents plans aux "rushes" tirés juste après le tournage, com-
environ, si le montage est rapide. Une cinquan- ment le film prend forme pendant le montage, no-
taine seulement si le film - dialogué - est tourné ter les changements de forme et de structure qui
en son synchrone. lui sont apportés à mesure que des idées nouvelles
L e nombre de plans est un des facteurs dont il s'imposent au monteur et que les idées initiales
faut tenir compte pour évaluer le prix de la pro- du scénario sont modifiées ou rejetées. Mieux le
duction. Combien de dialogues un court métrage scénariste peut se familiariser avec la pratique
de 15 à 25 minutes peut-il contenir ? Combien m @ m e du cinéma, plus grande sera sa compétence.
de plans dialogués peut-on tourner en studio en -
E n effet, un scénariste qualifié c'est-à-direun
une journée de travail ? L e dialogue sera-t-il scénariste qui a une expérience directe de la réa-
écrit ou improvisé ? Sera-t-il tourné en studio lisation des films et a lui-même collaboré à des
(c'est-à-diredans des conditions où le réalisateur travaux de ce genre - peut à la fois gagner du
est relativement maftre de ce qu'il fait) ou en ex- temps au moment de l'élaborationdu scénario et
térieur, dans des décors naturels (où le bruit et en faire gagner à ceux qui en tireront un film. Il
les interruptions imprévues risquent de ralentir est capable d'écrire un projet de scénario relati-
le tournage) ? vement vite parce qu'ilsait quelles idées se prêtent
Prenons l'exemple d'un film consacré à un su- ou ne se prêtent pas à un traitement cinématogra-
jet concernant l'agriculture : ce film montre la phique. I i saura comment transposer en termes
culture de certaines plantes et recommande l'adop- cinématographiques les idées vivantes qui lui
tion de nouvelles méthodes culturales, ou de nou- viennent.
veaux types de semences. L a terre est labourée, Depuis quelques années, on assiste à.l'appar-i-
les graines semées, les champs irrigués. Après tion de "l'auteur''de films, qui est à la fois son
transplantation des jeunes pousses, on irrigue scénariste, son réalisateur, son opérateur, son
encore et la nouvelle récolte lève et mûrit. On monteur et son producteur. Cette solution est

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excellente à certains égards, dans la mesure où requis dans un décor proche et d'accès facile
elle signifie que l'artiste est maître de ce qu'ilfait répondant aux exigences du scénario.
et assume l'entière responsabilité de son projet. En règle générale, une petite équipe est plus
Mais cela ne signifie nullement que n'importe quel économique qu'une grande, et peut consacrer plus
auteur est réellement doué pour chacune de ces de temps au tournage. Les frais de voyage et le
branches de l'activité cinématographique. Certes, défraiement d'une équipe nombreuse tournant en
maint réalisateur de films documentairesest aussi extérieur des plans en son synchrone sont très
son propre scénariste ; il fait lui-même les re- lourds. Chaque journée d'une équipe de douze tech-
cherchesnécessaires, écrit le scénario et réalise le niciens, par exemple, tournant dans un lieu où le
film.Cette méthode est excellente, mais tous les réa- producteur doit les défrayer complètement coate
lisateurs ne sont-pas capables de travailler ainsi. très cher. E n revanche, une équipe de deux tech-
L e scénariste, si l'on entend par là un h o m m e qui niciens peut se permettre de prendre plusieurs
comprend et aime le cinéma, mais sait aussi faire jours pour filmerl'événement, l'actionou l'exemple
des recherches objectives, puis analyser, assimi- particulier dont le réalisateur a besoin. L e scé-
ler et mettre en images ce qu'il a appris, aura nariste doit tenir compte de ces considérations
toujours un rôle distinct et précis à jouer. Il s'agit pour élaborer son scénario.
d'une activité spécialisée ;les scénaristes sont peu Mais le scénariste ne doit pas s'intéresser aux
nombreux, notamment dans le domaine du documen- seuls aspects financiers du travail d'une équipe
taire et du court métrage, et très recherchés quand cinématographique. Il importe qu'ilconnaisse la
ils ont donné la preuve de leur compétence. spécialitéet la méthode de travail de chaque membre
L e scénariste doit "écrire" avec réalisme, c'est- de cette équipe. Il est évident qu'il travaillera en
à-dire sans perdre de vue le processus de réalisa- collaboration étroite avec le réalisateur : celui-ci
tion des films. Il est préférable qu'il s'initie à arrêtera sa manière de tourner le film après des
ces opérations et acquière une expérience de pre- discussions détaillées avec le scénariste. Mais
mière main de certains de leurs aspects. C'estla prenons l'exemple de l'opérateur. L e scénariste
seule façon pour lui de prendre conscience des réa- doit avoir des notions (plus qu'élémentaires) de
lités et des techniques particulières du cinéma. cinématographie, savoir quelles sont les caracté-
C'est à ce prix qu'il apprendra à élaborer un scé- ristiques des divers objectifs. Il devrait voir de
nario avec le sens réaliste des dépenses que ce nombreux films, se faire une idée des possibilités
scénario implique et de ce qu'est le budget d'un d'une caméra et de l'effet psychologique et esthé-
film. tique particulier qu'on obtient en utilisant tel ou
tel objectif.
Quand faut-ilutiliser l'objectifà focale variable ?
SCENARIO ET EQUIPE TECHNIQUE Quand ce choix se justifie-t-il réellement et quand
n'est-il qu'un procédé arbitraire préjudiciable pour
L'importance numérique et la composition d'une le film ? Quelles sont les caractéristiques d'un
équipe cinématographique sont des facteurs déter- objectif de 9 mm de focale, d'un grand angulaire
minants pour le budget du film, et le scénariste de type "fish-eye" 7 Certains objectifs créent-ils
doit bien entendu le savoir. C'est de la forme et par eux-m ê m e s un climat psychologique particu-
du contenu de "l'histoire''que raconte le scénariste lier - déformations, nervosité, hallucinations ?
(ou du sujet du film,s'il ne s'agit pas d'une oeuvre Si le scénariste a des connaissancestechniques de
dramatique) que dépendent le nombre de techniciens ce genre, il peut, er, écrivant son scénario, tenir
à recruter et la composition de l'équipe. L e bud- compte des particularités spécifiques du matériel
get du film variera en fonction de ces décisions. et de ses possibilités techniques.
Si le scénariste sait, avant de semettre au tra- D e m ê m e , le scénariste doit avoir une idée
vail, qu'il s'agit d'un film à petit budget, il en dé- précise de la façon dont on peut utiliser la bande
duira aussitat que certaines formes de tournage sonore dans un film. U n bon magnétophone offre
sont exclues : de remarquables possibilités. Il permet d'enre-
(1) le tournage en son synchrone et les dialogues gistrer toute sorte de sons naturels en extérieur
seront trop chers, parce qu'ils supposent un et de les utiliser pour enrichir le film le plus
matériel plus considérable, des acteurs, et des simple. L e bourdonnement d'abeillesdans un ver-
prises de vues en studio, ou dans des condi- ger, de moustiques dans une chambre silencieuse,
tions identiques ; l'ambiance sonore d'une ferme, des bureaux d'une
(2) lestechniques complexes d'animation (animation grande entreprise, d'un bazar, d'une mosquée ou
image par image) seront vraisemblablement d'un temple, peuvent être enregistrés isolément,
trop coûteuses s'il s'agit d'unfilm dans lequel en dehors des prises de vues et incorporés à la
il faut expliquer endétail des processus indus- bande sonore. A l'aide d'un magnétophone, le
triels, chimiques, physiologiques ou agricoles scénaristepeut interviewerles gens qu'il rencontre
complexes ; sur les lieux du tournage ; quand il est impossible
(3) le transport de l'équipe sur différents lieux de OU peu commode de prendre des notes ou d'obtenir
tournage sera trop coûteux et il sera préférable des interviews de type classique, on pourra trou-
(si cela est possible) de tourner tous les plans ver très utile d'enregistrer les observations des
gens (populationlocale, conseillers spécialisés, généralement très personnelles et subjectives. Un
cultivateurs, jeunes enfants), avec toutes les tour- film est généralement la s o m m e de différents ta-
nures idiomatiques et les expressions du langage lents, d'enthousiasmes partagés, de discussions,
courant. L e magnétophone est un instrument aux de compromis, de solutions et d'idées nouvelles.
possibilités multiples : recherche, enregistrement -
Mais on trouve toujours au départ ou du moins
d'effets sonores, de musique jouée sur les lieux devrait-on toujours trouver - un scénario, fonde-
mêmes, des bruits réels émis par des machines, ment, plan et idée directrice du projet.
des animaux ou des véhicules déterminés, ambiances Dans certains cas, si les commanditaires ont
sonores de différentes cérémonies. Pour apprendre des idées très arrêtées et se font représenter par
à faire ces enregistrements, le scénariste doit un comité, et non par une ou deux personnes com-
s'entretenir avec les ingénieurs du son, les pre- pétentes et prêtes à modifier au besoin leurs vues,
neurs de son, les ingénieurs qui procèdent au mi- le scénario finalement approuvé peut devenir une
xage de la bande sonore dans les studios d'enregis- sorte de carcan pour le réalisateur. L'accord
trement. En s'entretenant avec ces divers spécia- donné pour le tournage revêt alors un caractère
listes et en se familiarisant avec leur matériel et très formaliste et ne laisse guère de place à la
ses possibilités, le scénariste, en tant que cher- collaboration. Chaque plan est prévu à l'avance,
cheur, peut apprendre non seulement à mieux voir, chaque mot du commentaire attentivement pesé et
mais encore à mieux écouter. L'oreille prompte approuvé avant l'enregistrement final.
à saisir les sons naturels caractéristiques de son Chaque fois que les choses se passent ainsi, le
sujet (marché de village, clinique, école primaire, film manque de vie, de fluidité, de rythme, de na-
famille d'un cultivateur), il pourra non seulement turel. L a volonté trop apparente d'informer le
noter, mais enregistrer sur bande magnétique, spectateur sur un certainnombre de points confor-
pour son propre compte et pour enrichir le film, mément à un plan préétabli lui confère un carac-
les sons authentiques qui évoquent les lieux et les tère mécanique, artificiel et triste.
gens auxquels il s'intéresse. Il est préférable que les commanditaires c o m m e
Prenons un autre exemple encore, celui du mon- le réalisateur évitent une telie situation. Mais
teur. L'opération qui permet de donner sa conti- l'établissement de rapports suffisamment compré-
nuité et sa fluidité au film,un rythme rapide ou hensifs et souples suppose un effort particulier de
lent, tranquille ou nerveux, une forme structurée part et d'autre.
-
ou impressionniste cette opération, le scénariste E n principe, le scénario doit fournir au réali-
peut s'yinitiers'ilse donne la peine de parler au sateur un plan précis assorti de tous les rensei-
monteur ou, mieux encore, d'aller en salle de gnements et de toute la documentationnécessaires,
montage pour y apprendre par lui-même les tech- dus aux recherches approfondies du scénariste.
niques fondamentales. Qu'il apprenne à faire un L e scénario ne doit pas enchaîner le réalisateur,
raccord entre deux plans, à donner son rythme à car c'est lui, en dernier ressort, qui porte le scé-
une suite de plans, à voir comment l'objectif à nario ou le découpage illustré à l'écran, de m ê m e
courte focale ou le téléobjectif modifient le jeu de que c'est l'opérateur qui "voit" l'image dans son
l'acteur. L e scénariste n'a certes pas besoin d'être viseur et la fixe sur le film en choisissant l'éclai-
un véritable technicien des prises de vues ou du rage, le point, la composition et le mouvement
montage, mais il est souhaitable qu'il connaisse au voulus, et le monteur qui donne au film son rythme,
moins les possibilités, sur le plan cinématogra- sa continuité, sa ligne de récit et son "tempo" dé-
phique, de la caméra, du magnétophone et de la finitifs en travaillant la pellicule. Mais tous ces
table de montage. S'il peut s'en faire une idée gé- techniciens tiennent compte, au départ, de l'infor-
nérale, il en tiendra forcément compte dans son mation donnée par le scénario et de ses lignes de
travail. Ici encore, il ne s'agit pas d'un effort force. C'est le scénariste qui, le premier, fait
d'écriture, mais de mise enimages. L e scénariste des recherches pour bâtir le récit cinématogra-
peut apprendre bien des chosesutiles et fascinantes phique, étudie les lieux, les gens et les situations
en s'entretenant avec l'opérateur, l'ingénieur du à décrire. La synthèse résultante sert à guider
son et le monteur, et en les regardant travailler. le réalisateur, qui donne à son tour des instruc-
Il doit s'efforcer d'établir des rapports amicaux et tions à l'opérateur. L e monteur, enfin, crée la
étroits avec les membres de l'équipe du film. continuité et la structuredu film. Chacun contri-
bue pour sa part à l'oeuvre entreprise, mais tous
s'inspirent d'abord du contenu et des idées direc-
D A N S QUELLE M E S U R E LE REALISATEUR trices du scénario.
DOIT-ILR E S P E C T E R LE SCENARIO Qui est, en dernière analyse, "l'auteur" du film
(ESQUISSE, PLAN PRECIS OU CARCAN) ? (de court ou de long métrage) ? C'estlàuneques-
tion qui prête à controverse. L'influence du pro-
L a réalisation d'un film est un travail d'équipe. Il ducteur sur la réalisation du film est considérable ;
est rare en effet que "l'auteur''d'un film en soit à le réalisateur impose sa vision des choses et sa
la fois le scénariste, l'opérateur, le réalisateur, manière de travailler ; l'opérateur crée, par
le monteur et le producteur. Il existe de tels ar- l'image, un climat particulier ; le monteur donne
tistes protéiformes, mais leurs oeuvres sont au film son r@hme distinctif, en assure la continuité

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et le développement. Aucun de ces spécialistes ne la sympathie des spectateurs. S'il est terne ou
peut prétendre être l'unique auteur, le seulrespon- maladroit, ils deviennent des personnages stéréo-
sable de l'oeuvre entière. L a nature ou l'impor- typés, artificiels et primaires, sans humanité ni
tance de ces différents apports peut varier enfonc- présence réelle. Aussi la présentation de tels
tion de la personnalité des techniciens et de leurs personnages suppose-t-elle beaucoup de talent de
rapports de travail. la part du scénariste. Cette forme de récit sup-
Mais tout commence avec le scénariste. C'est pose l'emploi de comédiens, ou d'acteurs non pro-
sur ses études, ses recherches, ses interpréta- fessionnels, pour tenir les rôles du film et (géné-
tions, que se base le film. C'est lui, dans la plu- ralement) la rédaction des dialogues que ces ac-
part des cas, qui fixe les limites pratiques du su- teurs vont dire. L e coQt du film est alors plus
jet et en définit les grandes orientations. L a sen- élevé, mais l'oeuvre a de meilleures chances qu'un
sibilité et le style particulier du réalisateur, de film purement documentaire d'être bien accueillie
l'opérateur et du monteur peuvent infléchir ulté- par le public.
rieurement le récit, mais c'est l'interprétation L a raison de ce succès est évidente : les gens
première du scénariste qui en fixe initialement la aiment écouter une histoire et s'identifierau héros
forme et le contenu. ou à l'héroïne, dont ils partagent par l'imagination
L e scénario doit donc fournir des idées direc- les aventures. C e phénomène s'explique pour des
trices bien arrêtées au réalisateur, constituer raisons affectives. U n documentaire présentant
l'ébauche du plan de travail véritable. Il doit con- des faits et des arguments sous forme d'essai ne
tenir toute l'information qu'on veut communiquer fera vraisemblablement pas appel à la sensibilité
dans le film, mais il ne doit pas - et, dans la plu- du spectateur, mais l'invitera au contraire à por-
part des cas, ne peut pas - être un moule rigide. ter des jugements sur ces faits et à prendre des
D'autres membres de l'équipe pourront contribuer décisions. Dans un film qui raconte une histoire,
de leur c6té à la réalisation de l'oeuvre et propo- en revanche, le public s'intéresse à l'intrigue et
ser d'autres idées. Mais le scénario est la base aux aventures des personnages principaux. Si le
m ê m e du film. film doit comporter une leçon ou une morale, ou
renseigner le spectateur sur certains points, ces
divers éléments pourront être incorporés au récit
QUALITES ET FAIBLESSES DU FILM A ACTEURS proprement dit, aux expériences vécues par les
personnages du film. L e public peut alors s'ins-
L a réalisation d'un film documentaire, d'un film truire, ou comprendre la leçon ou la moralité du
pédagogique ou d'un film "de motivation" conçu film,par l'exemple pour ainsi dire, et non par un
pour amener le public à adopter une certaine ligne processus intellectuel consistant à recevoir et à
de conduite, soulève généralement la question de assimiler des renseignements présentés sous
savoir s'il faut présenter le film SOUS forme d'l'his- forme cinématographique.
toire", c'est-à-dired'un récit dramatisé dont le Il y a évidemment de nombreux types de film
personnage principal s'exprime en son synchrone qui ne se prêtent pas du tout à cette "dramatisa-
à l'écran, ou sous la forme d'un véritable essai, tion". Les films purement pédagogiques ou tech-
c'est-à-dire d'un exposé simple et clair accompa- niques, qui ont pour objet principal de traiter une
gné d'un commentaire dans la bande sonore. question donnée, se passent d'une présentation
L e récit "fictif", avec des acteurs et des dia- "dramatique" qui ne leur apporte rien. E n re-
logues, peut prendre de nombreuses formes. Il vanche, les films de "motivation", conçus pour con-
présente de grands avantages, mais il a également vaincre le public d'adopter telle ou telle ligne de
certaines limitations. conduiteou quelque nouveau programme social,
L e premier problème - problème essentiel est- peuvent adopter cette forme.
d'intéresser le public. Quelle est la forme qui s'y S'il s'agit, par exemple, d'un film visant à m o -
prête le mieux 7 Cela dépend en partie du sujet du film, difier des attitudes socialestraditionnelles, il peut
des crédits disponibles et dutalentdu scénariste. être intéressant de lui donner la forme de récit et
L a première méthode permettant de susciter d'y faire figurer des types humains familiers,
l'intérêt et de retenir l'attention du mectateur est dans lesquels le public pourra s'amuser à recon-
sans doute celle de l'identification, qui consiste à naftre des célébrités locales.
faire incarner par des comédiens des "personnages" - Mais le scénariste et le réalisateur se heurtent
pour lesquels le public ressent de la sympathie et ici à certains problèmes. L e récit doit être E n -
~

auxquels il peut s'identifier : un héros, un "brave vaincant. Dans un film de long métrage, dont le
garçon", un personnage caractéristique,un h o m m e seul objet est de divertir, il n'est pas trèsimpor-
moyen, un cultivateur moyen, un écolier moyen, tant que l'histoire et les personnages soient vrai-
un "jeune h o m m e plein d'avenir'',un "jeune culti- semblables. Mais dans un film documentaire, qui
vateur ambitieux", une "épouse et mère dévouée". doit présenter des problèmes et des personnages
Tous ces personnages se rencontrent souvent dans réels de manière à convaincre le spectateur, il
les ouvrages de fiction, dans les brochures péda- est important que les personnages et leur histoire
gogiques et dans les films. Si le scénario est habile, soient tout à fait vraisemblables.
ils s'imposent avec force et netteté, et s'attirent C e problème concerne surtout le réalisateur.

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Il est relativement facile pour le scénariste d'ima- fictif dialogué qu'un pur et simple documentaire ;
giner des situations dramatiques et des personnages e récit fictif place le réalisateur devant cer-
dans un décor réel, mais cela est plus vite fait sur taines difficultés : rendre le jeu des acteurs
le papier que sur la pellicule. L e réalisateur se de métier vraisemblable et celui des non-pro-
heurte à une tâche plus ardue. S'il emploie des fessionnels détendu et naturel ;
acteurs, ceux-ci doivent jouer de façon convain- e récit fictif ne permet pas de communiquer
cante et avec naturel, c o m m e des "gens réels". autant d'information que le documentaire ou
Diriger un acteur dans un r6le de cultivateur, par "l'essai''cinématographique courant ;
exemple, présente bien des difficultés. Le comé- le récit fictif permet cependant de présenter
dien saura-t-il soigner les animaux, se servir l'essentiel de l'information de façon plus
d'une charrue et d'outils ? Peut-il passer pour un efficace ;
paysan ? Q u e penseront de véritables cultivateurs le récit fictif a de meilleures chances de capti-
de son jeu ? Tous seraient prêts à accepter, dans ver l'attention du public ;
un film de pur divertissement, qu'un tel r61e soit il existe cependantplusieurs catégories de films
tenu par une vedette, mais cela ne veut pas dire qui ne se prêtent pas à ce genre de traitement
qu'il en sera de m ê m e dans le cas d'un film docu- (récit dramatique avec acteurs) ;
mentaire. Les facultés critiques du public seront le scénariste doit alors s'efforcer d'imaginer
alors beaucoup plus aiguës, il relèvera des erreurs une présentation qui puisse intéresser l'au-
d'interprétation qui ne le gêneraient nullement dans ditoire et retenir son attention ;
un film racontant une histoire fictive. Si le docu- l'enseignement didactique a, de nos jours, de
mentariste veut entretenirun public de cultivateurs, moins en moins la faveur du public (que ce
dans un village, de quelque chose qui touche à la soit dans les salles de spectacles ou ailleurs,
vie quotidienne et aux habitudes de ce public, il dans les villes, les zones rurales ou les
verra les facultés critiques s'aiguiser et les spec- écoles);aussi le problème numéroun du scé-
tateurs détecter aussit6t toute fausse note dans le nariste est-il de trouver de nouvelles façons
jeu des acteurs. de présenter son sujet au public, non en lui
i
L a grande difficulté du récit fictif, dans un film dictant une leçon, mais en le rattachant à sa
documentaire, est de réussir à combiner l'authen- vie quotidienne, à ses besoins et centres
ticité et l'intérêt dramatique. L e scénariste veut d'intérêt.
intéresser son auditoire aux personnages du film ; Il n'y a évidemment pas de frontière nette entre
d'autre part, il veut communiquer de l'information le récit de fiction interprété par des acteurs et le
et des points de vues qui touchent à l'existence film documentaire. L e documentariste peut utili-
réelle du public. Aussi le scénario doit-il être ser desacteurs ou despersonnages sans les faire
exact et donner une impression juste des habitudes parler, en remplaçant les dialogues par un com-
et des conditions de la vie quotidienne locale. Si mentaire judicieusement écrit et conçu. Un film
on emploie des acteurs, le jeu ne doit pas être peut Petracer des événements ou une expérience
"théâtral", de manière que le public oublie qu'il réels en prenant pour acteurs les gens qui les ont
s'agit de comédiens. Si les acteurs sont non pro- vécus, sans devenir pour autant un véritable film
fessionnels, il faut les diriger de manière que leur de fiction.
jeu semble naturel, simple et vraisemblable, ce L e cinéma est un mode d'expression infini-
qui est extrêmement difficile. ment souple. L e scénariste étudie son sujet, se
Aujourd'hui, dans bien des pays du monde, le rend sur les lieux de tournage, s'entretient avec
grand public est de moins en moins enclin à écou- des personnes compétentes. Quand vient le mo-
ter ceux qui veulent lui donner des leçons, lui dire ment de rédiger son scénario, il se trouve devant
ce qu'ilefaire et ce qu'il= savoir. Les jeunes, de nombreuses possibilités, peut choisir entre de
en particulier, à l'est c o m m e à l'ouest, dans les nombreuses voies. Mais il lui faut aussi tenir
pays en voie de développement c o m m e dans les compte des besoins du réalisateur : le scénario
pays riches, n'acceptent plus de façon incondition- proposé peut-il être tourné à peu de frais ? Pré-
nelle les dogmes et les oukases de leurs alhés. sente-t-ilun intérêt pour le public ? Est-il vrai-
C'est là une raison supplémentaire de préférer le semblable ? Est-il réalisable, du point de vue
récit fictif vraisemblable à l'exposé dogmatique technique, pour le réalisateur et son équipe ?
qui renseigne le public en lui imposant des conclu- Un récit fictif, une présentation "dramatique"
sions toutes faites. L a tradition de l'enseignement du sujet, sembleront souvent les solutions les
didactique est sur le déclin dans de nombreux pays. plus intéressantes. Mais il n'existe pas de règle
Il est donc souhaitable que le cinéma, c o m m e absolue dans ce domaine.
d'autres moyens d'expression, trouve de nouvelles
voies, de nouveaux procédés, de nouveaux styles,
des méthodes neuves et intéressantes. C'est au L E S DIALOGUES
réalisateur du film, et plus particulièrement au
scénariste, qu'il incombe de relever ce défi. Les dialogues sont presque inévitablement influen-
En résumé : cés par le théâtre. Pourtant, les rapports entre
il est plus coûteux de porter à l'écran un récit comédiens et spectateurs ne sont pas du tout les

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m ê m e s au théâtre et au cinéma. L'acteurde cinéma donné qu'un dialogue est généralement un échange
n'a pas besoin de "passer la rampe" c o m m e le co- de répliques entre deux personnes. Mais l'acteur
médien. Les conventions que le public accepte au peut, dans certains cas,.se tourner directement
théâtre (scène, proscenium) n'existent pas au ci- vers l'objectifc o m m e s'il s'adressait au public
néma. Les dialogues de cinéma sont beaucoupplus m ê m e . Ce procédé crée un effet de surprise et
intimes, familiers, naturels - beaucoup moins peut renforcer l'intérêt du spectateur.
"structurés" - que les dialogues de théâtre. Pour le scénariste spécialisé dans le film do-
L e scénariste doit avoir de l'oreille, connaftre cumentaire ou de ''motivation",l'élaboration des
les expressions et les tournures de langage e m - dialogues pose un problème particulier, car il lui
ployées par des gens de toutes les classes et tous faut satisfaire à deux exigences contradictoires
les milieux. Comment s 'exprimentun chauffeur inhérentes à ce genre de films :
de taxi, une vendeuse dans un marché ? Comment (1) les dialogues doivent être adaptés aux per-
un petit fonctionnaire s'adresse-t-ilà ses subor- sonnages incarnés par les acteurs, et
donnés, à ses supérieurs hiérarchiques ? C o m - (2) ils doivent fournir des renseignements ou
ment s'expriment un riche marchand, une dame de susciter des attitudes essentielles dont le
la bourgeoisie aisée, un ivrogne ? film est le véhicule.
L a pire forme de dialogue est celle qui n'a Il est parfois extrêmement difficile, ou presque
d'autre objet que de renseigner le spectateur, sans impossible, pour le scénariste, de concilier ces
refléter la personnalité véritable de celui qui parle. deux exigences. L a brièveté du film documentaire
On trouve cette faute dans de nombreux documen- ne permet guère de fouiller la psychologie des
taires, dont les dialogues n'ont aucune réalité. Or personnages. Chaque réplique, chaque geste doivent
le public le moins cultivé ne manque pas de le re- contribuer à bâtir le personnage si l'on veut que
marquer et, aussitat, de cesser de croire au film. le jeu des acteurs semble vraisemblable. En
Les réalisateurs ont actuellement de plus en plus m ê m e temps, les acteurs doivent réussir à faire
tendance à demander aux acteurs d'improviser les comprendre par leurs gestes, par leurs paroles
dialogues. Les répliques ne sont plus écrites et (comme ils le peuvent) les attitudes, les situations
apprises par coeur ; les comédiens discutent entre ou les exemples essentiels qui constituent le con-
eux de la situation dramatique qui leur a été décrite tenu principal du film, sa raison d'être. E n effet,
en détail. Au moment du tournage, ils s'expriment le documentaire n'est pas simplementun récit, un
spontanément, en improvisant le dialogue devant spectacle, mais une histoire avec une "morale",
la caméra. Cette méthode donne parfois des dia- ou plutôt une histoire faite pour informer le pu-
logues étrangement artificiels et de qualité inégale ; blic, et sa raison d'être est avant tout de commu-
dans les meilleurs cas, elle crée une impression niquer de l'informationouun "message" essentiels.
saisissante de vie, de réalisme et de spontanéité. D'oùles difficultés que doit résoudre le scénariste.
Quel est le rôle du scénariste quand les acteurs U n bon moyen de rendre un documentaire vivant
improvisent les dialogues ? S'il n'a plus le souci est de varier la bande sonore en combinant dia-
d'écrire chaque réplique, il doit donner une des- logues et commentaire. Certaines répliques sont
cription très claire et très complète de la situation dites par les interprètes, à des moments essen-
dramatique pour que le rêalisateur et les acteurs, tiels du récit. Mais beaucoup de séquences où ils
en la lisant, sachent exactement de quoi il retourne figurent sont tournées en muet ; on peut y ajouter
et quel est le résultat désiré. C'est ensuite au ensuite quelques effets sonores, une partition mu-
réalisateur qu'il incombe de diriger les acteurs de sicale ou un commentaire "off", qui peut d'ailleurs
manière à utiliser efficacement la méthode de être dit par l'un des acteurs, dont on entend la
l'improvisation. voix dans la bande sonore sans le voir dans l'image.
Les possibilités d'improvisation des dialogues Cette doubleutilisation de la voix de l'acteur(dans
sont sans doute moins grandes dans les films do- les dialogues synchrones et dans un commentaire
cumentaires que dans les longs métrages. Mais "off" dit par le m ê m e personnage) peut contribuer
toute technique qui contribue à accentuer le réa- à donner une certaine cohésion et une perspective
lisme d'un film mérite d'être mise à l'essai. L e unique au récit.
"cinéma-vérité", les techniques de la "caméra in- Il est indubitable qu'en employant des acteurs
visible", du "free cinema", qui consistent à filmer et en donnant une intrigue à un film documentaire
des événements réels, spontanés, au moment m ê m e on en augmente l'impact et l'intérêt en tant que
où ils se déroulent devant l'objectif, traduisent spectacle. L e problème est de le faire à bon es-
aussi le besoin que ressentent les cinéastes con- cient. Ici encore, le cinéma se révèle un moyen
temporains d'enregistrerle réel dans son actualité, d'expression très souple. I i n'est pas nécessaire
son essence immédiate, sans préparation ni d'utiliser les acteurs dans toutes les scènes du
préméditation. film, ni d'avoir des dialogues pendant toute sa
Une conception moderne du jeu veut que les ac- durée. On peut au contraire combiner les scènes
teurs, ou les personnages du film, disent leurs ré- jouées avec des séquences d'un autre genre et
pliques en se tournant vers la caméra, c'est-à-dire d'autres types de commentaire dans la bande so-
en s'adressant directement au public. C e procédé nore. L e problème essentiel est de fondre ces
n'est évidemment pas toujours applicable, étant divers éléments en un scénario clair et bien

21
construit ; loin de se nuire les uns aux autres, ils proscrire. U n commentaire doit, par sa nature
donneront alors plus de cohérence au contenu docu- même, être dépouillé, sec, concis et dit c o m m e
mentaire et aux idées essentielles du film. une série de notes et non c o m m e des phrases et
Il est difficile d'examiner ces questions sans se des paragraphes longs et complexes. Il est tou-
reporter à des exemples concrets. On trouvera à jours possible, après avoir écrit un commentaire,
l'appendice une liste de films documentaires utili- de le relire soigneusement et de biffer de nom-
sant les dialogues de façon efficace, parfois en -
breux mots ici et là 15 % environ du texte, par
combinaison avec d'autres procédés. Ces films exemple. Une seconde relecture permettra de
permettront aux lecteurs de se faire une idée plus rayer d'autres mots inutiles (5 qo du texte, par
nette des principes et méthodes dont il vient d'être exemple). Après s'être accordé une trêve de 24
question, heures, l'auteur, en écoutant une fois de plus le
commentaire en regard de l'image, trouvera qu'il
peut encore supprimer 5 70 du texte. Toutes ces
LE COMMENTAIRE ratures seront certainement bénéfiques ; elles
donneront au comrhentaire une certaine "respira-
La rédaction d'un commentaire est un art mineur, tion", et aideront le public à en assimiler les
mais de la plus haute importance. Art mineur, points essentiels.
parce qu'il faut bien admettre que le commentaire L a concision est la première qualité d'un com-
est rarement l'élément le plus important d'un film, mentaire. Untexte ordinaire,une phrase de cons-
ce que le spectateur en retient. L e commentaire truction habituelle, contiennent beaucoup de mots
n'est qu'un élément auxiliaire du film, qui ren- superflus. Penser à écrire sous forme de notes,
force ou complète le contenu documentaire du film, sans verbe. Certains poètes le font ; les mots qui
de l'image. Mais il y a divers moyens d'obtenir subsistent dans la structure du poème sont des
ce résultat. mots clés, des mots images, des mots pleins de
On dit parfois qu'un bon commentaire ne se re- sens. Non des mots purement décoratifs, ou co-
marque pas, que le public en est à peine conscient. pulatifs, ou répétitifs, qui n'ajoutentrien d'impor-
E n d'autres mots, l'image est si captivante que le tant au 9.
spectateur ne voit qu'elle, et prête une attention L e style n'est pas à négliger. Mais par style,
distraite au texte de la bande sonore. Pourtant, le il ne faut pas entendre une manière d'écrire très
sens des mots est bien compris, m ê m e si le public élaborée ou verbeuse. L e style peut naïïre de
n'est pas conscient d'écouter le commentaire. Ce l'intonation de la voix, de la qualité d'un senti-
paradoxe s'explique si l'on considère les deux as- ment, du choix d'un mot juste, utilisé au bon m o -
pects du commentaire, (1) sa rédaction et (2) la ment, quand l'image l'appelle, quand l'image et
façon dont il est dit. la parole combinées se complètent et se renforcent
L'écueil principal, pour ce qui est de la rédac- réciproquement.
tion d'un commentaire, est la verbosité. Cette Dans bien des documentaires, il est inutileque
faute peut être due à la pure négligence, au fait que le commentaire décrive le contenu effectif de
le scénariste a oublié qu'un film est avant tout une l'image. Après tout, le spectateurs ces images
oeuvre visuelle ;: elle peut s'expliquer aussi par et comprend ce qui se passe. Mais le commen-
l'impossibilité d'écrire dans un style simple, dé- taire peut expliquer la signification de ce qui est
pouillé et sobre permettant à l'auditeur d'écouter montré. Prenons un exemple : un garçon marche
et d'assimiler ce qui est dit sans difficulté et sans dans la rue d'un village, la caméra l'accompagne,
risque de confusion. elle panoramique pour cadrer un temple ;le gar-
Il ne faut pas oublier, en effet, cette vérité évi- çon se dirige vers le temple, d'autres personnes
dente qu'un commentaire s'adresseuniquement à vont dans la m ê m e direction. On pourrait imagi-
l'oreille et n'est entendu,qu'une seule fois. L e pu- ner le Commentaire suivant : "Le garçon se fraye
blic ne dispose pas de texte écrit, ne peut pas s'y un chemin à travers la foule qui encombre la rue
reporter pour s'assurer qu'il a bien compris ce du village, où chacun vaque à ses occupations
qui vient d'être dit. E n outre, l'attention du spec- quotidiennes, et se dirige vers le lieu du culte.
tateur est sollicitée à chaque seconde du film par Beaucoup d'autres fidèles s'y rendent aussi en ce
les images, sa préoccupation principale est d e E - jour saint. " Mais le spectateur voit très bienque
garder. L e commentaire passe au second plan. le garçon fend la foule, qu'il se dirige vers le
Aussi le texte doit-il être dit avec simplicité, être temple et que d'autres personnes font la m ê m e
lui-même simple, facile à comprendre et concis chose. Ces explications sont donc superflues et
si l'on veut que le spectateur l'écoute. peuvent être supprimées du commentaire. L e
L'écrivain spécialisé dans la rédaction des commentaire pourrait nous renseigner sur la &-
commentaires devrait se répéter tous les matins gnification de ce que nous voyons, au lieu de @-
(à l'occasion, par exemple, d'une période de mé- crire la scène, que le spectateur voit déjà. Il
ditation) que le commentaire d'un film n'est pasun serait donc préférable d'adopter le texte suivant :
texte littéraire et que les métaphores, les phrases "En ce jour faste de fin de la moisson, de nom-
ronflantes, les subordonnées, les mots superflus breux villageois prennent letemps de rendre grâce. "
- tout ce qui rappelle ''lesbelles lettres''- sont à L e spectateur voit bien, eneffet, qu'ils se rendent

22
au lieu du culte sans qu'il soit besoin de le préci- L e montage consiste en s o m m e à donner une
ser en autant de mots. certaine fluidité à la suite des images. Les plans
Dans ce cas encore, il est difficile de préciser se succèdent, l'intriguese développe, sa signifi-
en quoi consiste un bon commentaire pour tel ou -
cation apparaît progressivement tout le film est
tel genre de films, sans recourir à des exemples un récit, une révélation progressive, une suite
concrets qui ne peuvent être étudiés qu'en projec- fluide, et cela doit se sentir dans le commentaire.
tion. On trouvera dans l'appendice une liste de Considéré isolément, un commentaire écrit a
films dont les commentaires sont remarquablement peu en c o m m u n avec un texte "littéraire". A la li-
efficaces. Il sera utile de voir ces films en écou- mite, la lecture d'un commentaire sans les images
tant attentivement la bande sonore. Après la pro- qui l'accompagnent ne donnerait m ê m e pas d'idée
jection, on pourra faire repasser le film sans pro- précise du sujet du film à une personne qui ne
jeter l'image, en écoutant seulement la bande so- l'aurait pas vu. S'il est inutile de parler, dans le
nore. L'intéressé se souviendra des images et commentaire, de ce qui est évident et apparaît à
pourra alors mieux apprécier, en fonction de ses l'écran, il s'ensuit que ce texte n'expliquera pas
souvenirs, le texte du commentaire. nécessairement ce que l'imagemontre, puisqu'elle
E n règle générale, on peut dire que : se suffit à elle-même à cet égard. L e commen-
les phrases d'un commentaire doivent être aussi taire explique au contraire ce que l'image signifie,
courtes que possible ; apporte des explications, des observations et tire
la longueur des phrases doit cependant varier des conclusions à partir des actions montrées à
pour que toutes n'aient pas la m ê m e longueur l'écran. L e texte doit commenter l'image au se-
(cequi créeraitun effet de répétitionhypnotique); cond degré en quelque sorte, interpréter et analy-
il n'est pas nécessaire de donner à toutes les ser les images documentaires. Ces observations
phrases la structure courante : sujet + verbe ne s'appliquent évidemment pas au film pédago-
+ complément ; gique ou didactique ordinaire, qui décrit un pro-
beaucoup de phrases peuvent être rédigées en cessus technique ou industriel ou un phénomène
style télégraphique, c'est-à-direqu'on se bor- scientifique (physiqueou biologique). Nous voulons
nera à mentionner l'idée ou l'aspect essentiel surtout parler ici du film documentaire ou de "mo-
de ce qui est montré sans construire une tivation", qui présente un récit discursif sous
phrase complète ; forme "dramatisée" ou non, c'est-à-dire du film
il faut ménager, dans la bande sonore, des "si- d'information générale et non du film d'informa-
lences" qui lui donnent une respirationet per- tion technique ou scientifique.
mettent d'ajouter des effets sonores ou de la L a rédaction des commentaires de film est
musique ; ou m ê m e ménager des moments de certes un art, m ê m e s'il s'agit d'un art mineur
silence complet ; tributaire. L e talent de l'auteur consiste à trou-
l'oeil et l'esprit du spectateur ont besoin de ces ver des mots qui correspondent à l'idée dominante
pauses intermittentes pour assimiler défini- de l'image, à ce que voit le public. Par leur struc-
tivement l'information donnée par l'image ; ture, leur ton, leur couleur, leur rythme et leur
il faut toujours penser, en écrivant le commen- trame, les courtes phrases du commentaire doivent
taire, au contenu et aux mouvements de la compléter l'image, non la copier, lui servir de
séquence image. Si celle-ci présente, par légende, la noyer sous un flot de paroles. Et en
exemple, un événement frappant et passion- ce sens le commentaire, m ê m e si on ne le remarque
nant, le commentaire doit soit anticiper cette presque pas et qu'on croit à peine l'écouter, peut
action et l'amener en expliquant àl'avance ce considérablement renforcer l'oeuvre entière. 11
qu'elle signifie, ou suivre cette action en la est au film ce que la carcasse invisible est à la
commentant ou en l'expliquant. Mais le m o - façade d'un batiment : c'est à lui que l'oeuvre doit
ment m ê m e où l'action se déroule se passe sa forme, son équilibre, son sens. Ce résultat
de commentaire, pour que l'oeil puisse la est plus aisé à atteindre pour l'auteur qui connaît
suivre et la goûter sans être distrait ; une bien les problèmes du montage et de la construc-
partition musicale, des effets sonores ou le tion d'un film.
silence seront alors un bien meilleur accom-
pagnement que des mots, qui nuiraient à la
concentration du public et au plaisir que lui RYTHME ET CONTINUITE
procure le film à ce moment précis.
C o m m e pour les scénarios, la rédaction d'un com- Nous avons parlé, à la section précédente, de la
mentaire est facilitée si son auteur connaft relati- continuité du récit. Bien que la question soit dé-
vement bien le processus de réalisation cinémato- licate et difficile à cerner avec des mots, elle
graphique. Une bonne initiation au montage, par est des plus importantes. Toute oeuvre, qu'il
exemple, est très importante pour ce genre de tra- s'agisse de littérature ou de musique, est faite
vail. L'auteur d'un commentaire devrait savoir de rythmes. On pourrait également employer le
comment se construit une séquence et comment le terme "pulsations". Un poème, un essai, une
montage permet de donner un certain rythme au nouvelle,une chanson,une symphonie, contiennent
film. des éléments structurels et rythmiques. On y

23
trouve des passages lents ou rapides, empreints Il y a de nombreuses analogies entre le rythme
de tendresse ou de vigueur. Il en est de m ê m e cinématographiqueet la musique. U n film,c o m m e
pour les courts métrages. On ne peut conserver un morceau de musique, se compose de phrases,
d'un bout à l'autre le m e m e ton, le m ê m e tempo, de développements, de motifs répétés, qui vont en
le m ê m e rythme, surtout au cinéma qui est par s'amplifiant de l'exposition initiale jusqu'au plein
excellence "art du mouvement". L a cadence, le épanouissement de 1'oeuvre.
rythme, doivent être variés, différenciés. Sinon, L a coupe d'un plan à un autre se fait souvent
le film sera terne, plat, hypnotique, dépourvu de sur un "temps fort". Dans bien des cas, il existe
variété, d'intérêt, de cette tension intérieure sans un rythme propre à chaque plan qui en dicte la du-
laquelle l'oeuvre ne se développe pas de façon sa- rée et la place au monteur. L e montage est d'ail-
tisfaisante. Aussi faut-il varier le rythme, le leurs en grande partie affaire de "phrases" et de
tempo, la "couleur" et le ton des courts métrages, rythmes, puisqu'il s'agit d'équilibrer la durée des
c o m m e c'est le cas d'ailleurs pour bien d'autres plans, des séquences et des différentes parties du
formes d'expression artistique. film entre elles. Cet art s'apprend par l'expérience,
Ce doit être là une des idées maîtresses du scé- mais il demande aussi de l'intuition ; les textes et
nariste quand il commence à ébaucher son scéna- manuels spécialisés peuvent être d'un certain se-
rio. Comment le film commencera-t-il ? Par cours, mais c'est seulement la pratique du montage,
une scène d'action passionnante, ou une séquence c o m m e monteur ou c o m m e assistant, qui permet de
ample, tranquille, sereine, paisible ? Que se comprendre vraiment cette opération, laquelle sup-
passera-t-il ensuite ? Quel sera le moment cul- pose de la sensibilité et un contact direct avec la pel-
minant du film ? Comment ce moment sera-t-il licule. L e scénariste ferabiende s'initier au mon- -
traité ? Se situera-t-il à la fin du film, avant la tage, et notamment de suivre du début jusqu'à la
fin, au milieu ? L'histoire commencera-t-elleà fin le montage d'un film dont il a lui-même écrit
notre époque ? Ou bien jadis, si le récit est en le scénario, afin de voir comment les différentes
partie historique ? Y aura-t-ilun "flashback" ? séquences s'agencent, quelles idées donnent nais-
Une série de "flashbacks" à différents moments du sance à des effets vigoureux et réussis, quelles
film ? L e film finira-t-ilc o m m e il avait commencé, autres manquent de clarté et ne font pas progres-
de manière que le récit ait une forme cyclique où ser le récit.
viendront s'inscrire les explications ? Rappelons une fois encore que le travail du scé-
L e scénariste doit donc réfléchir à des problèmes nariste n'est qu'un élément de la réalisation du
de structure, de diversification, de rythme, de film,et qu'il doit se fondre harmonieusement avec
tempo. Le film doit comporter des variations in- les autres opérations pour donner l'oeuvre finale.
térieures, des séquences rapides et lentes, violentes Mais le scénario a une importance fondamentale
et calmes, sombres et gaies. Nous connaissons parce qu'il fournit la première et la principale
tous ce vieux poncif cinématographique des "joyeux ligne directrice du récit, et précise le contenu du
villageois qui célèbrent la fête de la moisson après film à venir, l'interprétationqu'il donnera du sujet
avoir engrangé une abondante récolte". Cette fête traité.
figure dans les films de tous les pays qui ont un
studio de cinéma. On trouve des réjouissances
villageoises en Equateur, en Ukraine, en Inde, aux LE S T Y L E CINEMATOGRAPHIQUE
Etats-Unis, en Corée, au Kenya, en Turquie par- -
tout où il y a un programme de développement agri- L e style d'un film n'est qu'en partie l'oeuvre du
cole, où l'on cultive de nouvelles espèces, où l'on scénariste. Celui-ci doit cependant connaître les
emploie de nouvelles semences et de nouvelles m é - multiples facteurs qui donneront son style général
thodes culturales. Partout, ces joyeux villageois à l'oeuvre achevée. Nous avons parlé de la pho-
battent la mesure du pied et tourbillonnent dans tographie, de la réalisation, du montage, du rythme
leurs danses folkloriques. Si ce vénérable cliché du montage, du dialogue et du commentaire. Mais
revient si souvent, c'est que tout film doit compor- il faut signaler d'autres facteurs encore.
ter des pauses, des changements de rythme qui con- A partir de l'instant où les premières images
trastent avec les séquences difficiles, dépouillées et apparaissent sur l'écran, un style se dégage du
documentaires où il est question de la bataille de l'en- film (que ce soit intentionnellement ou en raison
seignement ou de la diffusion des nouvelles méthodes d'une carence du réalisateur). Quel est le pre-
culturales qu'on veut faire adopter au pays. mier titre, le premier"carton" apparu sur l'écran ?
Il faut au scénariste une certaine expérience et Est-il d'un dessin franc, identifiable, agréable à
de l'imagination pour prévoir les changements de regarder ? Ou bien le générique est-il confus,
rythme qu'engendrera chaque nouvelle séquence de pauvre, rayé, tiré à partir d'un négatif fatigué
son projet. Il est pourtant nécessaire qu'il s'en par une trop longueutilisation ? Quelle est la m u -
fasse une idée, qu'il imagine les lignes de force sique du film ? Une fanfare claironnante ? Une
qui détermineront la structure et les séquences chanson ? Une musique anonyme "comme on en
clés du film,pour pouvoir varier ses effets et rendre entend partout", ou une partition musicale ou so-
vivant un récit qui resterait autrement terne, banal nore choisie pour créer un effet particulier, sus-
et monotone. citerune réaction déterminée, plonger en quelques

24
secondes les spectateurs dans un certain état compositeur, au décorateur, de faire les expé-
d'esprit ? riences qui les tentent. Si le résultat est satis-
Quelle allure a le générique ? oii est-il placé ? faisant et apporte quelque chose au film, s'il crée
Au début du film, sur un seul carton ? Est-il bien un effet qui intrigue ou charme le public, il faut
dessiné ? Y a-t-il des motifs décoratifs, les ca- le conserver.
ractères sont-ils élégants ? L e générique est-il C'est le manque d'imagination qui rend un
animé ? Les lettres se détachent-elles en surim- film ennuyeux. Beaucoup de films documentaires
pression sur un décor faisant partie du film pro- laissent trop peu de jeu à l'imagination. Pourtant
-
prement dit ? L e générique à supposer qu'ilsoit le film documentaire le plus simple peut procurer
-
long est-il placé au début ou à la fin du film ? un certain plaisir esthétique si la leçon qu'ilcon-
Y a-t-ilun prégénérique qui laisse le public dans tient et la présentation qui en est faite sont belles,
l'incertitudede ce qui viendra ensuite ? Telles équilibrées et claires. Cette présentation peut se
sont les questions qui peuvent se poser à propos faireà l'aidede titres, de graphiques, de courbes,
du générique. Est-ce au scénariste d'y réfléchir, de séquences animées, de photographies fixes, de
en fonction de l'effet global, du style de l'ensemble dessinsutilisés de façon créatrice. L e scénariste
de l'oeuvre ? doit garder toutes ces possibilités à l'esprit.
Supposons que le film comporte des cartes ou L e type général d'un film dépend de multiples
des graphiques explicatifs. Quelle en sera la pré- détails, de la s o m m e d'un grand nombre de fac-
sentation ? Une carte plane ? Une carte repré- teurs partiels. Bande sonore : qualité, durée et
sentant une région ? U n globe ? Quel sera le type impact de la musique, efficacité d'effets sonores
de projection des cartes ? Seront-elles stylisées déterminés. Aspect du générique : caractères
ou de modèle courant ? L a majorité des specta- utilisés, titres (est-ilintéressant, intrigant, cu-
teurs savent-ils lire une carte ? Est-ce le cas rieux, mystifiant, excitant, terne ? ). Rythme du
des villageois et des paysans ? Les enfants savent- montage, ton du commentaire, qualité de la voix
ils lire les cartes ? de la personne qui le dit : intelligibilité de ce com-
Il en va se m ê m e pour les graphiques. Dans mentaire. Rythme et fluidité propres du film (le
quelle mesure différents publics comprennent-ils film est-il captivant ? Les séquences sont-elles
un exposé fait à l'aide de graphiques ? Peut-on suffisamment différenciées ? L e rythme ne semble-
incorporer des graphiques dans n'importe quel t-il pas un peu long par endroits ?).
film ? Est-ce à déconseiller (tableaux de pourcen- Toutes les décisions et tous les choiximportants
tage, courbes d'expansiondémographique, chiffres pour le film ne dépendent évidemment pas du scé-
relatifs à l'emploi, besoins en matière de nutri- nariste, mais celui-ci peut souvent les prévoir
tion) ? L e scénariste devra étudier des films com- dans le scénario initial. Indiquer, par exemple,
portant des graphiques et les faire projeter devant le genre d'effet qu'il faut obtenir à l'aide du géné-
un public. Il devrait chercher à savoir si ces gra- rique, des graphiques, de la musique ou des ef-
phiques ont permis de communiquer l'information fets sonores. Il s'acquittera d'autant mieux de
voulue aux spectateurs. Quel est l'avis à ce sujet cette tâche qu'il sera lui-même initié aux proces-
du directeur du programme, de l'enseignant, de sus de réalisationd'unfilm, et notamment au mon-
l'animateur de groupes de discussion ? Qu'en tage, stade auquel les dernières touches (géné-
disent les spectateurs ? Ont-ils compris les gra- rique, présentation) sont apportées à l'oeuvre
phiques, ou ceux-ci leur ont-ilsbrouillé les idées ? achevée. Pour écrire un scénario, il aura alors,
E n 1966 et 1967, le réalisateur français Jean- dans une certaine mesure, tous ces facteurs à
Luc Godard a utilisé des intertitres, des affiches l'esprit et se préoccupera non seulement du con-
et des dessins dans ses films de long métrage. tenu du film, des dialogues, de la documentation
Godard utilisait ces objets c o m m e éléments d'in- et de la rédaction du commentaire, mais de l'as-
formation, mais les présentait de façontrès abrupte pect global du film, de sa tonalité et de son climat
dans ses films, moins c o m m e documents véritables généraux.
que c o m m e symboles, rapports intuitifs, clés m e - Prenons l'exempled'un scénaristenovice chargé
nant à des idées nouvelles. de concevoir un nouveau film, ou un nouveau pro-
C e procédé ressemble à celui que les peintres gramme cinématographique, alors que les possi-
appellent "collage", qui consiste à agencer en une bilités techniques dont il dispose sont réduites et
seule image des objets divers - images découpées, que son expérience de la production cinématogra-
symboles graphiques et signes de différents types. phique est limitée. E n abordant ce nouveau moyen
Il n'y a aucune raison de ne pas combiner ces élé- d'expression, le scénariste se sentira certaine-
ments disparates dans un film, si le résultat est ment inquiet, peu sûr de lui. Quelles règles gé-
efficace et frappant, et dans la mesure où il élu- nérales peut-il suivre ?
cide ou renforce tel ou tel aspect de l'oeuvre. Il existe certes des règles de ce genre, mais
On admet de plus en plus volontiers aujourd'hui rares sont celles qui ont une valeur absolue. Il
que le film est une "forme libre". L a réalisation faudrait en effet pour cela que la réalisation d'un
d'un film, quel que soit le genre auquel celui-ci film se fasse selon une méthode déterminée, qu'il
appartient, n'obéit à aucune règle absolue. C'est y ait une "bonne" et une "mauvaise" façon de s'y
au scénariste, au réalisateur, au monteur, au prendre. Mais à notre époque oa le cinéma,

25
c o m m e bien d'autres moyens d'expression, évolue d'enseignement secondaire. Il ne doit pas se sen-
dans sa forme, son style et ses méthodes presque tir intimidé s'il n'a jamais encore collaboré à un
d'une année sur l'autre, il serait ridicule de pré- -
film. C'est aux principes du journalisme clarté
tendre qu'il y a une façon et une seule, de résoudre -
de l'analyse et de l'exposition qu'il doit être fi-
un problème cinématographique. dèle. Malgré son auréole prestigieuse, le cinéma
Quelles sont alors ces règles générales ? L e n'est qu'un moyen d'expression permettant c o m m e
scénariste doit réfléchir à certaines exigences. les autres d'exposer et d'interpréter des faits de
Tout d'abord, le film doit être fonctionnel, répondre nombreuses manières différentes. L e scénariste
à un besoin, prouver quelque chose, montrer ce débutant devra simplement se souvenir de l'ancien
qu'il faut montrer avec le maximum d'efficacité. proverbe chinois : "Tout voyage, fût-il de mille
Deuxièmement, il doit être simple et clair. Point lieues, commence toujours par un premier pas. ''
n'est besoin d'élaboration excessive, de dons ora-
toires ou littéraires, de grandes ambitions. L e
scénariste ne doit jamais perdre de vue l'idée sui- LE CONTACT AVEC LE PUBLIC
vante : "Comment illustrer ce sujet de façon sai-
sissante, le rendre clair, simple et vigoureux à La vision d'un film est un phénomène collectif. On
la fois ?." assiste généralement à la projection d'un film de -
Pour ce qui est du commentaire final du film, divertissement, éducatif ou documentaire - en
le scénariste ne doit pas oublier qu'il s'agit d'une groupe. L a réaction de ce groupe au film est une
sorte de conversation, imaginer qu'il s'adresse à réaction collective ; le plaisir éprouvé par les
tous les spectateurs dans le cadre d'une conversa- spectateurs est partagé, le public a les m ê m e s
tion, d'une causerie amicale. Il ne s'agit pas de réactions, les m é m e s émotions, il vibre à l'unis-
faire un discours, de prononcer une allocution pro- son. Evidemment, tous les spectateurs ne com-
tocolaire pour célébrer un événement officiel. L e prendront pas le film de la m & m e façon et n'enti-
scénariste n'a pas à faire preuve de virtuosité lit- reront pas les m é m e s conclusions, mais pour la
téraire, à montrer l'étendue de son vocabulaire grande majorité d'entre eux, la vision du film
ou la richesse de ses métaphores. Dans le film, aura été une expérience commune.
il doit parler au public, non le haranguer, donner L e scénariste doit se familiariser avec le pu-
aux spectateurs l'impression qu'il s'agit de parta- blic de cinéma, fréquenter les salles obscures,
ger une expérience commune, de trouver un inté- s'asseoir aux places à bon marché à l'avant de la
rét mutuel au sujet traité. L e film ne doit pas étre salle c o m m e aux places chères du premier balcon.
glacé, distant, traiter le spectateur avec condes- Il doit assister à différentstypes de séances :pro-
cendance. n faut au contraire que celui-ci ait jections devant une salle d'écoliers, séances à
l'impression que le cinéaste étudie la question avec ciel ouvert sur la place du marché ou dans la cour
lui, qu'ils l'examinent ensemble. L e ton du com- de l'école du village, projections dans la biblio-
mentaire, c o m m e celui de la voix qui le dit, doivent thèque municipale ou au sein de groupes de dis-
renforcer cette atmosphère amicale qui enlève à cussion bien organisés. Comment ces divers pu-
l'étude tout ce qu'elle peut avoir de guindé. blics réagissent-ilsaux films qui leur sont montrés ?
"L'intérêt" est un facteur important, car la Le scénariste doit également @tre conscient de
question traitée doit par-dessus tout être présen- la composante sociale du spectacle cinématogra-
tée de façon captivante. L e film doit présenter et phique ; il s'agit moins, en fait, de se livrer à
développer ses arguments de manière à éveiller et une analyse sociologique que de sentir ce qu'on
à retenir la curiosité et l'intérêt du public. Cela appelle la "température du public", c'est-à-dire
suppose un effort d'imagination de la part du scé- de prévoir ses réactions collectives devant un
nariste. L e film doit être clair et direct sans être film donné, de comprendre comment il l'apprécie
pour autant terne ou monotone. L e scénariste doit et comment il le sent.
aborder le sujet en bon journaliste, c'est-à-dire Celui qui comprend bien ces choses détient un
en exposant les faits essentiels et en faisant res- atout considérable quand il s'agit de communiquer
sortir leurs véritables rapports, en les décrivant avec le public. C'est le cas des grands artistes
de façon vivante et intéressante. A cela près qu'en du spectacle, des grands politiciens, de certains
écrivant le scénario, il donne au réalisateur un athlètes, musiciens, organisateurs et animateurs
moyen de montrer les faits, et non simplement de de mouvements communautaires. Toutes ces per-
les décrire avec des mots. Lorsque le langage sonnes savent "se brancher sur la longueur d'onde"
entre finalement en jeu, sous la forme d'un com- du public, de n'importe quel groupe social devant
mentaire, les mots doivent être simples, clairs lequel elles se trouvent placées. L e scénariste
et frappants. L e texte a uniquement pour objet doit s'efforcer d'affiner en lui ce sens, d'avoir
d'élucider ce qui est montré, de fournir toute ex- des antennes qui le renseignent sur ce qu'aime le
plication nécessaire ; il ne doit jamais se conten- public, sur ses réactions, ses attitudes. Il ne
ter de décrire les images, si celles-ci en disent faudrait pas croire pour autant que le travail du
assez long par elles-mêmes. scénariste consiste seulement à répondre à ces
L e Scénariste débutant est peut-être journaliste besoins du public ; mais il doit les comprendre
ou prof'esseur de langue dans un établissement pour pouvoir écrire son scénario. S'il se propose

26
de modifier l'attitude publique, il doit à plus forte utile de savoir faire un croquis quand on veut se
raison savoir quels sont les sentiments, les préju- faire une idée de l'aspect d'un plan, d'une compo-
gés, les passions, les inquiétudes, les allégeances, sition, d'un groupe de personnes, d'un détail à
sentiments et partis pris du spectateur moyen. photographier.
L e sens du spectacle ("showmanship") est l'ex- L'élaboration d'un découpage illustré est deux
pression qu'on utilise généralement pour définir fois plus efficace, c o m m e méthode de description,
l'art de l'homme de cinéma qui réussit à toucher que la rédaction d'un simple texte. Ce procédé
vraiment le public, par un effort d'identification, permet aux commanditaires, aux membres de
de compréhension, de sympathie. Pour le scéna- l'équipe, aux personnes qui participent au film,
riste et le réalisateur, ce sens du spectacle estun de saisir beaucoup plus facilement les intentions
véritable don du ciel. du scénariste et l'impact d'un plan ou d'une sé-
Cette qualité peut transparaftre m ê m e dans un quence déterminé.
film pédagogique consacré à la géographie ou à Renseignez-vous le mieux possible sur le pu-
l'hygiène. C'est elle qui fait d'une projection ci- blic. Si vous &tes un citadin, et qu'on vous de-
nématographique une expérience agréable, nonune mande d'écrire pour un public de cultivateurs, la
leçon fastidieuse. 11 faut, pour cela, que le scé- tâche sera peut-&tre malaisée. On ne "devient"
nariste et le réalisateur aient vraiment fait oeuvre pas un cultivateur par un simple effort d'imagina-
d'imagination, sans se contenter de mettre un peu tion. Mais des rencontres, des conversations et
de sucre dans la potion pour en adoucir le goQt ! des observations faites avec sympathie permettent
11 n'existe sans doute pas de méthode infaillible, d'apprendre beaucoup de choses sur la vie quoti-
de panacée, permettant au scénariste d'acquérir dienne, les attitudes, les problèmes et les peines,
ce sens du spectacle, mais il est certain qu'unede les satisfactions et les plaisirs d'un groupe social.
ses composantes essentielles est la sympathie. Si, scénariste citadin, vous écrivez le scénario
Quels sont les sentiments, les réactions, les in- d'un film destiné à un public de citadins, c'est à
quiétudes, les plaisirs, la manière de s'exprimer votre propre communauté que vous vous adressez.
des gens ordinaires ? Tout cela, le scénaristedoit L e scénariste doit savoir ce que pense le public
en avoir une connaissance approfondie. Qu'il ac- sur les questions d'actualité : politique, prix,
quière donc cette connaissance non en écrivant des questions civiques, spectacles, scandales, con-
manuels, mais en se rendant sur la place du mar- troverses, etc. Ecoutez les conversationstenues
ché, dans les salles de réunion, les cafés, les au coin de la rue. dans l'autobus, au café, dans
salles de concert, au parlement, sur les stades, les salons de thé. Retenez les expressions de la
dans les salons de thé. Ces recherches approfon- conversation courante. M ê m e si le film ne com-
diront sa connaissance de l'homme et sa compé- porte pas de dialogues, la connaissance du lan-
tence professionnelle. gage et de la psychologie du groupe auquel vous
vous intéressez vous aidera de multiples façons à
rédiger scénarios ou commentaires.
RECOMMANDATIONS Essayez de savoir ce que les petits enfants re-
tiennent de certains films. Dans quelle mesure
Consacrez le temps nécessaire aux recherches - et les comprennent-ils mieux, ou moins bien, que
pas seulement aux recherches en bibliothèque, mais vous ne vous y attendiez ? Dans les villages, les
à celles qui se font sur le terrain. enfants sont souvent capables de donner à leurs
Si vous êtes scénariste et que vous accompagnez parents ou leurs grands-parents des explications
l'équipe cinématographique (sans avoir la possibi- sur un film vu par toute la famille ; ils auront en
lité de faire des recherches à l'avance) essayezde effet étudié déjà la question à l'école, alors que
pousser vos interviews et vos enquêtes au-delà du les adultes n'en auront peut-être jamais entendu
lieu de tournage proprement dit. Visitez les alen- parler.
tours, entrez en conversation avec les gens de N e vous faites pas d'idées préconçues sur la
l'endroit. Cherchez toujours,à étendre vos con- longueur et la nature cilun scénario. u n'est pas
naissances et à approfondir votre compréhension nécessaire que le métrage et le style d'un film
du milieu dans lequel l'équipe et vous-même soient les m & m e s dans tous les cas. L e film dit
travaillez. "à concept unique", c'est-à-dire le film pédago-
-
Prenez des notes. Dans un carnet de préfé- gique consacré à une seule question, a ses avan-
rence à feuillets amovibles. Une série de carnets tages. C e sujet unique (description d'un procéclé
de ce genre, conservés d'année en année, consti- technique, par exemple) peut d'abord être filmé
tuent une petite bibliothèque de recherche person- directement, puis analysé dans des graphiques ou
nelle très utile sur différentes questions et diffé- des séquences animées, et enfin exposé une se-
rents lieux. conde fois en images réelles.
Apprenez à faire des croquis, au crayon, à la -
Veillez à ce que le scénario qu'il s'agisse
plume ou au stylo à pointe de feutre. Si vous d'un film de long ou de court métrage, d'une
n'avez aucun don pour ce genre d'exercice, n'y -
oeuvre simple ou complexe se développe logi-
pensez plus. Mais si vous êtes doué, persévérez quement et clairement. Quand la présentation
- prenez quelques leçons. npeut être extrêmement adoptée exige l'utilisation de graphiques, le

27
découpage du film en grandes idées "élémentaires" plus on "aérera" la bande sonore avec de la m u -
présentées sous un titre général, veillez à ce qu'il sique ou des effets sonores isolés, ou m ê m e des
y ait une progression ou un développement logique silencesqui laissentparler l'image, meilleur sera
du scénario. le film. U n commentaire verbeux, des pauses
Si le sujet le permet, et le demande, envisagez trop rares pour permettre la détente ou la réflexion,
de le traiter sous forme d'histoire plutôt que d'es- un texte trop "écrit", émousseront l'attention et
sai. S'il s'agit d'unedémonstration directe ou d'un l'intérét du public qui finira par résister incons-
film pédagogique, cette "dramatisation" sera sans ciemment au commentaire parlé, et ne plus
doute à déconseiller. Mais s'il s'agit d'un film de 1'écouter.
motivation, d'un film descriptif, d'un film expo-
sant un processus social, une industrie ou un pro-
jet de développement, on peut envisager de lui don- APPRENEZ A ANALYSER
ner la forme d'une histoire. Il est logique, en L E S FILMS QUI VOUS PLAISENT
effet, que le public s'intéresse plus à des person-
nages qu'à de simples processus. Dans quelle m e - Les participants au stage sur la rédaction des scé-
sure, avec quelles chances de succès et pour quelles nariostenu à Poona en août 1967 sous le patronage
raisons peut-on légitimement donner au film la de l'Unesco, qui avaient tous une expérience pro-
forme d'un récit mettant en scène des personnages, fessionnelle de la réalisation cinématographique,
des personnes de la vie réelle, que la question se sont vivement intéressés à l'analyse détaillée
traitée concerne directement ? des films qu'ils avaient pu voir et apprécier au
Si le scénariste fait intervenir des personnages cours de leurs travaux. Ces analyses se sont ré-
dans son récit, ces personnages doivent être vrais, vélées aussi difficiles à réaliser à Poona qu'ail-
c'est-à-direvraisemblables. Leurs actes, leurs leurs ; néanmoins, plusieurs films (surtout des
paroles doivent sembler logiques, naturels et courts métrages et quelques séquences de films
croyables. Or, les gens sont surtout vraisemblables de long métrage) furent étudiés en détail.
quand ils font les choses qu'ils ont l'habitude de Une des méthodes adoptées était la suivante :
faire, et cela à leur manière. C'est uniquement projectiond'uncourt métrage (dansle cas qui nous
en se livrant à des recherches que le scénariste intéresse, il s'agissait d'un film documentaire
pourra apprendre ces choses. essentiellement destiné au grand public et traitant
Si le scénaristefaittenir des propos invraisem- de la communauté de vues et de motivations des
blables ou accomplir des actes illogiques à ses militaires en Inde) suivie d'un débat. Après la
personnages, le film semblera, bien entendu, in- projection, deux participants dressèrent une liste
vraisemblable et illogique. Tout l'intérêt que peut complète des plans du film en visionnant la copie
présenter l'introduction de personnages dans un sur une table de montage ; cette liste fut ensuite
récit disparaît si le jeu de ces derniers est invrai- polycopiée et distribuée aux autres participants.
semblable ou artificiel. L'étude en commun de ce document leur permit de
Les motivations et les actes des personnages mettre en évidence les séquences principales du
d'une histoire doivent correspondre à leur situa- film et d'analyser (sur le papier) la progression
tion dans la vie courante. Si le scénariste leur des idées, séquence par séquence. Ces diverses
prête, pour les besoins de son récit, une conduite séquences, représentées sous forme graphique
incohérente ou excessive, le public le moins cul- sur un tableau noir, permirent de reconstituer la
tivé ne manquera pas de déceler immédiatement structure du scénario par idées générales et non
cet artifice. plus plan par plan ni conformément à la disposi-
Pour la rédaction d'un récit ou d'un commen- tion habituelle d'un scénario dont chaque page se
taire, la plus grande simplicité, la plus grande subdivise en deux colonnes verticales consacrées
brièveté sont de mise. L e scénariste emploiera l'une à l'image, et l'autre au récit et au commen-
des phrases courtes, sans structure complexe, des taire qui l'accompagnent.
mots courts, une langue ordinaire. Rappelez-vous O n organisa ensuitmeune nouvelle projection du
que le texte d'unfilm ne joue qu'un rôle accessoire, film,pendant laquelle les spectateurs furent par-
et que c'est l'oeil, non l'oreille qui est l'organede ticulièrementattentifs à l'agencementdes phrases
perception principal. Dans la plupart des cas, le du commentaire parlé, à leur place et à leur im-
spectateur retiendra beaucoup mieux ce qu'il a vu pact en fonction de l'image, ainsi qu'aux princi-
que ce qu'il a entendu. paux effets sonores, aux plans ou séquences
Si le déroulement d'uneaction est suffisamment muets dans lesquelsla musique, les effets sonores
clair à l'écran, il est inutile d'expliquerce qui se et le commentaire étaient utilisés avec sobriété
passe dans la bande son. L e texte peut préciser ou m ê m e complètement supprimés, et à l'utilisa-
la signification ou indiquer le résultat de ce qui tion de scènes "clés''ou de scènes symboliques,
est montré, mais il est inutile de décrire ce qui parfois reprises plusieurs fois, qui - outre leur
est déjà évident en soi. raison d'être objective pour la continuité de telle
-
Il est presque toujours possible et toujours ou telle séquence - avaient aussi une valeur E -
souhaitable - d'abréger le commentaire une fois bolique dans la mesure où leur signification pro-
qu'il a été rédigé. Plus on ménagera de pauses, fonde était bien plus importante que l'objet ou la

28
personne montrés à l'écran. Prenons un exemple : du film, ils furent en mesure d'apprécier à sa
au début du film, les personnes ou "personnages" justevaleur la construction de cette séquence par-
principaux de cette histoire très simple sont pré- ticulière et de comprendre le pourquoi de son im-
sentés dans le cadre de leur travail habituel. L'un pact si considérable. C e type d'analyse d'effets
de ces protagonistes est un petit garçon, à la mise et de détails particuliers d'un film présente, pour
soignée, qui va à l'école ses livres sous le bras. le réalisateur et le scénariste débutants, un inté-
Il est, en fait, le frère cadet de l'un des militaires rêt supérieur à la simple projection d'un film.
que le spectateur verra plus tard dans le film. Car, aprèstout, le public n'assiste (généralement)
Lorsqu'on le voit pour la première fois, ce petit qu'à une seule projection d'un film. Cette projec-
garçon ne représente que lui-même, un membre tionuniquene lui permet pas d'analyser ses propres
d'une famille, un individu. Mais à la fin du film, réactions et de se dire : "Je vois, le scénariste
quand nous avons fait connaissance avec plusieurs rappelle ici une idée antérieure exposée dans la
militaires stationnés dans diverses régions du pays, première bobine, mais la bande sonore donne à ce
et que nous commençons à bien comprendre quelle plan une signification autre que celle qu'il avait
est cette cause commune qui les unit bien qu'ils avant. " Les images défilent en effet sur l'écran
soient originaires de régions différentes de l'Inde, sans s'arrêter et il n'est guère possible d'en ana-
parlent des langues différentes et n'aient pas la lyser en détailla structure en cours de projection.
m ê m e religion, onnous présente à nouveaul'écolier. Pour le scénariste, il est donc très utile de voir
Mais nous le voyons cette fois dans le contexte de le film deux ou trois fois ou, encore mieux, de le
certaines scènes symboliques et significatives qui passer sur une table de montage ou à la "moviola"
mettent en lumière les valeurs et traditions per- pour voir comment se suivent les plans, leurs ar-
manentes de l'histoire indienne jusqu'à ce jour. ticulations et leurs points de jonction, les coupes
L e garçonnet n'est plus seulement lui-même, un particulièrement réussies, la structure d'une sé-
simple individu, mais tous les écoliers, tous les quence bien montée - dont le montage est peut-être
jeunes, tout l'avenir, lapersonnification de la so- précisément si rapide qu'il est presque impossible
ciété et de la technologienouvelles et d'une fidélité au spectateur d'en deviner la structure au cours
dynamique aux anciennes traditions nationales. d'une projection ordinaire. L'analyse faite après
Pendant que nous le regardons marcher d'un pas la projection est d'un grand intérêt pour le scéna-
allègre vers son école, le son de pas cadencés in- riste (pourtout cinéaste, d'ailleurs). E n dressant
nombrables, de brodequins militaires résonnant une liste des plans, en l'examinant sur le papier
-
contre le pavé un son puissant, massif - monte pour voir combien il a fallu de plans pour cons-
en crescendo dans la bande sonore. L e réalisateur truire une séquencedéterminée, comment une idée
crée ainsi une impression extraordinaire en utili- nouvelle, servant d'introduction à une séquence
sant un effet sonore frappant qui ne correspond pas nouvelle, est amenée par un plan d'un genre parti-
directement à l'image, mais prend, par rapport à culier, on comprend quelles idées fondamentales
l'image, une signification symbolique qui vient ont présidé à la réalisation du film et la façon dont
s'ajouter à son sens littéral. Ces deux éléments le scénariste les a agencées.
(l'imagede l'écolier et le son de pas.cadencés)se Tout scénariste pourra utilement choisir trois
fondent de façon puissament originale pour traduire ou quatre films dont il admire particulièrement la
clairement une idée, celle d'hommes en marche teneur et l'efficacité, puis les étudier, les analy-
vers l'avenir dont ils sont les gardiens et les cham- ser et les soumettre à un examen détaillé, qui lui
pions. E n fait, ce plan unique, utilisé en conjonc- donneront une idée générale de l'effort de structu-
tion avec l'effet sonore indiqué, fait naftre de mul- ration et d'agencement sans lequel il n'y a pas de
tiples idées qu'ilserait difficile de rendre explicites bon scénario. Commenous l'avons déjà noté, tous
dans le scénario avant la projection. C e n'est qu'en les films ne supposent pas de scénario et tous les
voyant le film àl'écran que le spectateur peut sai- grandsfilms n'ont pas été tournés d'après un scé-
sir tout l'impact et tout le sens de cette synthèse nario détaillé. Mais quand le scénario existe,
du son et de l'image. L e scénariste qui a unetelle tout son intérêt réside dans son agencement, sa
idée peut l'indiquer, en quelque sorte l'esquisser, force structuraleintérieure, une progression claire
dans son scénario, mais sans vraiment parvenir à des idées. L e scénario n'apparaît jamais dans
en décrire la signification exacte dans le texte écrit. l'oeuvre achevée, mais celle-ci s'explique par
Il faut la collaboration du réalisateur, de l'opéra- l'infrastructure, la charpente, les fondements, le
teur et des monteurs de l'image et du son pour cadre fournis par le scénario.
donner vie à l'effet conçu par le scénariste.
E n assistant à la projection du film en simples
spectateurs, les participants au stage de Poona CONCLUSION
n'avaient eu qu'une impression générale de l'effi-
cacité de cette séquence particulière et de sa bande -
Aujourd'hui à la fin des années soixante - beau-
sonore. Après avoir étudié la liste des plans (qui coup d'idées nouvelles ont vu le jour en matière
leur permit de voir dans quel contexte précis se de cinéma. Certaines de ces idées concernent
situait le plan de l'écolier, au début et à la fin du l'utilisation,sans préparationni essais préalables,
film)et après avoir assisté àune seconde projection de la caméra et du magnétophone considérés c o m m e

29
instruments d'enregistrement. c o m m e miroirs de réalisations cinématographiquesofficielles enlève
tournés vers la réalité. Beaucoup d'excellents tout intér@t et toute sincérité. Nous avons tous vu des
films et émissions de télévision (spectacles et re- films de ce genre et savons à quels traits ils se
portages filmés ou ''endirect") s'inspirentde cette reconnaissent :l'enthousiasmejovial et sans nuance
méthode d'enregistrement spontané, sur place, du narrateur, l'utilisation répétée des marches
sans recherche ni préparation préliminaire. militaires, le commentaire vague et verbeux, plein
Néanmoins, cette branche du cinéma (cinéma de généralités et dépourvu de faits précis, les vi-
libre, prises de vues directes, cinéma-vérité)ne sites de chefs d'Etat étrangers dans la capitale ;
représente qu'une partie, une méthode, un concept les revues, les gardes d'honneur, les arrivées et
dans l'éventail multiple des activités cinématogra- les départs aux aérodromes, les conduites inté-
phiques. On a et on auratoujoursbesoin d'un grand rieures dont les portières s'ouvrentet se referment,
nombre de films produits à des fins très diverses, les rubans qu'on coupe, les applaudissements polis,
qui devront tous être pensés et préparés avec soin, les allocutions de dignitaires, les premières pierres,
grace à des recherches minutieuses et à l'élabora- les cérémonies inaugurales, la visite d'une nouvelle
tion d'un scénario détaillé. Les films pédagogiques, aciérie, d'une nouvelle stationhydroélectrique.
les films d'orientation, les films de formation,les Pourtant, chacun de ces événements a son im-
films conçus pour inciter le public à adopter de portance pour le pays et pour le bien-@tre des ci-
nouvelles façons d'organiser sa vie quotidienne, toyens. Aussi le scénariste doit-ilreprendre cou-
tous ces films exigent un effort d'organisation, rage et s'efforcer, sans faillir, de trouver des
d'élucidation et une recherche de l'efficacité. On façons nouvelles et honnêtes de présenter ces faits.
continuera à utiliser, dans bien des films, le pro- 11 s'agit d'ailleurs d'une matière intéressante ; le
cédé consistant à présenter un personnage central film doit documenter le public national sur l'expan-
dont l'histoire traduit la situation réelle auquelle sion et l'évolution du pays. Cette tache n'incombe
le scénariste et le public s'intéressent (change- pas au seul scénariste, mais aussi au réalisateur
ments de la structure sociale, de la vie d'un vil- et à l'opérateur. Bien entendu, le film ne devra
lage, par exemple ; amélioration des méthodes cul- pas montrer seulementles événements et les hauts
turales et du matériel technique agricole ; change- dignitaires, mais les gens eux-memes, qui parti-
ments des habitudes d'hygiène ou d'alimentation). cipent aux cérémonies et que les nouvelles réali-
Beaucoup de ces films se fonderont sur la méthode sations touchent dans leur vie et leurs espérances.
de l'identification du spectateur avec le héros ou Il faut que, d'une façon ou d'une autre, ces gens,
les personnages du récit, dont les aventures lui les citoyens, qui sont également le public, figurent
sembleront avoir trait à sa propre vie et à ses évé- dans le compte rendu des événements. L'objectif
nements quotidiens. doit montrer comment l'actualité lestouche, com-
On aura besoin d'autres films encore pour dé- ment ils participent à la réalisation des nouveaux
crire, dans le cadre d'activités de formation ou projets et à l'application des politiques nouvelles.
d'éducation, des processus, des opérations scien- Ici encore, l'identification est le principe fonda-
tifiques,techniques ou d 'atelier. Ces films devront mental ; le public doit avoir le sentiment de "par-
avant tout être clairs et faciles à comprendre. Les ticiper': de prendre une part directe à la vie na-
éléments d'informationou les concepts pédagogiques tionale dans sa totalité. S'il en est autrement, le
principaux devront être exposés avec le maximum film ne sera qu'une suite d'automobiles,de céré-
de clarté et d'efficacité pour qu'ils se gravent dans monies inaugurales, de gardes d'honneur, de sa-
la mémoire du spectateur. Il faudra peut-être uti- -
luts, de lunettes de soleil, d'aérodromes il ne
liser, pour réaliser ces films, les techniques d'ani- touchera pas le coeur des spectateurs,
mation, la macrophotographie, les prises de vues E n dernière analyse, élaborer un scénario
image par image ou la microphotographie, afin c'est s'efforcer de toucher intimement le public.
d'exposer clairement tel ou tel processus. L e film doit B t r e e , pour que son sens et
D'autres films plus généraux auront seulement sa signification ne puissent rester incompris.
pour objet d'informer un large public des progrès Li doit étre intéressant pour captiver le spec-
des réalisations d'ensemble du pays. U n certain tateur en faisant appel à ces procédés universels
nombre de pays en voie de développement utilisent que sont le récit fictif,la progression dramatique,
des films pour présenter à la population qui fré- la découverte, le mouvement ; alors seulement le
quente des salles obscures une sorte de rapport cinéma pourra être véritablement qualifié d'"art
cinématographique périodique sur les affaires na- du mouvement".
tionales. Ces films, qui vont de la bande d'actua- L e film doit être humain, pour que l'homme
lité au documentaire et aux films "officiels", sont - -
moyen le spectateur moyen reconnaisse aussi-
peut-être ceux qui présentent les plus grandes dif- t6t qu'il s'agit de sa vie et de ses problèmes.
fultés pour le scénariste. Quand le commandi- Il existe évidemment, c o m m e nous l'avons déjà
taire est 1'Etat et que l'attributiondes commandes indiqué, des catégories de film dans lesquelles il
et le contrale de la réalisation deviennent des opé- est inutile d'introduireun récit ou des personnages :
rations purement bureaucratiques, on risque plus instruction, démonstration, techniques et procé-
que jamais de produire des films auxquels l'effort dés, sujets scientifiques et techniques. Mais
de propagande qui caractérise un si grandnombre dans ce cas, la clarté et la logique m@mes de la

30
présentation peuvent (à leur façon) constituer un m ê m e meilleures. L e cinéma est un moyen d'ex-
éléhent aussi intéressant que le récit dans un film pression insaisissable, électrique, subtil et chan-
partiellement ou totalement "dramatisé". U n film geant. Il permet la communication, bien que tous
qui présente ou explique une question peut égale- les théoriciens ne soient pas encore en mesure de
ment avoir un rythme différent d'une séquence à préciser la nature de ce processus de communica-
l'autre : explication, surprise, temps fort, curio- tion qui touche le coeur et l'esprit, l'imagination
sité. Il faut avant tout éviter la lourdeur et la m o - et la raison, la mémoire et l'intuition. L e cinéma
notonie. L e scénariste fera de son mieux pour dé- a aussi le grand avantage de divertir en informant.
couvrir les aspects véritablement intéressants de C'est au scénariste de s'assurer que ce plaisir du
son sujet et la manière de les traiter dans le film. spectateur est prévu dans le scénario initial quelle
Toutes ces exigences supposent le m ê m e effort: que soit la simplicité du film,pour que la projec-
un effort de concentration intellectuelle, de ré- tion finale soit à la foisune occasion de s'informer
flexionet d'étude intense, de tous les instants, effort et d'apprendre, et une expérience stimulante et
soutenu jusqu'à ce que le scénariste ait enfin donné agréable pour l'esprit et l'imagination. Au départ,
à son scénario la forme qu'il estime étre la meil- c'est le scénariste qui a le devoir et la possibilité
leure, en toute conscience et en fonction de ses de veiller à ce que le film atteigne ce but souhaité.
capacités. L à s'arr@te sa tâche. Pourtant, deux D e là vient l'importance fondamentale de son rôle
-
mois après la fin du tournage, il lui viendra en dans l'ensemble du processus de conception et de
-
revoyantle film d'autres idées encore, peut-être réalisation de l'oeuvre.

31
APPENDICE 1

FRAGMENT DU SCENARIO ORIGINAL DU FILM "JAI JAWAN"


(DIVISION CINEMATOGRAPHIQUEDU GOUVERNEMENT DE L'INDE)

Image Commentaire Sons divers - musique


Quelques plans de soldats dans l'Himalaya ; ils sont Bruits naturels et son
vigilants, tendus, épuisés : un groupe de soldats correspondant aux différentes
traverse un champ de neige ; les hommes avancent actions.
péniblement, enfonçant jusqu'aux genoux dans la neige ;
un autre groupe tire un canon de montagne ; d'autres
hommes traversent un torrent dangereux.

PLAN RAPPROCHE ET G R O S PLANS DE SOLDATS


ESSOUFLES APRES LEUR PENIBLE EFFORT.

P.E. Un soldat tout en haut d'une grande paroi


rocheuse ; il se détache contre une cime
couverte de neige.

P.E. (plus serré, dans le m&me axe). L e soldat se CONNAISSEZ-VOUS CET


détache contre la cime neigeuse. HOMME 7 SAVEZ-VOUS
D'OUIL VIENT ? SAVEZ-
P.M. (même axe). L e soldat vu de dos. VOUS POURQUOI IL EST
ICI ? IL S'APPELLE
P.R. Son visage (travellingavant jusqu'au gros PRABHAKARAN, IL VIENT
plan) DE THOTTAPALLI

G.P. Un bouquet de fleurs dans une chevelure Douce voix féminine malayali
féminine (une f e m m e malayali dans un (chevauchementdu plan 61
village). Sa nuque est au premier plan. au plan 62).

P.E. Des branches de cocotier doucement agités


par la brise (paysage caractéristique du
Kerala)

P.E. Terrain herbeux avec des arbres.


P.R. L'eau calme d'une mare (PLANFIXE). Eclaboussement d'eau.
On voit apparaître des ondes concentriques
(L'APPAREILS E DEPLACE COMME POUR "'Glou... Glou ... Glou ..."
SE RAPPROCHER DU FOYER DE CES On entend la cruche se
REMOUS). Une main féminine, nue et belle, remplir.
trouble la surface de l'eau. L'autre main
entre le cadre, tenant une cruche qu'elle
plonge dans l'eau. L'eau gargouille en
remplissant la cruche.

(PHOTOGRAPHIEFIXE) Prabhakaran plongé dans "Glou ... Glou ... Glou ..."
ses pensées.

(PHOTOGRAPHIEFIXE) Une jeune fille, debout, "Glou ... Glou ..."


regarde pensivement au fond de l'eau, la
cruche pleine contre sa hanche.

P.E. La mare dans le crépuscule. "Glou ... Glou ..."

33
Image Commentaire Sons divers - musique
(PHOTOGRAPHIEFME) Une vieille femme (la mère "Glou ..."
de Prabhakaran) regardant vers la droite, (LEGARGOUILLEMENT
plongée dans ses pensées. DE L'EAU DIMINUE
JUSQU'A CE QU'ON NE
L'ENTENDE PLUS)

(PHOTOGRAPHIE FIXE) L a femme de Prabhakaran -


Bruits nocturnes bruisse-
regardant vers la gauche. ments de palmes, chants de
grillons.

Le visage souriant de Prabhakaran sur une photographie


-
de groupe TRAVELLING ARRIERE montrant qu'il
s'agit d'une photographie de groupe le représentant
auprès de sa femme, son enfant, son père et sa mère,
tous assis sur des chaises.
(Le cliché est l'oeuvre malhabile d'un photographe de
village ; on peut imaginer qu'il date de la dernière
permission de Prabhakaran).

L e travalling arrière montre que cette photographie Bruits nocturnes - bruisse-


est accrochée dans le coin de la maison où se trouve ments de palmes, etc.
l'autel, avec ses idoles et les images des divinités
masculines et féminines qu'on trouve généralement
chez les villageois du Kerala. Une lampe à huile
brûle dans cette partie de la pièce.

(NUIT) P.M. Soldats endormis dans un abri. Bruits nocturnes.

(NUIT) (Meme cadrage qu'au plan 73)


Prabhakaran est étendu sur sa couchette, tourné
vers l'appareil. Il ne dort pas. (LEPLAN
CONTINUE). Il se retourne et tire la couverture
sur son visage.

(NUIT) (M&me cadrage qu'au plan 7 3 ) Bruits nocturnes - bruisse-


L a femme de Prabhakaran s'étend et se tourne ment de palmes.
sur le coté. COURT PANORAMIQUE VERTICAL
D A N S LE MOUVEMENT pour montrer son petit
garçon endormi à coté d'elle.
E n se retournant, elle tire une couverture sur
l'enfant endormi.

(FONDU)

34
APPENDICE II

EXTRAIT DU DECOUPAGE DU FILM "JAI JAWAN"


(MEMES E Q U E N C E QUE CELLE DU DECOUPAGE ORIGINAL
AVEC LES MODIFICATIONS APPORTEES AU COURS DU TOURNAGE ET DU MONTAGE)

no Grosseur Image Longueur


du plan
-Son
Effets sonores Commentaire Observations
du plan du plan
(en pieds) et musique

(Note - cet extrait constitue la séquence III de l'oeuvre achevée)


45. P.E. panoramique de droite à gauche 11, 5 pieds musique (accord impression de
sur un paysage de montagne puissant sur les montée vertigineuse
premières images
du plan)
11
46. P. E. travelling rapide le long d'une 5 pieds
rivière gelée
!I
47. P. E. trois soldats rapportent dé l'eau 9,5 pieds
d'une rivière
1,
' 48. P. R. un soldat puise de l'eau dans la 9,5 pieds
rivière

49. P.R. la roue d'une ambulance fait 3, 5 pieds vrombissement


jaillir l'eau de la rivière peu d'un moteur
profonde en marche
1,
50. P. M. travelling arrière (la caméra est 2 pieds 1
placée à l'arrière d'un véhicule 1
automobile qui laisse de profondes )
ornières dans la neige de la route) )impression violente
)de mouvement
Il
51. P.R. les deux mains du chauffeur sur 2 pieds )tournant (son et
le volant )image)
1
52. P. R. le soldat Sikh au volant 3 pieds 1
1
53. P. R. travelling latéral (pris du véhicule) 3 pieds )
du bord de la route couvert de 1
neige 1
54. P.E. un convoi de camions militaires 4 pieds -
se dirige vers la caméra (composi-
tion en diagonale ; grand angulaire)

55. P.E. panoramique sur des montagnes 19,5 pieds sifflement faible IL N'Y A PAS les effets sonores
couvertes de neige du vent QUE LES créent un climat
CHAUSSURES tout à fait
BRILLANTES, différent

56. P.E. montagnes, m&me plan 10,7 pieds idem QUE LES UNI-
FORMES,L E S
MEDAILLES
D'OR ET
D'ARGENT.

35
no Grosseur Image
Longueur
du plan
-
Son
Effets sonores Commentaire Observations
du plan du plan
(enpieds) et musique

57. P.E. panoramique sur des montagnes 8,5 pieds idem ICI, D A N S LES
recouvertes de neige ; la caméra MONTAGNES
II
vient cadrer la silhouette solitaire A 6.000 M E T R E S
d'une sentinelle LA TEMPERA-
TURE EST DE
17" C

58. E.D.M. plan plus serré (meme axe) du 8 pieds (Voici)


soldat solitaire (quelques images PRABHAKAFLAN
noires entre les deux plans donnent NAIR, DU
l'impression que l'opérateur a changé KERALA
d'objectif pendant la prise de vues)

59. P.R. le soldat de Kerala (ici encore, 4, 5 pieds début d'une l'illusion d'un
le monteur a intercalé quelques chanson tra- changement
images noires entre les deux plans ditionnelle du d'objectif aide
pour donner l'impression d'un chan- Kerala le spectateur
gement d'objectif) à concentrer
son attention
sur le per-
sonnage

60. P.E. paysage typique du Kerala. On voit 9 pieds la chanson se


serré des cocotiers de chaque côté d'une poursuit
rivière (l'appareilse déplace
lentement)

61. P.E. panoramique de gauche à droite sur 22 pieds musique


serré le paysage du Kerala ; la caméra nouvëlle,
s'arr&te sur une femme, debout fournie et
près d'un mur, qui se prépare à évocatrice
puiser de l'eau dans un puits

62. P.R. la femme puise de l'eau 4,5 pieds

63. G.P. la poulie tourne, la corde 4 pieds


se dévide
II
64. (plongée) intérieur d'un puits profond, dans 4 pieds
lequel descend un seau

65. P.M. la femme puise de l'eau 4 pieds la chanson la musique


s'éloigne diminue de
volume et
cesse avant
le début de
la séquence
suivante -
effet angoissant

66. G.P. profil de Prabhakaran Nair se 2,5 pieds sifflement faible impression de
détachant contre le paysage de du vent solitude, de
montagne froid

36
Longueur Son
no Grosseur du plan Effetsonores Commentaire Observations
Image
du plan du plan (enpieds) et musique

67. P.M. la photographie de Prabhakaran Naïr 25 pieds on commence à


est accrochée au mur d'unehutte fredonner une
recouverte de branches de coco- berceuse vers
tiers. La caméra panoramique en le milieu du
plongée pour montrer un enfant plan
endormi dans un berceau et la
femme qu'on a vu puiser de l'eau;
celle-ci est en prière devant une
image de Krishna

68. P.E. panoramique de gauche à droite 14 pieds berceuse


dans une salle de caserne ; on voit
des soldats endormis ; Prabhakaran
Naïr lit à la lumière d'unelampe

69. P.M. la femme de Prabhakaran finit sa 10 pieds berceuse


prière devant l'imagedu dieu
Krishna, prend une fleur, la pique
dans ses cheveux et sort du champ
de vision
II
70. P.lvr. dans la caserne, Prabhakaran Naïr 9 pieds
éteint, sa lecture finie

71. P.E. la femme de Prabhakaran s'endort 13, 5 pieds


serré sur sa natte posée à m ê m e le sol

72. P.M. Prabhakaran Naïr s 'endort,après 6,5 pieds la berceuse se


avoir tiré la couverture de laine perd au loin.
par-dessus sa tête Grillons, bruits
nocturnes la musique a
cessé, on entend
73. P.M. la femme et l'enfantdans la hutte ; 16 pieds bruits nocturnes seulement les
la femme arrange la couverture sons naturels
autour de son enfant

(FONDU)

37
APPENDICE III
SCENARIO SUR LES T E C H N I Q U E S DE LA PLANIFICATION
TITRE DEFINITIF : "LES REVES DE MAUJIRAM"
(DESSIN A N I M E DESTINE A EXPLIQUER A UN PUBLIC RURAL
L E S PRINCIPES DE LA PLANIFICATION GOUVERNEMENTALE A L'ECHELLENATIONALE)

Ouverture en fondu

Image (animation) Commentaire

Panoramique rapide sur un paysage rural ; la (Musiquepastorale au début, puis gargouillement


caméra cadre finalement un petit h o m m e court et du houka.) "Voici Shri Moji R a m , mieux connu
trapu. Il porte un grand turban en forme de cham- sous le n o m de Sheikh Chilli. S'ilporte son
pignon qui lui tombe presque sur les yeux. Adossé "pugree" de cette façon, c'est simplement pour se
à un arbre, il tire de grandes bouffées de son protéger du labeur quotidien. A 'safaçon, cepen-
houka., Ce personnage semble en paix avec l'uni- dant, Chilli rêve d'un monde meilleur, d'une vie
vers. Les petits nuages de fumée blanche qu'il plus rose. Mais comment faire ? "
exhale l'ont plongé dans une sorte d'état second.

Fondu

Tenant son houka d'une main et traçant de l'autre "Un jour, un marchand chargea Chilli de porter
des additions imaginaires dans l'espace, Chilli un pot de miel à un village voisin. E n retour,
s'avance, l'air endormi ; un pot de miel tient Chilli recevrait une demi-roupie. Bien entendu,
en équilibre instable sur sa tête. Chilli fume Chilli était très content. Avec son flair pour les
son houka de façon continue, mécanique. A investissements, il pourra faire merveille, m ê m e
mesure qu'il multiplie les chiffres dans l'es- avec une s o m m e aussi petite ... D'abord, ilachè-
pace, ses calculs l'amusent et la pensée de tera six oeufs. Ces six oeufs donneront six pous-
sa prospérité à venir illumine son visage. sins ... Plus tard, ceux-ci donneront naissance
à beaucoup d'autres coqs et beaucoup d'autres
poules, et Chilli possédera alors un grand élevage
de volailles.''

(Caquètements et cocoricos subits) - "et puis, il


achètera deux vaches et un taureau" ... (les meu-
glements de vaches et de taureaux se transforment
en un tintement de pièces de monnaie) ., .

Gros plan de Chilli, l'air extasié. C'est le moment (Musique au début du plan, puis bourdonnement
que choisit une mouche pour se poser sur son nez monotone d'une abeille) "Riche c o m m e Crésus,
et commencer à le chatouiller. Chilli n'y prête -
Chilli ... quandune mouche une vulgaire mouche -
d'abord pas attention, puis soudain lève la main fit s'écrouler ses châteaux en Espagne. ''
pour l'écraser ; mais il manque la mouche et
heurte le pot de miel, qui s'écrase au sol. L e
visage de Chilli est couvert de miel et une nuée
de mouches s'y abattent.

Fondu

U n groupe de fermiers bruyants et bavards se ras- "Le plus p.etit événement est une cause d'excita-
semblent sur la place du village. L e Mukhiya du tion dans le village. Mais quand le Mukhiya re-
village lit des noms sur une liste, provoquant çoit la liste de ceux qui ont été désignés pour
chaque fois un mouvement d'excitation dans le faire un voyage à travers l'Inde, presque toute la
groupe des auditeurs ; l'homme dont le n o m vient population manifeste un intérêt enthousiaste.
d'être lu est chaleureusement félicité par ses Tous, sauf le Sheikh Chilli, qui accueille la nou-
amis, qui lui donnent de grandes claques dans le velle avec froideur et un certain cynisme. Aussi
dos. Nous voyons dans un coin Chilli qui tire sur bien, qui aurait pu imaginer que Chilli serait au

38
Image (animation) Commentaire

son houka. Il a l'air cynique, indifférent. Mais nombre des élus ? Bien entendu, il commence
quand le Mukhiya dit son nom, il est aussi surpris par mépriser l'offre qui lui est faite : ''Pourquoi
et étonné que les autres. Chilli commence par visiter de grandes usines et être mis au courant
décliner l'offre qui lui est faite, mais, après avoir de vastes projets qui ne m e concernent presque
été longuement encouragé par ses amis et le pas ? " se dit Chilli ... et s'il finit par accepter,
Mukhiya, finit par céder. c'est bien plus pour faire plaisir à ses amis que
parce qu'il a été convaincu par le bruyant dis-
cours du Mukhiya sur l'intérêt de nos plans. ''

Nous voyons une pancarte : ''BharatDarshan Spé- (Bruit du train en marche et musique)
cial" (voyages à travers l'Inde) ; un panoramique
vers le bas nous montre Chilli, coiffé de son tur-
ban en forme de champignon, qui fume tranquille-
ment son houka dans le train en marche. Les
autres voyageurs conversent avec animation.

Fondu

Photographie d'un barrage en construction ; Chilli "L'alimentation en eau est le problème principal
et ses amis sont en train de le visiter. L e Mukhiya du cultivateur indien, qu'il y en ait trop ou trop
du village commence à donner des explications peu. Et ces barrages permettraient de régler le
quand Chilli l'interrompt soudain. Une discussion problème", dit le Mukhiya. "Les terres qui
s'ensuit. restent sont aussi arides qu'autrefois'',dit Chilli,
"mais un jour, cette eau atteindra aussi votre ré-
gion.'' I I Mais quand ? Pourquoi le Sirkar n'accé-
lère-t-ilpas le mouvement ? '' s'indigne Chilli.

Photographie de l'usine d'engrais de Sindri ; les Chilli est tout aussi indigné quand le Mukhiya
cultivateurs sont en train de la visiter. Encore explique que les engrais produits dans cetteusine
une fois, Chilli morigène le Mukhiya quand celui- rendraient leur vitalité à nos terres appauvries
ci expose les avantages des engrais. et permettraient d'obtenir de "super-récoltes".
Chilli dit qu 'il s'agit de "super-baratin".

Nous voyons ensuite les cultivateurs visiter une Mais ce n'est pas ce genre de discours qui peut
aciérie. Si la plupart d'entre eux semblent vive- -
produire une tonne d'acier et c'est à l'acier
ment impressionnés par ce spectacle, il n'en va qu'on mesure la force d'une nation.
pas de m ê m e pour Chilli, qui continue à faire des
observations d'un ton cynique. L e Mukhiya lui "Quelle importance l'acier a-t-il pour un cultiva-
répond calmement, c o m m e si de rien n'était. Les teur ?" objecte Chilli.
autres cultivateurs rient de l'absurdité des ques-
tions de Chilli. Pour une fois, il sent qu'il perd "Une grande importance. Depuis le socle de
la face. votre charrue jusqu'aux tuyaux de votre houka. ..''
(Rires)
"D'ailleurs, tous les instruments agricoles m o -
dernes sont faits de fer et d'acier.''

On voit ensuite les cultivateurs visiter l'usine de "Et que dire des chemins de fer qui relient entre
fabrication de locomotives de Chittarangan. Chilli eux les points extrêmes du pays ? L à aussi il
ne se départit pas de son apparente indifférence. faut de l'acier : pour construire les locomotives
et les wagons, poser les milliers de kilomètres
de voies ferrées, construire les barrages, les
fermes et les usines. C e sont là, en effet, les
étapes d'un progrès planifié."

39
Image (animation) Commentaire

Plan de Chilli la nuit ; il est trop agité pour dor- (Musique et effets sonores correspondant au ton
mir. E n surimpression, une série d'images du de la scène).
barrage, de l'aciérie, de l'usine de fabrication " M ê m e si la résistance de Chilli commence à
d'engrais et de l'usine de locomitives de Chitta- s'effriter, il n'est pas h o m m e à l'admettre.''
ranjan ; toutes ces images hantent son esprit. Il
se réveille, nerveux, le visage inondé de sueur.

(FINDE L'EXTRAIT)

40
APPENDICE IV
EXTRAIT DE "PHOEBE" (DECOUPAGE DU FILM ACHEVE)

(Le personnage principal de ce récit dramatique est une jeune fille qui découvre qu'elle est enceinte)

Office national du film du Canada

Phoebe étendue sur la plage, les yeux fermés. LA MERE : Tout ce que tu sais faire, c'est criti-
Paul sort de l'eau et se penche au-dessus d'elle,
- quer ! Tout ce que je fais est mal fait ! J'en ai
l'inondant de gouttelettes. vraiment assez de tes jérémiades 1

PAUL : Viens donc te baigner ...çate rafrafchira LE PERE : Et moi j'en ai assez de tes plaintes !
les idées.
L a mère fond en larmes.
PHOEBE : Non pas maintenant
L a plage. Phoebe, remarquant que le groupe de
PAUL pousse un soupir d'exaspération joyeux excentriques déjà vus à l'écran ne compte
plus que deux personnes au lieu de trois (une des
A la ferme. Cette fois-ci, Paul et Phoebe impro- fillesa disparu)-semet à appeler Paul avec frénésie.
visent un jeu ; ils crient et rient en se pourchas-
sant joyeusement d'une pièce à l'autre. Ils sortent PHOEBE : Paul ! Paul!
en courant de la maison et roulent dans l'herbe
haute d'une colline voisine. Paul embrasse avide- Elle s'allonge de nouveau et se replonge dans sa
ment la jeune fille. rêverie (elle se représente en imagination les
deux scènes suivantes).
L a plage. ns sont étendus cote à cote.
L e DIRECTEUR DE L'ECOLE: (Il s'adresse à
PAUL : Phoebe ... déesse de la lune ... elle d'un ton plein de douceur) Donc, Phoebe,
vous attendez un enfant ... M a foi, ce sont des
PHOEBE : Paul, je voudrais te demander quelque choses qui arrivent. Vous cesserez de suivre les
chose ... cours quand le moment sera venu ... Et VOUS pour-
rez ensuite vous présenter aux examens - quand
PAUL : (vivement) D e rentrer ensemble à la vous vous sentirez prête.
maison ?
Phoebe, toujours allongée sur le sable, imagine
PHOEBE : (contrariée) Oh ... n'en parlons plus. maintenant que le Directeur réagit de façon tout
à fait différente.
PAUL : Mais qu'est-ce que tu as aujourd'hui ?
LE DIRECTEUR : C'est très ennuyeux ... Vous
PHOEBE : Est-ce que tu vas cesser de m e poser comprenez que vous ne m e laissez pas le choix ...
cette question ? Je n'ai rien !!rien du tout 1 !! Il faut que vous quittiez l'établissement immédia-
tement ... Quand votre -- quand la période dif-
PAUL : Pourquoi es-tu venue ici ? ficile sera passée, vous pourrez vous faire ins-
crire dans un autre établissement, sans doute ...
PHOEBE : L'idée est de toi. Pour le moment, le règlement de l'établissement
est formel ... Nous devons penser aux autres
PAUL : E h bien, je regrette d'être aussi ennuyeux. élèves ...

PHOEBE : Oh laisse-moi tranquille. Je t'en prie, Phoebe étendue sur la plage, seule.
laisse-moi tranquille 1
Phoebe nageant.
PAUL : D'accord, d'accord ! bien volontiers !
Les silhouettes de Phoebe et de Paul se détachent
L a maison de Phoebe. Ses parents se querellent. tout en haut d'un grand immeuble en construction.

LE PERE : Où as-tu la tête, hein ? Est-ce qu'il Nous sommes de nouveau à la plage. Phoebe ap-
t'arrive m ê m e quelquefois de penser ? Non, mais pelle Paul avec frénésie. Paul apparaît soudain
dis-moi, où peux-tu bien avoir la tete ! 1 derrière elle, tenant une bouteille d'huile solaire
à la main.

41
PHOEBE : O ù étais-tu ? PAUL : Est-il vraiment fou ?

PAUL : Je suis retourné à la maison chercher PHOEBE : Non.


l'huile solaire. Veux-tu que je t'en mette sur le
dos ? PAUL :Phoebe ... déesse de la lune ... J'ima-
gine qu'on a dû se moquer de toi à l'école.
PHOEBE : Oui, je veux bien.
PHOEBE : Paul ...
Paysage urbain : de grands immeubles en construc-
tion. C'est la nuit. Paul et Phoebe marchent côte PAUL (paresseusement) Hmm..
à côte étroitement enlacés. Ii l'embrasse.
PHOEBE :As-tu jamais pensé à l'effet que ça doit
PHOEBE : I
l fait si sombre ici. faire de mourir ?

L a plage de nouveau. PAUL : Hmm ...

PAUL : Dis-moi, qu'est-ce qui ne va pas ? PHOEBE : Ca ne te fait pas peur ?

PHOEBE : Oh, je ne sais pas. PAUL : Pourquoi aurais-je peur ? Si on devait


vivre éternellement, on finirait par mourir d'ennui.
PAUL : Es-tu malade ?
PHOEBE : Mais - si on meurt jeune ?
PHOEBE : Non, je ne suis pas malade, j'en ai
simplement assez. PAUL : Quand on est jeune, on est censé penser
à la v
i e ..
. Pourquoi la mort t'intéresse-t-elle
PAUL : C'est à cause de moi ? soudain tellement ?

-
PHOEBE : Non cela n'a rien à voir avec toi ... PHOEBE : Oh, je ne sais pas. J'ai peur.
Je m e sens simplement toute drôle aujourd'hui,
c'est tout. PAUL : D e mourir ?

PAUL : Bon. PHOEBE :Non. Pas de mourir.

L e père de Phoebe s'habille dans la chambre prin- Paul interpelle le groupe de trois vacanciers que
cipale de la maison. Il est hors de lui. nous avons déjà vu sur la plage.

LE PERE : Tous les gens du quartier l'appren- PAUL : Holà ! Etes-vous en auto ?
dront ... Nous sommes fichus ! M a réputation
est ruinée 1 Pendant le trajet du retour dans l'automobile,
Phoebe se demande quelle sera la réaction de sa
Une "surboum" chez Phoebe. Musique et danses. mère quand elle lui dira qu'elle est enceinte. O n
entend la radio de façon intermittente pendant
MARGIE : M a soeur m'a envoyée voir ce médecin toute cette séquence. Phoebe imagine les trois
... Ça s'est passé très secrètement ... J'ai dQ scènes suivantes :
m e rendre chez lui ... Une demi-heure plus tard
c'était fini. PHOEBE : M a m a n ... J'ai quelque chose à te
dire ... quelque chose d'important ...
PHOEBE : Tu n'as pas eu peur ? Est-ce que ça
t'a fait mal ? PHOEBE (Off): M a m a n ... ce que j'ai à te dire
... ce n'est pas facile ! Maman, j'attends un
MARGIE : Non, ça n'a pas fait mal. 11 m'a dit enfant !
qu'il n'y avait pas de raison d'avoir peur, alors
je n'ai pas eu peur. LA MERE : Phoebe ! (d'unton incrédule)

L a plage. PHOEBE : Maman, j'attends un enfant !

PAUL : Qui a eu l'idée de t'appeler Phoebe ? LA MERE : Phoebe . .. Qu'est-cequetu racontes


... qu'est-ce que tu m e racontes là ! Ce n'est
PHOEBE : M o n parrain .., Il a de drBles d'idées pas vrai 1 Non ce n'est pas possible ! Qu'as-tu
... C'est un artiste ... Mes parents disent qu'il fait 1 Ton père te tuera ! M o n Dieu, qu'as-tu
est fou ... fait 1

42
Phoebe imagine maintenant que ses parents ont la LA MERE : Phoebe ... Es-tu folle ? Où vas-tu ?
réaction contraire : qu'ils accueillent la nouvelle
avec joie. L a m & m e action est répétée, de façonplus réaliste
cette fois-ci à un rythme normal.
PHOEBE : M a m a n ... Papa ... Je suis enceinte !
PHOEBE : Salut.
LA MERE : M a chérie, c'est merveilleux !
LA MERE : Bonjour. L e déjeuner sera un peu
LE PERE :E h bien, en voilà une nouvelle ! plus tard que d'habitude.

LA MERE : Maintenant, ta chambre ne sera plus PHOEBE : Ça ne fait rien - je n'ai pas très faim.
assez grande ; il faudra que nous t'en préparions
une autre ... LA MERE : Pourquoi m e regardes-tu c o m m e ça ?
Quelque chose ne va pas ?
LE PERE : Et tu devras commencer à ménager ta
santé ... PHOEBE : Non, non ce n'est rien.

L'automobile s'arrete devant la maison de Phoebe. L a chambre de Phoebe.

PHOEBE : A u revoir, Paul. Au revoir tout le L'entrée de la maison de Phoebe. Phoebe téié-
monde. phone à Paul.

LES A U T R E S : A bientôt ! PHOEBE : Paul ? ... Ce que j'ai essayé de te


dire toute la journée c'est que j'a.ttendsun enfant.
Phoebe entre dans la maison et, sans mot dire à
personne, commence àfaire ses valises en grande Elle raccroche sans attendre la réponse.
hâte.
Elle rentre dans sa chambre et se met à pleurer.

43
APPENDICE V

EXTRAIT DU FILM "LES POISONS, LES NUISIBLES ET L'HOMME''


(DECOUPAGEDU FILM ACHEVE)

(Ce film se compose surtout d'interviews et de déclarations filmées sur l'utilisation


des insecticides chimiques dans l'industrie alimentaire) Office national du cinéma
du Canada.

M. FLEMING (ministre de la santé) : J'ai instam- EZRA BENSON : Oui,je mangerai des airelles ce
ment demandé aujourd'hui d'arrêter toute vente jour-là. Je les aime. E n fait, j'en ai mangé di-
d'airellesou de produits à base d'airelles cultivées manche dernier.
en 1958 et1959dans les Etats du Washington et de
l'Oregon, à cause d'une contamination possible par LE COMMENTATEUR : Pendant ce temps, les
un désherbant chimique qui cause le cancer de la magasins et supermarchés étaient remplis de gens
thyroïde chez les rats auxquels il est administré. qui faisaient leurs courses pour le "Thanksgiving
J'ai demandé que ces ventes soient suspendues Day".
jusqu'à ce que les producteurs aient soumis un
plan pratique pour séparer les baies contaminées LE REPORTER : Madame, je vous prie, avez-
de celles qui ne le sont pas. vous acheté des airelles depuis que le Gouverne-
ment en a proscrit la vente ?
LE COMMENTATEUR : Au NewJersey, le repré-
sentant local d'une grande société de production UNE ACHETEUSE : Non. parce que je n'en ai pas
d'airelles, M. Ed. Lipman, s'inquiète des rela- eu besoin.
tions avec le client.
LE REPORTER : N'aimez-vous pas les airelles ?
M. LIPMAN : E n quoi le commerce des airelles Allez-vous en manger maintenant que l'interdic-
a-t-ilsouffert ? Ehbien, vous savez, nous s o m m e s tion est levée ?
une coopérative et nous avons dépensé de vastes
s o m m e s - plus de 20 millions de dollars, par L'ACHETEUSE: Mais certainement.
exemple, au cours des cinq dernières années -
pour expliquer au public que les produits à base LE REPORTER : Vous en servirez au repas du
d'airelles sont bons pour la santé. Je crois que "Thanksgiving Day", alors ?
maintenant, cette seule brève déclaration faite
lundi à Washington a totalement neutralisé l'effet L'ACHETEUSE: Oui.
de notre campagne, ou du moins en grande partie.
C'est là une des choses à inscrire au passif de LE REPORTER : Merci beaucoup.
cette opération. Nos magasins du N e w Jersey
pourraient perdre jusqu'à un demi-million de dol- LE REPORTER (3 une autre acheteuse) : Excusez-
lars de cette façon. moi, avez-vous acheté des airelles depuis que la
vente en a été interdite ?
LE REPORTER : Pensez-vous que cette alerte ait
porté dkfinitivement préjudice à lavente des airelles ? 2e ACHETEUSE : Non, je n'en ai pas acheté.

M. LIPMAN : Certainement pas. C'est une indus- LE REPORTER : Allez-vous en acheter mainte-
trie ancienne, très ancienne, que celle des airelles, nant que la vente est à nouveau autorisée ?
une vieille culture traditionnelle dans tout 1'Etat
et m ê m e dans tout le pays. Cette alerte passera 2e ACHETEUSE : Non, je n'en achèterai pas non
elle aussi. Mais elle va constituer un obstacle plus.
certain dans l'avenir immédiat.
LE REPORTER : M ê m e pas maintenant ?
LE COMMENTATEUR : A Washington, M. Ezra
Benson, ministre de l'agriculture, exprime une 2 e A C H E T E U S E : Non.
autre opinion sur les airelles.
LE REPORTER : Pourquoi ?
LE REPORTER : Monsieur le Ministre, cette af-
faire vous concerne-t- elle personnellement ? 2e A C H E T E U S E : Parce que je crois ce que le
Mangeriez-vous vous-m ê m e des airelles au repas Gouvernement a dit. O n ne tient pas à tomber
du "Thanksgiving Day" ? malade.

44
LE REPORTER (à une autre cliente) : Pardon, du Canada, ces produits ont été protégés contre
Madame, avez-vous acheté des airelles depuis que les ravages des insectes par la vaporisation de
le Gouvernement en a interdit la vente ? produits chimiques et d'autres insecticides.
Rares sont ceux d'entre nous qui font encore
3e ACHETEUSE : Non. pousser eux-mêmes ce qu'ils mangent. Les cul-
tures se font maintenant à grande échelle et sup-
LE REPORTER : Pourquoi ? posent l'utilisation généralisée des pesticides.
Nous devons essayer d'enconnaîtreà fond la nature
3e ACHETEUSE : E h bien, je suisun peu sceptique, et l'utilisationcorrecte. Car ces armes modernes
vous savez. -
sont extrêmement puissantes entre les mains de
quelques-uns elles peuvent avoir un retentissgment
LE COMMENTATEUR : Dans ce supermarché, sur la vie de millions de gens.
c o m m e dans d'autres magasins de toutes les villes
(FIN DE L'EXTRAIT)

45
APPENDICE VI

FILMS RECOMMANDES POUR L'EFFICACITEDE LEUR COMMENTAIRE


OU DU COMMENTAIRE ET DES DIALOGUES

NIGHT iW?UL John Grierson commentaire, vers, dialogues

SONG OF CEYLON Basil Wright le commentaire est constitué par


des textes historiques

DURY FOR TIMOTHY Humphrey Jemings

THURSDAY'S CHILDREN Lindsay Anderson

DELTA P H A S E 1 Bert Haanstra exposé semi-technique très clair


- di*n processus

REPORT F R O M COLOMBLA James M u e


United States Information Agency

Y E A R S OF LIGHTNING, United States Information Agency


DAY OF D R U M S
FIELDS OF SACRIFICE Office national du film du Canada

LONELY BOY Kroitor, Koenig Commentaire aussi concis que


Office national du film du Canada possible et son synchrone

ME MORANDUM Brittain, Spotton Commentaire concis mais évocateur


Office national du film du Canada

CULLODEN Peter Watkins Commentaire fondé sur des recherches


British Broadcasting historiques pou ssées, son synchrone
Corporation

Note : O n pourra, dans beaucoup de pays, se renseigner sur la possibilité de se procurer ces films
auprès de l'ambassade ou de la légation du pays d'origine. Dans les autres cas, s'adresser à la cinéma-
thèque ou aux archives cinématographiques nationales.

NUIT ET BROUILLARD Alain Resnais

LE POULET Claude Berry

A VALPARAISO Joris Ivens, commentaire : Chris Marker

L 'HARICOT Edmond Sechan

LA CASA DELLE VEDONE Vittorio Baldi

L 'INVENTIONDU MONDE Commentaire : Benjamin Perret

ECCE HOMO Alain Saury

HENRI MICHAUX OU Jacques Veinat


L ' E S P A C E DU D E D A N S

46
APPENDICE VI1

DEUX EXTRAITS DE DECOUPAGES ILLUSTRES


D E S DESSINS STYLISES RAPPELANT CEUX D E S DESSINS ANIMES
TIENNENT LIEU'DE TEXTE ECRIT

Croquis servant d'ébauche ou d'esquisse préliminaire


d'un film d'animation (court film sur le thème "Le
tabac et le cancer du poumon").

II

Croquis pour une séquence d'un film expérimental


(Université de N e w York).

Les croquis peuvent indiquer l'angle de champ, la


composition de l'image dans son cadre et, dans une
certaine mesure, les mouvements prévus dans chaque
plan. E n théorie, un découpage illustré peut donner
une idée visuelle de chaque plan (c'est-à-direde
chaque cadrage de la caméra) du film projeté.

47
A CAUSER DE5 INCENDiES.
f

ET B E N ENTENDU, A E N R I C H ~ RLB CORPS &DICAL.

.., ET NOTANM€hJT LES CHiiQüR4IENS.

48
49
La main du mari se crispe sur
sa poitrine pendant qu'il
S'a $faisse dan 5 le Çaoteuh.
La caméraest en contreplon+

La femme rcgafde on ma&


et se lève de Sa chaise.
Elle a un sourire sardonique.

Raccord &mouvewnen
pendant que \'homme s'affaisse
dan5 le fauteuil.
L'appafd\ cadre le cadavre du
mari 3 trevy4 ies jambes
des rnannequsns Z.

50
Elle s’avance ver5 la caméra.

O n voit Son reflet dans b


miroir au mur.

51
PUBLICATIONS D E L'UNESCO :AGENTS GÉNÉRAUX

Afghanistan Panuzai, Press Department. Royal Afghan Ministry of Education. KABUL.


Afrique du Sud Van Schaik's Bookstore (Pty.),Ltd.. Libri Building. Cliurch Street,P. O. Box 724 PRETORIA.
Albanie N. Sh. Botimeve Naim Frasheri. TIRANA.
Algérie Institut pedagogique national, II, rue Ali-Haddad (ex-rueZaâtcha),ALGBR.
Allemagne (Rép.féd). R. Oldenbourg Verlag, Unesco-Vertrieb für Deutschland, Rosenheimerstrasse 145. MÜNCHEN 8.
Antilles françaises Librairie J. Bocage, rue Lavoir, B. P. 208, FORT-DE--CE (Martinique).
Antilles néerlandaises G.C.T . Van Dorp &Co. (Ned. Ant.) N. V. WILLEMSTAD (Curaçao N. A.).
Argentine Editorial Sudamericana,S.A.,Humbert0 1 n.O 545. T.E. 30.7518.BUENOSA i m .
Australie Publications :Educational Supplies PW. Ltd., Box 33. Post Office, Brookvale ZIOO. N.S.W..
Périodiques :Dominie Pty. Ltd.. Box 33, Post Office, Brookvale 2100 N.S.W..
Sous-agent :United Nations Association of Australia. Victorian Division, 4th Flwr. Askew House.
364 Lonsdale Street, MELBOLIFINE (Victoria) 3000.
Autriche Verlag Georg Fromme &Co., Spengergasse 39. WIEN 5.
Belgique Toutes les publications : Éditions Labor 8,342.rue Royale, BRUXELLES 3. N.V. Standaard Wetenschappelijke
Uitgeverij. Belgiëlei 147,ANTWEWEN 1.
a Le Courrier et les diapositives seulement :Jean D e Lannoy, I 12.rue du Trône, BRUXELLES 5.
Bolivie Cornision Nacional Boliviana de la Unesco, Ministerio de Educacih y Cultura, casilla de correo
n.O 4107,LAPAZ. Libreria Universitaria. Universidad San Francisco Xavier, apartado 212,SUCRE.
Brésil Fundaçâo Getblio Vargas, caixa Postai 4081-zc-05,RIO DE JANEIRO, (Guanabara).
Bulgarie Raznoiznos. I Tzar Assen. SOFIJA.
Cambodge Librairie Albert Portail. 14,avenue Boulloche, PHNOM-PENH.
Cameroun Papeterie moderne. Maller et CIe, B.P. 495, YAOUNDB.
Canada L'Imprimeur de la Reine, OTTAWA (Ont.).
Ceylan Lake House Bookshop, Su Chittampalam Gardiner Mawata. P. O.Box 244, COLOMBO 2.
Chili Toutes les publications :Editorial Universitaria, S.A..casilla 10220, SANTIAGO.
I Le Coum'er 8 seulement : Comisi6n Nacional de la Unesco, Mac-Iver 764, dpto. 63, SANTIAGO.
Chine T h e World Book Co.,Ltd.. 99 Chungking South Road, section 1, TAIPEH (TaiwanlFormose).
Chypre I MAM D, Anhbishop Makarios 3rd Avenue, P. O. Box 1722.NICOSIA.
Colombie Libreria Buchholz Galeria. avenida Jiménez de Queseda 8-40,BOGOTA.Ediciones Tercer Mundo. apartado
aereo 4817,BOGOTX. Distrilibros Ltda., Pi0 Alfonso Garcia. carrera 4.'. n.O' 36-119y 36-125, CARTAGENA.
J. G e r m h Rodrigue2 N..oficina 201,Edificio Banco de Bogota, apartado nzcional 83, GIRARDOT (Cundi-
namarca). Lihrerla Univenitaria, Universidad Pedagbgica de Colombia. TUNJA.
Congo (Rép. dém.) La Librairie. Institut politique congolais. B. P. 2307, KINSHASA.
Corée Korean National Commission for Unesco, P. O.Box Central G4. SEOUL.
Costa Rica Toutcr lespublications: Libreria Trejos,S. A., apartado 1313. SAN JosB. Telefonos 2285 y 3200.
a Le Courrier icuiement :Carlo Valerin Shenz y Co. Ltda.. El Palario de las Revistas *,apartado 1924,
SAN José.
Côte-d'Ivoire Centre d'édition et de difision africaines,B. P. 454~.ABIDJAN PLATEAU.
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El Salvador Libreria Cultural Salvadoreira.S. A.. EdiFicio San Martin, 6.. calle Oriente n.O I 18.SAN SALVADOR.
Équateur Chsa de la Cultura Ecuatoriana. Nucleo del Guayas.Pedm Moncayo y 9 de Octubre. casilla de correa 3542,
GUAYAQUIL.
Espagne Toutes les pubEcation<: Libreria Cientifica Medinaceli. Duque de Medinaceli 4, MADRID 14. I Le
Courrier n s e u l m m t :Ediciones Iberoamericanas, S.A.. calle de Ofiate 15. MADRID. Ediciones Liber,
apartado de correos 17. ONDARROA (Vizcaya).
etnts-Unis d'Amérique Unesco Publications Center. P. O. Box 433. NEW YOM. N. Y. 10016.
gthiopie National Commission for Unesco, P. O.Box 2996, ADDIS ABABA.
FinIan de Akateeminen Kirjakauppa, 2 Keskuskatu. HELSINKI.
France Librairie de l'Unesco, place de Fontenoy, PARls-78;CCP 12598-48.
Ghana Methodist Book Depot Limited. Atlantis House, Commercial Street.P. O.Box 100,CAPECOAST.
Grèce Librairie H.Kaufmann, 28 rue du Stade, ATHINAI. Librairie Eleftheroudakis,Nikkia 4,ATHINAI.
Guatemala Cornision Nacional de la Unesco, 6.. d e 9.27. zona 1. GUATEMALA.
Haïti Librairie I A la Caravelle m, 36. rue Roux, B. P. III. PORT-AU-PRINCE.
Hong kong Swindon Book Co., 13-15 Lock Road, KOWLOON.
Hongrie Akadémiai Konyvesbolt, Vhci u. 22, BUDAPEST V. A.K.V. Konyvthsok Boltja. NépkoztOrsasLg utja 16,
BUDAPESTVI.
Inde Orient Longmans, Ltd.: Nicol Road, Bailard Estate. BOMBAY1; 17 Chittaranjan Avenue, CALCUTTA 13;
36 A Mount Road. MADRAS z; 3/5 ksaf Ali Road. NEWDELHI 1.
Sous-dCpBts : Oxford Book and Stationery Co., 17Park Street, CALCUTTA 16.et Scindia House, NEW DELHI.
lndian National Commission for Unesco, att. :T h e Librarian, Ministry of Education. a C 3 Wing. Roorn
no.- 114.Shastri Bhawan. NEW DELHI 1.
Indonésie Indira P.T. Djl.Dr.Sam Ratulangic 37, DJAKARTA.
Irak McKenzie'e' BookshoD. Ai-Rashid Street, BAGHDAD. University Bookstore, University of Baghdad,
PlOlBox 75. BAGHDAD.
Iran Commission nationale iranienne pour I'Unesco. avenue du Musée. TDH~RAN.
Irlande T h e National Press, 2 Wellington Road. Ballabridge, DL~BLIN 4.
Islande Snaebjorn Jonsson &Co., H . F..Hafnarstraeti 9, REYKJAVIK. '
Israel Emanuel Brown. formerly Blumstein's Bookstores: 35 Allenby Hoad el 48 Nahlat Benjamin Street,TEL Aviv.
Italie Libreria Commissionaria Sansoni S.p.A., via Lamarmora 45. casella postale 552 50121 FIRENZE.
Libreria Internazionale Rizzoli, Galeria Colonna, Largo Chigi, ROMA. Libreria 'Zanichelli. Diazza
Galvani Ilh. BOLOGNA. Hoepli, via Ulrico Hoepli 5. MILANO. Librairie française. Piazza Castello 9. TORINO.
Difisione Edizioni Anglo-Americane,via Lima 28. 00198ROMA.
Jamaïque Sangater's Book Stores Ltd., P.O. Box 366, IOI Water Lane. KINGSTON.
Japon Maruzen Co., Ltd., P. O.Box 5050, Tokyo International.TOKYO.
Jordanie Joseph 1. Bahous &Co., Dar-ul-Kutub,Salt Road. P. O.Box 66, AMMAN.
Kenya ESA Bookshop, P. O.Box 30167, NAIROBI.
Koweit T h e Kuwait Bookshop Co. Ltd.. P. O.Box 2942. KUWAIT.
Liban Librairies Antoine A. Naufal et Freres, B. P. 656, BEYROUTH.
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Libye Agency for Developrnent of Publication and Distribution,P. O. Box 261,TRIPOLI.
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Luxembourg Librairie Paul Bruck, 22, Grand-Rue, LUXEMBOURG.
Madagascar Toutes les publicofions :Commission nationale de la République malgache,Ministère de l'éducation nationale,
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Le Courrier n seulement :Service des œuvres post et péri-scolaires. Ministère de I'dducation nationale,
TANANARIVE.
Malaisie Federal Publications Sdn Bhd., Balai Berita, 31 Jalan Riong, KUALA LUMPUR.
Mali Librairie populaire du Mali,B. P. 28, BAMAKO.
Malte Sapienza's Library, 26 Kingsway. VALLETTA. .
Maroc Toutex le3 publications: Librairie * Aux belles images n, 281, avenue M o h a m m e d V. RABAT(CCP 68.74).
Le Courrier B seulement (pour les enseignants) :Commission nationale marocaine pour l'Unesco. 20, Zenkat
Mourabitine. RABAT(CCP324-45).
Maurice Nalanda Co.. Lrd.. 30 Bourbon Street, PORT-LOUIS.
Mexique Editorial Hermes, Ignacio Mariscal 41,MÉ~Ico. D.F.
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Mozambique Salema &Carvalho Ltda.. caka postal 192, BEIRA.
Nicaragua Libreria Cultural Niearagüense.calle 1 5 de Septiembre y avenida Bolivar, apartado n,- 807, M A N A G U A .
Norvège Toufes les publicafions: A/S.Bokhjemet. Akersgt. 41. OSLO1.
1 Le Courrier 8 seulement: A.S. Narvesens Litteraturjeneste, Box 6125,OSLO 6.
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Oxford Terrace. P. O.Box 1721. CHRISTCHURCH; Alma Street,P. O.Box 857, HAMILTON; Princes Street,
P.O.Box 1104,DUNEDIN;Mulgrave Street, Private Bag, WELLINGTON.
Ouganda Uganda Bookshop.P.O.Box 145. KAMPALA.
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Bookshop : Sarwar Road, RAWALPINDI : Paribagh. DACCA.
Paraguay Melchor Garcia, Eligio Ayala 1650, ASUNCION.
Pays-Bas N.V. Martinus Nijhoff. Lange Voorhout 9,'s-GRAVENHAGE.
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Philippines T h e Modern Book Co.,928 Rizal Avenue, P.O.Box 632,MANILA.
Pologne OProdek Rozpowszechniania Wydawnictw Naukowych PAN,Palac Kultury i Nauki, WARSZAWA.
Porto Rico Spanish English Publications,Eleanor Roosevelt I 15. apartado 1912,HATO REY.
Portugal Dias &Andrade,Ltda..Livraria Portugal,rua do Carrno 70,LSBOA.
République arabe unie Librairie Kasr E l Nil,38. rue Kasr El Nil,LECAIRE.Sous-déPôpot:La Renaissanced'Égypte, 9 Sh.Adly Pasha.
LECAIRE.
Rhodésie du Sud Textbook Sales (PVT)Ltd.. 67 Union Avenue, SALISBURY.
Roumanie Cartimex.P. O. Box 134-135, 126 calea Victorici,BUCURE~TI (Télex:226).
Royaume-Uni H.M.Stationery Office,P.O.Box 569,LONDON, S.E.I.
Government bookshops: London, Belfast,Birmingham, Cardiff,Edinburgh,Manchester.
Sénegal La Maison du livre. 13. avenue Roume, B. P. 20-60.DAKAR. '
Singapour Federai PlublicationsSdn Bhd., Times House, River Valley Road, SINGAPORE 9.
Soudan AI Bashir Bookshop. P. O. Box 1118.KHARTOUM.
Suède Toutes les publications :A/B C. E. Fritzes Kungl. Hovbokhandel,Fredsgatan 2, STOCKHOLM16.
Le CourriPr I seulement: T h e United Nations Association of Sweden,Vasapatan 15-17,STOCKHOLM C
Suisse Europa Verlag, Ramistrasse 5. ZURICH. Librairie Pavot,6,rue Grenus, 1211 GENPVE II.
Syrie Librairie Sayegh, Immeuble Diab; rue du Parlement, B. P. 704, DAMAS.
Tanzanie D a r es Salaam Bookshop. P. O.Box 9030. DARES SALAAM.
Tchécoslovaquie SNTL.Spalena SI, PRAHAI (Expositionpermanente). Zahranicni literatura,I I Soukenicka,PRAHA1.
Thaïlande Suksapan Panit,Mansion 9,Rajdamnem Avenue,BANGKOK.
Tunisie Société tunisienne de diffusion,5, avenue de Carthage,Tunis.
Turquie Librairie Hachette. 469 Istiklal Caddesi. Beyoulu. ISTANBUL.
URSS Methdunarodnaja Kniga. MOSKVA G-zoo.
Uruguay Editorial Losada Uruguaya.S. A./Libreria Losada.Maldonado ~goz./Colonia1340,MONTEVIDEO.
Venezuela Libreria Historia, Monjas a Padre Sierrà, Edificio Oeste 2, n.O 6 (Frente al Capitolio), apartado de
mrreos 7320, CARACAS.
République du Viêt-nam Librairie-papeterieXuân-Thu.185.193, rue T u - D o ,B. P. 283, SAIGON.
Yougoslavie Jugoslovenska Knjiga,Terazije 27. BEOGRAD. Drzavna Zaluzba Slovenije. Mestni Trg. 26. LJUBLJANA.
p.25587 $1.25 ; 7/- [€0.35] (stg.) ; 4 F

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