3 - Cellulite Cervico-Faciale

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ORL 2019/2020

CELLULITES CERVICO-FACIALES
I. Introduction
• Définition = Infection des espaces celluleux de la face et du cou ( Surtout bactérienne , parfois mycosique , jamais
virale )
• Origine dentaire +++
• Fréquence 
• Imagerie +++ ( TDM systématique C- / C+  Extension + complications thrombophlébite +++ )
• Thérapeutique
• Pronostic grave +++
II. Epidémiologie : Beaucoup de facteurs favorisants dont les plus importants sont l’utilisation des AINS ou la
mauvaise utilisation de l’ATB +++
1. Prédominance : adulte de sexe masculin
2. Origine : Dentaire ˃ pharyngée
3. Facteurs favorisants :
• Tabac / alcool : mauvais état bucco-dentaire
• Diabète : la micro angiopathie diabétique freine la diffusion de l’antibiothérapie
• Obésité
• Malnutrition (anémie sévère)
• Immunodépression (VIH : cellulites à répétition)
• AINS : contre indiqués puisque l’inflammation est d’origine bactérienne !!
 ↗ virulence et prolifération microbienne
 La phénylbutazone réduit l’activité des granulocytes, de la phagocytose et la destruction intra-cellulaire du micro-
organisme pathogène
• Mauvaise utilisation des antibiotiques : antibiothérapie souvent non adaptée (spectre étroit) puisqu’il s’agit d’une
infection polymicrobienne avec des anaérobies qui plus est !  résistances
De plus, une des particularités du tissu graisseux est sa mauvaise vascularisation, ce qui limite la diffusion des ATB pris : la
concentration au sein du tissu sera inférieure à la CMI de l’ATB. D’où la nécessité d’un traitement par voie parentérale.

4. Porte d’entrée infectieuse :


• Mortification de la pulpe dentaire
 Carie ++ ou traumatisme dentaire : entraine une pulpite (granulome inflammatoire) avec formation de pus 
collection endo buccale au niveau du palais en regard de la dent, ou extériorisation en exo buccal (début d’enflure
de la joue).
• Infection parodontale
 Gingivo-stomatite , parodontite
 Péricoronarite de la dent de sagesse
• Iatrogène
 Stomatologie
 Chirurgie de traumatologie maxillo-faciale
 Implantologie
 Aiguille d’anesthésie tronculaire

5. Infection poly microbienne :


 Aérobies et anaérobies +++ quelle que soit l’origine.

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 L’origine de la cellulite est toujours bactérienne ! L’origine mycosique est possible sur un terrain particulier (enfant
diabétique insulino-dépendant décompensé ou sujet ID)
 Se méfier de la Tuberculose et de l’actinomycose (= bactérie)
6. Infection synergique :
• Pullulations des bactéries aérobies
• Epuisement des défenses oxydatives du pool monocytomacrophagique et granulocytaire
• Pullulations des bactéries anaérobies
• Effraction des barrières anatomiques par protéolyse
• Nécrose tissulaire secondaire à la libération des streptolysines O et C cytotoxiques
• Thromboses locorégionales par action pro coagulante des toxines bactériennes

7. Infection de contiguïté : cercle vicieux


 Extension de l’infection par contiguïté ou par voie lymphatique ou hématogène :
 Territoire veineux : thrombophlébites septiques (sinus caverneux, ptérygoïdes, veines jugulaires internes)
 Territoire artériel : thrombus septique complet entrainant des ischémies (ex : la peau a une vascularisation terminale
 nécrose cutanée, cratères dégueu)
 Par voie lymphatique : adénophlegmon (premier relais de défense sur le plan local)

III. Diagnostic positif


1. Clinique :
• D’abord évaluer l’état respiratoire ; HD et neurologique du patient
pour savoir s’il est en état de choc !!!  Note : Les signes de gravité !!!
• Eliminer une urgence vitale (complications) :  Erythème au niveau de la partie basse
 Respiratoire : médiastinite, asphyxie du cou , creux sus-clav , te fourchette
 Hémodynamique : choc septique (toujours prendre le pouls et sternale
la TA)  Tuméfaction sus-hyoïdienne latérale qui
 Neurologique : collections cérébrales (abcès, empyème), tend à progresser vers la région
emboles septiques, thromboses : vigilance et signes cervicale médiane ou à l’inverse
neurologiques  Crépitations neigeuses
 Défaillance multi viscérale : anurie  Œdème lingual débutant
• Signes fonctionnels : installation aigue ++ en quelques jours  Douleur oropharyngée qui gêne la
 Douleur déglutition salivaire + trismus serré
 Fièvre : l’absence de fièvre est possible en cas de prise  Tumeur jugale qui ferme l’œil
d’antipyrétiques ou en cas d’agranulocytose post-
chimiothérapie.
 Tuméfaction rouge luisante
 Fistules
 Trismus réactionnel : limitation de l’ouverture buccale surtout quand l’origine est pharyngée (phlegmon
amygdalien, abcès latéraux pharyngés) : rétraction des muscles masticateurs et ptérygoïdes en contact avec le
pus.
 Tout trismus fébrile est une indication formelle au scanner !
• Interrogatoire acharné (terrain : âge, tares, histoire clinique, ATCD dentaires et ORL / sinusites)
• Examen clinique endo et exo buccal : chercher les racines dentaires ++ (patients édentés), forme circonscrite ou diffuse,
emphysème sous-cutané (crépitations dues aux anaérobies).

2. Paraclinique :
• Imagerie :

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 Panoramique retro alvéolaire + panoramique dentaire : présence d’un halo clair (noir) entourant la racine
dentaire en question, témoignant de la présence d’anaérobies.
 Scanner : renseigne sur la porte d’entrée, l’extension et les autres complications
 TDM faciale C+ : systématique, examen de choix.
 TDM C - : exploration des sinusites
 TDM cérébrale : empyème extradural (céphalées pouvant être isolées)
 IRM : D’une manière exceptionnelle si contre-indication
• Biologie : (Importante pour le retentissement et l’étiologie/hémopathie)
• NFS + CRP quotidiennes : hyperleucocytose à PNN, agranulocytose, pancytopénie
 VS (Procalcitonine n’aura pas d’intérêt vue qu’on sait déjà que
 Chercher un terrain favorisant :
l’origine est bactérienne)
 NFS : patient sous chimio  Leuco-
 Glycémie ( dépister un diabète )
neutropénie ou agranulocytose
 Sérologies (VIH)
 Si GB et PNN normaux  Penser à une
 Fonction rénale : patient sujet à une polyATB, insuffisance rénale
cellulite carcinomateuse
fonctionnelle , également pour la TDM C+
• Bactériologie + antibiogramme (obligatoires) et hémocultures
• Histologie : dans le cadre d’une cellulite carcinomateuse (ex : cancer de la thyroïde)

3. Formes cliniques :
• Cellulite aigue circonscrite (exemple : cellulite frontale compliquant une sinusite frontale)
• Cellulite aigue diffuse : forme gangreneuse ; forme phlegmoneuse
• Cellulite subaiguë et chronique (ostéolyse et extériorisation du pus : fistules et cicatrices)
4. Formes compliquées :
a. Complications générales :
• Pulmonaires, cardio-vasculaires, rénales
• Choc septique
• Défaillance multi viscérale

b. Complications particulières :
• Angine de Ludwig : abcès du plancher buccal. Décès par asphyxie car l’abcès refoule la base de la langue jusqu’à
atteindre la paroi postérieure du pharynx. A drainer le plus rapidement possible. Déconseiller le décubitus dorsal. Issue
du pus au niveau du plancher buccal, collection sous le menton ( signe du jabot : Très doulouerux , très rouge , œdèmatié
, et on retrouve un abcès au niveau de la radio ) . Indication à la trachéotomie, pas d’intubation
• Orbite : cellulite orbitaire (secondaire à une sinusite)
 Œdème inflammatoire de la paupière Toute exophtalmie chez un enfant est une
 Hyperémie conjonctivale, chémosis éthmoïdite JPDC +++
 Diminution de la mobilité oculaire
 Baisse de l’acuité visuelle
 Exophtalmie unilatérale
 TDM faciale +++
 Traitement par voie parentérale / hospitalisation
 Chirurgie endoscopique endonasale en urgence : risque de cécité car toute souffrance du nerf optique > 6h est
irrécupérable pronostic fonctionnel

• Crâne : méningite, abcès ou empyème cérébral, thrombophlébite du Triade TVC = Chémosis + ptosis +
sinus caverneux (catastrophique, mettre sous HBPM pour le ophtalmoplégie douloureuse  Angio TDM
pronostic visuel en plus des ATB) ou IRM !!!!

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• Médiastin : pleurésie, péricardite , Médiastinite +++ (car absence de cloison entre le cou et le médiastin) : mortelle !!!
 Sepsis
 Douleur thoracique, toux
 Dyspnée, dysphagie, fausses routes
 Œdème cervical sus claviculaire
 Emphysème pariétal
 TDM thoracique est l’examen de choix (collections s’arrêtant au niveau du péricarde..), mais une Rx thorax peut
faire l’affaire en l’absence de moyens (présence de niveaux hydro-aériques médiastinaux témoignant des
anaérobies).
 Sternotomie pour drainer la collection
• Sd de Lemierre : pneumopathie secondaire à la présence d’emboles septiques issus de la fragmentation de thrombus
de la veine jugulaire interne après mise en place de l’antibiothérapie. Origine le plus souvent = sphère ORL.

IV. Diagnostic différentiel :


 Adénite
 Staphylococcie maligne de la face
 Tumeur des glandes salivaires
V. Traitement : Le traitement est TOUJOURS médico-chirurgical
1. Buts :
 Assurer les fonctions vitales
 Lutter contre l’infection
 Stabiliser le terrain (diabète)
 Eradiquer la cause : porte d’entrée (dent, pharynx, sinus)

2. Moyens :
a. Mesures de réanimation :
• Contrôle des voies aériennes (trachéotomie si nécessaire)
• Sonde nasogastrique
• Réanimation hémodynamique (dobutamine en cas de choc)
• Traitement antalgique
• Prévention de l’ulcère de stress
• Support psychique

b. Antibiothérapie parentérale :
• Principes de choix :
 Traitement empirique après prélèvement
 Large spectre et viser les anaérobies aussi
 Antibiotique peu toxique bactéricide synergique
• Problèmes de l’antibiothérapie :
 Non diffusion de l’antibiotique sur le site d’infection (zones non vascularisé, nécrose...)
 Traitement sous dosé
 Résistance du germe
• Tri-ATB empirique (à adapter en fonction des résultats de l’antibiogramme)
 Métronidazole (pour les anaérobies)
 C3G : 2g/j, ou à dose méningée en cas de complications endocrâniennes càd 6g/j
 Aminoside (gentamycine) (effet anti staphylococcique, jamais seuls, en bithérapie au minimum)
 Ou Fosfomycine au lieu des aminosides si les moyens le permettent

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• Pas d’AINS
• Surveillance clinique (régression des signes), biologique (baisse des blancs et de la CRP) et radiologique (Scanner :
efficacité sur les collections et les thrombus).
 P.s : une fois la CRP est normale , relai per os +++

c. Corticothérapie :
• Corticothérapie + ATB : permis après la chirurgie
• Pas de corticostéroïdes tant que l’infection bactérienne n’est pas jugulée (recul de l’hyperleucocytose et de la CRP de
contrôle)
• Autre cas devant lequel on peut démarrer la corticothérapie : preuve bactériologique du germe en cause et pronostic
fonctionnel (visuel/cécité) engagé !
• Ses bénéfices doivent être certains, ne pas l’utiliser pour améliorer le confort du patient

d. Autres :
• Oxygénothérapie hyperbare
 Indication discutée (fasciites nécrosante)
 Morbidité non négligeable : baisse du débit cardiaque, effet convulsivant, barotraumatisme
• Immunoglobines polyvalentes :
 Fasciite nécrosante
 Choc streptococcique
 Myonécroses à streptocoques

e. Chirurgie, le traitement ultime :


• Chirurgie systématique quand il y a de la nécrose ou des tissus très mal vascularisés.
• Incision large sous AG
• Débridement
• Exérèse des tissus nécrosés
• Mise en place de lame et / ou sonde pour irrigation
• Pansement tous les jours
3. Indications :
• Cellulite séreuse : Traitement médical
• Cellulite suppurée circonscrite :
 Hospitalisation
 Traitement médical par voie parentérale
 Drainage chirurgicale sous AL ou AG
• Cellulite diffuse :
 Hospitalisation
 Traitement médical par voie parentérale
 Traitement chirurgical
4. Évolution :
• Favorable
• Peut être disgracieuse avec des complications ou séquelles fonctionnelle et esthétique
• Antibiothérapie ciblée + chirurgie codifiée précoce = meilleur pronostic
• Ne jamais oublier de prendre en charge l’origine et le terrain.
VI. Conclusion : QE +++
 Infection grave
 D’abord c’est une affaire du généraliste

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 Déterminer les critères de gravité


 Préciser l’histoire de la maladie
 Réaliser un examen complet
 Préciser l’état général du patient et les comorbidités
 Traiter l’infection chirurgicalement
 Associer un traitement symptomatique
 Choisir et prescrire un traitement antibiotique adapté
 Réévaluer le patient rapidement
 Adresser en centre spécialisé

 QEEE !
 PEC multidisciplinaire
 Dans la CCF : il faut drainer la collection et donner l’ATB  FAUX ! Faut
jamais oublier la PEC du terrain
 L’antibiothérapie se fait à l’aveugle  FAUX ! Elle est par contre , ciblée en
fonction des germes en causes qu’on suspecte
 Est-ce que la chirurgie est toujours indiquée ? Pratiquement non mais faut la
garder dans la tête :3
 Chez l’enfant : C3G + métronidazole en attendant de voir le spécialiste
 Chez l’adulte : Aclav
 On donne JAMAIS de corticothérapie d’emblée , elle est prescrite une fois on
est assuré que l’ATB marche bien
 La cortico est indiquée d’emblée en cas d’installation de la cécité
 Les AINS : STRICTEMENT PROSCRIT !!!!!

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