Parde 036 0259
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Claude Sultan
Dans Pardès 2004/1 (N° 36), pages 259 à 268
Éditions In Press
ISSN 0295-5652
ISBN 2848350539
DOI 10.3917/parde.036.0259
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Dans les analyses que font les hommes d’un événement historique,
toutes sortes d’arguments peuvent être évoqués : Il peut s’agir de circons-
tances d’ordre politique, sociologique, économique, diplomatique, etc.
Pour le judaïsme rabbinique, il y a aussi une manière théologique d’ana-
lyser l’histoire des hommes. Cette théorie qui lit dans la thora (c’est-à-
dire à partir d’un texte révélé) le passé et le présent d’Israël et de l’hu-
manité, y lit aussi son futur. Est utilisé pour cette lecture un principe
d’herméneutique classique que Nahmanide (Moïse fils de Nahman,
XIIe siècle) rappelle en introduction de son commentaire sur la thora. Il
s’agit du fameux « ma’asse avot simane la-banim » : « Tout ce qui est
arrivé aux pères est un signe pour les fils ! » (Nahmanide sur Gn. 12, 6 :
Midrach Tanhuma sur Lekh-Lekha § 9) C’est cette lecture que nous allons
essayer de faire des passages bibliques relatant les alliances de Paix des
Patriarches.
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(*) Les références bibliques utilisent la traduction française établie sous la direction du
Grand-Rabbin Zadoc Kahn.
PARDÈS N° 36/2004
Pardès 36 & Bulletin 26/06/12 11:18 Page 260
Les relations d’Abraham avec les puissantes tribus, elles aussi instal-
lées à Hébron (des Hittites, des Amoréens…), sont des relations basées
sur une grande cordialité : La personnalité d’Abraham est perçue par
tous ses contemporains comme auréolée de la plus grande gloire :
(Gn. 23,6) « Tu es un prince de Dieu parmi nous ! »
Très rapidement, il est reconnu pour être l’homme dont il faut recher-
cher l’amitié et la protection. Les Amoréens Aner, Eschkol et Mamre
s’empressent de conclure avec lui un pacte d’alliance, ponctuel et circons-
tanciel, lorsqu’ils se sentiront menacés par les rois de Mésopotamie venus
envahir leurs territoires. La victoire obtenue grâce à Abraham achèvera
définitivement de faire de lui la figure la plus prestigieuse de tous ces
rois et roitelets de Canaan.
Le conflit remporté sur Amraphel, sans doute Hammourabi (celui du
Code), s’achève par un hommage solennel rendu à Abraham. Le roi-prêtre
du Shalem (la future Jérusalem accueille Abraham avec une offrande de
pain et de vin, et appelle sur lui les bénédictions du Dieu suprême.
L’étranger Abraham, à peine arrivé en Canaan, est reconnu comme le libé-
rateur du pays, et devient l’objet de la reconnaissance de la population.
Quelques années plus tard, et pour des raisons nombreuses (la plus
importante étant l’annonce de la naissance imminente d’Isaac), Abraham
quitte Hébron et décide de s’installer plus au sud du pays, dans la partie
centrale de Néguev. Ici aussi, rapidement, Abraham fait figure de pion-
nier, il y installe des points de peuplement autour de puits qu’il vient de
creuser, et transforme la steppe désertique en territoires fertiles, où, bien
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L’ACCORD DE BEER-SHEVA I
haine, et ce même homme, Abimélec, (ou son fils) qui avait prêté serment
de ne faire « de mal ni à mon fils ni à mon petit-fils » oublie déjà les
termes des accords signés et « Abimélec dit à Isaac : va-t’en de chez nous
car tu es trop puissant pour nous ! » (Gn.26, 16) (des commentateurs
nombreux notent que « de chez nous », pouvait être compris comme suit :
« va-t’en de chez nous car tu t’es enrichi à nos dépens » !). Ceci devien-
dra pour des siècles un leitmotiv « antisémite » à la peau dure. Les juifs
s’enrichissent sur le dos de la nation qui les accueille ! Isaac s’éloigne
alors, mais la haine le poursuit. On retrouvera trace de ce rejet d’Isaac
dans le choix du nom des puits qu’Isaac creuse à nouveau, à l’image de
son père. Les puits rappelleront les querelles, les contestations, l’oppo-
sition, l’hostilité, la haine engendrées par la réussite d’Isaac. Renvoyé
par ses soi-disant alliés, Isaac quitte la région et va s’installer à Béer-
Shéva. Le choix était bon, cela est confirmé immédiatement. « L’Éternel
se révèle à lui et l’assure de sa protection ». (Gn. 26,24)
L’ACCORD DE BEER-SHEVA II
(GN. 26,26-31)
tionne le Midrach, qui ajoute : « Mais c’est pour enseigner que Jacob a
décidé de « sortir » (Vayetsé) de ce piège (Béer) que constitue le serment
(shevou’a) quitte à en endosser les conséquences : La colère (Harone af
ha-’olam) des nations ! » Il n’y aura donc pas de Béer-Sheva III ! Or,
Jacob c’est Israël !
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