Exposé Sur La Formation Des Candidats À l'EASA 2024

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BARREAU DU CAMEROUN.

PROGRAMME DE PREPARATION DES CANDIDATS A L’EXAMEN


D’APTITUDE AU STAGE D’AVOCATS ( EASA).

SESSION 2024, REGIONS DU CENTRE, SUD ET EST, DU 03 AU 04


AVRIL 2024 A YAOUNDE.

THEME : LES MODES DE SAISINE ET LEURS COMPETENCES ;


LES ACTES DE SAISINE, LES VOIES ET DELAIS DE RECOURS.
EN MATIERE CIVILE, DE DROIT LOCAL ET COMMERCIAL.

Me ACHET NAGNIGNI Martin Luther King

SCPA MANDENG-ACHET & ASSOCIES


BP 33104 YAOUNDE

Av Konrad Adenauer, face CRTV Radio, Immeuble GMC étage 2.


Les organisateurs du séminaire de ce matin ont choisi de vous entretenir sur
des questions de forme, liées à la compétence des juridictions, aux modes de
saisines des juridictions, aux actes de saisine de ces juridictions, aux voies de
recours et à leurs délais.

C’est avec plaisir que je vais ouvrir le bal des orateurs. Sans doute cette prise de
parole me permettra-t-elle de payer toute la dette que je dois au Barreau du
Cameroun et à tous ceux qui ont assuré ma formation d’Avocat. Mes
formateurs, il s’en trouve encore dans cette salle aujourd’hui, après 25 ans,
toujours aussi présents au RDV du donner( les citer). Je suis assurément
débiteur du Barreau du Cameroun et vous ce matin, vous êtes créanciers de
circonstances. J’espère que vous allez en tirer le meilleur profit.
Les questions de forme dont il est question ce matin vont joncher votre
parcours d’avocats. Et les avocats que vous serez demain devront donc être
assez outillés sur ces questions pour gagner des procès.
Les questions touchant à la forme du Droit sont primordiales. Elles le sont à ce
point qu’aucune décision de justice ne peut être rendue sur le fond si les
éléments de forme ne sont pas réunies. Elles sont éminemment primordiales
puisque certaines questions liées à la forme du procès peuvent être relevées
d’office par un juge et faire chavirer un procès dans un sens que les parties
n’avaient pas envisagé. Ont-elles saisi un juge matériellement incompétent,
souhaitent-elles malgré tout parvenir à une solution négociée que le juge ne le
pourra que si, explorant les règles de sa compétence matérielle, estime qu’il est
compétent pour statuer. La forme est ainsi le vase sans lequel le fond du
droit ne peut être porté.

Dans l’impossibilité matérielle de faire le tour de la question (il aurait fallu des
heures), nous allons parcourir le sujet tel un visiteur dans une belle ville, qui
choisit de ne s’arrêter que devant les ouvrages d’art. Nous aborderons donc ces
questions thématiques de façon graduelle, à savoir pour chaque procédure :
- les règles de compétence des juridictions

- les modes de saisine de ces juridictions

- les actes de saisine proprement dit devant ces juridictions

- les voies de recours et leurs délais.


I- LA COMPTENCE DES JURICTIONS EN MATIERE CIVILE,
COMMERCIALE ET EN MATIERE DE DROIT LOCAL

Les règles de compétence sont celles qui indiquent la nature et souvent, le


degré de la juridiction qui doit être saisie. La nature de l’affaire emporte
ainsi le choix de la compétence de la juridiction. Dans d’autres cas,
l’importance de l’affaire (taux du litige) détermine également la compétence
de la juridiction à saisir.

Au Cameroun, la compétence des juridictions dans les matières civiles,


commerciales et sociales se retrouvent en grande partie dans la loi
n°2006/015 du 29 décembre 2006 modifiée et complétée par la loi
n°2011/027 du 14 décembre 2011 portant organisation judiciaire. Ce
texte, en son article 3 indique que l’organisation judiciaire au Cameroun
comprend :
- La Cour Suprême
- Les Cours d’Appel
- Le Tribunal Criminel Spécial
- Les Juridictions inférieures de contentieux administratif et celles des
comptes
- Des tribunaux militaires
- Des tribunaux de grande instance
- Les tribunaux de première instance
- les juridictions de droit traditionnel.

Le décret n°69/DF/544 du 19 décembre 1969 modifié par le décret


n°071/DF/609 du 03 décembre 1971 fixe quant à lui l’organisation
judiciaire et la procédure devant les juridictions traditionnelles du
Cameroun Oriental.

Certains Actes OHADA (voies d’exécution et procédures simplifiées de


recouvrement, Droit Commercial…) vont impacter sur le choix des juridictions
compétentes. Cette autre partie sera développée par de personnes plus expertes
encore, après moi.

A RETENIR de ces textes de loi: l’organisation judiciaire est constituée au


Cameroun de trois degrés de juridiction :

- le premier degré de juridiction : le Tribunal de Première Instance et le


Tribunal de Grande Instance.
- deuxième degré : la Cour d’Appel
- dernier degré de juridiction : la Cour Suprême du Cameroun pour tous
les autres cas et la CCJA pour les questions tenant à l’application des
actes uniformes (baux commerciaux et tout autre litige convoquant pour
le trancher l’application des Actes OHADA).

Il s’agit des règles de compétence matérielle. Celles sur la compétence


territoriale seront évoquées supra.

A- LES REGLES DE COMPTENCE MATERIELLE.


1- PREMIER DEGRE DE JURIDICTION
Le Tribunal de Première Instance est compétent en matière civile pour des
demandes de paiement et des demandes de recouvrement par procédures
simplifiées des créances dont le montant est inférieur ou égale à 10.000.000 (dix
millions).

Important : Ce tribunal, statuant en matière de droit local est également


compétent pour statuer sur les questions d’état de personnes qui seront
développées supra.

En matière commerciale, il est compétent pour trancher :


- les litiges et les transactions entre commerçants, entre établissements de
crédit , entre commerçants et établissements de crédit, ou pour trancher les
litiges entre associés ou actionnaires ou pour trancher toutes les questions
concernant les actes et les effets de commerce lorsque le taux évalué en argent
est inférieur ou égale à la somme de 10.000.000 ( dix millions).

- Il faut noter à ce niveau, pour l’encourager la création des sections


commerciales dans les tribunaux, pour trancher les questions commerciales.
La floraison des litiges sur les baux commerciaux en dit long sur son
importance

Le président de cette juridiction est compétent pour connaître :

- des procédures en référé


- des ordonnances sur requête
- du contentieux de l’exécution des décisions du TPI et d’autres titres
exécutoires
- des demandes d’exéquatur.

Le Tribunal de Grande Instance est compétent :


- En matière civile
• Pour connaître des procédures relatives à l’état des personnes (état
civil, mariage, divorce, filiation, adoption, succession)
- En matière commerciale, pour connaître des litiges portant sur :
• les procédures collectives d’apurement du passif
• les créances commerciales résultant des effets de commerce
• les contestations entre établissements de crédit, entre
commerçants et établissement de crédit
• les contestations entre associés et actionnaires ou relative aux
sociétés commerciales, aux actes et effet de commerce de toute
personne lorsque le taux est supérieur à 10.000.000 (dix millions).

Le président du Tribunal de Grande Instance est compétent pour connaitre :

- du contentieux de l’exécution des décisions de ce tribunal


- des requêtes en libération immédiate (habeas corpus) et des order of
mandamus,
- des mesures contre les gardes à vue administratives.

Précision importante : lorsqu’une affaire ne nécessite pas de débats publics


(état de personnes) ou lorsque la loi l’a expressément prévu, le litige est porté devant la
juridiction statuant en CHAMBRE DE CONSEIL.

A RETENIR : la distinction doit être faite entre les procédures relevant de la


compétence du tribunal ou de l’Assemblée Générale de la juridiction de celles
relevant de la compétence seul du Président : la compétence présidentielle.

2- DEUXIEME DEGRE DE JURIDICTION : LA COUR D’APPEL

Compétence principale (article 22 de la loi portant organisation


judiciaire). La Cour d’Appel connaît de :
- L’appel de toutes les autres décisions autres que celles rendues par elle-
même ou par la Cour suprême
- L’appel de toutes les décisions rendues par toutes les chambres du TPI et
du TGI
- le Président de la Cour d’Appel est compétent pour statuer en premier
ressort sur le contentieux des décisions rendues par sa propre juridiction
Compétence a titre subsidiaire
La loi n° 92/008 du 14 aout 1992 modifiée par la loi n° 97/018 du
07 aout 1997 fixant certaines dispositions relatives à l’exécution des
décisions de justice prévoit qu’en cas d’appel contre les jugements
assortis de l’exécution provisoire, lorsqu’elle n’est pas de droit ou
lorsqu’elle a été accordée pour une créance alimentaire , à la suite d’une
expulsion fondée sur un titre foncier, pour la réparation d’un dommage
résultant d’une atteinte à l’intégrité physique ou en matière de salaire
non contestée, il peut être fait défenses à exécution.

La Cour d’Appel statut en cette matière, subsidiairement à sa compétence


retenue pour statuer suite aux appels contre ces jugements (jugement
avec exécution provisoire, ordonnance de référé…).

3- LA COUR SUPREME

Elle n’est pas un degré ultime de juridiction, sauf lorsqu’elle évoque et


statue à nouveau.
Le champ de sa compétence est décrit à l’article 35 de la loi 2006/16 du 27
décembre 2006 complété par la loi n° 201/014 du 12 juillet 2017 fixant
l’organisation et le fonctionnement de la Cour Suprême.

Les cas d’ouverture à pourvoi sont :


- Incompétence
- Dénaturation des faits et de la cause
- Défaut, contradiction ou insuffisances de motifs
- Vices de forme
- Violation de la loi
- Non réponses aux conclusions
- Détournement de pouvoir
- Violation d’un principe général de droit
- Non respect de la jurisprudence de la CS ayant statué en sections réunies
d’une chambre ou en chambres réunies

Nota bene : leé règles de fonctionnement de la Cs ne concernent que le


fonctionnement de la CS. Une décision rendue par un juge d’instance ne
peut pas violer une règle de fonctionnement de la CS. Cette dernière déclare
irrecevable tout pourvoi formé contre une juridiction d’instance lorsque le
moyen est fondé sur la violation d’une règle gouvernant la procédure de la
CS.

B –LES REGLES DE COMPETENCE TERRITORIALE

1- Le principe de la compétence du FOR du défendeur : ACTOR


SEQUITUR FORUM REI
C’est toujours le domicile du défendeur qui détermine la compétence de la
juridiction à saisir (article 8 (1) du Code de Procédure Civile et Commerciale) :
« En matière civile , le défendeur sera assigné devant le tribunal de son domicile ».

2- Exception : toutefois, le choix de la juridiction peut être imprimé par la


loi ou par les parties (clauses attributives de compétence).
Articles 8, 9, 10, 11, 12 et 13 du Code de Procédure Civile et Commerciale :
- Demande de pension alimentaire : le tribunal du domicile de l’ascendant
demandeur peut être saisi. Nous saisirons les juridictions de nos
domiciles pour vous contraindre à nous payer la pension
alimentaire, où que vous soyez.
- Contestations relatives à des fournitures, travaux, locations, louage
d’ouvrages, ou d’industrie : juge du lieu où la convention a été contractée
ou exécutée
- S’il y a plus d’un défendeur : devant l’un quelconque d’entre eux, au choix
- En matière successorale : lieu d’ouverture de la succession
- En cas d’élection de domicile pour l’exécution d’un acte : devant le
tribunal du domicile élu
- Pour la réparation d’un préjudice : devant le tribunal du fait
dommageable

A RETENIR :
1- Les règles de compétence matérielle sont d’ordre public et peuvent être
invoquées ex dipari causa, en tout état de cause, même pour la première
fois devant la CS. Les juges saisis peuvent l’invoquer d’office.
2- Les règles de compétence territoriales sont relatives : les parties peuvent
y renoncer mais doivent dans tous les cas l’exciper in limine litis
3- Certaines règles de compétence territoriales sont d’ordre public : quand
elles concernent les degrés des juridictions. Un jugement rendu par le
TPI de Yaoundé Centre Administratif ne peut pas être attaqué devant la
Cour d’appel du Littoral, qui ne pourra la connaître qu’en cas de renvoi
de la CS, après cassation.

II- LES MODES DE SAISINE DES JURIDICTIONS

A- L’ASSIGNATION
C’est le mode de saisine traditionnel.
Article 5 CPCC : l’instance en matière civile et commerciale sera introduite
par assignation.
Article 6 CPCC : contenu des assignations (mentions obligatoires, à peine de
nullité) :
- Date, nom, profession et domiciles des parties
- Identification de l’huissier instrumentaire
- Exposé des moyens et de la demande
- Objet de la demande (le juge ne donne aux parties que ce qu’elle lui ont
demandé, ni plus, ni moins)
- Identification du tribunal, des date et jour d’audience.
Le défendeur doit être assigné à personne ou à domicile

Délai d’ajournement : 08 jours


Délais de distance : 02 mois pour le défendeur résidant en Afrique, Europe
03 mois pour celui résidant aux Amérique
04 mois partout ailleurs

B- LES REQUETES
Elles doivent contenir :
- Date, nom, profession et domiciles des parties
- Exposé des moyens et de la demande
- Objet de la demande
Il existe des procédures qui allient les deux formes de saisine :
- Référé d’heure à heure
- Assignation à bref délai

III- LES VOIES DE RECOURS

Les chemins de la justice sont décidément insondables et tortueux, disaient les


anciens : il a fallu choisir la bonne juridiction, affiner l’acte de saisine, gagner le
procès : toutes ces précautions ne vous mettent pas à l’abri des voies de recours.
Et pourtant c’est bien le gage d’une bonne justice : ne perdre/ ou ne gagner
qu’en dernier ressort.
Que serait la justice si elle statuait une fois pour toute aussitôt saisie ?
Expéditive, diriez-vous.

Le Droit moderne distingue les voies de rétractation de celles de réformation.


Dans un cas, le juge qui a rendu sa décision est saisi pour la réexaminer
(opposition, tierce opposition).
Dans l’autre cas, c’est la juridiction supérieure qui est saisie (appel, pourvoi).

Mais dans tous les cas, il faut agir dans les délais.

A – LES DIFFERENTES VOIES DE RECOURS

1- Les voies de recours ordinaires


- Opposition contre les décisions rendues par défaut
- Appel contre celles rendues contradictoirement

2- Les voies de recours extraordinaires.


- Tierce opposition
- pourvoi
- Requête civile

B- DELAIS DES VOIES DE RECOURS


Le tableau qui suit renseigne sur les voies de recours. Il faut lire tous les
jours.
NB : le nouveau texte OHADA sur les voies d’exécution est entré en
vigueur depuis le 16 février 2024 avec une incidence sur les délais :
- Délais d’opposition aux ordonnances d’injonction de payer ou de
restituer : 10 jours au lieu de 15
- Délais d’appel contre les décisions sur opposition : 15 jours à compter e
son prononcé, ai lieu de 30
- Seules exceptions : les procédures engagées avant l’entrée en vigueur de
la nouvelle loi communautaire
- En matière d’état de personnes, le délai d’appel est de 02 mois à partir du
jour où la décision est rendue. CS, arrêt n°88/CC du 16 juillet 1996,
DJAPA NGASSAM Théodore c/ DJAPA née NGOUMI Charlotte

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