Voltaire
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Introduction
Voltaire, célèbre philosophe des Lumières, a écrit des contes philosophiques mais il est aussi un
écrivain engagé à la vie mouvementée (souvent condamné et exilé) mais célèbre et respecté dans
l'Europe entière.
Cet extrait de l'Histoire abrégée de la mort de Jean Calas se situe dans le chapitre 1 du Traité
sur la Tolérance, écrit par Voltaire en 1763, à l'occasion de l'affaire Calas.
Dans cet essai, Voltaire ne cherche pas seulement à obtenir la révision du procès mais aussi à
combattre l'intolérance et le fanatisme qui ont poussé les juges à condamner Calas par un procès
non impartial. Ce texte est donc à la fois un plaidoyer et un réquisitoire, dans lequel Voltaire
cherche à la fois à convaincre et persuader le lecteur (texte représentatif du combat des
Lumières).
Problématiques :
Quels sont les procédés argumentatifs utilisés par Voltaire pour défendre Jean Calas ?
Quels sont les armes et les cibles de ce texte ?
En quoi l'argumentation de ce texte est-elle particulièrement efficace ?
En quoi ce texte est-il engagé ?
En quoi ce texte est-il un essai ?
Texte étudié
[...]
Il semble que, que quand il s’agit d’un parricide et de livrer un père de famille au plus
affreux supplice, le jugement devrait être unanime, parce que les preuves d’un crime si inouï
devraient être d’une évidence sensible à tout le monde : le moindre doute dans un cas pareil doit
suffire pour faire trembler un juge qui va signer un arrêt de mort. La faiblesse de notre raison et
l’insuffisance de nos lois se font sentir tous les jours ; mais dans quelle occasion en découvre-t-
on mieux la misère que quand la prépondérance d’une seule voix fait rouer un citoyen ? Il
fallait, dans Athènes, cinquante voix au delà de la moitié pour oser prononcer un jugement de
mort. Qu’en résulte-t-il ? Ce que nous savons très inutilement, que les Grecs étaient plus sages
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et plus humains que nous.
Il paraissait impossible que Jean Calas, vieillard de soixante-huit ans, qui avait depuis
longtemps les jambes enflées et faibles, eut seul étranglé et pendu un fils âgé de vingt-huit ans,
qui était d’une force au-dessus de l’ordinaire ; il fallait absolument qu’il eut été assisté dans
cette exécution par sa femme, par son fils Pierre Calas, par Lavaisse, et par la servante. Ils ne
s’étaient pas quittés un seul moment le soir de cette fatale aventure. Mais cette supposition était
encore aussi absurde que l’autre : car comment une servante zélée catholique aurait-elle pu
souffrir que des huguenots assassinassent un jeune homme élevé par elle pour le punir d’aimer
la religion de cette servante ? Comment Lavaisse serait-il venu exprès de Bordeaux pour
étrangler son ami dont il ignorait la conversion prétendue ? Comment une mère tendre aurait-
elle mis les mains sur son fils ? Comment tous ensemble auraient-ils pu étrangler un jeune
homme aussi robuste qu’eux tous, sans un combat long et violent, sans des cris affreux qui
auraient appelé tout le voisinage, sans des coups réitérés, sans des meurtrissures, sans des
habits déchirés.
Il était évident que, si le parricide avait pu être commis, tous les accusés étaient également
coupables, parce qu’ils ne s’étaient pas quittés d’un moment ; il était évident qu’ils ne l’étaient
pas ; il était évident que le père seul ne pouvait l’être ; et cependant l’arrêt condamna ce père
seul à expirer sur la roue.
Le motif de l’arrêt était aussi inconcevable que tout le reste. Les juges qui étaient décidés
pour le supplice de Jean Calas persuadèrent aux autres que ce vieillard faible ne pourrait
résister aux tourments, et qu’il avouerait sous les coups des bourreaux son crime et celui de ses
complices. Ils furent confondus, quand ce vieillard, en mourant sur la roue, prit Dieu à témoin
de son innocence, et le conjura de pardonner à ses juges.
[...]
Voltaire, Traité sue la tolérance, Histoire abrégée de la mort de Jean Calas (extrait), 1763
- Contraste entre le père et le fils => symétrie de la syntaxe, répétition de subordonnées relatives,
l'âge du père et du fils est dit précisément, opposition de "faible" et "force" = antithèses.
- Argument supplémentaires en faveur de Jean Calas.
2. Persuader
- Persuader avec le registre pathétique : Jean Calas = vieillesse et faiblesse, mère = tendresse,
thème de la mort : début et fin.
- Souffrance, torture et mort à la fois - Questions rhétoriques : "Comment..."
- Anaphore : "sans" (fin du deuxième paragraphe) : insiste sur l'absurdité de l'accusation.
- Anaphore de "Il était évident que..."
- Effet de contraste : rupture avec 3 imparfaits et le passé-simple "condamna" qui sonne comme
une fatalité.
- "Les juges qui étaient décidés pour le supplice de Jean Calas" : avec le verbe "décider",
Voltaire montre que la décision des juges a été prise sans raisonnement.
- Dernier paragraphe : une scène édifiante, pathétique. Même sous la torture, Jean Callas n'avoue
pas et pardonne à ses juges, prouvant ainsi son innocence et sa bonté d'âme.
Conclusion