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lepoint.fr

INFO LE POINT. Les étranges dérives


de l’école de journalisme ESJ Paris
Bartolomé Simon

11–15 minutes

La salle de cours, à la peinture bleu clair défraîchie, se remplit


d'aspirants journalistes. Devant la classe, un reporteur
chevronné croise les bras. « En journalisme, l'objectivité n'existe
pas, mais la neutralité, oui », apprend-il aux néophytes. Ils sont
venus découvrir l'ESJ Paris, le samedi 18 novembre, à
l'occasion de ses portes ouvertes. La neutralité est
effectivement un sujet à l'ESJ Paris. Selon nos informations, elle
a pris, depuis deux ans, un tournant militant, en particulier sur le
dossier palestinien, avec des répercussions sur l'enseignement
délivré.

La dérive commence fin 2021. La gronde monte chez les profs,


payés de façon très aléatoire. Le président de l'école, Guillaume
Jobin, qui réside au Maroc une grande partie de l'année, laisse
son équipe à Paris affronter la tempête. Certains cours ne sont
plus assurés. Une partie des 150 élèves en présentiel s'agace à
leur tour. L'année coûte tout de même 7 000 euros, dans cette
école privée non reconnue par la profession (et qui n'a aucun
lien avec l'École supérieure de journalisme ESJ-Lille). Début
2022, trois cadres historiques sont alors licenciés : la directrice,
le responsable technique et le responsable de la radio de
l'école.

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« La riposte de notre peuple est légitime ; la


résistance, un devoir »

Le président de l'ESJ, Guillaume Jobin, un ancien médecin,


nomme une nouvelle responsable du pôle arabophone : Noha
Rashmawi. Cette ancienne diplomate, qui ne justifie d'aucune
expérience journalistique, a passé treize ans à l'ambassade de
Palestine en France. Elle sera chargée des « partenariats » et,
plus incongru, de la « situation palestinienne » à l'ESJ Paris
entre début 2021 et décembre 2022. Sur son LinkedIn, elle se
présente comme « vice-présidente » de l'ESJ à cette période.À
LIRE AUSSI « Je ne me sens pas en sécurité sur le campus » :
le conflit israélo-palestinien électrise les universités
américainesLe 7 octobre, cette militante n'a pas hésité à glorifier
l'attaque du Hamas, selon des posts Facebook consultés par Le
Point. Elle affiche sur sa photo de couverture des Palestiniens
fêtant la destruction d'un char près de Gaza. « La riposte de
notre peuple est légitime, la résistance, un devoir », poursuit-
elle le 8 octobre, avant de partager une image de soldats en

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parachute, louant la « détermination » du Hamas.

Une autre image repartagée par Noha Rashmawi le 8 octobre


montre un enfant jetant une pierre sur un char israélien. En
dessous figure une prise d'otages de soldats par le Hamas,
avec la mention : « Les enfants ont grandi. »

Mais la spécialité de Noha Rashmawi reste de comparer en


boucle les juifs à des nazis. « C'est un vrai holocauste », ose-t-
elle le 2 novembre, suivi de « Gaza, Triblinka (sic), les mêmes
criminels, les mêmes nazis ».

Contactée par plusieurs moyens, Noha Rashmawi n'a pas


répondu à nos sollicitations. Elle a quitté l'école en
décembre 2022. « Elle a été remerciée à la suite d'abus,
verbaux et autres », indique laconiquement Guillaume Jobin, qui
se refuse à condamner les prises de position de son ex-
collaboratrice sur les réseaux sociaux.

« On a un seul engagement politique : c'est la


défense des droits des Palestiniens »

En 2021, celle que le président présente à l'époque comme son


« bras droit » sur Facebook est encensée. Elle va poser sa
patte sur l'ESJ Paris. « Son parti pris nous dérangeait
beaucoup, se souvient un ancien intervenant. Mais on ne
pouvait rien dire, car elle avait été installée là par Guillaume
Jobin. » En mai 2022, la direction baptise une promotion
« Shireen Abu Akleh », du nom de cette journaliste
palestinienne tuée par l'armée israélienne en Cisjordanie. Pour
justifier cette initiative, Guillaume Jobin s'emporte sur le
site Arabnews : « Salam aleykoum, bonjour à tous […]. Je ne
sais pas qui a décidé de la tuer [Shireen Abu Akleh, NDLR].
Moi, mon avis personnel, c'est pas l'école que j'engage, c'est

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Guillaume Jobin, c'est qu'elle a été assassinée une fois de plus


par des Israéliens […]. »

On a un seul engagement politique : la défense des droits des


PalestiniensGuillaume Jobin, président de l’ESJ-Paris

Guillaume Jobin clarifie ensuite le tournant pris par son école :


« On ne fait pas de religion, pas de politique, on a un seul
engagement politique : c'est la défense des droits des
Palestiniens », déclare-t-il sur cette vidéo. « Je n'ai pas dit ça »,
prétend aujourd'hui Guillaume Jobin, alors que Le Point dispose
de la vidéo de l'interview. Sur son compte Facebook, le
président poste fièrement sa carte de presse de « journaliste
palestinien ». Le 4 novembre, il regrette, auprès du site
marocain LeBrief, que « les médias [et particulièrement les
médias français] fassent écho à la propagande de l'État
hébreu ».

L'orientation de la direction déteint sur toute l'équipe. Des


professeurs aux intervenants jusqu'au responsable technique,
une partie du personnel manifeste quasi quotidiennement son
engagement propalestinien sur les réseaux sociaux, selon la
dizaine de comptes que Le Point a consultés. C'est le cas de
Samar Smati, la directrice de l'enseignement à distance,
Mohamad El Hajji, chef du pôle « arabophone » et présentateur
sur une chaîne qatarie, Ali Garboussi, responsable technique,
ou d'autres professeurs ou responsables comme Souhila A.,
Nadia H-N, Nizar B…

L'un d'eux se distingue par son solide pedigree de militant.


Anwar Makhlouf, Palestinien résidant au Chili, et représentant
de l'ESJ Paris « en Amérique latine », avait fait parler de lui en
2017, lorsqu'il s'est vu refuser l'entrée en Israël pour son
engagement dans le mouvement anti-Israël « BDS », Boycott

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Désinvestissement Sanctions. « Je vais finir par mettre une


tente [arabe] sur la pelouse devant l'école », ironise Guillaume
Jobin sur son Facebook en septembre 2022. « Jobin choisit ses
intervenants pour des raisons idéologiques, mais aussi parce
qu'ils sont malléables. Ça lui permet de se créer une cour, une
petite notoriété dans le monde arabe. Il veut approcher le roi du
Maroc, mais n'y arrive pas », tacle un ancien intervenant.

En février, l'ESJ Paris invite le réalisateur Nadir Dendoune,


connu pour son engagement sur le sujet. On le retrouve par
exemple aux côtés de la députée Insoumise Ersilia Soudais
parmi le comité d'accueil de l'activiste palestinien Salah
Hamouri à l'aéroport de Roissy en décembre 2022. Un proche
du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP),
mouvement aujourd'hui accusé par Tsahal de détenir des
otages capturés par le Hamas. L'école parisienne affirme aussi
être liée à l'université de Birzeit, près de Ramallah, en Palestine.
Elle accepte des étudiants palestiniens dont les profils, là
encore, ne sont pas anodins. Marah Nazzal, par exemple, qui a
obtenu son sésame en 2022, est la fille d'un Palestinien
« emprisonné sept ans en Israël », selon Guillaume Jobin. Son
père, Omar Nazzal, a été accusé par les services israéliens
d'être proche du FPLP. Une autre étudiante, Luna Erekat, a suivi
les cours « depuis Jéricho, en Palestine ». Elle est la fille de
Saeb Erekat, ex-chef des négociateurs palestiniens. Un autre
récent diplômé palestinien de l'ESJ travaille actuellement à
Gaza pour une chaîne qatarie.

« Il y avait des étudiants auxquels on ne pouvait pas toucher,


explique un ancien intervenant. Par exemple, la fille du pilote
d'avion du roi du Maroc. Elle avait un niveau d'orthographe
catastrophique. Mais elle a été diplômée. Certains diplômes ont
même été donnés à des gens qu'on ne croisait jamais… »

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Marah Nazzal est désormais communicante au Yémen. Loin du


journalisme, d'autres récents diplômés mis en avant par l'école
sont devenus porte-parole de gouvernements en Libye, en
Mauritanie, en Arabie saoudite ou encore au Togo.

Enregistrements interdits au mastère MENA

Le 18 novembre, on profite des portes ouvertes pour se


renseigner sur une intrigante formation : le diplôme MENA, pour
« Moyen-Orient/Afrique du Nord/Turquie/Iran/Caucase ».
« Celui-ci, on ne l'a pas sur la brochure, il faudra voir
directement avec le directeur », nous répond-on. Sur la dizaine
de formations proposées, elle est la seule à afficher cette
étrange précaution : « Enregistrements, appareils photo,
caméras et smartphones interdits en cours pour des raisons de
confidentialité, de sécurité et de liberté d'expression dans les
groupes de travail. » Au programme : géopolitique du Moyen-
Orient, « colonisations et décolonisations » ou encore
« question palestinienne ».

Un diplôme à 4 000 euros l'année, 6 000 euros s'il est payé par
« une organisation ou une entreprise » et 3 000 euros si l'on est
« réfugié ». Selon le président de l'ESJ, la formation MENA
« n'a pas commencé ». « Nous interdisons les enregistrements
pour les invités qui le demandent dans tous les programmes de
l'école », affirme Guillaume Jobin. Le MENA est pourtant le seul
à l'indiquer… « Les cours engagés, ça n'existe pas à l'ESJ.
Nous avons des intervenants de tous bords politiques,
confessionnels et ethniques. »

Cette formation opaque est animée par un professeur issu de la


« nouvelle vague » de 2021 : Khaled Sid Mohand. Ce journaliste
franco-syrien, enseignant en géopolitique à l'ESJ Paris, fait sans
surprise preuve d'un militantisme propalestinien exacerbé sur

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ses réseaux sociaux. Nous avons raté le professeur aux portes


ouvertes ; il était en train de manifester pour Gaza, comme il l'a
publié sur son compte Twitter. Il y a sûrement croisé Noha
Rashmawi, qui avait appelé à s'y rendre contre « le fascisme de
l'occupant sioniste ».

La Russie est aussi la bienvenue

Avant le Moyen-Orient, l'ESJ Paris s'est passionnée pour la


Russie. Les journalistes réputés prorusses Anne-Laure Bonnel
et Régis Le Sommier sont recrutés comme professeurs (le
second nous précise qu'il a donné son premier cours en mars
2020 alors qu'il était encore à Paris Match. Il a ensuite rejoint
Russia Today puis créé le média russophile Omerta). Les
anciens de Russia Today n'ont pas de problème à se recycler à
l'ESJ, en témoigne l'actuelle directrice éducative, Elhame
Medjahed, ex-cheffe d'édition à RT, désormais
chroniqueuse free-lance. Dans la même veine, l'ESJ a accueilli
une conférence d'Arnaud Develay « sur la situation au Moyen-
Orient » en février 2021. Cet avocat, relais d'opinion de
différents régimes autoritaires en France, n'hésite pas à faire la
publicité de la Syrie de Bachar el-Assad, de l'Iran ou du régime
de Moscou.

« L'ESJ a toujours formé des journalistes aux idées très


différentes, témoigne un vieux briscard, ex-prof à l'ESJ. Mais
cette orientation n'était plus tenable. Anne-Laure Bonnel
enseignait la télé en deuxième année comme si de rien n'était !
On n'annonçait pas la couleur aux étudiants. » « Nous avons
une intervenante ukrainienne aussi », se défend Guillaume
Jobin, qui affirme aussi discuter d'un partenariat « avec une
université israélienne ».

Créée en 1899 par la romancière Dick May, l'ESJ Paris se

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targue d'être la première école de journalisme du monde.


« C'était une belle dame, l'ESJ, se souvient un ancien
intervenant. Elle voulait former des esprits libres à la suite de
l'affaire Dreyfus. Les étudiants étrangers venaient y chercher la
liberté d'expression à la française. Quand on voit ce qu'elle est
devenue, ça fait de la peine. »

L'enseignant le plus intrigant reste Mikhail Egorov, « journaliste


avec un mode de pensée rafraîchissant », selon Guillaume
Jobin. Ce professeur d'« actualité internationale », ancien du
média russe Sputnik, se présente sur Twitter comme « partisan
et artisan des relations Afrique-Russie » et publie ses analyses
sur le site « Palestine-solidarité ». Contacté, il dit ne plus
enseigner à l'ESJ et n'a pas souhaité répondre à nos questions,
« connaissant le positionnement de l'organe » que l'on
« représente ». De quoi rappeler les cours du barbouze Jean-
Paul Ney dans les années 2010, mis en cause dans plusieurs
affaires judiciaires et qui assumait d'aller au bureau « un pétard
à la ceinture ». Il n'était, en réalité, que le précurseur d'une
longue série d'intervenants détonants.

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