Université Du Québec Montréal
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MÉMOIRE
PRÉSENTÉ
COMME EXIGENCE PARTIELLE
DE LA MAÎTRISE EN ADMINISTRATION DES AFFAIRES
PAR
SOPHIE LÉVESQUE
JANVIER 2008
UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL
Service des bibliothèques
Avertissement
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le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche de cycles
supérieurs (SDU-522 - Rév.01-200G). Cette autorisation stipule que «conformément à
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commercialiser ou non ce travail dont [il] possède un exemplaire.»
REMERCIEMENTS
Je suis également très reconnaissante envers mes nombreux collègues de la Chaire. Plus
particulièrement, Monsieur Jérôme Guy, candidat au MBA-Recherche à l'Université du
Québec à Montréal, pour son soutien et ses conseils précieux tout au long de cette
recherche. Ensuite, Madame Emmanuelle Champion, candidate au doctorat en
administration à l'Université du Québec à Montréal, qui est assurément une source de
motivation et d'inspiration pour la poursuite d'études de cycles supérieurs. Leur présence
et leurs encouragements m'ont permis de mener à terme ce projet. Bref, je suis très
choyée de les avoir rencontrés.
Finalement, je remercie ma mère, Madame Jeannine Levasseur, pour avoir toujours cru
en mes capacités et être fière de mes accomplissements. Sa persévérance et son courage
m'inspirent. Puis, je remercie mon conjoint, Monsieur François Junior Bouchard, pour
son inlassable support durant cette étape de ma vie. Sa patience et son amour m'ont rendu
plus forte et déterminée à réaliser mes rêves.
TABLE DES MATIÈRES
CHAPITRE 1
LA RESPONSABILITÉ SOCIALE DES ENTREPRISES
1.1 La légitimité et le renouvellement du discours des entreprises 7
1.2 Définitions de la responsabilité sociale des entreprises 10
1.3 Acteurs sociaux et perceptions de la responsabilité sociale des entreprises 12
CHAPITRE 2
LA CAPACITÉ D' ATTRACTION ORGANISATIONNELLE 18
2.1 La gestion stratégique des ressources humaines 18
2.1.1 Les ressources humaines comme avantage concurrentiel 19
2.2 Capacité d'attraction ou l'attractivité organisationnelle 21
2.2.1 Théories expliquant l'attractivité chez un candidat.. 22
2.2.2 L'image ou la réputation organisationnelle 25
2.3 Capacité d'attraction et responsabilité sociale des entreprises 27
2.3.1 Composantes de la responsabilité sociale des entreprises et l'attractivité
organisationnelle 28
CHAPITRE 3
CADRE CONCEPTUEL 32
3.1 Objectifs de la recherche 32
3.1.1 Objectif général 32
3.1.2. Cadre conceptuel et variables opératoires 32
3.1.3. Questions de recherche 35
3.104. Apports pratiques et théoriques 35
CHAPITRE 4
CADRE MÉTHODOLOGIQUE 39
4.1 L'approche méthodologique 39
4.2 Le terrain de recherche 41
4.3 Collecte de données 43
404 Méthode d'analyse des données 45
4.4.1 Fidélité 45
4.4.2 Validité 46
4.5 Limites méthodologiques 47
CHAPITRE 5
PRÉSENTATION DES RÉSULTATS 48
5.1 Les facteurs d'attraction 49
5.1.1 Les pratiques et politiques de gestion des ressources humaines 49
5.1.2 La réputation de l'entreprise 51
5.1.3 Autres facteurs 54
5.2 Réputation de l'entreprise 55
5.2.1 Motivations pour rechercher une réputation corporative positive 55
5.2.2 Limites de la réputation de l'entreprise 59
5.3 RSE et capacité d'attraction 62
5.3.1 La responsabilité sociale: une composante de la réputation de l'entreprise
qui influence le processus de recherche d'emploi 63
5.3.2 L'importance de la responsabilité sociale selon des caractéristiques
individuelles 65
5.3.3 L'impo11ance de la responsabilité sociale des entreprises dans un futur
contexte de recherche d'emploi 67
5.4 Au-delà de l'attractivité 69
5.4.1 La responsabilisation sociale des entreprises, une attente exprimée 69
5.4.2 La responsabilité sociale des entreprises et la performance
organisationnelle 71
5.4.3 La responsabilité sociale des entreprises et la rétention 74
CHAPITRE 6
DISCUSSION DES RÉSULTATS 76
6.1 Relation entre la RSE et la réputation organisationnelle 77
6.1.1 Composantes d'une bonne réputation organisationnelle 77
6.1.2 Pondération des composantes d'une bonne réputation organisationnelle. 78
6.2 Relation entre la réputation organisationnelle et l'attractivité organisationnelle. 80
6.2.1 Caractéristiques organisationnelles 80
6.2.2 Caractéristiques interactionnelles 81
6.2.3 Caractéristiques individuelles 81
6.3 La familiarité comme variable de contrôle 82
6.4 Autres variables essentielles à la compréhension de la RSE comme facteur
potentiel d' attractivité 84
6.5 Autres avantages concurrentiels possibles découlant de la RSE 88
CONCLUSION 91
APPENDICE A
DONNÉES PERTINENTES SUR LES 19 RÉPONDANTS 100
APPENDICE B
RAPPORT D'ENTRETIEN AVEC LES EMPLOYÉS DE CASCADES 101
APPENDICE C
MATRICE DE L'ANALYSE DES DONNÉES 103
BIBLIOGRAPHIE 107
LISTE DES FIGURES ET DES TABLEAUX
Figure 3.1
Cadre conceptuel de la relation entre la RSE et J'attractivité organisationnelle 33
LISTE DES ABRÉVIATIONS, SIGLES ET ACRONYMES
Dans le contexte actuel, soit une économie du savoir, les ressources humaines sont de plus en
plus considérées comme un avantage concurrentiel puisqu'elles permettent à l'entreprise non
seulement d'atteindre ses objectifs, mais aussi de dominer la compétition. Conséquemment,
les gestionnaires déploient un éventail de stratégies des plus créatives pour que leur entreprise
se démarque des compétiteurs et ainsi favorise l'attractivité auprès des candidats potentiels.
Dans cette perspective, nous nous sommes attardées au concept de responsabilité sociale de
l'entreprise qui, selon plusieurs récentes études américaines, représente une plus value aux
yeux des individus à la recherche d'un emploi et, par le fait même, d'un employeur de choix.
Afin de mieux comprendre la relation entre ces deux variables et d'évaluer le potentiel
d'attractivité de chacune des dimensions composant la responsabilisation sociale de
l'entreprise, nous avons décidé de conduire des entrevues semi-dirigées avec des employés
récemment embauchés de Cascades, une entreprise québécoise et chef de file en matière de
gestion responsable. Nous voulions ainsi mettre à l'épreuve un modèle largement utilisé qui
soutient que les relations avec les employés, la communauté, les femmes et les minorités,
ainsi que le respect de l'environnement et la qualité des services et produits offerts dans une
perspective de développement durable influencent favorablement la réputation
organisationnelle, donc l'attractivité.
Nos résultats ont corroboré en partie cette modélisation. En effet, l'ajout d'une variable de
contrôle, soit la familiarité, a démontré que le degré de connaissance d'une personne envers
une entreprise influençait de façon positive l'évaluation de la réputation organisationnelle. De
plus, celtaines contraintes socio-économiques telles que le taux de chômage et des facteurs
individuels comme le niveau d'éducation et l'âge peuvent augmenter ou diminuer l'intérêt
d'une personne envers la responsabi 1ité socia le d'une entreprise et la réputation
organisationnelle au cours d'un processus de recherche d'emploi. Il y a donc des variables
modératrices à prendre en compte lorsque l'on analyse la relation entre la responsabilité
sociale et l'attractivité organisationnelle.
Cette recherche permet donc de conclure que l'adoption d'un style de gestion responsable
peut augmenter l'attraction lorsque certaines cond itions sont rencontrées. De pl us, il apparaît
que les jeunes adultes sont plus réceptifs et disposés à favoriser une entreprise qui affiche
une performance sociale manifeste.
Les principales limites de cette étude sont la généralisation limitée des résultats puisque notre
échantillon se limite à une seule entreprise, ainsi que le recours à des données « post hoc»
qui pourrait être biaisées suite à une évolution du discours ou de récentes expériences suite à
l'embauche. Cependant, cette étude s'ancre dans la réalité corporative, contrairement aux
autres études dans ce domaine qui procédaient par des simulations avec des étudiants en voie
de graduer en gestion.
des détenteurs d'actions seraient prêts à sacrifier une part des profits si cela était nécessaire à
la poursuite d'une gestion responsable. La justification sous-jacente à un tel revirement de
situation semble liée à la sensibilisation accrue des actionnaires aux coCJts latents d'une
stratégie axée seulement sur le profit à court terme. À cet effet, notons que l'adoption de lois
favorisant la signalisation de délits d'entreprise en lien avec la protection de l'environnement
ou des droits de la personne ainsi que l'augmentation de l'aide gouvernementale aux
entreprises respectant les normes élémentaires de responsabilité sociale sont sans contredit
des incitatifs substantiels pour favoriser l'importance accordée aux perspectives ultériemes
de bien-être de l'humanité.
De plus, une entreprise socialement responsable susciterait une meilleure collaboration des
employés dans l'atteinte de ses objectifs tout en bénéficiant d'un moyen afin de se démarquer
des compétiteurs et être ainsi perçue comme un employeur de choix auprès de j'élite. C'est
3
d'ailleurs dans cette optique que plusieurs études se sont attardées à démontrer l'existence
d'une relation positive entre la capacité d'attraction des entreprises et leur performance
sociale (Turban et Keon, 1993; Judge et Cable, J 997; Lievens et al., 2001; Luce et al., 2001;
Turban et Cable, 2003). Pour ces auteurs, l'image d'une responsabilité sociale par j'entremise
d'une bonne réputation organisationneJJe et d'une plus grande visibilité influence la capacité
d'attraction que détient une corporation, au même titre qu'une rémunération concurrentielle
(Becker et Huselid, 1999), des avantages sociaux, des horaires de travail flexibles, des
programmes favorisant la formation continue, ainsi que des possibilités d'avancement
(Powell, 1984; Taylor et Bergmann, 1987).
Cependant, bien que la plupart des auteurs fassent front commun quant à l'influence positive
et l'importance de la responsabilité sociale dans un processus de recrutement, ces recherches
présentent deux faiblesses; d'une part, peu d'études se sont intéressées à l'impact spécifique
des différentes composantes de l'image de responsabilité sociale sur la capacité d'attraction
de nouveaux employés. D'autre Palt, la plupart de ces recherches reposaient sur des
simu lations et ne tradu isaient donc pas nécessairement les motivations de personnes en
recherche active d'emploi. Backhaus et al. (2002) ont bien soulevé quelques pistes de
réflexion avec les résultats de leurs recherches qui proposaient que les caractéristiques les
plus prisées de la responsabilité sociale varient en fonction du genre des répondants et de leur
statut social, mais cette recherche reposait justement sur des situations hypothétiques, soit des
simulations présentées à des fin issants d'une école de gestion. C'est précisément l'absence du
point de vue de véritables chercheurs d'emploi dans l'ensemble des études faites dans ce
domaine qui est à l'origine de la présente recherche sur la représentation de la responsabilité
sociale et des dimensions qui la composent auprès de gens déjà engagés sur le marché du
travail.
L'objectif de cette recherche est donc de sonder l'impact de l'image de responsabilité sociale
d'une entreprise auprès de nouveaux employés qui viennent de conclure une démarche de
recherche d'emploi et d'explorer l'importance relative des diverses composantes de cette
image de responsabilité sociale sur la capacité d'attraction auprès de ces nouveaux employés.
Deux particularités constituent les éléments distinctifs cette recherche: elle est effectuée
auprès de véritables récents chercheurs d'emploi et elle explore l'impact relatif des
différentes dimensions de la RSE auprès de ces chercheurs d'emploi. Cette étude devrait
donc permettre aux théoriciens de mieux comprendre l'influence des différentes dimensions
composant la responsabil ité sociale sur la perception de l'entreprise par les employés. Quant
aux praticiens, ils y verront l'intérêt de l'évaluation des impacts réels d'une stratégie
corporative appuyée sur une performance sociale quant au pouvoir d'attractivité de
l'entreprise.
Pour mieux saisir cette relation complexe entre la responsabilité sociale des entreprises et la
capacité d'attraction, une recension des écrits pertinents s'impose. Tout d'abord, une
5
La responsabilité sociale des entreprises (RSE) est un concept qui suscite de plus en plus
d'intérêt auprès des diverses parties prenantes associées de près ou de loin à une organisation.
Cependant, cet engouement pour une gestion responsable est présent depuis plusieurs années
dans la littérature à l'intention des gestionnaires et des chercheurs. En effet, l'éthique
corporative a toujours été au cœur des préoccupations des philosophes et sociologues depuis
J'arrivée du capitalisme. D'ailleurs, le concept d'une responsabilité sociale de l'entreprise a
fait l'objet de nombreux débats dans la communauté scientifique quant à sa définition au sens
large, qui vient altérer le rôle et les responsabilités attribués à l'entreprise. En d'autres termes,
en exigeant de l'entreprise qu'elle considère d'autres paramètres que ses intérêts financiers,
donc qu'elle aille au-delà de ses obligations envers ses actionnaires, les discours sur la
responsabilité sociale proposent ni plus ni moins une révision des principes fondateurs de
l'entreprise (Gendron, 2000). Par le fait même, le principe de la RSE invite les organisations
à s'inscrire résolument dans le cadre de l'intérêt général et ainsi tenir compte des intérêts des
différentes parties prenantes.
Ce chapitre traite donc dans un premier temps du contexte favorable depuis quelques années
à l'émergence du concept de RSE. Dans un deuxième temps, différentes définitions de ce
concept seront présentées afin d'illustrer non seulement les divergences d'opinion entre les
acteurs sociaux sur Je rôle de l'entreprise mais aussi sur son opérationnalisation au quotidien.
Par le fait même, les motivations ou raisons sous-jacentes à une plus grande
responsabilisation sociale des entreprises seront abordées.
7
Principal acteur économique dans notre société, l'entreprise détient un pouvoir considérable.
En effet, la mondialisation des économies a permis à certaines grandes firmes de devenir
aussi puissantes, sinon plus, que certains États. De récentes données nous démontrent que
certaines multinationales présentent un chiffre d'affaires plus grand que Je PlB de pays tels
que la Norvège, la Turquie ou le Portugal (Commenne, 2006). Conséquemment, J'entreprise
est sans contredit un Jevier de création de richesse pour ses actionnaires, mais aussi un acteur
économique déterminant.
Toutefois, ce pouvoir qui était autrefois justifié par une conception de l'entreprise-contrat
semble ébranlé (Gabriel et Cadiou, 2005). En fait, de plus en plus d'acteurs remettent en
question cette perception de l'entreprise qui se définit par la rencontre de plusieurs individus
qui « ont librement décidé de s'associer pour mettre à profit leurs talents et les ressources
dont ils sont propriétaires» (Pasquero, 2006, p. 3). Le principe selon lequel ce nœud de
contrats limite la responsabilité de l'entreprise à la création de richesses pour ses actionnaires
est désormais contesté. lndubitablement, les nombreux scandales financiers et les
catastrophes écologiques vécus au cours des dernières années ont palticipé à l'érosion de ce
type de légitimité puisque ces évènements ont affecté directement la société. En d'autres
termes, ces externalités ont amené les consommateurs, les investisseurs, les organismes non
gouvernementaux (ONG), les groupes de pression, etc., à exercer une pression considérable
sur les organisations pour qu'elles se responsabilisent envers leurs parties prenantes. Dès lors,
l'entreprise est soumise à une nouvelle logique qui implique qu'elle justifie son existence vis
à-vis la société, c'est-à-dire qu'elle soit perçue comme légitime par la société.
Évidemment, cela signifie que J'entreprise est amenée à modifier ses rapports avec ses parties
prenantes et surtout son processus de gestion. En réaJ ité, bien que la société reconnaisse
l'importance du rôle de J'entreprise dans la création de biens et services essentiels à la qualité
de vie de tous et chacun, el Je est aussi consciente des effets pervers qui accompagnent bien
souvent cette production. Conséquemment, comme le soulignent Capron et Quairel
Lanoizelée (2004), l'entreprise se voit appelée à réaliser un équilibre harmonieux entre la
8
Cette nouvelle façon d'aborder la relation entre l'entreprise et ses parties prenantes suggère
que les organisations arrivent à tenir compte de leur environnement socio-politique donc à
devenir des entreprises-citoyennes même si cela représente un défi pour les gestionnaires.
Effectivement, cette conscientisation quant au rôle et responsabilités que doit assumer
l'entreprise face à la société s'insère dans un système de valeurs sociales. Pasquero (2003)
souligne que ce système est constamment en mouvance puisque les différents acteurs, au fil
du temps, construisent leur perception de la réalité en fonction, par exemple, de leurs intérêts
personnels mais aussi selon les règles, valeurs et croyances portées par les différentes
institutions de l'époque. En d'autres termes, l'entreprise et plus précisément les gestionnaires
doivent démontrer une grande capacité d'adaptation aux changements, et par Je fait même,
faire preuve de réceptivité sociale (Ackerman et Bauer, 1976). Cette réceptivité a pour
principal objectif de ne jamais laisser «d'écart irréversible se creuser entre son
compoltement et les désirs des acteurs sociaux dont elle dépend le plus» (Pasquero, 2003, p.
14). Cependant, une telle approche commande des comportements proactifs et surtout un
véritable désir de résoudre les problèmes afin de favoriser une gestion responsable.
Dans cet ordre d'idées, pour un gestionnaire qui a saisi l'impoltance de la réceptivité sociale,
la navigation à travers les nombreuses demandes des différents partenaires associés de près
ou de loin à l'entreprise exige de grandes aptitudes pour la communication, l'interaction ainsi
que la coopération (Gabriel et Cadiou, 2005). Par exemple, pour une entreprise comme
9
1 http://www.corporatecitizenship.novartis.com/managing-cc/stakeho Ider-engagement.shtm J
10
dont ce changement s'opérationnalisera dans le quotidien. C'est d'ailleurs dans cet état
d'esprit que de nombreux ouvrages s'intéressent aux nouvelles formes de régulation
économique, aux nouveaux mouvements socio-économiques, ainsi qu'à de nouvelles théories
de la gouvernance (Hufty et Cavalière, 2002; Gendron et Vaillancourt, 2003; Gendron,
2006).
Au cours des cinquante dernières années, un nombre élevé d'alticles scientifiques visant à
définir ce concept ont été publiés. POLlltant, comme le mentionne Carroll (1999), l'absence
d'un corpus de conceptualisation et de définitions cohérentes et, conséquemment, de
paradigmes utiles pour la recherche scientifique ajoute à la difficulté de produire une
littérature consistante. Ainsi, la responsabilisation sociale d'une entreprise peut prendre
diverses formes ou être interprétée différemment selon la partie prenante qui la définit
(Clarkson, J 995). La RSE est donc un concept à la fois polymorphe et polysémique.
comme des compoltements organisationnels qui vont au-delà des droits et obligations légaux
(Davis, 1960; Mosley et aL, 1996). En effet, l'organisation ne peut plus s'en tenir qu'à la
maximisation de ses intérêts économiques sans tenir compte des conséquences négatives
directes ou indirectes qu'elle engendre au sein du milieu dans lequel elle évolue (Graaf1and
et Van de Ven, 2006). Post et al. (J 996, cités dans Graaf1and et Van de Ven, 2006, p. 112,
traduction 1i bre) illustrent cette nouvelle réal ité de gestion en avançant que la responsabilité
sociale des entreprises « signifie que chaque entreprise doit rendre des comptes en ce qui a
trait aux activités organisationnelles qui affectent les gens, les communautés et
l'environnement». Kok et al. (2001, p.287, traduction libre) quant à eux suggèrent que «
l'entreprise a l'obligation d'utiliser ses ressources pour générer des bénéfices à la société
(...) ». Bref, la responsabilité sociale des entreprises modifierait ainsi le modèle traditionnel
de rationalité économique dans la prise de décision.
Toutefois, le concept de la responsabilité sociale des entreprises reste ambigu quant à son
opérationnalisation. En effet, Corley et al. (2001) s'attardent à cette problématique avec
l'exemple de la compagnie pharmaceutique Merk, qui a volontairement offert des
méd icaments à l'Afrique. En fait, l'entreprise est allée au-devant des attentes en se
positionnant par elle-même sur l'échiquier des entreprises responsables et éthiques.
Or, dans le cas Merk auquel les auteurs font allusion, bien que cet exercice ait bénéficié à son
image et à sa réputation en plus d'améliorer ses relations avec certaines parties prenantes,
cette décision a tout de même coûté plus de deux cent millions de dollars américains. Une
dépense qui n'a pas plu aux actionnaires. Conséquemment, l'entreprise qui décide de se
responsabiliser socialement peut parfois rencontrer de la résistance au changement,d'où
l'importance de connaître les perceptions divergentes de la responsabilité sociale des
entreprises selon différents acteurs sociaux. Par Je fait même, de comprendre les motivations
ou facteurs favorisant l'adoption de comportements responsables au sein des entreprises.
12
Le concept de responsabilité sociale des entreprises, qui dans sa plus simple expression
comme le mentionne Blyth (2005), décrit les responsabilités qu'une entreprise a envers la
société, engendre encore bien des débats, autant auprès des praticiens que des théoriciens. En
effet, « agir de façon responsable signifie queJque chose de différent pour chaque entreprise»
(Blyth, 2005, p.30, traduction Jibre). Mais encore, cette disparité quant aux responsabilités
qu'une entreprise devrait assumer varie non seulement d'une compagnie à l'autre mais aussi
selon les acteurs sociaux interrogés. Par exemple, la régu lation des acteurs et des institutions
économiques est envisagée de façon différente par les entreprises et le patronat versus les
organismes non gouvernementaux et la société civile. Il semble donc y avoir un clivage entre
la perception que les acteurs se font de la responsabilité sociale. Certains l'associent à la
notion de volontariat alors que d'autres Ja perçoivent comme un cadre institutionnel de
réglementation et de normes (Capron et QuaireJ-Lanoizelée, 2004).
Cette perspective fait allusion à ce que certains auteurs, dont Pérez (2005), qualifient de
« management responsable ». En d'autres termes, les gestionnaires doivent d'abord et avant
tout veiller à la rentabilité économique de J'entreprise mais autant que faire se peut en tenant
compte des partenaires internes (employés, syndicats) et externes (fournisseurs, communauté,
etc.) et en limitant les impacts sociaux et environnementaux de leurs activités. Cette
allégation implique alors que les gestionnaires et dirigeants d'entreprise fassent des choix
quant aux moyens à utiJiser pour atteindre les objectifs, à la période de temps envisagée pour
parvenir à améliorer Ja situation et aux retombées économiques et sociales possibles
13
occasionnées par de tels gestes. Bien souvent les intérêts et la nature des opérations de
l'entreprise influencent ses actions à cet égard (Wood, 1991).
Porter et Kramer (2006) illustrent cette réalité en mentionnant l'importance pour une
entreprise de choisir un domaine d'intervention sociale qui lui convient, donc est le plus
approprié. Selon ces auteurs, les entreprises doivent envisager la responsabi lisation sociale
comme un choix stratégique qui repose sur une série d'étapes propres à la gestion de projet
soit: identifier, prioriser et exposer les problèmes perçus. En d'autres termes, Porter et
Kramer affirment qu'il faut établir un lien entre les efforts de responsabilisation sociale et la
stratégie de l'entreprise pour améliorer la chaîne de valeur.
Bref, les entreprises et le patronat réfutent la nécessité d'imposer des lois ou des normes dans
ce domaine. C'est là une position qui illustre que leur volonté d'agir, donc de se
responsabiliser socialement, est principalement liée aux avantages concurrentiels possibles
émanant d'une telle stratégie. Autrement dit, les entreprises se sentent interpellées par le
concept RSE lorsqu'il y a la possibilité d'améliorer leur rentabilité économique, donc
d'augmenter leur création de valeur ajoutée (Porter et Kramer, 2006). Tout compte fait,
comme le suggèrent Porter et Kramer (2006, p.12, traduction libre), «la responsabilisation
sociale d'une entreprise devient stratégique lorsque la compagnie ajoute une dimension
14
sociale à sa proposition initiale, car les impacts sociaux deviennent ainsi une partie intégrante
de la stratégie globale ».
A cet égard, plusieurs auteurs, dont Waddock et Graves (l997), ont justifié le manque
d'intérêt de certaines grandes entreprises quant à la RSE à cause, entre autres, de l'absence de
lien concluant entre une responsabilisation sociale et une meilleure performance financière.
En fait, les résultats de ces études sont effectivement ambigus et témoignent de l'existence
d'une problématique non négligeable sur le plan méthodologique, soit la difficulté de
développer un outil de mesure efficient pour un construit multidimensionnel. En fait, pour le
moment, seules quelques études ont démontré une relation positive entre la RSE et
l'attractivité des consommateurs (Paul et al., 1997), le climat organisationnel (Morris, 1997),
les comportements hors rôle (Luce, 1998 citée dansCorley et al., 2001) communément
appelés les comportements discrétionnaires par Simard et Tremblay (2000), la motivation
chez les employés et l'attractivité organisationnelle (Turban et Greening, 1997; Greening et
Turban, 2000; Schmidt-Albinger et Freeman, 2000; Luce et al., 2001; Turban et Cable,
2003). De plus, celtaines études font valoir qu'une entreprise socialement responsable
obtiendrait plus facilement du financement qu'une entreprise qui ne l'est pas (Teoh et Shiu,
1990; Epstein et al., 1994; Waddock et Graves, 1997; Stenzel et Stenzel, 2005).
Selon O'Dwyer et al. (2005), peu d'études se sont intéressées à Ja perception des parties
prenantes telles que les organismes non gouvernementaux (ONG) et la société civile quant au
concept de responsabilité sociale de l'entreprise. En effet, la littérature s'attarde plutôt aux
parties prenantes qui détiennent un certain pouvoir économ ique sur l'entreprise comme les
employés, les fournisseurs et les syndicats. Pourtant, comme le soulignent Doh et Guay
(2006), en ce qui concerne les ONG, ils sont de plus en plus nombreux et gagnent en
influence auprès des gouvernements et de l'opinion publique. Leur présence active dans les
débats de société ainsi que leur affiliation à des groupes religieux ou à des activistes
indépendants ont parfois porté fruit au cours des dernières années; quelques auteurs, dont
Naim (2000), suggèrent même qu'ils sont désormais lin contrepoids aux multinationales.
Quant à la société civile, elle semble être de plus en plus sensibilisée aux répercussions
négatives d'une gestion à court terme, donc d'une maximisation de la valeur pour les
actionnaires et eJle pose des gestes significatifs pour montrer son mécontentement. Par
exemple, l'augmentation constante de l'achat de produits locaux, équitabJes ou écologiques
révèle que le citoyen utilise son rôle de consommateur pour faire pression sur les entreprises
(Tixier, 2004). Cette observation trouve aussi son équivalence dans le monde de la finance
puisque de plus en plus d'individus privilégient d'investir dans des fonds socialement
responsables qui intègrent des critères sociaux et environnementaux aux indicateurs habituels
financiers. Soulignons que ces constatations corroborent les résultats obtenus par la
Commission sur la démocratie canadienne et la respbl1sabilisation sociale des entreprises
(2002). En effet, soixante-douze pour cent des Canadiens y disent souhaiter que les
entreprises se préoccupent davantage de J'impact social et environnemental de leurs activités.
Toutefois, malgré ces constatations, les entreprises, de façon générale, ignorent bien souvent
ces acteurs sociaux et leurs revendications. C'est d'ailleurs pour cette raison que O'Dwyer et
al. (2005) avancent que les dirigeants d'ONG sont encJins à exiger des réformes
administratives et institutionnelles pour améJiorer les mécanismes par lesquels on oblige les
entreprises à améliorer leur performance sociale et environnementale. En d'autres termes, la
16
responsabilité sociale de J'entreprise s'inscrit ici dans une logique d'imposition qui repose sur
la reconnaissance au droit à l'information, une obligation de reddition de comptes crédible et
accessible envers toutes les parties prenantes, même les moins puissantes, ainsi que la
présence d'une régulation, donc de processus standardisés pour tous.
Certains auteurs partagent aussI cette VISion de la responsabi 1ité sociale des entreprises,
comme Sobczak (2002) qui appelle à une approche beaucoup plus coercitive, largement axée
sur la reddition de compte envers le gouvernement et la société. Par l'entremise d'un bilan
social, les entreprises auraient l'obligation de fournir des preuves tangibles de leurs efforts en
vue de collaborer au bien-être de la communauté. Cette idée repose entre autres sur les
avantages associés à la tenue d'audits ou les bilans financiers qui sont régis par des Jois et des
normes sévères. Notons que, récemment, cette approche a été soutenue et encouragée en
France par l'adoption d'un nouveau texte de loi intitulé Loi sur les nouvelles régulations
économiques lequel « prévoit expressément un rapport à fournir par les entreprises
concernées sur J'impact environnemental et social de leur activité» (Pérez, 2005, p. 39).
Comme le mentionnait Sobczak (2004), nous assistons à l'émergence d'un cadre juridique
concernant la responsabil ité sociale des entreprises. Sou 1ignons que l' institutionnal isation du
concept est souvent associée à des efforts concertés et la présence d'un référentiel qui facilite
l'adoption de comportements responsables.
Bref, les organismes non gouvernementaux et la société civile envisagent donc la RSE
comme une réponse aux insuffisances du système ultra libéral qui ne tient pas compte des
externalités négatives produites par les entreprises (Pérez, 2005) et, par le fait même, des
revendications de parties prenantes autres que les actionnaires. Selon ces acteurs sociaux, la
rentabilité économique est souhaitable mais pas à n'importe quel prix. Conséquemment,
l'établissement de lois, de normes et même de standards est préalable à une
responsabilisation sociale discrétionnaire des entreprises et est justifié par les nombreuses
pressions sociales des dernières années.
Notons pour conclure que ces deux perceptions opposées de la RSE nous permettent de
classer les motivations ou facteurs favorables à J'adoption d'une gestion responsable en deux
17
Quant aux entreprises, leurs actions ont pour fondement les motivations extrinsèques ou
utilitaristes qui sont associées à la stratégie de l'entreprise et ses répercussions à long terme.
Plus précisément, aux bénéfices économiques ou autres pouvant être retirés d'une gestion
socialement responsable. Autrement dit, l'intention des gestionnaires à favoriser la
responsabilisation sociale dépend en grande partie d'un calcul coOts-bénéfices. Bien que
contestée par certains, cette vision est encensée par tous ceux qui considèrent que l'entreprise
n'agit que lorsqu'on lui parle de chiffres et de bénéfices. En employant un tel langage, on se
rapproche du type de discours considéré par les dirigeants et gestionnaires (Porter et Kramer,
2006). D'ailleurs, il faut mentionner que les possibles avantages concurrentiels découlant
d'une responsabilisation sociale sont à la base de l'argumentaire des groupes patronaux qui
en font la promotion. Par exemple, Business for Social Responsibility (BSR) argumente que
la RSE améliore la performance, J'image et la réputation de l'entreprise, réduit les coûts à
long terme, facilite la gestion du risque, etc2 . Même discours du côté du Conference Board du
Canada qui soutient que les bénéfices de la RSE sont d'ordre légal, financier et managérial 3.
Dans cet ordre d'idées, le prochain chapitre abordera un de ces avantages concurrentiels
présumé découler de la responsabil ité socia le des entreprises, soit la capacité d'attraction
organisationnelle.
2 http://www.bsr.org/Meta/About/index.cfm
3 http://www.conferenceboard.ca/GCSR/
CHAPITRE 2
Au cours des dernières années, plusieurs changements sociaux et économiques ont engendré
de nombreux défis à relever pour les entreprises. En effet, un nouveau contexte de gestion se
19
fait jour. Ce dernier est caractérisé par une mondialisation des marchés, des changements
constants de la demande et une augmentation de la compétition en termes de produit-marché
(Pérez et Garcia-Falcon, 2002). Cette compJexification de J'environnement interne et externe
de l'entreprise a d'ailleurs amené plusieurs auteurs (Barney, 1991; Osterman, 1994; Lawler
Jl l, 1996; Paauwe et Bosel ie, 2003) à s'intéresser à une gestion des ressources humai nes
(GRH) plus stratégique, donc basée sur une meilleure compréhension des besoins
organisationnels. En fait, ces auteurs avancent que suite à une analyse approfondie des
ressources à l'interne, les gestionnaires déploieront des stratégies précises pour recruter les
bonnes ressources, les former et les retenir au sein de l'organisation. En d'autres termes, pour
s'assurer d'un alignement entre la stratégie d'affaires et la gestion des ressources humaines.
La nouvelle réalité concurrentielle (Applebaum et al., 2000) exige des entreprises d'avoir la
capacité organisationnelle à personnaliser et diversifier la production tout en offrant un bien
de qualité pour répondre aux besoins du marché (Appelbaum et Batt, 2006). L'innovation
(Osterman, 1994; Mohrman et al., 1995; Pil et MacDuffie, 1996) ainsi que la mise en place
d'un mode de production «juste-à-temps» qui requiert une capacité d'analyse et de
résolution de problèmes de la part des employés afin de pouvoir respecter les échéanciers de
20
Même observation dans le secteur tertiaire, donc celui des serVIces, qui est le premler
employeur au Canada depuis les dernières décennies (Morrissette et al., 2005). En fait, ces
employés qui sont en interaction constante avec Je client, donc avec la source potentielle de
revenus, ont des connaissances quant aux produits, au processus de fabrication et aux besoins
du consommateur afin de fournir un service à la clientèle exemplaire (Appelbaum et al.,
2000). Ainsi, non seulement ils ont accès à de l'information qui exige une certaine
décentralisation du pouvoir, mais leur performance en emploi influence grandement le niveau
des ventes et conséquemment la rentabilité financière de l'entreprise.
Bref, la migration d'une économie basée sur la production de masse à une économie de
production de biens et de services de grande qualité aux plus bas coûts possibles a encouragé
les gestionnaires et dirigeants d'entreprise à se préoccuper de leur GRH et principalement en
ce qui a trait à la recherche de candidats potentiels qui désormais peuvent posséder des
compétences et des aptitudes faisant toute la différence en termes de rentabi 1ité et de capacité
21
Bien qu'il y ait un besoin flagrant de poursuivre les recherches sur l'attractivité
organisationnelle pour mieux en saisir ses déterminants (Thomas et Wise, 1999; Backhaus,
2002; Ehrhart et Ziegel1, 2005; Lievens et al., 2007), la littérature actuelle nous permet de
constater que les candidats potentiels semblent porter une attention particulière aux
informations telles que le salaire, les avantages sociaux (assurances, vacances, etc.) et au
cheminement de carrière, donc aux opportunités d'avancement, avant de postuler pour un
emploi (Thomas et Wise, J 999). D'ailleurs, une étude de Chapman et al. (2005) montre que
l'attraction des candidats est en pal1ie expliquée par la description des caractéristique~ de
l'emploi, donc la description de tâche, et des conditions dans lesquelles s'effectuera le travail.
Cependant, ces informations sont bien souvent transmises au candidat lors de l'entrevue
d'embauche et sont déterminées par le parcours professionnel de l'individu. Par exemple, le
nombre de semaines de vacances accordées à un nouvel employé est généralement fonction
de son nombre d'années d'expérience dans un domaine. Autrement dit, ces données arrivent
tardivement dans le processus de sélection en plus d'être variables d'un individu à l'autre,
donc elles ne peuvent pas suffire à expliquer l'attractivité organisationnelle.
À cet égard, Ehrhart et Ziegert (2005) ont tenté de classer les grandes théories sous-jacentes à
l'attractivité organisationnelle qui ne font pas allusion aux pratiques et politiques de gestion
des ressources humaines mentionnées ci-haut en trois catégories: les caractéristiques
organisationnelles, les caractéristiques interactionnelles et les caractéristiques individuelles. 11
faut souligner, cependant, que bien que chacune de ces catégories regroupe de nombreuses
théories, nous avons retenu seulement celles qui pourraient être utiles dans le cadre de cette
recherche, donc qui nous permettraient de répondre à nos interrogations sur le potentiel
d'attraction de la RSE.
sur les conditions de travail (Rynes et Barber, 1990; Barber, 1998). Autrement dit, un
cand idat pourrait ne pas considérer une entreprise dès le début de sa recherche d'emploi parce
que cette dernière a une mauvaise réputation. Greening et Turban (J 997, p. 660, traduction
libre) résument cette idée en affirmant que « les attributs organisationnels sont une source
d'information pour les candidats puisqu'ils permettent de déduire le type de conditions de
travail offert par l'organisation ». D'ailleurs, une recherche de Gatewood et al. (1993)
conclut que les notes attribuées à la réputation organ isationnelle étaient positivement
corrélées à l'intention de postuler pour un emploi.
Pour certains auteurs, l'environnement perçu fait aussi état des attributs de l'organisation
(Backhaus et al., 2002). Par exemple, une structure organisationnelle favorisant la
décentralisation des pouvoirs ou ayant un système de reconnaissance avantageux
influencerait positivement l'attractivité (Bretz et al., 1989; Turban et Keon, 1993). Toutefois,
cela implique que le candidat a accès à ces informations par l'entremise de brochures
publicitaires ou d'une connaissance personnelle au sein de cette organisation.
Caractéristiques interactionnelles
La deuxième catégorie, les caractéristiques interactionnelles, suggère que les candidats
privi légient des organisations qui ont des valeurs congruentes aux leurs (Chatman, 1989,
1991; Cable et Judge, 1994; Judge et Cable, 1997). Chatman (1989) a noté que les candidats
sont intéressés par des organisations qui semblent avoir des normes et des valeurs qu'eux
mêmes considèrent importantes. En fait, les ind ividus sont à la recherche d'un fit entre leurs
besoins personnels et émotionnels et ceux de l'entreprise (Judge et Bretz, 1992). Ce faisant,
ils sont susceptibles de retirer une plus grande satisfaction de cette relation professionnelle.
Ils ont conduit une étude auprès du POl1 Authority of New York. Ils ont découvert
que l'image qu'avaient les employés d'eux était affectée par les actions de leur
employeur, soit Port Authority of New York, concernant les sans-abri. Ces employés
se voyaient comme une extension de leur compagnie. Conséquemment, un candidat
potentiel peut facilement s'imaginer à guoi pourrait ressembler son travail au sein de
cette entreprise en fonction de son image.
Également, soulignons qu'une étude de Riordan et al. (1997) suggère que les réactions des
autres personnes à l'extérieur de l'organisation, comme les amis, la famille, les médias etc.,
influencent un employé quant à son intention de quitter l'entreprise et sa satisfaction au
travail.
Bref, ces théories nous permettent de mieux comprendre l'importance du rôle que peut jouer
l'image ou la réputation organisationnelle dans un processus d'attractivité. En effet, bien que
l'image organisationnelle soit un concept équivoque en raison de ses définitions multiples
(Gioia et aL, 2000), il apparaît évident que pour un candidat une image corporative positive
peut être gage de conditions de travail favoràbles, d'une concordance entre ses valeurs et
celles de ]' entreprise tout en favorisant l'approbation des pairs, donc en le rassurant sur son
choix d'employeur. À cet égard, la plupart des auteurs avancent que « plus l'image
organisationnelle est positive, plus les candidats potentiels seront disposés à postuler»
(Smith et aL, 2004, p.77, traduction libre). Bauer et Aiman-Smith (1996) partagent d'ailleurs
cet avis lorsqu'ils avancent que les individus sont plus attirés vers une entreprise qui, par
exemple, a une attitude pro environnementale.
25
Cependant, ces efforts peuvent devenir complexes pu isque, comme le mentionnent Riordan et
al. (1997), l'entreprise ne peut pas présenter une seule et même image à tous. Ainsi, une
étude récente de Chun et Davies (2006) souligne que les consommateurs et les employés ne
valorisent pas les mêmes critères ou caractéristiques d'une entreprise lorsque vient le temps
d'évaluer sa réputation organisationnelle. Par exemple, une organisation peut être considérée
comme un très bon employeur par les employés et les candidats potentiels mais être un grand
pollueur, donc contestée par des consommateurs inquiets de ces répercussions.
Conséquemment, puisque la perception d'une entreprise est grandement influencée par sa
capacité à répondre à un besoin, donc de rencontrer certaines exigences, elle doit s'assurer de
mettre en valeur la caractéristique privilégiée par la partie prenante concernée. Ces
conclusions sont aussi partagées par Donaldson et Preston (1995) et Fombrun (1996).
un tel contexte. Conséquemment, comme J'expliquent Smith et al. (2004), l'entreprise doit
être consciente des signaux qui peuvent attirer ou repousser les cand idats lorsqu'elle
développe ses instruments de recrutement. D'autant plus que de nombreuses études ont déjà
démontré que le contenu de ses brochures d'information influence l'attractivité des candidats
(Mason et Belt, 1986; Schwoerer et Rosen, 1989; Kristof, J 996; Roberson et aL, 2005).
Dans cette perspective, plusieurs études se sont alors attardées à étudier la relation possible
entre la responsabilité sociale des entreprises et la capacité d'attraction (Davis, 1973;
Fombrun et Shanley, 1990; Turban et Greening, 1997, Greening et Turban, 2000; Luce et al.,
2001). En effet, pour Davis (1973) ainsi que Fombrun et Shanley (1990), la responsabilité
sociale d'une entreprise améliorerait l'image de l'entreprise et, par le fait même, l'attractivité.
Alors que pour Turban et Greening (1997), la réputation organisationnelle deviendrait la
véritable variable médiatrice. Contrairement à l'image corporative, la réputation
organisationnelle est plus difficile à man ipu 1er puisqu'elle se bâtit au travers des interactions
entre les multiples parties prenantes. Cette perception globale, qui peut être négative ou
posttiveen comparaison avec d'autres firmes, se fonde généralement sur les actions de
l'entreprise, les produits et services offerts ainsi que ses campagnes publicitaires. En fait,
bien d'autres facteurs peuvent ven il' influencer cette perception, ma is pour les citoyens, donc
les employés et les candidats potentiels, ces dimensions sont les plus accessibles. Finalement,
Luce et al. (2001) soutiennent que l'ajout d'une autre variable intermédiaire que celJe
proposée par Turban et Greening (1997) permettrait de mieux saisir le lien qui existe entre la
responsabilité sociale d'une entreprise et sa capacité d'attraction. C'est ainsi que la
« familiarité» ou le niveau de connaissances sur l'entreprise que détient un candidat pourrait
affecter cette relation. Les auteurs argumentent que les activités d'une entreprise, qu'elles
soient positives ou négatives, génèrent une médiatisation qui contribue à la visibilité de celle
ci donc à la « familiarité ». Ainsi, contrairement à Turban et Greening (1997), les auteurs
soutiennent que ce n'est pas la performance en termes de responsabilité sociale qui influence
directement et positivement la réputation et donc l'attractivité organisationnelle, mais plutôt
le niveau de familiarité qui influence l'attractivité.
27
Donc, la question qui se pose est la suivante: la RSE, qui est une composante de l'image ou
la réputation de l'organisation, et qui est de plus en plus souhaitée par les Canadiens
(Commission sur la démocratie canadienne et la responsabilisation des entreprises, 2002)
susciterait-elle une plus grande attractivité auprès des candidats potentiels, qui sont aussi des
citoyens?
Les résultats de nombreuses recherches suggèrent que bien que la responsabilité sociale des
entreprises ne constitue pas le seul élément d'une réputation organisationnelle, elle engendre
une vision positive de la firme qui peut augmenter l'attractivité des candidats en fonction des
trois grandes caractéristiques mentionnées précédemment (Turban et Greening, 1997;
Greening et Turban, 2000; Luce et aL, 2001). Effectivement, les candidats associent la
responsabi 1ité sociale des entreprises à une représentation d'une gestion éthique, donc qui
engendre de bonnes cond itions de travail (caractéristiques organisationnelles) et qui favorise
J'approbation des pairs, donc rassure le candidat (caractéristiques individuelles). D'ailleurs, la
théorie de l'identité sociale qui a été développée au départ pour expliquer les ~elations
intergroupes (Lievens et aL, 2007), permet d'avancer maintenant qu'une performance sociale
positive de la part d'une entreprise favorise l'attractivité des cand idats car ils s'attendent alors
à vivre des retombées positives au sein de l'entreprise, comme l'amélioration de leur estime
personnelle (Turban et Greening, 1997; Greening et Turban, 2000; Backhaus et aL, 2002;
Turban et Cable, 2003; Lievens et aL, 2007). De plus, puisque la responsabilité sociale est un
concept multidimensionnel à la frontière d'une valeur à défendre (Pasquero, 2005), elle
rejoint aussi les besoins personnels des candidats (caractéristiques interactionnelles).
Cependant, soulignons que de tels résultats impliquent que les entreprises doivent déployer
des efforts de communication quant à leur performance sociale pour donner accès aux
candidats à ces informations, par l'entremise de brochures publicitaires ou de sites internet
par exemple. La diffusion de leurs actions à caractère social devient un enjeu stratégique pour
favoriser ['attraction (Turban et Greening, 1997).
28
Bref, la responsabilité sociale des entreprises, selon ces recherches, est vraisemblablement
corrélée à la capacité d'attraction organisationnelle. Elle permet aux entreprises de se
démarquer de leurs compétiteurs auprès des candidats à la' recherche d'un employeur, donc
d'être un avantage concurrentiel non négligeable.
Les résultats de Backhaus et al. (2002) confirment que les chercheurs d'emploi considèrent la
performance sociale des organisations comme un attribut organisationnel important et ce, à
toutes les étapes du processus d'embauche. lis notent aussi que la performance sociale
devient un critère plus important lorsque vient le temps d'accepter ou de refuser le poste.
Toujours selon Backhaus et al. (2002), les chercheurs d'emploi s'intéressent particulièrement
aux aspects environnementaux, aux relations avec la communauté, aux relations avec les
employés, à la gestion de la diversité (femmes et minorités) ainsi qu'à la qualité des produits
offerts. Soulignons que ces cinq dimensions du concept de responsabilité sociale des
entreprises sont les plus souvent employées pour les recherches dans ce domaine.
Cependant, l'étude de Schmidt-Albinger et Freeman (2000) soutient que les candidats seront
plus réceptifs aux dimensions de la responsabilité sociale qui risquent de les affecter
directement, dans leur quotidien. Par exemple, les candidats potentiels s'intéressaient
principalement à l'état des relations avec les employés. Notons toutefois que Backhaus et al.
(2002) avaient eux aussi maintenu dans leurs conclusions l'importance qu'accordent les
candidats aux relations avec les employés. En effet, une entreprise qui performe dans les
quatre dimensions de la RSE mais qui néglige ses employés diminue son attractivité. Bref,
l'évaluation de l'importance des dimensions de la responsabilité sociale varie selon le rôle
que joue la personne soit: un employé, un citoyen, un activiste, etc.
30
Backhaus et al. (2002) ont aussi souligné que les femmes sont plus réceptives au concept de
responsabilité sociale que les hommes. Mais encore, en ce qui a trait à la gestion de la
diversité et des relations avec la communauté, il semble que l'entreprise doit démontrer
clairement ses actions pour être crédible aux yeux des candidats potentiels. D'ailleurs, les
auteurs soulignent J'importance de diffuser les efforts en termes de responsabilité sociale
pour augmenter l' attractiv ité des cand idats pour autant que ceux-ci soient concrets et
véritables comme le recommande Tixier (2004). La transparence et J'authenticité requises
dans la description de tâche pour éviter un taux de roulement élevé (Perry et Kleiner, 2002)
doivent aussi être de mise pour la communication des actions à caractère social.
Dans cette perspective, Schmidt-Albinger et Freeman (2000) avancent que les candidats
n'ont pas tous la même connaissance du concept de responsabilité sociale de l'entreprise en
fonction de leur niveau d'éducation, de leurs ressources financières et de leur accès aux
média d'information. Les auteures suggèrent ainsi de s'assurer de diffuser l'information sur
la responsabilisation de différentes façons pour rejoindre le public le plus large possible. Par
exemple, l'utilisation des journaux peut être une stratégie de communication pertinente mais
ne rejoint qu'une partie des candidats potentiels puisqu'elle exige que l'individu sache lire,
qu'il soit intéressé par l'actualité et qu'il ait les moyens financiers de s'abonner ou d'acheter
le quotidien.
Dans cet ordre d'idées, Backhaus et ses collègues (2002) mentionnent la nécessité de
poursuivre les recherches pour mieux comprendre la perception des candidats quant aux
dimensions de la responsabilité sociale des entreprises selon leurs intérêts et leurs valeurs. De
plus, ils soulignent les limites importantes des échantillons habituellement considérés pour ce
genre de recherche, soit des étud iants sur le point de graduer. À cet égard, il faut noter que
l'ensemble des chercheurs s'accordent pour dire que des recherches sur le terrain avec des
candidats à la recherche d'un emploi sont impératives pour confirmer le lien entre la
responsabilité sociale des entreprises et l'attractivité (Turban et Greening, 1997; Greening et
Turban, 2000; Luce et al., 2001). En effet, ce type de recherche permettrait d'explorer
l'importance relative de la responsabilité sociale des entreprises comparativement à d'autres
facteurs d'attractivité plus traditionnels tels que le salaire, les avantages sociaux, les
possibilités d'avancement ou de promotion, etc. Bien plus, une approche de type qualitatif
pourrait bonifier les connaissances actuelles sur les dimensions ou facteurs qui contribuent à
la perception d'une image corporative attrayante (Thomas et Wise, 1999) puisqu'elle
permettrait de comprendre le processus, donc le « comment ça se passe» (Contandriopoulous
et al., 1990, p. 37). Bref, il semble opportun non seulement d'arriver à déterminer si
l'intervention a été efficace et a donc produit les effets escomptés, c'est-à-dire d'attirer des
candidats potentiels en étant socialement responsable, mais aussi de comprendre les raisons
de son efficacité (Rossi et al., 2004).
CHAPITRE 3
CADRE CONCEPTUEL
Cette recherche a pour objectif général d'évaluer l'impact des divers éléments composant une
stratégie corporative appuyée sur l'image d'une responsabilité sociale quant à la capacité
d'attraction auprès d'employés. De façon plus précise, il s'agit d'évaluer l'importance des
relations avec la communauté, du traitement des femmes et des minorités, des relations avec
les employés, du respect de l'environnement et la qualité des services et produits offerts dans
une perspective de développement durable comme éléments pouvant influencer l'attirance
d'un individu envers une entreprise par j'entremise de la réputation organisationnelle. Nous
tenterons ensuite de comprendre pourquoi certaines dimensions sont plus importantes que
d'autres aux yeux des candidats potentiels, si tel est le cas.
Nous avons vu que la responsabilité sociale semble avoir un rôle important à jouer dans
l'attractivité d'une entreprise auprès des candidats potentiels (Turban et Greening, 1997,
Greening et Turban, 2000; Schmidt-Albinger et Freeman, 2000; Luce et al., 2001; Backhaus
et al., 2002; Turban et Cable, 2003). Cependant, cette relation n'est pas directe et implique
une variable médiane, soit la réputation organisationnelle (Turban et Greening, 1997;
Greening et Turban, 2000). En fait, contrairement à l'image organisationnelle, la réputation
«est plus difficile à manipuler et est ancrée dans les caractéristiques principales de
l'entreprise (Greening et Turban, 2000, p. 257, traduction libre). Conséquemment, selon
Greening et Turban (2000), la réputation organisationnelle exige que l'entreprise établisse de
bonnes relations non seulement avec les consommateurs, mais aussi les parties prenantes
33
telles que les employés, les investisseurs, Ja communauté, etc. donc est intiment liée au
concept de responsabilité sociale de J'entreprise. Cependant, puisque Luce et al. (2001) ont
démontré J'importance de la familiarité comme élément pouvant influencer la perception
d'un candidat envers une entreprise, cette variable s'impose comme variable de contrôle.
D'autant plus que Turban et Greening (1997) ont noté eux aussi que la responsabilité sociale
des entreprises semblait améliorer l'attractivité d'une organisation particulièrement lorsque
celle-ci était considérée comme familière par les répondants. Quant à l'attractivité
organ isationnelle, la 1ittérature nous a appris que trois groupes de caractéristiques
(organisationnelles, interactionneJles et individuelles) sont généralement employés pour
J'expliquer.
Conséquemment, voici Je cadre conceptuel retenu pour les fins de cette étude et la façon dont
sont opérationnalisées les variables qui l'animent.
Figure 3.1
Cadre conceptuel de la relation entre la RSE et l'attractivité organisationnelle
D
1
Familiarité 1
Nous avons déjà constaté que Je concept de RSE est polysémique. Sans présumer que la
définition retenue dans Je cadre de cette recherche est la seule, ni même la meilleure, il nous
paraît essentiel de retenir une définition compatible avec la représentation que l'entreprise
elle-même s'en fait, car c'est cette représentation qui impulse et structure les pratiques de
l'entreprise en la matière. Conséquemment, la responsabilité sociale sera considérée comme
lin acte volontaire et proactif, comme on la conçoit généralement dans le monde corporatif et
tel que la perçoit en particulier Cascades, notre entreprise-terrain. Précisons également que
l'entreprise observée paraît s'être responsabilisée principalement à cause des valeurs
personnelles des fondateurs et gestionnaires en place. Ses motivations semblent donc être
davantage déontologiques que stratégiques et se reflètent sur la culture de l'entreprise. Cette
attitude se concrétise à travers cinq grandes dimensions auxquelles les dirigeants portent une
attention particulière et qui sont aussi des éléments mesurés par l'échelle Kinder Lydenberg
Domini (KLD) : le développement durable, les relations avec les minorités, les relations avec
la communauté, les relations avec les employés et la qualité des produits et services offerts.
En ce qui a trait à la réputation organisationnelle, variable médiane, elle établit le lien entre la
responsabilité sociale des entreprises et J'attractivité. En effet, tel que mentionné
précédemment, la responsabilité sociale semble améliorer la réputation de l'entreprise, donc
son attractivité. Cette modélisation est d'ailleurs conforme au modèle conceptuel développé
par Turban et Greening (1997) et il est Je plus utilisé dans le domaine de recherche sur
J'attractivité organisationnelle.
Cependant, puisque les études de Luce et al. (2001) ainsi que de Turban et Greening (1997)
ont démontré le lien entre la familiarité à l'égard d'une entreprise, donc la connaissance
qu'un individu détient sur cette organisation, et sa perception positive de l'entreprise, nous
intégrerons aussi cette variable dans notre analyse. Cet ajout nous paraît d'autant plus
approprié pu isque l'entreprise-terrain de la recherche est omniprésente dans son port
d'attache, la région de Kingsey Falls, si bien que le recrutement pour la dizaine d'usines
situées dans cette région bénéficie d'un taux de familiarité particulièrement élevé. Cette
constatation ne s'appl ique cependant pas à toutes les usines constituant notre échanti lIon.
35
Bref, bien que le lien entre la RSE et J'attractivité organisationnelle ait déjà fait l'objet de
recherches, peu de recherches expliquent clairement le lien entre ces variables, ainsi que les
variations individuelles possibles quant à J'importance accordée à cet ensemble de pratiques
de gestion. En conséquence, il y a un besoin manifeste de poursuivre les recherches dans ce
domaine afin d'éclaircir ces relations, en s'intéressant, par le fait même, à la perception des
individus qui sont présentement à la recherche d'un emploi.
La question de recherche centrale vise à évaluer l'impact des divers éléments composant une
stratégie corporative appuyée sur l'image d'une responsabilité sociale quant à la capacité
d'attraction auprès d'employés. Cependant, sans qu'une sous-question porte explicitement sur
cette préoccupation, cette recherche devrait également permettre de répondre au comment et
pourquoi les employés sont attirés par les entreprises responsables socialement, en retraçant
les caractéristiques organisationnelles, interactionnelles et individuelles qui ont influencé leur
décision d'emploi ainsi que le rôle qu'elles ont àjouer dans cette relation.
Avec cette étude, nous cherchons à identifier si la responsabilité sociale des entreprises et
plus particulièrement les cinq dimensions qui la composent, améliore la réputation de
l'organisation et, par le fait même, son attractivité. Nous entendons également découvrir si
une de ces dimensions est plus importante pour un candidat potentiel et, si tel est le cas,
36
Bien que la responsabilité sociale des entreprises ait été l'objet de beaucoup d'intérêt de la
pali des chercheurs, peu d'études se sont attardées à ce qui se passe réellement sur le terrain.
Pourtant, on peut soupçonner que le comportement réel des entreprises et des gestionnaires
va bien souvent à l'opposé de ce que prévoient les thèses de la responsabilité sociale
(Gendron 2000). Conséquemment, s'attarder à analyser et comprendre la RSE et ses
répercussions auprès d'une entreprise québécoise et de ses employés est approprié et
innovateur.
De plus, la plupart des études portant sur cette question ont été effectuées aux États-Unis. Or,
non seulement la responsabilité sociale des entreprises est-elle un construit qui ne cesse
d'évoluer (Carroll, 1979), mais elle se concrétise par des pratiques institutionnellement
ancrées, et est donc largement influencée par de multiples facteurs tels que le gouvernement
en place, les priorités organisationnelles ainsi que la vision du rôle des entreprises. 11 est donc
judicieux de s'intéresser spécifiquement à la perception des individus au Québec.
Ainsi, une meilleure compréhension de la part des gestionnaires de la relation entre les
composantes d'une stratégie corporative appuyée sur une responsabilité sociale et
l'attractivité générée chez les candidats potentiels pourrait aider à justifier, d'une part, les
37
D'autre part, les gestionnaires et les praticiens seront en mesure de déterminer si le concept
de RSE peut être un facteur d'attraction pour l'ensemble des candidats ou, si au contraire, des
variations d'ordre individuel, telles que la situation économique ou le type de poste envisagé
viennent altérer l'importance accordée à la responsabilité sociale de l'entreprise dans un
processus de recherche d'emploi. Ces résultats donneront lieu à une utilisation plus efficiente
de cette stratégie d'attractivité, donc à une meilleure allocation des ressources.
Bref, nous pouvons présumer que nos résultats bénéficieront aux gestionnaires et praticiens
en précisant le lien qui unit la RSE et l'attractivité organisationnelle et en définissant les
situations propices à la mise en pratique d'une telle stratégie de recrutement.
De plus, les résultats de cette mise à l'épreuve du modèle théorique de Turban et Greening
(1997), largement adopté pour expliquer la relation entre la RSE et la capacité d'attraction
38
CADRE MÉTHODOLOGIQUE
feraient que la réalité est telle qu'elle est et qu'elle fonctionne comme elle fonctionne»
(Cossette, 2004, p. 23).
Afin de mener à bien cette recherche, une approche permettant de relever les opinions, les
croyances ainsi que les valeurs a été de mise. Pour cette raison, l'entrevue semi-dirigée
sembla être la méthode appropriée. En fait, « l'entrevue de recherche est une interaction
limitée et spécialisée, conduite dans un but spécifique et centrée sur un sujet particulier»
(DesJauriers, 1991, p. 33) visant à « discerner et rapporter comment les gens construisent
leur réalité selon la façon dont ils en parlent» (Frake, 1962, cité dans Patton, 1987, p.IS1,
traduction libre). En d'autres termes, cet échange verbal contribue à la production d'un savoir
socialement construit afin de paltager des connaissances pour mieux dégager une
compréhension (Savoie-Zaic, 2003). De plus, l'entrevue semi-dirigée s'aligne parfaitement à
la problématique de nature exploratoire puisque par l'entremise de rencontres avec les
individus dans leur contexte, elle donne lieu à une grande richesse d'information. En effet,
notre objectif est non seulement d'arriver à déterminer si la mise en œuvre d'une stratégie de
recrutement basée sur la responsabilisation sociale de l'entreprise a été efficace donc a
produit les effets escomptés, mais aussi à comprendre les raisons de son efficacité (Rossi et
al., 2004).
Cependant, certains documents sur l'entreprise et ses dimensions managériales, telles que sa
vision, sa mission, ses valeurs et ses stratégies de recrutement ont été consultés avant les
entrevues. Cette analyse préalable a permis de mieux connaître l'organisation au sein de
laquelle s'est effectuée la recherche tout en minimisant les informations à recueillir auprès
41
des participants. Ces données ont été pertinentes pour saisir les pratiques de responsabilité
sociale et les motivations de cette entreprise, donc ont facilité J'analyse subséquente.
La recherche a eu lieu au sein de l'entreprise Cascades, en partie pour des raisons de facilité
d'accès puisque son vice-président aux communications et affaires publiques, Monsieur
Hubert Bolduc, siège au comité de direction de la Chaire de responsabilité sociale et de
développement durable de J'UQAM à laquelle la chercheure est rattachée. Ce choix va
cependant au-delà des motifs de commodité, puisque Cascades est une entreprise qui se
préoccupe particulièrement des impacts qu'elle peut générer sur son environnement en raison
de la nature de ses activités (fabrication, transformation et commercialisation de produits
d'emballage, de papiers tissu et de papiers fins composés principalement de fibres recyclées).
Cette préoccupation est d'ailleurs traduite dans le bilan de performance sociale de Cascades,
ainsi que dans son énoncé de vision de la responsabilité sociale, deux documents détaillés
aisément accessibles sur le site web corporatif.
Malgré le fait que Cascades gère de mu Itiples usines en Amériques du Nord, en Europe et en
Asie, où la réglementation concernant le respect de l'environnement et des travailleurs est
très variable, cette entreprise s'engage à aller bien au-delà des normes minimales exigées par
ces gouvernements respectifs. En d'autres termes, pour Cascades, la promotion et le
développement de la qualité de vie tant des employés que des communautés où évoluent ses
entreprises sont au cœur de ses préoccupations. Ceci peut se traduire, par exemple, par la
construction d'écoles et d'hôpitaux, la mise en place de pratiques et politiques qui favorisent
la conciliation travail-famille, ainsi que des investissements importants dans la recherche et le
développement afin d'élargir la gamme de produits écologiques offerte. Consciente du
dilemme entre la nouvelle réalité concurrentielle versus l'importance de la sauvegarde des
ressources renouvelables ou non renouvelables, cette entreprise a développé un savoir-faire
qui rend possible l'adéquation entre les impératifs économiques et une gestion socialement
responsable. Autrement dit, cette organisation perçoit la responsabiI ité sociale des entreprises
42
comme un devoir qui, maJgré les coûts, engendre à long terme une production à valeur
ajoutée.
Souvent citée comme une pionnière par les autres entreprises dans ce secteur d'activité,
Cascades représente un cas extrême. En fait, cet échantillon intentionnel non probabiliste
était intéressant en raison de la richesse des informations qu'il risquait de contenir. D'une
part, l'accès à certaines données stratégiques, comme le rapport financier trimestriel ou le
bilan social, a été facilité puisque la personne-ressource est une connaissance. D'autre part, la
lecture de documents corporatifs a confirmé la présence d'une culture organisationnelle basée
sur l'éthique et donc de pratiques socialement responsables qui s'avèrent très prometteuses
sur le plan de l'analyse. Comme le souligne Beaud (2003, p. 212), « le choix de la technique
de sélection de l'échantillon, en particulier, ne saurait être dissocié du questionnement qui est
à l'origine de la recherche, de la population étudiée et des diverses contraintes avec lesquelles
le chercheur doit composer (... ) » Bref, ce choix de terrain semblait propice afin de pouvoir
répondre adéquatement à la question de recherche.
Le choix des répondants individuels a été fait par la personne ressource chez Cascades.
Cependant, certains éléments ont été pris en compte. D'une part, pour des raisons logistiques
propres au terrain de recherche, les candidats sélectionnés étaient les derniers comptabilisés
sur les relevés de paie et devaient être à J'embauche de Cascades depuis plus de trois mois,
donc suite à leur probation. D'autre part, les candidats devaient provenir de différentes
usines, appal1enant toutes cependant à la compagnie. Finalement, le nombre de candidats
rencontrés par établissement était proportionnel au nombre total d'employés au sein de
l'entreprise. Aucune sélection n'a été cependant faite sur la nature ou le type d'emploi
occupés par les individus. De plus, la taille de l'échantillon (dix-neuf employés) a été
déterminée par la personne ressource et n'est donc pas en lien avec le principe de saturation
des données que l'on observe pour ce type de recherche.
43
Sur une période de trois semaines, dix-neuf employés récemment embauchés ont été
rencontrés. La durée des entretiens était approximativement d'une trentaine de minutes. Avec
l'accord des participants (sauf une personne) les entrevues ont été enregistrées afin de
pouvoir recueillir le plus de renseignements possibles. Ainsi, à l'aide de notes prises à la
main et d'une transcription des enregistrements, nous avons obtenu un texte plus complet
pour chaque intervenant. La transcription partielle, qui propose de noter les extraits les plus
pertinents en fonction de la recherche en tenant compte bien sûr de la conversation intégrale,
a été préférée à une transcription complète, donc un verbatim, puisqu'elle est plus efficace en
termes de temps et évite un éloignement potentiel du sujet principal. Cependant, le temps et
la disponibilité des ressources ne nous ont pas permis de faire deux entrevues afin de faire
valider le résumé des discours auprès des employés. Cette démarche supplémentaire aurait pu
donner lieu à une plus grande validité des données.
D'un point de vue déontologique, certains aspects logistiques ont été respectés. La production
de documents écrits concernant le consentement des participants, la confidentialité des
données recueillies ainsi que la permission de publication des résultats ont été complétés afin
de respecter les normes de l'université.
Le protocole d'entretien qui a été utilisé pour l'ensemble des répondants se trouve en
appendice A. Voici la structure de ce protocole et la justification des questions posées.
• Quels sont les facteurs ayant amené l'employé à postuler chez Cascades?
• Est-ce que la réputation de l'entreprise a été un facteur décisif pour postuler pour
Cascades?
Ces questions avaient pour objectif, d'une part, de confirmer les deux facteurs recensés dans
la 1ittérature sur l'attractivité, soit les pol itiques et pratiques de gestion des ressources
humaines (salaire, conditions de travail, possibilités d'avancement, etc.) ainsi que la
réputation de l'organisation. D'autre part, de valider la relation soumise par Turban et
Greening (l997) entre la perception positive d'une réputation organisationnelle de
l'entreprise due à sa responsabilité sociale et l'attractivité organisationnelle pour un candidat.
44
Cette question était directement liée aux dimensions de la responsabilité sociale des
entreprises. En effet, nous n'avons pas utilisé ce terme puisqu'il aurait été hasardeux de
supposer que l'ensemble des participants rencontrés avaient une définition claire et concise
de ce concept, donc en connaissent les dimensions. Bref, cette question nous permettait non
seulement d'établir les composantes d'une réputation attrayante, comme le suggéraient
Thomas et Wise (1999), mais aussi de comparer l' impoliance accordée à chacune d'elles.
L'élaboration de ces questions reposait sur la jittérature scientifique, qui note l'importance de
diffuser de J'information sur la responsabilité sociale. En effet, tel que mentionné
précédemment, le candidat construit sa perception de Ja réputation de l'entreprise, entre
autres, par l'entremise des médias. Mais encore, plusieurs études ont démontré l'influence
déterminante des supports de diffusion de la réputation de J'entreprise quant à l'attractivité
selon la théorie de la signalisation.
Cette question référait aux facteurs pouvant venir tempérer la relation entre la réputation de
l'organ isation et son attractivité, soit le contexte socio-économique, l'expérience de travail et
Je type de poste offeri. Elle pouvait aussi susciter des réponses selon les valeurs et intérêts des
candidats potentiels, exigences mentionnées par Backhaus et ses collègues (2002) pour
enrichir les connaissances actuelles. Évidemment, cette question était liée aux
caractéristiques ind ividuelles et interactionnelles.
45
Pour chacune des questions abordées précédemment, le candidat était appelé à justifier sa
réponse. Ce faisant, J'information recueillie permettrait de tirer des conclusions et d'expliquer
plus en détails les résultats obtenus.
L'analyse des données s'est faite en deux étapes. Dans un premier temps, la transcription de
l'entretien ainsi que des perceptions de la chercheure s'est effectuée rapidement après chaque
rencontre afin de ne pas oublier de petits détails.
Dans un deuxième temps, nous avons analysé le discours à l'aide d'une matrice qui a été
élaborée autour des grands concepts abordés dans cette recherche. Elle contient, entre autres,
des termes sur le recrutement, les stratégies corporatives, l'attractivité et la responsabilité
sociale des entreprises. Quelques ajouts ont aussi été faits afin de pouvoir spécifier des
caractéristiques associées aux personnes, au temps et au contexte. Cette précision était
nécessaire suite à l'analyse de la littérature, qui dénotait l'importance de ces facteurs pour
comprendre le phénomène de l'attractivité. Notons également que l'utilisation d'une matrice
a eu plusieurs avantages. Par exemple, elle a facilité la classification des données avec ses
catégories prédéterminées tout en permettant de structurer la pensée des individus rencontrés.
Évidemment, ces analyses ont pour principaJ but de répondre à la question de recherche mais
aussi à la présentation des résultats et de recommandations pour les chercheurs et les gens
d'affaires.
4.4.1 Fidélité
en fonction des circonstances ou des évènements qu'il aura vécus. La réplicabilité est donc
possible malgré la nature qualitative de la recherche dont le principal instrument de mesure,
l'individu, s'impose avec toute sa subjectivité.
Le but de la recherche a été exposé aux répondants dès le début puisque la nature même du
sujet ne requiert pas une discrétion absolue. Leurs perceptions quant à l'attractivité de leur
entreprise socialement responsable ne peuvent pas compromettre leur emploi. Cette ouverture
envers les répondants semble plus éthique et les prédispose à une relation d'échange basée
sur la confiance. Une teJJe transparence a été envisagée pour faciliter la discussion.
4.4.2 Validité
Cette étude, que l'on peut qualifier de processuelle, donc qui s'intéresse au « comment ça se
passe », tire sa puissance explicative de « la cohérence de la structure des relations entre les
composantes du cas, ainsi que sur la cohérence des variations entre ces relations dans le
temps» (Contandriopoulous et al., 1990, p. 37). Dans ce cas-ci, la validité interne implique
que l'attractivité des entreprises soit explicable par la mise en place de pratiques de gestion
socialement responsables reliées au développement durable, à la qualité des produits et
services offerts, aux relations avec la communauté, les employés ainsi que les minorités et les
femmes.
Les limites de la méthode, donc de l'entrevue semi-dirigée, sont principalement en lien avec
le répondant qui peut être tenté de répondre en fonction de ce qu'il croit intéressant pour le
chercheur. D'autant plus que le sujet de l'étude a été exposé dès le début de l'entretien. Quant
à la chercheure, elle peut perdre son esprit critique en acceptant sans questionnement
l'ensemble du discours ou en mettant l'accent inconsciemment sur les éléments les plus
pertinents à sa recherche. Il faut noter toutefois, qu'en étant conscient des dangers présents, le
chercheur devient plus critique par rapport à son objectivité et aux difficultés pouvant être
rencontrées. Cette conscientisation s'avère d'autant plus essentielle dans ce cas puisque
l'utilisation de données primaires rend le chercheur juge et pal1ie dans le choix de ses
méthodes, de l'échantillon, du terrain et des techniques d'analyses.
Les erreurs reliées à la transcription des données ont été minimisées par une transcription
soignée. De plus, les enregistrements des conversations pouvaient être vérifiés pour fin de
validation.
L'étude d'une seule entreprise limite bien sûr la généralisation possible des résultats. En fait,
l'échanti lion, qui n'est pas probabiliste, donc pas représentatif, vient circonscrire les résultats
obtenus. Toutefois, puisque l'objectif de cette recherche est de comprendre et non de produire
un savoir ou des connaissances théoriques, cet échantillon d'intérêt semble tout à fait indiqué.
La validité interne occupe dès lors une plus grande place que la validité externe.
Finalement, une triangulation aurait été fructueuse pour réduire les biais possibles. En fait,
l'étude de quelques données quantitatives comme par exemple les rapports d'embauche, les
grilles d'entrevue, les notes du service des ressources humaines quant aux objectifs visés
pour une période de temps bien précise auraient pu apporter des précisions ou des pistes de
réflexion. Malheureusement, ces documents n'étaient pas disponibles.
CHAPITRE 5
Dans ce chapitre, nous allons, dans un premier temps, faire état des différents points de vue,
recensés à l'aide des entrevues, en ce qui a trait à l'attractivité organisationnelle. Plus
précisément, nous tenterons de valider les principaux facteurs d'attraction ainsi que
J'importance accordée à la réputation de l'entreprise lors du processus de recherche d'emploi,
donc dans le processus de sélection d'employeurs potentiels. Nous enchaînerons avec une
présentation des motivations poussant un candidat à rechercher une réputation corporative
positive ainsi que les limites concrètes de la diffusion d'information sur la performance
sociale, environnementale et économique de l'entreprise dans un contexte d'attractivité. Ces
analyses nous permettront de répondre à notre question de recherche et de vérifier nos
hypothèses: Est-ce que la réputation de l'entreprise a été un facteur déterminant dans le
choix de postuler pour cette dern ière? Quelles sont les composantes de la réputation
organ isationnelle qui influencent l'attractivité des candidats potentiels? Quels sont les
éléments de la responsabilité sociale des entreprises qui sont les plus susceptibles d'avoir
attiré les candidats potentiels? Est-ce que l'information diffusée sur la responsabilité sociale
de J'entreprise par l'entremise de différents médias a influencé l'attractivité des candidats
potentiels?
la performance organisationnelle et la rétention. Cette section des résultats fera la lumière sur
le « comment» et le « pourquoi» les candidats potentiels sont attirés par les entreprises
responsables socialement, en retraçant les caractéristiques organisationnelles,
interactionnelles et individuelles qui ont influencé leur décision d'emploi ainsi que le rôle
qu'elles ont àjouer dans cette relation.
Nos résultats d'enquête montrent que l'attractivité d'une organisation auprès des candidats
est dans un premier temps reliée aux pratiques et politiques de gestion des ressources
humaines. Principalement en ce qui a trait à la description du poste offert et aux conditions de
travail accordées, qu'elles soient monétaires ou non. Pour nos répondants, ces éléments
semblent déterminants lors de la décision de postuler pour une entreprise.
Le type de poste offert, donc la description de tâche, est le facteur le plus important pour la
plupart des candidats à la recherche d'un emploi puisqu'ils désirent œuvrer dans leur
domaine de spécialisation et mettre à profit leurs compétences. Ils sont attirés par un poste
qui correspond à leurs aspirations professionnelles.
« J'ai décidé de postuler lorsque j'ai vu l'offre d'emploi. C'est quelque chose qui
correspondait à mon champ de compétences. J'étais donc intéressé parce que le
domaine m'intéressait. C'était un secteur d'activité nouveau donc semblait pouvoir
m'apporter des nouveaux défis. Je recherchais un certain challenge. » (Entrevue 1).
« En fait, la compagnie n'était pas affichée sur l'offre d'emploi car c'était via une
firme de recrutement. Au départ, je ne savais pas que c'était pour Cascades, c'était
vraiment le poste comme tel qui m'intéressait. Surtout que je n'aimais plus ce que je
faisais. J'ai su que c'était chez Cascades seulement quand ils ont transmis mon
dossier» (Entrevue 18).
50
Quant aux conditions de travail, elles sont aussi source d'intérêt pour les candidats.
D'ailleurs, les entrevues permettent de déceler l'attention portée à la rémunération fixe et
variable. En effet, le salaire ainsi que les avantages sociaux concurrentiels (vacances,
assurances, partage au profit, etc.) dans ce secteur d'activité favorisent une perception de
sécurité d'emploi très attrayante.
« Pour moi, c'est une bonne compagnie, le salaire est bien, en tant qu'assurance c'est
bien aussi» (Entrevue 6).
« Un contact qui m'a dit que c'était une bonne entreprise. Bon salaire et bons
avantages sociaux. C'est rassurant! » (Entrevue Il).
Toutefois, les employés rencontrés ont aussi souligné leur intérêt pour les conditions de
travail non-monétaires. Autrement dit, le climat et les relations de travail, les opportunités
d'engagement ou de socialisation et la reconnaissance sont tous des éléments à valeur ajoutée
recherchés par les candidats.
« Mon conjoint travaille chez Cascades depuis 5 ans. II a commencé à Briky ville et
les relations d'équipe et de travail étaient très bien dans les bureaux. (... ) Si je
regarde comme mon conjoint, son patron ne le fait pas sentir qu'il est supérieur à lui.
J'avais entendu juste des bons commentaires de l'entreprise» (Entrevue] 1).
<de connaissais l'ambiance générale car j'avais déjà visité les usines de Kinsey Falls
et mon père y travaille depuis 17-18 ans. (.. ) Ils sont forts sur le travail d'équipe, ça
fait partie de leur philosophie. Ça permet de mieux connaître mes collègues, d'avoir
un lien un peu plus personnel. On ne parle pas toujours de travail. Par exemple, qui
va gagner les élections ce soir? » (Entrevue] 2).
51
Dans un deuxième temps, les répondants confirment que leur attraction pour l'organisation
est en lien avec la réputation de l'entreprise. En effet, les candidats potentiels considèrent que
la réputation de l'entreprise devient une plus value quand cette dernière est positive. En
d'autres termes, la perception favorable d'un candidat quant à Ja réputation de l'organisation
peut J'inciter à postuler au sein d'une entreprise plutôt qu'une autre.
« Je ne dirais pas que ça l'a été le facteur décisif, mais ça été un facteur important,
une raison de plus de souhaiter d'avoir l'emploi» (Entrevue 2).
« Ça l'a joué. Parce que le poste m'intéresse mais que fait la compagnie? En fait,
c'est une question de principe. Si ça J'avait été, par exemple, Imperial Tobacco, je
n'aurais pas appJiqué» (Entrevue 8).
D'ailleurs, pour trois individus, la réputation de l'organisation ont été la principale variable
qui les a amenés à s'intéresser à l'organisation, donc à postuler pour cette dernière.
« C'est sûr que j'ai étudié dans le domaine de l'environnement donc Cascades est
une référence pour cet aspect. J'aime cette image d'entreprise socialement
responsable et axée sur l'environnement. À prime à bord, c'est ce qui m'a intéressé,
bien sûr d'autres facteurs se sont ensuite ajoutés. En fait le premier contact, le
premier intérêt est venu de ça» (Entrevue 5).
Cependant, ces affirmations permettent de constater que les dimensions les plus prisées de la
réputation de l'entreprise varient d'un individu à l'autre. En fait, la perception d'un
52
employeur exemplaire, donc qui respecte ses employés, est sans contredit la dimension la
plus appréciée puisque treize des dix-neuf individus rencontrés en ont fait mention. Ce
respect s'illustre principalement par une gestion des ressources humaines qui préconise la
conciliation travail-famille et qui favorise le bien-être physique et psychologique des
employés.
« Parce que, moi personnellement, je pense qu'il y a l'aspect administratif donc que
tu dois faire ton travail, ta description de tâche, c'est pour sa que l'on te paie mais il y
a aussi l'aspect humain de l'entreprise où tu sais que l'entreprise te respecte et ça se
voit à travers toutes les activités que l'entreprise organise, et pas seulement toi en tant
qu'employé» (Entrevue 1).
« Je pense que les gens savent par contre de façon générale que Cascades est une
bonne entreprise. Surtout qu'elle est sOltie dans les 50 meilleurs employeurs au
Canada dans la revue l'Actualité. Cascades a une très bonne réputation
organisationnelle à l'externe. Donc ça incite les gens à venir postuler» (Entrevue
18).
« J'ai postulé aussi car c'est une grosse entreprise. J'ai travaillé pour d'autres petites
entreprises et ça finit par fermer. En étant pour Cascades, je me sens plus sécurisé»
(Entrevue] 3).
« Bonne compagnie, bien organisée, qui fait des profits. Ça représente une bonne
sécurité d'emploi» (Entrevue] 1).
« Dans une PME, comme mon ancienne entreprise, les conditions de travail sont
moins intéressantes, ils sont moins organisés, ils n'offrent pas les mêmes salaires et
53
ce n'est pas une compagnie qui pouvait m'offrir d'autres 0ppoliunités à l'interne
(Entrevue 18).
« Qu'est-ce qu'elle préconise? Est-elle attirée seulement par les profits ou elle prend
soin de ses employés? Regarde-elle aussi côté communauté? Fait-elle sa part pour
l'environnement en recyclant ?» (Entrevue 1).
«C'est important pour moi surtout que Cascades est dans le domaine du papier et
qu'elle fait un effort dans ce sens là pour être une entreprise verte. L'implication est
aussi très importante autant par des dons que par sa présence dans la communauté.
Par exemple, plusieurs activités sont organisées pour Le Relais pour la vie, la
campagne Cenlraide, etc. Les organismes qu'il aide sont diversifiés» (Entrevue 4).
Finalement, l'image d'une entreprise familiale s'est aussi révélée être source d'attractivité.
Pour cinq personnes, ces composantes sont associées à un style de gestion particulier. En
effet, les individus rencontrés prêtaient à une entreprise familiale une absence de hiérarchie,
une gestion de type porte ouverte, donc une meilleure communication. De plus, il semble y
avoir une certaine fierté à travailler pour une entreprise familiale.
« Le fait que ce soit une entreprise familiale, ça m'a beaucoup plu. En fait, ils disent
chez Cascades, qu'il n'y a pas beaucoup de respect pour la hiérarchie. Ce n'est pas
tellement important. Je pense que c'est de ramener tout le monde à un niveau assez
égal pour que tout le monde soit à l'aise de se parler de ce qui ne va pas, ça facilite la
communication» (Entrevue 2).
« Les gens sont fiers de travai 11er pour Cascades car c'est une entreprise québécoise
mais surtout une entreprise familiale. C'est aussi une entreprise qui a un rayonnement
dans notre quotidien. Alors on dit que c'est ici, c'est chez-nous» (Entrevue 15).
54
En dernier lieu, cinq employés ont simplement choisi l'entreprise à cause de sa proximité du
domicile. La plupart ici justifient un tel choix par la conciliation travail-famille qui devient
plus facile lorsque moins de temps est consacré au déplacement. lis recherchent ainsi une
meilleure qualité de vie.
« Ce n'est pas loin de chez nous premièrement. C'est parce que j'ai du temps comme
ça à consacrer à ma famille. Je n'ai pas une demi-heure d'auto à faire pour me rendre
au travail. J'y vais à pied ou en bicycle. La conciliation travail-famille est plus
facile» (Entrevue 6).
« Moi je travaillais à Ville Lasalle alors j'avais le trafic, les ponts. Quand on m'a
offert Je poste ici, qui est .l'endroit où je demeure maintenant, ça l'a facilité ma vie.
C'était la première raison» (Entrevue 19).
Bref, les réponses de nos répondants illustrent que les facteurs expliquant l'attractivité des
candidats pour une entreprise sont variables. Cependant, la plupart des individus rencontrés
ont noté l'importance de la description de tâche comme élément déterminant dans la décision
de postuler pour une entreprise. Cette décision peut être ensuite justifiée par la présence
d'une bonne réputation organisationnelle. Toutefois, cette dernière ne représente qu'une
valeur ajoutée et ne semble pas par elle-même posséder un potentiel d'attractivité élevé.
55
D'autant plus que les composantes de cette réputation organisationnelle sont multiples et
perçues différemment selon le candidat.
Soulignons par contre que bien que la réputation organisationnelle soit un facteur
d'attractivité parmi d'autres, elle n'est pas négligeable pour autant et doit faire l'objet d'une
analyse plus poussée afin d'en saisir les modalités. La prochaine section permettra, dans un
premier temps, de cibler les motivations sous-jacentes associées à la recherche d'une
réputation corporative positive chez un candidat. Dans un deuxième temps, le lien qui existe
entre la familiarité d'un candidat envers une entreprise et sa perception de la réputation de
celle-ci sera étudié. Par le fait même, la crédibilité des informations diffusées par l'entreprise
sur sa performance sociale, environnementale et économique expliquera les appréhensions
des candidats, donc des limites de la réputation organisationnelle comme facteur
d'attractivité.
Il ressolt de nos entrevues qu'en dépit du fait que la réputation organisationnelle ne soit pas
Je principal facteur d'attractivité pour un candidat, elle semble tout de même influencer la
décision de postuler auprès d'un employeur. À cet égard, les individus rencontrés ont révélé
plusieurs motivations menant à la recherche d'une entreprise ayant une réputation
organisationnelle enviable en plus d'offrir une description de tâche intéressante et des
conditions de travail concurrentielles.
L'identité sociale
Dans un premier temps, pour la plupart des individus rencontrés, une réputation
organisationnelle positive inspire un sentiment de fierté. En d'autres termes, les candidats
recherchent une entreprise qui est valorisée par les acteurs sociaux, et par les médias,
puisqu'ils modèlent leur conception de soi en fonction du groupe auquel ils appartiennent.
56
« Oui, je suis contente. Je suis fière quand ils passent aux nouvelles ou dans les
journaux, qu'ils présentent leurs initiatives pour l'environnement. Je suis contente
que ce soit ma compagnie qui ait eu cette idée là! » (Entrevue 8).
« Moi j'en suis très fier de ça. Comme la semaine dernière, Monsieur Lemaire a fait
une interview à la radio à l'émission de Christiane Charrette. Quand j'ai su ça, je me
suis empressé d'écouter» (Entrevue, 16).
Dans cet ordre d'idées, certains affirment qu'une entreprise comme Cascades, qui performe
sur le plan social et environnemental, facilite le développement d'un sentiment
d'appartenance généralement défini comme étant «( ... ) ce que ressent un individu
concernant son appartenance à un groupe, à une organisation ou à une institution (... ) »
(Boucher et Morose, ]990, pAI7).
« L'entreprise, Cascades, doit communiquer ses valeurs donc par le fait même ses
initiatives environnementales et sociales, ses objectifs, sa philosophie. Elle va créer
un plus grand sentiment d'appartenance» (Entrevue 5).
«Cascades s'occupe de l'environnement et c'est une compagnie qui nous offre des
produits dans le quotidien. On vit donc un sentiment d'appartenance que j'aime bien.
Alors je trouve ça intéressant. J'ai donc fait une pierre, deux COuPS» (Entrevue 15).
Corollairement, la moitié des personnes interrogées estiment qu'être employés par une
entreprise qui affiche une bonne réputation organisationnelle favorise J'approbation des pairs,
donc de leur famille et leurs amis. Cette acceptation est source de satisfaction chez le
candidat.
« ( ... ) et je trouve ça le fun d'avoir l'approbation des autres sur mon choix»
(Entrevue 7).
« J'aime ça quand je dis au monde que je travaille pour Cascades, ils savent c'est où.
C'est plus ce côté reconnaissance par les autres. On dirait que quand je dis Cascades,
ça fait un déclic dans leur tête. Ça veut dire pour eux que j'ai une bonne job»
(Entrevue 12).
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Une bonne réputation organisationnelle contribue ainsi à l'attractivité auprès des candidats
qui vivent des retombées positives telles qu'un sentiment de fierté, un sentiment
d'appartenance et l'acceptation de leur choix par les pairs. L'identité sociale permet donc
d'expliquer en partie l'importance accordée à la réputation de l'entreprise.
Les valeurs
Dans un deuxième temps, plus de la moitié des personnes rencontrées ont affirmé
l'importance de travailler pour une entreprise partageant les mêmes valeurs qu'elles. Fait
intéressant, elles ont évoqué la contrepartie de l'industrie du tabac, du pétrole et de
l'armement pour justifier leur position.
« Il faut avoir un fit entre nos valeurs et celles de l'entreprise! .le ne travaillerais pas
par exemple pour une compagnie d'armement. Ça non! .le ne pense pas que j'irais
travailler chez Shell non plus» (Entrevue 5).
« .le pense qu'un moment donné on m'a appelé pour travailler pour une firme de
publicité, mais avant de rappeler j'ai vérifié qui ils étaient. C'était une firme de
publicité, un genre de service à l'externe pour une compagnie de tabac . .le n'ai pas
été. Ça ne correspondait pas à mes valeurs» (Entrevue 14).
« J'ai vraiment besoin d'une adéquation entre mes valeurs et celles de l'entreprise.
Par exemple, je choisis toujours une compagnie dans laquelle je crois. .le veux dire, je
ne travaillerais pas pour Imperial Tobacco » (Entrevue 17).
Or, cette recherche d'une adéquation entre les valeurs des candidats et celles d'une entreprise,
donc du futur employeur, débute par la prise en compte de la réputation organisationnelle.
Effectivement, les candidats soutiennent que la réputation constitue une source d'information
utile pour juger de la concordance entre leurs besoins personnels et émotionnels et ceux de
l'entreprise.
« .le savais juste qu'ils avaient une bonne réputation. Semblait-il qu'ils traitaient bien
leurs gens donc qu'ils s'occupaient de leurs employés et qu'il y avait une vraie
volonté de rendre les employés biens, heureux, en santé, motivés! (... ) Ça c'était
vraiment important pour moi. .le savais que ça me ressemblait. Quand j'ai appliqué,
je m'attendais à ça » (Entrevue 2).
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« Quand j'étais à la recherche d'un emploi, je ne postulais pas tout de suite pour un
poste, j'allais voir le site internet, des press release, pour avoir de l'information sur la
compagnie, sur ce qu'elle faisait. Ça me permettait de mon côté de voir ce qui se
passait. Je connaissais donc leur philosophie corporative. Je veux dire j'étais contente
de voir ça. Je suis vraiment à la recherche d'un fit entre mes valeurs et celles de
l'entreprise» (Entrevue 14).
Bref, les candidats sont à la recherche d'une entreprise qui endosse les mêmes valeurs et
normes qu'eux. Conséquemment, ils sont nombreux à s'attarder à la réputation
organisationnelle de l'entreprise pour val ider cette concordance avant de postuler.
« C'est comme un tout. S'ils font attention à l'environnement, ils font sClrement
attention à leurs employés aussi. C'est comme une chaîne» (Entrevue Il).
« Parce que je me dis que s'ils changent ça, c'est la valeur principale sur laquelle ils
ont construit leur image, leur réputation. Je me dirais que s'ils détruisent ça, ils vont
aussi couper sur les aspects individuels comme le salaire, les avantages, les postes.
S'ils ne commanditent plus personne ça démontrerait qu'ils seraient là juste pour
faire du profit et que le reste ils s'en balancent. Selon moi, ce serait le point de départ
pour dégrader d'autre chose. Pour moi, c'est un gros morceau que Cascades s'occupe
de l'environnement. Les employés c'est comme un autre bloc à côté, s'ils touchent à
ça, ils vont aussi couper des postes et fermer des usines. C'est peut-être radical
comme façon de penser mais c'est mon opinion» (Entrevue 12).
adéquation entre les valeurs de l'individu et celles de l'entreprise et elle donne l'impression
que l'entreprise se préoccupe de ses relations avec les employés.
« Cascades prend soin du village comme l'aréna, la garderie. Cascades paie une
moitié des frais quand les enfants avaient en bas de cinq ans. Ça je le savais déjà.
Aussi, Cascades paie une partie des taxes de la maison. Ils nous ont donné 5000$
pour J'achat et après ils paient les taxes foncières. Ça peut pas être plus concret que
ça! » (Entrevue 6).
« Ah oui! Les gens ici sont tous très conscients du recyclage et de toutes les
méthodes. Ils savent ce que fait l'entreprise; elle fait attention à l'environnement.
J'imagine que pour les gens à l'extérieur c'est pas pareil» (Entrevue 9).
Or, les individus interrogés qui étaient localisés dans plusieurs grandes villes, bien
qu'intéressés par une entreprise considérée comme un bon employeur ou un bon citoyen
corporatif par les différents acteurs tels gue les médias, restent suspicieux quant à la véracité
de l'information donnée.
60
« Je reviens aux rapports de développement durable, c'est bien beau les belles images
et les chiffres mais ce n'est pas concret pour bien du monde. Ce l'est pas à l'intérieur
alors imagine à l'extérieur. Ce n'est pas évident d'évaluer de l'extérieur l'entreprise.
Est-ce du marketing vert ou non? L'image est importante mais ce n'est peut-être pas
la réalité» (Entrevue 5).
« De plus, de sentir que ce n'est pas une mode mais bien une façon de gérer. Les
frères, ça paraît que ce n'est pas parce qu'ils veulent en retirer des bénéfices ou du
crédit, ou profiter des crédits de carbone qui pourraient avoir éventuellement. Ça fait
toute la différence!» (Entrevue 16).
« JI devrait y avoir plus de portes ouvel1es et de visites d'usine. JI faut montrer ce que
l'on fait, le recyclage par exemple. Il faut que les gens voient les initiatives de
l'entreprise. Il faut montrer que c'est vrai, que c'est réel et que ce n'est pas juste un
message. Je pense que les gens de l'externe peuvent douter de nos pratiques et
politiques. En poste, on s'aperçoit mieux des initiatives» (Entrevue 19).
D'autre part, J'information disponible est limitée pour les candidats. En effet, les individus
rencontrés jugent qu'ils ont eu accès à celtaines données mais ils ont été incapables d'évaluer
comment cela se traduit au quotidien. Donc, malgré les efforts de transparence de
l'entreprise, il semble y avoir une perception de clivage entre le discours de l'entreprise et ses
actions, ou du moins une difficulté à distinguer les pratiques de gestion de la réputation et les
faits concrets.
« L'idée que l'on a d'une entreprise de l'extérieur est différente de l'idée que l'on
s'en fait à l'intérieur. C'est-à-dire que si tu vas sur le site de l'entreprise, tu vois les
activités et les implications sociales c'est des choses que l'on te dit mais tu n'as pas
encore eu la chance de vérifier tout cela» (Entrevue 1).
61
« En fait, j'avais de l'information mais celle-ci était limitée. Surtout, je n'étais pas
sûr que c'était vrai. On peut aller sur un site d'une entreprise et personne dirajamais
« on est des écœurants» ou « on traite pas bien nos gens» (Entrevue 2).
« De plus, c'est toujours difficile de l'extérieur de savoir à quel point l'entreprise fait
réellement ce qu'elle dit. Je veux dire, concrètement, qu'est-ce qu'elle fait? C'est
bien beau les grands principes comme dans l'annonce « environnementalité » mais
encore? » (Entrevue 5).
« Parce qu'on s'adresse toujours au public et je pense qu'il faut en donner le plus
possible pour rejoindre le plus de monde. Comme c'est quelque chose dont on peut
être fier, et qui a réellement un impact sur l'ensemble de Ja société, ça peut
conscientiser les gens. À la limite, ça peut sûrement permettre d'aller chercher de
nouveaux clients» (Entrevue 2).
« Oui, ça peut sensibiliser les gens et ça peut être un moyen de se démarquer de ses
compétiteurs. On offre un produit différent, écologique. Ce n'est pas négligeable
ça! » (Entrevue 6).
« Oui c'est sûr! Surtout que la majorité des gens associent usine à pollution. Et
partout où ils sont installés, ils sont jamais loin des quartiers résidentiels. Ils ont
62
intérêt donc à avoir de bonnes relations avec la communauté. Kingsey est l'exemple
parfait! » (Entrevue 18).
Les prochaines sections s'intéressent aux pratiques et politiques de responsabi 1ité sociale des
entreprises et leur potentiel concurrentiel sur le plan de l'attractivité. Nous nous attarderons
aux caractéristiques individuel.les qui peuvent influencer l'importance accordée au concept de
responsabilité sociale de l'entreprise. Nous positionnerons aussi ce concept sur un horizon
temporel, c'est-à-dire que nous considèrerons son évolution vraisemblable au cours des
prochaines années. Finalement, nous nous attarderons aux autres retombées
organisationnelles reliées à une bonne performance sociale et aux autres avantages
concurrentiels qui en découlent.
63
Bien que les personnes interrogées ne soient pas en mesure de définir clairement le concept
de responsabilité sociale des entreprises, donc bien qu'il y ait absence d'un cadre intégrateur,
nos répondants mentionnent les différentes composantes du concept, soit la gestion des
ressources humaines, les relations avec la communauté et le respect de l'environnement
comme éléments composant une bonne réputation organisationnelle.
« J'ai vécu dans des régions isolées, souvent mono-industrielles. Donc, je pense que
c'est extrêmement important que le principal employeur s'implique au sein de la
communauté, ce que Cascades fait. D'autant plus qu'ils peuvent amener un message
positif en ce qui a trait au développement durable, à l'environnement. Si c'était des
pollueurs, ça ne serait pas bon! De toute façon, je pense que les entreprises ont un
rôle social à assumer. Les gens sont là parce qu'il y a une entreprise et l'entreprise
peut faire des profits parce qu' i1y a des gens. Je pense que c'est juste un retour des
choses, un juste équilibre» (Entrevue 16).
« (... ) ça peut être possible et souhaitable de produire des biens en ayant des
procédés qui sont respectueux de l'environnement. Plus que juste récupérer notre
papier et nos cannettes. Par exemple, Cascades utilise du papier recyclé donc ça n'a
rien à voir avec le bois qui est d'ailleurs une industrie en crise présentement. »
(Entrevue 2).
Or, comme mentionné précédemment, bien que la réputation organisationnelle ne soit pas le
facteur déterminant dans un processus de recherche d'emploi mais bien une valeur ajoutée, il
reste que cette dernière joue un rôle appréciable lorsque vient le temps de choisir entre deux
entreprises qui offrent les mêmes conditions de travail par exemple. Principalement lorsque
cette réputation fait référence au respect de l'environnement, un des axes du concept de
responsabilité sociale des entreprises.
64
« Supposons que j'aurais eu la même offre d'emploi chez Cascades et chez Bell.
Cascades aurait eu un plus pour le fait qu'elle s'occupe de l'environnement»
(Entrevue 8).
« Je pense que ça peut être un plus. Ce n'est sûrement pas la raison principale mais
c'est un plus. Disons qu'entre deux entreprises qui offrent les mêmes conditions de
travail, je pense que les gens choisiraient celle qui est verte» (Entrevue 17).
Il semble donc que la responsabilité sociale, par l'entremise de I.a réputation de l'entreprise,
puisse être un facteur d'attractivité chez les candidats potentiels surtout lorsque ceux-ci
doivent trancher entre deux employeurs. Cependant, au cours du processus de recherche
d'emploi, les candidats potentiels avancent qu'ils n'accepteraient pas un salaire moindre ou
des conditions de travail moins avantageuses en contre partie d'une entreprise socialement
responsable.
«Voilà! Ça devient un critère important. Je ne dirais pas que c'est le premier. Par
exemple, si entre deux employeurs il y en a un gui paie deux fois moins que l'autre,
même si elle socialement responsable je ne suis pas sûr que je vais accepter l'offre»
(Entrevue 16).
Ces affirmations soulignent, encore une fois, l'impOJ1anCe accordée par les candidats
potentiels à la gestion des ressources humaines gui est en fait une composante du concept de
responsabilité sociale des entreprises. Rappelons gue treize individus interrogés sur dix-neuf
accordent une attention particulière aux aspects relevant de la gestion des ressources
humaines, comme les relations et les conditions de travail. En d'autres termes, l'attractivité
du concept de RSE semble reposer en grande partie sur cet aspect même si les candidats eux
mêmes n'associent pas une gestion efficiente des ressources humaines à une
responsabilisation sociale.
65
Le contexte socio-économique
Une analyse complémentaire nous permet de constater que J'attention pOltée à la
responsabilité sociale des entreprises dans un processus de recherche d'emploi dépend des
contraintes personnelles propres aux candidats. En d'autres termes, les opportunités
d'emplois reliées aux programmes d'études complétés ainsi qu'à la prospérité économique de
la province, donc du marché de l'emploi, et la situation financière du candidat lui-même,
influencent la façon dont il établit ses critères d'attraction.
« Mon frère est camionneur, moi je travaille en usine (... ). On est au bas de l'échelle,
on a pas la liberté de choisir. Ça dépend bien plus des ouvertures de postes. Si
j'attends juste une usine qui fait du recyclage, je vais peut-être bien attendre
longtemps. Il y a d'autres facteurs bien plus importants. Tu n'as pas le choix.
(Entrevue 13).
« Je veux dire, on ne crève pas de faim ici, des emplois il y en a. Je vous dirais que si
c'était le seul emploi disponible, j'accepterais parce qu'il faut vivre. J'vIais dans le
moment, il y a plusieurs opportunités. Surtout que le marché semble être à l'employé
depuis quelques années. En fait, je pense que l'importance accordée à cet aspect
dépend beaucoup de la disponibilité des emplois, des possibilités de chacun»
(Entrevue 5).
« Quand on est en recherche d'emploi depuis des mois, on ne peut pas se limiter à
choisir une entreprise verte. Il faut payer les comptes. On a des obligations
financières! » (Entrevue 14).
Bref, la responsabilité sociale semble être un facteur d'attraction lorsque les candidats
potentiels ont plusieurs opportunités ou possibilités sur le marché du travail. Le contexte
socio-économique devient ainsi une variable modératrice importante dans la compréhension
du potentiel d'attraction de ces pratiques.
66
« Oui! Les jeunes le sont déjà sensibilisés. On dirait que c'est ceux qui étaient là
avant ne le sont pas. Moi je trouve que les jeunes le sont plus que nous. Justement
hier je faisais couler l'eau et je faisais autre chose en même temps et ma fille m'a
chicané, elle m'a dit que je gaspillais de l'eau. Elle avait raison. J'ai arrêté J'eau. Je
suis contente de voir qu'eux sont conscientisés. L'école leur montre» (Entrevue 6).
Alors que pour d'autres, bien qu'ils assument que les jeunes soient plus sensibilisés, la
responsabilité sociale de l'entreprise pourrait susciter l'intérêt d'une clientèle plus vaste.
« Peu importe la catégorie d'âge. Mais il faudrait faire un effort particulier pour les
jeunes. Je pense que Monsieur, Madame tout le monde à Chicoutimi qui ont soixante
ans, ne savent pas ou ne s'intéressent pas. Tandis que les jeunes qui sortent du cégep
seraient plus réceptifs. Ce serait plus dans leurs champs d'intérêt» (Entrevue 14).
« Je pense que plus ça va aller, plus les gens vont accorder de l' impoltance à
l'environnement. Ça va donc prendre de plus en plus de place. Ça ne sera pas le
premier critère mais ça'jouera plus. Autant pour les jeunes que pour les vieux»
(Entrevue 18).
« L'environnement ça l'a pas d'âge, mais les jeunes sont plus sensibilisés à cause de
l'éducation. Par contre, il faut s'adresser à tous le monde car de plus en plus
l'environnement est important pour tous le monde» (Entrevue 19).
Les avis sont donc paltagés quant à la réceptivité et l'intérêt des candidats potentiels envers
une entreprise socialement responsable.
67
Pour plus de la moitié des répondants, les entreprises socialement responsables devraient
poursuivre leurs efforts de communication. En effet, bien que cet élément n'ait pas occupé
une place prépondérante dans leur recherche initiale d'emploi, les individus mentionnent
qu'ils sont maintenant sensibilisés au concept de responsabilité sociale et ils apprécient ses
répercussions tant au niveau professionnel que personnel.
« Parce qu'une fois que tu as goûté, tu ne peux plus t'en passer! Le respect de
l'individu, le dialogue, la sincérité, la transparence entre les collègues mais aussi
venant de la haute direction c'est rare (... ). Vraiment, les relations avec les employés
c'est très important et je ne pourrais pas travailler pour une entreprise qui ne respecte
pas ses employés. Bref, je suis plus sensibilisée à ces éléments qu'avant et c'est
devenu une priorité» (Entrevue 3).
«Je trouve que c'est impoltant qu'une compagnie s'implique socialement. On reste
pas dans l'idée qu'on ajuste un travail. (... ). C'est une source de motivation de vivre
ça quotidiennement au travail. Personnellement,je trouve ça difficile le soir de mettre
ça de côté et de dire qu'on applique plus ces principes. Ça se répercute donc à
l'extérieur du bureau» (Entrevue 12).
De ce fait, la plupart des personnes rencontrées ont affirmé qu'elles rechercheraient une
entreprise socialement responsable dans un futur contexte de recherche d'emploi, en partie à
cause de leur expérience au sein de Cascades. En d'autres termes, les individus réalisent que
c'est possible de produire des biens en respectant l'environnement même si c'est dans un
secteur industriel.
«Parce que je sais c'est quoi maintenant car làje travaille pour une entreprise qui fait
de la récupération ou du compostage. Je le prendrais donc en considération même si
pas la principale raison» (Entrevue 9).
« Parce qu'ici, j'ai été conscientisée au fait que ça peut être possible de produire des
biens en ayant des procédés qui sont respectueux de l'environnement. Plus que juste
récupérer notre papier et nos cannettes. (... ). Je comprends aussi le lien qui peut être
fait entre rentabilité et développement durable. J'ai aussi l'impression que ces
entreprises ont plus de chance de survivre à long terme» (Entrevue 2).
68
D'autre part, certains individus ont mentionné que leur motivation reliée à la recherche d'une
entreprise socialement responsable reposait sur l'urgence de la situation actuelle.
« Oui! Absolument! Parce que c'est important l'environnement. Tous les déchets, la
pollution, Kyoto, il faut faire quelque chose avec ça. Cascades, bien ils ont l'air à
vouloir embarquer dans ce système là! Je trouve que si on ne fait pas attention dans
cinquante ans il va être trop tard. Moi, ma mère est morte du cancer des poumons
doncje m'organise pour pas que ça m'arrive» (Entrevue 11).
« Je pense qu'à long terme, on n'a pas le choix de passer par là. Tout le monde dit
que la planète est en train de mourir par la surconsommation des ressources. On pas
le choix d'essayer de trouver des solutions, les ind ividus et les entreprises. Je pense
donc que je le regarderais avant. Effectivement, j'en tiendrais compte beaucoup plus
tôt dans le processus» (Entrevue 8).
Mais encore, quelques individus considèrent qu'il sera plus facile dorénavant de choisir une
entreprise socialement responsable comme employeur. En effet, les entreprises seront plus
nombreuses à mettre de l'avant des pratiques et politiques favorisant la performance sociale
et environnementale.
Toutefois, par le fait même, les candidats soulignent que des entreprises avant-gardistes telles
que Cascades perdront alors en quelque sorte leur avantage concurrentiel du moment.
« Je pense qu'au fil du temps, avec l'aspect environnement qui est véhiculé tout le
temps, à ce moment là ça deviendra encore plus payant pour Cascades. On va récolter
alors les bénéfices de nos efforts dans plusieurs années quand tout le monde va être
au courant de ce qu'on fait. À moins que plusieurs autres entreprises entrent dans la
course du développement durable. On aura alors moins d'impact sur le public, les
consommateurs et les futurs employés avec nos initiatives» (Entrevue 2).
69
Tout compte fait, les individus interrogés argumentent qu'ils tiendront compte de la
responsabilisation sociale d'une entreprise au cours de leur prochaine recherche d'emploi
pour autant que l'organisation puisse offrir des salaires compétitifs et des avantages sociaux
comparables à ses homologues pour un même secteur d'activité.
Bien qu'aucune question pal1iculière n'ait pOl1é sur les autres avantages concurrentiels
possibles que l'attractivité pour une entreprise socialement responsable, plusieurs
commentaires furent émis à ce sujet. À cet effet, la prochaine section fera état des
répercussions positives perçues par Jes employés œuvrant au sein d'une entreprise
socialement responsable.
« Je pense que c'est parfaitement normal aujourd'hui que les entreprises aient cette
conscience là. Je pense que ça va leur permettre d'assurer leur pérennité. Ça va de
soi. Je pense qu'il faut un chefde file dans ce domaine là» (Entrevue 16).
70
D'ailleurs, cette réalité semble particulièrement vraie pour Cascades. En effet, les candidats
affirment que selon eux, cette entreprise a l'obligation de performer sur le plan social et
environnemental à cause de son secteur d'activité. Par exemple, les candidats s'attendent à ce
qu'une entreprise qui utilise des matières premières s'intéresse au renouvellement de celles-
Cl.
Ceci nous permet d'établir deux constats. D'une part, l'importance accordée à la
responsabilité sociale peut être différente en fonction du rôle joué par l'individu. Rappelons
qu'en tant que candidat à la recherche d'un emploi, la responsabilisation sociale d'une
entreprise constitue un facteur d'attraction parmi tant d'autres, le salaire et les avantages
sociaux offel1s étant les principaux éléments considérés pour poser sa candidature au sein
d'une entreprise. Cependant, en tant que citoyen, les personnes rencontrées considèrent que la
responsabilisation sociale des entreprise est en quelque sorte une obligation et doit être
envisagée peu importe les coûts. En d'autres termes, l'absence de gestion à cet égard
constituerait une violation de ses obligations sociales.
D'autre pal1, le discours des candidats interrogés semble indiquer que les attentes en ce qui
concerne les actions sur le plan social et environnemental sont plus grandes envers une
entreprise qui, en fonction la nature de ses activités:
• utilise des ressources naturelles, telles que le pétrole, la forêt, l'eau, etc.
• produit un bien considéré comme dangereux, tels que la cigarette et les armes.
71
D'ailleurs, les industries les plus critiquées pour leur manque de vision en termes d'éthique
par les personnes interrogées sont l'industrie minière, l'industrie de l'armement et l'industrie
du tabac.
« J'ai travaillé dans une mine. J'ai travaillé pour Noranda. Eux, ils s'en foutent de la
pollution. Je travaillais avec un masque dans la face. Là, j'en ai plus de masque! Tu
pars d'une mine ou d'une fonderie et tu vas dans une papetière, il y a une grosse
amélioration au niveau de la pollution» (Entrevue Il).
« Je ne travaillerais pas pour une compagnie d'armement parce que c'est peut-être
cliché, mais faire de l'argent avec la guerre, c'est pas correct. C'est pas éthique»
(Entrevue 5).
«Je ne fume pas personnellement. Tout le monde sait que ce n'est pas bon pour la
santé. Donc, je ne serais pas allé encourager ça. (... ) L'industrie du tabac palticipe
dans un sens à la propagation du cancer des poumons» (Entrevue 8).
Pour le trois quart des répondants, une entreprise qui s'occupe de l'environnement et qui agit
de façon responsable fait preuve d'éthique et se positionne en tant qu'innovateur.
Conséquemment, une entreprise socialement responsable pourrait améliorer sa performance
organisationnelle vis-à-vis ses concurrents en étant différente mais aussi en répondant à un
besoin exprimé par les consommateurs.
«Je sais par exemple que mes parents n'achètent pas de papier de toilette en fonction
de s'il est recyclé mais j'ai des amis que oui. Même chose pour les petits gestes
qu'on nous suggère de faire au quotidien comme la récupération, le lavage à l'eau
froide, etc. Je pense que la demande pour des produits écologiques est là et que peu
d'entreprises répondent à ce besoin! » (Entrevue 4).
« Oui, ça peut sensibiliser les gens et ça peut être un moyen de se démarquer de ses
compétiteurs. On offre un produit différent, écologique. Ce n'est pas négligeable
ça! » (Entrevue 6).
«Être socialement responsable c'est payant; c'est une façon de se démarquer des
autres entreprises. D'après moi, c'est aussi une façon d'attirer les consommateurs. Le
72
monde de plus en plus est pour l'environnement. Je le lis dans les journaux»
(Entrevue 19).
« Quand les employés se sentent interpellés par la mission de l'entreprise, ils sont
plus engagés, ils connaissent mieux les objectifs de l'entreprise et peuvent plus
facilement les atteindre. Ils sont plus prêts à travailler pour l'entreprise surtout quand
le succès est communiqué» (Entrevue 4).
« Les employés en font plus quand il s'agit d'environnement. Par exemple, moi je
me permets d'envoyer des courriels à mes deux patrons pour leur mentionner que la
ville de San Francisco a banni les sacs de plastique. Je pense que c'est des efforts
appréciables puisque c'est utile pour eux. C'est de l'information qu'ils peuvent
garder et utiliser» (Entrevue 14).
La communication à l'interne
Toutefois, l'unanimité n'est pas au rendez-vous en ce qui concerne l'information diffusée sur
les actions socialement responsables posées par l'entreprise. Pour la moitié des répondants,
les communiqués émis sur les comportements responsables sont facilement accessibles et
nombreux. Leur nature pédagogique est appréciée et ils révèlent un souci de transparence de
la part de l'entreprise.
nous tiennent au courant! En général, si tu l'as pas vu, c'est parce que tu ne voulais
pas lire car c'est là» (Entrevue 6).
«L'information est importante pour montrer que Cascades est toujours responsable,
et ce depuis les quarante dernières années. Qu'ils n'ont pas changé et que même
qu'ils vont toujours plus loin. Qu'ils n'ont pas reculé. Par exemple,j'ai appris sur le
processus et le principe des matières recyclées, la réduction de la consommation
d'énergie chez Boralex » (Entrevue 12).
« Nous avons les informations par le journal de l'entreprise Le Cascadeur qui est
envoyé à la maison, en plus des courriels et des affiches. Je pense qu'on est bien
informé chez Cascades. C'est important pour moi de savoir où l'on s'en va»
(Entrevue 17).
Pour l'autre moitié des répondants par contre, la communication à l'interne pose problème.
Ces employés aimeraient avoir plus d'information sur les actions socialement engagées de
l'entreprise. Soulignons que quarante pour cent des individus interrogés ignoraient que leur
entreprise soutenait des associations ou des organismes à but non lucratif.
« Comment ça se fait que je ne sais pas ce qu'on fait concrètement comme entreprise
pour l'environnement? J'aimerais ça qu'on me le dise, que je ne sois pas obligé de
poser des questions. On n'annonce pas assez ce qu'on fait, on le véhicule pas
beaucoup. Si je n'avais pas posé la question, je n'aurais jamais su combien d'eau est
fi Itrée et comment on essaie de diminuer ça » (Entrevue 4).
«Je sais que la façon dont travaille Cascades c'est division par division. Ils ne font
pas diffuser l'information à toutes les divisions. Je pense qu'il y a un travail de
communication à faire à ce niveau là. On fait des bonnes choses et c'est rarement
diffusé. Il faudrait que l'on en parle. 11 faudrait arrêter le travail en silo» (Entrevue
14).
« J'aimerais en savoir plus. Ça changerait rien dans mon quotidien mais ça veut dire
que si l'entreprise a des projets précis, ce serait intéressant de le savoir ne serait-ce
qu'à titre informatif. Parce que vous appartenez à une entreprise qui a des projets x et
c'est important d'être au courant» (Entrevue 15).
D'ailleurs, toujours selon les employés, une meilleure diffusion de l'information permettrait
de mieux connaître l'entreprise et par le fait même d'en faire la promotion dans leur
entourage immédiat.
74
« Les gens le savent un peu. Ils posent aussi des questions sur Je fait que l'entreprise
fasse du recyclage. Ils trouvent ça intéressant et sont curieux. J'essaie de leur
répondre le mieux possible avec ce que je sais» (Entrevue 7).
Mais encore, une plus grande communication améJiorerait J'implication des employés tout en
permettant de comprendre ou de justifier les efforts supplémentaires exigés par l'entreprise.
Effectivement, être socialement responsable semble demander temps et énergie.
« Moi je dis toujours que la guerre se gagne avec de l'information. Plus vous en
savez sur une entreprise, plus vous pouvez la défendre, vous pouvez vous impliquer
et mieux la représenter. En plus, c'est très motivant comme employé. C'est plus
facile d'atteindre les objectifs organisationnels» (Entrevue 15).
« Par exemple, la charge de travail est grande ici chez Cascades, donc les gens
doivent faire des efforts supplémentaires. Pour les motiver à le faire cet effort, ils
doivent se sentir impliqués. Je veux dire, pour être vert, il faut faire un surplus
d'effûl1s donc il faut être convaincu que c'est important. Ça demande beaucoup
d'énergie, de temps, d'implication, etc. » (Entrevue 5).
Il apparaît donc que les employés d'une même entreprise ne partagent pas les mêmes
opinions en ce qui a trait à J'efficacité de la communication à l'interne. Pour certains, la
communication est appropriée et devient ainsi un outil indispensable au quotidien. Pour
d'autres, la communication est négligée et altère en quelque sorte leur engagement vis-à-vis
J'entreprise.
Encore une fois, le discours sur la relation entre la responsabilité sociale des entreprises et la
rétention des employés démontre que le concept et ses dimensions ne sont pas maîtrisés par
les personnes interrogées. En effet, l'ensemble des répondants considèrent qu'ils ne
tiendraient pas compte de la responsabilité sociale de l'entreprise dans leur décision de rester
en poste ou de quitter.
75
« Ça ne serait pas ça qui me ferait rester. Notre bien-être passe avant celui de
l'entreprise. Par exemple, si j'avais un mauvais patron, le fait que l'entreprise est
verte ne me fera pas rester en poste. Ce n'est pas un facteur de rétention important»
(Entrevue 2).
Toutefois, ils affirment que les éléments sous-jacents à leur satisfaction au travail et, par le
fait même, à leur intention de rester à l'emploi de l'entreprise sont: la présence d'un style de
gestion pOlte ouverte, le respect, l'empowerment ou la responsabilisation, les politiques et
pratiques de gestion en ce qui a trait à la reconnaissance et au développement des
compétences.
« Le respect, c'est une valeur primordiale. Être franc, honnête, être « up front ». Être
capable de dire lorsque quelqu'un a fait une bonne job, le reconnaître. Souvent, cette
façon de faire permet aux employés de faire plus (Entrevue 14).
Or, l'ensemble de ces pratiques peuvent être rel iées à une gestion stratégique des ressources
humaines, une constituante du concept de responsabilité sociale des entreprises. Nous
pouvons donc affirmer que bien que les employés n'établissent pas un lien clair entre ces
deux éléments, une entreprise socialement responsable, donc ayant de bonnes relations avec
ses employés, peut influencer la rétention de son personnel.
CHAPITRE 6
Notre étude s'inscrit dans le courant de recherches qui porte sur les avantages concurrentiels
possibles d'une gestion éthique ou responsable. Nous nous sommes, pour notre part, attardées
au potentiel d'attractivité de la RSE par l'entremise de la réputation organisationnelle.
Plusieurs autres auteurs se sont aussi intéressés à cette problématique (Turban et Keon, 1993;
Judge et Cable, 1997; Luce et al., 2001; Lievens et al., 2001; Turban et Cable, 2003), mais la
plupart des recherches effectuées dans ce domaine reposaient sur des simulations, c'est-à-dire
sur des situations hypothétiques. C'est d'ai lIeurs ce qui avait motivé notre intérêt à mettre au
jour le point de vue réel des employés, à savoir des gens présentement sur Je marché du
travail et ayant de l'expérience.
De plus, la littérature actuelle insistait sur l'importance de poursuivre les recherches dans ce
domaine afin de mieux saisir la complexité de la relation entre la RSE et l'attractivité
organisationnelle, plus paJticulièrement en ce qui concerne les diverses composantes d'une
stratégie corporative appuyée sur l'image d'une responsabilité sociale auprès de candidats
potentiels, ainsi que sur les caractéristiques individuelles qui peuvent venir renforcer ou
diminuer l'intérêt d'une personne envers une entreprise socialement responsable au cours du
processus de recherche d'un employeur.
Ainsi, nous avons proposé différentes hypothèses de recherche en lien avec notre cadre
conceptuel largement influencé par la modélisation originale de Turban et Greening (1997).
Les résultats de ces analyses qui ont été présentés au chapitre précédent feront maintenant
l'objet de discussions en lien avec d'autres recherches et mettront en évidence des pistes de
réflexion pour des études à venir qui surgissent de nos observations.
77
Selon notre cadre conceptuel, la responsabilité sociale d'une entreprise pouvait influencer
l'attractivité organisationnelle par l'entremise d'une variable médiane, soit la réputation
organisationnelle. En d'autres termes, une bonne performance sociale en ce qui a trait aux
relations avec la communauté et les employés, à la gestion de la diversité, au respect de
l'environnement ainsi qu'aux produits et services offelis, améliorait la réputation de
l'organisation auprès des candidats potentiels.
Nous avons observé, dans un premier temps, que les candidats potentiels considèrent qu'une
bonne réputation organisationnelle repose essentiellement sur des relations harmonieuses
avec les employés et la communauté ainsi qu'un respect de J'environnement qui s'illustre, par
exemple, par le recyclage et la diminution de la consommation des ressources naturelles.
Or, ces trois composantes qui caractérisent une bonne réputation organisationnelle, selon les
employés rencontrés, sont toutes des dimensions du concept de responsabilité sociale de
l'entreprise. En effet, elles font partie des cinq dimensions généralement envisagées comme
étant les plus importantes et pertinentes aux yeux des candidats potentiels pour évaluer une
entreprise lors du processus de recherche d'un employeur (Turban et Greening, 1997;
Schmidt-A Ibinger et Freeman, 2000; Backhaus et aL, 2002).
Nous pouvons ainsi corroborer l'existence d'une relation positive entre la performance
sociale d'une entreprise et sa réputation comme, l'avaient suggéré plusieurs auteurs (Turban
et Greening, 1997; Schmidt-Albinger et Freeman, 2000; Greening et Turban, 2000; Backhaus
et al., 2002).
78
Cependant, il est évident que certaines dimensions de la responsabilité sociale des entreprises
sont plus prisées par les candidats que d'autres.
De plus, nos résultats vont à l'encontre de ceux de Greening et Turban (2000) et Schmidt
Albinger et Freeman (2000) qui avançaient que les candidats potentiels accordaient une
grande importance à la gestion de la diversité comme élément déterminant d'une bonne
réputation, principalement parce que le traitement des femmes et des minorités, ainsi que les
relations avec les employés donnaient plus d'indications quant aux conditions de travail que
d'autres concepts de RSE (Turban et Greening, 1997; Schmidt-Albinger et Freeman, 2000).
Bien que nos répondants soient unanimes quant à la nécessité pour une entreprise d'entretenir
des relations harmonieuses avec ses employés pour afficher une bonne réputation
organisationnelle, aucun d'entre eux n'a fait allusion au programme de gestion de la diversité,
soit par rapport aux femmes ou aux minorités visibles (Williams et Bauer, 1994). Le discours
des personnes interrogées référait plutôt à la conciliation travail-famille et aux pratiques et
politiques qui favorisent le bien-être physique et psychologique des employés ainsi que le
respect. Des observations qui concordent avec les résultats de Schmidt-Albinger et Freeman
79
(2000) sur la prédominance des relations avec les employés lorsque les candidats
s'intéressent à la réputation organ isationnelle.
Quant à l'environnement, nos résultats vont dans la même direction que ceux de Turban et
Greening (1997). Les individus rencontrés admettent qu'une entreprise qui se préoccupe de la
protection de l'environnement améliore sa réputation organisationnelle. En effet, puisque les
problématiques environnementales, comme le réchauffement climatique, sont nombreuses et
dans une certaine mesure alarmantes, les individus apprécient les initiatives des entreprises
qui visent à réduire leurs déchets, leurs émissions de gaz à effet de serre, etc. Cependant, dans
un contexte d'attractivité, l'intérêt des candidats repose principalement sur les relations avec
les employés. En d'autres termes, comme le suggèrent Schmidt-Albinger et Freeman (2000),
en tant que citoyen la protection de l'environnement occupe une grande importance, mais en
tant que futur employé, le type de relation entretenu avec les salariés est décisif.
Bref, une performance sociale peut améliorer la réputation d'une organisation surtout si celle
ci est fondée sur des relations harmonieuses avec les employés et la communauté ainsi que
sur Je respect de l'environnement. Une entreprise aurait donc intérêt à mettre l'accent sur ces
80
éléments lorsqu'elle diffuse des informations à son sujet. Toutefois, rappelons que l'élément
suscitant le plus d'attraction auprès des candidats est les relations avec les employés.
Toujours selon notre cadre conceptuel, une réputation organisationnelle enviable était en
mesure d'influencer l'attractivité de J'entreprise. En fait, trois groupes de caractéristiques
expliquaient cette relation, soit les caractéristiques organisationnelles, interactionnelles et
individuelles.
Nous avons constaté que pour quelques candidats potentiels une réputation corporative
positive suscitait de l'intérêt parce qu'elle donnait une ind ication sur la quai ité des re lations
entre l'entreprise et ses employés. L'exemple le plus éloquent était sans contredit celui de
l'employé qui considérait qu'une bonne performance environnementale était synonyme de
bonnes conditions de travail. Par le fait même, qu'un désengagement de l'entreprise face à
ses valeurs environnementales provoquerait des fermetures d'usines et des mises à pied.
Dans le même ordre d'idées, nous avons également pu relever l'impo/tance accordée aux
caractéristiques interactionnelles, donc à la théorie selon laquelle les candidats sont à la
recherche d'une concordance entre leurs valeurs personnelles et celles de l'entreprise
(Ehrhart et Ziegert, 2005). Dans un tel contexte, la réputation devient dès lors un indicateur
utile pour juger de ce « fit» tant souhaité comme l'avait affirmé, entre autres, Backhaus
(2002).
II faut souligner que ces résultats, qui s'inscrivent dans la même veine que ceux de Greening
et Turban (2000), sont particulièrement intéressants pour une entreprise comme Cascades. En
effet, comme on l'a déjà mentionné, plus de soixante-douze pour cent des Canadiens
souhaitent que les entreprises se préoccupent davantage de l'impact social et
environnemental de leurs activités (Commission sur la démocratie canadienne et la
responsabilisation des entreprises, 2002). Conséquemment, une entreprise socialement
responsable peut s'attendre à voir son bassin de candidats potentiels augmenter, puisque dans
la société où elle puise ses ressources il y a présence de valeurs environnementales et
sociales. La prise en compte de l'intérêt général qui se fait jour par l'entremise de la
réputation de l'entreprise est certainement dès lors un puissant facteur d'attractivité.
Bref, J'ensemble de ces résultats nous démontre que le désir de travailler pour une entreprise
va parfois au-delà d'un simple échange monétaire, une observation partagée par d'autres
auteurs, dont Lievens et al. (2007). Les candidats potentiels peuvent certainement apprécier
des conditions de travail avantageuses, mais certains semblent être aussi à la recherche d'une
organisation qui leur ressemble et qui favorisera leur engagement envers cette dernière.
Ainsi, nous pouvons présumer qu'une entreprise socialement responsable, donc qui bénéficie
d'une bonne réputation organisationnelle, augmentera son attractivité auprès des candidats
potentiels à cause de l'attachement symbolique qu'elle peut occasionner. Cependant, nos
résultats ne peuvent étayer ceux de Lievens et al. (2007) qui soulignaient que l'attachement
symbolique était beaucoup plus f0l1 que l'attachement monétaire, puisque la majorité de nos
répondants considèrent en premier lieu les conditions de travail et ensuite la réputation avant
de postuler.
Jusqu'à présent, nos résultats confirment que le modèle proposé par Turban et Greening
(1997) pour expliquer la relation entre la RSE et l'attractivité organisationnelle est valide
même auprès de véritables candidats à la recherche d'un emploi et non simplement de
finissants gradués d'une école de gestion.
Cependant, il faut mentionner que l'ajout d'une variable de contrôle à notre modélisation, soit
la familiarité, s'est avéré très peJ1inent. En effet, comme Luce et al. (2001) ainsi que Turban
et Greening (1997) et Greening et Turban (2000) en avaient fait la démonstration, plus un
candidat a l'impression de connaître une entreprise, plus il est porté à vouloir travailler pour
cette entreprise. En d'autres termes, une entreprise plus familière était évaJuée plus
positivement quant à sa réputation (Turban et Greening, ] 997). Ces constats étaient d'ailleurs
à l'origine de recommandations sur la nécessité de diffuser des informations sur la
Or, nos résultats ne peuvent qu'appuyer ces observations pUIsque les candidats ayant une
grande connaissance de l'entreprise Cascades lui attribuaient plus facilement l'étiquette d'une
entreprise ayant une bonne réputation organisationnelle. En fait, les candidats qui habitaient
la région qui a vu naître J'entreprise ne doutaient point de son engagement envers
J'environnement, même s'ils avaient de la difficulté à nommer plus de trois initiatives mises
en place par cette dernière. Cela explique aussi pourquoi les candidats habitant dans les
vil les où plusieurs employeurs sont présents, donc qui avaient moins d'informations sur
Cascades, étaient plus suspicieux quant aux efforts de l'entreprise. Il semble donc que
l'information diffusée sur la responsabilité sociale de l'entreprise est certainement importante
pour améliorer la familiarité et aussi pour informer les candidats des actions de l'entreprise.
Dans cet ordre d'idées, nos résultats s'inscrivent en faux contre l'argumentation de Luce et
al. (2001) qui propose que la nature des actions de l'entreprise, donc qu'elle soit positive ou
négative, affecte de la même façon l'attractivité puisque l'important c'est que les candidats
connaissent et parlent de l'entreprise. Nos répondants ont déclaré à maintes reprises que bien
que des compagnies comme Shell ou Imperial Tobacco soient performantes financièrement et
chefs de file dans leur secteur d'activité, plusieurs ne sont pas intéressés à travailler à ces
endroits. En d'autres termes, même si ces candidats sont très familiers avec ces entreprises,
ils ne lui accordent pas automatiquement une bonne réputation organisationnelle.
Rappelons aussi que les candidats ont noté certaines préoccupations envers la véracité d'un
discours d'entreprise qui dit se préoccuper de ses externalités négatives sur j'environnement
et la société. En effet, la majorité des répondants affirmaient être en mesure d'évaluer et
d'apprécier de façon concrète les actions de l'entreprise seulement une fois en poste
puisqu'ils ont alors le loisir d'y participer.
À cet égard, ces commentaires renforcent la proposition de Turban et Greening (1997) qui
soulignaient l'importance pour une entreprise de tenir un discours réal iste sur sa performance
sociale afin de ne pas décevoir l'employé récemment embauché et fraîchement en poste.
Effectivement, les auteurs notaient qu'une description des comportements responsables vraie
84
Bien que le modèle de Turban et Greening (1997) ait été opportun pour amorcer les
recherches entre la RSE et la capacité d'attraction des organisations, il nous apparaît
maintenant comme incomplet. Les résultats de notre recherche démontrent avec aisance que
d'autres variables doivent être prises en considération lorsque l'on désire évaluer et
comprendre la relation qui unit ces concepts. Cette section s'intéresse principalement à
identifier ces variables et conséquemment proposer une nouvelle modélisation pour faciliter
les recherches à venir. De plus, ces données nous permettront de décrire le contexte favorable
à la mise en œuvre d'une stratégie d'attraction basée sur la performance sociale de
l'entreprise, dans la perspective de rentabil iser les efforts et les frais associés à une telle
décision.
avoir porté fruit. En effet, la plupart des individus interrogés ont souligné que les jeunes
adultes d'aujourd'hui et leurs enfants sont conscients des problématiques environnementales
auxquelles nous sommes confrontés, donc rébarbatifs à s'associer à une entreprise qui ne fait
pas sa part dans ce domaine. Le contraire s'applique aussi puisque les candidats plus âgés
étaient plus ou moins préoccupés par le réchauffement climatique et s'intéressaient peu aux
efforts de l'entreprise à cet égard. Il semble donc y avoir un lien entre l'âge des candidats
potentiels et les valeurs qu'ils endossent, un lien qu'on ne peut négliger puisque cette réalité
teinte le processus de recherche d'un employeur.
Le I1lveau d'éducation est aussi une variable à prendre en considération lorsque nous
analysons la relation entre la RSE et l'attractivité organisationnelle. Plus un individu a une
formation scolaire poussée, plus il a d'opportunités d'emplois. Autrement dit, il peut se
permettre de choisir entre plusieurs entreprises, donc sélectionner celle qui correspond
davantage à son image de l'employeur idéal. Dans cet ordre d'idées, les répondants qui
œuvraient comme camionneur, manœuvrier ou journalier n'avaient pas tenu compte de la
performance sociale de l'entreprise lorsqu'ils avaient déposé leur candidature auprès de
l'entreprise, contrairement aux gestionnaires ou personnel de bureau. Cependant, rappelons
que plusieurs candidats avaient expliqué que s'ils faisaient face à l'avenir à deux offres
d'emplois offrant les mêmes conditions de travail, la performance sociale de J'entreprise
pourrait faire la différence.
En réalité, c'est plutôt lorsqu'il est question de communication à l'interne que l'on a pu
observer une divergence d'opinion sur l'accessibilité à l'information. Toutefois cet enjeu, qui
n'est pas en lien direct avec le potentiel d'attractivité de l'organisation, devrait tout de même
faire l'objet de recherches ultérieures puisque, comme nous l'avons vu précédemment, il doit
y avoir une concordance entre les attentes du candidat et la réalité organisationnelle. Un bon
plan de communication favorise l'adhésion aux valeurs de l'entreprise et diminue
l'insatisfaction et les intentions de qu itter.
Bref, il est justifié de déclarer, d'une paJi, que l'entreprise a tout intérêt à être à l'écoute des
valeurs sociales, bien qu'elles soient constamment en évolution, car elles permettent à
l'entreprise d'adapter son discours, ses actions. En étant réceptive aux besoins et aux
revendications des citoyens, qui sont des candidats potentiels, elle peut se démarquer de ses
compétiteurs et bénéficier d'une plus grande attractivité. Par exemple, une entreprise qui est à
la recherche de jeunes candidats pour combler des postes pourrait miser sur son management
responsable pour attirer cette cl ientèle.
D'autre pmi, les résultats de notre recherche indiquent qu'il serait plus approprié d'utiliser
une stratégie d'attraction basée sur la RSE lorsque l'on s'adresse à des candidats potentiels
qui ont plusieurs opportunités d'emplois, par exemple en situation de pénurie de main
d'œuvre dans un secteur d'activité, ou lorsque leurs compétences sont spécifiques et rares,
donc qui sont recherchés par plusieurs employeurs. Cette liberté leur permet d'être plus
sélectifs et ainsi d'aller au-delà des critères reliés à la rémunération. À cet égard, nos
conclusions vont dans la même direction que ceux de Schmidt-Albinger et Freeman (2000).
Ces deux premières observations révèlent d'ores et déjà les problèmes potentiels de la mise
en œuvre d'une telle stratégie de recrutement. En effet, bien que les jeunes gens soient plus
sensibilisés à l'impO/iance de produire un bien ou d'offrir un service sans gaspiller les
ressources naturelles, tout en prenant soin des employés et de la communauté locale, ils ont
généralement peu d'expérience sur le marché du travail, donc ils sont limités lorsque vient le
temps de choisir un employeur. D'ailleurs, le type d'emplois qu'ils occupent habitueLlement
ne sont pas des postes clés pour l'entreprise, donc ne font pas l'objet d'efforts de recrutement
87
comme c'est le cas pour les postes de gestionnaires. Bref, à court terme, Je calcul coûts
bénéfices pour une entreprise qui envisage miser sur sa performance sociale pour se
démarquer de ses compétiteurs devient plus complexe avec de tels résu Itats. Toutefois, d'ici
quelques années, cette équation pourrait bien être différente puisque le marché de l'emploi
sera tout autre et ces jeunes occuperont possiblement des postes de gestion, des postes clés.
Nous pouvons ainsi avancer qu'une analyse des conditions socio-économiques est préalable à
toute démarche visant à utiliser la performance sociale de l'entreprise comme facteur
d'attraction. Ainsi, une entreprise multinationale aurait intérêt à déployer plusieurs stratégies
de recrutement en fonction des résultats de cette analyse au lieu d'uniformiser ses procédures
par souci de rentabilité. Surtout si elle œuvre à la fois dans des pays industrialisés et dans des
pays en voie de développement.
À notre connaissance, aucune étude jusqu'à présent n'a soulevé ces enjeux en lien avec la
mondialisation lorsqu'il était question du potentiel d'attractivité de la RSE. Pourtant, il est
évident que les valeurs priorisées par les Canadiens risquent d'être différentes de celles des
Boliviens ou des Marocains, par exemple. Mêmes constatations en ce qui concerne le niveau
d'éducation, donc les opportunités d'emplois ainsi que la réalité économique.
88
Bref, nos résultats nous permettent de confirmer l'hypothèse de Greening et Turban (2000)
ainsi que de Schmidt-Albinger et Freeman (2000), c'est-à-dire que la RSE attire des gens
avec plusieurs opportunités d'emplois, donc possiblement des gens d'expérience qui ont un
niveau d'éducation élevé. Cependant, une économie stable et performante localement et
nationalement est essentielle puisqu'elle favorise la création d'emplois et, par le fait même,
augmente les possibilités sur le marché du travail.
Finalement, il est intéressant de revenir sur le fait que les individus interrogés considèrent que
la RSE est bien plus qu'une simple licence d'opération ou une approche de gestion de la
réputation organisationnelle comme le suggéraient Porter et Kramer (2006). En fait, les
candidats croient que c'est un devoir de l'entreprise de minimiser ses externalités négatives
tout en maintenant de bonnes relations avec ses employés et la communauté. Toutefois,
même si leur discours fait allusion aux motivations intrinsèques ou au sens éthique des
gestionnaires, il n'en demeure pas moins que les individus admettent que certains avantages
concurrentiels peuvent découler d'une telle responsabilisation.
Ré~ntiondupenonncl
En effet, la RSE, et plus particulièrement la dimension des relations avec les employés,
semble améliorer la rétention. En d'autres termes, les politiques et pratiques de gestion des
ressources humaines et l'état des relations de travail influencent le désir d'un employé de
rester à l'emploi de l'entreprise. À cet égard, Je style de gestion adopté, les pratiques de
gestion des compétences, les pratiques de pal1age de l'information, les pratiques de
récompenses et de reconnaissance ainsi que l'organisation du travail ont été cités comme des
éléments reliés à une plus grande satisfaction au travail puisqu'ils améliorent le climat
organisationnel (Sims et Keon, 1997; Corley et aL, 2001; Tremblay et aL, 2005). D'ailleurs,
ces conclusions s'arriment avec celles de Tett et Meyer (1993), Morrison (1994) ainsi que Pil
et MacDuffie (1996), qui ont démontré à maintes reprises qu'il existait une relation entre la
satistàction et le roulement de personnel. Quant aux autres dimensions du concept de
responsabilité sociale de J'entreprise, elles ne semblent pas être en corrélation avec l'intention
89
de rester en poste. Des études ultérieures pourraient toutefois éclairer cette absence de
corrélation et ajouter à notre compréhension des impacts de la RSE sur les parties prenantes à
l'interne.
socialement responsable, Cascades crée des attentes. Par exemple, les employés nous ont
mentionné que si l'entreprise décidait de ne plus investir dans la protection de la nature ou
dans le développement des communautés environnantes, ils remettraient en question le choix
de leur employeur. Nous pourrions présumer que ce serait aussi le cas lors de licenciements
massifs puisque l'entreprise prétend être un employeur modèle qui respecte son capital
humain.
Bref, ces résultats sont particulièrement intéressants puisqu'ils nous amènent à penser que la
responsabilisation sociale de l'entreprise engendre une nouvelle forme de contrat entre les
employés et l'employeur. En d'autres termes, les employés sont prêts et même heureux de
participer activement à la réalisation de produits écologiques même si cela demande temps et
efforts. Ils sont fiers des progrès de Cascades sur le marché et de la réception chaleureuse et
positive de la clientèle envers leurs produits. Toutefois, cet échange ne peut être qu'à sens
unique; en contrepartie, ils s'attentent à ce l'entreprise reconnaisse leur implication et
maintienne ses engagement envers la communauté et l'environnement, peu importe les
obstacles rencontrés.
Or, ce type de revendications chez les employés laisse entrevoir une certaine solidarité, un
intérêt envers le mieux-être des autres qui s'oppose au mouvement individualiste actuel. En
fait, le discours des individus interrogés ne peut qu'engendrer de l'enthousiasme auprès de
ceux qui croient que la RSE peut prendre la relève du compromis fordien et favoriser un
retour vers un capitalisme moins « sauvage» et plus humain.
CONCLUSION
Dans le cadre de cette étude, nous avons tenté de mieux comprendre la relation entre le
concept de la responsabilité sociale des entreprises et l'attractivité organisationnelle. Plus
précisément, nous avons analysé le potentiel d'attractivité de chacune des dimensions
composant la RSE telle que conceptualisée par plusieurs chercheurs, dont Turban et Greening
(1997), soit les relations avec la communauté, le traitement des femmes et des minorités, les
relations avec les employés, le respect de l'environnement et la qualité des services et
produits offerts dans une perspective de développement durable. Cet objectif de recherche
s'inspirait d'une abondante littérature scientifique faisant état des possibles avantages
concurrentiels financiers et organisationnels découlant d'une responsabilisation sociale de
l'entreprise. Nous avions constaté que bien que plusieurs chercheurs américains établissaient
une corrélation positive entre la RSE et l'attractivité organisationnelle, aucun d'entre eux
n'avait effectué ses recherches en entreprise, donc avec des individus véritablement à la
recherche active d'un emploi. Ainsi, leur méthodologie, qui préconisait des simulations avec
des étudiants en voie de graduer dans les facultés de gestion, nous semblait discutable. Les
limites d'une telle procédure étaient d'ailleurs mentionnées comme principal obstacle à la
généralisation des résultats par ces auteurs.
Pour répondre à notre question de recherche sur l'impact d'une responsabilisation sociale
d'une entreprise quant à son attractivité auprès de cand idats potentiels, nous avons choisi
comme terrain d'enquête l'entreprise Cascades, chef de file en matière de responsabilité
sociale au Québec. Cette entreprise œuvre au sein d'une industrie généralement pointée du
doigt par les écologistes, soit la fabrication, transformation et commercialisation de produits
d'emballage, de papiers tissu et de papiers fins. Cependant, en utilisant des fibres recyclées,
en soutenant de multiples organismes à but non lucratif, en favorisant de bonnes relations de
travail par la mise en œuvre de politiques et pratiques de gestion des ressources humaines
respectueuses et en s'impliquant auprès de la communauté locale, les dirigeants de cette
organisation démontrent un véritable intérêt pour la gestion responsable et assument leurs
responsabilités envers leurs différentes parties prenantes et ce, depuis plusieurs décennies.
92
Par souci de cohérence, nous avons retenu une définition du concept RSE endossée par
l'entreprise terrain, mais également par les grands conseils patronaux tels que Business for
Social Responsibility (BSR) et le Conference Board du Canada. Pour ces acteurs, la RSE est
un acte volontaire, donc laissant une marge de manœuvre discrétionnaire aux gestionnaires
quant au choix des externalités négatives découlant de la production d'un bien ou d'un
service qu'ils désirent diminuer ou enrayer. En d'autres termes, cette responsabilisation
sociale est comprise comme ne devant pas se faire au détriment de la rentabilité financière;
elle serait au contraire souhaitable à cause des avantages concurrentiels d'ordre légal,
financier et managérial qu'elle peut engendrer. La littérature à cet égard suggère que
l'adoption de comportements responsables influence les relations de l'entreprise avec ses
cinq principales parties prenantes, donc les employés, les fournisseurs, les consommateurs,
les compétiteurs et la société civile (Graafland et Van de Ven, 2006).
Nous avons ensuite expliqué que J'attractivité d'une entreprise auprès d'un candidat repose
sur trois groupes de caractéristiques: organisationnelles, interactionnelles et individuelles.
Les caractéristiques organisationnelles sont associées à la théorie de la signalisation, donc au
phénomène selon lequel un individu qui n'a pas toute l'information requise pour juger une
entreprise comme employeur généralisera certaines de ses observations. Les caractéristiques
interactionnelles, quant à elles, font référence à la théorie du « fit », donc de la concordance
entre les besoins et valeurs des individus et ceux de l'entreprise. Finalement, les
caractéristiques ind ividuelles évoquent la théorie de l'identité sociale, donc de la recherche de
l'approbation des pairs quant à nos choix. Rappelons que ces caractéristiques et théories,
répertoriées par Ehrhart et Ziegert (2005), nous ont permis de démontrer le rôle important que
joue la réputation organisationnelle dans un processus de sélection d'un employeur. En effet,
la réputation organisationnelle, qui est une construction de perceptions et d'interactions
directes avec l'entreprise (Gatewood et al., 1993), permet à l'individu d'évaluer l'entreprise;
elle est un indicateur des valeurs prisées par l'organisation et suscite de l'admiration ou de
l'aversion au sein de la population.
À cet égard, la responsabilité sociale d'une entreprise, qui est somme toute une pratique de
gestion, peut influencer cette réputation de façon positive. Nous avons observé, avec Meznar
93
et Nigh (1995), qu'une entreprise tente généralement d'adapter ses activités aux attentes de
ses parties prenantes afin de maintenir les relations cruciales à sa survie et de se positionner
sur J'échiquier de la compétition.
Donc, comme l'avaient suggéré Turban et Greening (1997), nous avons envisagé que la
responsabilité sociale d'une entreprise, qui se traduisait par des relations harmonieuses avec
ses employés et la communauté, les minorités visibles et les femmes, ainsi qu'un souci de
protection de l'environnement dans une perspective de développement durable, serait
favorable à la réputation organisationnelle de l'entreprise, et donc augmenterait l'attractivité
auprès des candidats potentiels. D'autant plus qu'un récent rapport de la Commission sur la
démocratie canadienne et la responsabilisation des entreprises (2002) nous indiquait que de
plus en plus de Canadiens souhaitaient une plus grande responsabilisation sociale de la part
des entreprises. Nous avons toutefois ajouté une variable de contrôle, soit la familiarité, qui
semblait influencer l'évaluation par Je candidat de la réputation organisationnelle.
Pour vérifier nos hypothèses, nous avons effectué des entrevues semi-dirigées auprès de dix
neuf individus récemment embauchés chez Cascades qui ont bien voulu répondre à nos
questions et paltager les raisons qui les ont amenés à poser leur candidature auprès de cette
entreprise. L'analyse de leur discours nous a permis de vérifier si l'image ou la réputation de
l'entreprise a été un facteur déterminant dans Je choix de postuler pour cette entreprise.
Quelles sont les composantes de l'image ou de la réputation organisationnelle qui influencent
l'attractivité auprès des candidats potentiels? Quels sont les éléments de la responsabilité
sociale des entreprises qui sont les plus susceptibles d'avoir attiré les candidats potentiels?
Est-ce que l'information diffusée sur la responsabilité sociale de J'entreprise par l'entremise
de différents médias a influencé l'attractivité auprès des candidats potentiels?
Dans un premier temps, nous avons pu constater que la réputation organisationnelle est
effectivement un élément pris en considération par les candidats potentiels, bien que ce ne
soit pas le facteur principal puisque les conditions de travail et la rémunération occupent le
premier rang des priorités. Dans cet ordre d'idées, la réputation organisationnelle est
particulièrement utile lorsque vient le temps de départager deux entreprises qui offrent des
94
conditions d'emploi similaires. Notons aussi que plusieurs individus considèrent que la
réputation de celiaines compagnies œuvrant au sein d'industries polluantes ou néfastes pour
la société, comme l'industrie du pétrole ou du tabac, justifie leur absence d'intérêt pour ces
employeurs.
Dans un deuxième temps, nous avons identifié les composantes de cette réputation
organisationnelle favorable à l'attractivité. Ainsi, les politiques et pratiques de gestion des
ressources humaines, la rentabil ité financière, la responsabi lisation sociale de l'entreprise et
l'image d'entreprise de type familial semblent attirer l'attention des candidats potentiels. En
fait, aux dires des individus interrogés, ces éléments sont pertinents pour évaluer une
entreprise parce qu'ils sont en lien avec certaines valeurs endossées par ces individus et
favorisent J'approbation des pairs. Par exemple, une entreprise qui bénéficie d'une réputation
de bon employeur est perçue par les candidats comme une organisation qui offre de bonnes
conditions de travail, qui est respectueuse et dévouée envers ses employés et qui suscitera
vraisemblablement J'approbation des amis et de la famille.
Or, celiains de ces éléments mentionnés par ces candidats étaient en fait des composantes du
concept de RSE. En effet, bien que les individus ne puissent donner une définition claire et
précise de la responsabilisation sociale de l'entreprise, ils indiquaient que l'entreprise doit
être consciente des impacts de production négatifs qu'elle peut avoir sur la communauté
locale ainsi que l'environnement et que l'organisation doit maintenir des relations
harmonieuses avec son personnel. En d'autres termes, une entreprise doit assumer certaines
responsabilités envers ses parties prenantes, donc aller au-delà de la simple recherche de
rentabilité financière.
Par aiJ1eurs, nous en sommes venues à la conclusion que certaines variables doivent être
ajoutées au modèle généralement employé pour étudier la relation entre la RSE et
l'attractivité organisationnelle. D'une part, la familiarité, donc le niveau de connaissance de
l' ind ividu sur l'entreprise, vient inf1 uencer son évaluation de la réputation de l'organisation
en question. Dans notre recherche, ceci s'illustrait par un moins grand scepticisme envers les
réalisations de l'entreprise pour protéger la nature de la part des candidats potentiels qui
habitaient la région qui a vu naître l'entreprise. Toutefois, puisque nos résultats s'inscrivent
en faux par rapport à ceux de Schmidt-Albinger et Freeman (2000) qui affirmaient que la
nature des actions de l'entreprise n'est pas en lien avec le degré de familiarité, des recherches
ultérieures clarifieraient la définition et le rôle de cette variable. D'autant plus que lors de
notre étude, notre entreprise terrain n'avait pas fait l'objet de récentes critiques sur la place
publique. Au contraire, elle avait contribué activement à l'amélioration de la qualité de vie de
la communauté locale en s'impliquant, entre autres, auprès de l'école. Autrement dit, nos
résultats sont peut-être biaisés puisqu'une partie de nos répondants, qui étaient familiers avec
l'entreprise, connaissaient seulement des actions positives de l'entreprise. Une étude au sein
d'une entreprise comme Shell, qui a sa part de bonnes et de mauvaises critiques, s'avèrerait
apparemment pertinente pour juger de l'importance de la familiarité comme variable de
contrôle.
96
Dans un troisième temps, au-delà de l'attractivité, nous avons observé qu'une entreprise
socialement responsable peut susciter une plus grande motivation chez ses employés dans
l'atteinte des objectifs organ isationnels, pour autant que ces derniers soient communiqués de
façon efficiente et sur une base régulière à l'ensemble du personnel. Les individus interrogés
considèrent que travai1Jer pour une entreprise qui offre un produit écologique à une clientèle
de plus en plus soucieuse de sa consommation est stimulant. De plus, le temps et les efforts
requis pour arriver à un tel résultat sont récompensés et reconnus par les dirigeants de
l'entreprise. Bref, la RSE peut certainement aider à mobiliser les troupes.
Cependant, d'autres recherches dans la foulée de la présente enquête donneraient lieu sans
doute à une meilleure connaissance des effets bénéfiques d'une responsabilisation sociale de
l'entreprise à l'interne, plus particulièrement quant à l'arrimage entre les dimensions du
97
Plusieurs autres questions appellent aussI une investigation plus approfondie. Dans un
premier temps, bien que les programmes de gestion de la diversité ont pour principal objectif
de créer un climat organisationnel qui respecte chacun des employés, donc qu'ils soient
essentiels à la création et au maintien de relations harmonieuses entre le patronat et les
employés, aucun des participants n'en a fait allusion. Ainsi, ces observations donnent lieur à
deux questions. D'une part, serait-il pertinent d'éliminer la gestion de la diversité comme
composante distincte du concept de RSE? Autrement dit, pourrait-elle faire partie intégrante
de la composante des relations avec les employés? D'autre part, quelles sont les raisons sous
jacentes à ce manque d'intérêt pour la gestion de la diversité? Pourquoi les candidats
potentiels n'associent-ils pas d'emblée cette pratique à une bonne réputation
organisationnelle? Dans un deuxième temps, puisque nous avons souligné l'importance de
tenir compte des facteurs socio-économiques lorsque l'on analyse la relation entre
J'attractivité organisationnelle et la RSE, des recherches futures s'inscrivant dans un contexte
de mondialisation pourraient apporter un éclairage nouveau sur la stratégie à adopter selon la
région où est implantée l'entreprise.
Bref, nos résultats corroborent en partie les écrits qui établissaient un lien entre la
responsabilité sociale de l'entreprise et la capacité d'attraction. En effet, nous avons
démontré qu'effectivement une telle pratique de gestion améliore la réputation
organisationnelle et favorise l'attractivité auprès des candidats potentiels. Cependant,
certaines contraintes d'ordre personnel, social ou financier viennent modérer cette relation.
Conséquemment, il serait aussi opportun de s'intéresser à ces éléments dans des recherches
98
ultérieures, surtout dans une perspective de gestion internationale où ces contraintes peuvent
varier ou être perçues différemment par les candidats potentiels.
Soulignons que bien que nous ayons porté une attention particulière à l'élaboration de ce
projet de recherche ainsi qu'à sa méthodologie, certaines limites doivent être spécifiées.
Premièrement, les individus rencontrés n'étaient plus à la recherche active d'un emploi
puisqu'ils avaient été embauchés par Cascades depuis au moins trois mois. Nous aurions
peut-être obtenu des résultats différents en interrogeant ces individus avant leur embauche et
après. Surtout que leurs discours peuvent avoir évolué ou s'être modifiés entretemps en
fonction des circonstances ou évènements qu'ils ont vécus au sein de leur nouvelle entreprise.
Donc, si le temps alloué à cette recherche avait permis d'envisager une approche
longitudinale, nos données auraient été plus nombreuses et variées. Nos conclusions sur la
relation entre la RSE et l'attractivité organisationnelle auraient certainement été plus
approfondies et plus détaillées.
Deuxièmement, notre échantillon se limitait à une seule entreprise, ce qui ne peut que limiter
la général isation des résultats. En effet, l' échanti lion idéal aurait été une grappe d'entreprises
œuvrant dans plusieurs secteurs d'activités et qui présentent différents bilans de performance
sociale, certains positifs et d'autres négatifs. Nous aurions ainsi eu l'occasion de comparer
les discours des employés sur l'importance accordée à la performance sociale de leur
entreprise lors de leur recherche d'emploi. Ainsi, il nous semble que le rôle de la variable de
contrôle aurait été mieux exploité dans un tel design de recherche.
Malgré ces limites, nous aimerions rappeler que l'une des forces de notre recherche est
certainement d'avoir été menée au sein d'une entreprise, donc dans la « réalité corporative »,
où les dirigeants, employés et autres parties prenantes font face à de véritables contraintes et
obstacles. Nul doute que tous et chacun sont pour la vertu, c'est-à-dire pour une plus grande
responsabilisation sociale des organisations. Toutefois, lorsqu'il est temps de supporter
concrètement ces entreprises qUI déploient des stratégies qUI favorisent cette
responsabilisation, peu de candidats potentiels sont prêts à accepter une baisse de leurs
conditions de travail ou de salaire en contrepartie et ça, la littérature actuelle avait peut-être
99
Réponses possIbles:
- Salaire
- Avantages sociaux 1 Condilions de travail
- Types de postes offerts
- Référence (ami-collégue)
• Image J Répulation
Pourquoi l'image ou la
réputation de r:oUrqUOi l'image ou la
l'entreprise n' a pas ... Non Oui ~réputation de J'entreprise a
influe nté votre influeneé voire choix?
d'cision?
~
Réponses possibles: Réponses possibles:
p Pas d'information sur le sujet • Image de soi
• Besoin premier: trouver un emploi • Identité sociale
. Pas un facteur décisif dans le • Approbation des pairs
processus de recherGhe • Recherche d'un fit enlre valeurs
a
- Aucun attachement l'entreprise personnelles et valeurs organisationnelles
- Sensibiliser à la cause RSE - 00
Non Oui
Réponses possibles:
Non
- Image de soi
• Identité sociale Oui
'f_ _
• Approbation des pairs
- Recherche d'un fit entre Réponses possibles:
valeurs personnelles et • environnement
Réponses possibles: valeurs organisalionnelles Quels sont les critères - rel. employés
• Pas d'information sur le sujet - Sensibilisé à la cause selon vous qui • rel. femmes J minorité
• Besoin premier: trouver un
RSE - DO caractérisent une bonne - rel. communauté
emploi
réputation - types de produits et services
.
• Pas un facleur décisif dans le
organisationnelle? offerts
processus de recherche
• Aucun attachement à
l'entreprise
Selon vous, est-ce qu'il y a une L
dimension de celle image 1
réputation qui les a
particulièrement attiré?
Non Oui
Réponses possIbles:
Quels sont les critères - environnement
selon vous qui • rel. employés
caractérisent une - rel. femmes 1 minorité
bonne réputalion - rel. communauté
organisationnelle? - Iypes de produits et
services offerts
Réponses possibles:
- Plus importante - opinion personnelle
- Plus médiatisée - documentée
- Plus facile à évaluer pour un employé
J
Non
Oui
.,
Réponses possibles: Réponses possibles:
- Argent mal investi - Sensibilise population
- Raison d'étre de - Démontre que entreprise
l'entreprise seulement est responsabie
financière - Peut favoriser l'attraction
- Démarquer de ses
compétiteurs
1
L- __ .
* Les réponses possibles n'ont pas été suggerees aux répondants lors de l'entretien. Elles se
retrouvent dans le protocole à titre indicatif pour la chercheure. De plus, bien que la littérature
scientifique établisse une distinction entre « image organisationnelle» et « réputation
organisationnelle », nous avons utilisé les deux termes lors des entrevues puisque certains
réoondants étaient olus à l'aise avec l'un des deux mots.
APPENDICE C
Oui Non
Question 3a :
Croyez-vous
que c'est un
facteur
important pour
vos collè ues?
104
Oui Non
Question 4 :
Est-ce qu'il Ya une
dimension de cette
image/réputation qui
vous a
palticuI ièrement
attiré?
105
Oui Non
Question 7 :
Aviez-vous de
['information sur la
RSE/DD chez
Cascades avant votre
embauche?
Oui Non
Question 8 :
À votre avis, est-ce
que Cascades doit
poursuivre ses
effOlts de visibilité
concernant sa
RSE/DD?
Oui Non
Question 9 :
Si vous étiez à la recherche d'un
emploi demain, est-ce que la
réputation serait un facteur
décisif?
* D'autres réponses s'ajoutaient parfois à celle-ci. Dans de telles circonstances, on créait une nouvelle
colonne.
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