Fasc. 2310 LBO (LEVERAGE BUY OUT) - Création
Fasc. 2310 LBO (LEVERAGE BUY OUT) - Création
Fasc. 2310 LBO (LEVERAGE BUY OUT) - Création
– Création
JurisClasseur Droit bancaire et financier
Lola Chammas
Points-clés
Un LBO consiste en l'acquisition d'une société cible par une holding dédiée et spécifiquement financée à cette fin, ainsi que la mise en place
de mécanismes assurant un effet de levier financier (acquérir la cible grâce à l'endettement financier), juridique (contrôler la société cible sans
détenir directement la totalité des titres) et fiscal (déduire du résultat du groupe les intérêts financiers de la dette ayant permis l'acquisition de la cible)
(V. n° 1 à 4 ).
La structuration d’un LBO suit une chronologie répondant à des contraintes juridiques et réglementaires spécifiques (V. n° 6 à 20 ).
Les opérations d'acquisition par LBO sont soumises (i) au contrôle des concentrations des autorités concernées (nationale, européenne ou
étrangères) en fonction des seuils et secteurs géographiques concernés (V. n° 21 à 43 ) et (ii) au contrôle des investissements étrangers en fonction
de l’activité de la cible (V. n° 44 à 60 ).
L'effet de levier fiscal consiste essentiellement à déduire les charges financières de l'emprunt contracté par la holding sur les profits réalisés par la
société cible, grâce à la mise en place d'un régime d'intégration fiscale entre la holding et le groupe (V. n° 61 à 89 ).
Une partie significative du coût d'acquisition de la cible est financée par un endettement de la holding. Les emprunts souscrits sont de maturité et de
caractéristiques variées (senior, junior, mezzanine, amortissable, in fine, high yield, unitranche) (V. n° 90 à 105 ).
En cas de pluralité de prêts, une syndication est organisée. Des dettes de rangs différents obligent par ailleurs à mettre en place une convention de
subordination (V. n° 105 à 112 ).
Les dettes sont assorties de sûretés dont la nature et les modalités de mise en place soulèvent des problématiques spécifiques (V. n° 113 à 135 ).
L'acquisition de la société cible et les conventions qui la formalisent (protocole d’acquisition et garantie), obéissent aux règles classiques de toute
opération d'acquisition d'une société (V. n° 136 à 152 ).
Les parties mettent en place les principes de gouvernance de la holding d'acquisition et de transfert de titres et arrêtent un objectif de liquidité au
travers d’un pacte d’associés (V. n° 153 à 185 ).
L'implication financière et opérationnelle des dirigeants repreneurs constituant un élément clé de la réussite d'une opération de LBO, des outils
d'intéressement spécifiques sont mis en place à leur profit (V. n° 186 à 208 ).
Introduction
1. – Terminologie, Définitions –
Créées et développées aux États-Unis dans les années 1970, les opérations d'acquisition d'une société avec effet de levier sont communément désignées sous
le terme LBO (pour Leverage Buy Out). La langue anglaise s'est également imposée pour qualifier les formes spécifiques de ces opérations. On identifie
désormais traditionnellement le LMBO (Leverage Management Buy Out) qui est une opération de LBO réalisée avec les dirigeants et salariés de l'entreprise
concernée (également désignée sous le terme RES pour Reprise d'une Entreprise par ses Salariés), le LMBI (Leverage Management Buy In) lorsque l'opération
fait intervenir des dirigeants repreneurs externes à l'entreprise et l'OBO (Owner Buy Out) lorsque les actionnaires et dirigeants déjà en place restent dans
l'entreprise. D'autres variantes peuvent être mentionnées, comme les BIMBO (Buy In Management Buy Out) qui font coexister le management existant et de
nouveaux dirigeants ou encore les LBU (Leverage Build Up) dans lesquels plusieurs sociétés cibles sont acquises pour constituer un groupe. Au-delà de la
terminologie employée, ces opérations recouvrent des éléments caractéristiques communs : l'acquisition d'une société par une holding dédiée,
spécifiquement financée à cette fin, ainsi que la mise en place de mécanismes assurant un effet de levier financier (acquérir la cible grâce à
l'endettement financier), juridique (contrôler la société cible sans détenir la totalité des titres) et fiscal (déduire du résultat du groupe les intérêts
financiers de la dette ayant permis l'acquisition de la cible).
2. – Acteurs –
Les acteurs d'une opération de LBO sont à titre principal les dirigeants repreneurs, les investisseurs financiers (souvent des fonds ou structures d’investissement)
et les établissements de crédit ou fonds d’investissement prêteurs. Aux côtés de ces parties prenantes, interviennent généralement des conseils (intermédiaires
financiers, auditeurs et avocats), qui les assistent dans leur rapprochement et dans la réalisation du LBO.
3. – Déroulement d'une opération de LBO –
Si chaque opération de LBO présente des caractéristiques propres, des grandes lignes se dégagent néanmoins : après une phase d'étude de la cible (audits), les
dirigeants s'associent à des investisseurs financiers au sein d'une holding d'acquisition et conviennent des termes de leur relation au sein de cette société. La
holding souscrit un emprunt bancaire classique souvent complété par un financement hybride, de type « mezzanine » ou un endettement de type unitranche.
Grâce à ses capitaux propres et à son endettement, la holding peut procéder à l'acquisition de la cible (signature d'un protocole puis réalisation de l'acquisition,
soumise ou non à conditions suspensives).
4. – Structuration juridique –
Au plan juridique, les opérations de LBO s'organisent autour des axes suivants : la structuration de l'opération (V. n° 6 à 89 ), le financement (V. n° 90 à 135 ),
les modalités de l'acquisition de la cible (V. n° 136 à 152 ) et les relations entre les associés de la holding (V. n° 153 à 204 ). Compte tenu de l'importance
des aspects fiscaux dans tous les schémas de LBO, et bien que le droit fiscal ne soit pas l'objet de la présente étude (on se référera utilement sur ces sujets aux
ouvrages spécialisés), les principales problématiques fiscales rencontrées seront abordées dans leurs grandes lignes (V. n° 61 à 89 ).
5. – Introduction –
Une opération de LBO suit une chronologie ordonnée par la négociation des parties mais également le respect des contraintes réglementaires. Ainsi, une fois que
l’acquéreur aura terminé sa phase d’audit et de négociation, celui-ci formalisera son engagement d’acquérir afin d’aboutir (après, le cas échéant, l’information des
salariés et la consultation du comité social et économique) afin d’aboutir à la conclusion d’un protocole d’acquisition dont la finalité (après, le cas échéant, la
satisfaction des conditions relatives au contrôle des concentrations et des investissements étrangers) sera le transfert de propriété des titres de la cible.
1° Phase précontractuelle
6. – L’opération d’acquisition de la cible est l’aboutissement d’un processus de vente se déroulant généralement sur plusieurs mois et débutant par des
discussions initiées soit dans le cadre d’un échange de gré à gré, soit dans le cadre d’un processus d’enchères piloté par des banques d’affaires (ou autres
conseils financiers) jouant le rôle d’intermédiaires entre les vendeurs et les candidats investisseurs. Sur la base des éléments présentés par ces intermédiaires
(mémorandum d’information comprenant notamment une description sommaire de la cible et une présentation des résultats et d’un plan d’affaires), les fonds
investisseurs procéderont à sa valorisation cible afin de préparer leur offre et sa structuration.
Ils pourront alors remettre une lettre d’intention (en anglais letter of intent), non engageante à ce stade du processus, décrivant leur proposition d’acquisition et
soumettant leur offre à certaines conditions (issue favorable des audits effectués sur la cible, approbation du comité d’investissement du fonds, etc.). En
contrepartie de leur offre, les candidats requièrent généralement l’exclusivité des discussions (rarement octroyée avant une offre ferme dans le cadre d’un
processus ouvert) sur l’acquisition de la cible durant une certaine période afin de pouvoir finaliser les négociations.
7. – Lors de la phase d’étude de la cible, les investisseurs auront accès aux informations relatives à la cible au travers d’une data room et feront effectuer
différents audits (juridique, financier, fiscal, stratégique) par des spécialistes afin d’obtenir confirmation des qualités de la cible et d’ajuster, le cas échéant, le prix
d’acquisition proposé en fonction des risques identifiés à l’issue desdits audits. Dès le début de ce processus, les investisseurs entament la recherche de
financement.
8. – Le déroulement et, le cas échéant, la rupture des négociations initiées durant cette phase précontractuelle sont libres mais doivent impérativement satisfaire
aux exigences de la bonne foi (C. civ., art. 1112, al. 1). À cet égard, le manquement à l’obligation de négocier de bonne foi, telle que la rupture injustifiée de
négociations sur le point d’aboutir, peut engager la responsabilité extracontractuelle de son auteur. Par ailleurs, les parties sont tenues à un devoir
précontractuel d’information en vertu duquel celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre
doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant (C. civ., art. 1112-1, al. 1). Le
manquement à ce devoir d’information engage la responsabilité extracontractuelle de son auteur.
9. – La participation des candidats investisseurs au processus de vente est généralement précédée de la signature par ces derniers d’un accord de
confidentialité (en anglais non-disclosure agreement) couvrant l’ensemble des échanges et documents objet du processus. À cet égard, la partie qui utiliserait
ou divulguerait sans autorisation une information confidentielle obtenue à l’occasion des négociations engagerait sa responsabilité dans les conditions du droit
commun.
10. – Principe –
L'acquisition de la cible se fait par l'intermédiaire d'une holding qui devra (si elle n'existe pas déjà) être créée pour l'occasion, et être dotée des fonds propres
nécessaires à la réalisation de l'opération.
En pratique, la flexibilité de fonctionnement ainsi que les modalités et la fiscalité des cessions de titres pousseront cependant les parties à choisir les
sociétés par actions et plus particulièrement la société anonyme ou la société par actions simplifiée.
La diversité des titres que ces sociétés peuvent émettre (actions ordinaires ou de préférence et valeurs mobilières donnant un accès différé au capital) oriente
également le choix des investisseurs vers l'une de ces deux formes sociales. L'utilisation de plusieurs types de valeurs mobilières est en effet quasi
systématique dans les opérations de LBO, tant pour la structuration de l'endettement (la dette mezzanine prend généralement la forme d'une émission
d'obligations à bons de souscription d’actions) (V. n° 94 ) que pour l'intéressement de l'équipe opérationnelle (le management package s'organisant généralement
autour d’un mécanisme relutif sous forme d’actions de préférence souscrites par les dirigeants et d'obligations convertibles en actions souscrites par les
investisseurs financiers) (V. n° 191 ). Enfin, l'émission d'actions de préférence au profit des investisseurs permet quant à elle de conférer des avantages
politiques ou financiers (V. n° 206 ).
La SAS offre notamment la possibilité de mettre en place, de manière statutaire, un contrôle efficace de la composition de l'actionnariat et des mécanismes
spécifiques pour les transferts de titres et principalement des clauses d'exclusion d'un associé et des clauses d'inaliénabilité.
Cette forme sociale permet d'insérer dans les statuts certaines stipulations habituellement prévues dans un pacte d'actionnaires, et de leur conférer ainsi une
opposabilité à l'égard des tiers (V. n° 154 ).
Certains invoquent l'impossibilité pour la SAS de faire une offre au public de titres financiers et d'être cotée sur un marché réglementé, contrairement à la société
anonyme, alors que la sortie du LBO s'effectue parfois par voie d'introduction en bourse. On objectera qu'il est toujours possible d'introduire la cible plutôt que la
holding (V. Les LBO : Actes prat. ing. sociétaire2008, n° 99, dossier24) et surtout, que rien n'interdit de transformer une SAS en société anonyme préalablement à
l'introduction envisagée.
On retiendra enfin que la possibilité de recourir à la stipulation d'avantages particuliers statutaires, aux actions de préférence et de conclure des pactes
d'actionnaires offre généralement une réponse efficace à l'ensemble des besoins des actionnaires de la holding d'acquisition.
c) Conclusion d’une promesse unilatérale d’achat – term sheet d’investissement – protocole d’acquisition
15. – À l’issue de la phase d’audit de la cible et de négociation, durant la période nécessaire pour respecter l’obligation d’information des salariés issue de la loi
Hamon et/ou, le cas échéant, la consultation du comité social et économique (anciennement comité d’entreprise) (V. n° 138 à 140 ), l’acquéreur s’engagera
généralement envers les principaux actionnaires de la cible aux termes d’une promesse unilatérale d’achat (en anglais put option ). L’acquéreur s’engage
ainsi à conclure, dès la fin du processus d’information des salariés de la cible et de consultation du comité social et économique (si la cible ou une société du
groupe cible ou est soumise à l’obligation d’en mettre un en place), le protocole d’acquisition dont le projet en forme finale (ou quasiment finale) figurera en
annexe de la promesse.
De leur côté, les principaux vendeurs s’engagent dans la promesse d’achat à réaliser les démarches nécessaires pour mener à bien les processus d’information
et de consultation, octroient une exclusivité de longue durée et actent leur accord sur le projet de protocole d’acquisition.
16. – À l’effet de conforter les vendeurs sur le financement de l’acquisition, les acquéreurs pourront également annexer à la promesse, ou remettre par acte
séparé, les engagements de financement consentis par les différents intervenants, que ces derniers concernent le financement en fonds propres par les fonds
d’investissement (en anglais equity commitment letter ) ou le financement en dette des prêteurs (lettres de confort ou debt commitment letter ). Cette
étape intermédiaire, tout en respectant les règles liées à l’information des salariés et à la consultation du comité social et économique, sécurise l’opération et les
relations entre les parties qui, une fois la promesse levée, n’auront plus qu’à signer le protocole d’acquisition (V. n° 141 à 149 ).
Concomitamment à la signature de la promesse d’achat, afin de formaliser l’accord entre les investisseurs financiers et les dirigeants repreneurs sur le montant,
les modalités d’investissement et leurs relations futures au sein de la holding d’acquisition, ces derniers signeront un accord sur les principaux termes et
conditions de leur investissement (term sheet d’investissement) qui se traduira au moment de la réalisation de l’acquisition par la signature de la documentation
relative à la souscription des titres, au pacte d’associés et aux promesses de vente en cas de départ (V. n° 134 et s. ).
21. – Introduction –
Comme toute opération d’acquisition, une opération de LBO peut, dans certains cas, être impactée par les réglementations relatives au contrôle des
concentrations et au contrôle des investissements étrangers en France.
22. – Introduction –
Comme toute opération d'acquisition, une opération de LBO est susceptible d'entrer dans le champ des règles nationales, communautaires ou étrangères
relatives au contrôle des concentrations (seules les règles nationales et communautaires sont décrites ci-après).
a) Contrôle national
1) Champ d'application
Aux termes de l’article L. 430-1 I du Code de commerce, une opération de concentration est réalisée lorsque des entreprises antérieurement indépendantes
fusionnent, lorsqu'elles créent une entreprise commune de plein exercice ou lorsqu'une entreprise prend le contrôle d'une ou plusieurs autres.
Le contrôle est défini au dernier alinéa de l’article comme découlant “des droits, contrats ou autres moyens qui confèrent, seuls ou conjointement et compte tenu
des circonstances de fait ou de droit, la possibilité d'exercer une influence déterminante sur l'activité de l'entreprise, et notamment :– des droits de propriété ou de
jouissance sur tout ou partie des biens d'une entreprise ;– des droits ou des contrats qui confèrent une influence déterminante sur la composition, les
délibérations ou les décisions des organes d'une entreprise”.
Pour l’appréciation du contrôle et plus particulièrement du contrôle conjoint, il conviendra donc d’apprécier les éventuels droits de veto attribués aux
investisseurs au titre du pacte d’associés (en pratique, un droit de veto sur le budget, les investissements et la nomination des dirigeants suffira pour qualifier le
contrôle conjoint).
24. – Seuils –
Conformément aux dispositions de l'article L. 430-2 du Code de commerce, une notification est nécessaire dès lors que sont réunies les trois conditions
suivantes :
le chiffre d'affaires total mondial hors taxes de l'ensemble des parties à la concentration est supérieur à 150 000 000 € ;
le chiffre d'affaires total hors taxes réalisé en France par deux au moins des parties concernées est supérieur à 50 000 000 € ; et
l'opération n'entre pas dans le champ d'application des dispositions communautaires relatives au contrôle des opérations de concentration entre
entreprises.
25. – Particularités –
Des seuils moindres sont applicables dans certains cas (exploitation de magasins de commerce de détail ou exercice d'une activité dans un ou plusieurs
départements ou collectivités d'outre-mer), à savoir un seuil unitaire de 15 000 000 € et un seuil cumulé de 75 000 000 €. Le calcul des chiffres d'affaires doit être
effectué conformément aux modalités définies à l'article 5 du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 relatif au contrôle des concentrations
entre entreprises. Ainsi, lorsqu'une partie à une opération de concentration est membre d'un groupe, le chiffre d'affaires de la totalité du groupe doit être pris
en considération pour déterminer si les seuils sont atteints. On relèvera, concernant la cible acquise dans le cadre d'un LBO, que seul le chiffre d'affaires se
rapportant aux entités entrant dans le périmètre de l'acquisition est pris en considération. Concernant les acquéreurs, le calcul doit prendre en compte toutes les
activités du groupe et non celles des seules filiales directement impliquées dans l'opération ou celles relatives aux marchés concernés ou affectés par l'opération.
2) Procédure
27. – Pré-notification –
Une pré-notification peut être effectuée. Cette phase est facultative, informelle et confidentielle et peut s’avérer stratégique, notamment dans l’hypothèse où un
renvoi est envisagé ou pour des opérations complexes susceptibles de nécessiter des opérations correctives. Elle permet, en amont de la notification, pour les
entreprises qui le souhaitent, d’échanger avec le service des concentrations sur les questions que soulève l’opération. Une pré-notification peut également être
faite à l’Autorité lorsque les parties envisagent un renvoi à la Commission européenne.
Ce contact confidentiel est censé minimiser le risque d’incomplétude lorsque le dossier est notifié formellement et permettre donc d’accélérer l’examen de l’
opération par l’Autorité, ou conforter les parties lorsque l’opération de concentration n’entre pas dans le champ du contrôle (dans cette dernière hypothèse elles
en sont informées par une lettre de confort) (V. « Lignes directrices relatives au contrôle des concentrations », § 135).
30. – La phase 1 –
Une fois notifiée, l’opération est examinée par l’Autorité de la concurrence (ou plus rarement par le ministre chargé de l’Économie dans les conditions prévues à l’
article L. 430-7-1 du Code de commerce) dans le cadre d’un premier examen dit de « phase 1 ». Au terme de cet examen, qui peut impliquer la consultation de
tiers (clients, concurrents ou fournisseurs) dans le cadre d’un test de marché, l’Autorité de la concurrence se prononce sur l’opération. Elle peut :
l’autoriser, en subordonnant éventuellement cette autorisation à la réalisation des engagements pris par les parties si l’opération est susceptible d’avoir
des effets anticoncurrentiels ;
ou, s’il subsiste un doute sérieux d’atteinte à la concurrence qui ne peut être compensé par les engagements éventuellement proposés, engager un
examen approfondi, dit « phase 2 » (V. n° 33 ).
Le ministre chargé de l’Économie peut aussi demander l’ouverture d’une phase 2. (V. « Lignes directrices relatives au contrôle des concentrations, Lignes
directrices », § 135).
soit l'autoriser, éventuellement « en enjoignant aux parties de prendre toute mesure propre à assurer une concurrence satisfaisante ou en les obligeant à
observer des prescriptions de nature à apporter au progrès économique une contribution suffisante pour compenser les atteintes à la concurrence » ou
en subordonnant cette autorisation à la réalisation effective des engagements pris par les parties.
demander un examen approfondi (V. n° 33 ) de l'opération dans l'hypothèse où l'Autorité de la concurrence aurait décidé de ne pas y procéder, et ce
dans un délai de 5 jours ouvrés à compter de la date à laquelle il aura reçu la décision de l'Autorité de la concurrence ou en aura été informé ;
évoquer l'affaire et statuer sur l'opération pour des motifs d'intérêt général autres que le maintien de la concurrence à l'issue de l'examen approfondi
de l'Autorité de la concurrence, et ce dans un délai de 25 jours ouvrés à compter de la date à laquelle il aura reçu la décision de l'Autorité de la
concurrence ou en aura été informé.
Dans l'hypothèse où l'Autorité de la concurrence n'aurait pas pris de décision et à défaut de demande d'un examen approfondi ou d'évocation de
l'affaire par le ministre chargé de l'Économie dans les délais ci-dessus, l'opération concernée sera réputée autorisée.
enjoint sous astreinte aux parties de notifier l'opération sauf à revenir à l'état antérieur à la concentration ;
peut infliger une sanction pécuniaire d'un montant maximum égal, pour les personnes morales, à 5 % de leur chiffre d'affaires hors taxes réalisé en
France lors du dernier exercice clos augmenté, le cas échéant, de celui réalisé en France par la cible acquise et pour les personnes physiques, à 1,5
million d’euros.
réalisation d'une opération de concentration avant d'y avoir été autorisé (sauf dérogation) ;
omission ou déclaration inexacte dans la notification (le retrait de la décision ayant autorisé la réalisation de l'opération est également possible) ;
inexécution d'une injonction, d'une prescription ou d'un engagement (la décision ayant autorisé l'opération pourra être retirée et l'exécution des
injonctions, prescriptions ou engagements concernés pourra être enjointe sous astreinte) ; ou
en cas de réalisation d'une opération de concentration en contravention des décisions prises par l'Autorité de la concurrence ou du ministre chargé de
l'économie (il est également enjoint sous astreinte aux parties de revenir à l'état antérieur à l'opération de concentration).
qui sont notifiables en application du II de l’article L. 430-2 du Code de commerce mais non du I du même article et qui n’entraînent pas un changement
d’enseigne du ou des magasins de commerce de détail concernés (V. « Lignes directrices relatives au contrôle des concentrations », § 204).
un raccourcissement significatif des délais dans lesquels l’Autorité de la concurrence rend sa décision (15 jours ouvrés, en principe) ;
une décision d’autorisation de l’opération en application de l’article L. 430-5 III du Code de commerce(V. « Lignes directrices relatives au contrôle des
concentrations », § 204).
Toutefois, même si l’opération remplit les conditions prévues pour une procédure simplifiée, l’Autorité de la concurrence peut estimer nécessaire de recourir à la
procédure normale et d’appliquer le délai de 25 jours ouvrés (éventuellement prolongé) prévu à l’article L. 430-5, II du Code de commerce(V. « Lignes directrices
relatives au contrôle des concentrations », § 209).
b) Contrôle communautaire
1) Champ d'application
39. – Seuils –
À moins que chacune des entreprises concernées réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires total dans la Communauté européenne à l'intérieur d'un seul
et même État membre, une concentration est de dimension communautaire lorsque :
le chiffre d'affaires total réalisé au plan mondial par l'ensemble des entreprises concernées représente un montant supérieur à 5 milliards d’euros ; et
le chiffre d'affaires total réalisé individuellement dans la Communauté par au moins deux des entreprises concernées représente un montant
supérieur à 250 millions d’euros.
Sous la même réserve des deux tiers, une concentration qui n'atteint pas les seuils fixés ci-dessus est néanmoins de dimension communautaire lorsque :
le chiffre d'affaires total réalisé au plan mondial par l'ensemble des entreprises concernées représente un montant supérieur à 2,5 milliards d’euros ; et
dans chacun d'au moins trois États membres, le chiffre d'affaires total réalisé par toutes les entreprises concernées est supérieur à 100 millions d’euros
et le chiffre d'affaires total réalisé individuellement par au moins deux des entreprises concernées est supérieur à 25 millions d’euros ; et
le chiffre d'affaires total réalisé individuellement dans la Communauté par au moins deux des entreprises concernées représente un montant supérieur à
100 millions d’euros.
2) Procédure
Il existe également, au niveau communautaire, une procédure accélérée (dite « simplifiée ») si les entreprises concernées ont des marchés distincts et non
reliés verticalement, ou, en cas de relations horizontales, la part de marché cumulée est inférieure à 20 % et en cas de relations verticales, les parts de marché
individuelles sont inférieures à 30 % (cela concerne en pratique plus de la moitié des opérations). Le délai d’instruction de la Commission est alors de 15 jours
ouvrables à compter de la réception de la notification complète.
43. – Sanctions –
La Commission européenne peut :
ordonner la dissolution d'une concentration réalisée en violation de son interdiction ou de conditions dont elle a assorti sa décision ;
prendre toutes mesures provisoires appropriées pour rétablir ou maintenir les conditions d'une concurrence effective en cas de réalisation d'une
concentration avant son autorisation ou en violation de son interdiction ou des conditions posées ;
révoquer sa décision d'autorisation dans l'hypothèse où elle se serait fondée sur des indications inexactes ou si les parties ne respectent pas une
charge dont la décision était assortie.
La Commission européenne peut également infliger aux parties à la concentration des amendes jusqu'à concurrence de :
1 % du chiffre d'affaires mondial réalisé par les parties concernées (au sens de l'article 5 du règlement préc. n° 24) lorsque les parties fournissent, de
manière délibérée ou par négligence, des renseignements inexacts ou dénaturés ou répondent de façon inexacte ou incomplète aux enquêtes de la
Commission européenne ;
10 % du chiffre d'affaires mondial réalisé par les entreprises concernées (au sens de l'article 5 du règlement préc. n° 24) en cas d'omission de
notification, de réalisation d'une opération avant la décision ou en contravention avec la décision de la Commission européenne ou de refus de
dissoudre une concentration ou de se conformer aux mesures provisoires décidées par la Commission européenne.
44. – Introduction –
Lorsque l’acquéreur ou l’investisseur financier est une personne étrangère, l’opération de LBO peut entrer dans le champ des règles relatives au contrôle des
investissements étrangers en France si l’activité de la cible entre dans le champ d’application de cette réglementation.
1) Champ d’application
45. – Principe –
Lorsqu’un investisseur étranger viendrait à détenir, directement ou indirectement, le contrôle de la holding de reprise ou, pour un investisseur non-membre
de l’UE, une participation supérieure à 33,33 % du capital ou des droits de vote et que la cible exerce une activité « sensible », l’opération ne pourra être
réalisée qu'avec l'autorisation du ministre chargé de l'Économie.
activités de nature à porter atteinte à l'ordre public, à la sécurité publique ou aux intérêts de la défense nationale ;
Les articles R. 153-2 et R. 153-5 du Code monétaire et financier listent précisément les secteurs concernés selon que l’investisseur étranger est ressortissant ou
non de l’Union européenne, étant précisé que le décret n° 2018-1057 du 29 novembre 2018 a largement étendu la liste des activités concernées et
particulièrement sur les secteurs d’avenir.
en cas d’investissement impliquant la prise de contrôle, au sens de l’article L. 233-3 du Code de commerce (en ce compris le contrôle conjoint), d’une
entreprise française, ou ;
en cas d’acquisition de tout ou partie d'une branche d'activité d'une entreprise française, ou ;
si l’investisseur n’est pas ressortissant de l’Union européenne, en cas de franchissement du seuil de 33,33 % du capital ou des droits de vote d’une
entreprise française, ou ;
en cas d’acquisition par une entreprise française, contrôlée par un investisseur étranger, de tout ou partie d'une branche d'activité d'une entreprise dont
le siège social est établi en France dans l'une des activités énumérées du 8° au 14° de l'article R. 153-2 et à l'article R. 153-5 du Code monétaire et
financier.
Les fonds d’investissement étant réputés être contrôlés par leur société de gestion, il conviendra alors de chercher la personne physique contrôlant in fine la
société de gestion.
2) Procédure
L’arrêté précise que la demande doit être envoyée au moment de la survenance du premier des événements matérialisant l'accord des parties contractantes.
49. – Délai de réponse du ministre –
Le ministre chargé de l'Économie doit se prononcer dans un délai de 2 mois à compter de la date de réception de la demande d'autorisation. À défaut de
réponse, l'autorisation est réputée acquise. En revanche, si la demande d'autorisation préalable ne contient pas tous les éléments d'information nécessaires, ce
délai court à compter de la date de réception par le service intéressé des informations complémentaires demandées à l'investisseur.
de tout élément de nature à conforter la capacité de l’investisseur à assurer la pérennité d’approvisionnement du secteur de la défense ;
de l’activité de la cible.
autoriser l’opération sous conditions. Les conditions doivent être proportionnées au caractère critique de l’activité réalisée par la cible (C. mon. fin., art.
R. 153-9) ;
Le refus d’investissement doit être motivé et il est susceptible de recours devant une juridiction administrative. Il peut intervenir dans les cas prévus à l’article
R. 153-10 du Code monétaire et financier (i) s’il existe une présomption sérieuse que l’investisseur est susceptible de commettre l’une des infractions visées par
les articles 222-34 à 222-39, 223-15-2, 225-5, 225-10, 324-1, 421-2-2, 433-1, 450-1 du Code pénal, ou (ii) si les conditions ou engagements de l’investisseur ne
suffisent pas à la préservation des intérêts nationaux.
51. – Rescrit –
L’investisseur étranger et, depuis le décret du 29 novembre 2018, la société cible, peuvent saisir le ministre chargé de l’Économie d'une demande écrite aux fins
de savoir si cet investissement est soumis à une procédure d'autorisation ; le ministre doit répondre dans un délai maximal de 2 mois, mais l'absence de
réponse ne vaut pas dispense de demande d'autorisation (C. mon. fin., art. R. 153-7). Le rescrit offre aux parties la possibilité de purger cette question en
amont du processus de vente, avant ou en parallèle des phases de due diligence.
3) Contrôle et sanctions
acquisition ou franchissement du seuil de 10 % du capital ou des droits de vote d’une société française par un étranger ;
acquisition ou de cession de biens immobiliers à l'étranger par des résidents et en France par des non-résidents.
61. – Introduction –
Parallèlement à l'effet de levier financier d'une opération de LBO qui repose sur le recours à l'endettement de la holding, la mise en place d’une intégration fiscale
permettant à la holding de déduire fiscalement les charges financières sur les profits de la société cible génère un effet levier fiscal inhérent aux opérations de
LBO (1°). La holding fait face aux échéances de remboursement et au paiement des intérêts de ses emprunts au moyen de distributions de dividendes effectuées
par la cible et, le cas échéant, en facturant des prestations de service à cette dernière (2°).
l'importance des dettes d'acquisition subsistant lors de la fusion par rapport au financement initial ; et
l'exercice ou non par la holding, avant la fusion, d'une activité autre que la détention de titres.
L'Administration précise en outre que le fait que les deux sociétés aient formé ou auraient pu former un groupe intégré fiscalement est sans incidence sur la
qualification fiscale de l'opération.
la fusion des deux sociétés ne doit pas entraîner de rupture dans l'application du régime fiscal des groupes de sociétés prévu à l'article 223 A du CGI ;
le capital de la société absorbée ne doit comprendre aucun intérêt minoritaire susceptible d'être lésé par l'opération de fusion ; et
l'opération de fusion ne doit concerner que des structures de financement et n'entraîner par conséquent aucun appauvrissement des sociétés
opérationnelles.
74. – Limites concernant la déductibilité des intérêts versés à des associés minoritaires : Principes –
Aux termes de l'article 39, 1, 3° du CGI, la holding ne pourra déduire les intérêts servis à ses associés que si son capital social est intégralement libéré. Cet
article dispose par ailleurs que cette déductibilité est limitée au montant des intérêts “calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux effectifs moyens
pratiqués par les établissements de crédit et les sociétés de financement pour des prêts à taux variable aux entreprises, d'une durée initiale supérieure à deux
ans”. Pour les exercices de 12 mois clos entre le 31 décembre 2018 et 30 janvier 2019, le taux de référence est de 1,47 % (BOI-BIC-CHG-50-50-30, 23 janv.
2019, § °40).
75. – Limites concernant la déductibilité des intérêts versés à des sociétés liées : Limite du taux –
L'article 212, I, a du CGI prévoit une limitation à la déductibilité des intérêts versés au titre des prêts contractés par la holding auprès d'entreprises qui lui sont
liées au sens de l'article 39, 12 du CGI (des sociétés sont liées lorsqu'il existe des liens de dépendance entre elles). Dans cette hypothèse, les intérêts ne sont
déductibles que dans la limite prévue à l'article 39, 1, 3° précité (V. n° 74 ) ou, si les intérêts courus sont supérieurs à ceux ainsi calculés, dans la limite du
montant des intérêts calculés d'après le taux que la holding emprunteuse aurait pu obtenir auprès d'établissements ou d'organismes financiers indépendants
dans des conditions analogues. Le dispositif instaure donc un mécanisme de preuve contraire permettant aux entreprises, lorsque le taux servi est supérieur
au taux de référence défini au 3° du 1 de l'article 39 du CGI, de justifier de la normalité de ce taux (BOI-IS-BASE-35-20-10, 15 avr. 2014, § 70). Toutefois, ce
mécanisme de preuve contraire fait l’objet de nombreux litiges avec l’administration fiscale (TAParis, 16 janv. 2018, n° 1707553, SAS Studialis. – CAABordeaux,
2 sept. 2014, n° 12BX01182, Stryker Spine : JurisData n° 2014-035816).
76. – Limites concernant la déductibilité des intérêts versés à des sociétés liées : Dispositif anti-hybride –
En outre, l’article 212, I, b du CGI prévoit que la holding doit être en mesure de démontrer à la demande de l’administration que les intérêts qu’elle verse sont,
chez l’entreprise prêteuse liée, soumis à un impôt au moins égal au quart de l'impôt sur les sociétés françaises. Compte tenu de la baisse programmée de l’
impôt sur les sociétés, le taux d’imposition minimale varie de 7,75 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019 à 6,25 % pour les exercices
ouverts à compter du 1er janvier 2022, date à laquelle le taux maximal de l’impôt des sociétés devrait être de 25 %, sous réserve de modifications législatives
futures (BOI-IS-BASE-35-50, 1er août 2018, § 40).
a) Activation de la holding
84. – Les prestations de services rendues par la holding auprès de ses filiales seront soumises à la TVA et lui confédéreront la qualité d’assujettie.
85. – Les dépenses engagées par la société cible afin de rendre ces prestations de services constitueront des charges déductibles et pourront donner lieu à la
récupération totale ou partielle de la TVA, pour autant que le caractère effectif de ces prestations puisse être établi.
86. – Par ailleurs, les frais d’acquisition supportés par holding au titre de l’opération présentent le caractère de frais généraux au regard de la TVA (CE, 23 déc.
2010, n° 307698, Sté Pfizer Holding France : JurisData n° 2010-026170. – CE, 23 déc. 2010, n° 324181, min. c/ SA Michel Thierry). La TVA grevant ces frais
devrait être ainsi intégralement déductible dès lors que les frais engagés entretiennent un lien direct et immédiat avec l’ensemble de son activité économique,
telle que les prestations de services taxables à la TVA réalisées par la holding (BOI-TVA-DED-20-10-20, 10 juin 2013, § 480). Il convient à ce titre que la qualité d’
assujettie soit conférée à la holding à une date relativement proche de la date d’acquisition (i.e. « closing »), de manière à ce que ces frais aient un lien direct et
immédiat avec une activité taxable. La holding doit donc anticiper les moyens nécessaires à l’accomplissement des prestations de services envers ses filiales
avant l‘acquisition de sorte à ce qu’ils soient mis en place dans les meilleurs délais après cette date.
A. - Structuration de l'endettement
1° Types d'endettement
90. – Introduction –
Le financement de la holding d'acquisition se réalise par des apports en capitaux propres mais également par voie d'emprunt. Le recours à l'endettement
constitue en effet un élément essentiel des opérations de LBO. La dette, destinée à financer l'acquisition de la cible par la holding, permet de réaliser l'effet
de levier financier inhérent à ce type d'opérations. Par ailleurs, une nouvelle dette est quasi systématiquement souscrite afin de refinancer l’endettement existant
du groupe cible et de permettre de financer des opérations de croissance externe. La pratique a développé plusieurs types et niveaux d'endettement, toujours
assortis de sûretés.
2° Modalités du financement
95. – Caractéristiques –
Les prêts bancaires mis en place dans le cadre des LBO sont des prêts classiques, répondant aux exigences légales et aux pratiques de marché en la matière
(taux d'intérêts, TEG, cas de défaillance et mécanismes d'exigibilité anticipée…). Certains mécanismes et problématiques sont toutefois spécifiques aux
opérations de LBO, s'agissant des parties, des conditions suspensives, des engagements de faire et de ne pas faire, des conditions financières et des modalités
de remboursement.
Dans le cadre de processus de vente très compétitifs, les prêteurs peuvent accepter l’absence de cette clause et plus généralement de toute condition
suspensive (en dehors des remises documentaires permettant de s’assurer de la bonne réalisation de la capitalisation, de l’acquisition, et de la constitution
des sûretés notamment) afin de rassurer les vendeurs sur le caractère certain de la mise à disposition du financement (en anglais certain funds).
b) Spécificités de la mezzanine
103. – Caractéristiques –
Le financement mezzanine présente des caractéristiques spécifiques liées à l'accès au capital que n'offre pas la dette bancaire. L'émission, au profit
des « mezzaneurs », de valeurs mobilières donnant accès au capital de l'emprunteur, impose ainsi l'organisation des conditions de leur accès au capital et
de leur adhésion au pacte d'actionnaires.
104. – Régime –
La mezzanine prend la forme d'un emprunt obligataire assorti de bons de souscription d'actions, permettant d'accéder au capital. Les exigences du régime
afférent aux valeurs mobilières choisies comme support de ce financement doivent donc être respectées (conditions d'émission, organisation des masses,
protection des droits). Les conditions d’accès au capital sont détaillées (libre à tout moment ou encadré, limité à certaines hypothèses telles que l'introduction en
bourse ou la cession de l'emprunteur). En signant le pacte d'actionnaires, le « mezzaneur » se voit imposer des règles nécessaires à la cohésion de l'actionnariat
(obligation de cession conjointe, obligation d'offrir ses titres à la préemption et autres restrictions au transfert) mais bénéficie de droits, tels qu'une information
renforcée, un droit à participer aux futures augmentations de capital (au travers de l’exercice de bons de souscription d’actions anti-dilutifs), ou encore une faculté
de cession conjointe en cas de changement de contrôle. Par ailleurs, le contrat de mezzanine stipulera des cas d'exigibilité anticipée identiques à ceux de la dette
senior mais subordonnés à cette dernière.
105. – Principe –
La subordination fait généralement l'objet d'une convention spécifique qui a pour objet de gérer l'ordre (rang de priorité des prêteurs) des paiements
par l'emprunteur des diverses commissions et échéances de remboursement. Cette convention de subordination règle également la hiérarchie des sûretés qui
sont consenties dans l'opération et l'imputation des paiements entre les différents prêteurs en cas de réalisation desdites sûretés. Cette convention de
subordination est également signée par les actionnaires et les titulaires des obligations convertibles afin de leur interdire la perception de toute somme en leur
qualité d’actionnaire ou d’obligataire avant le remboursement complet de l’endettement financier.
a) Types de syndication
108. – Typologie –
Il convient de distinguer la « syndication directe », c'est-à-dire celle où plusieurs banques traitent avec un débiteur unique dans le cadre d'un instrumentum
commun (la convention de crédit), de la « syndication indirecte » ou « occulte ». Cette dernière voit le débiteur-emprunteur traiter avec une seule banque qui
répartit, dans un second temps, le risque afférent au crédit entre plusieurs autres établissements de crédit au moyen d'une convention de « sous-participation », à
laquelle le débiteur-emprunteur n'est pas partie.
L'article 2328-1 du Code civil dispose que “toute sûreté réelle peut être constituée, inscrite, gérée et réalisée pour le compte des créanciers de l'obligation
garantie par une personne qu'ils désignent à cette fin dans l'acte qui constate cette obligation” .
1° Problématiques soulevées
113. – Principe –
L'article L. 225-216, alinéa 1er du Code de commerce dispose qu'une société ne peut avancer des fonds, accorder des prêts ou consentir une sûreté en
vue de la souscription ou de l'achat de ses propres actions par un tiers. Le non-respect de cette disposition est sanctionné pénalement pour les
mandataires sociaux concernés en vertu de l'article L. 242-24 du Code de commerce et par ailleurs susceptible d'entraîner la nullité des engagements pris sur le
fondement de l'article L. 235-1 du Code de commerce. Ce texte interdit-il la mise en place de toute sûreté sur les actifs d'un groupe de sociétés acquis en
garantie des financements mis en place dans le cadre d'opérations de LBO ? Pour répondre à cette question, il convient de confronter les termes de l'article
L. 225-216 du Code de commerce à la double problématique de la définition des sûretés et de l'étendue des actifs susceptibles d'être affectés en garantie du
remboursement de la dette d'acquisition.
En revanche, dans le cas usuel où la société cible est bénéficiaire d’un prêt de refinancement afin de rembourser un financement existant, le prêteur se verra
consentir des sûretés sur les actifs de la cible.
115. – Tempérament –
En pratique, la prudence recommande toutefois de considérer que tout mécanisme visant à garantir directement ou indirectement le remboursement de la dette
d'acquisition (notamment la délégation imparfaite, la promesse de porte-fort ou les stipulations de solidarité) risque d'être sanctionné par cet article. Il faut noter
qu’au vu de l’évolution de la réglementation européenne cette interdiction est susceptible d’évoluer dans le sens d’un assouplissement (ce qui a été le cas dans
certaines législations de pays de l’Union européenne).
118. – Calendrier de mise en place des sûretés et recours aux actifs des filiales –
L'interprétation restrictive de l'article L. 225-216 du Code de commerce conduit à s'interroger sur la faculté de constituer des sûretés sur les actifs de la cible
postérieurement à la mise en place du financement (la sûreté ne serait ainsi pas constituée en vue de l'acquisition de la cible, au sens de l'article L. 225-216 du
Code de commerce). Elle impose également de discuter la faculté d'affecter en garantie d'une dette d'acquisition non pas les actifs de la société acquise mais
ceux de ses propres filiales. La prudence semble imposer de ne pas se contenter du critère de postériorité pour valider la mise en place des sûretés par la
cible, une telle mise en place supposant, en tout état de cause, un accord de la cible préalable à l'acquisition (un engagement de porte-fort d'exécution de la
holding à ce que la société cible consente aux prêteurs des sûretés sur ses actifs postérieurement à l'acquisition).
121. – Remontée des actifs de la cible à la holding et affectation en garantie par cette dernière –
La jurisprudence a validé la possibilité d'affecter au profit des prêteurs les distributions faites par la cible à la holding d'acquisition. Comme indiqué,
dans une lecture stricte, une fois les actifs de la cible valablement appréhendés par la holding – ils deviennent de ce fait des actifs de cette dernière – et les
sûretés constituées non pas par la cible mais par la holding, l'article L. 225-216 du Code de commerce ne trouverait plus à s'appliquer. Partant de ce constat, la
pratique a développé le mécanisme dit de « debt push down » qui permet, par la souscription d'un emprunt par la cible ou ses filiales, de financer des
distributions de dividendes (voire des distributions exceptionnelles de primes et réserves, ou l'amortissement du capital) vers la holding. Dans ce cadre, les
banques peuvent par ailleurs prendre directement des garanties sur les actifs de ces sociétés, sans violation de l'article L. 225-216 du Code de commerce. Ce
mécanisme est aujourd'hui assez largement utilisé par la pratique mais il convient à tout le moins de veiller à ce que l'emprunt contracté par la cible ou ses
filiales n'excède pas la capacité de remboursement normal de celles-ci et que les sûretés constituées par ces sociétés ne garantissent que les prêts
souscrits par elles et en aucun cas les prêts ayant servi à l'acquisition des titres de la cible. De façon plus générale, de telles pratiques peuvent être
critiquées sur le fondement d'un abus de majorité (notamment si des associés minoritaires restent présent au capital de la société cible, hypothèse qui reste l’
exception) ; si les distributions s'avèrent excessives au regard de la capacité financière de la cible, elles seront également susceptibles d'être qualifiées de fautes
de gestion en cas d'ouverture d'une procédure collective.
125. – Régime –
Le principal élément d'actif affecté au remboursement de la dette d'acquisition étant les titres de la cible, l'une des sûretés les plus utilisées dans le cadre des
LBO consiste dans le nantissement de compte-titres et de titres financiers prévu à l'article L. 211-20 du Code monétaire et financier. Ce nantissement est
efficacement constitué par une déclaration de gage adressée au teneur de comptes. Le nantissement portant sur le compte lui-même, tous les biens qui y
entrent, sont de plein droit compris dans l'assiette du nantissement : en effet l'article L. 211-20, I du Code monétaire et financier dispose que figurent notamment
dans le compte nanti “les titres financiers et les sommes en toute monnaie postérieurement inscrits au crédit de ce compte, en garantie de la créance initiale du
créancier nanti” .
Ces titres financiers ou autres valeurs font ainsi partie de l'assiette du nantissement et sont « considérés comme ayant été remis à la date de déclaration de gage
initiale ». Cela évite notamment au créancier le risque de voir une partie de son nantissement annulée sur le fondement de l'article L. 632-1-I-6° du Code de
commerce, au motif qu'il aurait été constitué en période suspecte pour garantir une dette antérieurement contractée.
En outre, et bien que cela soit contesté par certains en raison de l'indivisibilité du droit de rétention, il semble possible de donner en nantissement les mêmes
instruments financiers successivement à plusieurs créanciers (V. Ph. Malaurie et L. Aynès, Droit civil, Les sûretés, La publicité foncière, par L. Aynès et P. Crocq :
Defrénois, 9e éd., 2015, n° 538. – A. Couret et H. Le Nabasque (ss dir.), Droit financier : Précis Dalloz, 2e éd., 2012, n° 1198. – D. Legeais, Sûretés et garanties
du Crédit : LGDJ, 6e éd., 2008, n° 525. – G. Ferreira, Le nantissement de second rang : JCP E2005, 80. – G. Ansaloni, Sur le nantissement de second rang de
compte d'instruments financiers : RD bancaire et fin.2008, étude14. – S. Praicheux et D. Robine, Nantissement de compte d'instruments financiers : Dict. Joly
Bourse, spéc. n° 110). Le procédé d'entiercement par l'intermédiaire du teneur de compte permet en effet de constituer des nantissements de rang subséquents
sur les mêmes titres, ces nantissements étant classés par l'ordre des dates des déclarations de gage ou, en cas d'identité de date (ce qui est généralement le cas
en pratique compte tenu de la simultanéité qui a cours lors de la mise en place des financements) selon l'ordre de rang convenu entre les parties. L'argument
selon lequel l'indivisibilité du droit de rétention rendrait impossible la constitution de nantissements successifs ne nous semble pas pertinent. L'absence de
dépossession réelle suffit – à l'instar des nantissements des meubles incorporels – à justifier la constitution de nantissements de rangs successifs qui
fonctionnent alors de manière similaire aux rangs prévus pour les hypothèques. Cette analyse semble confortée par le régime du gage de meubles corporels
sans dépossession et du nantissement de meubles incorporels qui visent expressément la possibilité de constitution de rangs successifs. Néanmoins, il peut être
opportun que la convention de nantissement prévoit la possibilité ou non de procéder à un nantissement de second rang et de prévoir les modalités de mise en
œuvre du nantissement de second rang.
b) Le recours à la fiducie
127. – Régime –
Les prêteurs pourront bénéficier du régime de fiducie, et plus particulièrement de celui de fiducie-sûreté prévu par l’article 2011 du Code civil qui définit la
fiducie comme “l'opération par laquelle un ou plusieurs constituants transfèrent des biens, des droits ou des sûretés, ou un ensemble de biens, de droits ou de
sûretés, présents ou futurs, à un ou plusieurs fiduciaires qui, les tenant séparés de leur patrimoine propre, agissent dans un but déterminé au profit d'un ou
plusieurs bénéficiaires”. Le transfert de biens ou droits à un fiduciaire à titre de sûretés d'un créancier est donc à présent expressément prévu par les textes
même si on peut noter qu’il est peu utilisé en pratique.
c) Nantissement de créances
128. – Régime –
En alternative à la cession Dailly et à la fiducie décrite ci-dessus, les prêteurs auront aussi la possibilité de se voir affecter en garantie les flux de créances,
présents ou futurs, de la holding sur la société cible, en utilisant le nantissement de créances prévu par les articles 2355 et suivants du Code civil.
L'article 2356, alinéa 3 du Code civil dispose que l'acte écrit, qui constitue la condition de validité du nantissement, “doit permettre l'individualisation [des créances
futures nanties] ou contenir des éléments permettant celle-ci, tels que l'indication du débiteur, le lieu du paiement, le montant des créances ou leur évaluation, et
s'il y a lieu leur échéance”. L'article 2363 du Code civil dispose que si le créancier nanti notifie son nantissement au débiteur de la créance nantie, “seul le
créancier nanti reçoit valablement paiement de la créance donnée en nantissement tant en capital qu'en intérêts” .
130. – Principe –
Dans certaines hypothèses, notamment lorsqu'est mis en place un mécanisme de debt push down, les prêteurs bénéficieront de garanties sur les actifs de la
cible et/ou de ses filiales. Les parties pourront alors avoir recours au régime du gage de meubles corporels, qui permet la constitution efficace de ce type de
sûreté sans procéder obligatoirement à la dépossession corrélative du constituant (le gage avec dépossession demeurant toutefois toujours possible aux termes
de l'article 2337 du Code civil). Cette absence de dépossession permettra notamment de ne pas gêner, voire paralyser, l'activité de l'emprunteur (en l'occurrence
la cible ou les filiales) et donc d'augmenter substantiellement l'assiette des biens gagés au profit des prêteurs. En effet, l'article 2337 du Code civil dispose
expressément que “le gage est opposable aux tiers par la publicité qui en est faite” et consacre ainsi pleinement, pour cette sûreté, un principe de gage sans
dépossession (ou la consécration d'une possession purement juridique distincte de la possession réelle) (V. sur cette question, F. Danos, Propriété, possession
et opposabilité : Economica, 2007, n° 319).
131. – Publicité –
La publicité prévue par les textes prend la forme d'une inscription sur un registre spécial tenu par le greffe du tribunal de commerce et ayant pour effet de rendre
le gage opposable à tous (C. civ., art. 2338) selon les modalités prévues par décret. L'article 2340 du Code civil dispose, quant à lui, qu'en cas de conflit entre
plusieurs gages successifs sans dépossession, le rang est établi par la date de la publicité de chaque gage et l'ordre de leur inscription. Le registre spécial sur
lequel est effectuée l'inscription est tenu par le greffier du tribunal de commerce dans le ressort duquel le constituant est immatriculé ou, s'il n'est pas soumis à
l'obligation d'immatriculation, dans le ressort duquel est situé, selon le cas, son siège ou son domicile.
En outre, la constitution de gages successifs est à présent expressément prévue puisque l'article 2340 du Code civil dispose que le même meuble peut faire
l'objet de gages successifs sans dépossession, le rang des créanciers dépendant de l'ordre de leur inscription. Enfin, par renvoi de l'article 2355 du Code civil et
sauf dispositions spéciales, le régime du gage de meubles corporels s'étend au nantissement de meubles incorporels autres que les créances.
135. – Mécanisme –
Enfin, les prêteurs auront fréquemment recours à des délégations imparfaites, prévues par l'article 1336 du Code civil, afin de garantir le remboursement de leur
créance. Ces délégations de paiement portent sur des créances que pourrait détenir la holding au titre soit de ses polices d'assurances, en particulier l'assurance
« hommes-clés », soit au titre d'une mise en œuvre de la garantie d'actif et de passif consentie par le ou les vendeurs de la cible. Dans ces hypothèses, le
débiteur délégué – la compagnie d'assurance ou les vendeurs de la cible – s'engage directement envers les prêteurs à acquitter sa dette entre les mains de ces
derniers, ce paiement venant garantir le remboursement de la créance des prêteurs.
A. - Modalités d'acquisition
136. – Introduction –
Le but de l'opération de LBO est l'acquisition de la cible. De ce point de vue, le LBO obéit aux règles habituelles de toute acquisition d'entreprise, qui requiert
la conclusion d'un accord entre vendeur et acquéreur sur la chose vendue (les titres), ses qualités intrinsèques (en l'occurrence les éléments d’actif et de passif
de la cible) et son prix. La pluralité d'investisseurs (l'équipe dirigeante et les investisseurs financiers) au niveau de la holding d'acquisition nécessite également la
mise en place de règles afin de régir les relations entre les associés relatives, en particulier, à la gouvernance du nouveau groupe et aux transferts des titres
émis par la holding.
si la société n’est pas tenue d’avoir un comité social et économique, au moins 2 mois avant la date de conclusion du contrat de vente (sauf si chaque
salarié a fait connaître au cédant sa décision de ne pas présenter d’offre avant l’expiration de ce délai) ; ou
si la société est tenue d’avoir un comité social et économique, au plus tard en même temps que celle faite au comité en application de l’article L. 2312-8
du Code de travail, la vente pouvant alors être réalisée au terme de la procédure d’information et consultation du comité.
En cas de non-respect de l’obligation d’information des salariés, en dehors de l’octroi de dommages-intérêts, une amende civile (dont le montant maximum est de
2 % du montant de la vente) peut être prononcée contre le débiteur de l’obligation (à savoir le cédant ou le représentant légal de la cible).
Afin d’éviter la constitution d’un délit d’entrave et le risque de voir l’opération suspendue, les parties attendront que le comité se prononce et donne un avis
(négatif ou positif) sur l’opération avant de conclure le protocole d’acquisition.
2° 2°Protocole d’acquisition
Le protocole peut être conclu, du côté acquéreur, par les futurs actionnaires de la holding ou, à tout le moins, par le principal actionnaire de celle-ci, au nom et
pour le compte de la société en formation ou directement en son nom mais avec faculté de substitution au profit de la holding, dès l'immatriculation de celle-
ci. Lorsque la holding d'acquisition est déjà immatriculée, mais non encore capitalisée, la prudence impose par ailleurs au vendeur, de prévoir (i) l'intervention de
l'actionnaire de référence de la holding au protocole d’acquisition en qualité de garant de cette dernière, (garantie du respect de son engagement d'acquérir les
titres de la cible) ou (ii) la remise d’engagement de financement de la part des investisseurs (en anglais commitment letter).
Les vendeurs pourront également exiger soit des lettres de confort de la part des banques, soit des engagements en termes de financement.
Les termes du protocole d'acquisition sont négociés, et ce protocole est signé, alors même que les contrats de financement du LBO ne sont généralement pas
encore signés. En effet, la finalisation des prêts bancaires et des financements complémentaires génère des frais (commissions de montage, honoraires de
conseil, etc.) que les parties sont réticentes à engager tant que l’engagement de l'acquisition n'est pas conclu.
144. – Mécanisme de fixation du prix de cession –
Le prix de cession des titres sera généralement fixe (mécanisme dit de locked box ) afin notamment de permettre aux vendeurs fonds d’investissement de
distribuer à leurs investisseurs le prix de cession dès son encaissement, de sécuriser le financement du prix d’acquisition et d’éviter des ajustements complexes
dans le cadre des apports des managers. Dans ce cas, l’acquéreur se verra consentir de la part des vendeurs des déclarations et engagements pour s’assurer
que, depuis les comptes de référence (comptes ayant servi à fixer le prix), la cible a été gérée conformément aux pratiques antérieures (absence d’opérations
exceptionnelles) et que les vendeurs n’ont bénéficié d’aucun transfert de valeurs (en anglais, clause de leakage). Le protocole d’acquisition peut parfois prévoir
une clause d’ajustement de prix sur la base des comptes arrêtés à la date de réalisation du transfert (en anglais closing accounts adjustment ). Ce
mécanisme est rarement utilisé du fait des inconvénients liés à l’incertitude pour le vendeur de recevoir le prix de cession envisagé et des complexités liées à l’
ajustement en lui-même (procédure de détermination du prix, contestation, ajustement lié aux apports).
D'autres conditions suspensives, qui relèvent davantage de la volonté des parties sont fréquemment à prévoir (par exemple, cession préalable d’activité ou de
filiale).
Le protocole d'acquisition doit donc prévoir, à titre de conditions (i) la finalisation des contrats de prêts et autres financements et, (ii) compte tenu des conditions
suspensives que ces contrats de financement contiennent eux-mêmes, la mise à disposition effective des fonds, sans laquelle l'acquisition ne pourrait être
réalisée, ces opérations étant considérées en pratique comme réalisées concomitamment.
150. – Objet –
L'objet des garanties dites d'actif et de passif (qui ne se limite généralement pas à une simple garantie sur les comptes) est de faire supporter aux vendeurs, dans
certaines limites conventionnellement convenues (durée, plafond, seuil, franchise, de minimis et exclusion sur les éléments révélés lors des audits ou dans les
annexes du contrat de cession), les risques liés à l'exploitation passée de la cible et d'assurer à l'acquéreur que les informations qui lui ont été fournies sur la
cible et son activité pendant ses audits pré-acquisition ont été complètes et sincères. Ces garanties figurent dans le protocole d'acquisition ou dans un acte
séparé.
151. – Nature –
En cas de mise en œuvre, la garantie d'actif et de passif donne lieu, à titre d'indemnisation ou de réduction de prix, au versement à l'acquéreur, ou directement à
la cible, de sommes correspondant à l'accroissement du passif ou à la diminution des actifs garantis ou encore, plus globalement, à un préjudice subi par
l'acquéreur ou la cible du fait d’une déclaration inexacte.
Le caractère indemnitaire est parfois discuté et les sommes perçues sont généralement qualifiées de réduction du prix de cession à des fins souvent purement
fiscales (l’indemnité, à la différence de la réduction de prix, n’est pas assujettie à l’impôt sur les sociétés). Un courant doctrinal, suivi par certaines décisions
jurisprudentielles, opère des distinctions entre différents types de garanties conventionnelles et distingue notamment les garanties d'actif et de passif des clauses
de révision de prix (également appelées garanties de valeur), ces types de garanties étant soumis à des régimes différents. Pour exemple, il est
traditionnellement considéré que le montant des sommes perçues au titre d'une clause de révision de prix ne pourrait excéder le montant du prix de cession
contrairement à l'indemnisation d'un préjudice qui pourrait, le cas échéant, dépasser le prix perçu au titre de la vente de la cible.
Pour une étude détaillée sur les conventions de garanties, on se reportera au fascicule 165-35.
Les fonds vendeurs évitent ainsi la constitution de sûretés garantissant les déclarations (séquestre ou garantie bancaire) et la gestion d'un engagement hors bilan
parfois difficilement conciliable avec leurs contraintes de liquidation et leurs objectifs de distribution envers les porteurs de parts du fonds.
Les fonds acquéreurs peuvent pour leur part mettre en valeur leur offre par rapport aux offres plus classiques d'acteurs industriels qui exigent des garanties ou,
alternativement, abaisser leur prix d'acquisition en intégrant une évaluation globale du risque pris dans la valorisation de la cible.
Par ailleurs, influencés par la pratique anglo-saxonne, certains fonds d’investissement ont pris l’habitude de mettre en place des polices d’assurances garantie de
passif afin de libérer les vendeurs de leurs obligations de garantie, étant néanmoins précisé que ces polices ont un coût et des clauses d’exclusions de
responsabilité parfois dissuasives.
153. – Introduction –
Les opérations de LBO font cohabiter investisseurs financiers et dirigeants au sein de la holding d'acquisition. Ces deux parties doivent donc organiser leurs rôles
respectifs au sein du nouveau groupe et s'assurer de l'alignement de leurs intérêts quant aux objectifs à atteindre.
L'organisation statutaire des principes de gouvernance et des règles de co-existence entre associés sera d'autant plus aisée que la holding de reprise est une
société par actions simplifiée. Ses statuts offrent en effet une grande souplesse d'organisation (V. n° 13 ).
Dans d'autres formes sociales, la stipulation d'avantages particuliers ou le recours à des actions de préférence peut également constituer le support de ces
règles. L'avantage de stipulations statutaires réside en premier lieu dans leur efficacité, le non-respect des statuts étant sanctionné par la nullité ou, selon les
cas, par l'inopposabilité des opérations litigieuses.
En revanche, les principaux inconvénients des stipulations statutaires sont l'absence de confidentialité (les statuts pouvant être obtenus par les tiers auprès du
greffe). La mise en place d'un pacte d'actionnaires est donc souvent préférée à une gestion purement statutaire.
En tout état de cause, les aspects relatifs à la composition et au fonctionnement des organes sociaux doivent être incorporés dans les statuts de façon à éviter
une incohérence entre ces derniers et le pacte d'actionnaires.
1° Gouvernance d'entreprise
Ils négocient donc, au moyen de la mise en place de règles de gouvernance particulières, des droits d'information et d’autorisation spécifiques dans le
groupe. Cela est d'autant plus nécessaire que souvent, la quote-part capitalistique de l'investisseur financier (et donc son poids d'actionnaire) est volontairement
limitée par la souscription d'obligations convertibles pour une partie significative de son investissement aux fins notamment de permettre un accès privilégié des
dirigeants au capital. La mise en place de droits trop extensifs peut néanmoins exposer l’investisseur financier à un risque de direction de fait susceptible
d'entraîner sa responsabilité.
Les parties conviendront toutefois attentivement de cette répartition des rôles au sein des organes sociaux à l’effet de permettre un contrôle étroit de certaines
décisions stratégiques par l’organe de supervision mis en place tout en évitant pour ce dernier le risque d’immixtion dans la gestion et d’encourir une
responsabilité de « dirigeant de fait ».
En effet, en l’absence d’une définition légale de la notion de « dirigeant » de SAS, la doctrine et la jurisprudence retiennent notamment que la qualité de dirigeant
d’une SAS appartient à ceux qui ont le pouvoir de représenter la société, mais également aux autres personnes qui disposent d'un pouvoir effectif de gérer
la SAS (conseil de surveillance, etc.). Il n'y a en revanche pas lieu de qualifier de dirigeant les membres d'un organe de surveillance dont le rôle est limité à des
fonctions de contrôle ou de consultation.
La cour d’appel a ainsi considéré qu’un membre du conseil de surveillance de SAS avait la qualité de dirigeant en retenant que les statuts de la société avaient
confié audit conseil de surveillance les pouvoirs du conseil d'administration et du président-directeur général d’une SA (CAParis, ch. 5-9, 20 juin 2013, n° 13
/03892). De même, la qualité de dirigeant a été retenue pour des membres d’un « comité de surveillance » dont le rôle n’était pas limité à l’examen des
orientations stratégiques de la SAS mais qui devait autoriser les opérations et engagements supérieurs à 15 000 euros, seuil modeste compte tenu des activités
de la société, démontrant ainsi un véritable pouvoir d’immixtion dans la gestion (CAParis, 23 févr. 2016, n° 14/24308 : Revue juridique de droit des affaires, juin
2016, n° 453).
La qualité de dirigeant de la SAS est donc appréciée par la jurisprudence au cas par cas, en fonction des pouvoirs détenus par les membres des organes
institués par les statuts et de leur rôle dans la société.
159. – Même s'ils figurent dans un pacte d'actionnaires, les principes ci-dessus devront souvent être repris dans les statuts de la société pour renforcer leur
efficacité et éviter des incohérences susceptibles de générer des conflits relatifs au fonctionnement des organes sociaux.
160. – De nombreuses opérations prévoient par ailleurs la mise en place de comités spécifiques ad hoc tels que comités de rémunération ou d'audit.
162. – Principe –
Afin de s'assurer de la fidélité des dirigeants repreneurs, des clauses spécifiques sont insérées dans les pactes d'actionnaires.
Lorsque l'homme-clé cesse son activité sans qu'une faute puisse lui être reprochée (les Anglo-saxons parlent de good leaver), le rachat de ses actions par les
investisseurs sera généralement effectué à la valeur la plus élevée entre son investissement et le prix de marché (avec un éventuel complément de prix à la
sortie du LBO).
En revanche, si le départ de cet homme-clé est considéré comme fautif (cas du bad leaver), ses actions seront acquises au prix le moins élevé entre le prix
de marché et son investissement avec application d’une décote ; tel est le cas par exemple d’un licenciement pour faute grave ou lourde, de la démission, de la
violation de la clause de non-concurrence ou d’une clause essentielle prévue au pacte (autorisation préalable au titre de la gouvernance ou clause de transfert).
Il est usuellement prévu un cas de départ intermédiaire (cas du medium leaver) traitant les cas de départ ne constituant ni un cas de good leaver ni un cas de
bad leaver. Dans un tel cas, ses actions seront généralement acquises au prix de marché.
La pratique prévoit souvent un mécanisme de vesting permettant de ne pleinement valoriser qu’une partie des titres du dirigeant en fonction du temps passé dans
le groupe à compter de la souscription de ses titres au capital (généralement appliqué sur le mécanisme relutif d’accès au capital, à savoir les actions de
préférence) comme précisé ci-dessous.
167. – Afin d'assurer l'efficacité de ces clauses, des promesses de cession sont stipulées au profit des investisseurs (avec clause de substitution au
bénéfice du manager remplaçant). Dans certains cas, ces promesses bénéficient à la société elle-même, essentiellement dans le but d'attribuer à un nouvel
homme-clé les actions ainsi achetées, mais l'acquisition par la société de ses propres actions s'inscrit dans un contexte juridique encadré et contraignant (V. not.
fasc. 140-20, n° 75 et 76).
168. – Des promesses d’achat sont parfois accordées par les investisseurs dans le cas de good leaver mais les fonds d’investissement sont assez réticents à
les concéder dans la mesure où il s’agit d’engagements hors bilan.
169. – Les outils d'intéressement ( V. n° 192 ) intègrent aussi l'hypothèse de départs d'hommes-clés : leurs conditions d'attribution prévoient généralement un
échelonnement dans le temps, voire une perte de tout droit à exercice ou de valeur en cas de cessation des fonctions au sein de la société (on parle de vesting).
3° Maîtrise du capital
170. – Principe –
Les actionnaires de la holding d'acquisition sont liés par un fort intuitus personae. En conséquence, l'ensemble des parties doit veiller au maintien de l'équilibre
capitalistique.
Ces transferts concernent généralement (i) les transferts entre affiliés (ou à une holding patrimoniale en ce qui concerne les dirigeants), (ii) les transferts
nécessaires à l’intéressement de futurs managers (titres généralement portés par les investisseurs financiers), (iii) les transferts autorisés par les investisseurs
financiers (dans la mesure où il n’y a pas de changement de contrôle) et (iv) les transferts nécessaires aux clauses de liquidité (droit de sortie forcée ou sortie
conjointe).
173. – Agrément –
La clause d'agrément figure parmi les outils de maîtrise des transferts du capital. Elle permet d'appréhender tant les transferts au profit de tiers que ceux entre
actionnaires (C. com., art. L. 228-23, al. 1).
La mise en œuvre d'une clause d'agrément est toutefois susceptible de poser des difficultés, notamment en termes de calendrier ou encore d'obligation par la
société de procéder au rachat de ses propres actions (ce rachat étant lui-même soumis à un régime contraignant, V. JCl. Sociétés Traité, fasc. 140-20, n° 75 et
76).
En outre, le droit d'agrément est exercé de manière collégiale et ne constitue donc pas une faculté donnée à un actionnaire à titre individuel.
La procédure d'agrément offre par ailleurs au cédant un droit de repentir en cas de refus d'agrément de son cessionnaire pressenti, ce qui peut engendrer des
comportements de mauvaise foi de la part de ce dernier.
Enfin, on relèvera que la procédure peut entraîner l'intervention d'un tiers expert (nommé par le tribunal de commerce dans les conditions de l’article 1843-4 du
Code civil), appelé à se prononcer sur la valeur des droits sociaux cédés. Or, les actionnaires de la holding d'acquisition sont généralement réticents à ce qu'un
tiers expert se prononce sur la valorisation du groupe avant la sortie du LBO.
Pour ces raisons, l’utilisation de la clause d’agrément est en pratique exceptionnelle et les praticiens préfèrent la stipulation d'un droit de préemption.
La co-existence des deux procédures est concevable mais, elle accroît la complexité de purge de ces deux procédures, en cas de projet de transfert.
174. – Préemption –
Le droit de préemption permet à ses bénéficiaires de s'opposer à un transfert en se portant acquéreurs des droits sociaux objet de ce projet de transfert. Cette
clause de préemption (comme le droit de cession conjointe) prend généralement le relais des clauses d’inaliénabilité.
Ce droit de rachat offert aux actionnaires s'exerce généralement en proportion de la quote-part du capital de chacun et peut s'organiser par rangs de priorité en
fonction du groupe d'appartenance des actionnaires concernés.
Cette substitution du préempteur au cessionnaire pressenti, intervient en général aux mêmes conditions, notamment de prix, que celles applicables au projet
de transfert qui a déclenché le droit de préemption.
Il convient d'encadrer étroitement le déclenchement de la procédure de préemption par le cédant. Les mentions que ce dernier devra faire figurer dans la
notification de son projet de transfert devront être précises et complètes (identité du cessionnaire, prix offert, éventuelles modalités annexes de l'opération…) et
accompagnées, le cas échéant, de l’offre du cessionnaire.
Pour permettre l'exercice du droit de préemption alors que le prix offert ne serait pas libellé exclusivement en numéraire ou dans les cas d'opérations complexes
comportant un échange de titres (apport de titres par exemple), la stipulation d'un recours à une expertise (en cas de désaccord sur le prix) est conseillée.
175. – Les clauses ci-dessus permettent, en principe, aux actionnaires bénéficiaires (pour autant qu'ils disposent de la surface financière nécessaire) de se porter
acquéreurs des titres dont le transfert est projeté ; en pratique, elles ont toutes pour effet de rendre plus difficile les transferts et contribuent donc à la
stabilité du capital.
176. – Anti-dilution –
La maîtrise du capital concerne également les risques de dilution, notamment par augmentation de capital ou émission de titres donnant un accès différé au
capital.
Au moment de la mise en place du LBO, il est difficile de prévoir avec certitude l'évolution des besoins en financement du groupe. La nécessité d'un
refinancement en fonds propres ne peut donc pas être exclue.
Plus particulièrement, dans les opérations de build-up (constitution progressive d'un groupe de sociétés par opérations de croissance externes successives) une
telle évolution est de l'essence même du projet de LBO. Les montants nécessaires à la réalisation du build-up ne sont toutefois pas toujours déterminés avec
précision, puisqu'ils dépendent notamment du prix de rachat des futures cibles additionnelles. Dans ce type d'opérations, il n'est pas non plus possible de prévoir
avec certitude les exigences des dirigeants des futures cibles acquises quant à leur niveau de participation au capital de la holding d'acquisition.
Les parties doivent donc autant que possible définir les principes qui s'appliqueront aux futurs financements de la société : par exemple, droit de chacune des
parties de participer aux futures augmentations de capital en proportion de sa quote-part du capital (indépendamment du maintien ou non du droit
préférentiel de souscription des actionnaires), engagement de l’investisseur financier de conserver un ratio capital / obligations convertibles (sweet equity)
identique à celui retenu dans le cadre de son financement initial.
Des exceptions à la protection anti-dilutive sont généralement prévues comme l’entrée de nouveaux actionnaires au titre d’une acquisition (vendeurs ou
dirigeants de la cible) ou besoin de recapitalisation pour éviter une situation de faillite.
4° Clauses de sortie
177. – Introduction –
L'objectif de réalisation d'une plus-value de cession est primordial dans la décision des investisseurs financiers de participer au LBO. Le montant de cette
plus-value et l'échéance à laquelle elle sera réalisée sont les facteurs qui détermineront la rentabilité de leur investissement. Financiers et opérationnels doivent
donc dès l'origine mettre en place les outils assurant l'alignement de leurs intérêts en vue de la réalisation de cet objectif ainsi que la certitude de réaliser à terme
une cession de 100 % des titres.
Ces clauses de sorties sont organisées sous forme de promesses de porte-fort ou de promesses d'achat visant à assurer aux bénéficiaires que le cessionnaire
de l'opération concernée (ou, selon le cas, l'actionnaire cédant) se portera acquéreur des titres du bénéficiaire, selon les mêmes termes et aux mêmes conditions
que ceux applicables au transfert donnant lieu à l'exercice du droit de sortie.
179. – En l'absence de marché liquide sur les titres de sociétés non cotées, il est rare que l'on puisse trouver des acquéreurs pour moins qu'un bloc de contrôle,
voire la totalité du capital social. Par les contraintes qu'elles imposent à l'acquéreur, ces clauses de sortie visent donc davantage au maintien des équilibres du
capital qu'à assurer une véritable liquidité aux parties.
La clause de drag along consiste en une promesse de vente consentie par les parties généralement au profit d’un tiers acquéreur exerçable par le majoritaire,
ou l’ensemble des associés qui, à une majorité qualifiée à déterminer, ont décidé d'accepter une offre d'acquisition portant généralement sur l'intégralité du capital
de la holding d'acquisition.
La clause dite de liquidité, appelée à jouer si l'événement de liquidité n'est pas intervenu dans le délai initialement souhaité par les parties, consiste à permettre
au majoritaire ou à un ou plusieurs actionnaires agissant collectivement (généralement les investisseurs financiers) d'initier au nom et pour le compte de tous un
processus de vente portant sur la totalité des titres. Dès lors qu'une offre serait recueillie aux termes du mandat confié à un intermédiaire, les autres parties
seraient contraintes d'y apporter leur participation.
Ainsi, les statuts de la ManCo prévoiront des clauses d’inaliénabilité, des clauses de sortie forcée et des clauses d’exclusion en cas de départ ou de
violation des clauses de transfert. Par ailleurs, l’investisseur financier majoritaire souscrira une action de préférence (désignée par le terme golden share) lui
donnant notamment (i) le contrôle dans les assemblées d’associés et sur la nomination du président de ManCo, (ii) l’exercice des clauses de sortie et d’exclusion
et (iii) un droit de veto sur toutes les décisions importantes (transfert de la participation dans la holding, acquisition d’actifs, investissement, souscription de
dette…).
Dans l’hypothèse d’une ou plusieurs ManCo, il sera généralement prévu une liquidité directe par cession des titres émis par ManCo dans le cadre d’une sortie
afin d’éviter les frottements fiscaux et les opérations liées à la distribution aux managers du prix de cession reçu par Manco en cas de cession des titres de la
holding détenus par Manco, étant précisé que dans le cas où, au jour de la sortie, la cession des titres de ManCo serait remise en cause, l’investisseur financier
pourra toujours procéder par cession des titres de la holding détenus par ManCo.
183. – Durée –
Le pacte est généralement conclu pour une durée suffisamment longue pour couvrir la durée du LBO (un objectif de liquidité de LBO se situe en pratique aux
alentours de 5 à 7 ans, une durée de pacte comprise entre 10 et 15 ans est usuelle). L'absence de stipulation d'une durée exposerait le pacte à pouvoir être
dénoncé à tout moment et unilatéralement par toute partie, à la seule condition du respect d'un préavis suffisant. À cet égard, la jurisprudence a estimé qu'un
pacte conclu pour la durée pendant laquelle les associés sont actionnaires de la société n'est affecté d'aucun terme, et doit donc être considéré comme conclu
pour une durée indéterminée (Cass.com., 6 nov. 2007, n° 07-10.620 et 07-10.785, SAS Cie Générale de Tourisme et d'Hôtellerie CGTH c/ SA Cie Méridionale de
Participation CMP : JurisData n° 2007-041276 ; D. 2008, p. 1024). Par ailleurs, un contrat (et par analogie un pacte) dont la durée serait stipulée égale à celle de
la société elle-même, pourrait être qualifié d'engagement perpétuel et encourir à ce titre la nullité ou la requalification en engagement à durée indéterminée
(CAToulouse, 27 sept. 1999. – Cass.1re civ., 19 mars 2002, n° 99-21.209, Roudier c/ SA Clinique des Cèdres : JurisData n° 2002-013635).
184. – Adhésion –
Il est impératif que, pendant sa durée de validité, le pacte lie l'intégralité des actionnaires de la société. Il doit donc prévoir un mécanisme d'adhésion (qui règle
également la question de l'appartenance d'un nouvel adhérent à telle ou telle catégorie de parties au pacte).
185. – Modifications –
Enfin, il n'est pas rare que les aléas du marché (nécessité d'avancer ou de retarder les objectifs de liquidité, survenance de certains événements imprévus, départ
d'un dirigeant, intégration d'une nouvelle cible au groupe…) imposent de faire évoluer certains aspects du pacte.
Une modification des termes du pacte nécessite selon nous, par application des principes du consensualisme, un accord de l'ensemble des parties signataires
. À notre sens, la pratique anglo-saxonne d'une modification à une majorité préalablement convenue est donc susceptible d'être contestée en droit français. En ce
sens, une modification du pacte peut s'avérer plus complexe que celle de statuts (la modification des statuts pouvant en effet être réalisée par la volonté d'une
majorité des actionnaires à l’exclusion de certaines clauses relatives aux transferts).
La contrainte d'un accord unanime, inhérente au pacte d'actionnaires, exige que les évolutions prévisibles du pacte soient convenues dès l'origine (par exemple,
évolution du capital en cas de réalisation d'un build-up ou encore impossibilité d'atteindre l'objectif de liquidité à l'échéance prévue).
La nécessité de cet accord unanime justifie, en présence d'un nombre important de dirigeants, la mise en place d'une holding des cadres. Le recours à des
clauses de représentation stipulant un mandat octroyé par certaines catégories d’actionnaires (usuellement les managers) à un représentant est parfois utilisé,
étant néanmoins précisé qu’en principe tout mandat peut être révoqué (C. civ., art. 2004) sauf pour le cas du mandat d’intérêt commun.
186. – Introduction –
La réussite d'une opération de LBO est étroitement liée à la qualité et à l'implication du management. Par ailleurs, pour des niveaux de prix de cession similaire,
le candidat financier repreneur choisi sera généralement celui ayant offert le management package le plus attractif. Outre un traitement spécifique dans le pacte
(ou dans des promesses séparées en cas de départ du dirigeant) qui lie les actionnaires de la holding d'acquisition, la mise en place d'outils d'intéressement
s'avère donc un élément essentiel.
L'implication du management s'articule autour de trois axes principaux : son engagement financier dans la holding par souscription au capital de celle-ci, les
fonctions opérationnelles qui lui sont confiées (et la rémunération correspondante) et enfin, la mise en place d'outils d'intéressement complémentaires lui
permettant notamment de participer à la plus-value qui sera réalisée lors du débouclage de l'opération.
Les actions gratuites présentent cependant des caractéristiques et contraintes spécifiques en termes de période minimum de détention. Les actions
gratuites sont définitivement acquises à l’issue d’une période minimale d’un an (« période d’acquisition »). Une fois les actions définitivement acquises, le
bénéficiaire n’est pas nécessairement tenu de respecter un engagement de conservation (« période de conservation »). Toutefois, la durée cumulée de la
période d’acquisition et de celle de conservation ne peut être inférieure à 2 ans (C. com., art. L. 225-197-1). Ces délais sont déterminés par l’assemblée générale
extraordinaire lors de la décision d’autorisation d’attribution des actions gratuites.
En application de la limite individuelle, les actions ne peuvent être attribuées à des salariés ou mandataires sociaux qui détiennent 10 % ou plus du capital (C.
com., art. L. 225-197-1, II). Ce plafond est apprécié à la date de la décision d’attribution des actions gratuites, en tenant compte notamment des actions attribuées
au jour de la décision ainsi que de celles précédemment émises mais non définitivement acquises (C. com., art. L. 225-197-1, II, al. 3). L’appréciation de ce
plafond de 10 % ne s’effectue toutefois qu’au regard des titres directement détenus par le bénéficiaire dans la société.
Par ailleurs, le nombre total d’actions gratuites attribuées ne peut excéder 10 % du capital social de la société attributrice (C. com., art. L. 225-197-1). Lorsque les
actions sont attribuées à l’ensemble des salariés de la société, ce plafond est augmenté à 30 % du capital social. Dans cette dernière hypothèse, l’écart entre le
nombre d’actions gratuites attribuées à chaque salarié ne doit pas excéder un rapport de 1 à 5 (C. com., art. L. 225-197-1, I, al. 2).
Dans les groupes, les actions gratuites peuvent être attribuées au personnel salarié des sociétés dont 10 % au moins du capital ou des droits de votes sont
détenus, directement ou indirectement, par la société émettrice (dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé sont
visés l’ensemble des salariés et des dirigeants des filiales, mères et sociétés sœurs).
un gain réalisé lors de l’acquisition définitive de l’action gratuite (« gain d’acquisition »), égal à la valeur réelle des actions attribuées à leur date d’
acquisition ;
Pour les actions attribuées en vertu d’une autorisation de l’AGE intervenue depuis le 1er janvier 2018, le gain d’acquisition n’excédant pas une limite individuelle
et annuelle de 300k € est (i) imposé selon le barème progressif de l’impôt sur le revenu, après application d’un abattement de 50 % ou, le cas échéant, de l’
abattement fixe « dirigeants » prévu à l’article 150-0 D ter du CGI, et (ii) soumis aux prélèvements sociaux au taux de 17,2 %.
La fraction du gain d’acquisition excédant 300k € est imposée dans la catégorie des traitements et salaires au barème progressif de l’impôt sur le revenu. Cette
fraction du gain d’acquisition est soumise aux prélèvements sociaux sur les revenus d’activité, soit au taux de 9,7 % (avec application de la contribution salariale
spécifique de 10 %).
un gain (ou une perte) réalisé(e) à l’occasion de la cession des titres attribués gratuitement (« plus-value de cession »), égal(e) à la différence entre le
prix de cession et la valeur réelle des titres à la date d’acquisition définitive des actions.
Ce gain est imposé selon le régime des plus-values des particuliers, soit à la flat-tax au taux global de 30 % (12,8 % d’impôt sur le revenu et 17,2 % de
prélèvements sociaux), sauf option globale, expresse et irrévocable du contribuable pour l’imposition de ses revenus mobiliers et plus-values mobilières au
barème progressif (CGI, art. 150-0 A), étant précisé que l’éventuelle moins-value de cession peut être imputée sur le gain d’acquisition.
une contribution patronale de 20 % à la charge de la société attributrice assise sur la valeur réelle des actions gratuites à la date de l’acquisition
définitive. Cette contribution est exigible dès le mois suivant la date de l’acquisition des actions gratuites. Les PME n’ayant jamais distribué de
dividendes depuis leur création sont toutefois exonérées de cette contribution, dans la limite par bénéficiaire du plafond annuel de la sécurité sociale
(40 524 euros en 2019) ;
une contribution salariale égale à 10 % de la valeur réelle des actions à leur date d’acquisition sur la fraction excédant 300 000 euros par bénéficiaire.
être détenue directement pour 25 % au moins par des personnes physiques ou par des personnes morales elles-mêmes directement détenues pour
75 % au moins de leur capital par des personnes physiques ;
ne pas avoir été créée dans le cadre d’une concentration, d’une restructuration ou d’une extension d’activités préexistantes, sauf si l’ensemble des
sociétés prenant part à l’opération remplit les conditions précitées.
exercice d’une activité depuis plus de 3 ans au moment de la cession : pour les bons attribués à compter du 1er janvier 2018, les gains de cession sont
soumis à la flat-tax au taux global de 30 % (prélèvements sociaux de 17,2 % inclus), sauf option globale, expresse et irrévocable du contribuable pour l’
imposition de ses revenus mobiliers et plus-values mobilières au barème progressif ;
exercice d’une activité depuis moins de 3 ans au moment de la cession : pour les bons attribués à compter du 1er janvier 2018, les gains de cession
sont soumis au taux de 47,2 %, prélèvements sociaux inclus.
b) Mécanismes d’intéressement non-réglementés : le partage de la plus-value réalisée par les investisseurs financiers au profit des équipes
opérationnelles
201. – Principe –
Les sommes dont disposent les dirigeants repreneurs pour investir dans l'opération de LBO sont souvent insuffisantes – au regard des sommes globales
investies – pour leur assurer une plus-value importante, même en y incluant les gains provenant des outils d'intéressement décrits ci-dessus.
La pratique a donc développé et généralisé un principe de partage de la plus-value réalisée par les investisseurs financiers, fondé sur l'idée que la
performance – et a fortiori la surperformance – de la société cible dépend très largement de l'efficacité de l'équipe de direction. Ainsi, lorsque la rentabilité de leur
investissement aura atteint le niveau espéré, les investisseurs financiers partageront une partie de leur plus-value avec les dirigeants repreneurs. Cet outil
essentiel de motivation des dirigeants repreneurs peut prendre plusieurs formes.
Afin de limiter le risque de requalification en salaire de l’avantage conféré par ces actions de préférence, leurs modalités de souscription sont généralement
évaluées par un expert indépendant afin de s’assurer que les managers investissent à des conditions de marché.
Il est également fréquent (lorsque les équilibres capitalistiques le justifient) que les investisseurs financiers partagent la plus-value qu'ils auraient pu appréhender,
en intégrant une partie significative d'obligations convertibles dans leur investissement global (mécanisme dit de sweet equity), augmentant ainsi mécaniquement
la participation au capital des dirigeants repreneurs et, partant, la fraction de plus-value correspondante.
Les actions de préférence peuvent être également couplées avec l’attribution d’actions gratuites (soit indépendamment soit par attribution d’actions gratuites de
préférence).
Attention : D'une manière générale, la mise en place d'outils d'intéressement doit se faire avec prudence et clairvoyance en gardant à l'esprit que le recours
à un système autre que ceux spécifiquement organisés à cette fin par la loi (actions gratuites, options de souscriptions ou d'achat d'actions et bons de
souscriptions de parts de créateurs d'entreprises) comporte, en soi, des risques sociaux et fiscaux non négligeables.
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