Quebec 2020RP 12
Quebec 2020RP 12
Quebec 2020RP 12
le secteur agricole
Défis et opportunités
ANNIE ROYER
NATHALIE DE MARCELLIS-WARIN
INGRID PEIGNIER
THIERRY WARIN
MOLIVANN PANOT
CHRISTOPHE MONDIN
2020RP-12
RAPPORT DE PROJET RP
Les rapports de projet sont destinés plus spécifiquement aux partenaires et à un public informé. Ils ne sont ni écrits à des fins de
publication dans des revues scientifiques ni destinés à un public spécialisé, mais constituent un médium d'échange entre le monde
de la recherche et le monde de la pratique.
Project Reports are specifically targeted to our partners and an informed readership. They are not destined for publication in
academic journals nor aimed at a specialized readership, but are rather conceived as a medium of exchange between the
research and practice worlds.
Le CIRANO est un organisme sans but lucratif constitué en vertu de la Loi des compagnies du Québec. Le financement de son
infrastructure et de ses activités de recherche provient des cotisations de ses organisations-membres, d’une subvention
d’infrastructure du gouvernement du Québec, de même que des subventions et mandats obtenus par ses équipes de recherche.
CIRANO is a private non-profit organization incorporated under the Quebec Companies Act. Its infrastructure and research
activities are funded through fees paid by member organizations, an infrastructure grant from the government of Quebec, and
grants and research mandates obtained by its research teams.
Résumé
Le présent rapport devrait, grâce à tous les éléments analysés, aider les décideurs et l’ensemble
des acteurs du secteur agricole dans leur prise de décision quant à l’utilisation et à la gestion des
nouvelles technologies numériques en agriculture avec comme objectif afin de s’assurer que
cette industrie demeure très compétitive.
*
Fellow CIRANO et professeure agrégée au département d’Agroéconomie de l’Université Laval.
†
Présidente-directrice générale CIRANO et professeure titulaire à Polytechnique Montréal.
‡
Directrice principale des partenariats et de la valorisation de la recherche, CIRANO.
§
Fellow CIRANO et professeur titulaire à HEC Montréal
**
Professionnel de recherche, CIRANO.
††
Professionnel de recherche, CIRANO.
iv
Remerciements
La réalisation d’une telle étude exploratoire a nécessité l’implication d’un grand nombre de
partenaires et d’acteurs du secteur agricole.
Nous sommes reconnaissants à tous ceux, nombreux, qui se sont mobilisés pour cette étude, et
en particulier toutes les producteurs et représentants d’organisations de producteurs, les
centres de recherche et d’expertise, les institutions et organisations gouvernementales et les
fournisseurs d’intrants, d’équipements et de service qui nous ont accordé leur temps et surtout
leur expertise lors d’entrevues.
Nous souhaitons tout particulièrement remercier M. Dan Sleep, Chief, Bureau of Strategic
Development, Division of Marketing and Development, Florida Department of Agriculture and
Consumer Services, Dr Dirk Troskie, directeur du service Business Planning and Strategy du
départment de l’agriculture de l’Afrique du sud et M. François Moreau, délégué ministériel au
numérique et à la donnée, président du conseil des systèmes d'information au Ministère de
l'agriculture et de l'alimentation. Nous nous réjouissons de leur générosité dans le partage de
diverses informations sur les initiatives mises en place dans leur pays, qui ont mené à la
rédaction de ce rapport.
Nous remercions aussi tous les producteurs de lait, les producteurs en serre et les producteurs
de grains qui ont répondu en grand nombre à l’enquête en ligne sur les enjeux du numérique en
agriculture. Ces données inédites ont été d’une grande utilité.
Toutes ces personnes ont contribué, par leur disponibilité, leur sens critique, leurs suggestions
judicieuses ou encore leurs points de vue sur le numérique, à transformer la réalisation de ce
travail exploratoire en expérience enrichissante, motivante et pleine d’intérêt.
v
Résumé
Depuis quelques décennies, de plus en plus de données sont collectées et partagées entre les
producteurs agricoles, les équipementiers, les entreprises qui fournissent intrants et services,
les gouvernements, les différentes organisations qui structurent le secteur, les consommateurs,
ainsi que les autres maillons de la chaîne d’approvisionnement. Ces données peuvent aider à
mieux produire ou à poser plus rapidement des diagnostics sur l’évolution de la production,
améliorant la productivité agricole, son empreinte sur l’environnement et même, la qualité de vie
des producteurs agricoles.
Avec le développement de l’usage du numérique et la très grande quantité de données qui sont
générées, des questions peuvent toutefois se poser en lien avec la confidentialité des données,
leur sécurité (vol, piratage, manipulation), le transfert et le partage des données, la concurrence
et le risque d’espionnage, la qualité des données, les compétences pour le traitement des
données collectées, l’indépendance des producteurs, etc.
vi
uniquement en un simple transfert d’information, le partage des données agricoles doit avant
tout donner l’opportunité de renforcer la coopération entre les créateurs de ces données et les
experts compétents pour les analyser afin de créer de la valeur ajoutée et des opportunités
commerciales au sein de la chaîne agroalimentaire. Le partage doit se faire de manière
organisée et observer certaines règles, notamment en matière d’éthique, de transparence et de
sécurité.
Le présent rapport devrait ainsi grâce à tous les éléments analysés, aider les décideurs et
l’ensemble des acteurs du secteur agricole dans leur prise de décision quant à l’utilisation et à
la gestion des nouvelles technologies numériques en agriculture avec comme objectif afin de
s’assurer que cette industrie demeure très compétitive.
vii
TABLE DES MATIÈRES
viii
5.1.2 Propriété et concentration des données................................................................................................ 54
5.1.3 Indépendance des agriculteurs par rapport aux acteurs de l’amont et l’aval ..................... 56
5.2 LES ENJEUX INSTITUTIONNELS ............................................................................................................................... 58
5.3 LES ENJEUX ÉCONOMIQUES ..................................................................................................................................... 59
5.4 LES ENJEUX ORGANISATIONNELS ........................................................................................................................... 60
5.4.1 Canaux de transfert de connaissances ................................................................................................... 61
5.4.2 Accès à la formation aux nouveaux outils et aux nouvelles pratiques numériques ........... 68
5.4.3 Partage des données ...................................................................................................................................... 71
ix
10.3 FRANCE – CHARTE SUR L’UTILISATION DES DONNÉES AGRICOLES « DATA-AGRI » ET LABEL « DATA-
AGRI » 111
10.3.1 Description et gouvernance ..................................................................................................................... 111
10.3.2 Analyse du contenu de la charte ............................................................................................................ 113
10.3.3 Faiblesses et défis ......................................................................................................................................... 115
10.3.4 Outils complémentaires & facteurs clés de réussite ...................................................................... 115
10.3.5 Impacts et bénéfices observés de l’outil .............................................................................................. 116
10.3.6 Comparaison des deux principales chartes et labels de certification : Charte PSP et Data
Agri 116
10.4 NOUVELLE-ZÉLANDE – NZ FARM DATA CODE OF PRACTICE ........................................................................ 117
10.4.1 Description ...................................................................................................................................................... 117
10.4.2 Gouvernance ................................................................................................................................................... 117
10.4.3 Analyse du contenu de la charte ............................................................................................................ 118
10.4.4 Faiblesses et défis ......................................................................................................................................... 118
10.5 UNION-EUROPÉENNE – CODE DE CONDUITE DE L’UE RELATIF AU PARTAGE DE DONNÉES AGRICOLES
PAR CONTRAT ....................................................................................................................................................................... 119
10.5.1 Description et gouvernance ..................................................................................................................... 119
10.5.2 Présentation du contenu de la charte ou du code de conduite ................................................ 119
10.5.3 Considérations réglementaires .............................................................................................................. 121
10.5.4 Faiblesses et défis ......................................................................................................................................... 121
x
11.4 TABLEAU SYNTHÈSE DES CARACTÉRISTIQUES DES PLATEFORMES DE DONNÉES À L’ÉTUDE ................... 141
xi
Tables des tableaux
Tableau 1 : Liste des mots-clefs constituée et utilisée pour la revue de littérature .................... 10
Tableau 2 : Types d’acteurs rencontrés au Québec et nombre .................................................. 11
Tableau 3 : Descriptif des trois enquêtes ................................................................................... 13
Tableau 4 : Nombre de questionnaires valides par secteur consulté ......................................... 13
Tableau 5 : Contraintes à l’adoption des nouvelles technologies chez les producteurs au
Québec (selon les résultats de nos trois enquêtes) .................................................................... 40
Tableau 6 : Exploitants agricoles sur toutes les fermes, classés selon l'âge, Québec, 2011 et
2016. ........................................................................................................................................... 44
Tableau 7 : Exploitants agricoles sur toutes les fermes, classés selon l'âge, Canada, 2011 et
2016 ............................................................................................................................................ 45
Tableau 8 : Top 5 des rôles que le gouvernement devrait avoir dans le développement des
technologies numériques en agricultures selon les perceptions des producteurs ayant répondu
à l’enquête en ligne ..................................................................................................................... 81
Tableau 9 : Typologie des exploitations selon leur taille (2017) ................................................. 89
Tableau 10 : Les sous-secteurs de l’agriculture française (Chambre d’agriculture, 2019) ......... 93
Tableau 11 : Comparaison des deux principales chartes et labels de certification : Charte PSP
et Data Agri ............................................................................................................................... 116
Tableau 12 : Synthèse des caractéristiques des plateformes de données à l’étude ................ 141
xii
Tables des figures
xiii
Figure 24 : Perception du risque de perte d’indépendance en utilisant les technologies
numériques chez les producteurs au Québec (selon les résultats de nos trois enquêtes) ......... 57
Figure 25 : Perception des producteurs relativement au potentiel des technologies numériques
chez les producteurs au Québec (selon les résultats de nos trois enquêtes) ............................ 61
Figure 26 : Sources d’informations utilisées pour apprendre l'existence de nouveaux produits /
de nouveaux procédés / de nouvelles pratiques chez les producteurs au Québec (selon les
résultats de nos trois enquêtes) .................................................................................................. 64
Figure 27 : Sources d’informations utilisées par les producteurs pour savoir comment utiliser les
nouvelles technologies numériques ............................................................................................ 66
Figure 28: Perceptions des producteurs sur leur niveau de formation et d’information pour bien
utiliser les technologies présentes sur leur ferme ....................................................................... 70
Figure 29 : Perception des producteurs sur le partage des données numériques ..................... 73
Figure 30: Perceptions du rôle du gouvernement par les producteurs au Québec .................... 78
Figure 31: Valeur de la production par commodités et par type d’exploitation (en 2017) ........... 89
Figure 32 : Organisation du label Data-Agri au service de la transition digitale de l'agriculture112
Figure 33 : Principes de la Charte Data-Agri (Source : (Data-Agri, 2019)) ............................... 114
xiv
Liste des sigles et des acronymes
xv
DEFRA Department for Environment, Food and Rural Affairs (Royaume-Uni)
DESS Diplôme d'études supérieures spécialisées
DHAS Dairy Herd Analysis Service
EFFAB European Forum of Farm Animal Breeders), l'ESA (European Seed
Association
EIMA Exposition internationale des machines pour l’agriculture et le jardinage
ETA Entreprise de travaux agricoles
FAC Financement agricole Canada
FDAL Farm Data Accreditation Ltd
FEFAC Fédération Européenne des Fabricants d'Aliments Composés
FIEA France Informatique Élevage et Agriculture
FN3PT Fédération Nationale des Producteurs de Plants de Pommes de Terre
FNSEA Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles
FRAQ Fédération de la relève agricole du Québec
GAFAM Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft
GCFI Gross cash farm income
GLBA Gramm-Leach-Bliley Act
GSI Global Skills Index
HIPAA Health Insurance Portability and Accountability Act
IA Intelligence artificielle
IAA Industrie agroalimentaire
IDELE Institut de l’élevage
IFIP Institut du porc
IFPC Institut français des productions cidricoles
INRAe Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et
l'environnement
IRSTEA Institut national de recherche en sciences et technologies pour
l'environnement et l'agriculture
ITA Institut technique agricole (France)
ITA Institut de technologie agroalimentaire (Québec)
ITAB Institut de l’agriculture et de l’alimentation biologiques
ITAVI Institut technique de l’aviculture
ITB Institut technique de la betterave
ITRE Committee on Industry, Research and Energy
xvi
IVADO Institut de valorisation des données
JA Syndicat des Jeunes Agriculteurs
LCSA Loi canadienne sur les sociétés par actions
LSAQ Loi sur les sociétés par actions
MAPAQ Ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
NIAB National Institute of Agricultural Botany
NIFA National Institute of Food and Agriculture
OBVIA Observatoire international sur les impacts sociétaux de l'intelligence
artificielle et du numérique
OCDE Organisation de coopération et de développement économiques
OIISIAN Observatoire international sur les impacts sociétaux de l’intelligence
artificielle et du numérique
PAEF Plan agroenvironnemental de fertilisation
PASS Precision Agriculture & Sensor Systems Research Team
PATLQ Programme d’analyse des troupeaux laitiers du Québec
RGPD Règlement Général sur la Protection des Données
RPA Rural Payments Agency (Royaume-Uni)
S.A.S Société par actions simplifiée
SPAA Society of Precision Agriculture Australia
SIG Système d’information géomatique
SRUC Scotland's Rural College
TIC Technologies de l’information et des communications
UPA L’Union des producteurs agricoles
xvii
1 Introduction générale
Depuis quelques décennies, les technologies de l’information et des communications (TIC)
contribuent à faire émerger, à l’échelle mondiale, une révolution dite numérique. De plus en plus
de données sont collectées et partagées entre les producteurs, leurs équipementiers, la
nébuleuse d’entreprises qui fournissent intrants et services, les gouvernements, les différentes
organisations qui structurent le secteur, les consommateurs, ainsi que les autres maillons de la
chaîne d’approvisionnement.
Les données sont collectées à partir de divers dispositifs (stations météorologiques, robots,
tracteurs et équipements agricoles, drones, puces ou senseurs placés sur des animaux ou dans
les bâtiments) localisés sur les fermes. Ces technologies permettent de surveiller en
permanence l'environnement physique et produisent de grandes quantités de données à un
rythme sans précédent. Ces données peuvent aider à mieux produire (diminuer les intrants,
réduire l’impact environnemental, augmenter les rendements) ou à poser plus rapidement des
diagnostics sur l’évolution de la production, améliorant la productivité agricole, son empreinte
sur l’environnement et même, la qualité de vie des producteurs agricoles. De plus, l’agrégation
de grandes quantités de données, que l’on appelle données massives (Big Data) permet de
développer des modèles de prédiction précis à partir d’algorithmes.
Avec le développement de l’usage du numérique et la très grande quantité de données qui sont
générées, des questions peuvent se poser en lien avec la confidentialité des données, leur
sécurité (vol, piratage, manipulation), le transfert et le partage des données, la concurrence et le
risque d’espionnage, la qualité des données, les compétences pour le traitement des données
collectées, la dépendance des producteurs, etc. De plus, la « data-transformation » du secteur
agricole ne se limitant pas aux seuls lieux de production mais concernant toute la chaîne
logistique, il est crucial pour le Québec de négocier au mieux ce virage numérique pour garder
et développer ses avantages comparatifs et offrir dans tout le secteur une valorisation des
emplois, des ressources et des produits, et une amélioration de la traçabilité, des
problématiques de santé publique, de la distribution et de la compétition.
1
d’échange de données. Nous avons sélectionné les dispositifs soutenus directement ou
indirectement par les pouvoirs publics.
La recherche est donc organisée autour de deux grands volets abordant différentes questions :
2
Volet 1. Potentiels du numérique
en agriculture et usage actuel au
Québec
3
2 Contextualisation du virage numérique dans le secteur agricole
québécois
Tel que l’illustre la figure suivante, le secteur bioalimentaire génère environ 15% du total de
l’industrie (3 796 millions de dollars en 2017) (MAPAQ, 2019c).
Figure 1 : Répartition du PIB réel bioalimentaire au Québec en 2018 (millions de dollars de 2012)
Autres magasins
(ex.: Walmart,
circuits courts) :
2 282 Agriculture et
8% ac4vités de
sou4en: 4 298
Restaura4on
commerciale et 15%
débits de
boissons: 6 747 Fabrica4on
23% d'aliments,
boissons et
tabac: 8 700
30%
Magasins
d'alimenta4on:
4 293
15% Grossistes
agricoles,
aliments et
boissons: 2 672
9%
Source : Statistiques Canada, compilation MAPAQ
https://www.mapaq.gouv.qc.ca/fr/md/statistiques/Pages/pib.aspx
4
La production laitière est de loin la plus importante production agricole en termes de recettes
monétaires avec 2,39 milliards de dollars de recettes annuelles en 2018 (Figure 2). La
production porcine vient tout juste après avec 1,22 milliards de dollars. Les productions laitière
et porcine, les principales productions animales québécoises, totalisent à elles seules 40% des
recettes monétaires agricoles du Québec. Du côté des productions végétales, le maïs, le soja,
les légumes et les produits d’érable comptent pour environ 25 % des recettes totales (MAPAQ,
2019b).
Figure 2 : Répartition des recettes monétaires agricoles du Québec, en 2018 (millions de dollars)
Afin de conserver, voire accroître ses parts de marchés, ce secteur va devoir entreprendre un
virage numérique tout comme ses concurrents, et s’intéresser aux usages et bénéfices des
technologies liées à l’intelligence artificielle et aux données. De fait, le virage numérique, loin de
constituer une mode de passage, se présente comme une nouvelle façon de faire l’agriculture
dans un contexte de ressources de plus en plus rares, une concurrence de plus en plus vive,
une pénurie de main d’œuvre et des producteurs qui se soucient de plus en plus de leur qualité
de vie.
5
2.2 La 4e révolution industrielle et l’agriculture du 21e siècle
Les progrès technologiques ont toujours su accompagner les transformations s’opérant dans
l’agriculture, elles-mêmes rythmées par le développement humain. Chaque révolution
industrielle a imprégné le tissu des activités agricoles. La première révolution industrielle, qui a
commencé vers 1750, a transformé l’agriculture afin qu’elle réponde aux besoins grandissants
de nourriture pour faire face à la croissance de la population grâce à la mécanisation, la
machine à vapeur et les machines hydrauliques. Diverses nouvelles machineries apparaissent
pour répondre spécifiquement aux besoins des agriculteurs, de nouvelles techniques améliorant
les rendements se démocratisent (rotation des cultures, chaulage).
La deuxième révolution industrielle arrive à la fin du 19e et au début du 20e siècle, où l’emploi
de l’électricité et l’apparition des chaînes de production ouvrent les portes de la production de
masse. Les progrès dans le domaine de la chimie industrielle permettent de se passer des
fertilisants naturels pour employer les premiers agents fertilisants commerciaux. L’apparition du
moteur à combustion fait exploser le nombre de tracteurs et de moissonneuses-batteuses.
6
Ainsi, l’agriculture de précision est définie comme une agriculture qui utilise des technologies
(capteurs, machines, satellites, drones) qui génèrent une grande quantité de données pouvant
être utilisées pour produire avec une grande précision, au niveau d’un endroit précis sur une
parcelle ou d’un animal par exemple. Les types de données pouvant être récoltées peuvent être
de nature agronomique, météorologique, des données sur la machinerie, sur les sols, la gestion
de la ferme et sur la production. L’agriculture intégrée (ou smart farming en anglais) se
rapporte à une agriculture qui met en relation toutes les données produites par les technologies
numériques, soit l’agriculture de précision, sur la ferme dans le but de prendre des décisions
mieux informées et plus rapides, voir même de prévenir certains problèmes. Enfin, l’agriculture
numérique est une agriculture qui met en réseau les données produites sur les exploitations
avec les données massives, ce qui permet de formuler des intuitions prédictives avec une
grande précision. Cette forme d’agriculture permet aussi d’utiliser l’intelligence artificielle (IA) et
ainsi en arriver à formuler des intuitions prédictives par elle-même.
7
Toutes les industries et secteurs d’activités sont perméables à l’intelligence artificielle, et
l’ampleur des bouleversements dans la conception ou l’organisation des métiers appelle à se
préparer aux mieux. Il ne s’agit pas seulement de bénéficier de ses attraits, mais aussi d’être
parmi les instigateurs de ces changements pour garder une position d’influence et des
avantages de compétitivité.
Du fait de l’importance du secteur agricole dans l’économie québécoise et des nombreux défis à
relever pour l’agriculture, il est crucial pour le Québec de correctement négocier son virage
numérique. À la clé se trouve son indépendance en termes de maintien de ses avantages
comparatifs, de ses parts de marché à l’international; des solutions pour la relève du secteur et
la formation de ses producteurs aux nouvelles technologies; une réduction du gaspillage de ses
ressources; l’opportunité de développer un savoir-faire technique, technologique, et éthique en
termes d’utilisation de la technologie, du numérique, des données, et de l’IA appliqués au
secteur agricole; et l’occasion de participer activement à cette transformation du secteur et
devenir un chef de file d’ordre mondial.
Trois méthodes ont été utilisées dans le but de rassembler les informations nécessaires afin de
faire un état des lieux de l’utilisation actuelle des technologies numériques dans l’agriculture au
Québec, puis d’identifier la pertinence, les défis, les opportunités, et les risques que présentent
ces technologies pour le secteur agricole québécois :
8
(3) Enquête en ligne auprès de producteurs (méthode quantitative) : Basé sur les jalons
des entretiens et de la revue de littérature, un questionnaire a été constitué et soumis à des
producteurs agricoles appartenant à trois secteurs : le secteur laitier, le secteur des grains et la
culture en serres.
Nous allons expliquer davantage ces trois méthodes d’acquisition de données.
3.1.2 Mots-clefs
Au départ, utiliser les termes généraux liés à nos thématiques (agriculture, numérique,
donnée(s), innovation) a permis de débuter la consultation des premiers documents consacrés
aux nouvelles technologies utilisées en agriculture. Au fur et à mesure des lectures, nous avons
pu constituer une liste de mots-clefs permettant d’explorer davantage de documents en
ramifiant nos recherches autour de certains concepts et notions essentiels.
Plus fournie en documents, la littérature anglophone dispose de certains termes qui n’ont pas
nécessairement de traduction directe en français et en usage (e.g. smart farming). La plupart
des termes ci-dessous peuvent être recherchés pour tous les secteurs et toutes les industries
confondues, par conséquent il s’agit à chaque fois d’ajouter le terme [agriculture, agricole,
ferme] à la recherche. Par ailleurs, plusieurs expressions consacrées existent d’ores-et-déjà
(agriculture de précision, decision agriculture, smart farming). La recherche et la lecture de
documents s’est donc faite en anglais et en français, permettant de couvrir une plus grande
échelle en percevant les remous créés par le virage numérique dans différentes parties du
monde, bien entendu dans le domaine de l’agriculture mais aussi dans d’autres industries
pouvant mettre en perspective les enjeux spécifiques au secteur agricole.
9
Tableau 1 : Liste des mots-clefs constituée et utilisée pour la revue de littérature
Mots-clefs français Mots-clefs anglais
agriculture de précision precision agriculture (PA)
décision, analyse decision, analysis, decision agriculture
agriculture digitale digital agriculture
donnée(s), données massives data, big data
ferme intelligente, élevage intelligent smart farming
adoption, barrière adoption, barrier
vie privée, sécurité, propriété, souveraineté
privacy, security, property, data sovereignty
des données
recherche, développement, innovation,
research, development, innovation, strategy
stratégie
données ouvertes open data
gouvernance (des données) (data) governance
intelligence artificielle artificial intelligence
apprentissage machine machine learning
Évidemment, selon l’entité consultée, certaines questions ont été modifiées pour pouvoir
bénéficier au mieux de l’entretien (ex. les questions posées à des centres de recherche
s'attachent davantage à la R&D que des questions posées aux représentants des producteurs
plus en rapport avec l’utilisation des technologies sur le terrain). La majorité des entretiens a eu
une durée d’environ 90 minutes, mais la durée pouvait varier de 60 à 150 minutes. Le tableau 2
fait état du type d’acteur rencontré et de leur nombre.
10
Tableau 2 : Types d’acteurs rencontrés au Québec et nombre
Types d’acteur Nombre
Total 17
Comme il aurait été difficile de rencontrer tous les acteurs impliqués sur les questions du
numérique dans tous les secteurs agricoles, nous avons privilégié des rencontres avec des
organisations qui travaillent avec l’ensemble du secteur ainsi que certaines organisations des
secteurs agricoles névralgiques en termes de poids économique et au niveau de leur niveau
d’utilisation du numérique. Aussi, pour ce qui est des organisations de producteurs, nous avons
dû restreindre notre échantillon et choisir de rencontrer des secteurs où la révolution numérique
prend un important essor et qui ont un poids économique important au Québec. Les secteurs
rencontrés, la production laitière et la production de grain vivent des transformations numériques
fort différentes ce qui nous a permis d’avoir une large perspective sur les enjeux du numérique
dans le secteur agricole. En outre, le fait de rencontre des centres de recherche dont le champ
d’action est plus large nous a permis de collecter de l’information sur plusieurs secteurs à la fois.
Les acteurs ont été contactés par téléphone ou par voie électronique. Une lettre présentant le
projet de recherche était alors fournie aux répondants qui acceptaient de participer ainsi qu’un
guide d’entretien (à consulter en annexe 3). Le guide permettait de prendre plus ample
connaissance de la manière dont serait conduit l’entretien, des sujets qui seraient abordés, et
des questions qui allaient être explorées. Enfin, le courriel contenait un formulaire d’information
et de consentement (à consulter en annexe 2) stipulant les termes d’utilisation des informations
qui seraient recueillies. L’entité consultée pouvait décider d’arrêter sa participation à l’étude à
tout moment, y compris après la fin de l’entretien. Sous réserve de l’accord de l’entité, son nom
serait indiqué dans le rapport, mais en aucun cas le nom des personnes consultées n’y
figurerait. La plupart des entretiens ont eu lieu en face à face. Certains entretiens ont eu lieu via
des plateformes de communication virtuelle (Skype ou Zoom).
À plusieurs endroits dans l’analyse, nous rapportons les propos d’une seule personne pour
expliquer une position ou faire état d’un constat. Nous avons choisi de conserver ces propos car
cette étude est de nature exploratoire et qualitative. Nous ne recherchons pas une
représentativité statistique mais bien une richesse de contenu. Qui plus est, compte tenu du fait
que le nombre de personne rencontrée n’est pas très élevé mais que ces personnes sont pour
la plupart des experts de la question numérique et des représentants d’acteurs, il nous appert
pertinent de considérer et de rapporter leur perception. Le lecteur doit tout de même garder à
l’esprit que certaines opinions ou perceptions formulées dans ce rapport émergent d’une seule
personne. Le rapport indique à chaque fois lorsque c’est le cas.
11
Le guide d’entrevue développé par le CIRANO a été validé par le comité d’éthique à la
recherche avec des êtres humains de Polytechnique Montréal (Polytechnique Montréal, 2017,
2015). Le projet de recherche a reçu un certificat d’éthique de Polytechnique Montréal CÉR-
1819-35.
Au cours de nos entrevues, l’intérêt de plusieurs des entités rencontrées envers le projet ainsi
que le manque de données permettant de dresser un portrait pour le Québec de l'utilisation des
technologies numériques en agriculture, nous ont amenés à considérer l’opportunité de conduire
une enquête en ligne auprès de producteurs québécois de différents secteurs.
À la suite d’échanges avec les différents acteurs clés du secteur agricole ainsi qu’en analysant
la littérature sur les technologies existantes et leurs potentiels, trois secteurs ont été retenus
pour l’enquête en ligne :
- le secteur de la production laitière ;
- le secteur de grains (grandes cultures) ;
- le secteur de la culture en serre.
Le canevas des entrevues avec les acteurs a servi à élaborer la structure du questionnaire et
les informations recueillies durant les entretiens et la revue de la littérature ont permis d’enrichir
et de préciser les questions. Les différents points abordés dans le questionnaire portaient sur
l’utilisation actuelle du numérique sur la ferme, les déterminants de l’adoption des outils
numériques, les enjeux du numérique selon les producteurs, le rôle que devrait jouer l’État,
l’utilisation future du numérique sur leur ferme et quelques données socio-économiques. Les
entrevues nous ont aussi permis de s’assurer d’avoir un choix de réponses exhaustif pour
l’ensemble des questions, puisque toutes étaient des questions fermées.
Les questionnaires ont été construits pour être spécifiques à chacun des trois secteurs compte
tenu des technologies utilisées de part et d’autre (à titre d’exemple, le questionnaire développé
pour les producteurs en serre est consultable en annexe 4). Les questionnaires ont d’ailleurs
bénéficié d’amendements et de précisions grâce à la collaboration de différentes organisations
des secteurs représentés qui ont vérifié les questions et les choix de réponses fournis afin de
bien refléter la réalité terrain. Après ces échanges, la version finale a été testée par un
producteur et les questionnaires ont été mis en ligne par le biais de LimeSurvey, un outil de
sondage hébergé sur les serveurs de CIRANO. Basé sur le guide d’entrevue et développé dans
le même cadre de recherche, le questionnaire en ligne a été validé par le comité d’éthique à la
recherche avec des êtres humains de Polytechnique Montréal et bénéficie du même certificat
d’éthique. Au niveau de la confidentialité, la première page du questionnaire rappelle aux
répondants les modalités de l’étude:
12
“Toute participation est volontaire et libre. Toute participation est anonyme, et
aucun renseignement autre que les réponses aux questions posées n'est
collecté. Vous pouvez décider à tout moment de mettre fin à la session de
réponse, et si le questionnaire n'est pas complété en entier les réponses ne
seront ni enregistrées ni utilisées pour notre étude.”
Le lien vers le questionnaire a été diffusé à l’aide des différentes organisations de producteurs
participantes, via leurs plateformes intranet ou leur infolettre. Pour les producteurs en serre, un
envoi direct par courriel a été réalisé. La participation était volontaire et non-rémunérée. Le
questionnaire adressé aux producteurs laitiers a été disponible en mars et avril 2019. Celui
adressé aux producteurs de grain l’a été de mai à octobre 2019 et celui des producteurs en
serre, de juillet à septembre 2019. Le nombre de questionnaires valides par secteur consulté et
le nombre total de fermes par secteur au Québec est présenté dans le tableau 4.
7
Source : Centre Canadien d’information laitière, https://www.dairyinfo.gc.ca/index_f.php?s1=dff-fcil&s2=farm-
ferme&s3=nb, consulté le 26 février 2020.
8
Source : Producteurs en serre du Québec, https://www.serres.quebec/historique/, consulté le 26 février 2020.
9
Source : Producteurs de grains du Québec, http://www.pgq.ca/qui-sommes-nous/organisation/, consulté le 26
février 2020.
ET!
Chaque méthode de collecte des données possède ses avantages et inconvénients. Il importe
de préciser qu’un questionnaire en ligne crée d’emblée un biais en faveur des producteurs qui
sont familiers avec internet. Aussi, l’utilisation d’un sondage en ligne, basé sur une participation
volontaire non-rémunérée, ne nous a pas permis d’obtenir autant de questionnaire remplis
qu’espéré, malgré les nombreuses relances faites auprès des producteurs. Un plus grand
nombre de participants aurait certainement permis une meilleure représentativité.
Il importe également de mentionner qu’un questionnaire qui porte sur le numérique en
agriculture peut avoir créé un biais en faveur des producteurs qui ont un plus grand intérêt
envers les technologies numériques. Dans le cas du secteur laitier, ce biais « numérique »
semble évident. L’échantillon comporte très probablement une sur-représentativité de
producteurs plus orientés vers le numérique. Nous émettons cette hypothèse suite à
l’observation d’une proportion élevée de robots de traite dans les fermes laitières sondées. De
fait, alors que les robots de traite sont utilisés par environ 11 à 15% des fermes québécoises10,
l’échantillon montre plutôt une utilisation à 37%. Le biais numérique n’a pu été confirmé ou
infirmé pour les deux autres productions analysées, faute de données pour comparer nos
échantillons avec la population totale. Le portrait socio-économique des producteurs sondés se
trouve en annexe 5 du rapport.
Ces limites de représentativité échantillonnale nous amènent à souligner ici que les données
présentées dans ce rapport sur les trois secteurs agricoles sondés doivent être interprétées
avec prudence.
Ceci étant dit, le biais numérique perçu dans le secteur laitier permet de dresser un portrait plus
spécifique des producteurs les plus enclins à utiliser ces technologies. La forte proportion de
producteurs utilisant des technologies numériques dans notre échantillon nous permet entre
autres de mieux comprendre les perceptions de ces producteurs face aux enjeux du numérique,
ce qui nous semble tout à fait intéressant dans le cadre de cette étude. Malgré les biais
exprimés, les résultats des trois enquêtes permettent très bien de mieux identifier et comprendre
les freins à l’adoption et les bénéfices perçus.
Les données ont été analysées avec le logiciel SPSS.
10
Conversation personnelle avec une ressource de Lactanet, 2019.
14
4 Portrait du virage numérique dans l’agriculture québécoise
L’analyse des résultats des entrevues reprend en partie la structure du canevas de ces derniers
et sera divisée en trois sections. La première sous-section porte sur le potentiel et le niveau
d’utilisation du numérique dans le secteur agricole québécois en général. La deuxième sous-
section discute de la perception des principaux enjeux liés au numérique dans le secteur
agricole du Québec. Enfin, la troisième sous-section porte sur la perception des acteurs et
producteurs sur le rôle que devrait jouer le gouvernement dans le développement du
numérique et tente d’identifier les chantiers prioritaires à mettre en place par les pouvoirs
publics dans les prochaines années.
Il est important de rappeler que les informations recueillies sont pour la plupart les perceptions
des acteurs rencontrés. Ces perceptions peuvent se recouper ou diverger. Dans tous les cas,
elles nous permettent de brosser un portrait assez représentatif de comment le virage
numérique est perçu par les principaux acteurs/organisations du terrain. Aussi, l’analyse indique
lorsqu’il y a convergence ou divergence afin de souligner les consensus du milieu ainsi que les
points discordants. Enfin, pour chacune des trois sections de l’analyse, nous allons présenter le
portrait de l'utilisation du numérique et des différents enjeux plus en détail pour les trois
secteurs visés par le questionnaire en ligne : les grandes cultures, la culture en serre et la
production laitière.
Certains exemples québécois se présentent comme des leaders locaux, mais également, et
probablement, mondiaux. Nous allons en présenter certains à titre d’illustration.
C’est le cas d’Agri-Traçabilité Québec qui gère une base de données permettant la traçabilité
de 4,5 millions d’animaux. L’identification des animaux commence à la naissance et un suivi est
réalisé jusqu’au moment de l’abattage. La traçabilité a plusieurs utilités, agissant par exemple
comme police d’assurance, gage de qualité pour les consommateurs et donc un avantage
comparatif par rapport à d’autres viandes à la fois pour l’importation et l’exportation. À l’origine,
les procédés mis en place par ATQ avaient pour objectif de passer d’une “ère papier” à une “ère
électronique”. Aujourd’hui ATQ continue d’innover en étudiant les manières d’intégrer le principe
du blockchain (chaîne de blocs), une technologie de cryptage et de sécurisation des données
issues de la finance et des cryptomonnaies, pour consolider ses procédés et se prévenir de
toute fraude informatique.
15
Un autre exemple est Lactanet, le centre d’expertise de la production laitière. Né au milieu des
années 60 des nouvelles vagues en matière d’automatisation et d’informatique, le DHAS (Dairy
Herd Analysis Service) s’intéresse au départ à l’analyse et la gestion des troupeaux pour
augmenter productivité et profitabilité. Le DHAS a accompagné les producteurs de lait du
Québec en offrant des outils novateurs. Devenu le PATLQ (programme d’analyse des troupeaux
laitiers du Québec) à partir de 1970, Valacta en 2006, puis Lactanet en 2020, ce centre fournit
aujourd’hui de nombreux services de conseil et d’analyse en laboratoire pour les producteurs de
lait du Québec : analyses sanguine, génétique, diététique, etc. Chaque année, une unique
vache produit 20,000 points de données, et c’est l’exploitation judicieuse de ces données qui
permet à l’industrie laitière d’optimiser ses méthodes et ses rendements.
Il existe très peu de données récentes sur le niveau d’utilisation des outils et technologies
numériques dans les différents secteurs agricoles au Canada. Qui plus est, ces niveaux
évoluent très vite si bien que des données qui datent de 2 ou 3 ans sont déjà désuètes. Au
niveau des fermes de l’Ouest canadien, une analyse de l’adoption et des barrières de
16
l’agriculture de précision a été commandée par Agriculture et Agroalimentaire Canada en 2017
(Steele, 2017). L’analyse se base sur un sondage en ligne volontaire rempli par 261
producteurs. Les résultats indiquent que 98% des fermes de l’Ouest utilisent un GPS sur leur
ferme, 84% utilisent des technologies d’agriculture de précision, 75% pensent utiliser plus de
technologies numériques dans le futur, 45% étaient insatisfaits de leur couverture cellulaire et
39% n’étaient pas à l’aise de partager leurs données provenant des technologies d’agriculture
de précision.
Le dernier recensement sur l’agriculture fait également état de quelques données sur l’utilisation
des technologies numériques au Canada. La Figure 3 montre le pourcentage des fermes ayant
déclaré avoir recours à certaines technologies. Il ressort de ces données que la technologie
générant des données numériques la plus utilisée au pays en 2015 était la technologie GPS,
venait ensuite l’autoguidage et la cartographie SIG (Système d’information géomatique).
Figure 3 : Pourcentage des exploitations agricoles ayant déclaré avoir eu recours aux technologies selon le
type, Canada, 2015
0 10 20 30 40 50 60
Au niveau plus spécifique des productions animales, le recensement fait état du niveau
d’utilisation de deux technologies, soit les contrôles automatisés de l’environnement dans les
bâtiments et l’alimentation automatisée. Le secteur porcin était le secteur qui utilisait le plus ces
technologies en 2015, suivi du secteur de la volaille et des bovins laitiers (Figure 4). Les autres
productions animales utilisaient de façon très marginale ces technologies.
17
Figure 4 : Pourcentage des exploitations d'élevage ayant déclaré avoir recours à certaines technologies
selon le type, Canada, 2015.
60
50
40
30
20
10
0
Porcs Volailles et Bovins Moutons et Autres types Bovins de
œufs laitiers chèvres d’élevage boucherie
Pour le Québec plus particulièrement, nous n’avons identifié aucune étude dans le secteur
agricole qui faisait le portrait de l’utilisation des technologies numériques. Nous avons donc
tenté de faire un portrait approximatif et qualitatif sur la base des perceptions des acteurs.
Selon la plupart des acteurs rencontrés, le Québec ne serait pas en avance dans l’adoption de
ces technologies par rapport à d’autres provinces canadiennes ou d’autres pays (États-Unis,
Union européenne, Océanie), mais ne serait pas en retard non plus. En fait, il est difficile
d’évaluer le positionnement du Québec à ce niveau, car chaque type de production a un taux
d’adoption et d’utilisation différent. Par exemple, un répondant a indiqué que le Québec serait en
avance dans les secteurs de la canneberge et du maraîcher et n’aurait pas du tout de retard
dans le secteur avicole et porcin. Dans les productions animales, l’Europe serait les leaders
mondiaux à cause des normes supérieures à propos du bien-être animal, les obligeant à
développer des technologies rapidement pour répondre à ces normes. Pour ce qui est des
grandes cultures, les États-Unis et l’Océanie seraient les leaders mondiaux grâce aux grandes
superficies des exploitations.
18
Un répondant a signalé que l’adoption de certaines réglementations telles que le Plan
agroenvironnemental de fertilisation (PAEF) au Québec a obligé les producteurs à utiliser le
numérique plus rapidement que les producteurs des autres provinces canadiennes. Ils seraient
donc selon lui, davantage sensibilisés à l’utilisation du numérique que leurs voisins de l’Ontario
par exemple ou même des États-Unis. Au niveau des données ouvertes, toujours ce même
répondant, le Québec aurait un important retard par rapport aux États-Unis, l’Europe et le reste
du Canada. Quelques répondants ont signalé plusieurs exemples de plate-forme de collecte, de
traitement et de partage de données ailleurs dans le monde. Aucune initiative semblable n’est
présente au Québec en ce moment. Le deuxième thème de la recherche aborde ces initiatives.
Si les acteurs que nous avons rencontrés sont conscients du virage numérique s’opérant et de
son potentiel, ces derniers nous ont déclarés que cette conscience n’était pas nécessairement
présente chez les producteurs québécois. De fait, bien que le Québec puisse se targuer d’avoir
plusieurs entités d’ores et déjà à la fine pointe du virage numérique, cela n’est pas un
mouvement homogène dans le secteur. Nos recherches ainsi que les entretiens menés nous
indiquent que dans l’ensemble, il existe également un phénomène d’attente, parfois même de
résistance au changement. Ainsi, un grand pan du secteur agricole québécois semble hésitant
vis-à-vis de ces nouvelles technologies.
Quoi qu’il en soit, compte tenu de l’important consensus des acteurs québécois sur le potentiel
que représente le numérique en agriculture et de son importance pour conserver le secteur
compétitif, il nous apparaît primordial de nous pencher sur les facteurs clés d’un développement
harmonieux et inclusif du virage numérique.
Au cours des entretiens, nous avons pu constater un discours quelque peu contradictoire. D’un
côté, c’est le terme percutant d’urgence qui a été utilisé à répétition au cours de plusieurs
19
entretiens. Bien que les personnes interrogées se distinguent par leur degré d’alarmisme (“le
Québec n’est pas encore très en retard, mais il n’est certainement pas en avance”), tous
s’accordent à dire que le secteur agricole doit décupler ses efforts sur plusieurs fronts pour
activement prendre part aux transformations qui s’opèrent dans le secteur. Il y a urgence pour
démocratiser l’utilisation des nouvelles technologies et sensibiliser les producteurs au potentiel
de ces dernières. Il y a urgence pour développer ici au Québec non seulement les outils
technologiques, mais aussi l’expertise et le savoir-faire pour les utiliser. Il y a urgence pour
améliorer les conditions de travail des agriculteurs et leur permettre de garder des avantages
comparatifs face à la concurrence extérieure.
De l’autre côté, c’est aussi l’expression d’un sentiment qui se veut rassurant vis-à-vis du virage
numérique “car les choses sont en train de bouger”. Certains secteurs de l’agriculture
québécoise sont plus propices à l’utilisation et à l’adoption de ces nouvelles technologies, ont
commencé à en faire l’usage, et participent aux mouvements de modernisation du secteur. Ce
mouvement prend de la vitesse, et le développement très rapide de l’utilisation de ces
technologies dans la dernière année et l’évolution dans les perceptions des producteurs font
entrevoir un fort potentiel et un taux d’adoption grandissant dans les années à venir. Le présent
rapport fera état un peu plus loin des résultats du questionnaire en ligne sur l’utilisation et les
perceptions du numérique des producteurs dans les secteurs du lait, des serres et des grains.
20
pas tarder dans certaines productions. Les acteurs ont mentionné que ce sont surtout des
barrières techniques et organisationnelles qui ralentissent l’atteinte de ce type de fonctionnalité.
Les productions à forte valeur ajoutée (cultures en serre, maraîchers, productions animales
intensives, secteur laitier) auraient avantage à utiliser le numérique, car les enjeux de main
d’œuvre y sont plus prononcés et les facultés de l’agriculture de précision s’y déclinent
pleinement. Un répondant a aussi souligné que l’agriculture biologique à forte valeur ajoutée,
importante utilisatrice de main d’œuvre, pouvait également être un terreau fertile à l’utilisation du
numérique et des robots.
Les graphiques suivants font état du niveau d’adoption des technologies numériques des
répondants des trois secteurs agricoles enquêtés (soit les producteurs laitiers, les producteurs
en serre et les producteurs de grains), de leur perception face à ces technologies et de leur
perception de l’importance que prendront ces technologies en agriculture dans le futur.
21
Producteurs de lait du Québec (n = 121)
À l’instar d’autres régions du monde, l’industrie laitière québécoise n’échappe pas à la révolution numérique, où la
quantité et la qualité du lait produit par une vache peuvent être analysées par des machines qui vont ensuite optimiser les
menus de l’animal et l’organisation des prochaines traites. Les exploitants ont déjà l’habitude d’utiliser des technologies et
évoluent dans un environnement innovant, mais aussi très exigeant et compétitif.
Adoption des nouvelles technologies
P)(+'&#'+B'&3.(.'22'&+'1),+(&Q&6'%&),42%&),&6'%&
75 % des producteurs laitiers sondés utilisent les %'+5$1'%&,42$%3-(&6'%&('1R-)2)0$'%&-,B"+$S,'%&6'&
*+"1$%$)-C&6'&23&B31R$-'+$'&3,()B34S,'&),&6'&23&
nouvelles technologies numériques, que cela soit
+)@)4S,'&T&
sur l’ensemble de leur ferme (23 %) ou sur une #$%&"'$(")*+,'+-.)+"
portion seulement de leur ferme (52 %). /+"-0"1+(-+"
9F>& 9F>& #$%&"-0%'"2$'3+"'$("
$,+"45(65,"/+"-0"
1+(-+"
9>& 75,&"2*0%"/829"
+''0:8"-0%'"2*0%"
0((;38"
=9>& 75,"
$$!
Producteurs en serre du Québec (n = 47)
P)(+'&#'+B'&3.(.'22'&+'1),+(&Q&6'%&),42%&),&6'%&
%'+5$1'%&,42$%3-(&6'%&('1R-)2)0$'%&-,B"+$S,'%&6'&
*+"1$%$)-C&6'&23&B31R$-'+$'&3,()B34S,'&),&6'&23&
Dans cet échantillon, 13% des répondants déclarent
+)@)4S,'&T"
utiliser les nouvelles technologies sur l’ensemble de #$%&"'$(")*+,'+-.)+"/+"
leur ferme. <F>& -0"1+(-+"
#$%&"-0%'"2$'3+"'$("$,+"
43% les ont adoptés sur une portion de leur ferme, 8E>& 45(65,"/+"-0"1+(-+"
et une proportion similaire déclare ne pas en utiliser
du tout actuellement. 75,&"2*0%"/829"+''0:8"
8F>& -0%'"2*0%"0((;38"
8>& 75,"
*+,,-./01-23-4-564+7809-80/-3:.+9+;<-80.7,=2<>7-80
-.0?;2<379/72-0@
Dans une très large majorité, les producteurs en serre
$#)% sondés ont une opinion favorable des nouvelles
&#'% !"#$%$&'(')% technologies numériques. Ils sont 87% à donner une
(#&%
réponse positive pour cette question.
*+,-%$&'(')%
On peut considérer que 10% des participants affichent
*$./"#$%$&'(')%0.)$ une opinion indifférente en ce qui concerne les
)+,-%$&'(')% nouvelles technologies numériques.
!"#$%
1'.)2-$./-#.32"/$)$").
#45.6'.#47'%
$T!
Producteurs de grains du Québec (n = 46)
P)(+'&#'+B'&3.(.'22'&+'1),+(&Q&6'%&),42%&),&6'%&
Les producteurs de grains sondés ont dans une %'+5$1'%&,42$%3-(&6'%&('1R-)2)0$'%&-,B"+$S,'%&6'&
grande majorité adopté les nouvelles technologies *+"1$%$)-C&6'&23&B31R$-'+$'&3,()B34S,'&),&6'&23&
+)@)4S,'&T"
numériques. #$%&"'$(")*+,'+-.)+"/+"-0"
1+(-+"
Environ 76% des producteurs sondés déclarent une 99>&
#$%&"-0%'"2$'3+"'$("$,+"
utilisation totale (39%) ou partielle (37%) de ces F:>& 45(65,"/+"-0"1+(-+"
9>&
technologies sur leur exploitation.
75,&"2*0%"/829"+''0:8"-0%'"
FD>& 2*0%"0((;38"
Ils sont environ 22% à n’y avoir jamais eu recours.
75,"
$P!
Les résultats des trois enquêtes permettent de faire ressortir des différences dans le recours
aux technologies numériques en fonction de certaines données socioéconomiques propres à la
ferme. Bien que les différences ne soient pas toutes statistiquement significatives, nous en
relevons ci-dessous quelques-unes :
- Différences en fonction de la région d’implantation de l’entreprise agricole : les
producteurs de grains des régions urbaines11 semblent moins avoir recours aux
technologies numériques (28 % contre 60 % des producteurs dans les régions centrales,
et 60 % dans les régions éloignées)
- Différences en fonction de la superficie : Que cela soit pour les producteurs de grains,
les producteurs en serre ou les producteurs laitiers, plus la superficie de l’exploitation
augmente (pour les producteurs laitiers, nous considérons plutôt le nombre de vaches),
plus les producteurs ont recours de façon significative aux technologies numériques.
- Différences en fonction du type de production : les résultats de notre enquête auprès des
producteurs en serre confirment certaines affirmations reçues lors des entrevues à l’effet
que les producteurs bio ont davantage recours au numérique. Ainsi, 88 % des
producteurs en serre produisant en régie biologique utilisent le numérique contre 48 %
de ceux en régie conventionnelle (p=0,087).
- Différences en fonction de l’âge des répondants : Que cela soit pour les producteurs de
grains ou les producteurs laitiers, plus l’âge augmente, moins ils ont recours aux
technologies numériques.
11
Les régions du Québec ont été classées en trois grandes catégories : les régions urbaines (Capitale Nationale,
Laval, Lanaudière), les régions centrales (Mauricie, Estrie, Outaouais, Chaudières Appalaches, Laurentides,
Montérégie et Centre du Québec), et les régions éloignées (Bas-Saint-Laurent, Saguenay-Lac-St-Jean, Abitibi-
Témiscamingue, Côte-Nord, Nord du Québec, Gaspésie-Iles-de-la-Madeleine).
25
producteurs en serre et 35 pour les producteurs de grains). Pour ce qui est des résultats, et tel
que mentionné précédemment, il faut conserver à l’esprit qu’il existe dans l’échantillon un
certain biais de représentativité. Les données présentées font tout de même état du niveau
d’utilisation de plusieurs technologies auprès des producteurs plus enclins à les utiliser.
26
Tenant compte des différences de réalité suivant le type de production en ce qui concerne les
opérations réalisées sur les exploitations, cette question est contextualisée à chacune des
catégories de producteurs.
Chez les producteurs laitiers, le premier type de technologies utilisé concerne les applications
mobiles ou sur tablette, cette réponse étant citée par trois quart des répondants. Viennent
ensuite les capteurs de mouvements des vaches, le GPS et les caméras pour surveiller, cités
par respectivement 53 % et 47 % des producteurs sondés. On observe à l’opposé que les
détecteurs de vêlage et les capteurs de températures des animaux sont relativement peu
utilisés.
Parmi les producteurs en serre utilisant des technologies, la totalité des répondants déclare
surveiller la température dans leurs serres. La surveillance de l’humidité représente également
un paramètre important pour eux, puisqu’ils sont 81 % à le mesurer en utilisant des outils
numériques. Les conditions météorologiques se situent en troisième position dans le
classement, cité par 65 % des répondants.
Parmi les producteurs de grains qui utilisent des technologies numériques, ils les emploient
surtout pour l’application de produits phytosanitaires (69 % d’entre eux), puis pour l’application
d’engrais (60 %) et la topographie du sol (60 %). Dans la catégorie « Autre », les producteurs de
grains ont surtout mentionné des technologies relatives aux semis.
Ceci étant dit, la plupart des acteurs étaient d’accord pour dire que les perspectives de
développement seront excellentes au Québec à condition qu’un certain nombre de barrières
soient surmontées. Malgré l’entrain hétérogène décrit dans les sous-sections précédentes, les
répondants indiquent que les mentalités des producteurs agricoles tendent à changer dans le
sens d’une plus grande utilisation : les producteurs apportent plus d’importance à la qualité de
vie, surtout les jeunes producteurs de la relève, et se considèrent de plus en plus comme des
gestionnaires d’entreprises. Un répondant a indiqué que les entreprises qui seront avantagées
par ces technologies seront celles qui ont les compétences pour utiliser au mieux leurs données
et celles dont les propriétaires ont confiance en leur capacité de gérer ces outils. De plus,
l’utilisation de technologies numériques permet de répondre à certaines problématiques
présentes dans le paysage agricole québécois comme la pénurie de la main d’œuvre au niveau
des exploitations (la main d’œuvre saisonnière par exemple). À ce titre, le recours à ces
nouveaux outils est vu par les acteurs rencontrés ainsi que par les producteurs audités comme
une nécessité, une obligation, et plus le temps passe, plus elles seront incontournables.
27
Les figures suivantes montrent que plus de la moitié des producteurs agricoles des trois
secteurs sondés (près du trois quarts dans le secteur laitier) commenceront à utiliser ou
utiliserons davantage de technologies numériques au cours des deux prochaines années.
Figure 8 : Proportion des producteurs ayant l’intention de commencer à utiliser le numérique au cours des
deux prochaines années
Au cours des deux prochaines années, avez-vous l’intention de commencer à utiliser ou d’utiliser davantage les
technologies numériques ?
$[!
- Amélioration de la résistance des produits (surveillance et résistance aux pestes et
épidémies, suivi de la santé des animaux)
- Bénéfices pour l’environnement nombreux (utilisation de l’eau, gestion de la production de
déchets, utilisation des produits chimiques, émissions de gaz à effet de serre, empreinte
écologique des lieux de production (gestion température et humidité, chauffage), etc.)
- Prise de décision plus rapide et plus sûre
- Traçabilité des produits
Il existe aussi des bénéfices spécifiques à certains secteurs agricoles liés aux productions
animales :
- Réduction du coût de l’alimentation
- Traçabilité des intrants d’alimentation
- Meilleure répartition des aliments (plus optimale pour les animaux)
- Simplification de la distribution des aliments (automatisation accrue)
- Suivi du comportement et du bien-être animal
29
Producteurs de lait du Québec
Figure 9 : Évaluation des principaux bénéfices liés à l’utilisation des technologies numériques par les
producteurs de lait (n = 91)
Bénéfice très important Bénéfice moyen Bénéfice peu important Non applicable
Pour les producteurs laitiers, les principaux bénéfices qu’ils peuvent tirer de l’utilisation des nouvelles
technologies concernent en premier lieu le meilleur suivi de la santé des animaux (67 % d’entre eux
considèrent ce bénéfice comme très important), l’augmentation de la productivité laitière (bénéfice très
important pour 66 %) et le meilleur suivi de la reproduction (65 %).
Près de 60 % des éleveurs estiment que les nouvelles technologies permettent d’améliorer leur qualité de
vie et la rentabilité de leurs opérations.
On peut constater que les producteurs laitiers sondés ne sont que 44% à considérer que les nouvelles
technologies constituent une réponse importante au problème de main-d’œuvre, et 38 % qu’elles
permettent d’améliorer la qualité du lait.
À l’opposé, on peut noter que les avis sont plus mitigés pour ce qui est des bénéfices pour
l’environnement et la perspective d’avoir un plus grand troupeau.
30
Producteurs en serre du Québec
Figure 10 : Évaluation des principaux bénéfices liés à l’utilisation des technologies numériques par les
producteurs en serre (n = 26)
(#(% $(#(% !(#(% "(#(% ,(#(% *(#(% &(#(% +(#(% )(#(% '(#(% $((#(%
Pour les producteurs en serre, les principaux bénéfices qu’ils peuvent tirer de l’utilisation des nouvelles
technologies concernent en premier lieu l’amélioration de la qualité de vie et la simplification des
opérations et de gestion de la ferme. Ces deux bénéfices sont considérés comme très importants par 73
% des répondants.
Viennent ensuite l’amélioration de la qualité des produits et de la rentabilité des opérations, citées comme
très importantes par respectivement 65 % et 62 % des producteurs en serre sondés.
À l’inverse, les producteurs en serre ne sont que 23 % à considérer les nouvelles technologies comme
véritablement utiles pour assurer la relève et répondre à un besoin de main-d’œuvre.
TE!
Producteurs de grains du Québec
Figure 11 : Évaluation des principaux bénéfices liés à l’utilisation des technologies numériques par les
producteurs de grains (n = 35)
(#(% $(#(% !(#(% "(#(% ,(#(% *(#(% &(#(% +(#(% )(#(% '(#(% $((#(%
K.1.I=C45F3:D5=;/03F<1F K.1.I=C45;0O41 K.1.I=C45/475=;/03F<1F B45D?<//9=M745/<D
Comparativement à ce qui est observé pour les producteurs laitiers, les réponses obtenues des
producteurs de grains donnent un aperçu plus contrasté.
Il ressort que pour près de 26% des répondants au sein des producteurs de grains, l’augmentation de la
productivité représente un bénéfice peu important. Il en est de même, et dans la même proportion, pour ce
qui est de l’apport d’une solution à un problème de main-d’œuvre et de l’amélioration de la gestion du
temps.
Les bénéfices liés à l’utilisation des technologies numériques perçus comme très importants par les
producteurs de grain concernent essentiellement la meilleure précision dans l’application des intrants
(54% de ces producteurs considèrent ce bénéfice comme très important pour eux), suivi de l’amélioration
de la qualité de vie (51%) et de la simplification des opérations et de la gestion de la ferme (46%).
T$!
Globalement, on constate que les trois principaux bénéfices priorisés par l’ensemble des
producteurs sont la simplification de leurs opérations et de la gestion de leur ferme,
l’amélioration de leur qualité de vie et la meilleure qualité de leurs produits. Pour ces trois
bénéfices, il existe toutefois quelques différences en fonction des données socioéconomiques
des fermes :
- Différences en fonction de la région d’implantation de l’entreprise agricole : les
producteurs de grains des régions centrales semblent moins voir les bénéfices reliés à la
simplification de leurs opérations (44 % contre 67 % des producteurs en région urbaine
et 67 % en régions éloignées). Pour les serres par contre, les producteurs des régions
éloignées semblent moins percevoir ce bénéfice (54 % contre 100 % des producteurs en
serre des régions urbaines et 77 % des régions centrales). L’amélioration de la qualité de
vie est perçue différemment selon la production : les producteurs de grains des régions
centrales et éloignées sont plus nombreux que les régions urbaines à percevoir dans
l’utilisation des technologies numériques une amélioration de la qualité de vie (33 % des
répondants en régions urbaines, 56 % en régions centrales et 67 % en régions
éloignées), alors que pour les producteurs en serre, il s’agit davantage des producteurs
en régions urbaines et centrales (100 % des répondants en régions urbaines, 83 % en
régions centrales et 33 % en régions éloignées).
- Différences en fonction de l’âge : pour les producteurs en serre, plus leur âge augmente,
plus les répondants perçoivent des bénéfices reliés à la simplification de leurs opérations
(50 % des moins de 35 ans, 73 % des 35-54 ans et 86 % des plus de 55 ans). Chez les
producteurs de grain, les répondants du groupe d’âge 35-54 ans semblent être les plus
nombreux à percevoir ce type de bénéfice. Pour les producteurs en grain, plus l’âge
augmente, moins ils ont tendance à percevoir les technologies numériques comme une
amélioration de leur qualité de vie (67 % des moins de 35 ans, 63 % des 35-54 ans et 38
% des plus de 55 ans). L’inverse est noté chez les producteurs laitiers : plus l’âge
augmente, plus ils perçoivent des bénéfices importants sur leur qualité de vie (63 % des
moins de 35 ans, 74 % des 35-54 ans et 83 % des plus de 55 ans) ainsi que sur la
qualité de leur production (38 % des moins de 35 ans, 37 % des 35-54 ans et 80 % des
plus de 55 ans).
L’adoption des nouvelles technologies et des nouvelles pratiques suit habituellement deux
directions : la traction (pull) et la poussée (push). D’un point de vue commercial, les producteurs
cherchent en priorité à améliorer la productivité et la rentabilité de leurs opérations (traction), en
diminuant par exemple leurs coûts ou en obtenant de meilleurs prix pour leur produit. Il est donc
33
nécessaire de prendre de meilleures décisions et d’améliorer la gestion de leur exploitation.
Avec l’arrivée des outils et des méthodes de l’agriculture de précision, le savoir et l’information
sont générés localement et exclusivement à partir des activités de la ferme ce qui permet
d’obtenir de meilleures recommandations, spécialement conçues pour une seule et unique
exploitation. Les données massives et leur exploitation permettent donc d’améliorer les
rendements sur une ferme (Sonka, 2015; Poppe et al., 2015), c’est un facteur de traction pour
l’adoption de ces technologies.
Inversement, la mise à disposition sur le marché des outils de mesure connectés et la levée des
barrières technologiques et économiques pour bénéficier de ces avantages conduisent à la
croissance de leur utilisation. Et en conséquence, de nouvelles compagnies “AgTech” sont
créées pour répondre à ce nouvel intérêt, poussant elles aussi le développement, l’adoption, et
la démocratisation de ces nouvelles pratiques (poussée).
TP!
des données (Figure 13) fait référence aux différentes étapes entre la collecte des données sur
le terrain jusqu'à l’élaboration d’une recommandation menant à une action sur le terrain (Chen et
al., 2014; Miller & Mork, 2013).
Transfert Commerciali-
Génération de la Entreposage de la Analyse de sation de la
donnée de la donnée la donnée
donnée donnée
Les barrières d’intégration concernent les problèmes de compatibilité entre les différents
systèmes de données. Ces barrières sont parfois issues d’une volonté de verrouillage
technologique de la part du fournisseur d’équipement ou de service. Par exemple, les données
générées par l’utilisation d’un tracteur d’un fournisseur X seront au format x, mais un fournisseur
de services Y a besoin de données au format y pour analyser et optimiser les trajets d’un
tracteur. L’objectif est de créer une barrière conduisant un producteur à n’utiliser les services
que d’un seul fournisseur, par soucis de simplicité. En effet, il est naturellement plus complexe
pour ce dernier de faire appel à des fournisseurs différents car il lui incombe une étape de travail
supplémentaire pour faire le lien entre les différents systèmes et/ou formats. Il arrive que ce
verrouillage technologique soit spontané plus que volontaire, mais les conséquences pour
l’utilisateur sont les mêmes.
Les barrières d’interopérabilité viennent davantage du fait que de par la multiplication des
maillons de la chaîne des données, il est complexe d’avoir de la fluidité dans les échanges.
Chaque maillon de la chaîne (équipement qui génère de la donnée, équipement qui l’entrepose,
entreprise qui analyse, conseiller faisant les recommandations, etc.) opère à sa manière, à un
certain moment, et dépend ou non d’autres maillons de la chaîne. Ces relations chronologiques
ou de dépendance se passent aussi dans un cadre contractuel qui va venir davantage diminuer
la fluidité des données échangées, et donc ralentir la production des analyses et la soumission
de recommandation. Finalement, il apparaît trop complexe, trop long, ou trop coûteux de suivre
toute la chaîne des données.
À de nombreuses reprises, les entités rencontrées au cours des entretiens nous ont fait part de
ces barrières d’intégration et d’interopérabilité. Parfois, un agriculteur est bloqué par de tels
obstacles, car son équipement actuel n’est pas compatible avec les nouvelles technologies
numériques et par conséquent la mise à niveau de ses installations représente une enjambée
trop importante (financièrement ou organisationnellement). Pour d’autres, ce sont les multiples
technologies ou fournisseurs de services utilisés à la ferme qui sont peu compatibles entre eux.
Concernant ce dernier point, il appert que des améliorations importantes ont été faites dans les
dernières années si bien que quelques personnes interrogées nous ont mentionné que cet
obstacle était presque résolu dans certains secteurs.
35
Les réponses au questionnaire en ligne semblent aller dans la même direction pour les
producteurs de lait : 32% n’ont aucun problème et un autre 32% réussit à résoudre ces
problèmes assez facilement. Pour ce qui est des producteurs en serre, ils sont 12% à déclarer
ne rencontrer aucun problème de compatibilité et 19% sont en mesure de les résoudre
relativement facilement. De même, les producteurs de grains sont 14% à déclarer ne pas
rencontrer de problèmes de compatibilité et 23% d’entre eux disent avoir des problèmes de
compatibilité qu’ils parviennent néanmoins à résoudre relativement facilement.
Ce qui est le plus surprenant dans les résultats des producteurs de grains et en serre est la forte
proportion de ces derniers qui font appel à un seul fournisseur pour éviter d’avoir des problèmes
de compatibilité. Cette proportion est de 46% pour les deux secteurs, ce qui indique un possible
effet de dépendance des producteurs envers leurs fournisseurs de technologies.
Figure 14 : Perceptions de la compatibilité entre les technologies chez les producteurs au Québec (selon les
résultats de nos trois enquêtes)
« L'éventail de fournisseurs proposant des technologies et des solutions pour la ferme peut créer des
situations d'incompatibilité entre différentes technologies ou des problèmes d'intégration harmonieuse.
Indiquez quelle affirmation décrit le mieux vos installations »
TS!
presque unanimement au cours de des entretiens. Parfois, il n’est pas nécessaire de s’éloigner
très loin de Montréal pour qu’apparaissent des soucis d’accès à des vitesses nécessaires pour
travailler normalement. De grandes zones agricoles comme la Montérégie subissent ce genre
d’inconvénients. Si chaque entretien a amené son lot d’anecdotes, il n’existe pas aujourd’hui
d’état des lieux clair des problèmes de connexion à Internet pour les exploitants agricoles. Pour
plusieurs personnes interrogées, de tels problèmes d’infrastructures déficientes sont aussi un
enjeu important d’inégalité entre les régions et entre les producteurs. De plus, les fermes moins
bien connectées doivent investir dans leur propre installation (achat d’antenne par exemple) ce
qui rend le producteur particulièrement dépendant de son installation lors de panne ou de bris,
ne pouvant compter sur la force d’un réseau.
Il est à noter que dans le contexte de virage numérique et d’une croissance exponentielle de la
quantité de données générée et analysée, les contraintes techniques augmentent elles aussi
(réseaux, serveurs stables et performants, bande-passante accrue, etc.). Si le virage numérique
et les exploitations reposent en grande partie sur ces technologies, elles deviennent aussi
dépendantes de l’état du réseau et des services de maintenance qui doivent être très efficaces
pour entretenir et réparer le réseau.
Le questionnaire soumis en ligne à des producteurs québécois vient nuancer ces perceptions.
Nous avons demandé aux producteurs quel était leur niveau de satisfaction vis-à-vis de leur
service de connexion Internet et de leur couverture de téléphonie cellulaire. Les producteurs
ayant répondu à l’enquête au Québec semblent plutôt satisfaits, voire très satisfaits de leur
service Internet. Néanmoins, même si dans l’ensemble les producteurs de lait sont plutôt ou très
satisfaits de leur service Internet, on note qu’il reste un exploitant sur cinq qui semble rencontrer
de graves problèmes de connexions, cette proportion étant plus faible pour les producteurs en
serre et les producteurs de grains.
Figure 15 : Niveau de satisfaction vis à vis des services de connexion à Internet chez les producteurs au
Québec (selon les résultats de nos trois enquêtes)
70%
60%
50%
40%
74%
66% 68%
30%
20%
10% 21%
15% 17% 15%
12% 11%
0%
Très satisfait à plutôt satisfait Neutre Plutôt insatisfait à très insatisfait
37
Les figures suivantes montrent que globalement les producteurs ayant répondu à l’enquête
semblent satisfaits de leur couverture de téléphonie cellulaire (la proportion de producteurs très
satisfaits ou plutôt satisfaits variant entre 62 % et 72 % d’entre eux).
Figure 16 : Perceptions liées à la connexion à Internet et à la couverture cellulaire chez les producteurs au
Québec (selon les résultats de nos trois enquêtes)
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@A7B:.27.:& .C0:17
T[!
Pour toutes les entités que nous avons entendues, à l’échelle du producteur le facteur clé de
l’adoption des nouvelles technologies est l’impact économique sur l’exploitation. En d’autres
mots, les avantages sur le confort et la qualité du travail, ou bien les bénéfices pour
l’environnement importent moins que la rentabilité. La condition nécessaire et suffisante pour
l’adoption est d’avoir un bénéfice net et mesurable. Il faut que la technologie réponde au besoin
immédiat et soit économiquement viable. De l’avis de plusieurs entités que nous avons
rencontrées, il n’est pas concevable pour les exploitants de bousculer leurs opérations, de
rajouter des tâches, ou de faire un trou dans la trésorerie de leur entreprise si les bénéfices ne
sont pas visibles immédiatement. Cette attitude est renforcée par le fait qu’adopter une nouvelle
technologie ou de nouvelles pratiques demande du temps, ce que les producteurs n’ont pas
beaucoup, évoluant souvent « d’une urgence à l’autre ».
La plupart des répondants ont souligné le manque d’études indépendantes sur la rentabilité des
technologies et outils numériques. Bien que les fournisseurs de technologies produisent des
études de ce type, les études indépendantes permettraient un développement plus harmonieux
et efficace de ces technologies. Il est difficile pour les producteurs d’évaluer eux-mêmes ces
impacts. C’est une démarche complexe, et la rentabilité globale d’une technologie numérique ne
peut se faire que sur un horizon assez long, ce qui ne répond pas idéalement aux contraintes
d’impact économique pour les agriculteurs (visant le plus court terme). De plus, les études de
rentabilité de ces technologies embrassent souvent l’écosystème de l’exploitation, incluant
l’utilisation de la donnée comme telle. Tel que mentionné précédemment, le virage numérique
se décline en deux principales dimensions au niveau de la ferme : l’adoption de la technologie
comme telle (machine, capteurs, robot, GPS) et l’utilisation des données qui sont produites par
la technologie et permettant d’appuyer le producteur dans ses décisions.
Dans ce contexte, les études sur la rentabilité de ces nouvelles technologies sont manquantes,
et les producteurs ont tendance à ne pas faire confiance aux seules promesses et projections
des entreprises fournissant de tels services et équipements. En conséquence, nos entretiens
ont souvent révélé la nécessité de produire des études indépendantes sur l’impact économique
des nouvelles technologies d’abord, et l’importance de campagnes de sensibilisation et de
communication ensuite. L’évolution rapide des technologies ajoute au défi de l’évaluation de leur
rentabilité : analyser les bénéfices d’une innovation pour ensuite se rendre compte qu’elle a été
remplacée par une autre, plus performante, est une des difficultés évoquées par certains
répondants rencontrés. Enfin, une offre trop large (et changeante) et des contraintes de
compatibilité floues rendent un choix d’investissement complexe, par conséquent le producteur
peut se retrouver perdu sans savoir quelle technologie adopter et auprès de quel fournisseur. À
défaut de ressources indépendantes et pour palier à l’asymétrie d’information avec les
fournisseurs d’équipement et de service, la meilleure solution reste encore le bouche-à-oreille
selon les acteurs rencontrés: les producteurs s’organisent, par exemple en utilisant les
plateformes de réseaux sociaux ou en faisant appel à leur club-conseil en agroenvironnement,
pour partager leur expérience, venir observer le fonctionnement de certaines nouvelles
technologies sur place et échanger sur la rentabilité de ces dernières.
39
Le seuil de rentabilité des technologies numériques semble être, pour le secteur agricole,
fortement corrélé à la taille des exploitations. Tout d’abord, pour pouvoir se permettre les
investissements nécessaires, les structures de taille supérieure bénéficient simplement de
moyens plus importants. Ensuite, les exploitations de grande taille, une fois qu’une technologie
est adoptée, peuvent effectuer de plus grandes économies d’échelle et donc rentabiliser leur
investissement de manière plus conséquente. Enfin, basées sur la récolte et l’utilisation de
données, les nouvelles technologies dépendant de l’exploitation de l’information auraient plus de
peine à être efficaces sur des petites parcelles puisqu’elles produisent des données en moindre
quantité ou qualité.
Le fait que la technologie évolue très rapidement (et même trop rapidement dans certains cas)
semble constituer une contrainte assez forte à l’adoption des nouvelles technologies par les
producteurs. Cette contrainte est perçue comme très importante particulièrement pour les
producteurs de grains (46 % d’entre eux).
12
Tableau 5 : Contraintes à l’adoption des nouvelles technologies chez les producteurs au Québec (selon les
résultats de nos trois enquêtes)
Producteurs de lait Producteurs en serre Producteurs de grains
CONTRAINTES n = 121 n= 47 n=46
Faible 30% 40% 45%
Rentabilité trop
incertaine
Moyenne 43% 30% 20%
Forte 27% 30% 35%
Faible 27% 34% 22%
Technologie évoluant
Moyenne 45% 28% 32%
trop rapidement
Forte 28% 38% 46%
Une question spécifique portait sur le niveau de rentabilité en général des technologies
numériques dans le secteur des grains et de la serriculture. Globalement, on constate que les
producteurs estiment qu’il y a une rentabilité certaine à utiliser ces technologies numériques. La
rentabilité est néanmoins davantage perçue chez les producteurs en serre puisque 42 % d’entre
eux considèrent qu’elles sont très rentables et 31 % qu’elles sont rentables, ce qui fait que
globalement, c’est 73 % des producteurs en serre ayant répondu à l’enquête qui les jugent
comme rentables ou très rentables. Les producteurs de grains quant à eux sont 48 % à les
considérer comme rentables ou très rentables.
12
La question était : « Indiquez si les contraintes à l’adoption de technologies identifiées ci-dessous sont faibles,
moyennes ou fortes en ce qui vous concerne »
40
Des différences sont toutefois à relever en fonction de certaines données socioéconomiques :
- Différences en fonction de l’âge : Que ce soit pour les producteurs en serre ou de grains,
la rentabilité des technologies numériques semble être moins perçue chez les
répondants plus âgés.
- Différences en fonction de la présence de relève ou non : Les producteurs en serre qui
ont une relève sont plus nombreux à considérer rentables les technologies numériques
qu’ils utilisent (1,71 sur une échelle de rentabilité de 1 à 5 (1, étant pour très rentables et
5 comme pas du tout rentables) contre 2,8 pour ceux qui n’ont pas de relève, p=0,062)
Figure 17 : Perception de la rentabilité des technologies numériques en général chez les producteurs au
Québec (selon les résultats de nos deux enquêtes)
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13
https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/95-640-x/2016001/article/14816-fra.htm
PE!
grande taille génèrent aussi plus de données et une masse critique de données est souvent
nécessaire pour l’efficacité de certaines technologies. Ceci étant dit, certaines technologies
d'agriculture numérique sont adaptées aux petites et moyennes exploitations, car leur rentabilité
dépend moins d’économies d'échelle ou sont très attrayantes pour un environnement de
production spécifique (Van Es et Woodard, 2017). Par exemple, les producteurs de légumes
biologiques peuvent grandement bénéficier des systèmes de plantation de précision et
d’équipements autoguidés. De même, les exploitations de taille moyenne peuvent être attirées
par les systèmes robotisés de traite et d'alimentation ou de serres automatisées à cause du
manque de main d’œuvre.
Un cas québécois illustre bien les limites de l’utilisation de certaines technologies par rapport à
la taille des exploitations. Ainsi, l’entreprise québécoise Motörleaf n’a pas de client au Québec,
mais plutôt dans le reste du Canada, aux États-Unis, au Japon, et en Europe (Pays-Bas,
Allemagne), parce qu’elle a besoin de faire affaire avec des fermes dont la taille est supérieure
ou égale à 10 acres (4,05 hectares). Ces dernières offriront la quantité et la qualité de données
suffisantes pour les services proposés par l’entreprise. Aussi, les serres et fermes
hydroponiques présentent des environnements plus contrôlés, et par conséquent plus adaptés à
l’utilisation des outils de l’agriculture de précision (bien que cette dernière puisse tout à fait être
utilisée sur les fermes classiques, dites de légumes frais). Ce type de ferme est beaucoup moins
courant au Québec. En 2017, il existait 468 entreprises de production de fruits et légumes en
serres pour une superficie totale de 115 hectares (soit 0.25 hectare de superficie moyenne pour
une exploitation) (MAPAQ, 2019a). À titre de comparaison, le secteur des légumes frais
représente 1550 entreprises pour une superficie totale de 23 000 hectares (14.84 hectares en
moyenne) (MAPAQ, 2017). Ainsi, en termes de production en serre, le Québec se classe au
troisième rang des provinces canadiennes, derrière l’Ontario et la Colombie-Britannique,
détenant seulement 7 % des superficies et 4 % du volume de production de légumes de serre.
La taille plus réduite des entreprises du Québec, où seulement 7 % ont une superficie d’un
hectare et plus, limite leurs possibilités de bénéficier des économies d’échelle (MAPAQ, 2018b)
et restreint l’adoption des nouvelles technologies appartenant à l’agriculture de précision.
Le secteur laitier fait face à des problématiques semblables. Au Québec, la taille modeste des
troupeaux fait en sorte que la stabulation libre est moins répandue que dans les autres
provinces. Or, les robots et les carrousels de traite nécessitent une stabulation libre. En 2018, la
proportion des fermes ayant une stabulation libre était de 14% soit 23% des vaches
québécoises14. Ces pourcentages sont de loin les plus faibles au niveau canadien. En 2019,
entre 11% et 15% des fermes québécoises sont équipées de robot de traite (Valacta, 2019).
Ces chiffres sont similaires à l’échelle pancanadienne. Le recensement canadien de l’agriculture
indique que 8.9 % des exploitations laitières canadiennes déclarent utiliser la traite robotisée,
cependant cette proportion augmente à 17.4 % chez les fermes comptant entre 201 et 500
vaches laitières (Statistique Canada, 2017c). La Figure 18 fait état des statistiques du
recensement en la matière.
14
Les données sur les proportions en stabulation libre et entravée proviennent d’une communication personnelle
avec Lactanet, septembre 2019.
42
Figure 18 : Pourcentage des exploitations laitières ayant déclaré utiliser la traite robotisée, selon la catégorie
de taille s de bovins laitiers, Canada, 2015
20 17,4
14,8
15 13,1
10
6,5
5
0,9
0
1 à 50 51 à 100 101 à 200 201 à 500 501 et plus
43
Figure 19 : Pourcentage des exploitants agricoles ayant déclaré avoir eu recours aux technologies dans
l'année précédant le recensement, selon le groupe d'âge, Canada, 2016.
90 82,2 82 79,7
77,2 77 74,9
80 71,8 69,7
70 65,5
59,3
60 52
50 44,8
40
30
20
10
0
Moins de 25 à 30 à 35 à 40 à 45 à 50 à 55 à 60 à 65 à 70 à 75 ans et
25 ans 29 ans 34 ans 39 ans 44 ans 49 ans 54 ans 59 ans 64 ans 69 ans 74 ans plus
Au cours de nos entretiens, l’âge des exploitants a été identifié comme une cause potentielle à
l’adoption des nouvelles technologies numériques dans le secteur. En effet, les producteurs les
plus âgés sont tout simplement moins sensibles, moins informés et moins intéressés à s’équiper
et/ou à se former, ou voient moins le besoin d’effectuer des investissements et des
changements dans leurs opérations. Ce constat a cependant été mis en perspective à plusieurs
occasions. Si l’âge moyen des producteurs agricoles peut ralentir l’adoption des technologies
numériques, il est tout à fait possible que la relève présente sur la ferme change la donne dans
les années à venir.
Selon les chiffres du recensement agricole de 2016, la proportion des producteurs de moins de
35 ans a diminué de plus de 13% au Québec depuis 2011 (tableau 6), tandis qu’à l’échelle
pancanadienne les agriculteurs de moins de 35 ans sont en progression de 3% sur la même
période (tableau 7). Les enjeux de la relève sont davantage explorés dans la section suivante
du document.
Tableau 6 : Exploitants agricoles sur toutes les fermes, classés selon l'âge,
Québec, 2011 et 2016.
44
Tableau 7 : Exploitants agricoles sur toutes les fermes, classés selon l'âge,
Canada, 2011 et 2016
Tranches d’âge 2011 2016 Progression
Tous les âges 293 925 271 935 -7,48%
Moins de 35 ans 24 120 24 850 +3,02%
35 à 54 ans 127 895 98 840 -22,72%
55 ans et plus 141 920 148 250 +4,46%
Âge moyen des exploitants agricoles 54,0 55,0 +1,0
Source : Statistique Canada, 2017
4.6.6 Portrait des contraintes à l'adoption des technologies numériques dans les
fermes québécoises
Les entretiens, en particulier ceux réalisés avec les organisations de producteurs ou les centres
d’excellence, ont permis d’identifier une liste de facteurs pouvant entraver l’adoption des
solutions apportées par le virage numérique :
Contraintes financières
• Les bénéfices de ces technologies me semblent trop incertains
• La rentabilité est trop incertaine
• Le coût d’acquisition de ces technologies est trop élevé
• Le coût de maintenance de ces technologies est trop élevé
Contraintes technologiques
• Mon équipement actuel n’est pas compatible avec les technologies numériques (trop
vieux)
• La technologie évolue constamment
• La technologie est trop complexe
• Mon accès à internet n’est pas adéquat
45
Contraintes reliées aux risques potentiels engendrés par l’utilisation des technologies
numériques
• J’ai peur de perdre la confidentialité de mes données
• Je n’ai pas confiance en ces technologies (panne, dépendance, confidentialité)
• La technologie numérique risque de me faire perdre mon lien avec mes terres
Les contraintes à l’adoption des technologies numériques les plus fréquemment citées chez les
producteurs de lait sont les coûts d’acquisition et de maintenance trop élevés (Figure 20). Loin
devant les autres, ces deux réponses sont citées comme étant une contrainte forte par
respectivement 61 % et 49 % des répondants. L’évolution constante de la technologie et
l’incertitude de la rentabilité de ces technologies sont considérées comme une contrainte forte
par un peu plus du quart des répondants. L’incompatibilité de leur équipement peut également
être considérée comme une contrainte non négligeable pour les producteurs de lait.
À l’opposé, la perte de lien avec les animaux ne représente pas une contrainte forte puisqu’ils
sont 80 % à la qualifier de faible. Cette contrainte, soulevée lors d’un entretien, n’est pas
ressortie fortement dans notre échantillon. Cependant, tel que mentionné antérieurement, notre
échantillon comporte un biais en faveur des producteurs utilisant des technologies numériques
ce qui pourrait expliquer pourquoi notre enquête de vient pas corroborer l’hypothèse de l’acteur
rencontré. La complexité de la technologie et le manque d’information ne semblent pas poser de
problème puisque respectivement 77 % et 63 % des répondants la définissent comme une
contrainte faible.
PS!
Figure 20 : Contraintes à l'adoption des technologies telles que perçues par les producteurs de lait du
Québec (n = 121)
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Figure 21 : Contraintes à l'adoption des technologies telles que perçues par les producteurs en serre du
Québec (n = 47)
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P`!
En ce qui concerne les producteurs en serre, la contrainte la plus importante à l’adoption des
technologies numériques est leur coût élevé d’acquisition : 62 % d’entre eux la considèrent
comme forte, 32 % comme une contrainte moyenne. Viennent ensuite l’évolution constante de
la technologie, citée comme une contrainte forte par 38 % des répondants, la compatibilité de
leur équipement et l’incertitude de la rentabilité de ces équipements, ces deux dernières
réponses étant citées comme une contrainte forte par 30 % des répondants.
Figure 22 : Contraintes à l'adoption des technologies telles que perçues par les producteurs de grain du
Québec (n = 46)
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O:93B/093512:B35 O:93B/093517:P5995 O:93B/093512/0H85
Comme ce qui a été observé pour les producteurs en serre, la contrainte la plus importante à
l’adoption des technologies numériques selon les producteurs de grains est le coût élevé
d’acquisition : 65 % d’entre eux le considèrent comme une contrainte forte, 17% comme une
contrainte moyenne. Environ la moitié des producteurs de grains considèrent le coût élevé de la
P[!
maintenance et l’évolution constante de la technologie comme des contraintes fortes à
l’adoption des technologies numériques.
La compatibilité de leur équipement actuel avec les technologies numériques représente
également un frein important à l’adoption de ces technologies, puisqu’ils sont 28% à le
considérer comme une contrainte forte et 39 % comme une contrainte moyenne. À noter que la
complexité de la technologie et le manque de connaissance pour bien les utiliser – deux
propositions étroitement reliées – sont également fréquemment citées comme une contrainte,
moyenne ou forte. À l’opposé, la perte de lien avec leurs terres ne constitue pas une contrainte
pour 83 % des répondants, et à l’instar de ce qui a été observé chez les producteurs en serre,
les essais non concluants ne représentent pas non plus une contrainte puisque 80 % des
répondants la qualifient de faible.
49
5 Enjeux du virage numérique dans le secteur agricole québécois
Les enjeux et les défis de l’avènement des nouvelles technologies numériques dans le secteur
agricole québécois sont, de manière générale, communs à l’apparition de l’intelligence artificielle
et de l’économie des données dans tous les secteurs de l’industrie. Les gains de performance
font apparaître des risques de dépendance, et les données devenues un véritable capital pour le
secteur soulèvent des questions de propriété, de sécurité, de partage, de souveraineté, et de
responsabilité (European Commission, 2016; GODAN, 2018; Wolfert et al., 2017).
Aborder ces questions et trouver des réponses adaptées sont la clé du développement
harmonieux et de l’adoption rapide de nouvelles technologies dans le secteur agricole. Si
l’impact économique à court terme est la condition sine qua non pour l’adoption des nouvelles
technologique par les agriculteurs, les entretiens que nous avons réalisés soulignent de manière
unanime l’ensemble des thématiques liées à la propriété et au partage des données comme les
enjeux les plus cruciaux du virage numérique. Sur ce point, les producteurs réceptifs et
sensibilisés aux nouvelles technologies font écho aux professionnels et aux chercheurs
entendus, même si certains fournisseurs de service ou d’équipement expriment ce sentiment à
demi-mot.
Il est fondamental de comprendre que la donnée est d’une certaine façon la nouvelle matière
première du secteur agricole québécois. Ainsi, pour négocier au mieux ce virage numérique et
permettre de fournir un terrain fertile au développement du secteur, c’est tout un écosystème de
la donnée qu’il s’agit de fournir: possibilités techniques et technologiques, infrastructures
légales, réponses aux questions de gouvernance, offre de main d’œuvre et formations aux
nouveaux métiers liés à la production et l’utilisation des données dans le domaine agricole,
entités chargées de réfléchir aux bonnes pratiques dans le milieu et de veiller à leur application,
campagne d’information et politiques de soutien pour permettre l’adoption des nouvelles
technologies.
Rares sont les enjeux et les défis qui sont isolés ou mutuellement exclusifs, la négociation du
virage numérique dans le secteur agricole québécois doit être réalisée sur plusieurs fronts en
même temps. Un sentiment d’urgence apparaît nettement auprès des entités que nous avons
rencontrées. Si chacune juge de la relative importance du retard du Québec face à ces
questions et ces enjeux, tous s’accordent sur le fait qu’il faut au plus vite fournir les moyens pour
amorcer les changements du virage numérique. Socle du secteur agricole, les producteurs
seront les acteurs au cœur de cette transformation. Il s’agit donc d’une part de vite les
sensibiliser à ces questions, d’autre part à leur fournir les moyens d’opérer la mutation.
Cette partie du rapport élabore une liste d’enjeux mis en évidence au cours de notre revue de la
littérature et des entretiens réalisés, que nous avons regroupés en quatre grandes catégories
soient i) les enjeux éthiques, ii) les enjeux institutionnels, iii) les enjeux économiques et iv) les
enjeux organisationnels.
50
5.1 Les enjeux éthiques
L’accaparement des données, des technologies, du savoir-faire, des algorithmes, des solutions,
par des entités pouvant être des monopoles ou oligopoles est dangereux et pourrait
potentiellement diminuer l’autonomie des producteurs. À l’heure où les consciences politiques et
publiques s’éveillent partout dans le monde, mais surtout en Europe où des jugements plus durs
sont appliqués, l’objectif du “bénéfice pour tous” appelle à une reconsidération complète des
institutions de contrôle et une véritable réflexion sur l’éthique de ces nouvelles technologies
(Gilpin, 2014). Si l’on élargit notre champ de vision et qu’on ne se concentre plus uniquement
sur l’industrie agricole, on constate que le Québec est toutefois à l’avant-scène sur ces enjeux
avec deux grandes initiatives : (1) la Déclaration de Montréal pour un développement
responsable de l’intelligence artificielle, une vaste réflexion entreprise pour mettre en place des
balises pour mieux encadrer l’intelligence artificielle et le numérique15 ; (2) l’Observatoire
international sur les impacts sociétaux de l'intelligence artificielle et du numérique (OBVIA),
localisé à l’Université Laval, qui va alimenter les réflexions et les recherches sur la Déclaration
de Montréal.
Nous avons décliné les enjeux découlant du virage numérique en agriculture en trois principaux
thèmes : la sécurité/propriété des données, la propriété/concentration des données et
l’autonomie des producteurs face à leurs fournisseurs de technologies.
La sécurité des données réfère à la protection des données contre tout accès non autorisé. À
l’heure où les objets connectés se multiplient dans nos vies, dans les villes, au cœur de nos
maisons, et jusque dans les champs et les étables, une prise de conscience s’opère par rapport
à la vulnérabilité de ces objets qui pourraient servir de véritable fenêtre sur la vie privée de leurs
utilisateurs. Le principe de vulnérabilité des objets connectés est le même qu’avec les
ordinateurs et les téléphones intelligents. Cependant, les objets connectés qui se démocratisent
et se multiplient exponentiellement ne sont pas encore soumis aux mêmes règles de sécurité.
Multipliant les points d’entrée, ils sont synonymes de vulnérabilité pour les infrastructures et les
informations.
15
Pour plus de détail sur la Déclaration de Montréal pour un développement responsable de l’IA, vous pouvez
consulter le lien suivant : https://www.declarationmontreal-iaresponsable.com
16
Voir https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/eu-cybersecurity-act, consulté le 20 mars 2020.
51
prise de conscience est la plus vive, la sécurité des données personnelles et des équipements
étant plus critique.
Le Québec et le Canada suivent la même tendance : bien qu’une prise de conscience soit
amorcée, il n’existe aujourd’hui ni législation ni projet de législation s’attaquant à cette
problématique. La Commission d’Accès à l’Information du Québec (CAI) met simplement en
garde les citoyens en les « invitant à faire de prudence », et encourage les fabricants « à
prendre en considération la protection de la vie privée et des renseignements personnels dans
le processus de développement de ces produits ». Le gouvernement fédéral, quant à lui, met en
avant les principaux facteurs d’attraction commerciale de l’industrie de l’Internet des objets au
Canada, sans toutefois adresser la question des normes de sécurité de ces objets. Les
questions de sécurité des données créent en cascade de nombreuses problématiques pour
assurer cette sécurité : moyens techniques, investissements, lutte technologique contre le
piratage, etc., ce qui engendre des coûts additionnels et lève des barrières supplémentaires à la
circulation des données. La sécurité des données est un enjeu à tous les niveaux.
Dans le secteur agricole, les objets connectés font leur apparition et se démocratisent
rapidement. Ce sont les premiers maillons de la chaîne de données, ils vont produire les
informations brutes sur l’état des champs, l’utilisation des équipements, toutes les données
nécessaires à l’agriculture de précision, et offrent la possibilité de réaliser les tâches
nécessaires à l’exploitation d’une ferme à distance.
Au cours de nos entretiens, nous avons pu recueillir différents niveaux d’inquiétude à cet égard.
Certains n’y voient aucun enjeu. De fait, pour ces répondants, les producteurs sont de plus en
plus sensibilisés à cet enjeu et donc, les problèmes liés à la sécurité des données seraient
plutôt secondaires. Par ailleurs, les producteurs seraient habitués à partager leurs données
avec diverses entités et ne saisissent pas toujours les problèmes qui peuvent découler d’un vol
de données par exemple. Le récent problème de sécurité de certaines données de producteurs
sur le site de Holstein Canada à l’été 2019 a ajouté à la méfiance de plusieurs producteurs
(Parent, 2019). Ces données n’étaient heureusement pas sensibles, mais cet incident montre
qu’il peut y avoir des failles de sécurité dans les systèmes17.
D’autres y voient au contraire des enjeux très importants. Environ la moitié des entités
rencontrées a mentionné les risques de piratage des objets connectés utilisés sur les fermes (en
particulier au sujet du vol de données et des risques pour la compétition), et deux acteurs ont
souligné de manière alarmiste les risques importants d’attaque pirate sur les fermes : attaque
commerciale visant à saboter les récoltes d’une ferme (« couper le système d’arrosage
automatique pendant une journée de canicule, c’est une récolte qui est détruite »), voire une
attaque d’envergure stratégique d’un pays étranger souhaitant déstabiliser l’économie du
secteur. Les fermes très connectées et pilotées en partie par des logiciels seraient évidemment
les plus à risque.
17
Il est important de préciser que la faille a depuis été réparée et la sécurité des données chez Holstein Canada a
été renforcée.
52
La confidentialité des données réfère au fait de s’assurer que les données ne soient accessibles
qu’à ceux dont l’accès est autorisé. Pour plusieurs, les enjeux de sécurité liés à la confidentialité
sont prioritaires dans la mesure où si ces enjeux ne sont pas pris en compte rapidement, les
producteurs pourraient développer une peur de l’utilisation de leurs données par autrui et par
conséquent, ralentir l’adoption des technologies numériques. La crainte de l’utilisation des
données sans l’autorisation des producteurs est bien réelle chez plusieurs répondants. Certains
ont même mentionné que le secteur agricole ne saisit pas bien l’importance de cet enjeu, qu’il y
aurait un réel besoin de prise de conscience des dangers sur la confidentialité des données.
Les règles entourant la confidentialité des données sont, ou du moins devraient être, inscrites
au contrat liant le producteur et l’entreprise fournissant la technologie ou le service. Or, parfois
ces règles n’y figurent pas ou sont mal comprises par le producteur. Les producteurs peuvent ne
pas être en accord avec les règles de confidentialité stipulées dans leur contrat, mais doivent
souvent signer tout de même afin d’avoir accès à la technologie. Enfin, les règles peuvent être
modifiées au cours de la durée du contrat sans que le producteur ne soit avisé.
Nous avons posé la question suivante aux producteurs des trois secteurs visés par le sondage :
Avez-vous des craintes concernant la confidentialité des données numériques ? La proportion
de producteurs ayant répondu oui à cette question oscille autour de 35% dans les trois secteurs
(voir Figure 23). Ces proportions montrent que les producteurs sont généralement confiants par
rapport à cet enjeu. Le long historique de partage de données des producteurs aux
organisations et institutions au Québec explique peut-être ce résultat. En guise de comparaison,
l’American Farm Bureau Federation, un syndicat agricole américain, a fait un sondage auprès
de 400 producteurs agricoles en 2016 (American Farm Bureau Federation, 2016). Les résultats
de ce sondage montrent que 77% des producteurs sondés se demandent qui peut accéder à
leurs données agricoles et si elles pourraient être utilisées à des fins réglementaires. Aussi,
61% craignent que les entreprises puissent utiliser leurs données pour influencer les décisions
du marché. Enfin, 59% ne savaient pas si leurs contrats permettaient aux fournisseurs de
technologie ou de services d'utiliser leurs données pour commercialiser d'autres services,
équipements ou intrants.
Des différences intéressantes sont à relever lorsque l’on compare les résultats de cette question
sur les craintes relatives à la confidentialité des données et certaines variables
socioéconomiques. Ainsi, il existe des :
- Différences en fonction de la région d’implantation de l’entreprise agricole : Que ce soit
pour les producteurs en serre, les producteurs laitiers ou de grains, les répondants des
régions éloignées sont plus nombreux à avoir des craintes relativement à la
confidentialité des données numériques (pour les producteurs de grains, 50 % des
répondants en régions éloignées, contre 33 en régions urbaines et 35 % en régions
centrales ; pour les producteurs en serre, 50 % des répondants en régions éloignées,
contre 29 % en régions urbaines et 35 % en régions centrales ; pour les producteurs
laitiers, 48 % des répondants en régions éloignées, contre 0 % en régions urbaines et 39
% en régions centrales).
53
! Différences en fonction de l’âge : Pour les producteurs en serre, les craintes relativement
à la confidentialité des données numériques augmentent de façon significative avec l’âge
des répondants (73 % des plus de 55 ans, contre 23 % des 35-54 ans et aucun chez les
moins de 35 ans). Le même constat est visible chez les producteurs laitiers bien que les
différences ne soient pas significatives (70 % des plus de 55 ans, contre 40 % des 35-54
ans et 23 %chez les moins de 35 ans). "
L’enjeu de la confidentialité des données a été abordé dans plusieurs pays au travers de
l’élaboration de code de bonnes pratiques du partage de données, notamment en Europe, aux
États-Unis et en Nouvelle-Zélande. Le volet 2 du rapport fera état de ces initiatives.
Figure 23 : Perceptions des producteurs quant à leurs craintes concernant la confidentialité des données
numériques chez les producteurs au Québec (selon les résultats de nos trois enquêtes)
Avez-vous des craintes concernant la confidentialité des données numériques ?
L’entente entre John Deere et Monsanto illustre ce fait. Aux États-Unis, John Deere installe des
émetteurs-récepteurs dans sa machinerie que les producteurs n’ont pas le droit de modifier
mécaniquement ou électroniquement (Carbonell, 2016). Les données récoltées par la
machinerie sont automatiquement acheminées à John Deere, qui les partage avec Monsanto.
La multinationale intègre ensuite ces données aux siennes, sur les achats des producteurs, et
crée des algorithmes lui permettant de fournir des services agricoles de précision aux
producteurs. La présence déjà très forte de ces entreprises multinationales dans le paysage
agricole est donc d’autant plus renforcée par l’utilisation des données et leur partage entre elles.
En plus du pouvoir de marché que peuvent avoir ces entreprises, le volume de données qu’elles
peuvent obtenir leur confère un pouvoir encore plus grand.
XP!
Les délits d’initié et les abus de position dominante sont une autre crainte. Si un fournisseur
d’équipement et de service est en contrôle d’une partie importante des données du secteur, il
possède un levier important et pourrait prédire les rendements à venir de certaines matières
premières et finalement prendre l'avantage en utilisant par exemple ces informations pour
estimer les meilleurs moments pour acheter et vendre sur les marchés.
Dans ce contexte, il s’agit donc de définir un cadre pour la propriété et l’usage des données. De
nombreux modèles existent, mais c’est une situation d’autorégulation qui domine : certains
fournisseurs d’intrants et de service laissent clairement la propriété des données aux
agriculteurs qui les ont produites, d’autres bénéficient de contrat stipulant une cession de droits.
Pour certains fournisseurs de service, les producteurs vont rester propriétaires des données
brutes, mais ce sont les données organisées, analysées, transformées, et ayant une valeur
ajoutée qui deviennent la propriété de l’entreprise. De nombreuses questions éthiques naissent
de cette situation : des questions d’indépendance et d’autonomie (de l’agriculteur vis-à-vis des
grandes entreprises), des questions sur la notion du consentement, de la liberté de choisir, ou
de responsabilité vis-à-vis des décisions prises.
Nos entretiens ont révélé que les enjeux de propriété des données prennent une tournure
particulière dans le secteur agricole, plus que tout autre secteur économique, puisque le lien de
confiance entre opérateurs (producteurs, fournisseurs, clients) est basé sur la loyauté. Par
exemple, lors de l’achat d’une technologie permettant la génération de données, il est fréquent
d’observer un producteur qui continue de faire affaire avec la même entreprise et/ou un
représentant que la technologie précédente, mais qui croit que les termes du nouveau contrat
sont les mêmes que l’ancien. Une personne interrogée nous a cité l’exemple d’un producteur qui
décide d’acheter un robot de traite avec la même compagnie que ses trayeuses mobiles. Le
contrat associé à la vente du robot de traite est évidemment très différent de celui des trayeuses
mobiles, entraînant de nouvelles conditions notamment au niveau de la génération de données
et ce que cela implique au niveau de leur sécurité et de leur propriété. La problématique vient
alors du fait que le producteur ne perçoit pas toujours cet important changement ou qu’il fait tout
simplement confiance en son représentant.
Quelques acteurs interrogés ont affirmé que certaines entreprises qui vendent des robots de
traite peuvent restreindre l’accès aux informations collectées et aux données brutes produites
par le robot. Le producteur et les intervenants de différents niveaux (vétérinaires, conseillers,
laboratoires d’analyse, centre d’expertise) sont alors coupés de ce flux de données qui restent
en silo. C’est l’ensemble du réseau d’intervenants qui devient perclus, forçant à contourner le
système ou à rémunérer le fournisseur de service pour obtenir les informations nécessaires.
Plus globalement, la propriété des données est un enjeu pour les organisations qui ont
développé des outils collectifs, outils fort utilisés au Québec dans plusieurs secteurs, et ce,
depuis des décennies.
Ainsi, la propriété et l’usage des données représentent des enjeux importants tant d’un point de
vue éthique, qu’économique et stratégique. Toutes les entités rencontrées au cours de nos
55
entrevues soulignent la nécessité de règles de gouvernance de données, et appellent toutes à
l’amorçage de discussion. Pour certains, c’est une véritable urgence.
5.1.3 Indépendance des agriculteurs par rapport aux acteurs de l’amont et l’aval
La question de l’autonomie des agriculteurs vis-à-vis des fournisseurs de services et
d’équipements introduit deux scénarios antithétiques repérés lors de nos entretiens avec les
acteurs du milieu.
Le premier est celui d’un gain d’indépendance pour les producteurs utilisant les nouvelles
technologies numériques. L’arrivée de ces innovations permettrait d’augmenter l’autonomie des
agriculteurs vis-à-vis des grandes entreprises de l’agroalimentaire. Cela sera vrai à condition
que l’expertise et l’offre de services et de solutions technologiques se développent et ne soient
pas concentrées dans les mains d’une poignée d’acteurs. Cela sera possible également si les
producteurs sont en contrôle de leurs données et ont la possibilité de cesser leur relation
d’affaires avec un fournisseur en transférant les informations utiles les concernant d’un
fournisseur à l’autre.
Le deuxième est celui d’une perte d’autonomie pouvant s’illustrer de nombreuses manières.
Dans la section consacrée aux enjeux de la donnée, le risque d’accaparement des richesses (le
contrôle d’une majorité des données, une offre de services technologiques en situation de
monopole ou d’oligopole, une concentration de l’expertise et du savoir-faire dans le domaine
donnant un trop grand avantage concurrentiel) est une menace ressentie par les acteurs du
secteur agricole au Québec et dans le monde entier. Dans un scénario sombre, mais
envisageable, les producteurs qui adoptent le numérique et gèrent leur exploitation sur la base
de données et des données massives deviennent alors dépendants des grandes entreprises
pour gérer et analyser leurs données. Si le savoir-faire n’est pas diffusé et si les fournisseurs
négocient des clauses empêchant la libre circulation des données des utilisateurs, alors
l’expertise ne peut se développer de manière compétitive ailleurs. À de nombreuses reprises au
cours des entretiens, ce risque a été évoqué et les acteurs du virage numérique au Québec en
ont conscience. De leur avis, cette notion est cependant très peu répandue dans l’esprit des
producteurs, seuls les plus sensibilisés et réceptifs au virage numérique peuvent en avoir
conscience, mais cela n’entache pas véritablement leur confiance. Cela reste un risque lointain.
Un autre risque lié à la perte d’autonomie concerne la chaîne des données dans les procédés
de données massives. Avec le virage numérique, les compagnies réalisent que les données
sont un capital dont il faut se saisir : elles n’offrent donc plus seulement les intrants et
équipements, mais l’ensemble des services-conseils qui y sont relatifs sous forme de forfaits. En
faisant affaire avec un fournisseur, suivant les clauses du contrat, le producteur peut ne pas
avoir accès aux données qu’il produit en utilisant ces équipements et/ou services. Le producteur
est “capturé” par la chaîne de valeur et devient un maillon qui va fournir des informations
utilisées pour lui vendre davantage d’équipement et/ou de services. Citant de grands joueurs du
secteur, des répondants ont indiqué “ils en savent plus que le producteur”, sous-entendant
qu’un certain avantage commercial pourrait être exploité de manière abusive. De plus, si toutes
les données que le producteur génère et qui sont valorisées par son fournisseur ne sont pas
56
sous son contrôle, alors il perd la liberté de faire marcher la concurrence et de changer de
fournisseur. Toutes les informations accumulées depuis le début de sa relation d’affaires ne
seront pas transférables, ce qui le forcerait à “repartir de zéro”.
Enfin, une autre manière pour un joueur important du secteur d’abuser de sa position dominante
en exploitant les données serait d’intensifier la concurrence entre les producteurs. L’acheteur de
produits ayant accès aux rendements des fournisseurs peut décider de mettre les producteurs
moins performants de côté, ou les contraindre à adopter de nouveaux services et équipements
pour pallier leur “classement”. Ils deviendraient alors de simples exécutants, augmentant leur
dépendance face à leurs partenaires de l’aval.
Ainsi, sur une ferme la production de données en quantité massive peut permettre de bénéficier
de nombreux avantages pour améliorer les conditions de travail, celle des animaux, la qualité
des produits, et réduire l’utilisation de ressources et l’impact environnemental, mais la
concentration et la propriété de ces données peut créer dans son sillon de graves problèmes
éthiques à propos de l’autonomie et de l’indépendance des producteurs agricoles.
Au cours de notre enquête en ligne, la moitié des producteurs laitiers interrogés (50%) ont
signalé avoir la perception d’un risque de perte d’autonomie par rapport à leur fournisseur en
utilisant les technologies numériques. Les producteurs en serre sont 37 % et les producteurs de
grains 46 % à percevoir ce risque.
Figure 24 : Perception du risque de perte d’indépendance en utilisant les technologies numériques chez les
producteurs au Québec (selon les résultats de nos trois enquêtes)
Voyez-vous une perte d’indépendance en tant que producteur agricole face aux fournisseurs de ces
technologies ?
Des différences intéressantes sont à relever lorsque l’on compare les résultats de cette question
et certaines variables socioéconomiques. Ainsi, il existe des :
- Différences en fonction du niveau de scolarité : Que ce soit pour les producteurs en serre
ou de grains, les répondants détenant un diplôme universitaire sont plus préoccupés par
la perte d’indépendance qu’ils ont en tant que producteur face aux fournisseurs de
technologies (pour les producteurs de grains, 71 % des répondants avec un diplôme
universitaire, contre 44% avec un DEC et 27 % avec un diplôme du secondaire ; pour les
X`!
producteurs en serre, 53 % des répondants avec un diplôme universitaire, contre 18 %
avec un DEC et 38 % avec un diplôme du secondaire).
En général, les données stockées sur des serveurs physiquement présents au Canada sont
soumises aux lois canadiennes relatives à la vie privée, et inversement lorsque les données
quittent le territoire, elles doivent répondre aux lois des pays où elles voyagent. Les données
des utilisateurs ayant la citoyenneté canadienne ne sont donc pas nécessairement soumises à
la réglementation en vigueur au Canada. C’est un fait problématique puisque du fait de
l’infrastructure même des accès à Internet, les données circulent et virevoltent en dehors des
frontières sans qu’il y ait conscience de ces flux. De nombreux services populaires et
professionnels sont établis hors du Canada, que ce soit l’infonuagique, le stockage de données,
ou des services spécialisés pour chaque industrie. Par ailleurs, si certains fournisseurs de
services d’informatique en nuage sont en partie soumis aux lois d’un autre pays, alors même si
les serveurs qui stockent des données canadiennes sont physiquement présents sur le territoire,
la pleine souveraineté du Canada ne s’exerce pas et il existe un risque d’une perte de contrôle
des données.
Aujourd’hui, savoir précisément où se trouvent les données, à qui elles appartiennent, comment
elles seront utilisées, par qui, et quelles sont les autorités légales et morales garantissant leur
intégrité, sont des questions aussi cruciales que sans réponse nette. La question de la
souveraineté de données est complexe et évolue continuellement au fur et à mesure que se
noue le tissu des lois étrangères et internationales, et que ces lois sont éprouvées dans des cas
réels.
58
Souveraineté des données et nuage public, le gouvernement fédéral fait un état des lieux des
risques et des pistes de solutions explorées à propos de la souveraineté des données. Il existe
d’ores et déjà des exigences en matière de résidence des données classées dans certaines
catégories sensibles, mais seules des mesures d’atténuation des risques existent pour répondre
à l'ensemble des problématiques décrites plus haut.
Enfin, il est à noter que si les enjeux de propriété et de partage des données (et in extenso des
risques de dépendance) sont à l’esprit des acteurs du secteur agricole québécois que nous
avons auditionnés, la souveraineté des données est en revanche une notion qui n’est jamais
apparue d’elle-même dans les entrevues, signe que cet enjeu est peut-être sous-estimé ou
secondaire pour les acteurs québécois au moment de faire cette étude.
Les enjeux économiques du virage numérique se déclinent en trois principaux défis : l’emploi, la
main d’œuvre et la relève.
Parmi les défis de l'agriculture du 21e siècle, la diminution de la part de la population désirant
s’adonner aux activités agricoles est un enjeu persistant du secteur. La portion de la population
occupant cette place d’importance dans la société n’a de cesse de diminuer dans tous les pays
développés. Cette réduction du nombre de travailleurs du secteur est également engendrée par
d’autres effets, notamment les transformations des pratiques allant de pair avec les
développements technologiques, ainsi que l’agrandissement des exploitations. Comme
l’indiquent les différents mémoires soumis par la Fédération de la relève agricole du Québec
auprès du MAPAQ, la province n’est pas épargnée par cette tendance et l’établissement de la
relève est un enjeu préoccupant caractérisé par la perte de six fermes par semaine au Québec
(FRAQ, 2017, 2007).
Pourtant, un problème majeur et redondant existe pour assurer la pérennité du secteur : attirer
la relève, assurer sa formation et son établissement, et fournir la main d’œuvre nécessaire au
travail saisonnier ou aux travaux plus pénibles. Les entités que nous avons rencontrées au
cours de nos entrevues nous ont toutes fait part de ces problèmes, et ces entretiens font écho
aux revendications lisibles dans les différents mémoires soumis par la Fédération de la Relève
Agricole du Québec (FRAQ) au MAPAQ. D’une part, même si les jeunes producteurs sont
motivés et investis, il n’en reste pas moins que de manière générale les professions agricoles
manquent d’attraits pour les nouvelles générations. Cependant, de l’avis des entités rencontrées
le virage numérique et les nouveaux métiers offrent de nouvelles perspectives d’emploi dans le
59
secteur ainsi que de nouveaux attraits pour les agriculteurs. Il manque aujourd’hui de personnel
expert dans le secteur informatique, dans la géomatique, ou du personnel doté des
compétences relatives à l’analyse et à la science des données pour les enseigner et donc faire
évoluer des métiers du secteur. Aussi, ce personnel est fortement convoité par les autres
secteurs économiques et certains de ces secteurs rémunèrent très bien leurs ressources
humaines. Ainsi, le virage numérique apparaît comme une opportunité pour le Québec de créer
de nombreux emplois et venir compléter les lacunes du secteur, à la condition de proposer les
formations adéquates.
Pour les acteurs rencontrés en entretien, l’utilisation des nouvelles technologies est un
argument qui va encourager la relève. La liste des bénéfices constituée fait allusion à de
nombreux points qui rendraient une carrière dans le secteur agricole plus attrayante : pénibilité
du travail réduite, simplicité de certaines opérations (automatisation accrue), moins de
contraintes de main-d’œuvre, conception du métier évoluant vers davantage d’auto-
entrepreneuriat, plus de technologies tout en maintenant le lien avec la nature.
Au même titre que les avancées des outils d’automatisation utilisés sur les fermes, les nouveaux
outils numériques sont donc vus comme des atouts pour attirer la relève, transformer le métier
de producteur en lui apportant de nouvelles dimensions ainsi qu’en diminuant la pénibilité de
certaines tâches, tout en augmentant les rendements de production.
Les enjeux organisationnels se déclinent en trois grandes catégories dans notre étude : les
enjeux liés au transfert de connaissances, la formation et le partage des données. Les enjeux
découlant du transfert de connaissances et de la formation sont apparus comme cruciaux lors
de notre enquête auprès des acteurs. Et pour cause, ces enjeux se situent à un point
névralgique du virage numérique. Si ces enjeux ne sont pas résolus, les producteurs et acteurs
ne pourront s’approprier, pas seulement les technologies numériques, mais également le plein
potentiel de ces outils. Tel que mentionné au début de cette étude, le véritable virage numérique
s’effectue avec une agriculture intégrée qui s’avère plus complexe à mettre en œuvre que la
simple adoption de technologies.
Il a été demandé aux producteurs s’ils avaient l’impression d’utiliser le plein potentiel des
technologies numériques qu’ils employaient.
60
Figure 25 : Perception des producteurs relativement au potentiel des technologies numériques chez les
producteurs au Québec (selon les résultats de nos trois enquêtes)
Croyez-vous que vous utilisez le plein potentiel des technologies numériques que vous employez ?
Les producteurs en serre sont 96% à croire qu’ils n’utilisent pas le plein potentiel des
technologies qu’ils emploient. Les pourcentages sont également élevés dans les deux autres
secteurs. Ce résultat indique que l’adoption des technologies est une chose, mais que leur
utilisation en est une autre. Cela rejoint le commentaire d’un des acteurs qui avait l’impression
qu’au niveau de l’adoption, le Québec suivait bien le virage numérique, mais qu’au niveau de
l’utilisation, la province accusait un retard. Or, pour utiliser le plein potentiel des technologies
numériques, il faut solidifier l’agriculture dite de précision pour se diriger vers une agriculture
intégrée. Cette dernière requière des compétences en ressources humaines et en coordination
qui relèvent en grande partie de la formation et du transfert de connaissance, tant au niveau des
producteurs que des acteurs gravitant autour d’eux, incluant les fournisseurs de logiciels qui
permettent une meilleure intégration des données sur l’exploitation18.
18
Par exemple, des entreprises québécoises ont développé des outils qui permettent de mieux intégrer les données
des producteurs en temps réel. Parmi celles-ci, la Coop Fédérée a développé une application (Agconnection) dont
l’objectif est de faciliter l’utilisation de la technologie au quotidien et ce, tout au long de la chaine de valeur de la
planification jusqu’à la récolte. Le CEGA (Centre d’expertise en gestion agricole) a également développé un outil
(ALEOP) qui permet de regrouper l’ensemble des données nécessaires à la gestion de la ferme, de les exploiter et de
les partager.
SE!
ferme a le potentiel d’augmenter de manière exponentielle, mais les producteurs peuvent ne
plus savoir quelles sont les informations pertinentes pour leur entreprise et leur productivité. Une
fois encore, le réseau des groupes conseils permet de pallier le manque d’expertise en
agglomérant l'expérience de terrain acquise vis-à-vis de nouvelles technologies et leur utilisation
optimale. Cependant, il ne serait pas étonnant de retrouver chez les conseillers les mêmes
attitudes que les producteurs agricoles face aux technologies numériques. La courbe
d’apprentissage est abrupte pour plusieurs ce qui crée d’énorme défis. Entreprendre le virage
numérique pour les conseillers des groupes conseils non liés n’est pas une tâche facile selon
plusieurs répondants. Tout comme dans le cas de la formation que nous traiterons dans la
prochaine sous-section, les compétences requises pour conseiller les producteurs dans le
domaine ne sont pas des compétences traditionnelles des techniciens et agronomes. De plus,
plusieurs technologies existent sur le marché et il est difficile pour un conseiller de bien maitriser
chacune d’entre elles. Pour le moment, ce sont les conseillers qui ont un grand intérêt pour les
technologies numériques qui se forment eux-mêmes et qui forment leurs collègues.
L’absence des concepts et du savoir-faire liés aux données massives et à l’analyse de données
est un problème, il s’agit donc de trouver soit une manière d’apporter aux agronomes ces
connaissances, soit les moyens d’encourager et soutenir la collaboration entre les agronomes et
les sciences informatiques. Cette collaboration doit s’effectuer sur le terrain, au plus proche des
agriculteurs, d’une part dans le but de participer à un effort de sensibilisation et démocratisation
des technologies numériques, et d’autre part dans l’objectif de fournir les études attendues au
sujet de la rentabilité de ces outils et vis-à-vis des modèles d’aide à la décision à partir des
données collectées.
En dernier lieu, les entités rencontrées issues du milieu universitaire et des centres d’excellence
ont décrit des problèmes de moyens pour faire face aux changements rapides des technologies
62
et des logiciels utilisés dans ces domaines. Elles expliquent qu’il existe un décalage entre les
besoins des chercheurs et les moyens alloués ou les politiques mises en place. Plusieurs
anecdotes ont illustré ces propos, comme par exemple l’impossibilité d’installer certains logiciels
libres ou ouverts sur des postes de recherche, ou bien les délais entre des demandes de
financement pour s’équiper de logiciels et les réponses favorables qui arrivent tardivement
après une évolution des logiciels. Le maintien à jour est donc difficile dans un environnement
changeant rapidement.
Classement des canaux de transfert de connaissances en fonction de leur utilisation par les
producteurs
Nous avons posé aux producteurs des trois secteurs sondés deux questions légèrement
différentes pour connaître leur canal de transfert privilégié des connaissances et de l’information
1) Comment apprenez-vous l'existence de nouveaux produits / de nouveaux procédés / de
nouvelles pratiques (dans le domaine des technologies numériques appliquées à l’agriculture ?
2) Comment vous renseignez-vous pour avoir de l’information sur comment utiliser les nouvelles
technologies numériques ?
Les figures suivantes font état des résultats obtenus. Il est important de noter que certaines
sources d’informations sont propres à un seul secteur agricole ce qui explique que toutes les
sources ne se retrouvent pas nécessairement sur chaque figure.
63
Figure 26 : Sources d’informations utilisées pour apprendre l'existence de nouveaux produits / de nouveaux
procédés / de nouvelles pratiques chez les producteurs au Québec (selon les résultats de nos trois
enquêtes)
Comment apprenez-vous l'existence de nouveaux produits / de nouveaux procédés / de
nouvelles pratiques (dans le domaine des technologies numériques appliquées à
l’agriculture)?
PRODUCTEURS DE LAIT (n=91)
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Les producteurs sondés toutes catégories confondues utilisent essentiellement Internet pour
s’informer des nouveautés dans les technologies numériques agricoles. Les producteurs laitiers
sont 75 % à citer cette réponse, suivi des producteurs en serre (73 %) et des producteurs de
grains (69 %).
Les producteurs de lait prennent davantage renseignement dans les magazines et journaux
professionnels. 70 % des répondants citent cette réponse pour cette catégorie de producteurs,
que les producteurs en serre et de grains qui sont un peu moins de 60 % à y avoir recours. On
peut aussi observer que les producteurs laitiers ont plus recours aux médias sociaux que les
autres catégories de producteurs.
L’information recueillie auprès des autres producteurs constitue aussi une ressource importante
pour eux, puisqu’ils sont 73 % chez les producteurs de lait, 63 % chez les producteurs de grain
et 58 % chez les producteurs en serre à citer cette réponse.
À l’opposé, on peut voir que les producteurs pensent moins aux centres de recherches et
universités pour s’informer des nouvelles pratiques.
La seconde question était formulée comme suit : Comment vous renseignez-vous pour avoir de
l’information sur comment utiliser les nouvelles technologies numériques ? Les figures suivantes
font état des résultats obtenus pour cette question.
SX!
Figure 27 : Sources d’informations utilisées par les producteurs pour savoir comment utiliser les nouvelles
technologies numériques
Comment vous renseignez-vous pour avoir de l'information sur comment utiliser les
nouvelles technologies numériques ?
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L’information recueillie auprès des autres producteurs constitue aussi une ressource importante
pour eux, puisqu’ils sont 49 % chez les producteurs de lait et de grain et 46 % chez les
producteurs en serre à citer cette réponse.
Les producteurs laitiers et en serres effectuent davantage de recherches personnelles que les
producteurs de grains, puisque ces derniers ne sont que 23 % à citer cette réponse
comparativement aux 51 % et 42 % observés respectivement chez les deux premiers.
On note aussi que les producteurs en serre sont très peu à recourir aux médias sociaux (4 %),
contrairement aux producteurs de lait (33 %) et de grains (29 %).
Lors de nos entretiens, il nous a été confié que pour pallier certaines lacunes au niveau du
transfert de connaissances par exemple, des initiatives spontanées de groupe sur Facebook
s’organisent afin de constituer un lieu d’échanges entre producteurs sur les technologies
disponibles, leur intérêt et leur rentabilité approximative. Selon notre enquête auprès des
producteurs, c’est surtout le cas dans le secteur laitier et des grains.
S`!
5.4.2 Accès à la formation aux nouveaux outils et aux nouvelles pratiques numériques
Selon nos répondants, il semble manquer de moyens et de structure pour développer les
canaux de transfert de connaissance et en faire bénéficier l’ensemble du secteur agricole. Les
entités rencontrées sont unanimes : le virage numérique s’effectuera de manière d’autant plus
rapide et harmonieuse que les données seront mises en commun, analysées au bénéfice de
tous (en accord avec les besoins formulés sur le terrain : rentabilité et aide à la décision), et les
résultats des études diffusés en sensibilisant les agriculteurs. Cet état des lieux met tout
naturellement en évidence un autre enjeu important : la formation et l’expertise offertes par le
secteur public.
Les acteurs que nous avons rencontrés au cours de nos entretiens expriment une
problématique triple au niveau de la formation sur le numérique. D’abord, il existerait selon eux
encore peu d’offres pour la formation initiale de la relève et pour la formation continue
concernant les nouvelles technologies et l’agriculture de précision. Ensuite, selon eux, les
moyens et le soutien à la formation manquent, ce qui laisse peu de liberté et d’opportunité aux
producteurs désirant le faire de prendre le temps pour se former. Enfin et toujours selon les
personnes que nous avons interrogées, il existerait au Québec un décalage assez important
entre les formations accessibles et les compétences aujourd’hui nécessaire à la relève agricole.
Ceci étant dit, les acteurs rencontrés sont conscients que le virage numérique est un défi de
taille pour les institutions de formation et d’enseignement, car il nécessite de nouvelles
compétences dans des champs qui ne sont pas traditionnels. La structure organisationnelle et
financière de ces institutions crée certaines rigidités qui peuvent ralentir l’absorption d’un tel
changement.
Notre étude a tenté d’évaluer si ces perceptions étaient véritablement présentes dans la réalité.
Au niveau collégial, le diplôme d’étude collégiale (DEC) en gestion et technologies d’entreprise
agricole est offert dans 9 établissements. Il existe aussi des diplômes professionnels, ainsi que
des formations en ligne. Malgré cette offre et une progression du niveau de formation chez les
jeunes agriculteurs, 20 % des jeunes agriculteurs établis ne possèdent pas de formation liée à
l’agriculture (Fédération de la relève agricole du Québec, FRAQ). Et si la FRAQ souligne
l’importance d’assurer une formation en agriculture cohérente sur tout le territoire québécois,
aucune mention spécifique n’est faite au sujet des formations aux nouvelles technologies
numériques. En date de cette étude, les instituts de technologie agroalimentaire (ITA) proposent
quelques cours sur l’agriculture de précision et les nouvelles technologies. Des robots de traite
ont commencé à être installés à l’ITA de Saint-Hyacinthe à l’automne 2019. La formation
professionnelle et technique n’irait peut-être pas aussi loin et aussi vite que le voudraient
certains acteurs interrogés, mais il semblerait, après vérification, que les formations techniques
suivraient somme toute assez bien la vague numérique qui a commencé à déferler sur les
champs. Dans tous les cas, les acteurs concernés sont sensibilisés aux défis du numérique en
agriculture et mettent en place des formations permettant aux futurs producteurs de pouvoir
naviguer sur cette vague.
68
Au niveau universitaire, trois établissements offrent des programmes à tous les niveaux
(baccalauréat, maîtrise, DESS, doctorat et formation continue) : l’Université Laval, l’Université
McGill et l’école vétérinaire de l’Université de Montréal. À l’Université Laval, bien qu’il n’existe
que peu de cours dans les programmes de baccalauréat en agronomie entièrement dédiés au
numérique, plusieurs cours intègrent des notions et sensibilisent les étudiants. Une nouvelle
ressource professorale dans le domaine de l’informatique et des données massives a d’ailleurs
été embauchée à la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation au cours de cette
étude. L’Université McGill possède une équipe de recherche dirigée par le professeur
Viacheslav Adamchuk. Le PASS (Precision Agriculture & Sensor Systems Research Team)
travaille sur de développement de diverses technologies numériques appliquées au secteur
agricole et a développé le logiciel NumericAg, un système de décision développé pour aider les
producteurs et les conseillers à utiliser efficacement le numérique. Ce système demeure
cependant un exercice académique et n’est pas conçu pour des utilisations commerciales. Pour
ce qui est de ressources analysant la rentabilité économique des technologies numériques,
notre étude souligne une importante lacune au niveau provincial.
Les professeurs-chercheurs ayant des expertises dans le numérique sont toujours cependant
peu nombreux et pour cause, nos entretiens ont révélé que les compétences de ces chercheurs
proviennent de domaines très différents de l’agronomie. Ces compétences sont d’une part très
prisées et donc très en demande sur le marché du travail, mais aussi, ces ressources
professorales s’ajoutent à celles déjà en place dans un contexte où le nombre de professeurs
n’augmente pas nécessairement.
Tout comme dans le cas de la formation professionnelle et technique, les acteurs concernés
sont sensibilisés aux défis du numérique et de plus en plus de cours intègrent des notions
permettant une meilleure compréhension des outils et des données. Cependant, selon l’avis de
certaines personnes rencontrées, les formations universitaires n’iraient pas encore assez loin et
ne changeraient pas encore assez vite. Toutefois, l’adoption de l’approche-programme, qui
permet une meilleure cohérence de la formation et met l’emphase sur le développement de
compétences transversales, pourrait permettre d’offrir une formation intégrant davantage le
numérique en agriculture.
Nous avons demandé aux producteurs s’ils croyaient être suffisamment formés et informés pour
bien utiliser les technologies présentes sur leur ferme. Les figures suivantes présentent les
résultats obtenus.
69
Figure 28: Perceptions des producteurs sur leur niveau de formation et d’information pour bien utiliser les
technologies présentes sur leur ferme
Croyez-vous que vous êtes suffisamment formé et informé pour bien utiliser les technologies présentes sur
votre ferme ?
Globalement, on constate qu’un peu plus de la moitié des répondants, toutes productions
confondues, se considère comme suffisamment formés et informés pour bien utiliser les
technologies présentes sur leur ferme. Des différences sont toutefois à relever en fonction de
certaines données socioéconomiques :
- Différences en fonction de la région : chez les producteurs de grains et les producteurs
laitiers, il semble que les producteurs en régions urbaines se considèrent comme
beaucoup plus informés pour bien utiliser les technologies présentes sur leur ferme (pour
les producteurs de grains 75 % contre 44 des répondants en régions centrales et 33 %
en régions éloignées ; pour les producteurs laitiers, 88 % contre 69 des répondants en
régions centrales et 71 % en régions éloignées). L’inverse est constaté chez les
producteurs en serre (60 % des répondants des régions éloignées se considèrent
suffisamment informés contre 50 % en régions urbaines et 65 % en régions centrales).
`%!
5.4.3 Partage des données
Les enjeux entourant le partage des données doivent être surmontés pour bénéficier
entièrement des retombées des technologies numériques et des données massives. De fait,
dans le domaine des données, on parle de masse critique des données, c’est à dire la
quantité et la quantité de données nécessaires pour que l’analyse produise des résultats
probants et exploitables. Pour répondre à ce besoin, certains répondants soulignent l’intérêt de
la mise en place d’une base de données publique où les résultats d’essais structurés seraient
mis en commun. Or, nos entretiens montrent également que le partage des données comme tel
et le déploiement d’initiatives visant ce partage sont loin de faire consensus.
Nos entretiens avec les institutions de recherche et de formation ont fait apparaître un désir
ardent d’établir une stratégie de gouvernance des données forte et très encadrée pour d’un côté
éviter les dérives, fournir un écosystème fécond et sécuritaire pour le développement des
technologies et de l’économie de la donnée, et soutenir le partage et la mise en commun des
données qui offrent des potentiels importants. Dans le secteur de la recherche, le partage et la
mise en commun des données sont une étape importante pour appuyer les efforts de la
recherche et éviter de dissiper les ressources (temps, argent). Trop souvent, des barrières
s’élèvent à la mise en commun des données et des savoirs accumulés. Il faut “courir après les
données” ou “courir après les autorisations”. Selon eux, les initiatives de données ouvertes
(open data) seraient une solution prometteuse pour se délier de ces entraves au progrès, mais
ces dernières doivent être le fruit d’un effort commun et à grande échelle, accompagné d’une
réflexion sur les aspects légaux (pour réguler et encadrer les questions de propriété des
données) et de gouvernance (qui gérera ces initiatives ?).
La perception des entreprises privées fournissant des équipements et des services sur la notion
de partage des données est tout autre et appelle à la prudence. Les craintes viennent de
l’accaparement des données comme richesse par les grandes entreprises et de l’exclusivité
dont elles joueraient, empêchant la mise en commun de certaines informations. Là encore, le
tissage d’un maillage légal et règlementaire permettrait d’assurer la rétention de certaines
informations et d’empêcher leur fuite auprès de ces entreprises.
Le portail de données ouvertes est un outil plébiscité par plusieurs des intervenants consultés,
en particulier ceux appartenant au milieu de la recherche. Il apparaît comme une solution pour
faciliter le partage d’une base de données plus vaste et plus complète et par conséquent
favoriser la recherche, faciliter le transfert de connaissance, et inscrire durablement le progrès et
le développement des technologies numériques sans effet “un pas en avant, trois pas en
arrière”. Le portail pourrait répondre à plusieurs problématiques en offrant une interface de mise
en commun des données relatives à l’agriculture : les données qui finissent parfois oubliées en
silo et qui demandent du temps et des moyens pour être récoltées sont mutualisées et sont
valorisées au bénéfice de l’ensemble du secteur.
Évidemment, la mise en place ainsi que l’utilisation d’un portail de données ouvertes présentent
de nombreux défis. Un exemple est la participation volontaire des agriculteurs. Il faut faire un
important travail de sensibilisation auprès des agriculteurs pour les inciter à venir sur le portail
71
déposer les données, ce qui implique en amont du temps et des compétences nécessaires
suffisantes (fournir des données de qualité et organisées selon un canevas). Il est nécessaire de
leur démontrer l’intérêt personnel et le bien commun de leur participation en expliquant de quelle
manière ils pourront en bénéficier, directement ou indirectement. Plusieurs acteurs ont
mentionné que les producteurs devraient bénéficier d’une contrepartie pour « donner » leurs
données, qu’ils puissent avoir un juste retour pour leur apport et leur effort.
Les aspects techniques ont été soulevés à quelques reprises. Une mise en commun des
données exige un minimum de connaissances des producteurs pour transférer leurs données,
mais aussi, des formats de données compatibles. Une plateforme de données numériques est
un hub destiné à faciliter les échanges ; en ce sens elle doit permettre de mettre en commun
des données provenant de différents systèmes. L’accès à des jeux de données peut se faire soit
en les téléchargeant depuis un cloud si cette fonctionnalité est offerte, soit par l’intermédiaire
d’une API (Application Programming Interface). Une API est une interface de programmation
mise à disposition par un fournisseur de données qui ouvre l’accès à ses données via un URL.
Dans le cas des données déposées sur un cloud, les jeux de données doivent être déposés
dans un format (.xls, .csv par exemple) ou standard d’échange (.xml, .json etc.) exploitable. La
conception d’un portail d’échange de données devrait idéalement être facile à utiliser, tant pour
l’expert en programmation que pour l’agriculteur fournisseur de données. Il est certain qu’une
phase d’adaptation à l’outil sera nécessaire ; à cet égard, des tutoriels d’utilisation et des
formations sont généralement bienvenus.
Un autre défi est la participation des entités privées qui ont de prime abord tout intérêt à
s’assurer de la propriété des données pour les valoriser et en bénéficier elles-mêmes. Ainsi,
pour créer un portail de données ouvertes, il est nécessaire de réfléchir d’une part à des
incitatifs pour encourager les entreprises privées à partager des données, et d’autre part à un
cadre juridique leur fournissant des garanties et un encadrement. Le portail peut être paramétré
de différentes manières, relatives au type d’accès (données visibles et/ou téléchargeables), aux
modalités d’accès, aux termes des licences associées à la réutilisation de leurs données, ou les
coûts d’accès aux jeux de données ou aux services développés à partir de ces données.
Un troisième défi est la gouvernance de ces plateformes. Des répondants ont souligné que la
gouvernance des portails des données devait être accordée à des entités indépendantes afin
d’obtenir et de conserver la confiance des producteurs et des acteurs de l’industrie.
Au cours des entretiens, un seul répondant a soulevé des inquiétudes vis-à-vis des données
ouvertes, et a souligné qu’un total abandon des droits de propriété des données peut être
dommageable, autant pour les agriculteurs et que les entreprises privées. Une fois encore,
réfléchir de manière méthodique aux paramètres d’accès des données ouvertes et
l’établissement consciencieux de critères de sensibilité des données diffusées rend possible la
création d’un portail sans pour autant diffuser les informations tous azimuts. Enfin, plusieurs
modèles de monétisation sont envisageables pour l’utilisation de telles données, et chaque
producteur affilié au programme pourrait non seulement contrôler lesquelles de ses données
72
sont partagées et en quels termes, mais aussi être rémunéré à chaque utilisation de ses
données.
La volonté de pouvoir bénéficier de plateformes de données ouvertes est forte, et les avantages
en sont nombreux. La pénurie de données est vécue comme un véritable frein à la recherche et
au développement des nouvelles technologies numériques appliquées au secteur agricole, par
conséquent la création et la démocratisation de cet outil sembleraient être un élément
catalyseur du virage numérique en agriculture.
19
Figure 29 : Perception des producteurs sur le partage des données numériques
Avec qui vous sentez-vous confortable pour partager les données produites par les
technologies numériques que vous utilisez ?
19
À noter que dans le questionnaire soumis aux producteurs laitiers, le choix « mon vétérinaire » ne
faisait pas partie des choix présentés aux producteurs.
73
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6 Perceptions du rôle que devrait jouer l’État
La dernière partie des entretiens permettait de faire une synthèse des échanges en demandant
au répondant d’établir une liste de demandes et d’actions prioritaires que le gouvernement
québécois devrait suivre pour faciliter le virage numérique dans le secteur agricole. Si chacune
des recommandations formulées par les acteurs rencontrés adresse un enjeu important du
virage numérique, il nous a été possible en fonction de leurs réponses, de les classer par ordre
chronologique d’importance.
Avant toute chose, le plus urgent est d’initier la transformation du secteur agricole québécois en
fournissant les connaissances et les ressources pour développer l’expertise des données
localement, et garantir des infrastructures fonctionnelles. Cet effort passe par une sensibilisation
des agriculteurs aux bénéfices de ces outils, et par conséquent comme nous l’avons vu par la
réalisation et la diffusion d’études sur la rentabilité et l’impact économique de ces technologies.
Nos sondages auprès des producteurs ont permis de déceler que plusieurs ne savent tout
simplement pas dans quelle technologie investir. Un répondant a souligné qu’un guide identifiant
les principales technologies numériques dans les différents secteurs, leurs avantages et
inconvénients, ainsi que leur rentabilité respective aiderait les producteurs à s’y retrouver et
prendre des décisions d’investissement plus éclairé.
Un autre axe prioritaire porte sur la formation. Il a été mentionné de proposer davantage de
formations aux agronomes et conseillers pour qu’ils soient sensibilisés aux enjeux du numérique
et à même de comprendre et d’utiliser les concepts clés et les méthodes liés aux données
massives et à la science des données. Ainsi ils seront un relais éclairé pour accompagner sur le
terrain les producteurs dans leurs décisions et dans leur transition numérique. Il a également été
souligné de soutenir les efforts de formation de la relève des producteurs agricoles, et combler
les lacunes des programmes en incluant des volets relatifs au virage numérique dans le secteur.
Plus largement, il faut continuer à développer les formations relatives à la science des données
et les sciences informatiques, et encourager les centres de recherche spécialisés dans ces
domaines à s’intéresser aux problématiques relatives aux défis de l’agriculture du XXIe siècle.
Un répondant a mentionné qu’une vigie vulgarisatrice qui performe des analyses critiques de ce
qui se fait en matière de numérique agricole serait un atout. Cette vigie permettrait de
démystifier les technologies numériques pour ceux qui ont des craintes, mais également de
renseigner les producteurs plus avertis sur les enjeux qui découlent du numérique et de
présenter des technologies prometteuses sous un angle critique. La forme que pourrait prendre
cette vigie n’a cependant pas été spécifiée lors de l’entretien.
75
(Internet), pour que tous aient accès aux nouvelles technologies. Le gouvernement doit
poursuivre et intensifier ses campagnes de raccordement de toutes les régions du Québec à un
service Internet adéquat.
Afin de bénéficier de tout le potentiel du numérique et des données massives, il est nécessaire
selon plusieurs d’investir dans les outils collaboratifs facilitant la recherche et le développement
entre toutes les disciplines impliquées dans cette transition numérique du secteur agricole. Les
projets de recherche doivent aussi impliquer le terrain et les agriculteurs, pour d’abord les
sensibiliser à ces questions, ensuite bénéficier de leur contribution précieuse pour aligner la
recherche avec les besoins du secteur, enfin répondre de manière adéquate au manque de
recherche sur la rentabilité et la prise de décision liées à ces technologies. Toujours selon ces
mêmes acteurs, il faut éviter un modèle de collaboration fragmentaire avec des producteurs
individuels, le maître mot est la mise en commun des données et du savoir-faire pour constituer
un fondement solide et fertile pour l’innovation, ainsi qu’un mouvement global de transition
numérique.
Au niveau des incitatifs et aides financières, les acteurs sont très nuancés à cause des risques
de surendettement. Le gouvernement pourrait aider les producteurs à s’équiper grâce par
exemple à des crédits d’impôt. Cependant, pour éviter les écueils, les mauvais investissements,
les endettements, ou un renouvellement trop rapide des technologies du fait d’une “course à
l’innovation” néfaste, les aides financières devraient peut-être être accordées en priorité aux
technologies ayant fait preuve de rentabilité ou d’un impact bénéfique sur le long terme. Ceci
étant dit, plusieurs acteurs ont semblé très réticents à inciter financièrement les producteurs à
investir pour les raisons évoquées plus haut.
Bien que les intervenants auditionnés aient conscience de l’importance des enjeux de la
donnée, des risques et des dérives pesant sur le secteur, ils s’accordent à dire que le plus
important pour le secteur agricole québécois est de s’équiper en technologies numériques pour
ne pas prendre davantage de retard. Une fois la vague numérique initiée, il sera temps
d’accorder les ressources nécessaires pour répondre à l’éventail des enjeux éthiques liés à ces
technologies.
Le chantier prioritaire à cet égard est de définir et d’établir la propriété des données. Si le
producteur ne peut conserver la propriété de ses propres données, il perd son indépendance
face à ses fournisseurs. De plus, les outils collectifs développés au fil des ans pour améliorer les
performances dans plusieurs secteurs agricoles québécois peuvent ne pas avoir accès à ces
données, les coupant ainsi d’un certain bassin de données et donc d’une certaine
représentativité.
76
Certains voient dans la sécurité et la confidentialité des données un chantier d’action pour les
gouvernements afin d’éviter une perte de confiance et un ralentissement du développement de
ces technologies au Québec. Les entretiens ont souligné qu’un cadre réglementaire permettrait
un développement plus harmonieux et une utilisation plus sereine des nouvelles technologies
numériques. La possibilité de créer un espace de médiation a aussi été mentionnée : lieu où les
producteurs pourraient venir faire part de situations conflictuelles.
Quelques acteurs ont mentionné que l’État devrait réglementer pour contraindre les fournisseurs
de services et d’équipements à souligner l’importance des clauses de contrats demandant le
consentement des producteurs. Les fournisseurs devraient expliquer la conséquence de ce
consentement sur l’échange des données avec leur client et la manière dont la propriété des
données générées par leur client est gérée.
Nos entretiens ont également fait ressortir le rôle que pourrait jouer l’État en termes
d’information et de sensibilisation auprès des producteurs à propos des enjeux éthiques. Un
acteur a souligné que l’État pourrait mettre un portail en ligne facilement accessible pour illustrer
les dérives que ces nouveaux enjeux peuvent causer. La rédaction d’un guide de bonnes
pratiques pour les fournisseurs de technologies et de service a aussi été amenée comme action
à considérer.
Certains acteurs souhaitent que l’État propose une plateforme de données ouvertes bénéficiant
à l’ensemble du secteur, et qu’il réfléchisse au tissu de réglementations et d’incitatifs à mettre en
place pour stimuler son développement et promouvoir son utilisation.
Nous avons demandé aux producteurs de se prononcer sur sensiblement les mêmes
thématiques que lors des entretiens avec les experts. Les répondants devaient choisir trois
réponses parmi la liste des thématiques proposées. Les figures ci-dessous font état de
l’ensemble des réponses des producteurs laitiers, des producteurs en serre et des producteurs
de grains sur le rôle du gouvernement.
77
Figure 30: Perceptions du rôle du gouvernement par les producteurs au Québec
Quel devrait être le rôle du gouvernement dans le développement des technologies numériques
en agriculture aujourd’hui et dans le futur ?
PRODUCTEURS DE LAIT (n = 121)
Pour les producteurs en serre, les priorités gouvernementales en matière de développement des
technologies numériques devraient d’abord concerner l’accompagnement et le soutien financier
aux agriculteurs pour les aider à la transition numérique, l’investissement dans les infrastructures
techniques et l’investissement dans la recherche pour soutenir les innovations liées à l’utilisation
de l’intelligence artificielle dans le milieu agricole.
`[!
PRODUCTEURS DE GRAINS (n = 46)
`V!
D’après les producteurs de grains, sur cette question, le gouvernement devrait en premier lieu
apporter du soutien aux agriculteurs pour les aider à la transition numérique – 52% d’entre eux ont
sélectionné cette réponse, fournir les ressources et les infrastructures pour permettre aux données
des agriculteurs d’être protégées (pour 30% des répondants) et s’assurer que les infrastructures
techniques sont adéquates et performantes (pour 26% d’entre eux).
Comme ce qui peut être observé chez les producteurs de lait et les producteurs en serre, la
réflexion sur les enjeux éthiques liés à l’utilisation des nouvelles technologies dans le domaine
agricole apparaît en bas du classement, avec seulement 4% des répondants qui citent cette
proposition.
Des différences dans les perceptions des producteurs relativement aux actions à prendre par le
gouvernement sont toutefois à relever en fonction de certaines données socioéconomiques :
- Différences en fonction de la région : chez les producteurs de grains, tout comme chez
les producteurs en serre, les répondants des régions urbaines priorisent moins souvent
la formation de la relève dans leur top 3 des rôles du gouvernement. Le soutien financier
est davantage cité par les producteurs des régions éloignées pour les producteurs en
grains et les producteurs laitiers et par les producteurs laitiers des régions urbaines.
Lorsqu’il s’agit de prioriser le fait de s’assurer que les infrastructures techniques soient
adéquates et performantes, les producteurs laitiers en régions urbaines sont
significativement les moins nombreux à le faire (20 % des répondants producteurs
laitiers en régions urbaines contre 51 % en régions centrales et 65 % en régions
éloignées).
- Différences en fonction de l’âge : sans grande surprise, les producteurs de grains et les
producteurs en serre plus âgés priorisent davantage la formation de la relève dans leur
top 3 des rôles à jouer par le gouvernement que les répondants plus jeunes. Par contre,
on constate l’effet inverse chez les producteurs laitiers. Chez les producteurs en grain,
les plus jeunes priorisent davantage l’accompagnement et le soutien financier que les
répondants plus âgés (67 % des moins de 35 ans et 61 % des 35-54 ans contre 37 %
des plus de 55 ans).
80
- Différences en fonction du nombre d’employés : De façon significative, plus le nombre
d’employés augmente, plus les producteurs en serre priorisent l’accompagnement et le
soutien financier des agriculteurs ainsi que le fait de s’assurer que les infrastructures
techniques soient adéquates et performantes.
Globalement, on constate que quatre grandes priorités ressortent des réponses, tous
producteurs confondus, à savoir,
ü S’assurer que les infrastructures techniques (réseau, Internet, services) soient
adéquates et performantes
ü Accompagner et soutenir financièrement les agriculteurs pour aider à la transition
numérique
ü Encourager la formation de la relève
ü Fournir les ressources et les infrastructures pour permettre aux données des agriculteurs
d’être protégées
Tableau 8 : Top 5 des rôles que le gouvernement devrait avoir dans le développement des technologies
numériques en agricultures selon les perceptions des producteurs ayant répondu à l’enquête en ligne
LAIT SERRES GRAINS
81
Volet 2. Portrait de politiques et
d’initiatives publiques à l’international
encadrant l’usage du numérique et des
données en agriculture
82
7 Mise en contexte des politiques et initiatives publiques étrangères
étudiées
Les résultats de l’enquête conduite auprès des producteurs québécois dans le premier volet de
ce rapport démontrent que les technologies de précision constituent aujourd’hui une réalité bien
ancrée pour la majorité d’entre eux. Le déploiement des technologies numériques contribue
incontestablement à renforcer les opérations du secteur agricole ; de fait, les exploitations
agricoles sont de plus en plus « intelligentes ». Les nombreux capteurs intégrés aux
équipements agricoles transposent la réalité du terrain dans un format exploitable par des
machines. La révolution numérique se traduit ainsi par la génération d’une quantité toujours
plus importante de données dans les différentes opérations associées à la production, et ce
volume s’avère utile pour les différentes parties prenantes de la chaîne agroalimentaire.
Les agriculteurs occupent une position centrale dans la génération, le traitement et la gestion de
ces données. Les innovations technologiques font que les données numériques concernent un
champ d’applications toujours plus étendu et diversifié. On peut parler de données sur le bétail,
sur les sols, mais aussi de données vétérinaires, météorologiques, financières, cette liste étant
non exhaustive.
Afin de profiter pleinement des bénéfices liés au partage des données, il est primordial d’instiller
et de préserver la confiance entre les acteurs de la chaîne, en premier lieu desquels les
producteurs. Le partage doit se faire de manière organisée et observer certaines règles,
notamment en matière d’éthique, de transparence et de sécurité. Considérant le fait que les
données peuvent être confiées à un nombre infini de parties, le caractère immatériel de cette
ressource soulève des enjeux en matière de confidentialité, de protection, de sécurité du
partage, de stockage, de droit d’utilisation, de propriété intellectuelle et de juridiction.
Sur la manière dont le partage devrait idéalement être organisé, plusieurs questions générales
se posent en effet :
83
1. Sur le contrôle :
- Qui a la propriété des données ?
- Dans quelles conditions s’opère le transfert ?
- Un agriculteur doit-il obtenir l’autorisation de son fournisseur d’équipements afin de
partager ses données ?
3. Sur la sécurité :
- Quels sont les moyens mis en œuvre pour que les données sensibles ne tombent pas
entre de mauvaises mains ?
Il est aussi fondamental de se pencher sur la pertinence et la qualité des données à partager.
Une grande quantité de données ne signifie pas en elle-même qu’elles seront utiles à la prise
de décision ou à la recherche. Bien des producteurs seraient disposés à partager, encore faut-il
que les bénéfices qu’il peut en tirer soient bien identifiés et que le service fourni en contrepartie
de leurs données soit encadré par un contrat juste et transparent. Tous ces questionnements
apportent des explications sur les réticences de certains agriculteurs à partager leurs données.
Enfin, sur un plan plus général, certains freins sont identifiés à l’adoption des nouvelles
technologies numériques par les producteurs. La couverture insuffisante de l’Internet haut débit
dans certaines zones rurales reste une contrainte importante.
Dès lors que ces constats sont établis, il convient de se pencher sur les stratégies qui
permettraient de tirer au mieux parti de la valorisation des données agricoles ; en d’autres
termes de mettre en œuvre les facteurs clés de succès du partage des données.
Sur le plan réglementaire, des vides juridiques en matière de protection de la confidentialité des
données agricoles persistent. En Europe et aux États-Unis, certaines initiatives visant à établir
des principes autour de la protection et l’utilisation des données au moment d’établir des
contrats entre les fournisseurs d’équipements et les agriculteurs clients ont récemment été
mises en place. Ces chartes et codes de conduite, nés d’initiatives conjointes entre des
fédérations agricoles, des fournisseurs d’intrants ou autres parties prenantes, font l’objet d’une
présentation détaillée dans ce volet.
Dans certains pays, afin d’apporter des réponses aux enjeux entourant le partage, des
plateformes numériques d’échanges et/ou de stockage des données numériques générées sur
les exploitations agricoles ont fait leur apparition. De tels projets sont parfois soutenus par les
pouvoirs publics ; dans d’autres cas, il apparaît que la naissance et l’organisation de ces
plateformes sont le fruit d’initiatives privées, souvent menées conjointement avec des
universités ou des fédérations d’agriculteurs.
84
Ce deuxième volet a donc pour but de présenter certaines initiatives publiques en dehors du
Québec et du Canada en termes d’aide à l’innovation et à la recherche numérique en
agriculture, de chartes et labels visant à fixer des principes dans l’établissement des contrats
agricoles et de plateformes d’échange et de valorisation des données. Dans tous les cas, il
s’agit de politiques ou d’initiatives publiques en place ou en cours d’implantation pour utiliser le
potentiel et encadrer l’usage du numérique dans le domaine de l’agriculture.
La méthodologie pour ce deuxième volet est exclusivement qualitative. Après avoir effectué une
revue de littérature, nous avons conduit des entrevues auprès de différentes entités d’autres
juridictions.
La revue de littérature est effectuée pour identifier les principaux éléments sur la manière dont
s’opère le virage numérique dans d’autres juridictions. La recherche et la lecture de documents
s’est faite en anglais, en français, en néerlandais et en allemand, permettant de couvrir une plus
grande échelle en percevant les remous créés par le virage numérique dans différentes parties
du monde, dans le domaine de l’agriculture, mais aussi dans d’autres industries pouvant mettre
en perspective les enjeux spécifiques au secteur agricole. La France, la Nouvelle-Zélande, le
Royaume-Uni, l’Union européenne et les États-Unis sont des sources intéressantes de
documents puisque ces pays partagent des similarités avec le Québec et le Canada que ce soit
au niveau de leur activité agricole (importance du secteur pour l’économie, types de production,
démographie), leurs avancées dans les technologies numériques, ou leur structure de
gouvernance. Le choix s’est porté sur ces pays en raison de leur avancée dans le virage
numérique agricole et de la similitude de leurs secteurs agricoles respectifs avec celui du
Québec. Ils offrent donc des pistes de réflexion instructives pour le Québec.
Afin de compléter notre collecte de données secondaires et la lecture de rapports sur les
expériences étrangères, nous avons conduit des entrevues avec des représentants d’autres
juridictions. Différents aspects étaient couverts lors de ces entrevues, chacun d’entre eux
faisant écho aux entrevues réalisées avec les acteurs du monde agricole au Québec. Ainsi,
étaient abordés les caractéristiques de l’industrie agricole du pays, le potentiel et l’utilisation des
technologies numériques, les enjeux et les risques reliées à l’utilisation de ces technologies et
finalement le rôle des gouvernements (le guide d’entrevue semi-guidé est disponible en Annexe
6 – Guide d’entrevue semi-guidée auprès de représentants d’autres juridictions).
Par l’intermédiaire des pupitres à l’étranger du Ministère des Relations internationales et de la
Francophonie du Québec, nous avons été mis en contact avec des acteurs gouvernementaux
au cœur de la transformation numérique dans leur pays. Des échanges ont ainsi été faits avec :
• Le délégué ministériel au numérique et à la donnée, président du conseil des systèmes
d'information au Ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation en France,
• Le Chief, Bureau of Strategic Development, Division of Marketing and Development,
Florida Department of Agriculture and Consumer Services,
85
• Le directeur du service Business Planning and Strategy du département de l’agriculture
de l’Afrique du sud,
• Le Department Coordinator, Foreign Trade Center, Ministry of Agriculture and Rural
Development d’Israël.
Ces échanges nous ont permis, pour certains, d’approfondir la compréhension des initiatives
mises en place et pour d’autres, de mieux comprendre les enjeux entourant le numérique et les
contraintes vécues par les pays. Par exemple, la correspondance avec le représentant du
département de l’agriculture de l’Afrique du Sud nous a permis de mieux comprendre
l’importance de l’agriculture de précision et d’alimenter notre réflexion sur la formation, plus
particulièrement la formation des jeunes à la technologie. Les fruits de cet échange nous ont été
utiles à plusieurs endroits dans ce rapport. Par ailleurs, comme l’Afrique du Sud s’intéresse
encore peu aux données et à leur partage, nous n’avons pas utilisé cette entrevue pour
alimenter la présente section du rapport sur la gouvernance des données. Il existe en effet de
grandes différences contextuelles entre l’Afrique du Sud et le Québec qui font en sorte que les
technologies numériques sont très importantes en Afrique du Sud puisque les producteurs
doivent s’adapter à la contrainte locale qui est le manque d’eau. Le pays n’a donc pas d’autres
choix que d’utiliser les technologies numériques dans un souci permanent d’économie de l’eau.
Le pays fait ainsi beaucoup d’innovation et met en place différents programmes en lien avec
l’agriculture de précision, mais encore peu en ce qui a trait aux données.
86
Le volet 2 est construit de façon à présenter en premier lieu un portrait général de la
transformation numérique du secteur agricole qui s’opère en France et aux États-Unis. Par la
suite, des fiches présentent des chartes et labels mis en place pour encadrer les données
agricoles puis des plateformes de données mises en place pour faciliter le partage et la
gouvernance des données. Une synthèse conclut le volet 2.
Toutes les fiches sont construites sur le même modèle afin d’en faciliter la lecture. Notez que
certaines sections présentes dans les fiches sont des transcriptions textuelles de texte de loi ou
de principes. Ces sections apparaissent en italique et la source est toujours indiquée.
• Description • Description
• Gouvernance • Gouvernance
• Analyse du contenu • Données considérées et
• Faiblesses et défis acteurs impliqués
• Outils complémentaires ou • Fonctionnalités et incitatifs
facteurs clés de réussite • Défis et limites
• Impacts et bénéfices observés • Impacts et bénéfices observés
de l’outil de l’outil
[`!
9 Description de la transformation numérique du secteur agricole
aux États-Unis et en France
En 2018, les revenus monétaires (cash receipts) engendrés par le secteur agricole américain
dans son ensemble s’établissent à environ $373 milliards. De ce total, 53% ($197 milliards)
provient des cultures (crops), le reste ($176 milliards) de l’élevage (animals and products). Les
trois États en tête de classement pour les revenus de cultures sont la Californie, qui domine
largement le trio avec $38,2 milliards, suivi de l’Illinois ($14,5 milliards) et de l’Iowa ($13,4
milliards). Le Texas, l’Iowa, la Californie dominent le classement des revenus d’élevage,
engrangeant respectivement $14,4 milliards, $14,3 milliards et $11,7 milliards pour l’année
2018.20
En 2012, la surface agricole des États-Unis est estimée à 1,2 Mds d’acres (4 856 227 km2). Une
exploitation agricole (farm) est définie comme telle par le Département de l’Agriculture (USDA)
dès lors qu’elle produit ou vend au moins $1 000 de produits agricoles au cours d’une année.
Actuellement, le pays comptabilise un peu plus de deux millions d’exploitations, avec une
surface moyenne de 444 acres (environ 180 ha) en 2017 (Burns & MacDonald, 2018).
Aux États-Unis, la taille d’une exploitation agricole se mesure à son revenu agricole brut (Gross
Cash Farm Income - GCFI). Le GCFI correspond au revenu annuel de l’exploitation avant les
charges ; il inclut les revenus monétaires issus de la vente de récolte ou de bétail, les autres
revenus liés à l’exploitation ainsi que les subventions gouvernementales perçues par l’exploitant
agricole. La prévision du GCFI pour l’année 2019 est estimée à $425 milliards, un chiffre
relativement constant depuis 2016 (Burns & MacDonald, 2018).
20
(USDA ERS - Annual cash receipts by commodity, 2019)
(USDA ERS - Agricultural Production and Prices, 2019)
(USDA ERS - Farming and Farm Income, 2019)
88
Tableau 9 : Typologie des exploitations selon leur taille (2017)
Revenu agricole brut Nombre Valeur de la
(Gross Cash Farm d’exploitations (% production (% du
Income) Total) total)
Exploitations familiales
Petites [< $350 000] 1 811 920 25,8 %
(Small Family Farms) (88,9 %)
22,6 %
Moyennes [$350 000 - $999 999] 127 862
(Midsize Family Farms) (6,3 %)
39 %
Très grandes [>$5 000 000] 5 872
(Very Large Family Farms) (0,3 %)
Figure 31: Valeur de la production par commodités et par type d’exploitation (en 2017)
89% des exploitations sont enregistrées en tant qu’entreprise individuelle (sole proprietorship)
et celles-ci sont à l’origine de 59% de la valeur de la production agricole (Burns & MacDonald,
2018).
[V!
Le secteur agricole américain présente une balance commerciale positive, avec un excédent
enregistré de $139,6 milliards en 2018 ; environ 25% de la production agricole en valeur est
exportée chaque année (Fast Facts About Agriculture & Food—The Voice of Agriculture—
American Farm Bureau Federation, 2019).
21
Dernière année pour laquelle les données sont complètes; prochaine estimation prévue en 2020.
90
l’intelligence artificielle, consacrer des ressources fédérales, et lever les barrières à l’innovation.
Cette initiative reçoit la collaboration et l’engagement d’acteurs provenant des secteurs public,
privé, universitaire, ainsi que de partenaires internationaux22.
Afin de concrétiser ces objectifs et plus précisément d’apporter une réponse aux défis
alimentaires croissants, le National Institute of Food and Agriculture (NIFA), qui dépend du
Département de l’Agriculture, a lancé l’initiative Food and Agriculture Cyberinformatics and
Tools, basée sur la science des données et destinée à soutenir et accélérer des programmes
de recherches variées en lien avec l’intelligence artificielle appliquée à l’agriculture dans son
ensemble. Les investissements du NIFA visent à soutenir les projets en lien avec la science des
données massives, l’apprentissage-machine, les systèmes autonomes, la vision artificielle
(computer vision) et les systèmes intelligents d’aide à la décision, aussi bien dans les cultures
que dans l’élevage. Les domaines considérés comprennent la production agricole, le
développement des capteurs, la bio-informatique, la gestion des écosystèmes, le soutien aux
communautés rurales et la formation de la main-d’œuvre (Select Committee on Artificial
Intelligence, 2019).
22
Pour plus d’information, voir : https://www.whitehouse.gov/ai/
23
(Purdue University | About Indiana Corn and Soybean Innovation Center, 2019)
(Maddox, 2018)
91
de nouvelles potentialités en agriculture de précision, relativement à la connectivité en temps
réel (Gagliordi, 2018).
L’agriculture de précision devient une réalité pour de plus en plus d’agriculteurs, et l’Internet des
objets s’y est fait une place solide depuis une vingtaine d’années. La prochaine étape pour les
fournisseurs de technologie consiste à travailler sur l’application de l’intelligence artificielle dans
le processus de production agricole, de la semence à la récolte (Gagliordi, 2018).
Au niveau des États fédérés, le Massachusetts et la Californie24 par exemple prévoient dans
leur arsenal législatif des lois dédiées à la sécurité des données. Celles-ci par définition
s’appliquent également aux entreprises qui collectent des données agricoles, mais elles
présentent certaines limites : d’une part, leur portée ne peut s’étendre au-delà du périmètre de
leur juridiction, d’autre part leur définition varie d’un État à l’autre et leur champ d’application ne
couvre pas l’ensemble des types de données pouvant être collectées par l’agriculture de
précision25 (Ferris, 2017).
C’est pourquoi selon Ferris (2017), il apparaît nécessaire, à l’échelon fédéral, de mettre en
place de nouvelles lois et règlements pour protéger les agriculteurs des utilisations abusives qui
pourraient être faites de leurs données. Elle propose une réflexion sur une nouvelle loi fédérale
sur la collecte et la confidentialité des données, spécifiquement adaptée au secteur agricole. Sa
conception pourrait s’inspirer de certaines lois sectorielles déjà existantes pour la protection des
données, telle la Gramm-Leach-Bliley Act (GLBA) en vigueur au sein de l’industrie financière et
la Health Insurance Portability and Accountability Act (HIPAA) dans celle de la santé. Sur le
plan du partage des données en particulier, le fournisseur de technologie devrait être tenu
24
Massachusetts Data Protection Law (2010);
En Californie: California Shine the Light law (2003), Online Privacy Protection Act (2003)
25
“Some of the information collected by precision agriculture tools may fall into the categories enumerated by the […]
laws, such as a producer’s name and financial information. However, much of it does not, such as crop yield data,
fertilizer and pesticide application information, land locations, etc. Though these types of information do not fall into
the usual categories of personal information that companies are legally obligated to protect, they deserve to fall into a
protected category in the agriculture industry.”
92
d’obtenir le consentement explicite de l’agriculteur client avant de communiquer à des tiers
lesdites données. Une telle loi fédérale permettrait une uniformisation des directives pour les
entreprises qui collectent les données agricoles et une protection plus efficace des données des
agriculteurs, valable sur l’ensemble du territoire américain (Ferris, 2017).
La protection des données massives dans le secteur agricole est un sujet sur lequel le Congrès
s’est déjà penché. En octobre 2015, un comité d’experts s’est réuni pour débattre des questions
relatives à la propriété et à la confidentialité des données dans l’agriculture. Si au cours de cette
audience ce comité reconnait l’importance de ces enjeux, les experts excluent cependant le
recours à toute initiative gouvernementale pour les réglementer. À ce jour, aucun projet de loi
spécifique à la protection des données massives dans l’agriculture n’a été présenté26 (Stubbs,
2016).
L’agriculture joue un rôle très important dans l’économie française. L'agriculture française est la
première en importance dans l'Union européenne, et l'industrie agroalimentaire française
exporte dans le monde entier, en particulier les vins, produits laitiers et céréales. L'agriculture
correspond à 1.6 % du PIB et l'industrie agroalimentaire à 2.0 %. Le secteur agroalimentaire
représente 13.3% des exportations totales et 9.9 % des importations (AAC, 2017). Bien que la
part de l’agriculture dans le PIB français soit moindre relativement à celle du Québec, l’industrie
agroalimentaire de l’hexagone représente 34,896 milliards de dollars canadiens (2015) contre
22,536 milliards pour tout le secteur bioalimentaire québécois (2017).
En termes d’importance et de répartition des sous-secteurs, l’agriculture française présente des
similitudes avec la production agricole québécoise, notamment vis-à-vis du maïs, des bovins,
des porcins, des volailles, et du lait.
26
“On October 22, 2015, the House Agriculture Committee conducted a hearing on private big data in the agriculture
industry. Panelists discussed benefits and concerns related to private big data. Data ownership and privacy were
chief among concerns, but most panelists agreed that little to no government intervention was desired.”
27
Source : Comptes de l’agriculture – Eurostat ; (Fatah, 2015)
93
Vins 55% 1er
Bovins 25% 1er
Porcins 9% 3e
Ovins et caprins 15% 2e
Volailles 16% 1er
Lait 16% 2e
À noter que l’agriculture française évolue dans un contexte européen : il existe en particulier
des normes et des quotas, ainsi que des aides, communes aux pays de l’union européenne.
Par ailleurs, la France est très active dans le monde de l’intelligence artificielle et de la science
des données. L’appui au développement de ces nouvelles technologies est très marqué ces
dernières années. La France souhaite devenir, sinon le leader mondial du domaine, un acteur
influent et capable de jouer un rôle important dans le développement de l’intelligence artificielle.
La France bénéficie déjà d’un environnement favorable à la recherche dans les domaines
technologiques poussés. Avec une dépense intérieure de recherche et développement (R&D)
estimée à 2,22% du PIB en 2016, la France reste en cinquième position des pays réalisant les
dépenses de R&D les plus importantes de l’OCDE, après la Corée du Sud (4,23%), le Japon
(3,14%), l’Allemagne (2,93%) et les États-Unis (2,74 %). Même si les infrastructures
universitaires de recherche et de développement y sont très performantes, l’effort de recherche
provient surtout des entreprises qui, en 2011, exécutaient 64 % des travaux de R&D réalisés
sur le territoire national et finançaient 59 % de la dépense nationale de R&D.
Pour renforcer cette position dominante, de nombreuses initiatives ont été amorcées ces
dernières années pour appuyer les efforts en termes de recherche et de développement liés à
la science des données et à l’intelligence artificielle. En particulier en 2017 et 2018 une vaste
mission interministérielle, ayant même une composante citoyenne, a été lancée : la mission
Villani. Le rapport « Donner un sens à l'intelligence artificielle ; Pour une stratégie nationale et
européenne », parfois abrégée « Rapport Villani » (Villani, 2018) qui a été produite au terme de
la mission du même nom, pose les jalons de la stratégie française. Cette stratégie est très
centrée sur les aspects économiques et éducatifs, en d’autres mots comment transformer dès
aujourd’hui les établissements d’enseignement supérieur et les intégrer au tissu des entreprises
pour rapidement accroître le nombre de personnes formées et capables d’occuper des postes
de travail ou de recherche et développement.
94
Concertation citoyenne sur les enjeux éthiques lies à la place des algorithmes dans notre vie
quotidienne (CNIL et al., 2017), Comment permettre à l’homme de garder la main ? Les enjeux
éthiques des algorithmes et de l’intelligence artificielle (CNIL & Éthique & numérique, 2017),
Synthèse de la consultation publique sur l'intelligence artificielle par Cédric Villani (Parlement &
Citoyen, 2018).
Ce focus donne le ton des réflexions françaises sur le sujet du virage numérique en agriculture.
La section du document commence par lister les enjeux de l’agriculture du XXIe siècle : nourrir
une population grandissante de manière efficace, bonne pour la santé, en diminuant l’utilisation
de l’eau et des produits chimiques pour faire face aux enjeux environnementaux, le tout dans un
contexte de réchauffement climatique.
Le rapport Villani souligne l’urgence de la situation et l’importance des enjeux relatifs à la
donnée :
« Il y a urgence pour ce secteur à se saisir des opportunités de l’intelligence intelligente, qui ne
peut se penser que de manière intégrée à l’ensemble de l’industrie agroalimentaire. L’IA, qui
nécessite un volume important de données, peut permettre des innovations sur l’ensemble de la
chaîne de valeur – production, transformation, distribution, information du consommateur : il est
crucial de mobiliser les données agricoles publiques et privées, ainsi que l’ensemble des
données de l’ensemble de la chaîne agroalimentaire ».
Enfin, le rapport Villani articule la stratégie française en deux temps : court terme et moyen
terme. Le temps court a pour objectif de « préserver les capacités stratégiques et soutenir
l’innovation agricole » et souligne cinq conditions à réaliser (Villani, 2018) :
- « Favoriser le dialogue entre les agriculteurs et l’industrie agroalimentaire pour faire
émerger de nouveaux modèles de valeur ;
- Développer les soutiens à la recherche pour le développement de la robotique et des
capteurs agricoles ;
- Garantir la couverture réseau nécessaire à une agriculture connectée ;
- Intensifier les efforts sur la standardisation et l’interopérabilité ;
- Outiller les démarches collectives de négociations sur les données des exploitations ».
L’ensemble des conclusions et des recommandations du rapport Villani font écho aux réflexions
constatées au Québec.
95
La stratégie du secteur agricole français pour négocier le virage numérique est conduite par de
nombreux acteurs, en particulier le gouvernement. Ce dernier est à l’origine de plusieurs
initiatives qui ont orienté et déclenché la transformation du secteur. En 2015, le ministère de
l’Agriculture et de l’Alimentation a lancé une mission pour cibler les enjeux de l’innovation en
agriculture et ainsi réfléchir aux solutions à apporter (Bournigal et al., 2015). La mission
conduite par Jean-Marc Bournigal, Président d’Irstea (Institut national de recherche en sciences
et technologies pour l'environnement et l'agriculture) a abouti au rapport Agriculture –
Innovation 2025 : 30 projets pour une agriculture compétitive et respectueuse de
l'environnement. Celui-ci s’articule autour de 3 priorités et 9 axes, et liste plusieurs dizaines
d’actions ciblées et pratiques.
- Priorité 1 : Développer une approche système et faire de l’agriculture un contributeur à
la lutte contre le dérèglement climatique (Axes agro-écologie et bioéconomie).
- Priorité 2 : Permettre le plein développement des nouvelles technologies dans
l’agriculture (Axes : agriculture numérique, robotique, génétique & biotechnologies, et
biocontrôle).
- Priorité 3 : Fédérer tous les acteurs de la recherche, de l’expérimentation et du
développement agricole en appui de la compétitivité (Axes innovation ouverte,
économie agricole, et formation).
Chaque recommandation formulée dans ce rapport présente un contexte, des objectifs, des
livrables, des étapes, et les acteurs clés. Trois des projets référencés méritent d’être
mentionnés :
- Le projet 10 ou « NUM1 » préconise la mise en place d’un portail de données à
vocation agricole dans le but de favoriser l’innovation ouverte. Un enjeu d’importance y
est soulevé : « Conforter les aspects propriété/utilisation des données et leur
hébergement, via une gouvernance confiée à la profession agricole ». L’implication
des organismes publics de recherche, des représentants de la profession agricole, de
gestionnaires de bases de données publics et privés (incluant les équipementiers),
d’éditeurs de logiciel et d’opérateurs de télécommunications est jugée nécessaire à un
tel projet.
- Le projet 11 ou « NUM2 » a pour objectif une meilleure structuration des moyens de
recherche sur le numérique en agriculture, par notamment une mise en réseau des
acteurs de la recherche publique et privée, afin d’accélérer la création de valeur à partir
du croisement et de l’analyse de données.
- Le projet 22 ou « INNOUV1 » vise une meilleure intégration des agriculteurs dans les
circuits d’innovation, par une meilleure évaluation des innovations issues du terrain (des
agriculteurs) et une meilleure diffusion des travaux de la recherche auprès d’eux.
Pierre angulaire de la stratégie numérique agricole française, l’objectif de mise en place d’un
portail de données ouvertes pour l’ensemble de l’écosystème agricole français préconisé en
2015 dans le rapport Agriculture – Innovation 2025 prend une tournure plus concrète avec la
publication en 2017 du rapport « AgGate Portail de données pour l'innovation en agriculture »
(Bournigal, 2017), abrégé « Rapport Bournigal ». Ce rapport pose les jalons de la mise en
96
œuvre d’un portail de données ouvertes agricole, en répertoriant les fonctionnalités techniques
et les enjeux à considérer.
En particulier, le rapport fait la lumière sur le défi principal d’un portail de données ouvertes : la
gouvernance et les enjeux juridiques. En effet, la mise en commun des données par les
producteurs et les autres acteurs du secteur repose sur la confiance, ainsi que sur le partage
des bénéfices de cette mise en commun (la valorisation des données). Il s’agit donc de trouver
le système de gouvernance le plus efficace, en phase avec les désirs et les attentes de toutes
les parties impliquées.
D’autres acteurs du secteur agricole français sont activement à l’œuvre dans les réflexions et
les transformations du secteur. Par exemple l’Association de coordination technique agricole
(ACTA), qui coordonne les instituts techniques agricoles (ITA), a publié les conclusions de ses
réflexions au sujet de l’accès aux données pour la recherche et l’innovation en agriculture
(ACTA, 2016b), ainsi que des recommandations pour favoriser l’accès et la valorisation des
données (ACTA, 2016a). Un exemple de réflexions profondes aboutissant à des actions
pratiques est le travail effectué conjointement par la Fédération nationale des syndicats
d'exploitants agricoles (FNSEA) et le Syndicat des Jeunes Agricultures (JA) : ces derniers ont
travaillé à l’élaboration de la charte Data-Agri dont le but est de valoriser et sécuriser les
données des exploitations agricoles dans les contrats. La charte Data-Agri a évolué en label qui
est attribué après l’audit des conditions contractuelles d’échange de données entre une
entreprise et un agriculteur.
Plusieurs autres entités de l’écosystème agricole français participent aux réflexions sur le virage
numérique du secteur. De nombreux « think tanks » spécialisés ou non en agriculture existent,
à l’instar d’agrIdées, de Renaissance numérique, ou de l’Observatoire des usages de
l'agriculture numérique. Renaissance numérique a par exemple publié un rapport au sujet de la
valeur des données en agriculture (Renaissance numérique, 2018) et propose une typologie
générale des données agroalimentaires, une catégorisation juridique des données agricoles, et
une analyse des enjeux juridiques de la donnée agricole. Il existe aussi plusieurs entités (La
Ferme Digitale, ChaireAgroTIC) chargées de la mise en relation de la recherche, des
entreprises, et du terrain, et qui veillent au déploiement d’un environnement favorable aux
innovations technologiques en agriculture.
Si en 2017 le rapport Bournigal soutient la création d’un « AgGate », un portail de données pour
l'innovation en agriculture, c’est finalement le portail déjà existant API-Agro qui a bénéficié des
intentions du gouvernement (Voir Section France – Portail de données API-Agro).
97
10 Chartes et labels mis en place pour encadrer les données
agricoles : quelques initiatives étrangères
10.1 États-Unis – Charte Privacy and Security Principles for Farm Data
10.1.1 Description
Les Principes de Confidentialité et de Sécurité des Données Agricoles (Privacy and Security
Principles for Farm Data) constituent un ensemble de directives qui ont pour objectif de prévenir
tout abus autour de la collecte et du traitement des données agricoles électroniques. Au nombre
de treize, ces principes traitent en particulier des thématiques de consentement de l’agriculteur
et de partage des données.
Ils sont d’abord destinés à aider les agriculteurs à avoir une meilleure compréhension des
enjeux relatifs à l’utilisation de leurs données électroniques, en leur donnant des outils et
indications leur permettant d’être mieux avertis lorsqu’ils décident de signer un contrat avec un
fournisseur de technologie agricole.
Ils s’adressent également aux fournisseurs de technologie qui collectent et analysent les
données des agriculteurs, en leur indiquant notamment les bonnes pratiques à suivre en
matière de communication avec l’agriculteur et de rédaction des contrats.
Les Principes de Confidentialité et de Sécurité des Données Agricoles ont été lancés en
novembre 2014.
10.1.2 Gouvernance
Le 13 novembre 2014, l’American Farm Bureau Federation (AFBF), groupe de défense des
intérêts du secteur agricole américain, annonce le lancement d’un ensemble de principes visant
à instituer un cadre de protection de la confidentialité et de la sécurité des données
électroniques agricoles. Ces principes sont le résultat d’un travail collaboratif mené avec 34
entreprises et organisations actives au sein du secteur agricole. En date du 1er avril 2016, les
fournisseurs de technologies agricoles et autres organisations agricoles ayant adhéré et qui se
sont engagé à respecter les principes de la charte incluent :
98
10.1.3 Analyse du contenu de la charte
Principe 1 : Éducation. Il est primordial d’éduquer les producteurs pour que toutes les parties et
tous les intervenants y voient clair. Les organisations de producteurs et leur industrie doivent
veiller au développement de programmes visant à rendre les clients plus avisés, notamment sur
leurs droits et leurs responsabilités. Les fournisseurs de technologies agricoles doivent s’efforcer
de rédiger des contrats en langage clair et simple à comprendre.
Selon le principe 2, il est essentiel pour les agriculteurs de penser à ce qu’il adviendra de leurs
données, notamment la manière dont celles-ci seront utilisées et contrôlées. L’agriculteur doit
s’assurer que les contrats conclus avec les différents intervenants abordent explicitement les
questions relatives à la propriété des données.
Principe 3 : Collecte, accès et contrôle. Les fournisseurs de technologies agricoles [ne] peuvent
collecter les données agricoles, y accéder et les utiliser qu’avec le consentement explicite et
affirmatif de l’agriculteur aux termes d’un contrat portant une signature manuscrite ou numérique.
La majorité des contrats contiennent des points relatifs à la collecte, à l’accès et au contrôle des
données électroniques. Le nom de la personne ou de l’entité ayant un droit de collecte, d’accès
et de contrôle des données engendrées sur l’exploitation doit figurer explicitement dans tout
contrat passé entre l’agriculteur et son fournisseur de technologie agricole. Avant de procéder à
la signature d’un contrat, il est important que l’agriculteur comprenne les implications à long
99
terme de ce à quoi il consent, en matière de collecte et d’utilisation de ses données. La
formation des agriculteurs sur ces enjeux est donc primordiale.
Principe 4 : Avis. Les agriculteurs doivent être avisés de la collecte de leurs données et de la
manière dont elles seront communiquées et utilisées. Cet avis doit être transmis dans un format
qui est facile d’accès.
Selon le principe 4, les contrats avec les fournisseurs de technologie agricole doivent comporter
des spécifications quant à la manière dont seront traitées les données de l’agriculteur,
notamment à quel moment celles-ci seront collectées et pour quelle utilisation. Les contrats
doivent donc aviser l’agriculteur sur ces points relatifs à la manipulation de ses données. L’avis
en question doit être formulé dans un langage clair, transparent et spécifique.
De manière générale, ce principe sert à rappeler que les agriculteurs restent maîtres de leur
choix de décider ou non de passer un contrat avec un fournisseur de technologie, et que la
transparence du contrat qui leur est présenté devrait être un élément essentiel à prendre en
compte dans leur prise de décision.
100
Principe 7 : Transférabilité des données. Dans le contexte du contrat et de la politique de
conservation des données, les agriculteurs doivent être en mesure de récupérer leurs données
pour les stocker ou les utiliser dans d’autres systèmes, sauf les données anonymisées ou
globales qui ne peuvent plus être liées à une personne ou à une entreprise particulière. Les
agriculteurs devraient pouvoir facilement récupérer sur demande les données qui ne sont pas
anonymisées ou qui ne sont pas globales.
Sur la portabilité des données, le principe 7 veille à ce que les agriculteurs puissent être en
mesure de faire usage de leurs données à leur guise.
Principe 8 : Modalités et définitions. Les agriculteurs doivent connaître les entités avec qui ils
passent un contrat si le fournisseur de technologies agricoles partage les données avec de
tierces parties, des partenaires, des partenaires d’affaires, des fournisseurs de technologies
agricoles partenaires ou des entreprises affiliées. Il incombe aux fournisseurs de technologies
agricoles d’expliquer clairement et de façon cohérente dans chacun de leurs contrats, les
définitions des termes suivants : 1) données agricoles; 2) tierce partie; 3) partenaire; 4) partenaire
d’affaires; 5) Fournisseurs de technologies agricoles partenaires; 6) entreprise affiliée; 7) titulaire
du compte comportant les données; 8) données du client initiales. Si ces termes ne sont pas
employés, le fournisseur de technologies agricoles définit chacun des termes remplaçant dans le
contrat et la politique de confidentialité. Les fournisseurs de technologies agricoles s’efforcent de
rédiger leurs modalités, leurs conditions et leurs contrats en langage clair.
Le principe 9 établit que les agriculteurs devraient être assurés de pouvoir permettre ou non
que leurs données soient communiquées ou vendues à des tiers qui les manipuleront. Les
fournisseurs de technologie devraient donc veiller à ce que les agriculteurs comprennent bien
l’utilisation qui pourrait être faite de leurs données ; les contrats devraient donc idéalement
couvrir ces aspects et mentionner ces tierces parties.
Principe 10 : Conservation et accessibilité des données. Sur demande ou après une période
donnée convenue d’avance, le fournisseur de technologies agricoles doit, le cas échéant, retirer
et détruire de façon sécuritaire les données agricoles originales du compte de l’agriculteur et les
101
lui renvoyer. Le fournisseur de technologies agricoles doit prévoir la capacité pour l’agriculteur
d’accéder aux données que le fournisseur de technologies détient durant cette période de
conservation. Les fournisseurs de technologies documentent les politiques d’accessibilité et de
conservation des données permettant d’identifier une personne et les procédures d’élimination de
celles-ci et précisent les exigences relatives aux données régies par des politiques et des
procédures.
Selon le principe 10, il est important que les agriculteurs comprennent la durée et les conditions
relatives à l’hébergement de leurs données présentes dans les systèmes de leurs fournisseurs
de technologie. Les agriculteurs qui souhaitent pouvoir accéder en tout temps à leurs données
doivent être au fait de l’ensemble des options qui leurs sont offertes par leur fournisseur.
La procédure à suivre pour une demande de retrait des données devrait être indiquée dans les
contrats conclus avec les fournisseurs. À la cessation, les agriculteurs doivent pouvoir être
assurés que les données permettant de les identifier seront effectivement détruites afin de
réduire le risque de fuite de données confidentielles.
Principe 11 : Fin du contrat. Les agriculteurs peuvent interrompre un service ou faire cesser la
collecte de données à tout moment sous réserve des obligations en vigueur appropriées. Les
procédures visant à mettre fin aux services doivent être clairement définies dans le contrat.
Les agriculteurs devraient porter une attention particulière aux sections relatives à l’expiration
et/ou résiliation des contrats, en particulier les implications pour l’utilisateur et pour le
fournisseur de technologie au moment de la cessation. La cessation d’un contrat est une option
offerte aux deux parties, à l’agriculteur s’il souhaite se départir de son engagement vis-à-vis de
son fournisseur dans la mesure où il respecte ses obligations, au fournisseur si l’agriculteur ne
respecte pas les modalités de collecte des données ou n’utilise pas l’outil.
Dans leurs contrats ou modalités et conditions, les fournisseurs de technologie agricole doivent
explicitement s’engager à ne pas recourir à des activités illégales ou anticoncurrentielles. À la
lecture d’un contrat, les agriculteurs devraient s’assurer que ces éléments y figurent et à défaut
être attentifs aux formulations employées. Il est important que les agriculteurs soient au fait des
activités considérées illégales ou anticoncurrentielles à la signature d’un contrat avec un
fournisseur de technologie agricole.
102
Tous les enjeux relatifs à la sécurité entourant le stockage des données électroniques
s’appliquent naturellement au secteur agricole. Bien qu’aucune série de mesures de sécurité ne
puisse se prévaloir d’être totalement infaillible, le principe 13 stipule que les fournisseurs de
technologie agricole sont tenus de mettre en place un niveau de sécurité élevé pour le stockage
des données. De plus, ils doivent aviser les agriculteurs lorsqu’une faille de sécurité survient.
Ces éléments doivent figurer clairement dans les contrats passés entre l’agriculteur et les
fournisseurs de données agricoles.
28
Voir Section 10.2
103
10.2 États-Unis – Certification Ag Data Transparent (ADT)
10.2.1 Description
Ag Data Transparent est une certification accordée aux fournisseurs de technologies agricoles
qui démontrent que les points relatifs à la confidentialité et la protection des données dans les
contrats qu’ils établissent à l’attention de leurs agriculteurs clients sont conformes aux Principes
de Confidentialité et de Sécurité des Données Agricoles (Voir section 10.1).
L’agriculture de précision est une réalité pour un nombre croissant d’agriculteurs, et apporte son
lot de défis en matière de propriété et d’utilisation des données produites. Les agriculteurs ne
savent pas toujours ce qu’il advient de leurs données dans les systèmes de leurs fournisseurs,
et leur occupation leur laisse peu de temps pour étudier en détail les politiques de confidentialité
des données et accords de licence pour les données produites qui figurent dans leurs contrats.
Les Principes de Confidentialité et de Sécurité des Données Agricoles sont une tentative de
réponse à ces problématiques, à savoir établir un lien de confiance entre l’agriculteur et son
fournisseur de technologie, et l’alléger d’une lecture de contrat possiblement fastidieuse et
complexe. La certification ADT (« ADT Seal ») représente l’outil servant à attester et garantir le
respect de ces principes par les fournisseurs de technologie agricole ; elle permet également
d’aider les agriculteurs dans leurs choix.
10.2.2 Gouvernance
Création et responsabilités
La certification Ag Data Transparent a été soutenu par l’American Farm Bureau Federation
(AFBF) pour répondre à des préoccupations exprimées par de nombreux agriculteurs autour de
la protection de leurs données électroniques.
Dans un sondage réalisé par AFBF entre juillet et septembre 2014 auprès de 3 380
agriculteurs, 82 % des répondants ont déclaré ne pas savoir précisément ce que leurs
fournisseurs peuvent faire avec leurs données déposées sur les clouds, et près de 76 % étaient
inquiets que certains puissent utiliser sans leur consentement leurs données à des fins de
spéculation sur les marchés29. Suite à cette étude, des efforts ont été menés pour établir les
treize Principes de Confidentialité et de Sécurité des Données Agricoles (Voir section
précédente). Afin d’encourager une application concrète de ces principes, AFBF participe à la
mise en place du programme de certification Ag Data Transparency Evaluator.
La certification Ag Data Transparent est administrée par The Ag Data Transparency Evaluator
Inc., une organisation à but non lucratif créée en 2016 qui se donne pour mission de favoriser la
transparence et la simplicité des contrats des fournisseurs de technologie. The Ag Data
Transparency Evaluator est soutenu par des syndicats de producteurs agricoles (farmer-led
organizations) et des fournisseurs de technologie, parmi lesquels : AGCO, Ag Connections,
Agrible, American Farm Bureau Federation, American Soybean Association, Beck’s Hybrids,
29
(American Farm Bureau Federation, 2014)
104
Conservis Corporation, CNH Industrial Crop IMS, Dow AgroSciences, DuPont Pioneer, Farm
Dog, Farmobile, Granular, Grower Information Services Cooperative, Growmark, Independent
Data Management, John Deere, National Association of Wheat Growers, National Corn
Growers Association, National Farmers Union, National Sorghum Producers ou encore The
Climate Corporation.
Processus d’évaluation
L’évaluation est réalisée par la firme Janzen Agricultural Law LLC, dirigée par Todd Janzen (Ag
Data Transparent—Janzen Ag Law, s. d.). Todd Janzen est un avocat spécialisé dans les
questions juridiques entourant les innovations du secteur agricole et qui s’intéresse en
particulier aux enjeux relatifs à la protection des données électroniques des agriculteurs.
Plusieurs de ses clients sont des fournisseurs de technologie agricole, qu’il assiste dans la
rédaction de leurs politiques de confidentialité et conditions d’utilisation.
Le processus d’évaluation se déroule comme suit (Ag Data Transparent Master Services
Agreement 2018-2019, s. d.):
1. Le fournisseur candidat répond à un formulaire de dix questions relatives à la propriété,
l’utilisation, la transférabilité et la sécurité des données agricoles. Ces questions sont
rédigées d’après les Principes de Confidentialité et de Sécurité des Données Agricoles.
2. Le fournisseur fait parvenir à l’appui une copie numérique ou un lien permettant un accès
libre aux contrats dont il fait référence dans le questionnaire, par exemple les modalités et
conditions, les déclarations de confidentialité et contrats de licence utilisateur final.
3. Les réponses et contrats sont confrontés et analysés par ADTE qui approuve ou non
l’apposition du sceau Ag Data Transparent au fournisseur. La décision est notifiée par la
communication d’une « lettre d’approbation » (Approval letter) ou une « lettre
d’observations » (deficiency letter).
30
Version disponible sur :
https://static1.squarespace.com/static/5a579302a803bbfd4a369c67/t/5cb73cb471c10b0dd49b1a96/1555512501040/
MSA+Online+04.15.2019.pdf
105
3. Si le fournisseur communique des données collectées à une tierce partie, celle-ci devra-
t-elle adhérer à la charte des Principes de Confidentialité et de Sécurité des Données
Agricoles ?
4. Le fournisseur de technologie devra-t-il obtenir le consentement de l’agriculteur avant de
permettre à d’autres entreprises l’accès aux données de son client ?
5. Est-il possible pour l’agriculteur, après le dépôt de ses données dans le compte du
fournisseur, de récupérer l’intégralité de ses données dans leur format original ou un
format équivalent ?
6. Le fournisseur prévoit-il d’aviser l’agriculteur en cas de modifications apportées au
contrat ?
7. Le fournisseur prévoit-il d’aviser l’agriculteur en cas d’atteinte à la sécurité de ses
données ?
8. Est-il possible que l’ensemble des données de l’agriculteur soient supprimées à sa
demande, lorsque le contrat prend fin ?
9. Le contrat mentionne-t-il une durée de rétention des données originales ?
10. Le contrat définit-il clairement ce qu’il advient des données de l’agriculteur si le
fournisseur de technologie est acquis par autre entité ?
10Q Form
1. What categories of data does the product or service collect from me (the farmer)?
2. Do the Ag Technology Provider’s (ATP’s) agreements address ownership of my data after
my data is transferred to the ATP?
3. If the ATP contracts with other companies to provide data related services, does the ATP
require these companies to adhere to the ATP’s privacy policies with me?
4. Will the ATP obtain my consent before providing other companies with access to my data?
5. After I upload data to the ATP, will it be possible to retrieve my original complete dataset in
an original or equivalent format?
6. Will the ATP notify me when its agreements change?
7. Will the ATP notify me if a breach of data security occurs that causes disclosure of my data
to an outside party?
8. Upon my request, can my original dataset be deleted when my contract with the ATP
terminates?
9. Do the ATP’s agreements establish how long my original datasets will be retained?
10. Do the ATP’s agreements address what happens to my data if the ATP is sold to another
company?
Le processus d’évaluation doit dans son ensemble être réalisé dans un délai de six mois à la
signature de l’Ag Data Transparent – Master Services Agreement, à défaut de quoi le
fournisseur sera tenu de le redémarrer.
106
Après validation du processus d’évaluation
Dans les sept jours qui suivent l’envoi de la lettre d’approbation, ADTE rend public sur son site
Internet les réponses approuvées pour les dix questions. Afin d’obtenir davantage de
précisions, les résultats affichent également un hyperlien vers les contrats des entités certifiées.
L’entité certifiée obtient le droit d’apposer le sceau ADT pour une année dans tous ses
documents marketing. La mention suivante peut être ajoutée en dessous du sceau :
“This company has been evaluated for transparency and compliance with the agricultural
industry’s Privacy and Security Principles for Farm Data. The results of the evaluation can be
found by clicking on the “Ag Data Transparent” seal.”
ADTE joint à la lettre d’approbation un guide (ADT Seal Style Guide) pour l’affichage, l’utilisation
et la mise en forme du sceau ADT dans les documents de présentation du fournisseur.
Si le fournisseur de technologie procède à une mise à jour, modification ou suppression dans
les clauses de ses contrats après avoir été certifié, il doit se soumettre à nouveau à une
évaluation pour obtenir une mise à jour de sa certification. Une nouvelle version du formulaire
de 10 questions est adressée à ADTE s’il y a lieu.
On peut noter le niveau relativement faible de ces frais pour les entreprises, un incitatif visant à
encourager une large participation des entreprises collectant des données agricoles au
programme de certification.
Entités certifiées
Sont reconnus éligibles au programme de certification ADT des entreprises et organisations
provenant de secteurs divers reliés à l’agriculture, tels que l’industrie des semences, les
fabricants d’équipement, les startups technologiques, les coopératives, conseillers
107
agronomiques, et tout fournisseur offrant des objets connectés. Les plateformes qui collectent,
stockent ou manipulent des données agricoles sont aussi concernées par le programme.
Il est intéressant de noter que cette certification ne s’adresse pas exclusivement à des
fournisseurs américains puisque Financement agricole Canada (FAC) possède la certification
ADT depuis 2018, devenant ainsi la première entité canadienne à obtenir la certification
américaine Ag Data Transparent pour son logiciel de gestion agricole AgExpert. Compte tenu
de la pertinence de ce logiciel pour les producteurs et de son origine canadienne, quelques
précisions sont fournies dans l’encadré ci-dessous.
31
D’après l’information donnée par Thomas Chevalier, spécialiste produit chez FAC, la fusion des deux logiciels en
un seul produit est prévue à terme (Chevalier, 2020).
108
être entrées dans le système. Au départ, le logiciel affiche une carte Google Map sur
laquelle l’agriculteur client dessine les contours de son exploitation. Aucune donnée
personnelle n’est reliée aux parcelles.
L’agriculteur client saisit ensuite dans l’interface les données d’opérations pour son
champ, notamment des données sur la terre, des données agronomiques, des données
sur la gestion de la ferme, des données sur l’équipement ou encore des données
classées dans d’autres catégories, en particulier sur le bétail.
De son côté, FAC regroupe et anonymise les données saisies par l’agriculteur client et
crée des informations de références accessibles (« données globales ») aux utilisateurs
de la version Privilège d’AgExpert. Anonymisées, ces informations ne peuvent pas être
reliées aux agriculteurs, et FAC déclare ne pas vendre les données à des tiers sans leur
consentement (Financement Agricole Canada, 2019b).
Les données téléversées peuvent être supprimées à tout moment. L’agriculteur a la
possibilité de partager ses données entreposées jusqu’à cinq personnes de confiance,
incluant selon la terminologie d’AgExpert :
-Conseillers de confiance : agronomes, expert-conseil en productions végétales,
représentant d’un détaillant de semences, propriétaire foncier, comptable etc.
-Fournisseurs de technologie32
-Autres personnes ou entités : organismes, assureurs, prêteurs, agences et ministères du
gouvernement fédéral ou gouvernements provinciaux
De plus, le partenariat établi entre FAC et John Deere permet aux utilisateurs de matériel
de cette marque de téléverser directement des données agricoles reliées à ce fournisseur.
Le partage des données est étroitement lié à la gestion de l’exploitation ; l’agriculteur qui
aurait par exemple besoin de donner des informations nécessaires au travail d’un
employé ouvre l’accès à ses données, lesquelles sont accessibles depuis l’application
AgExpert. L’agriculteur est donc au centre du partage de ses données, et initie ce partage
dans le seul intérêt de servir la gestion de son exploitation (et non pas de servir la
recherche).
Les logiciels AgExpert, commercialisés à l’échelle du Canada, représentent déjà une
solution technique intéressante en matière de partage des données agricoles :
l’agriculteur a la responsabilité et le contrôle de l’utilisation de ses données, le partage est
sécurisé, et la politique d’utilisation des données dans le contrat du fournisseur suit les
principes d’une charte de bonnes pratiques. Il serait donc intéressant de généraliser le
concept à l’ensemble des filières agricoles, notamment l’élevage, et de permettre un
partage vers davantage de parties prenantes, i.e. plus que cinq tiers de confiance
(Financement Agricole Canada, 2019c).
32
« FAC s’emploie à fournir à ses utilisateurs des options pour transférer et partager des données entre différentes
entreprises et plateformes de données ».
109
Points forts de la certification
- Le fait de demander au fournisseur de technologie certifié de se soumettre de nouveau au
processus d’évaluation lorsqu’il apporte des changements dans ses politiques de
confidentialité des données est un moyen de diminuer la fréquence des modifications.
- La liste des 10 questions du processus d’évaluation, publiquement disponible, peut
constituer une référence précieuse pour un agriculteur dans ses démarches de négociation
contractuelle avec un potentiel fournisseur de technologie agricole. (Grassi, 2016)
- La certification peut s’adresser à tout type d’organisation qui collecte des données
agricoles33. (« Future of Agriculture – Ag Data Transparency with Todd Janzen of Ag Data
Transparent », 2018)
33
“I can say with a lot of confidence that really any company that’s collecting data could go through the certification
process, the one exception being companies that have a different contract with every single farmer, because we
value the master contract. You can’t value 400 different contracts”. (Todd Janzen en entrevue, 2018)
34
Podcast disponible sur http://www.farmruralag.com/future-of-agriculture-ag-data-transparency-with-todd-janzen-of-
ag-data-transparent/
110
10.3 France – Charte sur l’utilisation des données agricoles « Data-Agri » et label
« Data-Agri »
La vocation de l’outil est de valoriser et sécuriser les données des exploitations agricoles
dans les contrats. La FNSEA et les JA soulignent en effet d’une part l’intérêt stratégique et
économique du développement de l’utilisation des données et de la science des données en
agriculture, et d’autre part l’absence de législation ou de tout encadrement à leur sujet (comme
le règlement général sur la protection des données à l’échelle européenne35) : « les données en
question ne relèvent pas systématiquement des données à caractère personnel. Elles ne sont
donc pas protégées par la loi et le règlement européen de protection des données à caractère
personnel, et relèvent du droit des contrats signés entre les opérateurs ». La charte répond
donc à un manque de confiance qui peut exister entre les agriculteurs et les autres acteurs du
secteur agricole. La FNSEA et les JA soulignent aussi des problèmes d’efficacité et de
valorisation des données, en mentionnant par exemple les étapes de ressaisie qui doivent être
évitées.
Cette charte définit treize principes généraux devant idéalement régir les Conditions générales
d’utilisation de tout acteur intervenant auprès des exploitants agricoles.
35
il est important de prendre en compte que les données agricoles peuvent contenir des données à
caractère personnel. Dès lors, il conviendra de tenir compte des dispositions du Règlement européen n° 2016/679
sur la protection des données (Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016
relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre
circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (RGPD règlement général sur la protection des
données))
111
Calendrier et phase d’implantation actuelle
La charte Data-Agri est officiellement présentée à la fin mars 2018 et lancée en avril 2018. Peu
d’information circule quant au calendrier et étapes de la conception de la charte.
Le 12 juin 2018, lors de la seconde édition du salon « La Ferme Digitale » à Paris, le lancement
du label Data-Agri a eu lieu pour compléter et renforcer la démarche. Le label s’adresse aux
entreprises qui souhaitent souligner leur démarche d’adhésion aux principes de la charte.
Processus d’évaluation
Pour obtenir le label, les entreprises devront respecter 4 grands principes : « la lisibilité des
contrats par les agriculteurs », « la transparence », « la maîtrise de l’usage des données par
l’agriculteur » et « la sécurité des données ». Chaque entreprise volontaire devra demander une
labellisation des contrats qu’elle propose aux agriculteurs.
La procédure de labellisation est une procédure d’audit juridique vérifiant la compatibilité entre
vos contrats et la charte Data-Agri. L’audit juridique est assuré par un tiers de confiance,
indépendant de Data-agri, le cabinet d’avocats Grall & Associés.
Le tiers de confiance analyse les documents et fait part à l’entreprise candidate de son projet
d’avis. Après échanges avec l’entreprise, le tiers de confiance transmet à Data-Agri son avis
positif ou négatif à l’octroi du label. Si l’avis est positif, Data-Agri propose un contrat de
labellisation définissant vos engagements en tant que « labellisé ». Une fois le contrat signé, le
label est octroyé pour une durée de 3 ans.
112
Le coût pour les entreprises variera en fonction de leur chiffre d'affaires, de 500 euros à
quelques milliers (Haverland, 2018).
On peut cependant relever certaines différences entre les deux, tant au niveau de l’esprit de la
charte que de l’administration de la certification :
- À la différence des principes américains, la charte Data-Agri ne formalise pas le droit de
propriété des données agricoles aux agriculteurs, elle leur confère seulement le droit
exclusif sur la maîtrise des usages qui seront fait de leurs données d’exploitation.36
- Data-Agri est soutenue exclusivement par des syndicats de producteurs. Aux États-
Unis, les équipementiers agricoles majeurs du pays (AGCO, John Deere, CNH
Industrial) et des syndicats de producteurs ont été au cœur de l’élaboration des
Principes de Confidentialité et de Sécurité des Données Agricoles et soutiennent le
programme de certification Ag Data Transparent.
- La durée de validité de la certification diffère aussi : trois ans pour Data-Agri, un an pour
Ag Data Transparent
36
« La propriété des données générées sur l’exploitation agricole n’est pas un enjeu en soi. En revanche, la maîtrise
de l’usage de ces données par l’agriculteur lui permet de contrôler la diffusion aux collecteurs de données et lui
donne ainsi plus de poids dans la chaîne de valeur » (Data-Agri)
113
Figure 33 : Principes de la Charte Data-Agri (Source : (Data-Agri, 2019))
EEP!
10.3.3 Faiblesses et défis
La charte et le label rencontrent plusieurs défis pour démocratiser, faire accepter, et par
conséquent justifier de leur usage.
115
10.3.5 Impacts et bénéfices observés de l’outil
Avant que la charte et les labels ne soient officiellement lancés, une douzaine de startups de
constructeurs, des distributeurs de matériels agricoles ainsi que des fournisseurs de services
montraient déjà leur intérêt pour la démarche. Aujourd’hui sur le site Internet de Data-Agri, à la
page présentant les entreprises labellisées, seules cinq entreprises sont listées :
- AIRINOV
- Companion – Surveillance collaborative des cultures (de BASF)
- LE CUBE (plateforme)
- Ekylibre
- Gari, l’assistant agricole de Groupama (groupe bancaire).
10.3.6 Comparaison des deux principales chartes et labels de certification : Charte PSP
et Data Agri
Le tableau ci-dessous permet de rapidement comparer les caractéristiques des deux principales
chartes et labels de certification mis en place aux États-Unis et en France.
Tableau 11 : Comparaison des deux principales chartes et labels de certification : Charte PSP et Data Agri
ÉTATS-UNIS FRANCE
Charte PSP et CERTIFICATION Ag Data Data-Agri
CHARTE Transparent
116
10.4 Nouvelle-Zélande – NZ Farm data code of practice
10.4.1 Description
Le Farm Data Code of Practice est un ensemble de bonnes pratiques sur le stockage,
l’utilisation et le partage des données dans le secteur agricole néo-zélandais. Ces directives
visent à permettre un traitement approprié et sécuritaire de ces données. La création de cette
charte s’inscrit dans une démarche visant à favoriser l’innovation du secteur (« enhance the
ability to do business ») par un meilleur accès aux données sans duplication et l’encouragement
à adopter les nouvelles technologies.
L’existence de cette charte vise à rassurer les agriculteurs sur le fait que les données relatives à
leur exploitation seront gérées de manière sécuritaire et de façon appropriée par les
organisations qui y adhèrent. Les agriculteurs ont à y gagner sur le plan des innovations
technologiques (applications) permises par un partage facilité des données.
Les principes de la charte ont été développé suite à un programme de consultation mené au
sein du secteur agricole du pays et reposent sur les fondements suivants (Farm Data
Accreditation Ltd, 2015) :
- L’adhésion à cette charte est volontaire
- La charte doit offrir une crédibilité visible pour les organisations certifiées
- La charte favorise une gestion et une communication transparente et ouverte des données,
à la fois pour le producteur que pour l’utilisateur final
- La charte respecte la propriété intellectuelle et encourage l’innovation
- La charte doit faire prendre conscience de la disponibilité des données.
10.4.2 Gouvernance
Depuis le 2 avril 2015, le Farm Data Code of Practice est la propriété de la société
indépendante Farm Data Accreditation Limited (FDAL). Son actionnariat se compose des
entités suivantes (Farm Data Accreditation Ltd, 2015) : Beef + Lamb New Zealand Ltd, DairyNZ,
Dairy Companies Association of New Zealand, Federated Farmers of New Zealand, Te Tumu
Paeroa – The New Maori Trustee, New Zealand Veterinary Association, Meat Industry
Association.
Les organisations suivantes ont supervisé le développement de la charte et ont représenté un
groupe consultatif (advisory group) pour Farm Data Accreditation Limited lors de sa constitution
(Farm Data Accreditation Ltd, 2015).
DairyNZ CRV Ambreed LIC New Zealand FarmIQ New Federated Farmers of
Zealand New Zealand
Te Tumu Paeroa – The Fertiliser Association Fonterra Co-operative
New Maori Trustee Group Limited
Le financement initial pour le développement de la charte a au départ été assuré par DairyNZ,
un centre de recherche spécialisé dans l’élevage bovin, et le ministère néo-zélandais de
l’agriculture (Ministry for Primary Industries) dans le cadre de son programme Transforming the
Dairy Value Chain lancé en 2011. Farm IQ Systems et Red Meat Profit Partnership ont
117
également participé au financement pour le développement et le lancement de la charte.
Rezare Systems Ltd a également été consulté dans le développement de la charte. La
participation gouvernementale à travers ce financement initial constitue une différence notable
par rapport aux parties prenantes impliquées dans l’élaboration des chartes présentées pour les
États-Unis et la France dans les trois sections précédentes. Le Code of Practice est conçu à
l’attention de toute organisation qui collecte, détient ou partage des données sur les
producteurs agricoles et leurs exploitations.
118
10.5 Union-Européenne – Code de Conduite de l’UE relatif au Partage de Données
agricoles par Contrat
37
Version disponible sur :
http://www.axema.fr/agroequipements/Lists/Lesarticlespubliques/Attachments/386/EUCodeConductDATA(1).pdf
(Code de conduite de l’UE relatif au partage de données agricoles par contrat, s. d.)
119
• pour chaque partie de protéger ses données sensibles (secret d’affaires, droits de
propriété intellectuelle) par des restrictions d’usage ou de traitement non expressément
autorisés ».
Ces principes s’inscrivent dans une démarche de valorisation et de sécurisation des données
agricoles des exploitants agricoles.
Le code aborde certains principes juridiques essentiels permettant d’obtenir un contrat équilibré
en proposant une liste de contrôle des contrats relatifs aux données agricoles. Les questions ci-
dessous sont à se poser par le créateur de données (l’agriculteur) lorsqu’il utilise un produit ou
un service contenant ou utilisant des données agricoles (Copa-Cogeca, CEMA, Fertilizers
Europe, CEETTAR, CEJA, ECPA, EFFAB, FEFAC, ESA, 2018) :
- Une convention / un contrat a-t-il été signé ?
- Existe-il des obligations ? Quelles sont les garanties et indemnités prévues pour chaque
partie ?
- Quelles sont les données collectées ?
- Qui détient / contrôle l’accès aux données ?
- Quels sont les services proposés ?
- Mes données vont-elles être utilisées à d’autres fins que de me fournir, à moi le créateur
des données (par exemple, un agriculteur), un service ? Est-ce suffisamment clair ? Puis-je
être d’accord / pas d’accord ? Quel(s) avantage(s) / valeur cela représente-il pour moi (en
tant que créateur de données) ?
- Les données sont-elles partagées avec d’autres parties ? Quelles règles les parties
externes doivent-elles accepter ? Ai-je le choix d’accepter ou de refuser de partager les
données avec d’autres parties ?
- Le prestataire de services peut-il modifier les contrats de manière unilatérale ?
- Que se passe-t-il lorsque le prestataire de services change de propriétaire ?
- Puis-je récupérer l’ensemble de mes données d’un système dans un format utilisable ?
- Va-t-on m’informer en cas de menaces de sécurité ?
- Puis-je sortir du service et supprimer mes données du système ?
- Puis-je contacter un service d’assistance pouvant répondre le cas échéant à mes
questions ?
- Dois-je souscrire une assurance ?
- Quelles sont les clauses de confidentialité ?
Le code présente également des exemples d’application très pertinents dans différents
domaines de l’agriculture. En annexe 11, vous pourrez consulter le cas de partage de données
dans une optique de prévision des maladies des vaches laitières.
120
Contrôle de la conformité des entreprises aux principes de la charte
L’adhésion au code est volontaire ; les signataires encouragent les acteurs de la chaine
agroalimentaire à s’y conformer.
Contrairement à ce qui existe pour les chartes Privacy and Security Principles for Farm Data
(États-Unis), Data-Agri (France) et NZ Farm data code of practice (Nouvelle-Zélande), il n’existe
pas de processus de certification prévu pour les entreprises collectrices de données agricoles
en conformité à ce code européen.
Le code présente néanmoins cet intérêt de constituer une référence normalisée à l’échelle
européenne. Par définition, il est susceptible d’atteindre un plus grand nombre d’entreprises
collectrices de données agricoles, sur une zone géographique qui dépasse les frontières
nationales des états membres,
38
Il se réfère plus particulièrement aux documents suivants : Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du
Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à
caractère personnel et à la libre circulation de ces données (Règlement Général sur la Protection des Données -
RGPD) Règlement (CE) Nº 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux
obligations contractuelles (Rome I). Directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 1996
concernant la protection juridique des bases de données. Directive (UE) 2016/943 du Parlement européen et du
Conseil du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets
d'affaires) contre l'obtention, l'utilisation et la divulgation illicites. Proposition de règlement du Parlement européen et
du Conseil concernant le respect de la vie privée et la protection des données à caractère personnel dans les
communications électroniques et abrogeant la directive 2002/58/CE (règlement « vie privée et communications
électroniques ») COM/2017/010 final - 2017/03 (COD). Rectificatif à la directive 2004/48/CE du Parlement européen
et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle du 29 avril 2004 (OJ
L157,30.4.2004)
121
10.6 Faits saillants relatifs à l’étude des chartes
Ces chartes présentent l’intérêt d’aider à instiller la confiance dans le secteur agricole, en
particulier sur le fait que les données des agriculteurs seront traitées de manière sécuritaire.
Apportant une réponse aux manques juridiques sur ces questions, elles constituent une
référence pour évaluer les pratiques des entreprises. Leur diffusion permet de sensibiliser les
agriculteurs et l’industrie en général sur tous les enjeux relatifs à l’utilisation et la protection des
données agricoles.
La faiblesse principale de ces codes de bonnes pratiques réside dans le fait qu’elles n’ont pas
valeur de loi. Les entreprises et organisations qui déclarent s’engager à être en conformité avec
ces principes le font sur une base volontaire. De plus, à l’exception du code européen, ces
chartes ont une application nationale, ce qui peut en soi créer des défis pour les entreprises
ayant des activités internationales.
122
11 Plateformes de données mises en place pour faciliter le partage et
la gouvernance des données : quelques expériences publiques
étrangères
11.1.1 Description
39
Les instituts techniques agricoles (ITAs) sont des organismes de recherche et développement appliquée, créés par
et au service des agriculteurs. Spécialisés dans une production ou une filière agricole particulière, leur mission est
principalement de conduire des activités d’expérimentation, d’établir des normes de qualité et de diffuser la
connaissance et des services auprès des agriculteurs et de leurs partenaires.
123
2016 Création de la Société par actions simplifiée (S.A.S.) API-AGRO.
L’actionnariat se compose d’organismes privés et parapublics, représentant l’ensemble
du monde agricole.
2018 Après deux levées de fond, la SAS est capitalisée à hauteur de 1.5 M € et comprend une
trentaine d’actionnaire
11.1.2 Gouvernance
Arvalis, institut du végétal CTIFL (Centre FIEA le réseau Fredon France Genes
technique informatique Diffusion
interprofessionnel des d’élevage
fruits et légumes)
Geves, expertise et GS1 France IDELE (Institut IFPC (Institut ISAGRI
performance de l’élevage) français des
productions
cidricoles)
ITAB (Institut de ITAVI (Institut ITB (institut Groupe Seenergi Smag,
l’agriculture et de technique de technique de Smart
l’alimentation biologiques) l’aviculture) la betterave) Agriculture
40
À la différence de la France qui en possède quatre, il n’existe qu’un seul type de société par action au Québec. En
droit québécois, une société par actions peut être constituée soit sous la loi provinciale (Loi sur les sociétés par
actions - LSAQ), soit sous la loi fédérale (Loi canadienne sur les sociétés par actions - LCSA). La loi fédérale donne
accès à tout le marché canadien, à condition de s'immatriculer dans les provinces où l'on fait affaire. La loi
québécoise donne accès au marché québécois principalement, mais il est possible de s'immatriculer dans les autres
provinces.
124
SOFIPROTEOL Syngenta Terres inoova Unigrains Unissia
Type de données
Tous les types de données sont considérés pour la plateforme API-Agro, données brutes
comme données valorisées. Celle-ci concernent l’ensemble des filières de l’écosystème
agricole : grandes cultures, élevage, maraîchage, viticulture, arboriculture, horticultures, agro-
industries etc.
De nombreux jeux de données sont disponibles sur le portail. Les organismes fondateurs,
partenaires principaux et actionnaires, ont dès le début mis des jeux de données à dispositions
pour permettre une mise-en-œuvre accélérée de l’outil. Par exemple, la base Sols d’ARVALIS
qui est mise à jour de manière annuelle, et la base de données des Produits Phytosanitaires
développée par l’ACTA.
Faire appel à un partenaire technologique proposant une solution prête à être utilisée, et partir
avec un vaste éventail de données a permis d’assurer un très bon démarrage à la plateforme
en se libérant de longues périodes de développement initial qui peuvent avoir pour
conséquence d’enrayer la réalisation d’un tel outil.
125
- Les organismes, partenaires et institutions qui sont actionnaires ou non de la S.A.S. API-
AGRO. Ces derniers (pour certains dès le début du projet) participent à l’alimentation en
jeux de données vastes et de qualité de la plateforme. Ces fournisseurs sont aussi un des
attraits, ou bien un facteur de réussite, de la plateforme puisque dès le début de son
établissement, API-AGRO était d’ores et déjà assorti de jeux de données importants.
- Les « particuliers », c’est-à-dire des producteurs qui utilisent les services d’API-AGRO et
souscrivent à l’offre basique. L’offre basique leur permet d’utiliser la plateforme et les API
pour stocker leurs données et les mettre en valeur. Ces dernières doivent être mises en
conformité ou normalisées par rapport au canevas prescrit par la plateforme. Après l’offre
« basique », l’offre « standard » de la plateforme permet à l’utilisateur d’organiser la
monétisation de ses données et offre aussi la possibilité de limiter la visibilité (pour faire des
échanges privés).
Les conditions d’alimentation en données de la plateforme sont stipulées dans les Conditions
Générales d’abonnement à la plateforme API-AGRO. Les conditions générales exposent
plusieurs définitions :
« Fichiers Abonné désignent les données émises sur la Plateforme par un Abonné et
ses Utilisateurs Fournisseurs. Les formats des Fichiers Abonnés supportés par la
Plateforme sont listés à l’Article 4.4. Les Fichiers Abonnés peuvent contenir des
Données Personnelles.
Appel d’API désigne l’interface applicative de programmation de type N à N par laquelle
un Abonné Acquéreur obtient des données mises à disposition par un Abonné et ses
Utilisateurs Fournisseurs. » (Conditions Générales d’abonnement à la plateforme API-
AGRO, s. d.)).
126
rapportées dans le tableau ci-dessous (« Votre métier—Participez à la transformation
numérique de votre secteur », s. d.) :
Pour accéder au portail et utiliser les données, il faut souscrire à un abonnement. Plusieurs
offres existent : basique, standard, premium, et collectif. Les différentes caractéristiques de ces
forfaits sont consultables en annexe 12.
Modèle d’affaire
Le modèle économique de la plateforme API-AGRO est l’abonnement. Les utilisateurs de la
plateforme peuvent souscrire à différents types d’abonnement avec différentes fonctionnalités
ou niveaux d’accès.
Convaincre des organismes ou des producteurs de s’abonner à la plateforme est donc un enjeu
important auquel API-AGRO répond en développant un écosystème, des interfaces, des
fonctionnalités qui bénéficient au client. Le gage de qualité de la plateforme a été assuré dès le
début du projet par plusieurs facteurs :
- Acteurs importants et réputés du monde agricole à l’initiative du projet
- Appel à des solutions technologiques existantes et fonctionnelles pour éviter une longue
période de développement logiciel, bénéfice de l’expérience des fournisseurs de solution
technologique
- Provision d’une quantité importante de larges jeux de données pour dès le début utiliser la
plateforme et commencer à faire des analyses combinant plusieurs jeux de données
- Premiers projets de recherche entrepris par les acteurs fondateurs du projet utilisant
l’analyse de données de plusieurs jeux permettent de montrer des résultats rapidement
127
- Attention particulière à la facilité d’utilisation de la plateforme, aux enjeux de normalisation
et de standardisation des données recueillies sur le portail pour éviter les écueils habituels
de l’analyse de données (des bases de données qu’il faut constamment retravailler avant de
pouvoir les utiliser)
- Création d’un écosystème complet séduisant de nombreux acteurs du secteur pour asseoir
sa légitimité et sa réputation
Monétisation
API-Agro dispose espace d’échange commercial pour mettre en relation acquisiteurs et
fournisseurs de données. Le processus d’acquisition des données commence par une
« demande d’acquisition » envoyée par l’acquéreur auprès du fournisseur. Les deux parties
disposent d’un outil de messagerie pour entamer la négociation. L’acquéreur choisit la licence
d’utilisation souhaitée, un contrat juridique établi entre les deux parties sur l’utilisation qui sera
faite des données du fournisseur. L’échange peut avoir lieu dès que le fournisseur, en accord
avec les modalités de l’échange, valide la demande d’acquisition de l’acquéreur.
Un fournisseur de données détient l’option de vendre des données à partir du niveau
d’abonnement « standard ». L’acquisition, monétisée ou non, des données est néanmoins
accessible dès la formule d’abonnement « basique ».
L’article 3 des conditions générales d’utilisation de la plateforme API-AGRO concerne les
informations relatives aux abonnements et services proposés, et l’article 3.5 la fonction de
monétisation : Conditions particulières à la fonctionnalité Monétisation dans le cadre des
Abonnements Standard, Premium et Collectif précisent que le fournisseur de données
détermine son prix pour permettre l’accès à ses données. Et c’est l’abonné intéressé par
l’acquisition de ces données qui accepte ou non le prix proposé :
« L’Abonné Fournisseur est seul responsable de la fixation du prix de la Monétisation
ainsi que de la facturation de ses Fichiers Abonnés et/ou Appel d’API. La Monétisation
est définitivement validée lorsque l’Abonné Acquéreur accepte les conditions de l’Offre
de l’Abonné Fournisseur sur l’objet et le prix de la Monétisation, matérialisées dans le
Contrat entre Abonnés. »
La plateforme API-AGRO reçoit aussi un pourcentage de la monétisation des échanges de
données entre ses abonnées : ce sont les « Frais d’intermédiation financière ». Ces frais sont
appliqués suivant le barème suivant :
- Jusqu’à 1.999.999 € : 1,1%
- Entre 2.000.000€ et 4.999.999€ : 0,9%
- Entre 5.000.000€ et 9.999.999€ : 0,8%
- Entre 10.000.000€ et 19.999.999€ : 0,75%
- Au-delà de 20.000.000€ : 0,7%
La lecture des conditions d’utilisation ne nous permet pas de savoir si ces montants sont
calculés et prélevés pour chaque opération de monétisation, ou à la fin d’une année d’utilisation
et d’abonnement de la plateforme.
128
Fonctionnalités
Les fonctionnalités disponibles sur la plateforme pour les fournisseurs et utilisateurs de données
comprennent (plus de détails sur https://api-agro.eu/la-plateforme/fonctionnalites/) :
- Sécurité des échanges de données par une identification personnelle vérifiée dès la
connexion à la plateforme
- Contrôle du fournisseur sur la diffusion de ses données, aux formats et à la fréquence
choisie
- Option de monétisation des données et choix du mode de tarification, en abonnement, achat
unique ou récurrent. Possibilité de les échanger gratuitement également.
- Mise en relation des fournisseurs et utilisateurs de données issus de l’ensemble de
l’écosystème agricole
- Création et accès à des catalogues de données personnalisés avec des mots clés, pour
tous les secteurs et dans le monde entier
- Paramétrage des droits d’utilisation des données pour l’établissement de contrats de licence
personnalisés
- Visualisation d’échantillons de données générés automatiquement par des algorithmes pour
évaluer la qualité et la pertinence des données
- Service de notifications sur les opportunités et les sujets d’intérêt pour optimiser la gestion
des données
- Planification et suivi des échanges de données dans la durée pour les transactions
récurrentes
- Traçabilité des transactions avec l’ensemble de l’historique des discussions consultable
dans l’espace personnel.
Sécurité
La sécurité est un enjeu important pour la plateforme API-AGRO. C’est d’une part un enjeu
inhérent de la gestion d’un tel outil, mais c’est aussi d’autre part une manière d’établir de la
confiance entre l’entreprise et ses utilisateurs qui peuvent être de différentes sensibilité vis-à-vis
des risques liés à la sécurité.
Une manière pour API-AGRO d’assurer la sécurité de son portail de données a été de faire
appel à des partenaires technologiques pour leurs solutions techniques. La plateforme n’a pas
été mise sur pieds de toute pièce, mais adaptée par les entreprises qui proposent déjà des
solutions.
129
11.1.6 Impacts et bénéfices observés de l’outil
L’outil s’adressant à l’ensemble des acteurs du secteur et également du fait de l’implication
dans le développement de plusieurs acteurs importants, la plateforme a déjà rencontré un
important succès. Ces acteurs fondateurs ayant forgé un outil répondant à leurs besoins,
plusieurs projets ont déjà été menés grâce aux solutions et fonctionnalités de la plateforme. La
plateforme API-AGRO a permis de faire avancer certains projets de recherche, notamment :
(Sine et al., 2019)
1. Développement du système d’informations Agrosyst de l’INRA, qui acquiert, héberge et
valorise des données variées dans le domaine des cultures. La plateforme API-AGRO a
permis aux développeurs d’Agrosyst d’accéder à des référentiels existants, interroger
des bases de données en temps réel et acquérir l’information nécessaire pour
reconstituer leur liste de bases de données de références.
2. Mise à jour automatique des données de l’Institut Technique de l’Aviculture (ITAVI),
dans son travail de suivi mensuel des coûts de matières premières alimentaires pour
calculer des indices de référence utilisés dans différents contrats entre acteurs de la
filière avicole.
130
11.2 Union Européenne - Portail de données AgroIT
11.2.1 Description
Les principaux utilisateurs cibles sont les agriculteurs, les organisations agricoles et les
institutions gouvernementales et européennes du secteur de l'agriculture. L’orientation vers les
données ouvertes a été choisie dans le but d’accélérer le transfert d’informations, d'applications
et de services innovants vers l’ensemble du marché européen.
Le SEGES précise qu’en définissant des normes « ouvertes », les agriculteurs ne seront pas
limités à la sélection des produits développés par le SEGES et accessible via la plateforme
AgroIT, mais aussi à tout autre fabricant ou fournisseur d’outil s’appuyant sur ces principes
ouverts.
Sur le site Internet du projet42, la dernière mise à jour date de novembre 2016. Après la
participation à une trentaine de salons et conférences entre mars 2014 et septembre 2016, c’est
au EIMA (Exposition internationale des machines pour l’agriculture et le jardinage) 2016 à
Bologne en Italie qu’AgroIT a présenté ses « Conclusions of a three year AgroIT project ». Sur
les réseaux sociaux, AgroIT a cessé ses publications au début de l’année 2017.
Développement
Le projet a suivi 4 étapes principales de développement :
41
Source : (AGRO IT: more efficient farming thanks to an open standards IT system | EU Results, s. d.)
42
i.d.
131
1- Implémentation d’applications mobiles via la plateforme AgroIT
- Permettre une récolte simple et efficace des données lors de l’exécution des activités
quotidiennes de l’agriculteur ;
- Proposition à l’agriculteur d’un scénario découpé en une séquence d’activités
quotidiennes ;
- Aide à la décision (« farm ERP », enterprise resource planning) basée sur un système
existant, PANTHEON Farming.
Objectifs :
- Augmentation de la productivité suivant le concept « input data as you go » ;
- Utilisation plus efficace des ressources de la ferme grâce à l’accès simple et rapide aux
informations et recommandations ;
- Gain de temps grâce à l’automatisation des tâches (récolte des données) ;
- Grâce à l’automatisation de la récolte de données et l’ouverture des données, la
possibilité est offerte de réaliser de meilleures analyses globales en vue de définir des
stratégies, politiques, et directives de la part des institutions gouvernementales.
2- Multiplication des services et des applications disponibles sur la plateforme pour une récolte
de données plus large
Intégration d’autres sources de données comme les divers types de systèmes de surveillance
(capteurs). Il s’agit de pouvoir connecter ces équipements à la plateforme. Nous allons
également intégrer divers dispositifs via leurs systèmes de surveillance à la plate-forme.
Objectifs :
Davantage de données et de types de donnent permettent de plus larges capacités d’analyse,
et donc de recommandations pour les producteurs.
4- Données ouvertes
Créer des standards et bonnes pratiques relatifs aux données ouvertes. Les normes seront
publiées dans le domaine public ou sous licence Creative Commons afin de permettre la
collaboration et un soutien important au sein des industries et des communautés.
Utiliser ces normes pour promouvoir la plateforme et accélérer l’intégration de nouveaux
utilisateurs, acteurs, et données.
132
Projets pilotes
La plateforme n’est pas accessible en ligne, cependant plusieurs projets pilotes ont été réalisés
avec des producteurs volontaires en Europe, notamment au Danemark, en Pologne, en
Roumanie, Slovénie, Autriche, Serbie et Macédoine. Il n’est pas possible de conclure si ses
projets pilotes sont maintenus, ou si les projets pilotes se sont multipliés depuis.
11.2.2 Gouvernance
Partenaires AgroIT
Plusieurs partenaires ont été impliqués dans le développement d’AgroIT :
- Datalab d.d., Slovénie
- EFOS d.o.o., Slovénie
- Farmers’ Federation in the Republic of Macedonia, FYR Macedoine
- Freedom Grow, Sistemas de Informação SA, Portugal
- Pessl Instruments GmbH, Autriche
- Przemysłowy Instytut Maszyn Rolniczych, Pologne
- Mattig Management Partners RO S.R.L., Roumanie
- Sinergise, Laboratory for GIS, d.o.o., Slovénie
- University of Ljubljana, Slovénie
- SEGES, Danemark
Il n’est cependant pas précisé quel est le degré d’implication de chacun des partenaires dans la
gestion du projet. Seul le rôle de Datalab est précisément connu, c’est cette entreprise qui a
développé la solution d’analyse des données PANTHEON Farming.
Le SEGES fait partie d’une association dont le nom complet est SEGES, Landbrug & Fødevarer
(Agriculture et Alimentation), F.m.b.A, le sigle signifiant Forening med begrænset Ansvar, soit
une association à responsabilité limitée.
133
Structure juridique et gouvernance stratégique
La plateforme AgroIT est encore au stade de projet et n’a donc pour l’heure pas de structure
juridique définie. L’interaction entre les différents partenaires et le niveau d’implication de
chacun d’entre eux dans la gestion du projet n’est pas décrite dans les documents consultables.
Type de données
La présentation des étapes de développement du projet nous renseigne un peu sur les données
considérées pour la plateforme AgroIT. Ce sont les données créées par le producteur sur son
exploitation, brutes ou transformées, qui doivent ensuite être alimentées sur la plateforme. Il est
fait mention de l’intégration de différents types de capteurs et d’automatisation de la récolte des
données. Cependant il n’est pas fait mention du développement par AgroIT de ses propres
équipements et capteurs. Utiliser les équipements et capteurs d’autres fabricants et
fournisseurs peut créer une barrière de nature contractuelle dans le flux des données vers la
plateforme ouverte.
134
- Les producteurs sont les utilisateurs directs du portail. Ils l’alimentent en données, et
bénéficient des conseils, des séquences d’action, et de l’aide à la décision offerte par des
fournisseurs de service qu’ils peuvent choisir ;
- Les fournisseurs de service qui accèdent aux données du ou des producteurs pour les
analyser et ensuite émettre des recommandations ;
- Les institutions gouvernementales qui peuvent profiter des jeux de données ouvertes
agglomérées pour les analyser et réfléchir à des politiques publiques spécifiques au secteur
agricole.
Les conditions d’accès aux données ouvertes de la plateforme ne sont pas précisées, pas plus
que ne l’est la manière dont les données doivent être agglomérées. Il est crucial de spécifier si
l’ensemble des acteurs du secteur agricole ont la possibilité d’accéder au portail de données ou
non, et si oui sous quelles conditions.
Modèle d’affaires
Aucune information quant au modèle d’affaire d’AgroIT n’est consultable.
Monétisation
Aucune information sur la possibilité de monétisation des données. Il est à noter que la notion
de données ouvertes n’exclue pas forcément le principe de monétisation des données. Si la
consultation des données est ouverte, l’utilisation peut être l’objet d’une transition monétaire.
Fonctionnalités
- Automatisation de la récole des données sur la ferme ;
- Intégration de capteurs et équipements provenant d’autres entreprises ;
- Analyse des données par l’application de base d’AgroIT, PANTHEON Farming ;
- Recommandations quotidiennes et proposition de séquences d’actes pour augmenter la
productivité de la ferme ;
- Possibilité d’être en liaison avec d’autres types de service d’aide à la décision pour des
besoins plus ponctuels ou plus spécifiques ;
- Une « Cloud Integration Platform » (http://agroit.li.fri.uni-lj.si/explore) où l’utilisateur peut
explorer un catalogue de différentes APIs. En premier lieu, ce sont les services des
partenaires du projet qui doivent être disponibles (par exemple SEGES, Pessl, Sinergise),
puis en second lieu la plateforme doit s’ouvrir à tout fournisseur de servie qui souhaiterait y
ajouter sa ou ses solutions. À l’heure actuelle, 13 API sont affichées sur le portail de
démonstration.
135
11.2.6 Impacts et bénéfices observés de l’outil
Il est difficile de juger des impacts et bénéfices de l’outil AgroIT. Sur le site Internet du projet,
ressource principale d’information, la publication d’information s’est arrêtée fin 2016.
La plateforme en tant que telle, parfois référée comme CIP (cloud integration platform), a une
version pilote. Une démonstration du portail et de quelques-unes de ses fonctionnalités comme
l’API Marketplace est accessible (http://agroit.li.fri.uni-lj.si/explore). Les standards sur les
données ouvertes agricoles ne sont pas publiés.
Le projet AgroIT a implanté 100 fermes pilotes dans toute l’Europe : du Danemark à la Pologne,
en passant par la Roumanie, la Slovénie et l'Autriche, la Serbie et la Macédoine. Seules des
fermes en Slovénie (STARIHA Farm), Roumanie (SC Fructis Trading SRL, Rokura Pilot Farm),
et Pologne (Agriculture and Pomology Research Farm, APRF) sont illustrées par quelques
textes et photographies (AgroIT-Yearly internal progress report.pdf, 2015).
Il n’y a pas d’information sur la quantité de données présente sur le portail ni sur les institutions
gouvernementales consultant la plateforme.
136
11.3 Royaume-Uni – Portail de données Agrimetrics
11.3.1 Description
Le centre de recherche représente l’une des plus importantes organisations de valorisation des
données agroalimentaires au Royaume-Uni. La mission que se donne Agrimetrics est « d’aider
à résoudre les défis pour obtenir une production agroalimentaire économiquement et
écologiquement durable, par l’utilisation des données, de l’analytique et de l’intelligence
artificielle » (Source : traduction libre de (Agrimetrics, s. d.).
Pour Agrimetrics, les données massives représentent une source d’analyse indispensable pour
la recherche et l’innovation. Le centre collecte et agrège des données agricoles provenant de
sources d’information variées. La structuration et la combinaison de ces jeux de données
fragmentés et rassemblés dans un seul endroit sert à la recherche de solutions en matière
d’amélioration de la productivité, de la sécurité et de la transparence dans les secteurs de
l’agriculture et agroalimentaire.
11.3.2 Gouvernance
Agrimetrics est né d’une initiative conjointe de Rothamsted Research, l’Université de Reading,
Scotland’s Rural College (SRUC) et le National Institute of Agricultural Botany (NIAB). Ces
entités en sont les quatre partenaires fondateurs (Crawford et al., 2015).
137
expérience dans l’application et l’échange du savoir, en particulier dans les domaines des sols,
cultures, bétail, produits alimentaires et développement durable.
Agrimetrics est aussi membre de l’Association for Innovation, Research and Technology
Organisations (AIRTO), qui regroupe des institutions opérant dans l’innovation et la recherche
au Royaume-Uni.
En ce qui concerne sa forme juridique, Agrimetrics Ltd. est une société britannique à
responsabilité limitée. Son siège est établi sur l’un des sites de Rothamsted Research, à
Harpenden. Le centre comptait 17 employés et réalisait un chiffre d’affaires d’1,7 million£ en
2016. (Agrimetrics | Our members, 2016). L’équipe dirigeante est conduite par David Flanders
(PDG); l’entreprise dispose aussi d’un conseil d’administration composé de représentants des
institutions partenaires et d’un comité consultatif.
Mode de fonctionnement
La plateforme d’Agrimetrics ne constitue pas un entrepôt de données ; elle donne des liens
d’accès vers divers jeux de données, et se sert de l’intelligence artificielle et de l’apprentissage
automatique (machine learning) pour transformer ces données en un format pouvant être utilisé
et analysé par ses clients (ingénieurs agronomes, chercheurs, etc.). Selon Agrimetrics, cette
manière de procéder est inédite dans le secteur agroalimentaire et permet aux fournisseurs de
données de conserver la propriété et le contrôle sur leurs données. Ces propriétaires accordent
des permissions de contrôle partiel ou total aux projets et organisations de leur choix.
Les services d’Agrimetrics consistent à :
- Lier des données entre des jeux de données complémentaires
- Produire des analyses pour informer sur les tendances au sein de la chaine agroalimentaire
- Effectuer des modélisations dans une optique de prédiction et de gestion des risques
- Vendre des services d’expertise et de conseil
Field Explorer
- Field Explorer représente la gamme de fonctionnalités permettant à l’utilisateur d’accéder
via une interface à des informations reliées aux parcelles agricoles au Royaume-Uni.
- Ces informations sont le résultat d’agrégations de données réalisés issues du croisement de
diverses bases de données. Agrimetrics effectue ce travail par le biais des APIs référencées
dans son système (comme par exemple, Field Boundaries API, Field Facts API, Field
Forecasts API, Field Search API, Field Trends API, GraphQL API). Dans la terminologie
d’Agrimetrics, ces données agrégées représentent des données liées (linked-data).
- Au sein de la gamme Field Explorer, l’outil Field Boundaries permet par exemple l’accès à
des informations (données statiques, tendances, prévisions…) pour 2,8 millions de parcelles
du pays. Ces données proviennent de sources diverses, par exemple DEFRA (Department
for Environment, Food and Rural Affairs), Natural England, USDA, Met Office, Soil Grids,
RPA (Rural Payments Agency). Cet outil de visualisation permet aux utilisateurs
d’Agrimetrics d’enrichir leurs propres données pour développer des outils et des
applications d’innovation, par exemple dans une optique d’amélioration de la productivité.
138
Marketplace
Le « marketplace » est une plateforme qui permet à des utilisateurs de données d’accéder via
des APIs à des bases de données mises à disposition par des organisations propriétaires de
jeux de données, des données qui ne sont pas retravaillées par Agrimetrics (pre-linked data)
dont ces utilisateurs ont besoin pour développer des applications, modélisations ou analyses.
Un catalogue permet l’exploration des jeux de données disponibles. En contrepartie, les
fournisseurs de données qui mettent à disposition des jeux de données dans le catalogue
perçoivent une rémunération basée sur la fréquence d’accès enregistée pour leurs jeux de
données.
Sur cet aspect de rémunération des fournisseurs de données, un parallèle avec le portail de
données API-Agro peut être établi ici. Bien qu’un mécanisme de rémunération pour les
fournisseurs de données soit mis en place chez Agrimetrics, à la différence de la plateforme
française, la rémunération ne repose pas sur l’organisation d’une transaction monétisée de gré-
à-gré entre le fournisseur de données et l’utilisateur de donnée ; il n’y a pas de « négociation »
directe entre les deux parties pour la fixation d’un prix.
Public visé
Le marketplace, ainsi que les informations et analyses produites par le centre de recherche
présentent un intérêt pour les développeurs et scientifiques des données œuvrant dans ou
139
autour des secteurs agricoles et agroalimentaires. En particulier, Agrimetrics indique que ses
outils et plateforme peuvent être utiles aux entreprises agricoles techniques, fournisseurs
d’intrants, ingénieurs agronomes, chercheurs, mais aussi traders de commodités, qui
disposeront de sources précieuses pour leur modélisations et analyses.
Modèle d’affaires
Agrimetrics commercialise trois niveaux d’abonnements sur une base annuelle. Chaque niveau
d’abonnement donne un accès illimité aux « core-linked data », soit plus d’un milliard de points
de données ainsi qu’un montant de « crédits de données » qui permettent l’accès aux données
« premium ». La tarification est flexible dépendamment des besoins du client et des volumes
d’achat.
Agrimetrics déclare que ses profits sont réinvestis dans de nouvelles données, technologies et
capacités. Les capacités développées par Agrimetrics servent non seulement à donner accès à
des données de qualité, mais également à veiller à la sécurité de ces données.
Sécurité
La plateforme d’Agrimetrics adhère à des normes de gouvernance des données rigoureuses et
bénéfice d’accréditations :
- Accréditation ISO 27001 Management de la Sécurité de l’Information
- Certification Cyber Essentials, qui évalue l’efficacité des contrôles de sécurité mis en place
contre les menaces provenant d’Internet
- Conformité au Règlement Général sur la Protection des Données de l’Union Européenne,
qui sert de référence en matière de protection des données à caractère personnel.
140
11.4 Tableau synthèse des caractéristiques des plateformes de données à l’étude
Le tableau suivant permet de faire un récapitulatif plus visuel des différentes caractéristiques
des plateformes de données publiques étudiées.
Participants au projet
141
Parties prenantes Producteurs Producteurs Producteurs
connectées à la Fournisseurs de Fournisseurs d’intrants Fournisseurs d’intrants
plateforme services Entreprises Entreprises
Institutions agroalimentaires agroalimentaires
gouvernementales Coopératives Conseillers
Conseillers Entreprises
Entreprises numériques
numériques Services financiers
Services financiers Secteur public
Secteur public Chercheurs
Chercheurs
142
12 Synthèse et éléments à prendre en compte dans l’analyse des
initiatives des autres juridictions sur l’encadrement du numérique
Il était pertinent de se tourner vers les secteurs agricoles des États-Unis et de la France,
notamment en raison de leur avancée dans ces domaines, des caractéristiques similaires qu’ils
présentent avec celui du Québec et aussi pour décrire brièvement les initiatives majeures de
soutien à la recherche par les acteurs publics.
Les États-Unis affichent une avance incontestable en ce qui a trait à la transformation agricole.
Des moyens considérables sont consacrés chaque année à la recherche et développement,
tant dans les secteurs publics et privés. Le pays dispose d’universités et d’agro-équipementiers
majeurs, dont certains se sont révélés précurseurs pour de nombreuses technologies. La
participation gouvernementale est très active dans les domaines de la recherche agricole, en
particulier en ce qui a trait à l’intelligence artificielle et la science des données. L’agriculture tient
une place au sein du programme American AI Initiative, le plan gouvernemental dédié à
l’intelligence artificielle.
La France n’est pas en reste puisque le secteur agricole aborde aussi pleinement le virage
numérique. La stratégie du secteur agricole français pour négocier le virage numérique est
conduite par de nombreux acteurs, dont le gouvernement à l’initiative de plusieurs missions et
projets qui ont orienté la transformation du secteur. Pour ce qui est de la gouvernance et la
valorisation des données agricoles, le rapport de la Mission Bournigal (Bournigal, 2017),
commandé par les ministères de l’Agriculture, de la Recherche et de l’Économie, fait état d’une
recherche approfondie sur cet enjeu et donne une description très détaillée des différents défis
à prendre en compte et des fonctionnalités requises pour la mise en place d’une plateforme de
données numériques agricoles tournée vers l’innovation. Les autorités publiques jouent aussi
un rôle actif afin de soutenir les projets en lien avec l’intelligence artificielle, et le pays tient une
place respectable au niveau mondial dans ce domaine.
Savoir précisément où se trouvent les données, à qui elles appartiennent, comment seront-elles
utilisées, par qui, et quelles sont les autorités légales et morales pour garantir leur intégrité, sont
des questions restant pour l’heure sans réponse nette. Face à ces interrogations, l’industrie
tente de s’organiser elle-même avec la diffusion de chartes servant de guides de bonnes
pratiques, des chartes produites avec la participation d’acteurs majeurs du secteur.
143
Les chartes et codes de conduite présentés dans ce rapport ont vu le jour en raison des
insuffisances juridiques actuelles en matière de protection spécifique des données des
agriculteurs. L’exemple américain montre en effet qu’il n’existe à l’heure actuelle aucune loi
dans le pays prévoyant les exigences minimales qui devraient être respectées par les
fournisseurs de technologie en matière de collecte, de partage et de sécurité des données
agricoles sensibles.
Ces codes abordent des questions centrales, telles que la terminologie, la propriété des
données, les droits relatifs aux données, les questions liées à la protection de la vie privée, la
sécurité, le consentement, la divulgation et la transparence. Ils tentent d’exploiter les avantages
des données agricoles tout en protégeant la vie privée et la sécurité des producteurs. Même si
ces codes ne sont pas juridiquement contraignants, ils permettent de mieux saisir l’importance
de la transparence des flux de données agricoles, changent la perception que les entreprises
agricoles en ont et sensibilisent les producteurs de données à leurs droits (Zampati, 2019).
Les Principes de Confidentialité et de Sécurité des Données Agricoles développés par Farm
Bureau de 2014 font partie des premières initiatives de ce genre lancées dans le monde. Cette
charte oblige les agro-équipementiers ou fournisseurs de services à un niveau élevé de
transparence sur l’utilisation qui sera faite des données dans la rédaction de leurs contrats. Ils
mettent également l’accent sur l’éducation et la responsabilité de l’agriculteur en matière de
compréhension des engagements qu’il contracte.
Ces chartes présentent l’intérêt d’aider à instiller la confiance dans le secteur agricole, en
particulier elles contribuent à rassurer les agriculteurs que leurs données seront traitées de
manière sécuritaire. Apportant une réponse aux manques juridiques sur ces questions, elles
constituent une référence pour évaluer les pratiques des entreprises. Leur diffusion permet de
sensibiliser les agriculteurs et l’industrie en général sur tous les enjeux relatifs à l’utilisation et la
protection des données agricoles. Elles favorisent la collaboration d’organisations majeures du
secteur, et à ce titre, gagnent en crédibilité du fait de leur présence.
La faiblesse principale de ces codes de bonnes pratiques réside dans le fait qu’elles n’ont pas
valeur de loi. Les entreprises et organisations qui déclarent s’engager à être en conformité avec
ces principes le font sur une base volontaire. Par conséquent, des fournisseurs d’équipement
agricole majeurs peuvent décider de ne pas les suivre. De plus, à l’exception du code
européen, ces chartes ont une application nationale, ce qui peut en soi créer des défis pour les
entreprises ayant des activités internationales.
144
L’adhésion des entreprises conditionne l’existence de ces chartes. Pour s’assurer du fait que
les entreprises seront disposées à se mettre en conformité, les principes doivent être réalistes
et énoncés dans un langage clair et facilement compréhensible.
Des labels sont créés afin de pallier certaines des faiblesses mentionnées ci-dessus et donner
un incitatif pour les fournisseurs de services de se mettre en conformité avec l’ensemble des
points énumérés dans les chartes. C’est le cas notamment des Principes de Confidentialité et
de Sécurité des Données Agricoles qui s’accompagnent du label Ag Data Transparent dont le
processus de certification repose sur une évaluation rigoureuse des contrats des fournisseurs.
À mesure qu’ils se diffusent dans le secteur, les labels de certification donnent une crédibilité
supplémentaire aux chartes et gagnent en impact. Todd Janzen, avocat à l’origine de la
création du label américain Ag Data Transparent, précise que de plus en plus de fournisseurs
de technologie se tournent vers le processus de certification à la demande de leurs clients
agriculteurs. (« Future of Agriculture – Ag Data Transparency with Todd Janzen of Ag Data
Transparent », 2018)
145
d’experts comme cela était le cas auparavant. Elles sont connectées à de nouveaux
intermédiaires et ont ainsi l’opportunité de s’ouvrir à de nouveaux marchés (Jouanjean, 2019b).
Participation
Le premier défi tourne autour de la participation. De manière générale, en plus du mode de
gouvernance, un point clé est de déterminer la diversité optimale nécessaire à l’efficacité d’une
plateforme d’innovation (Kilelu et al., 2013).
Lorsque l’on aborde la contrepartie pour l’échange de données vient aussi l’idée de leur
monétisation, étant entendu que ces données sont à l’origine d’une création de valeur.
L’exemple d’API-AGRO en France représente une bonne illustration d’une plateforme sur
laquelle des transactions monétisées de données agricoles sont possibles. La question se pose
sur la façon d’établir un juste coût pour les données : l’équilibre doit être trouvé entre une juste
rétribution pour les producteurs de données et la garantie d’accès à un coût abordable pour le
plus grand nombre d’acteurs.
La participation des entreprises privées, par exemple les fournisseurs d’intrants, doit aussi être
acquise. Celles-ci ont de prime abord tout intérêt à s’assurer de la propriété des données pour
les valoriser et en bénéficier elles-mêmes. Ainsi, pour créer un portail de données ouvertes, il
est nécessaire de réfléchir d’une part à des incitatifs pour encourager les entreprises privées à
partager des données, et d’autre part à un cadre juridique leur fournissant des garanties et un
encadrement. Les instituts de recherche génèrent également des données utiles et pour eux
aussi un portail peut présenter l’opportunité de mieux valoriser leurs données.
146
Fonctionnalités
Le deuxième défi concerne les fonctionnalités pertinentes à développer sur la plateforme, tout
en maintenant un niveau élevé de sécurité. Un portail peut être paramétré de différentes
manières, relativement au type d’accès aux données (consultation et/ou téléchargement), aux
modalités d’accès, aux termes des licences associées à la réutilisation des données, aux coûts
d’accès aux jeux de données ou aux services développés à partir de ces données.
Dans les exemples présentés dans le rapport, les solutions généralement retenues en matière
d’accès aux données sont les APIs, permettant la fédération de bases de données séparées.
Une fonctionnalité essentielle consiste aussi en des moteurs de recherche performants. À ce
titre, l’outil Field Explorer de la plateforme Agrimetrics permet de trouver des données
complètes pour 2,8 millions de parcelles agricoles au Royaume-Uni. Cependant, si la
performance des moteurs de recherches est importante, il tout aussi primordial de se pencher
sur les questions d’anonymisation des données en lien avec des parcelles géo-référencées.
Gouvernance et financement
Troisièmement, il importe de définir le mode de gouvernance le plus approprié. L’enjeu est de
définir une gouvernance qui permette à la fois d’instituer la confiance et de mobiliser des
acteurs œuvrant dans le secteur agricole.
La question reste posée de savoir si le gouvernement devrait toujours jouer un rôle actif dans le
développement de ces plateformes, ou si la gouvernance des portails des données devrait être
confiée à des organisations indépendantes et privées. Dans les modèles présentés dans ce
rapport, les plateformes de données sont des projets dirigés conjointement par des grands
acteurs du monde agricole, des instituts de recherche et/ou des universités. Les comités
stratégiques se composent de généralement de membres représentant les universités,
chambres d’agriculture, instituts de recherche ou équipementiers partenaires. Quoi qu’il en soit,
il apparaît primordial que la diversité de l’écosystème agricole soit représentée.
Les structures juridiques retenues pour les entités gérant les plateformes sont diverses :
Société par Actions Simplifiées pour le cas d’API-Agro en France, Association à responsabilité
limitée pour le SEGES qui participe au projet européen AgroIT, Société à Responsabilité
Limitée (Ltd.) pour Agrimetrics au Royaume-Uni.
Les conditions d’utilisation servent à établir une gouvernance des données. Des obligations
sont définies à la fois pour ceux qui alimentent le portail en données – en matière de dépôt
notamment, et pour ceux qui en feront usage. Dans la plupart des cas, l’agriculteur est en
mesure de définir les droits qu’il souhaite accorder sur ses données. La possibilité lui est laissée
de choisir les parties avec lesquelles il souhaite partager ses données, de définir des licences
d’utilisation et de révoquer ses autorisations. Tous les portails étudiés garantissent le fait que
l’agriculteur reste le propriétaire de ses données et qu’il garde le contrôle sur leurs utilisations.
147
Le montage financier choisi dans les modèles étudiés combine une participation des
actionnaires, des aides publiques. Une tarification annuelle fixe est en général prévue pour la
partie souhaitant utiliser les données. Différents niveaux d’abonnements sont généralement
proposés suivant la consommation de données désirée.
148
13 Conclusion générale
Une partie du secteur agricole de plusieurs pays est désormais pilotée par les données et cette
proportion s’accroit d’année en année, laissant présager que d’ici quelques décennies, ce sera
tout un pan de l’agriculture planétaire qui sera produite ainsi. Le virage numérique qui s’opère
dans les campagnes s’est accéléré au cours des deux dernières années, si bien que nous
avons du mal à l’observer, à savoir où nous en sommes et où nous situons-nous par rapport à
nos compétiteurs. Le premier volet de cette recherche avait donc pour objectif de faire le portrait
de l’utilisation du numérique en agriculture au Québec et des enjeux qui en découlent. Le
second volet permettait d’identifier les politiques et les initiatives publiques encadrant l’usage du
numérique en agriculture à l’extérieur du Québec.
Ce rapport a été élaboré sur la base de trois types d’acquisitions d’information : (1) une revue de
la littérature, (2) des entretiens semi-dirigés avec plus d’une vingtaine d’acteurs et experts du
milieu (des producteurs, des organisations de producteurs, des centres de recherche et
d’expertise, des fournisseurs d’intrants, d’équipements ou de services et finalement des
institutions et organisations gouvernementales tant au Québec qu’à l’international), et (3) un
questionnaire en ligne auprès de producteurs québécois évoluant dans des secteurs agricoles
névralgiques en termes de poids économique et d’utilisation du numérique (à savoir les
producteurs de lait, les producteurs en serre et les producteurs de grains du Québec). Notre
méthodologie multisources s’explique par le fait qu’il existe très peu de données récentes sur le
niveau d’utilisation des outils et technologies numériques dans les différents secteurs agricoles
au Canada et encore moins sur la perception qu’ont les acteurs des enjeux qui en découlent. Au
Québec aucune étude ne fait le portrait de l’utilisation des technologies numériques. Nous avons
donc tenté de faire un portrait qualitatif sur la base des perceptions des acteurs. Compte tenu du
fait que les données recueillies sont des perceptions, leur interprétation doit se faire avec une
certaine prudence.
La vague numérique en agriculture ne semble pas être une mode de passage, bien au contraire.
Une forte proportion des producteurs sondés a mentionné vouloir utiliser davantage d’outils
numériques dans le futur et les acteurs s’accordent également pour dire qu’une véritable
révolution est en route. De façon générale, le Québec agricole suit la vague numérique, du
moins au niveau de l’adoption des technologies. Par contre, la province aurait un certain retard
au niveau de l’intégration des données générées sur les exploitations comparativement aux
régions concurrentes. Pour ce qui est des données ouvertes, le Québec aurait un important
retard par rapport aux États-Unis, l’Europe et le reste du Canada.
Si les acteurs que nous avons rencontrés sont conscients du virage numérique s’opérant et de
son potentiel, ces derniers nous ont tracé un portrait plutôt en demi-teinte de ce sentiment chez
les producteurs québécois. Il existerait un phénomène d’attente, parfois même de résistance au
changement chez les producteurs. Les raisons expliquant cette situation sont relativement
nombreuses. Un certain nombre de producteurs rencontrent d’importants problèmes de
compatibilité entre les technologies utilisées sur la ferme. Ces problèmes d’incompatibilité
149
nuisent bien souvent à l’utilisation à son plein potentiel et à l’utilisation efficace des données
produites. Une autre raison citée presqu’unanimement au cours de nos entretiens, l’existence
de problèmes de connexion à Internet et au réseau de téléphonie cellulaire en région. Un
exploitant sur cinq ou six, dépendamment des secteurs, rencontre de graves problèmes de
connexion, créant une certaine iniquité entre producteurs sur le territoire. La courbe
d’apprentissage de ces nouveaux outils est également très abrupte, créant d’importants défis au
niveau de la formation et des canaux de transfert des connaissances. Mais pour toutes les
entités que nous avons entendues incluant les producteurs, le facteur clé de l’adoption des
nouvelles technologies est l’impact économique sur l’exploitation. Nos entretiens ont souvent
révélé la nécessité de produire des études indépendantes sur la rentabilité des nouvelles
technologies.
La révolution numérique se traduit par la génération d’une quantité toujours plus importante de
données dans les différentes opérations associées à la production, et ce volume s’avère utile
pour les différentes parties prenantes de la chaîne agroalimentaire. Ce virage numérique est
plutôt très bien perçu au Québec. Les enjeux relatifs au numérique dans le secteur agricole,
qu’ils soient de nature éthiques (sécurité et confidentialité des données, autonomie des
producteurs, etc.), institutionnels (souveraineté des données), économiques (main-d’œuvre et
relève) ou organisationnels (formation, transfert de connaissance, etc.) n’entachent pas du tout,
ou très peu, cette perception. Cependant ces enjeux sont bien réels et pourraient affecter la
confiance des producteurs de partager leurs données par exemple. Or, pour tirer le plein
potentiel des données, un partage de ces dernières semble incontournable. Loin de consister
uniquement en un simple transfert d’information, le partage des données agricoles doit avant
tout donner l’opportunité de renforcer la coopération entre les créateurs de ces données et les
experts compétents pour les analyser afin de créer de la valeur ajoutée et des opportunités
commerciales au sein de la chaîne agroalimentaire. Afin de profiter pleinement des bénéfices
liés au partage des données, il est primordial d’instiller et de préserver la confiance entre les
acteurs de la chaîne, en premier lieu desquels les producteurs. Le partage doit se faire de
manière organisée et observer certaines règles, notamment en matière d’éthique, de
transparence et de sécurité. Dans ce contexte, plusieurs initiatives de réglementation, de
portails de partage, de charte des bonnes pratiques et autres labels ont récemment émergé un
peu partout dans le monde, avec une certaine concentration en Europe et aux États-Unis.
Savoir précisément où se trouvent les données, à qui elles appartiennent, comment seront-elles
utilisées, par qui, et quelles sont les autorités légales et morales pour garantir leur intégrité, sont
des questions restant pour l’heure sans réponse nette. Face à ces interrogations, l’industrie
tente de s’organiser elle-même avec la diffusion de chartes servant de guides de bonnes
pratiques, des chartes produites avec la participation d’acteurs majeurs du secteur. Ces chartes
présentent l’intérêt d’aider à instiller la confiance dans le secteur agricole, en particulier elles
contribuent à rassurer les agriculteurs que leurs données seront traitées de manière sécuritaire.
Apportant une réponse aux manques juridiques sur ces questions, les chartes analysées dans
ce rapport constituent une référence pour évaluer les pratiques des entreprises. Leur diffusion
permet de sensibiliser les agriculteurs et l’industrie en général sur tous les enjeux relatifs à
l’utilisation et la protection des données agricoles. Elles favorisent la collaboration
150
d’organisations majeures du secteur, et à ce titre, gagnent en crédibilité du fait de leur
présence.
La faiblesse principale de ces codes de bonnes pratiques réside dans le fait qu’elles n’ont
toutefois pas valeur de loi. Des labels ont été créés afin de pallier cette faiblesse et donner un
incitatif pour les fournisseurs de services de se mettre en conformité avec l’ensemble des points
énumérés dans les chartes. C’est le cas notamment des Principes de Confidentialité et de
Sécurité des Données Agricoles aux États-Unis qui s’accompagnent du label Ag Data
Transparent dont le processus de certification repose sur une évaluation rigoureuse des
contrats des fournisseurs.
Dans certains pays, afin d’apporter des réponses aux enjeux entourant le partage, des
plateformes numériques d’échanges et/ou de stockage des données numériques générées sur
les exploitations agricoles ont fait leur apparition. Un portail répond à plusieurs problématiques
en mettant à disposition de l’ensemble des acteurs œuvrant dans le secteur agricole une
interface de mise en commun de données variées relatives à l’agriculture. Ainsi, des données
de différentes natures qui finissent parfois oubliées en silo et qui demandent du temps et des
moyens pour être exploitées peuvent y être agrégées et valorisées, pour le bénéfice des
producteurs d’abord mais aussi de l’ensemble du secteur. Comme la pénurie de données est
vécue comme un frein à la recherche et au développement des nouvelles technologies
numériques appliquées au secteur agricole, la création et la démocratisation d’un tel outil
peuvent apparaître comme un élément catalyseur du virage numérique en agriculture. À cet
égard, les plateformes Api-Agro en France et Agrimetrics au Royaume-Uni constituent des
outils soutenus par des autorités publiques, mis en place dans une optique de soutien à la
recherche et à l’innovation. Les exemples de plateformes d’échange de données numériques
agricoles cités dans ce rapport montrent qu’elles sont le fruit d’initiatives très récentes, ce qui
rend quelque peu prématurée la mesure précise de leur impact sur les filières agricoles. En
outre, la mise en place d’une plateforme d’échange de données numériques dans le secteur
agricole n’est pas sans présenter certains défis en termes de participation, de fonctionnalités,
de gouvernance et de financement.
Enfin, bien que les personnes interrogées se distinguent par leur degré d’alarmisme quant à
l’urgence d’agir pour favoriser et encadrer le numérique, tous s’accordent à dire que le secteur
agricole doit décupler ses efforts sur plusieurs fronts pour activement prendre part aux
transformations qui s’opèrent dans le secteur. Les acteurs et les producteurs interrogés dans le
cadre de cette recherche croient que l’État devrait dans un premier temps encourager la
transformation du secteur en fournissant connaissances et ressources pour développer une
expertise locale et garantir des infrastructures fonctionnelles. Dans un deuxième temps, ils sont
d’avis que l’État devrait répondre aux enjeux éthiques et institutionnels entre autres en
développant un cadre réglementaire et en informant/sensibilisant les producteurs sur les
impacts des enjeux d’une agriculture fortement basée sur la donnée.
Pour toutes les entités que nous avons rencontrées, assurer la souveraineté alimentaire du
Québec et la compétitivité du secteur agricole québécois passe nécessairement par le fait de
151
saisir les opportunités offertes par le virage numérique et participer activement au
développement de ses technologies et des bonnes pratiques. S’engager dans le virage
numérique représente un très grand défi pour tout le secteur agricole québécois. Il ne s’agit pas
d’adopter une nouvelle pratique ou d’acheter une nouvelle machinerie seulement. Pour
atteindre le plein potentiel du numérique, de nouvelles compétences et réflexes doivent être
développés. Les données produites doivent être traitées et analysées pour en faire des outils
pertinents. Tout cela requiert du temps : du temps pour se former et comprendre, du temps pour
évaluer les besoins et du temps pour s’adapter à ces nouveaux outils.
Le présent rapport devrait ainsi grâce à tous les éléments analysés, aider les décideurs et
l’ensemble des acteurs du secteur agricole dans leur prise de décision quant à l’utilisation et à
la gestion des nouvelles technologies numériques en agriculture avec comme objectif afin de
s’assurer que cette industrie demeure très compétitive.
152
14 Annexes
14.1 Annexe 1 - Certificat éthique
EXT!
14.2 Annexe 2 - Formulaire d’information et de consentement
Titre du projet de recherche : Enjeux du numérique dans le secteur agricole québécois (projet de
recherche financé par CIRANO)
Équipe de recherche :
Nom de la responsable et directrice de recherche : Nathalie De Marcellis-Warin
École Polytechnique de Montréal
C.P. 6079, succ. Centre-ville Montréal (Québec) H3C 3A7
Tél. (514)340 4711 poste 4127 Fax. (514) 985-4039
Adresse courriel : [email protected]
Préambule :
Avant d’accepter de participer à ce projet et de signer ce formulaire d’information et de consentement,
veuillez prendre le temps de lire, de comprendre et de considérer attentivement les renseignements qui
suivent. Nous vous invitons à poser toutes les questions que vous jugerez utiles au directeur de
recherche ou aux autres membres de l’équipe de recherche et à leur demander de vous expliquer tout
mot ou renseignement qui ne serait pas clair.
154
recevoir un exemplaire du rapport contenant les conclusions de l’analyse.
Compensation financière :
Vous ne recevrez aucune compensation monétaire pour votre participation à ce projet de recherche.
Confidentialité :
Suite à votre entrevue, le chercheur responsable du projet recueillera et consignera les réponses aux questions
auxquelles vous aurez répondu. Seuls les renseignements nécessaires à la bonne conduite du projet de recherche
seront recueillis dans le cadre de la présente étude. Aucun nom ou position dans
l’institution/organisme/entreprise de personnes rencontrées ne sera associé aux réponses colligées et par
conséquent aucun nom ou position ne sera cité dans le rapport.
Tous les renseignements recueillis au cours du projet de recherche demeureront strictement confidentiels
dans les limites prévues par la loi. Si les chercheurs utilisent dans le rapport des données ou de
l’information fournis pendant l’entrevue en y associant le nom de votre institution/organisme/entreprise, ils
devront s’assurer au préalable d’avoir eu le consentement écrit de votre institution/organisme/entreprise
accordant l’utilisation de ces informations. Dans le but de ne pas commettre d'erreurs ou de ne pas
divulguer d'informations confidentielles, les chercheurs demanderont également une
approbation/validation quant aux informations et données citées dans le rapport avant sa publication.
Les informations et données brutes seront conservées informatiquement de façon confidentielle sur une
période de 10 ans sur le serveur sécurisé du CIRANO et seuls les chercheurs identifiés à l’étude y auront
accès. Ces données seront par la suite détruites à la fin de la période de conservation de 10 ans. Les
données du projet de recherche pourront être publiées dans des revues scientifiques ou partagées avec
d’autres personnes lors de discussions scientifiques. Toutefois, aucune publication ou communication
scientifique ne renfermera quelque information que ce soit pouvant permettre de vous identifier. Vous
avez le droit de consulter les informations que nous aurons recueillies auprès de vous pour vérifier
l’exactitude des renseignements collectés aussi longtemps que le chercheur responsable du projet de
recherche, ou l’établissement détient ces informations.
À des fins de surveillance et de contrôle, le projet de recherche pourra être évalué par une personne
mandatée par le Comité d'éthique de la recherche de l’École Polytechnique de Montréal ou encore une
personne mandatée par les organismes subventionnaires de recherche. Toutes ces personnes et ces
organismes adhèrent à une politique de confidentialité.
155
Personnes-ressources :
Si vous avez des questions concernant le projet de recherche, vous pouvez communiquer avec Nathalie
de Marcellis-Warin au (514)340 4711, poste 4127 ou encore par courriel à nathalie.demarcellis-
[email protected].
Si vous avez des questions concernant votre participation au projet de recherche, vous pouvez
communiquer avec la présidente du Comité d’éthique de la recherche de l’École Polytechnique, Mme
Delphine Périé-Curnier, au (514) 340-4711, poste 4437 ou encore par courriel à
[email protected]
Consentement :
J’ai pris connaissance du présent formulaire d’information et de consentement. Je reconnais qu’on m’a
expliqué clairement la nature de ma participation au projet de recherche, qu’on a répondu à mes
questions et qu’on m’a laissé le temps voulu pour prendre une décision. Je consens à participer à ce
projet de recherche aux conditions qui sont énoncées dans le présent formulaire dont on m’a remis une
copie.
_________________________________________________________________
Nom et signature du participant de rechercheDate
Je certifie que j’ai a expliqué au participant la nature de sa participation au présent projet de recherche,
répondu aux questions qu’il avait à cet égard et lui ai clairement indiqué qu’il demeurait libre de mettre un
terme à sa participation à tout moment, et ce, sans subir le moindre préjudice. Je m’engage, avec
l’équipe de recherche, à respecter les modalités décrites dans le présent formulaire d’information et de
consentement et déclare en avoir remis une copie signée au participant.
_________________________________________________________________
Nom et signature du chercheurDate
156
14.3 Annexe 3 – Guide d’entrevue pour les acteurs du secteur agricole québécois
Note : Pour l’ensemble des questions, nous utilisons la terminologie “ organisme/association” mais en fonction de l’interlocuteur
rencontré, il pourra également s’agir des membres de l’organisme/association ou encore d’une entreprise.
Partie 3 : Potentiel et utilisation actuelle des nouvelles technologies numériques pour votre
organisme / association
● Votre organisme/association est-il touché par le développement des technologies dans les
domaines suivants : bio-conception, pilotage par les données, traçabilité, logistique ?
● Votre organisme/association sera-t-il avantagé par l’arrivée et la généralisation de ces
technologies dans le monde agricole, ou sera-t-il menacé ?
● Décrivez votre utilisation actuelle de ces technologies.
● Quels sont les freins au développement de ces technologies dans les activités de votre
organisme/association ?
157
● Investir dans la recherche pour soutenir les innovations liées à l’utilisation de l’intelligence
artificielle
● Accompagner et soutenir financièrement les agriculteurs établis pour aider à la transition
numérique
● Organiser la formation de la relève
158
14.4 Annexe 4 – Questionnaire d’enquête en ligne pour les producteurs en serre
du Québec
Utilisation actuelle
Q2 Dans le futur, croyez-vous que les technologies numériques deviennent de plus en plus
importantes dans le secteur de la production en serre?
• Oui
• Non
• Ne sais pas
Q3 Votre ferme a-t-elle recourt à des outils ou des services utilisant des technologies numériques
de précision, de la machinerie automatique ou de la robotique?
• Oui, sur l’ensemble de ma ferme
• Oui, mais juste sur une portion de ma ferme
• Non, j’ai déjà essayé mais j’ai arrêté
• Non
Q3a En général, considérez-vous que les technologies numériques que vous utilisez sont ... ?
• Très rentables
• Rentables
• Moyennement rentables
• Peu rentables
• Pas du tout rentables
• Je ne sais pas
• Autre
Q3b Quels paramètres sont mesurés ou quelles opérations culturales sont réalisées sur votre
ferme grâce aux outils numériques?
159
Q4 Utilisez-vous des services liés à ces technologies? Si oui, lesquels?
• Analyse des données conduisant à des recommandations en temps réel pour la prise de
décision
• Système d’ajustement automatique de température, et/ou d’humidité, et/ou du taux de CO2
• Amélioration de la qualité des substrats (fertilisation ciblée)
• Amélioration de la topographie des champs (nivellement, etc)
• Réduction de la pollution diffuse et des GES
• Aucun
• Autre:
Q4a Est-ce que vos serres sont équipées de système d'ajustement automatique de température,
et/ou d'humidité, et ou du taux de CO2?
• Oui
• Non
• Ne sais pas
Q4b Êtes-vous automatiquement avisé(e), par exemple sur votre téléphone intelligent, d'erreurs,
de bris, de problèmes, d'alertes, ou d'autres paramètres comme la température et/ou l'humidité
et/ou le taux de CO2 de vos serres?
• Oui
• Non
• Ne sais pas
Q6 L'éventail de fournisseurs proposant des technologies et des solutions pour la ferme peut
créer des situations d'incompatibilité entre différentes technologies ou des problèmes
d'intégration harmonieuse. Indiquez quelle affirmation décrit le mieux vos installations:
• J'utilise les logiciels, technologies, et services d'un seul fournisseur pour éviter les problèmes de
compatibilité
• Je fais appel à plusieurs fournisseurs de logiciels, technologies, et services, mais je n'ai pas de
problème de compatibilité
• Je fais appel à plusieurs fournisseurs et j'ai des problèmes de compatibilité que j'arrive à régler
relativement facilement (par exemple manipulations ou étapes supplémentaires pour
transférer/transformer les données)
• Je fais appel à plusieurs fournisseurs et j'ai des problèmes importants de compatibilité
• Autre
Q7 Croyez-vous que vous utilisez le plein potentiel des technologies numériques que vous
employez?
• Oui
• Non
• Je ne sais pas
160
• Cable modem
• Sans-fil fixe
• Sans-fil mobile
• Service satellite
• Fibre optique
• Je ne sais pas
• Autre:
Q9 Quel est votre niveau de satisfaction vis-à-vis de votre service de connexion à Internet?
• Très satisfait
• Plutôt satisfait
• Neutre
• Plutôt insatisfait
• Très insatisfait
Q10 Quel est votre niveau de satisfaction vis-à-vis de la couverture de votre service de téléphonie
cellulaire?
• Très satisfait
• Plutôt satisfait
• Neutre
• Plutôt insatisfait
• Très insatisfait
• Je n’ai pas de couverture réseau
Q10a Qui s’occupe de la gestion des données produites par votre ferme? (données sur la
production, données sur la productivité, résultats des expertises en laboratoire, etc.)
• Ma ferme/Je m'en occupe moi-même
• Mon(mes) détaillant(s) d’équipement
• Mon(mes) détaillant(s) d’intrant de culture
• Mon(mes) consultant(s)/expert(s)-conseil(s)
• Personne ne s’occupe de la gestion des données de ma ferme
• Autre:
Q10b Employez-vous des ressources particulières, du personnel, ou des services pour prendre en
charge sur le long terme la conservation d’un historique de données pour fin d’analyse?
• Oui
• Non
• Je ne sais pas
Q10cTrouvez-vous qu'il est important de faire une sauvegarde régulière des données de votre
ferme?
• Oui
• Non
• Je ne sais pas
161
Déterminants de l’adoption d’outils numériques
Q11 Évaluez les principaux bénéfices des technologies numériques employées sur votre ferme:
162
Q12 Indiquez si les contraintes à l’adoption de technologies identifiées ci-dessous sont faibles,
moyennes ou fortes en ce qui vous concerne:
J’ai fait des essais mais ils n’ont pas été concluants
163
Réseau et transfert de connaissance
Q14 Comment vous renseignez-vous pour avoir de l’information sur comment utiliser les nouvelles
technologies numériques ?
• Autres producteurs
• Démonstrations ou portes-ouvertes sur une ferme
• Expo-champs
• Salon de l’agriculture du Québec (Centre de Foires)
• Ateliers, séminaires, rencontres, ou conférences
• Fournisseurs d’intrants
• Fournisseurs d’équipements
• Consultants indépendants
• MAPAQ (Ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec)
• Magazines et journaux professionnels
• Recherches personnelles
• Universités
• Mon Club-conseil
• UPA Producteurs en serre du Québec
• CRAAQ (Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec)
• Internet
• Médias sociaux
• Autre:
Q15 Considérez-vous que vous soyez suffisamment formé et informé pour bien utiliser les technologies
présentes sur votre ferme?
• Oui
• Non
• Je ne sais pas
164
Sécurité et confidentialité des données
Q17 Voyez-vous dans l’utilisation des technologies numériques une perte d’indépendance en tant que
producteur agricole face aux fournisseurs de ces technologies?
• Oui
• Non
• Je ne sais pas
Q18 Avec qui vous sentez-vous confortable pour partager les données produites par les technologies
numériques que vous utilisez ?
• Proches parents ou membres de la famille
• Autres producteurs
• Fournisseurs d’équipement
• Fournisseurs d’intrants
• UPA Producteurs en serre du Québec
• Ma coopérative
• Mon Club-conseil
• Chercheurs universitaires
• MAPAQ
• Agriculture et agroalimentaire Canada
• CRAAQ
• Autre:
Rôle du gouvernement
Q19 Quel devrait être le rôle du gouvernement dans le développement des technologies numériques en
agriculture aujourd’hui et dans le futur?
• Fournir les ressources et les infrastructures pour permettre aux données des agriculteurs d’être
protégées
• S’intéresser aux questions de propriété des données
• Développer une infrastructure réglementaire permettant le développement harmonieux de ces
technologies
• Réfléchir aux questions relatives à l’indépendance et d'autonomie des producteurs vis-à-vis des
différents acteurs de cette révolution numérique
• Réfléchir aux enjeux éthiques liés à l’utilisation des nouvelles technologies dans le domaine
agricole
• Informer et sensibiliser les Québécois au développement de ces technologies dans le secteur
agricole
• Investir dans la recherche pour soutenir les innovations liées à l’utilisation de l’intelligence
artificielle dans le milieu agricole
• Accompagner et soutenir financièrement les agriculteurs établis pour aider à la transition
numérique
• Encourager la formation de la relève
• Assurer un meilleur lien entre recherche et la formation des conseillers et des producteurs sur
les nouvelles technologies (intelligence artificielle, science des données, etc.)
• Soutenir le développement de services et d’outils qui aident à la prise de décision agricole
• S’assurer que les infrastructures techniques (réseau, Internet, services) soient adéquates et
performantes
165
• Aucun rôle
• Autre:
Données socio-économiques
166
Q22 Quel est votre âge?
• 25 ans et moins
• 25 - 34 ans
• 35 - 44 ans
• 45 - 54 ans
• 55 - 64 ans
• 65 ans et plus
167
14.5 Annexe 5 - Descriptions des données sociodémographiques des
échantillons des trois enquêtes
ES[!
Quel est votre âge? !"#$%#&$'()%*+,#*(&$
Réponse Décompte Pourcentage
25 ans et moins 9 7,4%
,-%./0%12%7890%% &"!$%
25 - 34 ans 23 19,0%
35 - 44 ans 45 37,2% --%6%,#%./0%% ,",$%
45 - 54 ans 34 28,1%
55 - 64 ans 8 6,6% #-%6%-#%./0%% *+"&$%
65 ans et plus 2 1,7% )-%6%##%./0%% )!"*$%
*-%6%)#%./0%% &'"($%
D92;1% !"#$%
?578B31%9/5C1;052.5;1%% &*"#$%
?@A%% -,"*$%
Nombre d’employés sur la ferme:
Réponse Décompte Pourcentage ?@<%% -"+$%
1 27 22,3% <1=4/>.5;1%% &,"-$%
2 34 28,1% :;53.5;1%% &"!$%
3 27 22,3%
4 et plus 29 24,0% ("($% &("($% *("($% )("($% #("($% -("($% ,("($%
Sans réponse 4 3,3%
-*#.$#&,$.#$/)46(#$%7#4'.)83&$9*0$,(2120..#/,$
Avez-vous une relève?
Réponse Décompte Pourcentage &*($.2$:#(4#$5$
Oui 60 49,6%
Non 17 14,0%
<./0%;E74/01% )")$%
Peut-être 44 36,4%
#%12%7890%% *#"($%
)% **")$%
*% *+"&$%
&% **")$%
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:1926H2;1%% ),"#$%
G4/%% &#"($%
F95%% #'",$%
ESV!
ENQUÊTE AUPRÈS DES PRODUCTEURS EN SERRE DU QUÉBEC
U7CM6<BC3%M8%W867/%84%M8%[email protected]/%%%% !)"($%
Quel type de production réalisez-vous sur votre ferme?
Réponse Décompte Pourcentage U7CM6<BC3%M8%V7624/%84%@J96K8/%%%%% #&"T$%
Production biologique 8 17,0%
Production conventionnelle 32 68,1% '"'$% ,"'$% &'"'$%&,"'$%)'"'$%),"'$%#'"'$%#,"'$%!'"'$%!,"'$%
Les deux 7 14,9%
3-*//*'*)+'/0')-4*,<:$*'5*'.%+,*'
*=4/%$+0;%&8'
1.3/%7J?C3/8% !"#$%
U@6/%M8%)'%'''%K)%%%% &'"($%
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Z8%)%''&%K)%[%,%'''%K)%%%% )&"#$%
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E`%!
!"#$%#&$'()%*+,#*(&$
Quel est votre âge?
Réponse Décompte Pourcentage ',%-./%01%678/%%%% #&"'$%
25 ans et moins 1 2,1%
25 - 34 ans 5 10,6% ,,%5%'+%-./%%%% !*"+$%
35 - 44 ans 14 29,8%
+,%5%,+%-./%%%% !*"+$%
45 - 54 ans 11 23,4%
55 - 64 ans 11 23,4% *,%5%++%-./%%%% !(")$%
65 ans et plus 5 10,6%
!,%5%*+%-./%%%% #&"'$%
?467B20%8.4C0;/41-4;0%%%% *'"!$%
Quel est le nombre d’employés qui travaillent sur la ferme ? ?@A%%%% *#"($%
Réponse Décompte Pourcentage
Moins de 5 employés 17 36,2% ?@<%%%% #9"&$%
Entre 5 et 9 employés 10 21,3%
Entre 10 et 49 employés 16 34,0% <0=3.>-4;0%%%% #&"'$%
Plus de 50 employés 4 8,5%
:;42-4;0%%%%% +"*$%
@.1;0%#&%01%+(%02673EF/%%%% *+"&$%
@.1;0%,%01%(%02673EF/%%%% !#"*$%
D34./%>0%,%02673EF/%%%%% *'"!$%
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:0815I1;0%%%% +!"'$%
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&"&$% ,"&$% #&"&$% #,"&$% !&"&$% !,"&$% *&"&$% *,"&$% +&"&$% +,"&$%
E`E!
ENQUÊTE AUPRÈS DES PRODUCTEURS DE GRAINS DU QUÉBEC
!"#$%&'%(')*'+,%-.*'/0'1*,2*'
Dans quelle région se trouve votre ferme?
Réponse Décompte Pourcentage ?945891N71O7KI9=$$ +%"(#$
Bas-Saint-Laurent 0 0,0% ED45K8K:39$G7905$$ ,("!#$
Saguenay–Lac-Saint-Jean 4 8,7% ED45K8K:39$F05$$ ,*"+#$
Capitale-Nationale 2 4,3% 6/7894CN90$$ +"+#$
Mauricie 3 6,5% 6/4/7N3S89$$ %"&#$
Estrie 1 2,2% 6/T/A$$ !"!#$
Outaouais 0 0,0% ?R/7N3S891H@@/A/=R90$$ ,!"-#$
Abitibi-Témiscamingue 0 0,0% P/0@K039<QA901N91A/1E/N9A9349$$ !"!#$
Côte-Nord 0 0,0% BD8N$N7$O7KI9=$$ !"!#$
Nord du Québec 0 0,0% ?M591BD8N$$ !"!#$
Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine 0 0,0% HI3CI31JKL30=/L34:79$$ !"!#$
Chaudière-Appalaches 5 10,9% G75/D7/30$$ !"!#$
Laval 0 0,0% F05839$$ +"+#$
Lanaudière 4 8,7% E/783=39$$ )"*#$
Laurentides 1 2,2% ?/@35/A91B/CD4/A9$$ '"(#$
Montérégie Est 7 15,2% 2/:794/;<6/=12/3451>9/4$$ %"&#$
Montérégie Ouest 6 13,0% ./012/34516/78945$$ !"!#$
Centre-du-Québec 13 28,3%
!"!#$ *"!#$ ,!"!#$ ,*"!#$ +!"!#$ +*"!#$ (!"!#$
3-*'4,%5-$)*67.%-)')-,'.%+,*'1*,2*8'
Que produisez-vous sur votre ferme?
,("!#$
Réponse Décompte Pourcentage VD788/:9$$ '"(#$
!"!#$
Soya 6 13,0% UD30$$ +"+#$
Maïs 22 47,8% '"(#$
Blé 4 8,7% HTD349$$ )"*#$
Canola 0 0,0% !"!#$
Avoine 3 6,5% .AK$$ %"&#$
Orge 2 4,3% '&"%#$
Pois 1 2,2% 2D;/$$ ,("!#$
Lentilles 0 0,0% !"!#$ ,!"!#$ +!"!#$ (!"!#$ '!"!#$ *!"!#$ )!"!#$
Fourrage 2 4,3%
Autre 6 13,0%
3-*/'+94*'5*'4,%5-:;%&',"0/$)*67.%-)')-,'
.%+,*'1*,2*8'
Quel type de production réalisez-vous sur votre ferme?
Réponse Décompte Pourcentage
Production biologique 2 4,3% 690$N97X$$ '"(#$
Production conventionnelle 42 91,3%
Les deux 2 4,3%
U8DN7=CD4$=D4T94CD449AA9$$ -,"(#$
U8DN7=CD4$I3DAD:3W79$$ '"(#$
Quelle est la superficie de votre exploitation?
Réponse Décompte Pourcentage
Moins de 10 hectares (moins de 24,7 acres) 1 2,2% !"!#$ ,!"!#$ +!"!#$ (!"!#$ '!"!#$ *!"!#$ )!"!#$ &!"!#$ %!"!#$ -!"!#$,!!"!#$
10 à 24,9 hectares (24,7 à 61,6 acres) 2 4,3%
25à 49,9 hectares (61,7 à 123,5 acres) 3 6,5%
50 à 99,9 hectares (123,6 à 247,0 acres) 12 26,1% 3-*//*'*)+'/0')-4*,<:$*'5*'.%+,*'*=4/%$+0;%&8'
100 à 199,9 hectares (247,1 à 494,1 acres) 9 19,6%
200 hectares et plus (494,2 acres et plus) 19 41,3%
+!!$R9=5/890$95$@A70$Y'-'"+$/=890$95$@A70Z$$ ',"(#$
,!!$[$,--"-$R9=5/890$Y+'&",$[$'-'",$/=890Z$$ ,-")#$
*!$[$--"-$R9=5/890$Y,+(")$[$+'&"!$/=890Z$$ +)",#$
+*[$'-"-$R9=5/890$Y),"&$[$,+("*$/=890Z$$ )"*#$
,!$[$+'"-$R9=5/890$Y+'"&$[$),")$/=890Z$$ '"(#$
ED340$N9$,!$R9=5/890$YLD340$N9$+'"&$/=890Z$$ +"+#$
!"!#$ *"!#$,!"!#$,*"!#$+!"!#$+*"!#$(!"!#$(*"!#$'!"!#$'*"!#$
E`$!
!"#$%#&$'()%*+,#*(&$
Quel est votre âge?
Réponse Décompte Pourcentage *,%-./%01%678/%% '("!$%
25 ans et moins 2 4,3%
25 - 34 ans 1 2,2% ,,%5%*!%-./%% &*"'$%
35 - 44 ans 10 21,7% !,%5%,!%-./%% &)"#$%
45 - 54 ans 13 28,3% #,%5%!!%-./%% &'"($%
55 - 64 ans 12 26,1% &,%5%#!%-./%% &"&$%
65 ans et plus 8 17,4%
&,%-./%01%234./%% !"#$%
+"+$% ,"+$% '+"+$% ',"+$% &+"+$% &,"+$% #+"+$%
;1#<=1)*&$*/#$(#.>1#$5$
90815G1:0%% &)"#$%
F3.%% &)"#$%
E84%% !#",$%
+"+$% ,"+$% '+"+$% ',"+$% &+"+$% &,"+$% #+"+$% #,"+$% !+"+$% !,"+$% ,+"+$%
E`T!
14.6 Annexe 6 – Guide d’entrevue semi-guidée auprès de représentants d’autres
juridictions
Note: Pour l’ensemble des questions, nous utilisons la terminologie “ organisme/association” mais
en fonction de l’interlocuteur rencontré, il pourra également s’agir des membres de
l’organisme/association ou encore d’une entreprise.
174
• Aide à la prise de décision et responsabilité
• Cadre réglementaire
• Autonomie et assurabilité
• Incitatifs et aides financières
175
14.7 Annexe 7 - Tableau récapitulatif des caractéristiques de la transformation
numérique dans d’autres juridictions
176
Entreprises phares en Démarche
agriculture numérique Norme, contrat, Formation, Centre de recherche, gouvernementale,
et données Portail de données Charte, code Label lois éducation Think Tank commission
Pays
- Saarland
-Data Hub DKE
University - Big
- Berlin Big Data Center - Deutsche
Data Hub Agrirouter Data Analytics
Allemagne Disy Agrarforschungsallianz
de DKE Technical
- Informationssysteme (DAFA)
University of
GmbH
Munich (TUM)
- Australia's
Competition
and Consumer
Act 2010
- Centre for
Australian - Society of Precision
eResearch and - Data Availability
Competition Agriculture Australia
Digital Innovation and Use in
and Consumer (SPAA)
(CeRDI) at Australia (2017)
Commission - CSIRO Data 61
- DAS (Digital Federation (Productivity
(ACCC) - Precision - Australian Centre for
Agriculture Service) University Australia - National Farmers' Commission)
- Data Sharing Agriculture Intellectual Property
Australie - AgDNA (FedUni) Federation
and Release Laboratory (PA in Agriculture (ACIPA)
- Phoenix (AGDATA - Australian Bureau (NFF) - Accelerating
Framework (w/ Lab) Society of Precision
AUSTRALIA) of Agricultural and Precision to
Consumer Data Agriculture Australia
Resource Economics Decision
Right) (SPAA)
and Sciences + Agriculture
- Privacy Act Accelerating Precision
Australian Bureau of (Reports)
(case Aussie to Decision
Statistics
Farms Inc.) Agriculture (Reports)
- Consumer
Data Right
(CDR)
177
-The Agricultural - California
- The Agricultural Data
Data Coalition (ADC) Consumer
Coalition (ADC)
-Grower Information Privacy Act of
- Agrian
Services Cooperative 2018 (CCPA)
FarmBeats (Microsoft)
(GiSC) - Law of
- FarmLogs
-Growers Ag Data copyright (Data Open Ag
- AGDATA (différent de Janzen Ag Law
Cooperative (GADC) - AgData ownership) Technology
Ag Data Transparent) - Privacy and PrecisionAg Institute
[AgXchange] Transparent - US Agriculture and Systems
États-Unis - The Climate Security Principles (State of U.S. Precision
-Open Ag Data Data Act of (OATS) Center
Corporation (Google) for Farm Data Agriculture Report)
Alliance (OADA) 2018 (Purdue
- aWhere AgGateway
-National Oceanic - Sherman University)
- OnFarm
Atmospheric Antitrust Act
- Agribotix
Administration - Legal cases of
- Conservis
(NOAA) chicken farmers
- PrecisionAg Institute
- AgGateway’s vs. processors
- InfoAg
ADAPT (2 states)
- AGROSYST
- AIRINOV
- API-Agro - agrIdées
- Ekylibre
(AgGate) - Renaissance
- LE CUBE
- Data.gouv (mission numérique
- GARI
ETALAB) - La Ferme Digitale
- Agriconomie Charte Data-Agri Label Data Agri
France - Portail AgriMatrice - Observatoire des
- Weenat
connecté à la usages de l'agriculture
- Miimosa
Plateforme numérique
- Les Grappes
Collaborative de - ChaireAgroTIC
- Terroir Mon Amour
Traçabilité (Terena
& GS1)
-Agriisrael
-The Israel Innovation
- Prospera Authority
Central Bureau of
Israël - AgriTask par ScanTask -Canada-Israel
Statistics (Census)
- Taranis Industrial Research
and Development
Foundation (CIIRDF)
178
- Agricultural
Research Center
of the
- Routrek Networks,
- Japan Plant Factory National
Inc. - e-stat.gp.jp - Hokkaido
Association (JPFA) Agriculture and
- Japan Cloud (Census) University
Japon - The Agricultural Food Research
Consortium (JCC) - Japan Cloud - Chiba
Academy of Japan Organization
- SabaiX by PlantX Consortium (JCC) Univeristy
(AAJ) - East Meets West
- Factory 808
(Networking
Event)
- AgroFood Portal
Pays-Bas (Census)
- AGRIMATIE
- National Institute of
Agricultural Botany
(NIAB)
- Agri-EPI
(Engineering,
Law of Scotland's
Royaume- Precision and
Agrimetrics copyright (Data Rural College
Uni Innovation Centre)
ownership) (SRUC)
- CIEL (Centre for
Innovation Excellence
in Livestock)
- CHAP (Crop Health
and Protection)
179
- The Danish
Agency for Data
Supply and
- AgroIT -University of Efficiency (SDFE)
- Data-ethics
- Danish Open Data Copenhagen's - The Centre for
6 principles for label SEGES
Initiative Department of Technology and
Danemark artificial (Initiative 1.6 in (Knowledge Center for
“Basic Data Food and Data Strategy
intelligence AI Strategy by Agriculture)
Program” Resource Danish Agency for
Danish GVT)
(Grunddata) Economics Digitisation
- The Danish
Agricultural
Agency
- EPRS | European
- AgroIT
EU Code of conduct Parliamentary
- Données - Articles 42 et General Data
on Research Service,
économiques 43 du RGPD Protection
agricultural data Smart-AKIS
Europe générales évoquent les Regulation 2016
sharing by (dashboard) -Science and
Foodie Project labels (GDPR / RGPD)
contractual Technology
(farm-oriented open Mai 2018
agreement Options
data in europe)
Assessment
- agINFRA
Federal Institute of
Agricultural
Autriche
Economics
(AWI)
- Institute of
Agricultural
Economics and
Chine Development (IAED)
- Chinese Academy of
Agricultural Sciences
(CAAS)
180
14.8 Annexe 8 - Recommandations de la Mission Bournigal dans la mise en place
d’un portail de données pour l’innovation en agriculture
(Bournigal, 2017)
2- Référencer des données publiques, des données de la recherche et des données privées
3- Faire du guichet un hub de données distribuées chez leurs fournisseurs, en travaillant en mode « réservoir
de données/ médiateur » pour interconnecter les données isses de sources différentes
4- Établir un plan d’évolution du portail, focalisé sur la performance des recherches, via la construction
d’ontologies
7- Développer des services offrant un retour rapide vers le fournisseur de données (cloud, magasin
numérique), en impliquant la profession agricole dans une démarche de « design thinking »
8- Assurer l’anonymat des données sensibles lorsque celui–ci est demandé ou requis
10- Sensibiliser la profession agricole à l’agriculture numérique et à l’intérêt de la démarche pour qu’ils
demandent aux entreprises qui gèrent leurs données de les ouvrir au portail
11- Mener des recherches complémentaires pour créer des ontologies et évaluer la valeur le long de la chaîne
de valeur de la donnée agricole.
13- Communiquer régulièrement vers les fournisseurs de données, en particulier les agriculteurs
14- Encourager les liens entre le portail et les dispositifs de recherche pour une fertilisation croisée
15- Encourager la réutilisation entre le portail et les autres initiatives proches (Agrosyst, API AGRO)
181
14.9 Annexe 9 New-Zealand Farm Data Code of Practice
The Code of Practice is intended for use by organisations that collect, hold, or share data about
primary producers and their farming operations. By complying with the Code of Practice,
organisations will agree to:
- make disclosures to primary producers and other end users about the rights that the
parties have in the data, rules and processes for data sharing, about data security and the
legal jurisdiction in which data is kept; and
- implement a set of practices that provide primary producers with confidence that data
pertaining to their farming operations is secure, managed according to agreed terms and
for agreed purposes, and accessible under appropriate terms and conditions.
The Code of Practice itself does not define standards for data interchange, but rather requires that
data is interchanged using industry agreed standards or other appropriate standards so that it may
be used effectively.
The Code of Practice also defines the means by which compliance with the Code can be assessed,
and the terms under which a compliance mark and statement may be used by compliant
organisations.
APPROACH
[…]
DISCLOSURES
This section of the Code of Practice covers disclosures that an organisation must make in order to
be compliant with the code. Disclosures must be in a language that will be readily understood by
primary producers.
182
Corporate Identity
An organisation which complies with this Code of Practice shall disclose to primary producers:
company name and registered office address; contact and web address information; and the
contact person(s) available within the business to deal with enquiries regarding data and the Code
of Practice.
Rights to Data
An organisation that complies with this Code of Practice shall disclose to primary producers: what
rights the organisation asserts in relation to the data; what rights the primary producer has in
relation to the data; under what terms data is made available to third parties who are authorised or
acting on behalf of primary producers; under what terms is data made available to other third
parties; and the definition of raw versus derived and aggregate data in relation to the above terms.
Security Standards
An organisation that complies with this Code of Practice shall disclose to primary producers: that
policies are in place to ensure all staff and subcontractors comply with security and privacy best
practices; that the organisation complies with ISO 27001, or the NIST Engineering Principles for
Information Technology Security (NIST Special Publication 800-27 Rev A) or has an equivalent
information security management system to protect against data being compromised; and that an
appropriate back-up and recovery regime is in place.
Data Access
An organisation that complies with this Code of Practice shall disclose to primary producers:
- the means by which a primary producer may view, correct, or extract data pertaining to
their farming operation;
- the means by which delegated access by third parties on behalf of a primary producer is
achieved;
- the means by which parties may apply for access to data;
- the means by which a primary producer may migrate data pertaining to their farming
operations to another service; and
- the electronic data interchange standards and formats which are supported.
Data Sovereignty
An organisation which complies with this Code of Practice shall disclose to primary producers:
- the legal jurisdiction in which data is stored; and
- the legal jurisdiction where back-ups are stored.
PRACTICES
183
An organisation that complies with this Code of Practice shall:
- validate the identity and authorisation of any person accessing data;
- interchange data using relevant industry data interchange standards; and
- implement forms of data transfer that are recognised by those experienced in the industry
as being not generally susceptible to third party interception or eavesdropping
5.3. Security
- An organisation that complies with this Code of Practice shall:
- implement policies to ensure all staff and sub-contractors comply with security and privacy
best practices;
- ensure the organisation complies with ISO 27001, NIST 800-27 Rev A, or has an
equivalent information security management system that considers risks, defines policies
and technical security procedures appropriate to the sensitivity of the data stored;
- implement a data back-up and recovery regime that is appropriate for the scale, sensitivity,
and timeliness of the data stored; and
- keep records of any potential breaches or unauthorised attempts to access the data.
Farm Data Accreditation Ltd have confirmed that an internal self-audit plus declaration is the most
appropriate form of assessment initially, and will allow organisations to balance the costs and
benefits of aligning with the Code of Practice.
A Review Panel will assess the compliance checklist and evidence provided and make a
recommendation to FDAL. When FDAl approves accreditation, a trademark licence agreement will
be sent which must be signed and returned.
184
- ensure self-audits are conducted annually no more than 90 days prior to the anniversary
date of accreditation;
- ensure non-compliance issues are rectified prior to the anniversary date of accreditation;
and
- complete the checklist and Declaration as required in Section 6.1 and return these to
FDAL.
- FDAL shall maintain an up to date register of compliant organisations that is available on
request and supply this to all accredited organisations at least annually.
FDAL may receive complaints from primary producers and/or complying organisations.
Complainants will:
- provide their complaint in writing to FDAL;
- set out the basis of their complaint providing time, dates plus any supporting information;
and
- provide contact details for the complainant, including phone, address and email.
185
- give notification to existing primary producers, with whom the organisation interacts, that
the organisation will no longer comply with the Code of Practice; and
- within 90 days of providing notice to FDAL, remove the Code of Practice trademark from all
documentation, signage and web sites, including from older documents that may still be
accessible online (to avoid confusion)
FDAL must:
- update the register of compliant organisations accordingly; and
- advise all accredited users of the Code of Practice when there is a withdrawal from the
Register of Accredited Organisations.
186
14.10 Annexe 10 : Code de conduite européen relatif au partage de données
agricoles par contrat
Le texte ci-dessous est une reproduction textuelle du code de conduite européen relatif au
partage de données agricoles par contrat. Source : (Copa-Cogeca, CEMA, Fertilizers Europe,
CEETTAR, CEJA, ECPA, EFFAB, FEFAC, ESA, 2018)
- ATTRIBUTION DES DROITS SOUS-JACENTS AUX DONNÉES DÉRIVÉES (ÉGALEMENT APPELÉE PROPRIÉTÉ DES
DONNÉES)
Le principe de base adopté est que lorsque des données sont produites par un opérateur de la chaîne
agricole en raison de son activité ou sont commandées par ce dernier, l'opérateur en question est considéré
comme étant le créateur des données. Le droit de déterminer qui peut accéder et utiliser les données est
attribué à cet opérateur. Cette attribution ne couvre pas les données / informations générées suite au
traitement de ces données fournies par plusieurs créateurs (par exemple dans le cadre d’une agrégation),
mais la fourniture de données dans ce cadre devrait être intégrée dans un contrat. Par exemple, les droits
concernant les données produites dans l’exploitation ou au cours d’opérations agricoles sont
accordés à (« détenus par ») l'agriculteur et peuvent être amplement utilisés par celui-ci.
La nature et les moyens de collecte des différentes données agricoles déterminent les niveaux d'attribution
des droits sur les données (« propriété »). Les données ne peuvent pas être détenues comme le sont des
actifs physiques. Il est donc indispensable de définir des principes essentiels en matière d'accès aux données
agricoles et de droits d'utilisation.
Les parties (créateur, fournisseur, utilisateur, tiers) doivent signer un contrat définissant clairement les
conditions de collecte et de partage des données en fonction des besoins des parties signataires. Dans la
mesure du possible, ledit contrat doit comporter un chapitre entièrement consacré à la description du partage
de données.
Le contrat doit reconnaître le droit de toutes les parties à protéger les informations sensibles (la
propriété intellectuelle, entre autres choses) en limitant leur future utilisation ou leur futur traitement. Les
parties ne peuvent pas utiliser, traiter ou partager des données sans le consentement du créateur des
données.
Ce code reconnaît le droit du créateur des données, qu'il s'agisse d'un agriculteur ou d'une autre
partie, à bénéficier et/ou à être indemnisé pour l'utilisation des données créées dans le cadre de son
activité. Il reconnaît également la nécessité d'accorder au créateur des données un rôle de premier plan dans
le contrôle de l'accès et de l’utilisation des données créées dans le cadre de son activité et de lui donner la
possibilité de tirer parti du partage des données avec un partenaire quelconque souhaitant utiliser ses
données. Par conséquent, le contrat doit clairement établir les avantages réservés au créateur de données.
Le créateur de données pourra être indemnisé pour sa création de valeur, soit financièrement, soit sous forme
d’échange de services, de meilleurs produits ou autre, convenus entre les parties.
Tous les contrats seront rédigés dans un langage simple et compréhensible par tous pour en expliquer le
contenu et pourront être aussi accompagnés d’un document non officiel expliquant les aspects liés aux
données. Ce contrat devra préciser clairement :
- les principaux termes et définitions
- l’objectif associé à la collecte, au partage et au traitement des données
- les droits et obligations des parties en ce qui concerne les données, les règles et les processus de
partage des données, leur sécurité et le cadre juridique dans lequel les données sont conservées et
quelles sont les sauvegardes prévues pour leur stockage.
- le logiciel ou l'application adéquate et les informations sur le stockage et l'utilisation des données
187
agricoles
- les mécanismes de vérification des données de leur créateur
- les mécanismes de transparence qui permettront d’ajouter de nouvelles et/ou de futures utilisations.
La collecte, l'accès, la conservation et l'utilisation des données agricoles collectées ne pourront être effectifs
tant que le créateur des données n’aura pas donné son autorisation explicite, expresse et informée sous
forme d’un document contractuel. Le créateur de données doit être informé de manière claire et non
ambigüe dès que quelqu'un tente de collecter et de conserver ses données. Si les deux parties ont signé un
contrat, ce dernier devra spécifier les conditions selon lesquelles l'identification du créateur des données peut
être rendue possible. Dans le cas contraire, les données devront être pseudonymisées.
Le créateur de données doit autoriser l'utilisation et le partage de ses données avec des tiers et accepter
notamment des situations dans lesquelles des décisions seront prises sur la base de ses données. Les
informations seront transmises aux tiers sous la forme de données agrégées, pseudonymisées ou
anonymisées, sauf si ces informations sont requises pour pouvoir fournir le service demandé et/ou si les
conditions sont précisées dans le contrat. Sauf indication contraire dans le contrat, l'utilisateur des données
doit prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter toute possibilité de ré-identification.
Les données doivent être collectées et utilisées dans le but spécifique établi par contrat. Les
ensembles de données ne doivent pas être conservés au-delà du temps strictement nécessaire à la
réalisation des analyses prévues. Par ailleurs, les données ne seront accessibles qu'aux personnes disposant
de l'autorisation requise.
L'accès aux données, que ce soit en lecture seule ou en mode entièrement modifiable, doit faire l'objet d'un
audit strict et tout transfert ou toute modification des données (par exemple, entrée, modification,
suppression) doit être entièrement traçable, par ex. en étant associé à des métadonnées sur l'auteur et la
modification.
Le créateur de données devra pouvoir accéder facilement et de façon adéquate à ses données et être en
mesure de récupérer ensuite celles qui lui ont été attribuées (« propres ») de la même manière, sauf si les
données agrégées ne sont pas concernées par cette attribution, car elles ne sont pas uniquement basées sur
les données du créateur. Si réalisable techniquement, il est indispensable de responsabiliser le fournisseur de
données (le « collecteur ») afin qu’il mette les données à disposition de leur créateur dans un format
accessible et lisible. Si cela n'est techniquement pas faisable, le fournisseur de données devra pouvoir le
justifier.
Le créateur de données peut prétendre recevoir les données concernant ses opérations conformément au
contrat, dans un format structuré, courant et lisible sur ordinateur.
Sauf indication contraire dans le contrat, le créateur de données peut transmettre ces données à un
autre utilisateur de données. Si les parties en conviennent ainsi, et si cette opération est techniquement
réalisable, le créateur de données peut faire en sorte que les données soient directement transmises d'un
utilisateur de données à un autre.
Par ailleurs, le créateur ne devra jamais être limité lorsqu’il souhaite utiliser ses données dans
d'autres systèmes / plateformes / installations de stockage de données (portabilité des données), sauf
indication contraire précisée dans le contrat.
Par conséquent, l'utilisateur des données doit expliquer les moyens (par exemple si et comment) qui
permettront au créateur de données de visualiser, corriger, récupérer ou extraire les données. Les moyens qui
lui permettent de migrer les données relatives à ses activités agricoles vers un autre service et les normes et
188
formats d'échange des données électroniques pris en charge devront également être clairement expliqués.
Tout cela ne devant pas empêcher les limites prévues en matière d’accès aux données de la machine
ou aux données sensibles (applicable uniquement au bon fonctionnement de la machine). Tout ceci doit être
clairement précisé par contrat, par ex. entre agriculteurs / entrepreneurs et fabricants d'appareils.
Les utilisateurs de données qui contrôlent la base de données doivent impérativement disposer d’un protocole
de sauvegarde de protection des données pour les créateurs, qui ne permette pas le partage non autorisé
avec des tiers. Par ailleurs, les données à caractère personnel contenues dans les bases de données doivent
être à la fois conservées sous pseudonyme et cryptées ou protégées à l’aide de méthodes similaires. Ceci
dans le but de rendre les données moins identifiables et de réduire les risques tant au cours d’un
fonctionnement normal qu'en cas de violation de données.
Les utilisateurs de données doivent transmettre au créateur de données les coordonnées des personnes à
même de pouvoir les aider si certains points doivent être précisés ou encore pour déposer une réclamation.
Les contrats ne doivent pas être modifiés sans l'accord préalable du créateur des données. Si les
données doivent être vendues ou partagées avec un tiers non désigné à l’origine dans le contrat, le créateur
de données aura la possibilité d’accepter ou de refuser cette vente ou ce partage, sans que cela n'ait la
moindre conséquence, financière ou autre. L'utilisateur des données ne pourra vendre ou divulguer de
données à une autre partie uniquement s’il a la possibilité de reprendre et d’appliquer les conditions du contrat
signé au préalable entre l'utilisateur de données et le créateur.
Le créateur de données doit pouvoir se retirer du contrat et mettre fin ou suspendre la collecte et l'utilisation
de ses données, à condition toutefois d’avoir respecté ses obligations contractuelles. Ceci doit cependant être
clairement prévu par contrat et le créateur de données doit être informé des conséquences de ces décisions.
Soit, le retrait ou la suspension est pris en compte dès sa première demande avec effet immédiat, soit le
retrait ou la suspension ne pourront intervenir qu’après un préavis d’une durée raisonnable. Ce dernier aspect
a pour objectif de garantir au créateur de données un accès permanent à ses données durant la période de
préavis.
Si plusieurs services différents sont proposés, le créateur de données aura la possibilité d’en choisir aucun, un
ou plusieurs. Pour pouvoir permettre une prise de décision en toute connaissance de cause, l’utilisateur de
données qui offre ses services est tenu d’expliquer tous les services et fonctionnalités compris dans les
différentes options proposées.
Afin de faciliter le partage des données, ce Code encourage les partenaires de la chaîne agroalimentaire à
mettre en œuvre des outils d'aide à la prise de décision pour les créateurs de données, ainsi que pour les
utilisateurs de données, qui leur permettraient d'intégrer une gamme très étendue de données. Différents
partenaires de la chaîne alimentaire devraient ainsi s’impliquer, les créateurs de données notamment, afin de
contribuer efficacement à leur développement et mieux répondre à leurs besoins.
Le contrat doit prévoir de manière explicite les responsabilités en matière de sécurité et de confidentialité de
l’utilisateur / du fournisseur de données. L'utilisateur de données doit conserver dans la mesure du possible
une trace des données tout au long de la chaîne de valeur et partager les informations réunies avec le
créateur de données. Les collecteurs et les utilisateurs de données agricoles ne doivent donc pas utiliser ces
données à des fins illégales ou en profiter pour spéculer ou à toute autre fin.
Si les données sont utilisées pour prendre des décisions concernant le créateur de données « en tant
que personne physique » le RGPD s'applique. Par conséquent, l'utilisateur des données, qui est
189
dorénavant le responsable du traitement, est tenu de fournir au créateur de données, devenu désormais la
personne concernée (personne physique, directement ou indirectement, identifiée ou identifiable), toutes les
informations nécessaires garantissant un traitement loyal et transparent. Si la prise de décision automatisée
est utilisée pour les données à caractère personnel, la personne concernée doit en être informée, y compris
en cas de profilage, et, au moins en pareils cas, des informations utiles concernant la logique et/ou la nature
de l'algorithme doivent être fournies ainsi que l'importance et les conséquences prévues de ce traitement pour
la personne concernée. Les données ne seront pas utilisées pour évaluer la capacité de leur créateur à
financer un service ou une machine.
D’une manière générale, l'utilisateur des données s'engage à protéger les données reçues de leur créateur
contre la perte, le vol, l'accès non autorisé et la modification par des personnes non autorisées.
Par ailleurs, les données agricoles sensibles doivent pouvoir bénéficier d'un régime particulier en matière de
droits d'accès, d'utilisation ou de partage, mais aussi des améliorations relatives à la sécurité (par exemple
pour tout ce qui concerne le masquage, l'authentification, les flux sécurisés sur Internet, etc.) comme indiqué
dans le contrat signé entre l'agriculteur et le fournisseur de données ou son utilisateur. À titre de bonne
pratique, les utilisateurs de données doivent pouvoir désigner un délégué à la protection des données, qui
jouerait un rôle important en s'assurant que les droits des créateurs de données sont bien respectés
conformément au RGPD.
Les utilisateurs de données qui contrôlent les bases de données s'engagent à mettre en œuvre régulièrement
des protocoles de sauvegarde et de récupération pour empêcher la perte de données en cas de crise. Il est
essentiel de prévoir les sauvegardes de sécurité nécessaires pour empêcher toute divulgation, modification,
destruction, perte ou accès non autorisé, le tout à un coût abordable. Il convient également de mettre en
œuvre un certain nombre de protocoles à suivre en cas de violation et les dossiers concernant les éventuelles
violations ou tentatives d’accès aux données non autorisées doivent être conservés.
Le créateur et l'utilisateur des données sont responsables des données de connexion et devront les traiter
avec précaution. Les utilisateurs doivent pouvoir garantir la confidentialité des informations de connexion.
Le créateur de données garantit, à sa connaissance, l'exactitude et/ou l’exhaustivité des données brutes. Sa
responsabilité n’est toutefois pas engagée en cas de dommages dus, et/ou liés, à la production, à la réception
et/ou à l’utilisation de ces données par des machines, des appareils, des utilisateurs de données et/ou des
tiers.
La protection des secrets commerciaux, des droits de propriété intellectuelle et la protection contre la
manipulation frauduleuse sont les principales raisons pour lesquelles les informations ne sont pas partagées
et expliquent pourquoi, même dans le cadre de projets communs, les partenaires commerciaux ne sont pas
autorisés à recevoir de données.
La question fondamentale ici est de pouvoir garantir que ces deux aspects, quand ils sont exprimés en tant
que conditions d'autorisation dans les contrats, sont bien respectés. La protection des droits de propriété
intellectuelle des différentes parties prenantes de la chaîne de valeur est fondamentale.
190
14.11 Annexe 11 : Étude de cas dans le système de prévision des maladies des
vaches laitières
Source : (Copa-Cogeca, CEMA, Fertilizers Europe, CEETTAR, CEJA, ECPA, EFFAB, FEFAC,
ESA, 2018)
Dans ce cas, les parties concernées sont les suivantes : les agriculteurs, les producteurs de
systèmes de traite, les coopératives laitières, les vétérinaires, les scientifiques et le prestataire
de services.
Ce service consisterait à réunir des données sur la capacité de traite et de les comparer aux
données sur la collecte de lait afin d'évaluer la probabilité de maladie et les facteurs qui y
contribuent. Une collecte importante de données pourrait ainsi contribuer à une meilleure
connaissance des facteurs qui provoquent certaines maladies, à une identification plus rapide
des maladies et même à la mise en œuvre de mesures préventives.
L'agrégation des données de production laitière, pour la plupart collectées au jour le jour,
permettrait aux agriculteurs de réagir rapidement.
Les agriculteurs, les producteurs de systèmes de traite et les coopératives laitières fourniraient
des données sur la capacité de traite de chaque vache, tandis que les vétérinaires, à partir des
fiches de traitement des animaux, apporteraient des informations sur l'apparition de maladies
spécifiques. Le rôle des scientifiques serait de tirer des conclusions en comparant la capacité
de traite et les données des fiches de maladie. Le prestataire de services ferait en sorte de
proposer une interface conviviale et un flux de données satisfaisant.
191
14.12 Annexe 12 : Caractéristiques des forfaits pour le portail API-AGRO
Pour accéder au portail et utiliser les données, il faut souscrire à un abonnement. Plusieurs
offres existent : basique, standard, premium, et collectif.
Source : (Conditions Générales d’abonnement à la plateforme API-AGRO, s. d.)
"#$!
193
14.13 Annexe 13 : Sources de données alimentant le portail d’Agrimetrics
Soil bacterial UKRI Centre for https://catalogue.ceh.ac.uk/download?fil Angleterre Modélisation basée sur
diversity Ecology & eIdentifier=d44373e1-23ac-4730-b6db- des échantillons de 2007
Hydrology 76c701a9426d_bacteria
Soil invertebrate UKRI Centre for https://catalogue.ceh.ac.uk/download?fil Angleterre Modélisation basée sur
abundance Ecology & eIdentifier=d44373e1-23ac-4730-b6db- des échantillons de 2007
Hydrology 76c701a9426d_inverts
Priority Habitats Natural England https://data.gov.uk/dataset/4b6ddab7- Royaume- 1999 - 2015
6c0f-4407-946e-d6499f19fcde/priority- Uni
habitat-inventory-england
Water Quality Environment https://data.gov.uk/dataset/298258ee- Angleterre 2014
Agency c4a0-4505-a3b5-0e6585ecfdb2/wfd-
river-waterbody-catchments-cycle-2
Historical Crops Rural Payments https://data.gov.uk/search?q=crome Angleterre 2016, 2017, 2018
Agency
Census Office for National https://www.ons.gov.uk/census/2011cen Angleterre Mars 2011
Statistics sus
Broad Habitat Land Cover Map https://eip.ceh.ac.uk/lcm Angleterre 2015
Classification (LCM), NERC
194
15 Bibliographie
195
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