Procedure Administrative Contentieuse - FT
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Procedure Administrative Contentieuse - FT
(fiche thématique)
INTRODUCTION
La procédure administrative contentieuse correspond à l’ensemble des règles qui régissent le
déroulement du procès devant le juge administratif. Si elle présente des similitudes avec la procédure
civile, elle s’en distingue sur de nombreux points en raison de la spécificité de l’action administrative.
Mais, dans l’un et l’autre cas, les règles posées visent à apporter des garanties aux parties au litige.
Trois grandes étapes scandent son déroulement. Dans un premier temps, il appartient au
requérant de saisir le juge administratif. Cette saisine est soumise au respect de trois conditions tenant
à l’exigence d’une décision administrative préalable, au délai de recours contentieux et à diverses
règles de forme encadrant le dépôt de la requête. Il est important de noter qu’un tel recours n’a pas
d’effet suspensif. Cela signifie qu’une décision administrative, contestée devant le juge, continue à
produire ses effets. L’administration dispose, en effet, du privilège du préalable. Cette règle peut
paraître choquante, mais elle revêt un intérêt majeur : à défaut d’exécution immédiate des décisions
administratives, toute vie administrative risquerait d’être paralysée par l’afflux de recours
systématiques ou dilatoires. Le juge administratif peut, cependant, à la demande des parties, ordonner
des mesures provisoires dans l’attente qu’il soit statué sur le fond de la requête.
Une fois la saisine effectuée, commence la phase de l’instruction qui est une sorte d’enquête
menée par le juge en vue de permettre à la juridiction administrative de se prononcer en toute
connaissance de cause. Lorsque le juge estime que l’ensemble des paramètres de l’affaire ont été
établis, intervient la phase de jugement à l’issue de laquelle est rendu l’arrêt qui clos, sauf recours
éventuel de l’une des parties, l’affaire.
I – LA SAISINE DE LA JURIDICTION
ADMINISTRATIVE
La saisine de la juridiction administrative doit respecter trois exigences : la règle de la décision
préalable (A), le délai de recours contentieux (B) et les formes de la requête (C). Bien qu’elles soient
impératives, le juge administratif veille avec bienveillance sur leur respect par les requérants. Ces
derniers ne sont, en effet, pas toujours au fait des arcanes de la justice administrative. Aussi, invite-t-
il, dans de nombreuses hypothèses, les justiciables à régulariser leur situation lorsque l’une de ces
règles n’a pas été respectée. Il en va, ainsi, notamment, en matière d’obligation de recourir à un avocat,
de produire la décision attaquée ou, encore, de traduire la requête en langue française. Un décret du
13/08/2013 le contraint même à une telle invitation lorsque la requête ne contient pas l’exposé des
conclusions et des moyens. En revanche, et cela est tout à fait logique, le non-respect du délai de
recours contentieux ne peut être régularisé.
D’application simple en matière de recours pour excès de pouvoir (REP), puisqu’ici la requête
est nécessairement dirigée contre un acte administratif unilatéral préexistant, elle pose des difficultés
pratiques en matière de plein contentieux dans la mesure où il n’existe pas toujours de décision de
l’administration. Lorsque tel n’est pas le cas, il appartient au requérant de « lier le contentieux » en
s’adressant à l’autorité administrative pour obtenir réparation de son préjudice et de saisir le juge de
l’éventuelle décision de rejet qui lui est opposée. L’on trouve ici la raison d’être de la règle de la
décision préalable : instaurer un dialogue entre l’administration et les administrés dans le but de
déboucher sur un règlement amiable du litige. Mais, dans les faits, ce dialogue est rarement fructueux.
Cette règle connaît des exceptions. Il n’est, ainsi, nul besoin de décision préalable pour les
déférés préfectoraux contre les contrats, pour les recours formés par les personnes publiques contre
les administrés et pour les demandes présentées en matière de référés administratifs. Il en allait de
même jusqu’en 2016, en vertu d’une longue tradition, pour les recours formés en matière de travaux
publics. Mais, cette exception a été supprimée par le décret du 02/11/2016. Cette matière rejoint donc
le principe général de l’exigence d’une décision préalable pour pouvoir saisir le juge administratif.
Cette limitation dans le temps du délai de recours s’explique par un impératif de sécurité
juridique : il importe, en effet, de ne pas faire peser trop longtemps des risques d’annulation
contentieuse sur les situations juridiques existantes. Elle présente, cependant, l’inconvénient de laisser
un acte illégal produire des effets de droit de manière illimitée dès lors qu’aucun recours n’a été
effectué dans le délai de deux mois. Aussi, le juge admet-il la technique de l’exception d’illégalité qui
permet de contester, à l’occasion d’un recours formé contre un acte administratif individuel, la légalité
du règlement sur lequel cet acte se fonde. Si le règlement est illégal, il n’est pas annulé, mais voit son
application écartée dans le cas d’espèce et l’acte individuel est annulé pour défaut de base légale.
Ainsi, se trouvent conciliés les impératifs de sécurité juridique et de respect du principe de légalité.
L’examen de cette règle appelle certaines remarques quant à sa mise en œuvre (1) et aux
exceptions qui lui sont apportées (2).
Il peut, ainsi, être tantôt plus court, tantôt plus long, afin de tenir compte de la spécificité de
certains contentieux. Il est, par exemple, de 48 heures à l’encontre des arrêtés préfectoraux de
reconduite à la frontière, de cinq jours pour les recours des électeurs contre les résultats des élections
municipales et cantonales ou, encore de quatre ans pour les recours des tiers contre les autorisations
préfectorales d’exploiter des installations classées présentant de graves dangers pour
l’environnement.
les délais et voies de recours n’ont pas été mentionnés dans la notification de l’acte, le Conseil d’Etat
limite, dorénavant, le délai de recours à un an.
Enfin, il faut noter que des tiers peuvent se greffer au recours principal en formant une
intervention par requête distincte déposée avant la clôture de l’instruction, dès lors qu’ils justifient
d’un intérêt à agir. Ils ne peuvent, cependant, soulever que des moyens invoqués dans le cadre du
recours principal.
La plupart du temps, cette formalité est effectuée en deux temps : le requérant dépose
d’abord, dans le délai de recours contentieux, une requête introductive d’instance contenant un bref
exposé de ses conclusions, qu’il complète ultérieurement (c’est-à-dire même après l’expiration du
délai de recours contentieux) par un mémoire complémentaire plus détaillé.
II – L’INSTRUCTION
L’instruction est une sorte d’enquête menée par le juge en vue de permettre à la juridiction
administrative de se prononcer sur l’affaire en toute connaissance de cause. Elle présente certains
caractères (A) et suit un déroulement bien précis (B).
Concrètement, cette règle signifie que les parties doivent pouvoir échanger librement leurs
arguments et avoir connaissance des documents produits par l’autre partie en vue de leur discussion
devant le juge. Cette exigence implique, notamment, que toute pièce ou tout moyen présenté par une
partie puisse être discuté par l’autre. Dans le même sens, tout moyen que le juge envisage de relever
d’office doit être, préalablement, communiqué aux parties afin qu’elles puissent présenter leurs
observations. Quant aux mesures d’instruction prescrites par le juge, elles doivent être consignées
dans un rapport communiqué aux parties : en cas de visite de terrain par exemple, les parties doivent
être informées du jour et du lieu de la visite afin de pouvoir y assister et présenter leurs observations.
documents susceptibles d’établir sa conviction ou, encore, les raisons de fait ou de droit pour
lesquelles elle a pris la décision contestée. L’éventuel refus de l’administration de satisfaire ces
exigences l’amène, alors, à considérer les allégations du requérant comme fondées.
Le juge administratif peut également, à la demande de l’une des parties ou spontanément (ce
que ne peut normalement pas faire le juge civil), ordonner diverses mesures d’instruction : demande
de documents, audition de témoins, vérification de documents administratifs, visite des lieux,
expertises, …
B – Le déroulement de l’instruction
L’instruction débute par l’enregistrement de la requête introductive d’instance auprès du
greffe de la juridiction administrative saisie. Un rapporteur et un rapporteur public sont, alors,
désignés.
La requête est, ensuite, communiquée à l’autre partie qui y répond par un mémoire. Un
échange de mémoires s’ensuit, soit à l’initiative des parties, soit à celle du juge. Tout au long de ce
processus, les exigences du principe du contradictoire, du caractère écrit et du caractère inquisitorial
de la procédure s’imposent tant aux parties qu’au juge.
Au terme de ces échanges, le rapporteur rédige un rapport qui analyse l’ensemble des données
de fait et de droit de l’affaire, synthétise les arguments des parties et les textes applicables et prépare
les visas de la décision à venir.
A ce stade, l’affaire est en état d’être jugée. L’instruction se termine par une ordonnance de
clôture qui ouvre la voie à la tenue de l’audience.
III – LE JUGEMENT
La phase de jugement comporte deux temps : l’audience (A) et l’élaboration de l’arrêt (B).
A – L’audience
L’affaire est examinée devant la formation de jugement, les parties, mais aussi, en principe, un
public. En effet, s’il n’existe pas, pour les juridictions administratives, de principe général du droit
imposant la publicité des débats, une telle publicité est, cependant, prévue par les textes devant de
très nombreuses juridictions administratives, dont les Tribunaux administratifs, les Cours
administratives d’appel et le Conseil d’Etat.
Depuis lors, l’ordre de prise de parole des différents intervenants est fixé comme suit. Comme
de coutume, l’audience commence par de brèves observations orales du rapporteur. Puis le rapporteur
public, auparavant dénommé commissaire du Gouvernement, exprime ses conclusions : il doit exposer
en toute indépendance son opinion sur les questions que présente à juger la requête et les solutions
qu’elle appelle. Enfin, les parties présentent leurs observations orales.
Ce système s’applique devant les Tribunaux administratifs et les Cours administratives d’appel.
Mais, l’ancien système demeure devant le Conseil d’Etat : le rapporteur public continue à s’y exprimer
après les parties ; ces dernières peuvent, cependant, répondre à ses conclusions par de brèves
observations orales.
B – L’arrêt
Une fois l’audience terminée, l’affaire est mise en délibéré qui est toujours, en vertu d’un
principe général du droit, secret, de manière à assurer l’indépendant des juges et l’autorité morale de
leurs décisions, ainsi que de soustraire leur discussion à toute forme de pression.
C’est à ce moment que la formation de jugement analyse les arguments présentés par les
parties et les conclusions du rapporteur public. La question s’est longtemps posée de savoir si ce
dernier pouvait assister au délibéré et s’y exprimer (sans bien sûr prendre part au vote). A la suite de
plusieurs arrêts de la CEDH, la réponse a été évolutive. Dorénavant, la situation varie selon la juridiction
saisie : ainsi, il ne peut assister au délibéré en ce qui concerne les Tribunaux administratifs et les Cours
administratives d’appel ; en revanche, il conserve cette faculté, sans cependant pouvoir s’exprimer,
devant le Conseil d’Etat (sauf demande contraire d’une partie).
Le délibéré est clos par l’élaboration de l’arrêt qui comporte des visas (les textes appliqués),
des motifs (les arguments retenus) et un dispositif (la solution du litige). Les juges doivent se borner à
statuer dans les limites des conclusions des parties. Ainsi, ils ne peuvent ni refuser de statuer sur
certaines conclusions, ni statuer au-delà de ce qui était demandé par les parties.
Le jugement est, ensuite, « lu », c’est-à-dire rendu public, lors d’une séance publique qui
intervient en général une quinzaine de jours après le délibéré. C’est à compter de cette date qu’il
acquiert l’autorité de la chose jugée, laquelle pourra, toutefois, être suspendue par l’exercice d’une
voie de recours. Ce jugement doit, également, être notifié aux parties afin de déclencher à leur égard
le délai dont elles disposent pour déposer un recours éventuel.
Les choses peuvent s’arrêter là. Mais, l’une des parties peut, si elle n’est pas satisfaite par le
jugement rendu, exercer un recours en faisant appel ou en déposant un pourvoi en cassation.
L’administré, s’il est victorieux, peut également user de différentes voies pour obtenir du juge qu’il
contraigne l’administration à exécuter ses décisions dans l’hypothèse où elle se montrerait
récalcitrante.