Philosophie Et Ethique 2023
Philosophie Et Ethique 2023
Philosophie Et Ethique 2023
NOMBRE CREDIT : 2
Promotion : LMD 1( A et B)
TITULAIRE DU COURS : Lucien TSHIBANGU KABWE
Docteur en philosophie
Spécialiste en philosophie théorétique, philosophie du droit et culture
africaine
- Contact du professeur: 0903944468 ; [email protected]
- Contact étudiant : dispositif électronique obligatoire
Objectif général : La philosophie(et éthique), fille ainée des sciences, bénéficie du droit
d’ingérence dans tous les domaines du savoir.
Objectif spécifique : la philosophie(Ethique) et le droit constituent le revers de la même médaille.
Si on ne connaît pas la nature de l’homme, on ne peut ni légiférer sur lui ni défendre ses droits. A
l’issue de cette unité d’enseignement, l’étudiant sera en mesure de comprendre que c’est absurde
faire le droit sans philosophie et étique.
Approche pédagogique : Cours magistral interactif( participation en présentiel obligatoire),
utilisation des TIC, ………
Contenu de l’UE :
1. Introduction
2. Etude de l’histoire de la pensée philosophique et ses implications dans le domaine législatif et
juridique
3. La portée de l’éthique dans l’ histoire des sociétés et dans l’esprit des lois
4. L’éthique de la solidarité africaine et conscience de la volonté générale(J. J. ROUSSEAU).
5. Conclusion
Bibliographie
1. ARISTOTE, Ethique à Nicomaque, éd. Les Échos du Maquis, v. : 1,0, janvier 2014.
2. BREHIER E, Histoire de philosophie, t. I l‟Antiquité et le Moyen âge, éd. électr. Chicoutimi,
Québec, 2005.( obligatoire)
3. DILTHEY W., Théorie des conceptions du monde. Essai d‟une philosophie de la
philosophie, tr. L. Sauzin, Paris, PUF, 1946.
4. HUSSERL, La Philosophie comme science rigoureuse (1910), tr. M. De Launay, Paris,
PUF, 1989.
5. MONTESQUIEU, De l‟esprit des lois(1748) Livre I-VIII, éd. électronique, Chicoutimi,
Québec, 2002.( obligatoire)
6. BONGO-PASI MOKE SANGOL, Eléments de Philosophie, Intention philosophique, Ethique
et droit, éd. du Pangolin, Enghien, 2022.(obligatoire)
7. 19. TSHIBANGU K. L, - Conscience de la volonté générale et/ou de la solidarité africaine
comme a priori à l‟Etat de droit en Rd. Congo(Approche théorétique de la philosophie de J.-J
Rousseau), Thèse de doctorat(Inédite), UPN, 2018.
8. TSHIBANGU KABWE Lucien, Les vertus de l‟intellect démocratique, exigence
phénoménologique de la culture politico-juridique en Rd. Congo et en Afrique, éd. de
l‟Harmattan, Paris, 2023.(obligatoire).
Modalité d’évaluation
1. Travaux pratiques individuels
2. Interrogation individuelle
3. Examen avec questions à choix multiples
2
0. INTRODUCTION GENERALE
1. Philosophie
Contrairement à la foi ou à la croyance, la philosophie n‟est pas la révélation apportée par le
détenteur du savoir à l‟ignorant, elle est essentiellement d‟une part, un dialogue de
l‟âme(pensée) avec elle-même(Platon : l‟âme quand elle pense ne fait que s‟entretenir avec elle-
même affirmant ou niant) et d‟autre part un dialogue entre des égaux qui se font complices dans
leur soumission commune à la force de la raison (et non à la raison de la force).
A la question du pourquoi de la philosophie, l‟histoire de la pensée répond qu‟au
commencement du monde de la connaissance étaient les mythes où seuls les mystères(théisme ou
polythéisme) avaient de l‟emprise sur l‟homme, « connaître » signifiait en quelque sorte
« croire ». Insatisfaits des valeurs religieuses traditionnelles, les penseurs grecs du VIe s. ,
consacrèrent la première mise en œuvre systématique de la raison réfléchie.
Deux considérations fondamentales marquent ce tournant historique :
a. La tradition n‟est pas un code : les grecs ont fondé la philosophie en distinguant ce qui est
bien de ce qui est ancestral et traditionnel. L‟Europe est née avec le logos c‟est- à-dire quand la
question « qu‟est-ce.. ?(qu‟est-ce que le courage, le bien…) s‟est substituée à l‟autorité de la
coutume et de la religion(mythes) en recherchant ce qui est un bien pour l‟homme et la société.
b. Le passage de la tradition orale à l‟écriture marque le pas décisif dans l‟itinéraire du
cursus philosophique. Ce qui se pense, s‟écrit en même temps(Verba volant scripta manent : les
paroles s‟envolent, les écrits restent).
N. B : Le mérite des présocratiques ioniens(Ionie est une région d‟Asie Mineure dans
l‟actuelle Turquie dont la capitale était Milet) est de grande taille dans la mesure où ce ne sont
plus les dieux qui seraient unilatéralement à l‟origine du monde, pensèrent-ils, mais un principe
unificateur(αρτη :archè : le meilleur point de départ naturel du mouvement) contenu dans la
nature des choses. La recherche de cette vérité au moyen de la pure raison marque les premiers
pas de la spéculation philosophique.
2. Ethique
Du grec εΘικος (ethikos de τα εΘη) et du latin moralis de mores : à la fois substantif et adjectif,
éthique est synonyme de morale c‟est-à-dire ce qui se rapporte à l‟esprit ; on parle de ce fait, de
philosophie morale ou philosophie éthique. Les distinctions n‟est qu‟un simple problème
d‟écoles. L‟Ethique a une double considération à la fois théorique et pratique. On parle par
exemple de la philosophie morale ou éthique de Kant qui sont des expressions équivalentes.
Par ailleurs, le terme éthique fait allusion aux divers codes de bonne conduite professionnelle , ce
qu‟on appelle déontologie, il s‟agit d‟ un ensemble de valeurs et de principes particuliers dans un
domaine ou service1 . Ex. l‟éthique d‟un juriste ou la déontologie d‟un juriste.
En ce qui nous concerne, nous traitons dans ce cours de l‟éthique comme philosophie et
comme discours théorétique c‟est-à-dire comme science de l‟esprit. Il s‟agira donc des réflexions
rigoureusement argumentées sur les fondements de l‟éthique en vue de bien agir. L‟éthique est
donc une discipline philosophique portant sur le jugement de valeur. Sa formulation se caractérise
par des énoncés normatifs, prescriptifs et évaluatifs. L‟instrument de l‟éthique c‟est la conscience
appelée aussi Raison pratique(par différence de la raison spéculative(philosophie). Nous dirons
que c‟est par l‟usage correcte de la raison vis-à-vis de la réalité qu‟on peut se dire avoir une vie
éthiquement correct.
1
Cfr. M. F. MUKENDJI MBANDAKULU, Somme des pratiques éthiques ou déontologiques, éd. Médiaspaul, 2012.
3
2
E. KANT(1784), Réponse à la question «Qu‟est-ce que les Lumières ?», éd. électronique, PDF: Les Échos du Maquis, p. 2.
6
3
D. LAERCE, Vies des plus illustres philosophes de l‟antiquité, chez Lefèvre, Editeur, Paris, p. 5.
9
- quand il se condense elle génère un processus, d‟abord le vent, et puis la pluie et en fin l‟eau, la
terre et la pierre. Pour le reste du cours de la vie, Anaximène suit l’apeiron d‟Anaximandre : ce
qui naît, à la mort, retourne à son principe.
2. Pythagore et le Pythagorisme
Avec la destruction en 494 de la prestigieuse ville de Milet, la pensée intellectuelle des
ioniens émigrera vers la Magna Grecia en Italie du sud et en Sicile où Pythagore fonda son
mouvement en 530 à Crotone: « Plusieurs des hommes qui s‟y font connaître, viennent pourtant
d‟Ionie. Pythagore est né à Samos, Xénophane à Colophon. Et ce sont eux qui donnent chacun
l‟impulsion dans les colonies d‟Italie à un mouvement d‟idées important, à la philosophie des
nombres d‟une part, à l‟éléatisme d‟autre part, qui, l‟une et l‟autre, vont dominer tout le
développement ultérieur des idées »4.
Le pythagorisme qui naît de ce mouvement, malgré ses emprunts à la réflexion
mathématique la plus rigoureuse, est teinté du syncrétisme religieux. C‟est du nombre que naît
toute chose et c‟est dans les signes mathématiques que l‟univers doit se comprendre : le nombre
est l'essence des choses. Dix est le nombre parfait qui résulte de la somme de quatre premiers
nombres(1+2+3+4 : tétragramme) disposés géométriquement sous la forme d‟un triangle.
Le théorème que l‟on attribue à Pythagore énonce que « dans un triangle rectangle, le carré
de l'hypoténuse est égal à la somme des carrés des deux autres côtés ». À travers ce théorème, le
pythagorisme formule une règle générale, il ne parle pas d'un triangle rectangle en particulier,
mais de l'essence de n‟importe quel triangle rectangle du fait de ses propriétés. Ici, comme on
l‟aperçoit avec justesse, la spéculation pythagoricienne porte, non sur les choses particulières
auxquelles ces prédécesseurs ioniens se fermaient, mais sur les idées qui les rendent possibles.
C‟est avec Pythagore en s‟appuyant sur le nombre et les sciences mathématiques, que le monde
des idées trouve ses premiers développements. Platon ne sera qu‟un petit fils de Pythagore. Le
pythagorisme veut pénétrer, par-delà l'expérience sensible à la saisie de l'essence des objets, à
partir de laquelle on peut rendre raison des choses de ce monde. La connaissance devient un
mouvement de la raison vers la saisie de ce qui est intelligible au-delà du sens.
Par ailleurs, dans cette réflexion purement rationnelle se cache dans l‟esprit de Pythagore
plusieurs mystères. Nous pouvons retenir de cette doctrine ces éléments essentiels:
1. L'âme est immortelle;
2. Elle transmigre d'espèces animales en espèces animales (doctrine dite de la«
métempsycose »).
3. Ce qui a été renaît, donc rien n'est absolument nouveau (thèse de « l'éternel retour du même»).
N. B : Comme on le voit, il est difficile ou quasi impossible que le domaine du savoir se
parallélise totalement du domaine religieux ou mystique.
3. Héraclite d’Ephèse(576-480)
L‟un des présocratiques dont l‟originalité de pensée a le plus séduit un grand nombre des
philosophes qui ont vu en lui le début de la vraie spéculation philosophique. Son épistémologie se
base sur l‟idée qu‟à la vérité éternelle le commun des mortels ne peut avoir accès car « tout coule,
tout passe et rien ne reste(παντα ρει:pantarei). De toutes ces idées que l‟histoire de la pensée nous
délivre à travers les Fragments d‟Héraclite, rien de grand nous est présenté sur la totalité de sa
conception philosophique.
Nonobstant cette objection critique, «Héraclite dit l‟Obscur et Xénophane sont les deux
premiers penseurs dont nous possédons des fragments quelque peu étendus: ils nous ramènent
l‟un et l‟autre vers les cités ioniennes. Héraclite était d‟Éphèse où il florissait sans doute vers la
fin du VIe siècle.
Dans « son œuvre, De l’Univers, écrite en prose, est la première où nous voyons nettement
une véritable philosophie, c‟est-à-dire une conception du sens de la vie humaine entée sur une
doctrine réfléchie de l‟univers. C‟est peut-être lui qui a divisé son ouvrage en ces trois parties
4
E. BREHIER, Histoire de philosophie, t. I l‟Antiquité et le Moyen âge, éd. électr. Chicoutimi, Québec, 2005, p. 47.
10
devenues traditionnelles: physique, théologique et politique; c‟est sous ces trois chefs que nous
pouvons ranger les cent trente courts fragments qui nous restent »5. Sa philosophie se résumerait
d‟après E. Bréhier dans ces quatre points fondamentaux:
1. Le combat (πολήμος: Polémos) est le père de toutes choses; la naissance et la conservation des
êtres sont dues à un conflit de contraires(contrastes) qui s‟opposent et se maintiennent l‟un l‟autre
grâce au logo.
2. Dans le logos coexistent toutes les oppositions et toutes les différences : homme-femme, jour-
nuit, etc.
3. « L‟unité de toutes choses[…]la substance primordiale est le feu, en lequel peuvent s‟échanger
toutes choses, comme toute marchandise s‟échange contre de l‟or; tout naît et progresse selon que
le feu, éternellement vivant, s‟allume ou s‟éteint avec mesure ».6 La spécificité d‟Héraclite dans
sa posture de dépassement de ses prédécesseurs s‟articule autour de cet élément essentiel du feu
selon E. Bréhier: « Le choix que fait Héraclite, appelle donc l‟attention moins sur la substance
des choses que sur la règle, la pensée, le logos qui détermine les mesures exactes de ses
transformations ».7
4.« Le perpétuel écoulement des choses(παντα ρει, panta rei), Tout coule, tout passe et rien ne
reste : «Tu ne peux pas descendre deux fois dans le même fleuve; car de nouvelles eaux coulent
toujours sur toi».
En fin Héraclite distingue deux catégories de personnes : Des éveillés(Philosophes) qui sont peu
et les dormeurs qui constituent la majorité de la société.
4. Xénophane, Parménide, Zénon et l'école d'Élée
Xénophane, fondateur de l'école d'Élée, est né à Colophon vers 550. C'est après une longue
errance en Sicile, qu'il se fixa à un âge très avancé à Élée (Grande-Grèce, dans l‟actuelle province
de Salerno à Luca). Il est auteur d'un long poème sur la nature. Xénophane et son école posent
les bases de l‟ontologie philosophique autour de la question de l‟être.
Xénophane tout en s‟imprégnant de la cosmogonie milésienne, ses préoccupations le
portent surement ailleurs: « chez lui se précise une idée, déjà explicite chez Héraclite,
l‟incompatibilité de la raison humaine, mûrie par la science milésienne et par l‟expérience, avec
les images traditionnelles du mythe. ».8
N.B : Ce n‟est pas que ces penseurs ne croient pas à l‟existence des dieux, « Avec Xénophane et
Héraclite, nous sommes au moment où la physique ionienne donne naissance à une théologie tout
opposée à celles des mythes, où Dieu prend quelque chose de l‟impersonnalité, de l‟immobilité et
de l‟intelligibilité d‟une loi naturelle ».9 De cette école d‟Elée citons les plus célèbres
philosophes:
a. Parménide
Par rapport aux émigrés de l‟Ionie dont Xénophane son maître, Parménide naît à Élée vers
540. Il est l'auteur d'un poème dont le contenu est considéré comme la première réflexion
ontologique de la philosophie occidentale. Il est le premier à écrire une œuvre philosophique en
vers; nous en avons le début qui est solennel comme le récit d‟une initiation religieuse: « le poète
se voit conduit sur un char par les filles du Soleil, jusqu‟aux portes du jour, que garde la Justice
vengeresse; la Justice, suppliée par ses guides, lui ouvre les portes; il entre et reçoit de la déesse
les paroles de vérité »10. Une autre anecdote précise qu‟à l‟ouverture de la porte deux chemins se
présentèrent celui de l‟opinion et celui de la vérité. Parménide reçoit cette vérité absolue: L’être
est et le non être n’est pas .Penser et être sont une seule et la même chose d‟après Parménide.
5
Ibidem.
6
Ibidem.
7
Ibidem.
8
Ibidem.
9
Ibidem, p. 56.
10
Ibidem.
11
Dans la méthode rationnelle de la recherche de la vérité de l‟être par opposition à la doxa qui
est un savoir rudimentaire fait des opinions, avec cette fiction Parménide livre sa guerre contre
Héraclite et toute l‟école ionienne dans son choix pour la vérité. Dans le Sophiste, Platon met
dans la bouche de l‟étranger(qui représente dans ce dialogue Parménide) s‟adressant à
Théétète(qui représente Héraclite): « Non, jamais on ne prouvera que le non-être existe. Écarte
plutôt ta pensée de cette route de recherche. ».11
Si l‟opinion porte à la connaissance apparente et superficielle de l‟être, la vérité, elle, amène
à la connaissance authentique de l‟être. La vérité, du grec aleteia, signifierait, ce qui ne se cache
pas. Au nom du principe de la contradiction, Parménide par rapport à Héraclite qui l‟admet
comme substantielle à l‟existence des choses, lui nie catégoriquement l‟inexistence du non-être.
Si l‟être diffère à la fois des choses sensibles et des opinions, selon Parménide, la vérité de l‟être
se fixe dans la pure rationalité et intelligibilité des choses; il s‟agit de l‟existence aprioristique de
la pensée et du primat de la raison par rapport au monde du réel, du mythique et du religieux.
Caractéristiques de l‟être parménidien :unicité(#multiplicité), éternité(#temps), immutabilité(#
non-être) et infinité( synonyme de perfection).
b. Zénon
De la pensée de Parménide, son disciple Zénon d‟Élée qui fleurit vers le milieu du V e siècle
développa d‟abord l‟aspect critique et ensuite sa dialectique. Aristote fait de lui le fondateur de la
dialectique qui est l‟art de prouver en partant des principes admis par son interlocuteur. Zénon
inaugure la discussion qui part d‟hypothèses dont il déduit des conséquences. Platon nous dit
qu‟il établissait la thèse de Parménide, l‟existence de l‟Un immobile, en montrant les absurdités
qui résultaient de la thèse contraire. La pluralité est absurde. Si Parménide suit le principe
d‟identité dans sa dialectique, Zénon au contraire suit le principe de contradiction. La méthode
utilisée par Zénon, qui en est le fondateur, est la dialectique qui consiste à admettre les
argumentations de l‟adversaire comme vraies pour en tirer des conséquences qui les réfutent à
travers une démonstration par l‟absurde. Il s‟agit de la confrontation de deux thèses
contraires(Thèse-antithèse). Dans les arguments apparaissent des paradoxes(Para : contre et
doxa : opinion). Le paradoxe indique en général une affirmation contraire au sens commun. En
philosophie, le paradoxe indique une conclusion illogique à travers des prémisses
vraisemblablement correctes. Ex : Pour démontrer que la perpendiculaire est plus courte que toute
oblique, on démontre qu‟il est absurde de supposer une oblique plus courte que la
perpendiculaire.
N. B : Le contraste chez Zénon se trouve entre deux représentations qui visent l‟une et l‟autre à la
rationalité, entre la continuité de la sphère parménidienne et la discontinuité du monde
pythagoricien. Cette discontinuité est absurde; en effet, composer le multiple d‟unités sans
grandeur ou de points, c‟est le composer de rien ; mais donner à chaque unité une grandeur, c‟est
dire qu‟elle n‟est pas l‟unité, puisqu‟elle est alors composée.
5. De la sophistique(Les Sophistes)
Avec la fin des guerres médiques12 (en 449), la Grèce soustraite au danger barbare doit poser
les bases de sa politique et déterminer son propre destin. C‟est la fin de l‟Aristocratie antique,
Périclès (mort en 429) à qui l‟on attribue l‟invention du terme « démocratie », introduit à Athènes
la constitution démocratique dans une situation d‟ébranlement moral très profond. Sur le plan
religieux, le dogmatisme tombe aussi en branle. Dans pareille situation de reconstruction de
l‟empire, la nécessité de la formation intellectuelle de la population ne pouvait être qu‟une
urgence pour la mise sur pied d‟une vision nouvelle dans la marche de la société.
Le concours des sophistes, entendu par ce terme comme sages, hommes habiles ou
simplement professeurs, était d‟une grande valeur pour la diffusion de la culture sur bases
démocratiques. Ces professeurs allaient enseigner à travers les rues de toutes les villes en faisant
11
PLATON, Le Sophiste, éd. Bibliot. Electr. Du Québec, vol. 5, version 1.01, p. 152.
12
Perses quel les Grecs appelaient Mèdes : La puissance ninivite s‟écroula sous une évasion médique(Antiquité).
12
13
E. BREHIER, Op. cit., p. 71.
14
Ibidem, p. 72.
15
Ibidem, p. 74.
13
16
Ibidem, p. 81.
17
Ibidem, p. 82.
18
ROBIN L. (1866-1945), Platon(1935), éd. électr. V. :10 : Les échos du Maquis, 2011, p. 38.,
14
par Philippe, roi de Macédoine pour se voir confier l‟éducation de son fils Alexandre. Lorsqu‟il
retourna en 335 à Athènes, il ne rentra plus à l‟Académie mais fonda le Lycée, une nouvelle
école, où il enseigna pendant treize ans. Cette école est aussi appelée péripatéticienne(περιπατειν,
Peripatein : se promener) parce qu‟Aristote avait coutume d‟enseigner en se promenant dans les
allées du Lycée. A la mort d‟Alexandre (323), le parti national athénien que dirigeait encore
Démosthène l‟obligea à quitter la ville ; il se retira à Chalcis, en Eubée dans une propriété héritée
de sa mère, où il mourut en 322, à 63 ans.
b. Les analytiques et Les Topiques : Œuvres logiques cfr. le Cours de Logique
c. La Métaphysique
1. Le terme métaphysique n‟est pas d‟Aristote. C‟est Andronicus de Rhodes qui l‟utilise dans
la systématisation des œuvres d‟Aristote( au premier siècle après. J. C) dans une rubrique de 14
Livres qui venaient juste après la physique. En effet μήτα τα ϕύσικα (meta ta physica) signifie :
après(les traités sur) la physique. Aristote dans cette trame, parle de la philosophie première c‟est-
à- dire « la science de l‟être en tant qu‟être ou des principes et causes de l‟être et de ses attributs
essentiels». Elle pose ce problème très concret : qu‟est-ce qui fait qu‟un être est ce qu‟il est ?
Qu‟est-ce qui fait qu‟un cheval est un cheval, qu‟une statue est une statue, qu‟une chaise est une
chaise?
Il s‟agit de savoir le sens qu‟a le mot est dans la définition qui énonce l‟essence d‟un être. La
Métaphysique se trouve être par conséquent, pour sa plus grande partie, un traité de la définition.
Le problème de la définition, base de la philosophie de Socrate et que Platon avait cru résoudre
par la dialectique, n‟est en réalité ni du ressort de la dialectique, qui juge simplement de la valeur
des définitions faites, ni de celui de la science démonstrative qui en use comme de principe, mais
d‟une science nouvelle et encore inconnue, la philosophie première, ou science désirée, qui
s‟occupe de l‟être en tant qu‟être.
2. Les 3 catégories de sciences
Si chez Platon la conception du savoir est globale et totalisante(seules les idées constituent l‟objet
de la science dont s‟occupe la philosophie), Aristote apporte une rupture : pour lui, toutes les
sciences s‟insèrent dans la philosophie qui ne peut être alors l‟unique savoir. Il y a pour lui
plusieurs types de savoir qui sont irréductibles les uns aux autres. Dans la Métaphysique, Aristote
opte pour une systématisation de ces sciences en 3 catégories:
- Les sciences théorétiques( consacrées au nécessaire: Mathématique, physique et métaphysique).
- Les sciences pratiques( consacrées au possible en ce qui concerne le comportement de l‟homme:
L‟Ethique et la politique).
- Les sciences poïétiques ( consacrées au possible en ce qui concerne les créations de l‟homme :
L‟art et les techniques).
3. Principe de la non- contradiction
En effet, pour pouvoir répondre à la question qu‟est-ce que la substance ?, il est nécessaire,
soutient Aristote, que la philosophie réduise toutes les significations de l‟être à un seul signifié
parce que son objet d‟étude est l‟être en tant qu‟être. Il faut arriver pour cela à un axiome qui ne
peut être réfuté. Il s‟agit de ce que Aristote appelle, le Principe de la non-contradiction selon
lequel l‟on ne peut dire d‟une chose en même temps que son contraire.
Ex. L‟homme est un animal raisonnable et dire en même temps, l‟homme est un animal non
raisonnable.
Ce principe énonce le fait que chaque être est un et a une nature déterminée et nécessaire qui ne
peut être niée. C‟est cette nature qu‟il appelle substance. La substance est par exemple, une chose
bien déterminée à quoi se réfèrent des propriétés physiques et logiques.
Au principe de la non contradiction, la critique successive y aurait ajouté ces deux autres
principes :
Principe d’identité( A=A) et le Principe du tiers exclu( qui ressemble au principe de la non-
contradiction) selon ce principe, le troisième terme « C » est un non-lieu, A et B sont dans un
rapport de contradiction.
17
écrits témoignent d'un stoïcisme timoré: Dialogues, Lettres à Lucilius, De ira, De amicitia.
d. Marc-Aurèle (121-180 P.C.N.)
Empereur romain et philosophe, successeur d'Hadrien au trône, il défendit les frontières de
l'Empire contre les invasions. Ce chef politique et militaire engagé a laissé des Pensées, qui
traduisent son vécu de stoïcien confronté à la pratique.
e. Plotin (205-270 P.C.N.)
Plotin adapte Platon et fonde par là le néo-platonisme, qui, en réaffirmant la distinction entre la
matière et l'esprit, influencera profondément la philosophie chrétienne.
f. Saint Augustin (Aurelius Augustinus) (354-430 P.C.N.)
Penseur et théologien, il défendit la foi chrétienne contre le paganisme, donna, contre la
conception traditionnelle du temps cyclique, naissance à une conception de l'histoire linéaire. Ses
écrits relatifs à la Grâce prêtèrent le flanc aux plus grandes controverses, alimentèrent la crise de
la Réforme et le jansénisme. Il reste un des Pères de l'Église, c'est-à-dire un des intellectuels
fondateurs de sa doctrine.
III. Moyen Age
La philosophie occidentale, au Moyen-Age, est essentiellement chrétienne: elle vise à concilier
foi et raison. Elle subordonne la connaissance aux vérités révélées de la Bible: ce qui n'empêche
pas, selon des penseurs comme Abélard ou Thomas d'Aquin, l'exercice de la raison.
L'enseignement philosophico-théologique porte le nom de scolastique (du latin, scola, école). Il
emprunte la méthode de la quaestio- responsio, sorte de cheminement dialectique entre l'Écriture
(les affirmations de la Bible) et la connaissance rationnelle. La logique revêt dans ce contexte une
importance fondamentale.
Le Moyen-Age est influencé d'une part par saint Augustin(référence incontournable en matière de
Foi) et Aristote dont les écrits sont peu à peu redécouverts par les philosophes arabes Avicenne
(980-1037) et Averroès (1126-1198) par le biais des croisades de l'Espagne et de Byzance. S.
Augustin est influencé par l‟ idéalisme souvent proche de Platon, en opposition avec le réalisme
et le naturalisme d‟Aristote. Le conflit sera souvent aigu dans la représentation de différentes
écoles de cette période. Citons les auteurs les plus renommés :
A. Pierre Abélard (1079-1142)
Théologien et philosophe, il est davantage célèbre aujourd'hui pour ses amours infortunées avec
la belle Héloïse que pour ses traités, dont le plus connu est Dialectique. Abélard occupe une place
importante dans la formation de la scolastique; il s'illustra par ailleurs dans la Querelle des
Universaux (nominalistes(concept : simple nom de la chose) et réalistes( concept=chose réelle).
B. Thomas d'Aquin (1225-1274)
Théologien et philosophe, il réalisa la synthèse du savoir de son temps dans une œuvre immense,
qui marqua définitivement l'Occident chrétien: c'est la Summa Theologica, dite encore Summa
summarum. Penseur encyclopédique et moderne, il rêva de concilier la Foi et la Raison, et fonda
la légitimité de cette dernière pour la connaissance du monde.
C. Guillaume d'Ockham (1285-1347)
Théologien et philosophe, il fut un nominaliste radical, et refusa la possibilité de connaître Dieu
par la raison. Il est l'auteur d'une Somme de logique qui, par son principe d'économie (le fameux
"rasoir d'Ockham"), donna à la science moderne des maximes et une méthode. Il est considéré
comme le précurseur des empiristes. G. d‟Ockham prêchait un empirisme radical avec une
séparation radicale entre foi et raison. Tout ce qui dépasse la sphère de la raison ne peut pas être
ni connu ni démontré. De cette façon, G. d‟Occam mit fin au problème de la philosophie
médiévale et libéra la philosophie de ses liens avec la théologie : c‟est ce qu‟on appelle le rasoir
d‟Ockham.
IV. La Renaissance
- la Renaissance est la redécouverte de la culture de l'Antiquité gréco-latine(naissance de la
philologie).
- L‟invention de la machine à écrire(imprimerie) par Johann Gutenberg(1394-1468) qui favorisa
19
19
C‟est à dessein que nous présentons ce philosophe du XVIIIe s, à la suite des deux précédents : il s‟insère difficilement, en
effet, dans le courant des Lumières.
21
20
H. KELSEN, cité in Dizionario di filosofia, Gli autori, le correnti, i concetti, le opere, ed. BUR, Milano, 2008.
22
chologiques et plus généralement à tout leur comportement.»21. Pour Tempels, il est bien clair
que les Bantous ont leurs propres idées et leur propre vision du monde.
c. Critiques à l’endroit de Tempels
« La Philosophie Bantoue » suscita bien des critiques de la part des philosophes et
théologiens :
1. Alexis Kagamé réfuta à la suite du père Mulago l‟identification de l‟être à la force vitale.
Selon ces philosophes, Tempels soutient le panvitalisme chez les Bantous où tout est force(force
animale, force végétale, force humaine,…).
2. Les critiques les plus vives de ce courant seront faites par Paulin Hountondji, Marcien Towa et
Fabien Eboussi Boulaga22. Malgré toutes ces critiques comme le reconnaît P. Hountondji, La
Philosophie bantoue a ouvert la voie à toutes les analyses ultérieures dans la reconstruction
«d‟une vision du monde spécifique, supposée commune à tous les Africains soustraite à l‟histoire
et au changement et, par surcroît, philosophique». Deux inconvénients majeurs à l‟endroit de la
Philosophie Bantoue:
- elle ne s‟adresse pas aux Africains, mais aux Européens, notamment aux coloniaux et aux
missionnaires. «Le Noir continue, de ce fait, d‟être tout le contraire d‟un interlocuteur: il est ce
dont on parle, un visage sans voix qu‟on tente de déchiffrer, entre soi, objet à définir et non sujet
d‟un discours possible »
- La prétention de Tempels à définir une philosophie collective des Africains à caractère
ethnologique, qualifiée par Hountondji d‟«ethnophilosophie ». 23 En se débarrassant du «concept
vulgaire» de la philosophie hérité de l‟ethnologie, P. Hountondji montrait par-là que la
philosophie africaine doit s‟appréhender de façon rigoureuse comme une réflexion méthodique
«ayant les mêmes visées universelles que celles auxquelles prétend n‟importe quelle philosophie
dans le monde »24 .
N. B : A la suite de ces critiques et positions des penseurs Africains vis-à-vis de Tempels, la
problématique de la philosophie africaine reste celle de s‟insérer dans le concert de la rationalité
universelle. Ainsi, derrière la question de la philosophie africaine se profile celle de l‟existence
du sujet comme condition du philosopher. Une véritable réflexion philosophique des africains
doit supplanter la simple activité philosophique qui fait parfois recours à l‟aspect simplement
culturel et politique sans une tentative avérée d‟un discours systématique sur ces données. Nous
pensons de notre part, comme chercheur dans ce domaine qu‟il serait urgent de fonder des
principes qui suscitent la systématisation de notre vision du monde en matière :
- Politique, économique,(de) bonne gouvernance et gestion des affaires publiques, (de)droit, …
L‟empreinte de l‟africanité dans le domaine de la connaissance et des idées reste un défi majeur à
relever par l‟intelligentsia africaine pour s‟affranchir des idées reçues afin de voir s‟appliquer sa
propre raison comme vision du monde à la croissance et au développement de l‟Afrique.
25
PLATON, La République, éd. électronique, v. :1,0: Échos du Maquis, 2011, p. 6.
26
Ibidem, p. 12.
25
philosophie dans le monde des affaires publiques. C'est pourquoi, dit-il, « je fus irrésistiblement
amené à louer la vraie philosophie et à proclamer que, à sa lumière seule, on peut reconnaître où
est la justice dans la vie publique et dans la vie privée. Donc les maux ne cesseront pas pour les
humains avant que la race des purs et authentiques philosophes n‟arrive au pouvoir ou que les
chefs des cités, par une grâce divine, ne se mettent à philosopher véritablement »27. Le chemin à
parcourir est bien loin d‟être commencé en ce qui concerne la science de la vertu de la raison que
Socrate avait voulu qu‟elle soit la vraie, sinon l‟unique science de l‟homme et pour l‟homme.
3. 3 Aristote
Comme pour Socrate et Platon, Aristote reconnaît qu‟en dehors du Bien Suprême auquel doit
tendre la pensée, tout acte d‟esprit et d‟intelligence est nul. La pensée est un acte selon Aristote
qui doit participer de l‟acte du Souverain Bien qui est Dieu. Cette perception onto-théologique de
la pensée suscite dans la philosophie d‟Aristote toute l‟ampleur qui doit accompagner l‟esprit de
recherche et la propension vers le bien, la jouissance et le bonheur de l‟homme. Considérer la
pensée comme acte participatif de l‟acte pur est très fascinant. « Or la Pensée, écrit- il, celle qui
est par soi(…) est la pensée de ce qui est le meilleur par soi, et la Pensée souveraine est celle du
Bien souverain. L'intelligence se pense elle-même en saisissant l'intelligible, car elle devient elle-
même intelligible en entrant en contact avec son objet et en le pensant, de sorte qu'il y a identité
entre l'intelligence et l'intelligible : le réceptacle de l'intelligible, c'est-à-dire de la substance
formelle, c'est l'intelligence, et l'intelligence est en acte quand elle est en possession de
l'intelligible».28 L‟effort de l‟intelligence humaine est de rester en état de travail constant pour
atteindre le Bien Suprême dans lequel il n‟y a aucun contraire. Faire honneur à la vertu de la
pensée comme acte et non comme simplement puissance équivaut à reconnaître en l‟homme sa
nature divine. Aristote l‟affirme avec exactitude dans l‟ Ethique à Nicomaque : « Mais si le
bonheur est une activité conforme à la vertu, il est rationnel qu'il soit activité conforme à la plus
haute vertu, et celle-ci sera la vertu de la partie la plus noble de nous-mêmes[…]. En effet, en
premier lieu, cette activité est la plus haute, puisque l'intellect est la meilleure partie de nous-
mêmes et qu'aussi les objets sur lesquels porte l'intellect sont les plus hauts de tous les objets
connaissables. Ensuite elle est la plus continue, car nous sommes capables de nous livrer à la
contemplation d'une manière plus continue qu'en accomplissant n'importe quelle action ».29 La
contemplation est l‟activité suffisante du philosophe et non l‟action qui appartient aux sciences
pratiques.
N. B : Ces trois classiques considèrent que le droit est une forme coactive(qui a pouvoir de
contraindre) de la moralité c‟est-à-dire les normes juridiques constituent l‟un des moyens pour
rendre les normes morales plus opérantes.
3. 4 culture asiatique
Contrairement à la Grèce antique dont l‟histoire remonte au VIe siècle avec les présocratiques, la
culture asiatique connue plusieurs siècles après, nous présente une éthique plus ancienne et toute
particulière aussi bien en Inde qu‟en Chine pour ne retenir que ces deux régions.
A. L’Inde
a. sources de l’Hindouisme et du bouddhisme
L‟éthique indienne est logée dans les Védas et les Védantas, livres fondateurs de l‟Inde et de
l‟hindouisme, rédigés dès le XVIIIe siècle av. J. C. La Bagahvad Gita, poème épique et
religieux, date des environs de 1000 av. J. C. et les Upanishad, qui sont des commentaires
mystiques s‟interrogeant sur le parcours de l‟âme, datent quant à eux du VIe siècle av. J. C.
L‟Hindouisme sous sa forme actuelle du Brahmanisme, est un ensemble de croyances, de cultes,
de rituels, de pratiques sociales, propres à l‟Inde. Le Brahman est le Principe métaphysique
suprême, mais une sorte d‟Absolu impersonnel, à la fois transcendant et immanent. Le
27
PLATON, Lettre VII, in Lettres, Belles Lettres, p. 30.
28
Ibidem.
29
ARISTOTE, Ethique à Nicomaque, éd. Les Echos du Maquis, V. : 1,0, Janvier 2014, p. 228.
26
d‟existence ».30
Dans la même perspective, Senghor affirme: « je suis convaincu que ce qui lie au plus
profond… ce qui nous lie est au-delà de l‟histoire Ŕ il est enraciné dans la préhistoire. Il tient à la
géographie, et l‟ethnie et, partant à la culture. Il est antérieur au christianisme et à l‟islam. Il est
antérieur à toute colonisation. C‟est cette communauté culturelle que j‟appelle « africanité ».31
Bimwenyi - Kweshi(mort le 06/02/2021) appelle «le niveau de sens fondamental» et qui semble,
dit- il « le plus résistant aux changements[…]. C‟est ce qui appartient à la sphère dite de «la
culture profonde» d‟un peuple, à «son caractère de base», à ses expériences-limites et à
l‟interprétation fondamentale qu‟il en dégage en réponse aux questions cruciales de
l‟existence ».32
N. B : Nous estimons en tout état de cause que la solidarité africaine demeure un constituant
éthique dont il faut partir pour la formalisation de la politique, du droit, de l‟économie(…) en
Afrique et faire des Etats africains des véritables Etats de droit(de l‟homme). L‟éthique de la
solidarité africaine dans ses axes majeurs doit inspirer à :
1. l‟extension de cette idée de la famille restreinte et clanique à l‟idée d‟une communauté
nationale et mondiale(l‟Afrique est le berceau de l‟humanité).
2. une législation qui tienne compte de la justice distributive où l‟égoïsme est prohibée à tous les
niveaux. A la notion du respect des interdits, des règles et des lois pour vivre en harmonie au sein
de la communauté.
3. Vénération de la hiérarchie des êtres : Etre suprême(Dieu), Ancêtres du clan, les
Anciens(morts et vivants).
4. respect des aînés et la sacralité du pouvoir politique public doit amener au respect des
institutions qui gouvernent nos Etats modernes.
5. considérer le concept de solidarité africaine comme étant corrélatif au concept de
démocratie(pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple selon la formule d‟A. LINCOLN)
et son corollaire Etat de droit(droit de l‟homme et Etat où ce ne sont pas des hommes mais des
lois qui dirigent la destinée d‟une nation).
30
Ibidem.
31
Ibidem.
32
O. BIMWENYI- KWESHI, Discours théologique Négro-Africain, Problème des fondements, éd. Présence Africaine, Paris, 1981,
p. 380.
29
33
L. M. MORFAUX et J. LEFRANC, Vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines, éd. Armand Colin, Paris, 2011-2012.
34
T. HOBBES, Le Citoyen( De Cive), éd. électroniques, v. : 1, 0: Les Échos du Maquis, 2013, p. 30.
35
Ibidem, p. 33.
36
J. LOCKE(1690), Traité du gouvernement civil, éd. électronique, Chicoutimi, Québec, 2002, P. 17.
37
Ibidem, p. 77.
38
Ibidem.
39
Ibidem.
40
Ibidem.
30
l‟homme auquel il faut recourir pour refonder la société actuelle faite des inégalités et des
injustices sociales. Somme toute, la fiction De l‟état de nature telle que présentée par les tenants
du Droit naturel éloigne, selon Rousseau, de la réalité quant à considérer l‟homme primitif
comme un être jouissant de toutes les facultés humaines dans sa vie sociale. R. Derathé esquisse à
ce sujet: « Rousseau écarte cette fois «le principe de la sociabilité» et la description qu‟il donne
de la condition primitive de l‟homme est en opposition directe avec ses prédécesseurs ».
J.-J Rousseau présente les caractéristiques éthiques fondamentales qui retracent la naturalité de
l‟homme avant la naissance de la société : liberté naturelle et perfectibilité.
Chez Rousseau, c‟est la liberté et non la raison qui distingue l‟homme de l‟animal. La liberté dont
il est question ici, est la liberté métaphysique ou naturelle et non la liberté au sens juridique et
politique dont le contrat social fait l‟objet.
1. Liberté naturelle : Dans l‟état de nature, l‟homme par rapport à l‟animal, manifeste sa
grandeur dans l‟expression de sa liberté: « La nature commande à tout animal et la bête obéit.
L‟homme éprouve la même impression, mais il se reconnaît libre d‟acquiescer, ou de résister; et
surtout dans la conscience de cette liberté que se montre la spiritualité de son âme: car la
physique explique en quelque manière le mécanisme des sens et la formation des idées; mais dans
la puissance de vouloir ou plutôt de choisir, et dans le sentiment de cette puissance, on ne trouve
que des actes purement spirituels, dont on n‟explique rien par les lois de la mécanique ».41
Sartre conçoit la liberté comme étant: un pouvoir spirituel de dire "oui" ou "non", se découvrant
dans l'angoisse; conscience et liberté sont une et même chose. Sans la volonté, on ne saurait dire
de l'homme qu'il est libre puisqu'il n'aurait pas d'alternative dans ses décisions. Il serait contraint
par l'instinct naturel comme les animaux inférieurs. En ce sens, le mot liberté est synonyme
d'autonomie.
2. Perfectibilité : Si la liberté est un sentiment intérieur, la perfectibilité permet à l‟homme
libre de se frayer un chemin qui répondrait à ses besoins et Rousseau la définit comme: « qualité
très spécifique[…] sur laquelle il ne peut y avoir contestation, c‟est la faculté de se perfectionner;
faculté qui, à l‟aide des circonstances, développe successivement toutes les autres, et réside parmi
nous tant dans l‟espèce que dans l‟individu, au lieu qu‟un animal est, au bout de quelques mois,
ce qui sera toute la vie, et son espèce, au bout de mille ans, ce qu‟elle était la première année de
ces mille ans».42 L‟homme, tout en étant homme à part entière, est appelé à se parfaire au jour le
jour pour devenir pleinement personne humaine. Pour se faire, il a pour devoir de mener sa vie
selon un rythme qui correspond à la mise en pratique de certaines normes pouvant l‟aider à sa
propre construction. L‟application de ses règles que lui propose la morale lui permet de respecter
une échelle de valeurs qui coordonne les relations sociales.
4. 3. Origine du mal dans la société
A. Amour de soi-même
Naturellement parlant, il y a des besoins qu‟on ne peut nier à un être humain quel qu‟il soit.
« Le premier sentiment de l‟homme, dit J.-J Rousseau, fut celui de son existence, son premier
soin celui de sa conservation43. Les produits de la terre lui fournissaient tous les secours
nécessaires, l‟instinct le porta à en faire usage. La faim, d‟autres appétits lui faisant éprouver tour
à tour diverses manières d‟exister »44. L‟homme comme tous les autres animaux se nourrit de ce
sentiment positif de veiller à soi-même, de se défendre contre les danger, de manger et se
conserver.
41
J. ŔJ ROUSSEAU , Discours sur l‟origine et fondements de l‟inégalité parmi les hommes, Paris-Bordas, 1985, p. 17.
42
Ibidem, p. 18.
43
La conservation est le thème privilégié de Locke et autour duquel son élaboration philosophique tourne. Il dépasse en outre les
bornes de l‟ amour de soi pour s‟ accoster à l‟ amour-propre car enfin de compte Locke ramènera le sens de la conservation
seulement de la propriété(Locke, Traité du Gouvernement civil(1690).
44
Ibidem, p, 29.
31
B. Amour-propre
A l‟opposé de l‟amour de soi se trouve l‟amour-propre. B. Pascal écrivait: « La nature de
l‟amour-propre et de ce moi humain est de n‟aimer que soi et de ne considérer que
soi ».45L‟amour-propre est le père de tous les vices et antivaleurs qui déchirent la conscience
humaine. L‟origine de l‟amour-propre est la société qui pousse l‟homme à vivre en dehors de lui-
même et dans l‟opinion des autres : le luxe, la concurrence, orgueil, … Le décentrement de
l‟homme vis-à-vis de sa propre nature(conscience) active en lui des sentiments destructeurs de sa
vraie authenticité et son rapport avec les autres. L‟amour propre caractérise en effet la corruption
de la nature humaine. Elle est à la source de l‟égoïsme et de la passion pour le plaisir personnel.
4. 4. Conscience quid ? :
S. T. d‟Aquin définit la conscience comme un acte et non une puissance(capable de, un principe
de mouvement ou de changement), elle joue le rôle d‟attester un acte. Deux verbes sont attachés à
la conscience: instigare(pousser à) et ligare(lier à, obliger à). Ex:la conscience m‟oblige à…Mais
la conscience peut être ignorée, déposée, émoussée à cause des passions.
Dans le Livre IV d‟Emile, le citoyen de Genève répond: « Il est donc au fond des âmes un
principe inné de justice et de vertu, sur lequel, malgré nos propres maximes, nous jugeons nos
actions et celles d'autrui comme bonnes ou mauvaises, et c'est à ce principe que je donne le nom
de conscience »46. « La conscience, rassure Rousseau, est le plus éclairé des philosophes: on n'a
pas besoin de savoir les Offices de Cicéron pour être homme de bien; et la femme du monde la
plus honnête sait peut-être le moins ce que c'est qu' honnêteté »47.
Rousseau trouve dans la conscience le siège de la vertu et de la morale et en exalte la
grandeur et la prééminence: « Conscience! conscience! instinct divin, immortelle et céleste voix;
guide assuré d'un être ignorant et borné, mais intelligent et libre; juge infaillible du bien et du
mal, qui rends l'homme semblable à Dieu, c'est toi qui fais l'excellence de sa nature et la moralité
de ses actions; sans toi je ne sens rien en moi qui m'élève au-dessus des bêtes, que le triste
privilège de m'égarer d'erreurs en erreurs à l'aide d'un entendement sans règle et d'une raison sans
principe. Grâce au ciel, nous voilà délivrés de tout cet effrayant appareil de philosophie: nous
pouvons être hommes sans être savants; dispensés de consumer notre vie à l'étude de la morale,
nous avons à moindres frais un guide plus assuré dans ce dédale immense des opinions humaines.
Mais ce n'est pas assez que ce guide existe, il faut savoir le reconnaître et le suivre. S'il parle à
tous les cœurs, pourquoi donc y en a-t-il si peu qui l'entendent? ».48
a. Incorruptibilité de la conscience
Rousseau en considérant la conscience innée, déclare par le fait même, qu‟elle constitue
un principe incorruptible c‟est-à-dire elle est le siège de la naturalité de l‟homme. Elle demeure
comme la nature humaine, immuable et éternelle. Parlant à Emile, le précepteur Rousseau dit:
« Partout tu n'as vu régner sous ce nom que l'intérêt particulier et les passions des hommes. Mais
les lois éternelles de la nature et de l'ordre existent. Elles tiennent lieu de loi positive au sage;
elles sont écrites au fond de son cœur par la conscience et par la raison; c'est à celles-là qu'il doit
s'asservir pour être libre; et il n'y a d'esclave que celui qui fait mal, car il le fait toujours malgré
lui».49
Si les maximes morales sont acquises avec l‟aide de la raison, ce sont-elles qui peuvent être
corrompues mais la voix de la conscience ne peut pas se pervertir. Un homme sans conscience, ce
n‟est plus un homme, il devient un animal dépravé. Quand la conscience n‟ a pas été exercée on
est souvent amené à s‟excuser, à éprouver des remords(qui s‟excuse s‟accuse). Grace à sa
conscience, l‟homme demeure pour l‟éternité naturellement bon, sa conscience peut être éteinte
mais jamais anéantie. « On nous dit, note le Genevois, que la conscience est l'ouvrage des
45
B. PASCAL, Pensées, éd. Henri Massis, Paris, 1958, p. 153
46
Idem, Emile ou de l‟éducation, Livre IV, éd. électronique, Chicoutimi, Québec, 2002, p. 81.
47
Ibidem, p. 60.
48
Ibidem, p. 84.
49
J.-J ROUSSEAU, Emile ou de l‟éducation, éd. électronique, Liv. IV, Chicoutimi, Québec, 2002, p. 122.
32
préjugés; cependant, je sais par mon expérience qu'elle s'obstine à suivre l'ordre de la nature
contre toutes les lois des hommes. On a beau nous défendre ceci ou cela, le remords nous
reproche toujours faiblement ce que nous permet la nature bien ordonnée, à plus forte raison ce
qu'elle nous prescrit ».50 « Voyez aussi quelle indignation s'allume en nous quand cette attente est
frustrée! La conscience s'élève et murmure contre son auteur; elle lui crie en gémissant: Tu m'as
trompé! »51. Dire au fond de ma conscience ne veut rien dire car la conscience n‟a ni de fond ni
de sommet, elle est une opération de l‟esprit. Rousseau déclare : par la raison seule
indépendamment de la conscience, on ne peut établir une loi naturelle.
Le vrai homme réside dans la conscience tel nous rapporte aussi la sagesse africaine.52
Modes opératoires de la conscience :
- A chaque instant de sa vie, le sujet est présent par rapport à lui-même par la conscience.
- La conscience fait appel à la mémoire et au souvenir
- Comprendre et synthétiser dans l‟unité d‟un être une multiplicité et une diversité empirique.
Emmanuel Levinas a attiré aujourd‟hui à nouveau l‟attention sur le fait que le visage humain,
nu et vulnérable, essentiellement pauvre, n‟impose pas moins le respect. L‟accès au visage est
d‟emblée éthique. Un assassin ne peut regarder sa victime dans les yeux, comme s‟il pressentait
la présence de quelque chose de sacré 53. Comme Emmanuel Levinas le rappelle avec insistance,
autrui est celui que je ne peux pas inventer. Il résiste de toute son altérité à sa réduction au même,
fût-ce (et même surtout) au même que moi, à l‟ipséité de mon propre pouvoir-être. La conscience
implique les notions de la volonté(instance de décision) et de la responsabilité(éthique de la
responsabilité selon Max Weber, tient compte rationnellement des moyens disponibles et des
conséquences dans une situation donnée).
b. Etat social : C‟est un état qui est né par un funeste hasard( c‟est-à-dire l‟état social au sein
duquel les hommes se sont retrouvés à vivre n‟a jamais été préparé a priori) et Rousseau
détermine la qualité de son fondateur et les conséquences de cette genèse improvisée de l‟état
social : « Le premier qui, ayant enclos un terrain, s'avisa de dire: Ceci est à moi, et trouva des
gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, de
guerres, de meurtres, que de misères et d'horreurs n'eût point épargnés au genre humain celui qui,
arrachant les pieux ou comblant le fossé, eût crié à ses semblables: Gardez-vous d'écouter cet
imposteur; vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n'est à
personne ».54 Le rôle des arts des sciences de cet amour propre est déplorable selon Rousseau:
« Le besoin éleva les trônes; les sciences et les arts les ont affermis ».55 Besoin il y a, pour
Rousseau, de remettre en question non seulement cette société injuste mais aussi le savoir
intellectuel sur lequel elle est fondée. Le mal de l‟inégalité est sociétal, il n‟est pas naturel. Il faut
mettre sur pied un contrat social comme expression de la volonté générale pour régler la vie de
l‟homme et de ses semblables dans la société.
4. 5. Fondements éthiques d’un Etat(de droit)
a. volonté de tous et volonté générale :
J.-J Rousseau pour exprimer l‟unanimité ou le mandat impératif du peuple, tente d‟établir une
différence non facile entre ces deux termes, il écrit : « Il y a souvent bien de la différence entre la
volonté de tous et la volonté générale; celle-ci ne regarde qu‟à l‟intérêt commun, l‟autre regarde à
l‟intérêt privé, et n‟est qu‟une somme de volontés particulières ».56
50
Ibidem p. 59.
51
Ibidem, p. 75.
52
La pensée de Baluba exprime bien cette idée :“Muntu mwine udi mu mucima”(traduction: le vrai homme se trouve dans le cœur).
53
Cf. Emmanuel Levinas, Totalité et infini, La Haye, Martinus Nijhoff, 1971 ; Humanisme de l’autre homme, Paris, Fata Morgana,
1972 ; les exposés spécialement clairs de Éthique et infini, Paris, Fayard, 1982, p. 89-132.
54
J .-J ROUSSEAU, Discours sur l‟origine et les fondements de l‟inégalité parmi les hommes, éd. électr., Chicoutimi, Québec, 2003,
p. 29.
55
J,-J ROUSSEAU, Discours sur les sciences et les arts, éd. Elect., v. :1,0 : les Echos du Maquis, 2011, p. 8.
56
E. CASSIRER , Op. cit., p. 40.
33
57
J.-J ROUSSEAU, Du Contrat social, éd. Mondadori, Milano, 2004, p. 54.
58
MONTESQUIEU, De l‟ Esprit des lois, Deuxième partie(livres IX à XIII)(1748), éd. électronique, Chicoutimi, Québec, 2002, P.
45.
59
MONTESQUIEU, op. cit., p. 46 (Montesquieu se trouve conditionné par la conception anglaise du pouvoir de souche libérale, bien
qu‟ ayant la volonté de réformer la politique, opte, pour la Monarchie modérée et de cette façon, la théorie de la séparation des
pouvoirs, justifie la Constitution de l‟ Angleterre et n‟ opérerait en rien la garantie voulue pour une réforme fondamentale du pouvoir
du peuple pour le peuple. La monarchie et les institutions seront pour toujours détentrices du pouvoir et le peuple sera de ce fait à
leur merci. Nous en ferons des amples critiques au sixième chapitre de cette dissertation.
34
sont naturelles et elles sont inscrites dans la conscience de tout homme et donc elles sont a priori
et universelle. L‟apriorisme de la loi morale, l‟universalité éthique et la morale du devoir
systématiquement développés par E. Kant, trouvent leur formulation de considérer la conscience
comme la première instance de législation et de jugement. Le fondement de la morale n‟est pas à
rechercher en dehors de nous-mêmes( réfutation de l‟utilitarisme). Tout homme muni de
conscience et de raison est sujet à tout jugement de valeurs devant les impératifs de sa raison.
2. Les impératifs hypothétiques et l’impératif catégorique(E. Kant) :
a. Les impératifs hypothétiques : selon E. Kant, l‟usage de la raison est techniquement pratique
en vue d‟une fin qui satisfasse un intérêt matériel. C‟est un agir par inclination d‟où l‟adage : « la
fin justifie le moyen ».
b. L‟impératif catégorique ou loi morale commande impérativement la volonté au-delà de tout
intérêt personnel : agir juste par respect de loi. La morale de Kant est une morale du devoir. Son
fondement est une obligation morale qui rend bon l‟homme suivant des normes qui coordonnent
l‟agir libre de l‟homme sous l‟égide de la raison qui constitue sa lumière. Ainsi, elle requiert
comme mobile de l‟activité humaine le devoir pour le devoir. Cet agir moral doit être
objectivement nécessaire :
- « Agis toujours d‟après une maxime telle que tu puisses vouloir qu‟elle devienne en même
temps loi universelle ».
- « Agis de telle sorte que tu traites l‟humanité dans ta personne et dans celle d‟autrui toujours en
même temps comme une fin et jamais comme un moyen ». c‟est à ce principe que se déduit le
principe du droit : agis extérieurement de telle sorte que le libre usage de ta volonté puisse
coexister la liberté de chacun selon une loi universelle.
- « Agis comme si par ta volonté la maxime de ton action devait être érigée en LOI UNIVERSELLE
60
DE LA NATURE » . L‟action de l‟homme doit tenir compte de l‟autre. Autrement dit, la prise en
charge d‟autrui dans mes jugements me facilite à pourvoir mieux vivre, car il est indispensable à
mon propre épanouissement. L‟impératif catégorique kantien permet à l‟homme de sortir de lui-
même en tenant compte de l‟autre. Il brise les murs de l‟égoïsme et de toutes tendances visant
l‟utilisation comme moyen. Il prône une prise en charge de l‟ensemble sans ignorer personne,
pour que chaque action puisse être universellement admise. Ainsi, Kant opte pour un monde où
tout un chacun se libère de l‟instinct égoïste ; travaillant ainsi pour le bonheur de l‟humanité.
3. Le politique moral et le moraliste politique(E. Kant)
Le passage de l‟éthique à la politique et au droit est une question d‟ordre ontologiquement
philosophique. Le substrat éthique de la politique et du droit doit résulter de la concomitance de
plusieurs valeurs à prendre en compte dans l‟élaboration et la praxis des lois. La distinction entre
le politique moral et le moraliste politique que nous fait E. Kant est d‟une grande valeur
juridique. C‟est du véritable machiavélisme que dénonce Kant quand il distingue dans Vers la
paix perpétuelle, le politique moral et le moraliste politique:
- le politique moral applique la morale comme a priori à ses actions. Le bien ou la vertu doit être
postulé avant toute action. « Au politique moral qui est l‟homme de bien s‟oppose au moraliste
politique ».
- le moraliste politique applique la morale a posteriori, c‟est un politicien machiavélique dont le
but est d‟accommoder la morale à ses desseins et de justifier par la nécessité des circonstances,
les actes les plus contraires au droit. Les trois principes suivants concourent à l‟application de
cette morale machiavélique :
a. Fac et excusa : agis d‟abord par la force ou la ruse, tu justifieras ensuite ton action.
b. fecisti nega, tu feras, au besoin reposer la faute sur ceux-là même que tu pousses à bout
c. divide et impera, divise tes sujets ou les gouvernants entre eux, tu imposeras mieux ainsi ta
volonté ».61
60
E. KANT, Fondements de la métaphysique des mœurs, Paris, Hatier, 1963, p. 42.
61
E. KANT, Vers la paix perpétuelle, P.U.F., Paris, 1958, p. 63.
35
N :B : Pour éviter tout machiavélisme dans la conception du pouvoir politique public d‟une part
et dans l‟élaboration de nos lois, l‟obéissance à l‟impératif catégorique de la conscience reste de
rigueur.
B. Du Législateur
1.Un législateur quid ?
Le Législateur est la personne qui donne des lois à un peuple. Dans le contexte actuel de nos
Etats, il ne s‟agit plus d‟un individu mais un pouvoir attribué aux Assemblées nationales qui
assume le pouvoir législatif( national et provincial). Elaborer des lois justes requière non
seulement compétence sur le plan académique mais aussi et surtout efficacité sur le plan moral
dans la saisie du bienfondé d‟une loi à donner à son peuple. Si les juristes sont des légalistes et
des défenseurs des lois, ils ne doivent pas être au service de n‟importe quelle loi.
2. Un Législateur, pas n’importe qui
J.-J Rousseau écrit: « Le législateur est à tous égards un homme extraordinaire dans l‟Etat. S‟il
doit l‟être par son génie, il ne l‟est pas moins par son emploi[…]c‟est une fonction particulière et
supérieure qui n‟a rien de commun avec l‟empire humain; car si celui qui commande aux
hommes ne doit pas commander aux lois, celui qui commande aux lois ne doit pas commander
aux hommes; autrement ses lois, ministres de ses passions, ne feraient souvent que perpétuer ses
injustices, et jamais il ne pourrait éviter que des vues particulières n‟altérassent la sainteté de son
ouvrage[…].selon le pacte fondamental il n‟y a que la volonté générale qui oblige les particuliers
et qu‟on ne peut jamais s‟assurer qu‟ une volonté particulière est conforme à la volonté générale,
qu‟après l‟avoir soumise aux suffrages libres du peuple. Ainsi l‟on trouve à la fois dans l‟ouvrage
de la législation deux choses qui semblent incompatibles: une entreprise au Ŕ dessus de la force
humaine et pour l‟exécuter, une autorité qui n‟est rien »62 . Que le législateur soit un individu(
initiateur d‟une loi) ou une Assemblée qui vote une loi, la loi appartient au peuple qui doit la
ratifier. Les principes éthiques énoncés(supra) doivent être pris en compte, le contexte et la
géographie des bénéficiaires, tel que l’Esprit des lois de Montesquieu le recommande, feront
qu‟une loi soit éthiquement correcte et soit considérée comme véritablement raison
humaine(Montesquieu) et expression de la volonté générale du peuple(J.-J Rousseau : un
législateur n‟est pas un faiseur des lois mais celui qui sait conformer les lois à la volonté générale
du peuple).
C. Ethique ou déontologie en matière de droit
Littéralement le terme droit, provient du substantif latin directum ou de son adjectif directus
qui signifie, droiture, sans courbure, conforme à la vérité et à une règle. Le terme classique était
jus, juris . L‟adjectif droit renvoie à ce qui est juste, idéal, une valeur. Le droit objectif ou positif
est un ensemble des règles fixées par une autorité compétente et qui régissent les relations des
hommes en société. On distingue le droit privé entre les personnes et le droit public, entre les
personnes et l‟Etat, le droit international(public et privé), droit pénal(porte sur la répression des
crimes et d‟autres infractions à l‟ordre public en déterminant la responsabilité pénale et civile).
La procédure réglemente la recherche et le jugement des délinquants. Avec la mondialisation, on
parle aujourd‟hui du droit commercial, du droit du travail, du droit administratif,…et de
juridictions correspondantes : tribunal de commerce, conseil de prud‟hommes, tribunal
administratif, …
En ce qui nous concerne, à la question qu‟est-ce que le droit, seule la raison peut répondre
selon E. Kant car elle est l‟unique fondement de toute législation possible : agis de telle sorte que
tu traites l‟humanité dans ta personne comme dans la personne d‟autrui comme une fin et jamais
simplement comme un moyen.(cfr. Troisième chapitre). Toutes les notions de droit de l‟homme
trouvent leur fondement dans cette position axiologique de l‟homme. Un juriste qui s‟applique à
la pratique du droit doit être un homme extraordinaire qui sait que l‟éthique constitue le for
interne du droit et qu‟il n‟existe pas de droit sans devoir. Le devoir pour lui signifie ce à quoi on
62
J.-J ROUSSEAU, Du Contrat social, éd. Mondadori, Milano, 2004, p. 58.
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est tenu par la loi. Toute la vie et l‟action d‟un juriste qu‟il soit magistrat ou avocat sont
réglementées par différentes lois qui régissent notre législation.
1. Magistrature
a. Un magistrat est toute personne investie d‟une autorité juridictionnelle :
- membre de l‟ordre judiciaire( avocat, conseiller, juge, procureur) qui preste dans les cours et
tribunaux, et des cours.
- un officier civil revêtu d‟une autorité administrative : en France le président de la république est
appelé premier magistrat et ici chez nous il est appelé magistrat suprême.
b. Le serment : « je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder religieusement le
secret des délibérations et de me conduire en tout comme un digne et loyal
magistrat »(BONTHOUX, J.P, « Ethique et pratique professionnelle de magistrat » dans Revue de
la gendarmerie nationale, p. 62.).
c. devoirs du magistrat :
- l‟impartialité(qui ne sacrifie point la justice , la vérité au bénéfice des considérations
particulières)
- le devoir de réserve(discret)
- la loyauté(probité, honnêteté, droiture)
- l‟intégrité - la dignité(gravité dans les manières, respect de soi-même et d‟autrui qui n‟ a pas à
se marquer dehors)
- la diligence(promptitude dans l‟exécution, empressement, zèle) - la discrétion(discernement,
retenue judicieuse dans les paroles et dans les actions ex : les postings sur le net).
2. Avocat
a. Est un professionnel du droit inscrit à un barreau, chargé de défendre, d‟assister une partie dans
un procès et de plaider devant un tribunal. Un avocat général est un membre du ministère public
assistant le procureur général notamment à la cour de cassation et dans les cours d‟appel. L‟ordre
des avocats : ensemble des avocats inscrits près d‟une cour, d‟un tribunal et représentés par un
bâtonnier . En dehors de la loi à laquelle tout juriste est tenu, il est aussi tenu de respecter les
clauses du règlement intérieur établi par sa corporation(Ordre) et à d‟autres instruments
nationaux et internationaux relatifs à sa carrière.
b. serment : « je jure comme avocat d‟exercer mes fonctions avec dignité, conscience,
indépendance, probité et humanité ». Manquer à ce serment prononcé devant la cour d‟appel,
entrainerait à des sanctions disciplinaires.
c. devoirs d’un avocat :
- devoir de diligence : vis-à-vis de son engagement avec son client, l‟avocat doit être perspicace
et solide dans sa prestation afin de gagner le procès. Il doit conduire chaque affaire avec célérité
et management.
- le devoir de véracité et de loyauté : comme professionnel de la loi, l‟avocat apprendra à dire la
vérité, être loyal et honnête aussi bien à l‟endroit de son client que de son bâtonnier et de ses
collègues.
- devoir de délicatesse et la probité : En dehors des bonnes manières et de l‟élégance dues à cette
noble profession, l‟avocat doit être délicat dans la fixation de ses honoraires. On ne devient pas
avocat pour faire des rançons de n‟importe quelle manière et la cupidité dans ce domaine n‟est
pas à démontrer. Le devoir de probité l‟oblige à ne pas produire des fausses pièces en justice, de
se comporter dignement en toutes circonstances c‟est-à-dire vis-à-vis du tribunal(être discipliné),
dans ses rapports avec ses confrères et dans ses relations avec le reste de la communauté.
- le devoir de secret professionnel : un avocat apprendra à ne pas abuser de la confiance de son
client, il ne devra pas divulguer le secret de son client à la contrepartie. Rompre le secret
professionnel est une infraction très grave sur le plan déontologique et dont les sanctions peuvent
varier jusqu‟à la radiation au barreau.
- le devoir d‟indépendance : l‟avocat dans sa prestation même s‟il doit défendre les intérêts de
son client, il restera indépendant vis-à-vis de l‟objectivité de la loi.