COURS DE PSYCHO DU TRAVAIL (L1Comm)

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[1]

INTRODUCTION

L‘étude de la psychologie en général est un phénomène récent. Et la


connaissance et la compréhension de la nature humaine ont toujours été parmi
les préoccupations majeures des plusieurs disciplines telles que: la philosophie,
l‘économie, l‘anthropologie, la sociologie, le droit, la médecine, l‘ingénièrie
etc.... Cependant, toutes les branches de la psychologie sont donc jeunes; «la
psychologie clinique, la psychologie scolaire, la psychologie du travail» et parmi
elles, la psychologie du travail (industrielle) est sans nul doute la plus neuve. Le
premier livre de psychologie du travail (industrielle) ne date que depuis 1913
sous la signature de Hugo MUNSTENBERG et traite de «the psychology of
industrial effecieny ». La jeunesse de cette nouvelle discipline n‘a nullement
empêché le monde moderne du travail de faire largement appel à l‘expertise de
ses spécialistes.

Il n‘y a pas si longtemps qu‘un employeur considérait la main-d‘oeuvre comme


un simple coût de production et déployait tous ses efforts pour maintenir ce coût,
comme tous les autres, aussi bas que possible. En effet, les salaires étaient fixés
empiriquement de façon subjective et approximative. Il n‘existait pratiquement
pas de cours de formation pour les ouvriers et pour les cadres. Les nouveaux
engagés étaient affectés sans tenir compte de leurs aptitudes ni motivations et se
permettaient de poser des questions à leurs voisins lorsqu‘ils étaient en
difficultés. Aucune disposition ne prévoyait d‘assurances médicales ou sociales.
Les retraites obligatoires à partir d‘un certain âge n‘existaient pratiquement pas.
Les nouveaux employés étaient sélectionnés par des méthodes et techniques qui
ne présentaient guère plus de garantie que le simple choix du hasard. De telles
méthodes de sélection, totalement inefficientes, pouvaient être tolérées par les
chefs d‘entreprise, aux époques de licenciements sans indemnités ni préavis et
des embauchés sans planification ni critères. «La règle suivie depuis des
générations, et presque universellement en vigueur était: le supérieur ou contre-
maître mieux le supérseur a raison et les ouvriers ont tort ». Voilà autant
d‘éléments qui justifient ‗l‘intérêt et la nécessité d‘être initié à la psychologie du
travail et des organisations pour tenir toujours plus haut le niveau de la
production de biens et de services de qualité. A ce sujet, on relève que la plupart
des patrons ont accepté le principe qu‘une force de travail insatisfaite et
mécontente augmente, dans des proportions énormes, le coût du chapitre
«ressources humaines » par rapport au coût des matières premières et de
l‘équipement.

De ce fait, ce cours a été destiné aussi bien aux étudiants en psychologie toutes
options confondues pour les familiariser déjà avec le monde du travail auquel ils
seront appelés demain, qu‘à ceux des autes spécialités, tels que les étudiants en
[2]

économie, en gestion, en communication, en sociologie, en droit, et pourquoi


pas en sciences appliquées avec des ingénieurs, des médecins du travail, et
autres agents de sécurité. Aussi, ce cours convient agréablement bien aux
professionnels des ressources humines, aux cadres et maîtrise et à tous ceux qui
veulent s‘aventurer dans l‘administration, l‘industrie, le commerce, les
organisations non gouvernementales etc. Mais ce qui suppose bien sûr les
connaissances psychologiques élémentaires.

A la fin du cours, l‘étudiant doit être capable notamment : (i) de connaître les
différencs questions traitées en psychologie du travail, ainsi que les différents
domaines de recherche et d‘intervention de cette discipline scientifique ; (ii) de
décrire et expliquer les aspects relatifs à la psychologie du personnel ; (iii)
d‘analyser sommairement un travail (identification de l‘emploi, description des
tâches, spécification des emplois et classification des emplois) ; (iv) d‘identifier
et expliquer, le contexte de travail, les facteurs de risques psychosociaux et de
risques professionnels (maladies professionnelles, accidents de travail…)…
[3]

CHAPITRE 1 : CONSIDERATIONS GENERALES

Section 1 : Le Travail

1.1. Qui travaille? Qu'entend-on par travail?

Dans un auditoire, quand on pose la question suivante : « qui travaille ici ? »,


souvent seuls les salaries se manifestent… On peut se demander si un étudiant-
jobiste travaille, si un bénévole travaille, si un artiste, un artisan travaille, si nous
sommes en train de travailler. Ce sont des questions importantes car considérer
qu'un artiste travaille lui donne le droit aux services sociaux réservés aux
travailleurs.

Une activité n'est pas (nécessairement) considérée comme un travail. Ce que


l‘on nomme travail présente un caractère de contrainte (en référence, dans la
littérature de langue française, au travail défini comme « activité forcée » pour
reprendre les mots de H. Wallon (1930)).

La notion de contrainte a deux sens. Nous sommes contraints au travail :


caractère forcé, obligation de travailler qui est à la fois une obligation financière,
morale, sociale. On considère que c'est normal d'aller travailler. De plus, nous
subissons des contraintes au travail : cadre contraignant du contexte, de la nature
du travail. On doit se lever tous les matins, suivre des horaires, avoir un chef,
des normes de production.

1.2. Historique et évolution de la notion du travail

Durant l'antiquité, les Grecs méprisaient le travail, les citoyens ne travaillent


pas, seuls les esclaves travaillent. Les citoyens faisaient de la politique, de la
rhétorique.

Au 5eme siècle (référence étymologique), en latin, le « tripalium » est un engin


de torture forme de 3 pieux. Le travail au temps des Romains était une tâche
dégradante.

Dans la culture judéo-chrétienne, le travail renvoie à la punition que Dieu aurait


infligée à l‘homme de « gagner son pain à la sueur de son front », se donner de
la peine, …
[4]

Ce serait avec la Révolution industrielle, et avec l‘affirmation de valeurs issues


du protestantisme et du libéralisme économique, que le travail aurait acquis une
image positive.

Pour les protestants, l'oisiveté et la mendicité sont bannies. Le travail devient un


devoir, une obligation.

Au XIXeme siècle: le travail est ce qui crée de la richesse, le travail est un


facteur de production, la richesse pour celui qui organise le travail, il génère du
travail pour les autres et de la richesse pour lui.

On a pu voir s‘affronter au cours du XXeme siècle des courants de pensée


divergents sur la valeur « travail ».

Pour la pensée chrétienne, le travail est une activité fondamentale de l‘homme, il


est d‘utilité sociale, travailler permet la charité.

Pour la pensée humaniste, le travail comme lieu de socialisation, de la formation


de l‘identité individuelle et collective. Les travailleurs se regroupent en métier,
corporation, ils sont regroupés ce qui crée leur identité.

Pour la pensée marxiste, le travail est fondamentalement social. Opposition entre


le vrai travail (essence de l‘homme – façonner la nature par le travail) et la
réalité aliénée du travail.

Meda et Rifkin parlent du déclin du monde du travail: Emploi et travail, plein


emploi et sa remise en cause (Meda, 1995) (le plein emploi est un travail avec
des conditions acceptables pour tous). La fin du travail (Rifkin, 1995):
l‘automatisation va engendrer la raréfaction de l‘emploi, il y aura assez de
machine pour remplacer l'homme. Les psychologues ne sont pas d'accord avec
lui, il doit y avoir une distribution du travail entre la machine et l'homme.

Dans les années 60, les sociologues pensaient qu'en 2000, la société serait une
société des loisirs, il n'y aurait plus besoin de travailler pour produire, on est loin
de la réalité!

1.3. Valeurs et place du travail dans la vie

Il s‘agit ici d‘établir la relation existant entre le travail et son sens ou sa


signification. Quand on demande : que faites-vous dans la vie? Souvent la
[5]

réponse a trait à l‘activité professionnelle. Le travail est souvent un critère


d‘identification et de classification sociale.

Jahoda (1982) a fait des recherches sur le chômage et sa répercussion sur les
personnes. Il en a déduit quelques fonctions du travail : le travail structure la
temporalité des individus (contraintes de gestion du temps (horaires)). Il permet
des contacts sociaux (socialisation) en dehors de la sphère familiale. Grace à la
production de biens ou de services, il insère l‘individu dans un collectif avec un
but commun, dans la société. Il définit le statut social et contribue à définir
l‘identité de l‘individu. Il constitue une source d‘activités.

Ceci explique certaines difficultés rencontrées par les personnes sans travail
(culpabilité, exclusion sociale, faible image sociale…). Toutefois, compte tenu
de l‘évolution du marché de l‘emploi, Roques et Curie montrent que ceci
dépend de la signification du travail et sa fonction dans les systèmes d‘activités
des personnes. Il faut donc intégrer dans le modèle le sens du travail pour
l'homme.

Faire de la psychologie du travail, c’est aussi devoir traiter du sens du travail


pour l’homme : quelles sont les significations attribuées au travail par l‘individu,
quels en sont les concomitants psychologiques? C'est aussi l'orientation et
l'insertion professionnelle, l'intégration « dans la vie active », les aspirations
professionnelles, l'impact des conditions de travail sur le sens du travail, la
conciliation vie au travail/hors travail…

Avant de traiter du sens du travail, il convient comprendre d‘abord le mot « sens


». Celui-ci a deux racines. Du latin « sensus », il signifie la faculté d‘éprouver
des impressions, la faculté de connaître, voire de juger. Il signifie également
l‘idée ou l‘image que représente un signe ou une expérience. De par sa racine
germanique « sumo », il signifie la direction, l‘orientation que prend quelque
chose. En psychologie, le sens se rapporte essentiellement à l‘expérience de
cohérence, de cohésion, d‘équilibre, voire de plénitude. Le sens est aussi associé
à la raison d‘être et de vivre, à la vocation (Frankl, 1969).

Dans sa publication intitulée « Donner un Sens au Travail », Morin (2006) note


que le travail joue un rôle important dans le développement de la personne. Il lui
permet d‘assurer sa subsistance, c‘est certain, mais ce n‘est pas là son seul
intérêt. Le travail est avant tout une activité par laquelle une personne se définit,
s‘insère dans le monde, actualise son potentiel, et crée de la valeur, ce qui lui
donne, en retour, le sentiment d‘accomplissement et d‘efficacité personnelle,
voire peut-être un sens à sa vie.
[6]

À partir des différentes acceptions du mot « sens », on peut faire un parallèle en


rapport au « sens du travail » (Morin, 2006) : signification, orientation et
cohérence.

Le travail peut avoir le sens de « signification », c‘est-à-dire de ce que le travail


symbolise pour un individu, quelles sont les représentations, la valeur qu‘il lui
donne, quelle place il occupe dans sa vie. En d‘autres termes, la signification du
travail renvoie à la valeur du travail aux yeux du sujet et la définition ou la
représentation qu‘il en a la direction

Le travail peut avoir aussi le sens d’ « orientation », c‘est-à-dire là où une


personne veut arriver dans son existence. L‘homme est l‘unique animal qui
projette son futur, qui fait un plan de développement. Le travail fonctionne
comme un moyen pour atteindre ses buts, ses accomplissements. En d‘autres
termes, l‘orientation du sujet dans son travail, c‘est ce qu‘il recherche dans le
travail et les desseins qui guident ses actions (Phénoménologie).

Le travail peut avoir le sens de « cohérence », c‘est-à-dire, une harmonie entre


les aptitudes, les habiletés, les potentialités de la personne et les tâches et les
objets qu‘il produit. On doit souligner que chaque individu présente une
structure de sa personnalité, et ainsi l‘activité qui lui est cohérente doit être en
harmonie avec cette structure personnelle pour lui donner du sens ou de la
satisfaction symbolique du travail. C‘est « le vécu qualitatif de la tâche ». En
d‘autres termes, pour la cohérence, il s‘agit de l‘effet de cohérence entre le sujet
et le travail qu‘il accomplit, entre ses attentes, ses valeurs et les gestes qu‘il pose
quotidiennement dans le milieu de travail.

Pour délimiter expérimentalement, plus précisément et scientifiquement, les


principales caractéristiques qui donnent un sens au travail, Morin (2006), après
enquête dans un centre hospitalier et l‘application d‘évaluations statistiques, a
finalement dû ramener les principales composantes au nombre de six : (i) la
rectitude morale, (ii) les occasions d‘apprendre et de se développer, (iii)
l‘autonomie au travail, (iv) les relations au travail, (v) l‘utilité du travail et (vi) la
reconnaissance au travail.
La rectitude morale : un travail qui se fait dans un milieu qui valorise la justice
et l‘équité, dans un environnement sain et sécuritaire, qui témoigne de la
considération pour la dignité humaine, où vous pouvez compter sur l‘aide de vos
collègues lorsque vous avez des difficultés.

Les occasions d’apprendre et de se développer : un travail que vous avez du


plaisir à faire, qui vous permet d‘atteindre vos objectifs, qui vous permet
d‘atteindre un équilibre avec votre vie privée, qui vous permet d‘envisager
[7]

l‘avenir avec confiance, qui vous permet d‘apprendre, qui vous permet de vous
épanouir).

L’autonomie au travail : un travail qui vous permet d‘assurer des


responsabilités, qui permet d‘exercer votre jugement pour résoudre des
problèmes, qui vous permet de prendre des décisions, qui vous permet de
travailler efficacement. La valorisation de l‘exercice de l‘autonomie donne à
l‘homme un sens plus humain dans son travail : l‘autonomie, c‘est ici la
possibilité de disposer d‘un espace d‘expérimentation dans lequel le sujet puisse
s‘éprouver et chercher les voies de son développement.

Les relations au travail : un travail qui vous permet d‘avoir des contacts
intéressants avec d‘autres, qui vous permet d‘avoir de bonnes relations avec les
autres, qui vous permet de développer une complicité avec vos collègues, qui
vous permet d‘avoir de l‘influence dans votre milieu.

L’utilité du travail : un travail qui est utile à la société, qui est utile aux autres.

La reconnaissance au travail : un travail qui correspond à vos compétences, qui


vous donne un salaire qui permet de subvenir à vos besoins, où l‘on reconnaît
vos compétences.

On peut observer que les caractéristiques qui donnent du sens au travail peuvent
être vues comme étant les caractéristiques qui donnent du sens à l‘essence
humaine, c‘est-à-dire être autonome, libre, pouvoir se développer, apprendre,
être utile à la société, être reconnu pour ses capacités, son identité, dans un
milieu où il est respecté et peut faire preuve de respect et de considération
envers un autre être humain. C‘est ainsi que dans ses études cliniques,
Baumeister (1991) a déterminé quatre besoins qui concourent à donner un sens à
la vie : (i) avoir une raison d‘être, une raison de vivre, (ii) avoir le sentiment
d‘avoir un contrôle sur son destin et de l‘efficacité dans ses projets, (iii) avoir le
sentiment d‘être une personne correcte, dont la conduite est moralement
justifiable, et (iv) avoir un sentiment de dignité et de valeur personnelle. Ces
besoins sont inter-reliés et leur satisfaction se manifeste par le sentiment de
cohérence et de sens de sa vie.

Pour Isaksen (2000), le sens du travail est perçu comme un état de satisfaction
engendré par la perception de cohérence entre la personne et le travail qu‘elle
accomplit. D‘après son analyse de 28 entrevues avec des employés dans le
secteur de la restauration, il est possible pour une personne de donner un sens à
son travail, malgré les conditions difficiles dans lesquelles il s‘effectue. Ainsi,
huit caractéristiques du travail contribuent à lui donner un sens : (i) la possibilité
de s‘identifier à son travail et à son milieu de travail, (ii) la possibilité d‘avoir
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des bonnes relations avec les autres et de se préoccuper de leur bien-être, (iii) le
sentiment que le travail est utile et contribue à l‘accomplissement d‘un projet
important, (iv) le sentiment que le travail accompli est important pour les autres,
est bénéfique pour autrui, (v) la possibilité d‘apprendre et le plaisir de
s‘accomplir dans son travail, (vi) la possibilité de participer à l‘amélioration de
l‘efficacité des processus et des conditions de travail, (vii) le sentiment
d‘autonomie et de liberté dans l‘accomplissement de son travail, et (viii) le
sentiment de responsabilité et de fierté du travail accompli.

Généralement, un travail a du sens lorsque le sujet perçoit son travail comme


ayant un but, un dessein (a purpose) et de la valeur, de l‘importance
(significance).

1.4 Centralité relative et absolue du travail

1.4.1 La centralité relative du travail

On doit répartir 100 points entre différents domaines de vie, en fonction de


l'importance qu'on leur accorde.

Le travail occupe la première place (travail, famille, loisir, communauté,


religion) au Japon et en Yougoslavie. Cependant, le travail occupe la seconde
(famille, travail, loisir, communauté, religion) en Belgique, aux USA, en Israël,
en République fédérale d‘Allemagne, au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et
d‘Irlande du Nord, en Russie (Alexandre Ardichvili, 2005).

1.4.2 La centralité absolue du travail

Question de la loterie : Si vous héritiez suffisamment d'argent pour vivre


confortablement sans travailler, pensez-vous que vous travailleriez de toute
façon ou non?

Les réponses varient d‘un pays à l‘autre et ont tendance à devenir de plus en
plus négatives avec le temps. Cette proportion est de 93% de oui chez les
japonais. Alors qu‘elle n‘est que de 69% chez les britanniques. Au début des
années 1980, 70% des allemands répondaient oui. Cette proportion baissait à
64.4% à la fin de cette même décennie. Seulement 14% des gagnants américains
à la loterie cessent de travailler (Harpazet Hui, 2001).

Quels sont les déterminants de la signification sociale du travail ? Au fait, ce qui


détermine aussi la signification sociale du travail (sociétale) et le rapport
individuel et collectif au travail, c'est la disponibilité du travail (marche de
[9]

l‘emploi), le contexte économique général, les choix de gestion et leurs impacts


sur les conditions de travail (par exemple l‘accent mis sur la flexibilité dans un
contexte de compétitivité, de globalisation, et de mondialisation de l‘économie),
la législation (contraintes définies par le cadre juridique), etc.

Lorsqu'on demande aux gens de décrire leur travail, ils peuvent expliquer ce
qu'ils font (je soigne des malades, je répare des ordinateurs, je vends des
produits, j‘enseigne…), expliquer son utilité (je permets à des personnes de
trouver de l‘emploi, je trouve de nouveaux médicaments, je développe les
compétences… ou expliquer leur statut (je suis employé(e) de banque, je suis
médecin, je suis fonctionnaire…). Cela dépend de la manière dont ils conçoivent
leur travail. Il s‘agit là de la définition du concept de travail selon le sens
commun.

1.5. Définitions du travail

Plusieurs définitions du mot « travail » coexistent selon la personne qui en parle


: économiste, psychologue, juriste, etc. Même quand on doit se baser sur la
conception du travail selon les psychologues, plusieurs définitions existent.

Toutefois, il existe une définition consensuelle de « Travail ». Il est un « effort


individuel ou collectif physique ou intellectuel conscient, délibéré professionnel
ou non, dont le but est la concrétisation d‘un projet, d‘une idée ou d‘un produit,
et dont la rétribution peut être morale ou matérielle ».

Selon cette définition, le travail :


nécessite la mise en œuvre de ressources physiques ou intellectuelles
(mais qu‘en est-il de la pénibilité ?) ;
peut être réalisé par une personne seule ou un groupe (mais qu‘en est-il du
télétravail ?) ;
est différent de l‘esclavage (Code du travail et Code pénal) (mais qu‘en
est-il du travail des enfants ?) ;
peut avoir une forme autre que le salariat ;
produit des biens ou des services ;
peut être récompensé par autre chose qu‘un salaire.

Mais cette définition est incomplète. Il existe d‘autres définitions comme celles
de Goguelin, Louche et Karnas.

Pour Goguelin (1998), le travail est une activité professionnelle et rétribuée,


organisée à l‘intérieur d‘un groupe social et exercée de manière réglée.
[10]

Quant à Louche (2001), le travail est une activité consistant à mobiliser de


l‘énergie pour produire un bien ou délivrer un service et qui est contrainte par un
cadre social et technique.

Pour Karnas (2002), le travail dont traite la psychologie du travail se définit


comme l‘activité d‘un homme ou d‘une femme dans un cadre organisationnel,
social, défini utilisant des outils particuliers, aux fins d‘atteindre des objectifs de
production donnés.

Il est important de reconnaître que le travail est une notion qui comporte
plusieurs définitions. Brief et Nord (1990) soutiennent que le seul élément qui
rallie les multiples acceptions soit une activité qui a un but. Généralement, on
le définit comme une dépense d'énergie à travers un ensemble d'activités
coordonnées visant à produire quelque chose d'utile (Shepherdson, 1984). En
plus, le travail serait une activité utile, déterminée par un but défini au-delà du
plaisir engendré par son exécution (Fryer & Payne, 1984).

Selon Firth (1948), le travail ne doit pas impliquer seulement des relations
fondées sur les exigences techniques et économiques; il doit également
impliquer un ensemble de relations fondées sur les nécessités humaines et
sociales sans quoi on met en péril le sain développement de la société. En effet,
le caractère des relations qu‘entretiennent les individus a un effet important sur
leur décision de s'engager dans leur activité productive et sur la qualité de leur
production.

Brief et Nord (1990) partagent le même point de vue que (1948). Pour eux,
donner au travail le sens d'une activité que l'individu fait pour gagner un salaire,
entraîne des conséquences fâcheuses autant personnelles qu‘institutionnelles. En
outre, cette restriction du sens du travail à son aspect économique engendre ou
renforce les rapports contractuels entre l'individu et l'organisation qui l'emploie,
conférant une importance à la rémunération au détriment de l'esprit de service et
de communauté. Elle dévalue également les activités non-rémunérées comme le
bénévolat et le travail domestique (housework) ; celles-ci n'étant plus
considérées comme du travail, elles ne sont plus reconnues. Au niveau
institutionnel, cet usage de la notion de travail crée également une situation où le
traitement salarial attire plus l'attention des négociateurs que le traitement des
relations humaines dans l'organisation ou le traitement psychologique qu'y
trouvent les individus.

Quoiqu‘on en dise, le travail est une activité très importante pour les humains et
pour la société. Il est avant tout une activité par laquelle une personne s‘insère
dans le monde, exerce ses talents, se définit, actualise son potentiel et crée de la
[11]

valeur qui lui donne, en retour, le sentiment d‘accomplissement et d‘efficacité


personnelle, voire peut-être un sens à sa vie.

En définitive, nous pouvons noter qu‘il existe des conditions nécessaires (mais
non suffisantes) pour définir ce qu‘est le « travail » :

L‘activité de travail est différente des autres activités ;


C‘est une activité « forcée » (Lévy-Boyer, 1987), obligée par soi et/ou par
la Société ;
Il existe des règles et un cadre (règlements, Loi, Code du travail, accords
d‘entreprises, etc.) ;
Il y a rétribution (pas forcément en salaire) ;
L‘activité est réalisée dans un cadre social et organisationnel, c‘est-à-dire
au sein de groupes humains interagissant ;
L‘activité est normée, vise un but préalablement défini.

1.6. Typologie des formes de travail

Lorsqu‘on s‘en tient aux pays les plus développés, on pourrait supposer que les
activités non salariées, même dynamiques, ne constituent qu‘un aspect
irréversiblement minoritaire. Mais en revanche si l‘on considère les pays en voie
de développement, les ordres de grandeur sont différents (Aubret & Gilbert,
2007).

D‘une manière générale, le tableau ci-après distingue trois modes de «mise au


travail», libre, salarié et forcé et deux types d‘activités, marchandes et non
marchandes, soit une grille qui en comporte cinq cases (Gazier, 1991).

Tableau n°1 : Typologie des formes de travail.

Modes des « mises au travail »


Travail libre Travail salarié Travail forcé
Activités non -Travail Salariés des Esclavage
marchandes domestique administrations corvées Peine
Types - Travail et des ménages de travail
d‘activités militant

Activités Travail Salariés des Obligatoire


marchandes indépendant entreprises

Travail rémunéré = Emploi


[12]

Source: Gazier (1991, p.37)


Il est ainsi tout à fait nécessaire, pour les pays développés comme pour les
moins développés, de compléter l‘étude du salariat par la prise en compte de
l‘ensemble des modalités du travail. Cependant, il est aussi logique d‘aller plus
loin, en étudiant pour elles-mêmes les diverses formes de travail non salarié. Les
données sont malheureusement souvent réduites aux repérages préliminaires et à
l‘établissement d‘ordres de grandeur approximatifs.

Section 2 : Psychologie du travail et diversité d’expressions

2.1. Introduction

La psychologie du travail, c'est d‘abord une psychologie. Ce qui signifie qu‘on


s‘intéresse en priorité aux individus, à leur activité, à leurs conduites et à leurs
représentations (Lemoine, 2003). Elle est délimitée à un secteur d‘activités.

Dans les ouvrages qui traitent de la psychologie du travail, il y a diversité


d‘approches. Ainsi, la psychologie du travail s‘exprime dans l‘usage
d‘expressions différentes. A cet effet, on parle aussi de psychologie industrielle,
de psychotechnique, de psychologie des entreprises, de psychologie
professionnelle, de psychologie des organisations, etc. Selon ces expressions,
bien que la psychologie du travail soit centrée sur la relation entre un individu et
son environnement (de travail), il y a des options différentes en termes de
finalité, d‘objet de recherche et d‘intervention.

2.2. La psychologie industrielle


En effet, la psychologie industrielle pourrait être définie comme l‘application
des principes et des faits psychologiques dans l‘industrie, aux problèmes de
l‘existence humaine dans le monde des affaires et de l‘industrie. En d‘autres
termes, c‘est l‘ensemble des méthodes de la psychologie appliquée qui ont été
soit conçues pour les besoins de l‘industrie, soit adaptées à ces besoins. En bref,
la psychologie industrielle, c‘est l‘étude du comportement de l‘homme dans
l‘industrie, de façon à mieux le connaître pour qu‘il soit toujours plus
performant, plus efficace et plus motivé...

2.3. La psychologie professionnelle


Par ailleurs, considérant la professionnelle comme une occupation ou une
activité dont on tire ses moyens d‘existence, la psychologie professionnelle
[13]

pourrait être définie comme l‘application des principes et des faits


psychologiques à la profession.

2.4. La psychologie du travail

Comme la psychologie industrielle, la psychologie du travail un secteur


d‘application est un domaine de la psychologie. Elle vise d‘abord à constituer un
corps de connaissance sur le travail sans distinction des secteurs administratif,
industriel, commercial, agricole, etc. et tend ensuite à utiliser ces connaissances
conjointement à celles obtenues dans d‘autres domaines pour transformer ce
travail en fonction de certains objectifs. (LEPLAT, 1981). D‘où la psychologie
du travail est à la fois une science et une technologie. Ces deux aspects de la
psychologie sont complémentaires.

A cet effet, il convient de souligner le fait que la psychologie du travail n‘est pas
une psychologie appliquant les théories de la psychologie fondamentale. Elle
produit des connaissances qui influencent d‘autres secteurs de la psychologie.
Les différents domaines s'enrichissent mutuellement, il y a échange entre les
domaines. Ainsi, la psychologie du travail est « une discipline sensible à la
demande sociale tout en n‘étant pas subordonnée à elle » (Louche, 2007).

La psychologie du travail est donc constituée par l‘ensemble des connaissances


psychologiques concernant l‘activité de l‘homme au travail, et l‘ensemble des
méthodes et techniques qui assurent la mise en œuvre de ces connaissances pour
la réalisation d‘objectifs évalués par des critères fixés par ceux qui demandent
l‘intervention. Ces deux versants de la psychologie du travail sont dits
respectivement théorique (ou fondamental) et appliqué, ou encore scientifique et
technologique.

Les autres branches de la psychologie apportent des contributions non moins


négligeables à la connaissance du travail. Par exemple, c‘est le cas : (1) de la
psychologie physiologique, pour étudier : les relations entre le corps et l‘« esprit
», l‘activité cérébrale lors du travail, le rôle des émotions et des affects, le stress
au travail. Par exemple, « quels sont les impacts du stress professionnel sur notre
façon de travailler ? » ; (2) de la psychologie cognitive, pour étudier : les
mécanismes mentaux, la mémoire humaine, les facteurs attentionnels, la prise de
décision. Par exemple, « quel est l‘impact du travail de nuit sur notre activité ?
», « quel est l‘impact de la fatigue sur la mémoire ? » ; (3) de la psychologie du
développement, pour étudier : la maîtrise du langage et son développement,
l‘évolution de la personnalité. Par exemple, « comment comprenons-nous une
consigne de sécurité ? » ; (4) de la psychologie sociale, pour étudier : l‘influence
par autrui (majoritaire, minoritaire, …). Par exemple, « comment nos jugement
[14]

sont-ils influencés par les opinions des autres ?, le travail collaboratif et collectif
(par exemple : « comment fonctionne une équipe de travail ? » ; (5) de la
psychologie différentielle, pour étudier : nos caractéristiques individuelles
(humeur, personnalité, etc.), l‘impact des changements individuels. Par exemple,
« comprenons-nous tous la même chose ? », etc.

Il convient de remarquer les études et recherches se rapportant au domaine du


travail ont commencé à être répertoriées sous le nom très général de psychologie
appliquée ou psychotechnique. Et parmi les branches de la psychologie, la
psychologie industrielle est probablement la plus neuve. Le premier livre de
psychologie industrielle a été publié par Hugo MUNSTENBERG, ancien élève
de WUNDT, sous le titre de ―The psychology of industrial Effeciency‖ en 1913.
Puis le domaine s‘est différencié et C. MYERS proposa en 1925 le nom de la
« psychologie industrielle ». Cette dénomination encore largement répandue est
cependant limitative puisque le travail n‘est pas seulement industriel, mais aussi
agricole, commercial, administratif, etc.

Contrairement au terme « psychologie industrielle », le terme de « psychologie


du travail », proposé par Léon WALTHER en 1926, paraît plus général et est
donc préférable pour désigner l‘ensemble du domaine. Mais ce terme a eu peu
de succès jusqu‘à une période récente où il semble avoir gagné du terrain. En
plus, au niveau des applications, la psychologie du travail est associée à des
technologies non psychologiques.

2.5. La psychologie du travail et des organisations

Aujourd‘hui, on parle de la «psychologie du travail et des organisations». Cette


spécialité ou option est née au début du XXème siècle, en réponse à des
problèmes concrets (d‘orientation et sélection professionnelles, de sécurité, de
formation et d‘apprentissage, d‘adaptation du travail à l‘homme et vice versa).
Elle se porte directement sur les thèmes qui sont au centre des préoccupations
actuelles des hommes et des femmes au travail. Elle s‘intéresse aussi au
développement des ressources humaines qu‘elle aborde dans la perspective de la
psychologie sociale. Parmi les thématiques traitées dans cette discipline il y a
celle de la socialisation organisationnelle. Celle-ci consiste à la manière dont
l‘individu intériorise les comportements et les modes de pensée des collectifs de
travail dans lesquels il s‘intègre. Dans ce cadre, l‘accent est mis, entre autre, au
caractère réciproque de la relation entre l‘individu et l‘organisation.

La psychologie du travail et des organisations a pour objet l‘étude des conduites


humaines de production d‘un bien ou de mise en œuvre d‘un service,
développées dans le cadre d‘une organisation marchande ou non marchande
[15]

(Louche, 2007). Les conduites renvoient en premier lieu aux éléments


observables des activités de travail. Elles englobent également tous les processus
internes qui les accompagnent au niveau cognitif, affectif ou conatif
(motivation).

Section 3. Genèse de la psychologie du travail

Durant l‘expansion industrielle à la fin du XIXe siècle qui privilégia l‘industrie


lourde et les mines, les conditions de travail pénibles alertèrent les
physiologistes qui considèrent qu‘il fallait d‘abord proposer aux hommes un
travail qui ne soit pas au-dessus et en dessous de leurs forces (Jardillier, 1981).
En d‘autres termes, aux 19° et 20° siècles, il y a accélération du développement
industriel, développement de la psychologie scientifique, intérêt des
psychologues (et demande du terrain) pour les activités humaines dans les
industries (enjeux économiques, fatigue au travail, monotonie des tâches,
pénibilité au travail, impact sur la santé…) (Villerme (1840) : pénibilité et
accidentologie). On voit le développement d‘outils psychométriques pouvant
servir à l‘évaluation des capacités humaines au travail (recrutement) et a
l‘orientation professionnelle (Echelles intelligence : Binet et Simon, Cattell,
Galton…).

Lahyet Pacaud étudie la profession de dactylographe, les gestes de la frappe ;


analyse psychologique du travail des mécaniciens et des chauffeurs de
locomotive, des conducteurs de tramways, analyse des accidents. On a donc
deux orientations : l'analyse des conditions de travail et l'évaluation des
individus.

Ce qui apparaît clairement que différents courants de pensée ont eu, au cours de
temps, des optiques différentes des conditions nécessaires à l‘épanouissement de
l‘homme par son travail et ont donc proposé à notre préoccupation des solutions
successives.

La jeunesse de cette nouvelle discipline (qu‘est la psychologie du travail) n‘a


cependant pas empêché l‘industrie naissante de faire largement appel au travail
des spécialistes du comportement humain. Cette application quasi immédiate de
la psychologie du travail s‘explique probablement par les transformations
profondes auxquelles l‘industrie américaine a dû faire face, au cours de ce
dernier quart de siècle. La «règle du jeu industrielle ayant brutalement changé,
certaines des techniques de la psychologie sont apparues comme des aides
précieuses dans la reconversion au nouvel ordre.
[16]

A la lumière de ce qui précède, il se dégage donc que c‘est suite aux


mécontentements du personnel tant à l‘égard de l‘entreprise que de sa direction
que l‘attention a été porté sur le facteur humain au travail. Ces sources de
mécontentement provenaient surtout des éléments suivants : (i) la main d‘œuvre
était considérée comme un simple coût de production et la direction de
l‘entreprise déployait tous ses efforts pour maintenir ce coût comme tous les
autres aussi bas que possible. Bien que donnant certains résultats à court terme,
cette politique s‘est finalement révélée désastreuse à long terme ; (ii) les salaires
étaient calculés sur base subjective, empirique et de façon approximative ; (iii)
les retraites obligatoires à partir d‘un certain âge n‘existaient pratiquement pas et
le travail s‘effectuait 24h/24h sans distinction d‘âge (enfant, jeune, adulte,
vieux), de sexe (homme et femme) ; (iv) les nouveaux travailleurs étaient
recrutés et sélectionnés sans aucuns critères par des méthodes qui ne
présentaient guère plus de garantie.

D‘une manière brève, on peut résumer les sources de ce mécontentement comme


suit : (i) manque d‘harmonie entre l‘ouvrier et son travail (exemple : travail trop
lourd, dur et ouvrier trop léger) ; (ii) manque d‘entente entre l‘ouvrier et ses
compagnons ; (iii) manque de collaboration et d‘entente entre ouvrier et son chef
ou attitude trop autoritaire du chef ; (iv) des conditions de travail pénibles et des
conditions économiques défavorables, etc...

De ce qui précède, il en résulte nécessairement un mécontentement qui peut se


généraliser et vicier ainsi le climat social de l‘entreprise. Trop souvent et c‘est
d‘ailleurs le cas, la direction ne soupçonne le danger qu‘au moment où la
pression sociale se manifeste extérieurement sous la forme de grèves, à ce
moment-là, il est trop tard.

De ce fait, les effets cachés des frustrations ouvrières, bien que moins
spectaculaires, sont pourtant bien plus dangereux pour la sécurité de
l‘entreprise ; il en résulte donc d‘une part une diminution de l‘intérêt pour le
travail avec comme conséquence une régression de la volonté d‘effort, un refus
de coopérer, un gaspillage élevé, un absentéisme anormale, un usage négligeant
des machines et de l‘outillage qui sont autant de facteurs qui viennent grever le
prix de revient de l‘entreprise d‘autre part, la misère ouvrière et les frustrations
des travailleurs mécontents provoquent et stimulent bientôt le développement
d‘un syndicalisme très actif. Celui-ci cherche encore sa cohésion et ses moyens
d‘action, mais sa venue accroît davantage la tension entre le Capital et le travail.
En effet, les syndicats mettent en général l‘accent sur l‘aspect négatif des
relations professionnelles. C‘est dans le but d‘éviter cette situation dangereuse
pour la stabilité sociale et économique de l‘entreprise que ses chefs ont eu
recours aux sciences de comportement, mieux à la psychologie du travail avec
comme objectif de porter remède à une situation de conflit, ceci en cherchant à
[17]

substituer aux oppositions économiques et affectives qui séparent travailleurs et


patrons, une philosophie de coopération et de collaboration pour le bien
commun.

3.1. Le XIX siècle et les relations humaines

La plupart des chercheurs Economistes, sociologues, juristes et psychologues


trouvent l‘origine de la tension actuelle entre patrons et travailleurs dans un
ensemble de transformations économiques et sociales qui, progressivement, dès
la révolution industrielle, ont modifié les rapports humains dans l‘entreprise et
notamment ont dépersonnalisé le processus de production.

Aussi, les dimensions croissantes des entreprises, la multiplication des fonctions


spécialisées ont provoqué une augmentation du nombre d‘échelons
hiérarchiques et un étalement de l‘organigramme, d‘où des difficultés accrues de
compréhension et communication entre les divers membres de l‘entreprise.

Ex. : Explication du cas du tour de BABEL

Par ailleurs, le développement des sociétés anonymes a causé une séparation


nette entre la propriété et la gestion effective. Dans bon nombre d‘entreprises, la
gestion active n‘est plus exercée par les bailleurs de fonds ou possesseurs du
capital, mais est confiée à un spécialiste rétribué, un fonctionnaire. Les
propriétaires conservent néanmoins leur droit au profit intégral de l‘entreprise.

Les pionniers de l‘industrie voient même dans le développement du machinisme


un moyen de résoudre le problème social par la création d‘une économie
d‘abondance. Ainsi, ils accordent toute leur attention au perfectionnement des
techniques de production et ne présentent qu‘un intérêt secondaire au facteur
humain. L‘homme est pourtant considéré comme un facteur de production au
service de la machine, facteur dont le prix est déterminé selon la loi de l‘offre et
de la demande.

Au cours de cette période, à cause justement de la misère ouvrière et les


frustrations des travailleurs mécontents qui provoquent et stimulent le
développement d‘un syndicalisme très actif. En effet, ces syndicats défendent
une philosophie du travail basée sur l‘antinomie des intérêts patronaux et
ouvriers et adoptent une politique d‘action agressive.
[18]

3.2. Prémices d’une réaction humanitaire

1). Pour les chefs d’entreprises

Des chefs d‘entreprises de bonne volonté et d‘intentions louables ont été touchés
par la misère du prolétariat. Ils se sont donc préoccupés d‘apporter quelques
améliorations au soft des travailleurs.

De prime à bord, il semble que les sentiments de ces hommes d‘action soient de
plus généreux, car ils considèrent que leur devoir de «bon patron» est d‘agir en
«bon père de famille ».

Ainsi, il ne suffit donc pas qu‘ils donnent du travail, mais doivent également
s‘intéresser au sort de leurs ouvriers au-delà du travail ils doivent les aider s‘ils
sont dans le besoin, les encourager à suivre le droit chemin, s‘intéresser à leurs
familles et à leurs enfants.

2). Réponses des travailleurs (attitudes)

Malgré ces idées quasi généreuses et quelques actions d‘éclat, l‘expérience


paternaliste avec son embryon de réalisations sociales se solde par un échec,
suite à la méfiance et au manque de coopération de l‘élite ouvrière.

Ex. Cas de la grève de revendication salariale à l‘ex. U.M.H.K., actuellement


GECAMINES, en 1941, qui a occasionné plusieurs morts. Pourtant les
travailleurs avaient tout (argent, vêtement, nourriture, logement...).

3). Résultats ou constat

Les patrons paternalistes constatent avec amertume que loin d‘aplanir les
conflits sociaux de l‘entreprise, leur attitude sociale ne fait qu‘exaspérer les
sentiments d‘hostilité de la masse ouvrière.

De ce qui précède, on peut se demander les raisons réelles d‘une telle attitude
des travailleurs.

D‘abord, par le fait que si les préoccupations sociales de la part des patrons
paternalistes sont sincères, les intentions réelles de certains dirigeants sont
malheureusement beaucoup moins louables. Sous le couvert de générosité
sociale, ils visent surtout à combattre l‘influence syndicale et s‘assurer la
stabilité de leurs travailleurs.
[19]

Ensuite, l‘attitude paternaliste manque aussi de psychologie : en effet, quoique


étant d‘intention charitable, elle est teintée d‘un esprit de supériorité qui choque
les ouvriers et de plus, tend à les réduire au rang d‘êtres inférieurs qu‘il faut
guider. En plus, elle ne reconnaît que l‘aspect matériel du problème social et
néglige les besoins affectifs des travailleurs à qui elle ne permet pas d‘affirmer
leur personnalité.

Enfin, le fait que le patron accorde unilatéralement des avantages sociaux de


tous genres (logement, distribution de vêtements, d‘argent et de nourriture)
apparaît aux yeux des travailleurs comme un aveu implicite de l‘injustice du
salariat.

3.3. Apparition de l’organisation scientifique du travail (O.S.T) et le


facteur humain

3.3.1. L‘apport de F.W. TAYLOR ou TAYLORISME (1856 — 1915)

1. Théories

Il est parti de la théorie américaine du nom de ‗‘Scientific management‘‘ ou


―Scientific administration‖ que les premiers traducteurs français ont traduit
indûment par ― l‘organisation scientifique du travail‖ ou OST en sigle.

En effet, la période qui s‘étale entre 1880 et 1920 marque une modification
profonde dans l‘attitude des dirigeants d‘entreprises. L‘attention des chefs
d‘industrie qui jusqu‘ici s‘était portée surtout vers le perfectionnement des
techniques et des machines se tourne maintenant vers l‘organisation scientifique
du travail ou OST.

Ce changement d‘orientation s‘explique par le fait que les Entrepreneurs voient


dans l‘organisation rationnelle des entreprises un nouveau moyen de
concurrence sur les marchés grâce aux diminutions de prix de revient qu‘elle
permet de réaliser. Une production mondiale en hausse constante fait sentir le
besoin d‘un contrôle au gaspillage des hommes et des matières premières. Ce
contrôle est en somme le but de l‘organisation scientifique du travail.

Quoiqu‘on puisse dire, l‘honneur de cet effort revient à Frederick Taylor, un


ingénieur américain, qui est considéré comme le père de tout un mouvement qui
se propage partout sous le nom de ―Taylorisme‖, un terme aujourd‘hui qui a
déclenché une littérature immense. Cependant, on ne peut pas perdre de vue que
d‘autres l‘avaient précédé, il s‘agit notamment de Descartes et Vauban en
France, A. Smith en Angleterre et Withney aux U.S.A. Mais de toutes les
[20]

façons, Taylor est néanmoins le premier à avoir élaboré l‘organisation


scientifique du travail en un véritable corps de doctrine. De ce fait, son grand
mérite est d‘avoir aussi pris le premier l‘élément humain en sérieuse
considération, comme facteur principal de la production en le soumettant à une
étude très approfondie. Malgré cela, il était encore trop tôt d‘avoir envisagé le
problème d‘un point de vue vraiment scientifique.

2. Critiques

Quelques critiques sont adressées au taylorisme. Bien que présentant des


avantages certains en matière de productivité, du rendement et de la
maximisation des recettes, le Taylorisme n‘est pas à l‘abri des critiques. Ces
critiques portent le plus souvent sur les points suivants :

L‘imperfection des techniques de l‘organisation Scientifique du travail


laissent encore trop de place aux jugements subjectifs ;
Le chronométrage des tâches et les systèmes de salaire aux pièces et à
prime sont trop souvent cause d‘une accélération du travail ;
Le taylorisme conduit souvent au surmenage, à l‘hyperspécialisation et
rend le travail monotone ;
Le travailleur est insuffisamment consulté et informé à 1‘occasion des
changements apportés au travail ;
Les psychologues et physiologistes reprochent aux tayloriens de vouloir
standardiser l‘homme, de négliger les différences anatomiques et
psychologiques individuelles, car la méthode de travail qui s‘avère la plus
efficiente pour un individu ne l‘est nécessairement pas pour un autre ;
Les principes énoncés par Taylor sont insatisfaisants au point de vue
individuel, car il découle du modèle : (a) une division entre conception et
exécution du travail et (b) une division très fine au niveau de l‘exécution
même du travail.

3.3.2. L’apport de Henri FAYOL ou FAYOLISME (1841 — 1925)

Si Taylor, pour augmenter le rendement d‘une entreprise industrielle, commence


l‘organisation par le bas, c‘est-à-dire au niveau d‘exécution par l‘ouvrier, c‘est
parce que lui-même était un ouvrier au vrai sens du mot. Fayol par contre pour
le même but, commence l‘organisation par le haut, par le cadre, c‘est-à-dire par
le Directeur, c‘est parce que lui-même était un cadre dirigeant, un Directeur
Général.

En plus, Taylor étudie scientifiquement le travail humain comme il avait étudié


scientifiquement le travail de la machine, tandis que Fayol étudie
[21]

scientifiquement la tâche du Directeur, pour lui les facteurs fixes sont : le


capital, les débouchés, l‘outillage, les procédés etc. et la variable, c‘est
l‘administration.

Ainsi, d‘après Fayol, toutes les opérations, mieux toutes les fonctions auxquelles
donnent lieu les entreprises, peuvent se répartir entre les six groupes suivants :
(i) fonction technique (technologie) s‘occupant de la production, la fabrication,
la transformation ; (ii) fonction commerciale (marketing) s‘occupant des achats,
des ventes et des échanges ; (iii) fonction financière s‘occupant de recherche et
gérance des capitaux ; (iv) fonction de sécurité s‘occupant de la protection des
biens et des personnes ; (v) fonction de comptabilité, s‘occupant de l‘inventaire
du bilan, de prix de revient et des statistiques ; (vi) fonction administrative qui
agit uniquement sur l‘effectif du personnel et n‘exerce pas d‘influence
immédiate ni sur les matériaux, ni sur les mécanismes. Selon Fayol, cette
fonction administrative recouvre cinq éléments principaux ci-après (a)
prévoyance ou planification, (b) organisation, (c) commandement ou direction,
(d) coordination et (e) contrôle.

Cependant, les thèses essentielles de la théorie administrative de Fayol reposent


sur 14 principes célèbres qui peuvent être appliqués à tous les domaines de
l‘activité administrative sans exception. Ces principes sont (Gvichiant, 1974) :
(i) la division du travail, (ii) l‘autorité, (iii) la discipline, (iv) l‘unité de
commandement, (v) l‘unité de direction, (vi) la subordination des intérêts
particuliers à l‘intérêt général, (vii) la rémunération, (viii) la centralisation, (ix)
la hiérarchie, (x) l‘ordre, (xi) l‘équité, (xii) la stabilité du personnel, (xiii)
l‘initiative et (xiv) l‘union du personnel.
Par ailleurs, les principes proposés par Fayol n‘ont rien de rigide, car il n‘y a
rien d‘absolu en matière administrative. Au contraire, tous les principes de
l‘activité administrative sont souples et susceptibles d‘être adaptés à toutes les
circonstances. Il s‘agit de savoir s‘en servir. Ainsi, le nombre des principes
administratifs n‘est pas limité.
Comme on le voit, Henri Fayol était un ingénieur (Français) comme Taylor. Il
est surtout connu pour son activité administrative. Son principal ouvrage :
« Administration industrielle et générale » a été publié en 1916. Lui-même a
occupé pendant 30 ans le poste de directeur de la grande société minière et
métallurgique française « Comam Bault ».

En guise de conclusion, les deux doctrines, à savoir le Fayolisme et le


Taylorisme, se présentent comme deux solutions d‘un même problème : celui de
la force humaine. D‘où les deux doctrines se complètent.
[22]

3.3.3. L’apport de Max. Weber ou la bureaucratie

Les représentants de la théorie classique de l‘administration, prenant pour critère


de départ l‘interprétation de la nature humaine et des motifs de son
comportement, concentrent toute leur attention sur les aspects administratifs de
l‘organisation. Ce faisant, Gulick, Fayol, Mooney, Urwick et d‘autres
s‘accordent à souligner la contribution énorme apportée par le célèbre
sociologue allemand Max Weber à l‘étude des principes de l‘organisation
(Gvichiant, 1974). En effet, Max Weber a élaboré un type « idéal»
d‘organisation administrative qu‘il a désigné par le terme « Bureaucratie ».
Dans les ouvrages américains, le terme « bureaucratie » désigne trois notions
différentes :

 Sens traditionnel, ce terme dans la littérature politique désigne la


conception de l‘administration par le système des bureaux, sans
aucune participation des subordonnés ;

 Sens employé par Weber, il désigne une conception sociologique de la


rationalisation de l‘activité collective mais formelle ou un type
d‘organisation rationnelle et efficace ;

 Sens vulgaire le plus large, il désigne une conception qui reflète le


manque d‘efficacité des fonctions de l‘organisation, les procédés
dilatoires, les obstacles à l‘activité normale créés par les procédures
inutiles, la routine, etc...

Bien que les conceptions de Weber se basent, dans l‘ensemble, sur les méthodes
d‘organisation européennes, son « type idéal » présente des analogies avec les
modèles créés par la théorie classique américaine de l‘administration, mieux de
l‘organisation.

3.3.4. L’apport de quelques psychologues experts ?

1) l‘apport de Hugo Munsteberg

Certains psychologues de formation ou de profession étudiaient surtout les


problèmes concernant la formation de l‘homme à l‘environnement, les
conditions de travail, la monotonie, la fatigue, la mise au point de tests
d‘orientation professionnelle…

Parmi ces psychologues, l‘un de plus remarquables d‘entre eux fut Hugo
Munsterberg, disciple de Wundt, devenu professeur de psychologie à
[23]

HARVARD et publia en 1913 un ouvrage intitulé « Psychologie et efficience


industrielle ». Il a fait des recherches pour valider des tests de sélection pour les
employés de l‘industrie du téléphone. Ces tests visaient à mesurer adéquatement
les différences individuelles pour faciliter les choix des individus au regard des
exigences des tâches. La contribution essentielle de Munsterberg fut d‘avoir axé
ses recherches sur l‘analyse empirique et la validation statistique que l‘on
retrouve aujourd‘hui dans la méthodologie de la gestion du personnel.

2) Apport de Walter Dill Scott

Une autre contribution non moins importante est celle de Walter Dill Scott. Il est
considéré aussi comme le pionnier de la psychologie industrielle contemporaine,
il ne construit pas son système d‘une façon méthodique d‘après les résultats de
la science expérimentale. A la psychologue scientifique se mêle chez lui la
psychologie vulgaire.

Dill Scott se préoccupe, tout comme TAYLOR, d‘augmenter le rendement


ouvrier dans l‘entreprise. A cet effet, il a épinglé trois facteurs qui sont d‘une
grande importance, à savoir : (i) la perspective d‘un salaire élevé ; (ii) un
contrôle perfectionné du rendement ouvrier ; et (iii) une rationalisation
soigneuse du procédé de fabrication.

Par ailleurs, Dill Scott a formulé un certain nombre des principes devant
permettre l‘accroissement de la production. Il s‘agit des éléments suivants :

• L‘imitation du modèle, du chef,


• L‘émulation entre groupes, entre équipes,
• La loyauté réciproque des patrons et des ouvriers,
• La concentration au travail,
• La diminution de la fatigue professionnelle,
• Les salaires justes,
• le goût et l‘amour pour le travail...., sont autant des données qui influent
d‘une façon favorable sur l‘ouvrier et augmentent son rendement.

Bref, DILL SCOTT a appliqué ses idées dans les entreprises américaines et il l‘a
toujours fait avec succès.

5. La 1ère Guerre Mondiale et les difficultés de la production

1) Constat

Quelque paradoxal que cela puisse paraître, c‘est la guerre de 1914 à 1918, qui a
rappelé à l‘humanité ensanglantée que le moteur humain ne peut être traité
[24]

comme un moteur inanimé. Suite à la carence manifeste de la population active


sur le marché de travail du fait qu‘elle est appelée sous drapeau pour défendre la
nation. C‘est donc pendant la guerre que la preuve a été faite que pour utiliser la
puissance de l‘homme à son maximum de rendement, il est nécessaire de tenir
compte des phénomènes psychiques et physiologiques qui président au
fonctionnement de ses organes.

Par ailleurs, durant cette guerre, les besoins du relèvement européen donnent
une forte impulsion aux nouvelles techniques de production du travail. Les
besoins de la guerre et la rareté de la main-d‘œuvre qui en découle, forcent les
industries notamment Américaines, Anglaises, Françaises, Allemandes et autres
à rechercher des voies nouvelles afin de découvrir le moyen d‘économiser
l‘élément humain, ses matières premières et accélérer le processus de
production. C‘est donc grâce aux chercheurs comme Taylor, Gilbert, Emersson,
etc. que l‘Amérique prend le devant, mais après la guerre, le mouvement ne
tardera pas à connaître une extension mondiale.

Poursuivant ainsi le rendement optimum, on s‘intéresse inévitablement au


facteur humain et à sa productivité. Pour ce faire, on s‘efforce de rationaliser la
tâche et de réduire la fatigue de l‘ouvrier, en analysant ses mouvements, en
chronométrant ses temps de travail, en réorganisant la disposition de son poste
de travail et en améliorant également les méthodes de manutention. Par-là, on
veut lui éviter l‘obligation de penser, car sa tâche a été préparée à l‘avance, des
consignes de travail lui indiquent la méthode à suivre, les gestes à faire, les
standards de temps à respecter.

Notons en plus que durant la première guerre mondiale, il a fallu gérer les
recrues dans l‘armée américaine (évaluation des aptitudes). Dans les usines, il a
fallu remplacer les ouvriers partis au front par des femmes et des jeunes (étude
des conditions de travail,…). On a vu que les femmes faisaient aussi bien que les
hommes car elles étaient très motivées et impliquées, mieux elles travaillaient,
mieux leur mari était bien équipé au front. Il y a un intérêt des psychologues
pour l‘influence des relations humaines au travail (Mayo, Lewin, etc.) et pour la
formation, la sélection, l‘évaluation de la satisfaction et motivation au travail.

2) Réactions aux innovations de l‘employeur

Malgré ces innovations, les réactions ouvrières ne tardèrent pas à se manifester.


Elles sont négatives et parfois particulièrement violentes. En effet, les
travailleurs réalisent rapidement que les nouvelles méthodes d‘organisation
réduisent progressivement leur liberté de pensée et d‘action ; ils réagissent par
un mécontentement à peine voilé et un relâchement de l‘intérêt envers la
profession.
[25]

De ce fait, on peut supposer que la rationalisation des entreprises s‘est faite sur
la base de connaissances insuffisantes en ce qui concerne le caractère véritable
de la nature humaine et notamment en négligeant ses aspirations profondes et
surtout son besoin de dignité. On s‘explique dès lors l‘opposition du
syndicalisme au Taylorisme, de même les réactions ouvrières parfois extrêmes
aux mesures de rationalisation particulièrement aux essais de chronométrage de
travaux.

En définitive, peut-on affirmer que l‘organisation scientifique est inhumaine?


Pas du tout ! Une chose est certaine, c‘est que le souci de l‘humain a toujours été
présent à l‘esprit des promoteurs de l‘organisation scientifique du travail.
D‘ailleurs, Taylor lui-même n‘a-t-il pas insisté sur la nécessité de transformer la
mentalité des patrons et des ouvriers et sur l‘urgence de substituer une
collaboration intelligente et efficiente au conflit permanent qui les oppose.

En fait, les difficultés en matière de relations humaines qui résultent de


l‘application de l‘organisation scientifique du travail n‘émanent pas des
principes fondamentaux qui aujourd‘hui même demeurent en grande partie
inchangés, mais de leurs modalités d‘application.

Les chefs d‘entreprises et les organisateurs n‘étaient peut-être pas mûrs à cette
époque pour saisir tout le sens social du mouvement scientifique de travail. Par
ailleurs, au début de ce siècle, la sociologie et la psychologie industrielle
n‘étaient encore que peu développées. L‘organisation scientifique du travail ne
disposait donc pas de moyens suffisants pour comprendre les besoins
psychologiques et sociaux des travailleurs ainsi que le sens de leurs réactions
vis-à-vis des nouvelles méthodes de travail.

6. Durant la 2ème Guerre Mondiale et après 1945

Durant la seconde guerre mondiale, les appareillages de détection et de


pilotage dans l‘aviation (radars) deviennent plus sophistiques. Le pilote doit se
fier aux appareils, des radars sont présents pour détecter les ennemis et il faut
former et sélectionner ceux qui les utilisent sans se tromper durant 72h d'affilée,
il faut donc adapter la machine à l’homme.

Apres 1945, on voit le développement du monde industriel (service du


personnel: sélection, tests psychotechniques,…). Le travail est adapté à l‘homme
pour éviter les accidents, augmenter la sécurité, l'ergonomie. La croissance
économique implique la valorisation du travail. Il y a un développement du
secteur tertiaire (administration, services…) et des études sur les relations de
travail (motivation, leadership, etc.). Au fait, après la seconde guerre mondiale,
[26]

les préoccupations suivantes ont contribué au développement de la psychologie


du travail :

• Besoin urgent d‘affecter un grand nombre d‘individus à des postes


industriels précis et très spécifiques ;
• Essor de l‘approche psychotechnique (recrutement dans les industries,
etc.)
• Enjeux économiques importants ;
• Idée maîtresse, c‘est « adapter l‘Homme au travail » ;
• Parallèlement, réflexion de quelques chercheurs sur l‘adaptation du travail
à l‘Homme (cela renvoie à l‘annonciation de l’ergonomie)

3.4. Reconnaissance de l’importance capitale du facteur


humain dans l’industrie

En dépit des lacunes constatées dans l‘application stricte d‘organisation


scientifique du travail, le développement des sciences du comportement et celui
des sciences du travail au cours de ces dernières années devaient modifier à
nouveau l‘attitude de dirigeants d‘entreprises vis-à-vis du facteur humain.

Au début, les progrès de ces sciences ne trouvent qu‘un écho limité auprès des
industriels qui ne modifient que peu leur concept de l‘homme au travail.
Néanmoins, de larges bouleversements sociaux, économiques et politiques
devaient les amener à réviser leur conception et développer une véritable
politique sociale reléguant dans un musée du passé la notion du travail-
marchandise pour reconnaître à l‘homme une personnalité, une valeur
intrinsèque propre qui ne peut être confondue avec celle de la machine.

Comme l‘affirme G. Friedmann (1946) dans le traité de sociologie du travail :


« le but de l‘organisation scientifique du travail est resté le même, il est
strictement économique, mais ses moyens se compliquent, s‘assouplissent, se
raffinent au point d‘en transformer peu à peu le visage ».

A ce sujet, la reconnaissance de l‘importance capitale du facteur humain dans


l‘industrie va s‘apprécier dans la suite par trois tendances successives
d‘évolution. Celles-ci ne s‘opposent pas, mais se complètent harmonieusement.
Il s‘agit de la tendance humanitaire, de la tendance intégrative et de la tendance
participative ou dite de la démocratie industrielle.
[27]

3.4.1. La tendance humanitaire

Cette tendance se développe surtout au cours des années 1930; il s‘agit d‘une
période d‘éveil du patronat en général aux problèmes humains dans l‘entreprise.

Devant les difficultés en matière de relations humaines provoquées par une


application trop rigoureuse et rationnelle de l‘organisation scientifique du travail
et l‘échec du paternalisme, les patrons sont amenés à modifier leurs vues,
lentement d‘abord, ensuite de manière de plus en plus nette. Ils prennent
conscience de leurs devoirs sociaux et de la portée de leurs attitudes sur le
comportement des travailleurs.

La première réaction des chefs d‘entreprise est de veiller à humaniser le travail.


Désormais, le travailleur n‘est plus considéré comme une créature inférieure
qu‘il faut protéger et guider, mais comme un être animé de sentiments et de
désirs. L‘élément humain est toujours un facteur de production, mais il doit
recevoir un traitement particulier.

Tenant compte du caractère inéluctable de la mécanisation et de la nécessité de


rationaliser le travail, on s‘efforce de développer une meilleure harmonie entre
le travail et le facteur humain, de créer un confort physio-psychologique du
travail ; aussi, à cette époque, on assiste à l‘éclosion de toute une série de
principes, de méthodes, de procédés s‘intégrant dans une organisation
scientifique du travail rénovée et destiné à réconcilier l‘unité du complexe
humain avec les méthodes modernes de production. A ce sujet, la contribution
de la psychologie industrielle à l‘harmonisation du travail est particulièrement
très importante et très appréciée.

Les efforts déployés suivent deux voies d‘importance égale avec un aspect
additif ; il s‘agit primo de l’adaptation de l’homme à son travail (qui consiste
surtout dans l‘orientation, recrutement, sélection, affectation, formation
professionnelle) et secundo de l’adaptation du. travail à l’homme (qui consiste
dans l‘organisation des postes de travail, l‘amélioration des conditions
d‘ambiance, matériel du travail).

Un autre aspect additif de la nouvelle manière d‘aborder les problèmes humains


est l‘attention que l‘on commence à apporter aux problèmes de management
(surtout de leadership ou de commandement). Pour preuve, un peu partout
naissent des services chargés de l‘étude des problèmes posés par les facteurs
humains. Selon les entreprises, on les appelle tantôt service du personnel, tantôt
service social, tantôt service de relations industrielles, etc...
[28]

3.4.2. La tendance intégrative

Cette tendance existait déjà sous forme mitigée avant 1940, mais elle n‘est
entrée avec force dans le cadre des préoccupations patronales que depuis
quelques années. Les chefs d‘entreprises font un effort immense pour sortir de
leur égoïsme antérieur et de leur arrogance. Ceci se remarque d‘ailleurs dans
leurs écrits, dans leurs mots d‘ordre et par leurs actes. Beaucoup d‘entre eux
entendent mettre leur devoir social à l‘avant-plan et à se poser dorénavant en
serviteurs de la communauté.

L‘entreprise, hier encore était considérée essentiellement comme cellule


économique, et de plus en plus envisagée comme une forme d‘organisation
sociale dans les rapports d‘homme à homme, d‘homme à groupe et de groupe à
groupe.

Le travailleur n‘est plus considéré comme une force individuelle, séparée, mais
comme membre à part entière de l‘organisme que représente l‘entreprise. C‘est
pourquoi, aux Etats-Unis, deux notions capitales ont actuellement la faveur pour
l‘étude des conditions d‘une bonne intégration : celle de l‘information et celle de
la communication (c‘est-à-dire établissement du système de communication
entre les différents étages de bas en haut et de haut en bas et au niveau du même
étage). Le réseau de communication doit être économique et permettre une
diffusion des éléments isolés qui risquent d‘avoir entre eux des actions
antagonistes mais des membres d‘une même structure d‘ensemble. Le but est
que chacun parvienne à une attitude positive à l‘égard des autres et de
l‘ensemble.

Ainsi comme on le voit, le paternalisme est officiellement abandonné et rejeté :


il survit néanmoins encore dans bon nombre d‘entreprises.

A l‘aspect négatif des relations sociales dans l‘entreprise, à la lutte des classes,
on veut substituer une politique basée sur la collaboration et la paix sociale.
Cette collaboration ou intégration des efforts et des volontés de tous vers un but
commun ne peut cependant être l‘effet du hasard, mais le résultat d‘efforts
soutenus et conscients s‘attachant à créer les conditions propices à la naissance
d‘un esprit communautaire, d‘un groupe de travail ou chacun a réellement
l‘impression de contribuer librement au bien commun. On va donc s‘efforcer de
créer non seulement un confort biopsychologique du travail, mais aussi de
renforcer les biens affectifs et d‘intérêts existants entre l‘entreprise et les
travailleurs.
[29]

3.4.3. La tendance participative ou tendance dite de la démocratie


industrielle

Celle-ci est surtout prônée par certains théoriciens sociaux et milieux syndicaux.
Jusqu‘ici peu de patrons semblent avoir opté ouvertement pour le principe de
cette nouvelle orientation.

En effet, les tenants de cette tendance ne parlent plus d‘un droit de consultation
ou d‘information des travailleurs, mais d‘un droit de codécision, de cogestion au
niveau de l‘entreprise et de l‘industrie. Bien sûr leurs théories s‘attaquent au
principe même de l‘entreprise capitaliste.

En plus, le travailleur n‘est pas un servant (esclave) de l‘entreprise, mais un


coparticipant à la production, si le capitaliste y apporte son argent et son
équipement, bref, tous les facteurs de production, l‘ouvrier lui donne son travail,
sa force de travail, sa qualification, son expérience, bref, son savoir, son savoir-
être et son savoir- faire. D‘où le capitaliste n‘a pas le droit de décider seul et
d‘une manière unilatérale des salaires et des conditions de travail. Le travailleur
a aussi le droit de participer aux décisions qui peuvent influer sur sa vie de
travail tant sur le plan de l‘entreprise que sur le plan professionnel et national.
L‘autorité absolue du capital est remplacée par l‘autorité collective de tous les
participants à la production, ce qui suppose des modifications profondes dans la
structure de l‘entreprise.

Actuellement, dans cette tendance, le mot qui est quasi à la mode : c‘est la
direction par objectifs (DPO) ou en anglais management by objectives (MBO).
En réalité, elle n‘est rien d‘autre qu‘une espèce de rationalité appliquée à
l‘entreprise. On pourrait d‘ailleurs la définir comme une technique moderne de
direction de l‘entreprise qui vise à atteindre une plus grande efficacité par une
meilleure utilisation des ressources humaines et matérielles.

De ce fait, elle recouvre tous les aspects de l‘entreprise et concerne toute


personne y travaillant. Douglas Mc Gregor (1960) reprenant Maslow a
déterminé dans ce système de direction la théorie X et la théorie Y, c‘est-à-dire
les deux grandes tendances en matière de direction des hommes : la tendance
autoritaire X et la tendance participative Y.

Selon la première théorie (théorie X), elle représente la conception traditionnelle


de la direction, et met l‘accent sur la contrainte et le contrôle. Elle suppose les
postulats suivants : (i) les individus par nature détestent le travail et s‘ils ont
l‘occasion ils peuvent le fuir ; (ii) de ce fait, les individus doivent être contraints,
dirigés, contrôlés et motivés par la crainte de punitions ou de privations qui les
poussent à fournir les efforts voulus ; (iii) l‘individu moyen préfère être conduit,
[30]

a peu d‘ambition, ne veut pas assumer de responsabilité: et cherche sa sécurité


avant tout.

Selon la seconde théorie (théorie Y), elle représente la conception moderne de la


direction et met l‘accent sur la participation. Cette théorie repose sur d‘autres
postulats comme : (i) les êtres humains ne détestent pas le travail : la dépense
physique et mentale leur est aussi naturelle que le loisir ou le repos ; (ii) l‘être
humain préfère l‘autocontrôle à la contrainte ; (ii) l‘être humain ne craint pas
l‘engagement et les responsabilités ; (iii) l‘être humain est capable de créativité,
d‘imagination, d‘originalité pour solutionner des problèmes des entreprises ; (iv)
dans les conditions de la vie industrielle moderne, le potentiel intellectuel de
l‘être humain est sous utilisé.

Il se dégage de la théorie de Mc Gregor que les dirigeants qui raisonnent


aujourd‘hui selon la théorie X surveillent étroitement leurs subalternes, les
menacent de sanctions et exigent la conformité aux politiques de l‘entreprise
(Sekiou & Blondin, 1986). Toutefois, la théorie X ne se préoccupe que des
besoins de base et des besoins de sécurité en négligeant de satisfaire les besoins
plus élevés (besoins sociaux, d‘estime de soi et d‘actualisation).

Pour Mc Gregor, l‘être humain d‘aujourd‘hui a envie de travailler et qu‘il est


motivé par le désir de s‘accomplir et de se sentir utile. Il estime réelle la
possibilité d‘intégration des buts de l‘organisation (entreprise) et des buts de
l‘individu.

Cependant, la direction par objectifs (DPO), fondée sur la définition des


objectifs par celui qui doit les atteindre, implique la participation et
l‘engagement personnel. Elle implique la participation des responsabilités.
Partout, elle est donc issue directement de la théorie Y.

Ensuite Blake et Mouton parlent de deux dimensions de Management :(i)


attention pour la production et (ii) attention pour les travailleurs.

Pendant toutes ces dernières années, de multiples débats ont porté sur la
participation des employés aux décisions concernant le travail dans l‘entreprise
(Tiffin & Cormick, 1967). Viteles (1969, p.407) a résumé ainsi les conclusions
de quelques-unes des recherches sur cette question : « le principal résultat de
ces recherches est la conclusion que la participation des employés au processus
de décision, dans une atmosphère de style démocratique, et établie par une
direction compréhensive, facilite le développement de motivations intériorisées
et personnalisées, contribue à élever le niveau de la production et du moral ».
[31]

Il y a aussi ceux qui contestent l‘intérêt de la participation. Dale rapporte les


conclusions d‘une enquête auprès des représentants du personnel. Cette enquête
portait sur leur expérience de la coopération officielle des employés avec la
direction. Il constate que ce genre de collaboration pouvait être critiqué de trois
façons (Viteles, 1969) : (i) les travailleurs ne participaient pas honnêtement ; (ii)
les fonctions de direction se voyaient contestées, ou même dégradées ; (iii) le
coût économique de l‘opération dépassait largement les avantages.

Il faut signaler une autre enquête sur 201 compagnies ayant déjà institué une
procédure officielle de coopération. Les directions de près de deux tiers d‘entre
elles s‘avouent satisfaites des résultats de l‘expérience tandis qu‘un tiers
manifeste des attitudes variant, selon les résultats, de la neutralité au
désappointement ou à la prudente réserve : wait and see.

Par ailleurs, dans sa tentative de caractérisation des décisions de groupe, Maier


(cité par Tiffin & Mc Cormick, 1967) distingue, dans le tableau ci-dessous, entre
ce qu‘elles sont et ce qu‘elles ne sont pas.
[32]

Tableau n°2. Caractéristiques des décisions de groupe

La décision de groupe n’est pas : La décision du groupe est :


1. Une perte de contrôle de la - Un moyen de contrôle par persuasion
situation plutôt que par force
2. Le mépris de la discipline -Une méthode de discipline de groupe
exercée par l‘intermédiaire de la pression
sociale
3. Le moyen de donner à chacun ce -Un moyen d‘être honnête envers le
qu‘il- veut travail et les membres du groupe
-Une méthode pour réconcilier les
4. une façon de manipuler les gens attitudes en conflit
5. Un moyen de «vendre » les idées -Permettre au groupe de se rassembler sur
du chef de groupe l‘idée qui lui paraît la plus apte à résoudre
son problème.
6. Une dictature meilleure -Une façon de laisser les faits et les
sentiments s‘exprimer
7. Une affaire de vote collectif -Une mise en commun des idées
8. Une direction consultative ne -Une façon coopérative de résoudre les
pouvant difficultés
9. Un moyen de remettre dans les -Donner à chaque personne une chance de
mains des employés la conduite de participer aux questions le concernant
l‘entreprise dans
situation de travail.
10. Ce que chacun peut faire s‘il le -Une méthode qui exige du savoir-faire et
veut le respect des individus

Ci-dessous sont repris les avantages de la participation aux décisions et ceux de


la délégation des responsabilités :
1) Avantages de la participation aux décisions :
Décisions mieux adaptées ;
Meilleure motivation pour l‘exécution ;
Information plus complète de chacun ;
Plus grande flexibilité dans l‘adaptation des solutions ;
Conduite plus responsable donc plus efficace ;
Amélioration du travail en groupe ;
Accroissement de l‘esprit d‘équipe ;
Développement du sentiment de solidarité ;
Appel à l‘imagination de chacun.
2) Avantages de la délégation des responsabilités:
Développement de l‘esprit d‘initiative ;
[33]

Augmentation de l‘autonomie et de l‘indépendance ;


Possibilité d‘autodiscipline ;
Développement (et exigence) d‘une plus grande maturité ;
Accentuation de la compétition entre groupe et atténuation de celle entre
individu ;
Raccourcissement et simplification des communications ;
Facilitation des contacts humains ;
Jugement des hommes, plus d‘après les résultats que d‘après leurs
méthodes de travail ;
Clarification de la dépendance du subordonné par rapport au supérieur.
En guise de conclusion, on peut dire que le terme « participation » désigne au
moins trois processus distincts qui peuvent être mis en œuvre indépendamment
selon que la participation concerne : la prise de décision, la diffusion des
informations et la répartition des profits.

Section 4. Mutations récentes du monde du travail

De nos jours, il y a une évolution du milieu du travail. Avec la mondialisation


de l’économie, la concurrence internationale est accrue, il y a ouverture du
marché des pays de l‘est, du marché asiatique… On voit le développement des
nouvelles technologies: automatisation, informatisation, TIC (technologie de
l'information et de la communication). On passe à une société postindustrielle:
plus de la moitié des salariés travaillent dans le secteur des services. On constate
une décroissance des secteurs de l‘agriculture (secteur primaire), des mines et
des industries (secteur secondaire), … et l'essor des secteurs des services
(secteur tertiaire): distribution (commerce, transport), sociaux (éducation,
médecine), aux entreprises et aux particuliers (banques, assurances, immobilier)
ainsi que l'essor des secteurs non marchands.

On voit aussi le déclin de l‘industrie en tant que grand pourvoyeur d‘emploi: il y


a à la fois moins d'industries et moins de travailleurs par industrie. La
configuration des entreprises change, il y a beaucoup plus de PME (100000), ce
qui encourage la création d'emploi. Dans le contexte occidental, on note de plus
que le cadre législatif est différent et plus souple pour une PME, par exemple,
les syndicats sont obligatoires à partir de 50 travailleurs, il n'y a pas de conseiller
en prévention pour les PME.

L‘autonomie des travailleurs augmente: choix des méthodes de travail, des


rythmes de travail. Ceci doit être mis en lien avec l‘évolution des conditions de
production (augmentation de la flexibilité).
[34]

On doit faire face à une intensification du travail: horaire de travail densifié,


fractionné. L'exigence augmente. Le passage au 35h en France n'a pas permis de
créer de l'emploi, les gens doivent faire en 35h ce qu'ils faisaient en 38h
auparavant. De plus, cela complique la mise en place du travail à 3 pauses et
donc il y a diminution d'effectif à certains moments.

Il y a aussi une distension du rapport au travail: travail plus abstrait,


manipulation de codes, dématérialisation. Par exemple, les architectes qui
travaillent sur des plans en 2D doivent maintenant travailler en 3D, ce n'est plus
le même métier. Les vieux livres de compte laissent la place à des tableaux
Excel.

On voit aussi une montée de la précarité: CDD, intérimaires, sous-traitants,


indépendants et une augmentation de la pénibilité du travail et des risques.

De façon plus structurée, nous pouvons présenter comme suit les différentes
évolutions du monde du travail :

 Évolution des secteurs d’emplois :


• « disparition » de l‘agriculture traditionnelle
• Déclin de l‘industrie traditionnelle
• Essor des services aux personnes
• Essor des services aux entreprises
• Accroissement des niveaux supérieurs et inférieurs de la structure
professionnelle
• Multiplication rapide des gestionnaires et spécialistes
• Appel important à la sous-traitance

 Évolutions technologiques :
• Essor du télétravail (ex., courrier électronique)
• Importances du travail collaboratif (ex., systèmes Wiki, collecticiels,
ENT, etc.)
• Essor de la vitesse et des capacités de traitement des informations
• Problèmes liés à la sécurité et confidentialité
• « Informatisation » de toutes les couches de la Société

 Evolution des modes de gestion des entreprises :


• Co-existence de plusieurs modèles (« paternalistes », « collectifs », etc.)
• Essor de la précarisation de l‘emploi
• Mondialisation des échanges
• Délocalisation et sous-traitance
• Intensification du travail (quantitativement et/ou qualitativement) à cause
de la concurrence
[35]

• Implication des salariés dans la vie des entreprises


• « Débordements » sur la vie privée

 Evolutions démographiques :
• Augmentation de l‘espérance de vie (dans certains pays du monde)
• Vieillissement de la population active (dans certains pays du monde)
• Scolarisation plus longue
• Essor de la formation « tout au long de la vie »
• Féminisation de la population active

 Evolutions idéologiques :
• L‘âge de la retraite ?
• Intéressement à la vie des sociétés ?
• Pénibilité du travail ?

Section 5. Finalités, modalités et domaines de la psychologie du


travail

La psychologie du travail constitue une partie de la psychologie, correspondant à


une division de cette discipline en termes de classes de conduites définies par
leur objet (comme psychologie scolaire, clinique, médicale, économique et/ou
commerciale, etc.). De nos jours, trois questions de psychologie du travail
peuvent être envisagées; elles sont relatives:
aux finalités: quel est le but ou l'objectif que l'on veut atteindre ?
aux modalités: comment concevoir les finalités ?
aux domaines et champs de recherche et d‘intervention de la discipline.

5.1. Finalités de la psychologie du travail

Quel est le but de la psychologie du travail? Le but est d'aider à créer un cadre
de travail fonde sur une harmonie optimale entre l‘homme et le travail, entre
l‘homme et son activité professionnelle. Améliorer la qualité de vie au travail
devrait avoir des effets positifs sur le travailleur et l‘engager plus favorablement
dans son activité ce qui devrait entrainer une amélioration du rendement ou de la
productivité et il est intéressant de prendre cela en compte.

Il y a une opposition entre une vision du travail comme « peine » et une vision
du travail comme « expression de soi ». Cette opposition est en fait essentielle
par rapport à la définition d‘objectif de la psychologie du travail car elle renvoie
[36]

à une distinction entre une finalité de réduction des contraintes (pénibilité) et


une finalité de développement de la personne (au et par le travail).

Il y a donc une double finalité: le bien-être et la production. Il est important de


ne pas le nier. Même en tant que psychologue, il faut prendre en compte les
deux variables. La première finalité est de réduire la pénibilité du travail,
limiter la fatigue, améliorer le bien-être au travail, augmenter la satisfaction à
l‘égard du travail, etc.

Cette première finalité de la psychologie du travail est liée à l’objectif social de


celle-ci, lequel consiste à harmoniser et améliorer les relations humaines dans le
monde du travail, notamment : en créant, en développant et en maintenant des
relations harmonieuses entre tous les membres de l‘organisation ; en
embauchant un personnel compétent et en utilisant ses efforts avec efficience
(c‘est le problème de la formation, promotion et transfert) ; en développant au
maximum la personnalité de chaque individu notamment en le réconciliant avec
les milieux physique et social de son travail ; en lui procurant satisfaction et
rémunération dont il a besoin dans l‘exécution de son travail. Surtout en lui
procurant une rémunération juste équitable et convenable.

Le fait de donner dans la production la primauté à l‘homme constitue d‘ailleurs


le moyen le plus efficace pour accroître la productivité de l‘organisation
(entreprise)

La seconde finalité est d'améliorer les performances, accroitre l‘efficacité, la


productivité, la qualité, la rentabilité, etc. La psychologie du travail vise donc
aussi l'amélioration des performances. Cette seconde finalité est relative à
l’objectif économique de la psychologie du travail qui consiste à aider la
direction à mieux produire le plus économiquement possible un nombre
croissant de biens et de services de qualité dans le temps requis. A cet effet, elle
doit rechercher les techniques et les moyens qui augmenteront les capacités
professionnelles des travailleurs et en même temps développeront leurs
motivations de coopérer par leurs efforts au succès de l‘entreprise.

A priori, on peut croire qu'il y a contradictions entre ces finalités et qu'il n'est
pas possible de répondre aux deux objectifs. Mais on peut considérer qu'il n'y a
pas d'objection entre les deux finalités (ou les deux ne doivent pas s‘opposer),
qu'on peut les rencontrer en même temps, que l'une n'est pas prise en compte au
dépend de l'autre, qu'il existe une convergence. Ce n'est pas une position facile
pour les psychologues de défendre ce point de vue de convergence. Toutefois,
on ne résoudra pas les problèmes économiques si l‘ensemble du personnel,
mieux des ressources humaines, ne remplit pas convenablement son rôle. Pour
ce faire, il faut un climat social propice et serein.
[37]

Par ailleurs, pour évaluer et apprécier la performance réalisée dans le contexte


du travail, il existe des critères ainsi que des indicateurs qui renvoient aux
notions d‘efficience et d‘efficacité. Pour ce faire, trois types d’efficiences
peuvent être distingués, lesquels sont les éléments constitutifs de l‘efficacité,
même si chaque élément peut avoir un impact différent des autres. Il
s‘agit de :l’efficience économique, l’efficience technique et l’efficience
sociale :

a) L’efficience économique est définie par comparaison des dépenses aux


résultats qui en découlent. Les critères de mesure les plus utilisés sont les
coûts comparés aux résultats, soit globaux, soit calculés par unité.

b) L’efficience technique concerne la capacité de produire des services en


quantité et qualité acceptables, dans le temps requis. Ce type d‘efficience
recouvre, par exemple la qualité et la rapidité de service rendu, découlant
du caractère approprié des procédures utilisées.

c) L’efficience sociale recouvre les attitudes du personnel envers l‘entreprise


et son travail, ainsi que les satisfactions qu‘il en retire en échange de ses
efforts. Elle est mesurée par les indicateurs quantitatifs comme
l‘absentéisme, l‘instabilité où turn over, grèves ou conflits larvés ; par des
indicateurs qualitatifs comme des enquêtes d‘attitude et d‘opinions, sous
forme de perception et de comportements, d‘interview et de questionnaire.

5.2. Modalités d’intervention de la psychologie du travail

Comment faire? Sur quoi agir ? Doit-on agir sur les hommes ou sur les
structures ou sur les deux? Pour reprendre le terme de J. Leplat (1997), la
question centrale est une question de couplage optimal entre l‘homme et le
travail, les tâches qu'on lui donne.
[38]

Figure 1. Éléments essentiels de l’analyse du travail (d’après Leplat, 1997)

L'activité est la conséquence, le résultat du couplage (agent et tâche).

La question des modalités peut être abordée de deux manières diamétralement


opposées (mais non exclusives!) Soit adapter le travail à l‘homme, soit adapter
l‘homme au travail.

5.2.1. Concernant le scénario du travail ou homme-Machine


Pour le psychologue ou pour tout autre chercheur, la situation de travail
constitue un objet difficile à manipuler, à modifier, pour les seules fins de son
étude (notamment dans le cadre expérimental). Les situations de travail ne sont
pas - ou peu - sous le contrôle direct du psychologue. L‘analyse des situations,
telles qu‘elles se présentent, revêtira en psychologie du travail une très grande
importance (Leplat & Cuny, 1977).
En tant que conduite, le travail peut être considéré par rapport à des cadres de
référence variés. Le travailleur est inséré dans un système technique, notamment
dans un système homme x machine. Il concourt à cette place au fonctionnement
de ce système. L‘étude des interactions qui s‘instituent entre l‘homme d‘une
part, la machine, ses instruments de travail ou, plus largement, son
environnement technique, d‘autre part, constitue un champ important de la
psychologie du travail.
Par ailleurs, le travailleur, en tant que tel est aussi membre de groupes formels et
informels; il est inséré dans des organisations variées (équipe, atelier, usine,
entreprise, hôpital, syndicats, groupes professionnels, etc.). L‘étude des relations
et des communications qui se développent dans ces contextes constituera un
autre champ de la psychologie du travail (Leplat & Cuny, 1977).
Enfin, la représentation que se fait le travailleur de sa tâche, son attitude envers
elle, les satisfactions qu‘il en retire, définissent encore un autre champ de la
psychologie du travail.
[39]

En psychologie du travail, les éléments (ou objets) d’investigation pourront


être:

1. Les systèmes HxM élémentaires

Il s‘agit d‘un homme avec ses caractéristiques intrinsèques et d‘une machine


avec ses caractéristiques techniques.

1.1. L‘individu, l‘homme mis en évidence: HxM

On s‘intéresse surtout aux caractéristiques du travailleur.


- Champs de la psychologie concernés :
• la psychologie différentielle
• l‘apprentissage.
- Champs d‘intervention
• la signification du travail
• l‘implication
• la sélection,-l‘affectation (compte tenu des caractéristiques des
travailleurs, qui choisira-t-on, qui écartera-t-on de tel ou tel poste?)
• la formation (comment modifier les caractéristiques du travail (savoir,
savoir -être, savoir-faire pour l‘adapter à son travail.

1.2. L‘interaction travailleur-Machine: HxM

On s‘intéresse surtout aux relations, interactions entre l‘individu et la


machine.
- Champs de la psychologie concernés :
• la perception
• la sensori-motricité
• la connaissance (quel est le savoir que le travailleur doit posséder, quelle
est l‘expérience qu‘il a acquise?)
- Champs d‘intervention :
• l‘ergonomie élémentaire (comment éviter, diagnostiquer les erreurs, les
accidents, les maladies professionnelles, bref, les risques professionnels?)
• les conditions de travail (quelle est la charge physique et mentale du
travail auquel le travailleur est confronté?)
La formule sera S-O-R

1.3. Le couple Homme-Machine comme poste de travail (HxM):

On s‘intéresse au couple home-machine en soi, à l‘insertion du poste de


travail dans le temps et dans l‘espace.
[40]

- Champs de la psychologie concernés :


• la motivation
• la vigilance
• les rythmes nycthéméraux ou biologiques.

Ces rythmes constituent un aspect principal dans l‘évaluation des conditions


de travail. L‘homme présente en effet certains rythmes au cours de son
travail (ex. fluctuations de la température). Ces rythmes peuvent être mis en
relation avec l‘activité, les performances réalisées.

- Champs d‘intervention:
• l‘organisation (du travail)
• l‘évaluation (du travail).

On peut chercher à organiser le travail en tenant compte des meilleurs moments


au point de vue rythmes biologiques. Lorsqu‘on adapte le poste de travail en
fonction de la dimension temporelle, on parle de chrono-ergonomie.

2. Les systèmes HxM complexes

Il s‘agit de la somme des individus et de leurs machines.

2.1. Les groupes de travailleurs: ∑(HxM)

On s‘intéresse particulièrement aux caractéristiques de groupes de travailleurs


par rapport aux caractéristiques de machines.

- Champs de la psychologie concernés :


• la psychologie sociale
• les communications
• le travail en groupe
- Champs d‘intervention
• l‘amélioration du climat de communication
• les relations (entre individus au sein de l‘organisation)
• l‘encadrement.

2.2. Les ensembles de relations: ∑(HxM)

On ne se limite pas ici seulement au champ spécifique de la psychologie.


- Champ de la psychologie concerné :
• l‘Organisation en tant que discipline et non en tant que objet
- Champ d‘intervention :
• l‘ergonomie des systèmes.
[41]

L‘analyse menée ici sera différente du cas élémentaire (d‘un seul homme avec
une seule machine) car il faudra tenir compte des interactions homme x homme,
donc de variables relationnelles : l‘homme est inséré dans un ensemble de
communications, de relations avec d‘autres couples HxM (postes de travail).
La formule sera S-R au lieu de S-O-R.

2.3. Les ensembles de postes: ∑(HxM)

On s‘intéresse non seulement aux relations entre H-M mais à l‘ensemble du


poste tout entier.

- Champs de la psychologie concernés :


• l‘organisation (structure des tâches ...)
• la structure de groupe
- Champ d‘intervention:
• la gestion du personnel

3. La dimension historique

Jusqu‘à présent, les systèmes HxM (élémentaires et complexes) envisagés


étaient considérés comme des ensembles qui n‘étaient pas analysés de manière
diachronique. Pour tenir compte de leur évolution dans le temps, on introduit
une troisième dimension: la dimension historique, symbolisée par (h).

3.1. La carrière de l‘individu : h x(HxM)

On s‘intéresse à la façon dont l‘individu construit une carrière


- Champs de la psychologie concernés :
• la mobilité professionnelle
• le vieillissement
- champ d‘intervention :
• l‘affectation, la mutation, la promotion (comment l‘individu évolue-t-il au
sein de la société, de l‘entreprise? Y-a-t-il une politique de changement...?)

3.2. L‘évolution des relations HxM : hx(HxM)

- Champ de la psychologie concerné :


• l‘organisation du travail
- Champ d‘intervention:
• l‘ergonomie de correction et de conception.
[42]

Il s‘agit pour la première (ergonomie corrective) de tendre à améliorer les


situations de travail existantes, autrement dit, quelles leçons tirées d‘une analyse
des conditions de travail dans l‘avenir. Pour la deuxième (ergonomie
préventive), de tendre à faire intervenir les connaissances sur l‘homme dès le
projet du poste, de l‘outil, de la machine ou des systèmes de production. C‘est
donc l‘ergonomie au stade du projet. On essaie d‘aménager les machines pour
les adapter à la physiologie de l‘homme.

3.3. L‘évolution des postes: h x (HxM)

- Champ de la psychologie concerné :


• l‘organisation du travail
- Champ d‘intervention:
• la planification de l‘emploi.
Ainsi, un autre champ d‘application concerne les aspects internes et externes de
l‘entreprise.

5.2.2. Concernant les aspects internes et externes de l’entreprise

Il ressort des analyses que l‘adaptation de l‘homme au travail et de l‘adaptation


du travail à l‘homme n‘auront que peu d‘effet si les conditions générales de
l‘entreprise sont psychologiquement insatisfaisantes et moins motivantes. D‘où
il importe de tenir compte des aspects à la fois internes et externes de
l‘entreprise. La figure 2 ci-après illustre bien cette manière de voir.
[43]

Fig. 2: Application sur les aspects internes et externes dc l’entreprise

Adaptation
Au travail
Actions concernant les hommes Actions concernant le travail Conditions Conditions Environnement
internes externes externe local
Connaissance du Perfectionnement Analyse du travail
Adaptation du travail
personnel du personnel
- Simplification du -Analyse de
- Présentation du - Economie
travail l‘emploi
- Apprentissage - Conjoncture
candidat
- Regroupement des - Concurrence
- Lettre avec C.V - Formation Identification - Structures - Action sociale
tâches - Technologique
- Interview de professionnelle Description - Culture - Logement
- Adaptation du social-valeurs
sélection Spécification - Communication - Transport - Valeurs
- Recyclage travail à l‘homme
- Tests - Evaluation - Commandement - Coopératives/ - Législatif
- Prévention des
psychotechniques - Stage - Classification - Rémunération cantine - Lois
accidents et - Règlements
- Enquête sociale - Promotion prof. des emplois - Horaire - Economat
maladies - Système d‘aide
- Notation - Etc. - Sports/Loisirs
- Etc. professionnelles de
professionnelle - Cafétariat
gouvernements
- Etc. - Etc.

Source : Jardillier (1967) (adapté)


[44]

5.2.3. Méthodologie de la recherche en psychologie du travail


En réalité, la recherche en psychologie ne cherche pas des solutions mais des
explications. De ces explications peuvent découler éventuellement des solutions
possibles.
A ce sujet, la psychologie du travail distingue deux éléments : l‘individu et son
poste de travail.
I M

Individu Poste de travail


On notera cependant que la méthodologie est prescriptive et normative.
1. Contraintes méthodologiques

• Si la recherche en psychologie du travail consiste à expliquer des


enchaînements entre des phénomènes, le but de la recherche est assez
clair, celui du chercheur ne l‘est pas pour autant. A qui le chercheur
souhaite-il expliquer cet enchaînement? A lui-même? Pourtant la
recherche n‘a pas pour fonction uniquement de satisfaire une curiosité
personnelle, le chercheur s‘efforce par elle d‘obtenir des récompenses en
échange d‘un travail.

• Le poste de travail comporte le travail constitué des tâches effectives qui


sont ce que le sujet fait réellement et des tâches prescrites qui
correspondent à ce qui est attendu du sujet.

• Le conflit qui surgit entre la validité interne et la validité externe d‘une


recherche expérimentale. La validité interne désigne le degré de certitude
que l‘effet observé est bien sous la dépendance de la variable manipulée ;
la variable externe exprime la possibilité de généraliser à d‘autres
populations, d‘autres contextes les résultats obtenus dans une expérience.
Mais aucun type de validité ne le cède en importance à l‘autre.

• Un autre conflit réside dans le choix que doit faire opérer le chercheur
entre l‘originalité de sa recherche et la garantie d‘obtenir des résultats
reconnus.

• Faire de la recherche, c‘est gérer un temps disponible. Un nombre


important de recherches échouent parce que le chercheur ne s‘est pas posé
la question de l‘économie de ses moyens temporels. Cette économie de la
recherche se pose aussi en terme monétaire (argent).

• L‘accès au terrain dépend le plus souvent du bon vouloir d‘un certain


nombre de personnes ; le fait que des sujets se prêtent à l‘observation
[45]

également ; la mise à disposition d‘outils documentaires ou de traitement


tout autant. Bref, l‘accès à ces moyens se négocie. Trois systèmes
interviennent dans la négociation qui conduit à l‘œuvre de recherche:

le système terrain composé de plusieurs types d‘acteurs aux


objectifs partiellement différents ;
le système de recherche composé d‘acteurs scientifiques disposant
d‘une certaine autonomie ;
le système personnel du chercheur (Personnalité) composé des
appartenances réelles et symboliques.
Ainsi, les choix que traduit une recherche correspondent en fait non pas à ceux
d‘un décideur mais plusieurs qui négocient entre eux sur les objectifs et les
moyens, car tous les acteurs n‘ont pas les mêmes atouts. D‘où l‘objet de la
recherche et son objectif ne sont pas indépendants des moyens de la réaliser.
Buts et moyens forment une structure telle que la modification de l‘un des
termes se répercute sur les autres.
Cette structure moyen-fins n‘est pas donnée une fois pour toute, elle se construit.
Car il existe des contraintes et des ressources assez stables qui conditionnent la
stratégie de recherche. Tel est le cas à un moment donné de l‘état des
connaissances dans un domaine bien déterminé.

5.2.4. Construction ou élaboration de l’Objet


L‘objet de la recherche n‘est pas donné, il est construit. Dans la science, rien
n‘est donné, tout est construit.
La situation en psychologie du travail peut être décrite comme un système tâche-
sujet dont le chercheur analyse le fonctionnement ; la problématique est un
système organisé de questions sur ce fonctionnement ; la méthode est un
ensemble coordonné de techniques (procédures standardisées et transmissibles
de construction et de traitement des observables).
Quelques-unes des exigences de la construction de l‘objet de recherche peuvent
être illustrées par la métaphore ―pédagogique‖ de la pyramide ci-après (Curje &
Cellier, 1987) :
[46]

PROBLEMATIQUE

CONJECTURAL SPECULATIF

Hypothèse
OBJET

Problème Technique

SITUATION EMPIRIQUE METHODE

Figure 3. Métaphore de la pyramide.


Le sommet figure l‘objet de recherche ;
La base comporte, en ses trois angles, la situation, la problématique, la
méthode de recherche.

On note cependant qu‘il n‘y a pas de problème sans problématique. Et la


problématique est un système de questions, un système d‘étonnements et l‘on ne
s‘étonne que de ce qui ne paraît pas correspondre à ce que l‘on croyait établi.
Aussi, l‘objet est construit par la méthode et les techniques. C‘est donc
l‘existence de cette solidarité entre l‘objet et les techniques qui implique la
transformation des objets de recherche lorsque de nouvelles techniques de
recherche apparaissent.
La métaphore de la pyramide illustre également le processus de construction de
l‘objet. Dans un triple sens :
• La pyramide ne peut tenir débout s‘il manque une de ses faces : la
recherche privée de problématique resterait purement « empirique »; celle
à laquelle manquerait l‘appui d‘une situation resterait « spéculative» »; le
chercheur auquel la méthode fait défaut ne produit que des «conjectures ».

• Il n‘est pas possible de construire une face sans prendre appui sur les deux
autres. La métaphore de la pyramide indique que les différentes faces
doivent être construites en même temps dans un étayage réciproque de la
problématique, du problème et des techniques. Peu importe en définitive
le point de départ, l‘important est qu‘il ne soit qu‘un point de départ.
[47]

• Enfin, la pyramide a pour propriété d‘avoir un sommet plus réduit que sa


base. L‘objet de la recherche est pointu. Sa construction consiste en un jeu
de questions- réponses de plus en plus délimitées et précises. C‘est cet
objet qui donnera son titre à la recherche. Le titre de la recherche est
trouvé par le chercheur à la fin de la recherche. C‘est pourquoi on sait que
le processus de «maturation » n‘est achevé aussi longtemps que le titre n‘a
pas pu être trouvé.
On peut donc résumer le processus de construction de l‘objet comme suit :

Figure 4. Processus de construction de l’objet


Environnement ext. Problématique

Position et Contraintes Résultats


caractéristiques Visées personnelles partiels
du chercheur Ressources Objet

Environnement int. Situation Méthode

5.3 Domaines et champs de recherche et d’intervention

Exemple: Dans une agence bancaire, travaillent des hommes et des femmes qui
réalisent différentes tâches de type administratif en relation avec l‘activité
habituelle d‘une banque. Les guichetiers doivent réaliser un certain nombre de
tâches spécifiques correspondant aux opérations demandées par les clients:
versement, change, ouverture compte… Pour ce faire, ils utilisent un terminal
d‘ordinateur (outil), traitent des documents, appliquent des règles, des
règlements, etc… Leur travail est organisé pour satisfaire aux exigences
commerciales de la banque.

Imaginons que certains guichetiers commettent un nombre d‘erreurs très


important, mettant en cause le bon fonctionnement de l‘agence: il s‘agit
d‘erreurs touchant à des opérations financières: erreurs de codification,
opérations erronées, fautes dans des montants… Ces erreurs sont identifiées,
elles sont sensibles, dommageables. S‘interrogeant sur les « causes » possibles
des erreurs, le psychologue appelé à intervenir pourra envisager plusieurs
thématiques d‘intervention…

Quels en seraient, selon vous, les grands axes? Voici quelques piste: s‘interroger
sur leurs motivations au travail, s‘interroger sur leur formation, s‘interroger sur
l‘attitude des supérieurs hiérarchiques, revoir les processus de sélection (on
[48]

aurait choisi les mauvaises personnes), revoir leurs outils informatiques,


s'interroger sur l'environnement de travail…

Les personnes concernées ont-elles les qualités requises pour exécuter le travail
demande? Intelligence, attention… Connaissances bancaires, de la banque,
informatique… S‘agit-il de caractéristiques fondamentales (qu'elles ont ou
qu'elles n'ont pas) de la personne? S‘agit-il de caractéristiques liées à des
formations et aux expériences antérieures de travail?

N‘aurait-il pas fallu détecter le faible niveau de ces caractéristiques avant


l‘engagement, lors de l'embauche? Le recrutement, la sélection ont-ils été
correctement effectues?

Les personnes concernées ont-elles reçu une formation adéquate, suffisante,


leur permettant de faire face aux exigences réelles de travail? Ce qu'on apprend
est-il utilisable dans la pratique? Ceci implique-t-il les processus de formation?
S‘agit-il des capacités de formativité des apprenants (sont-ils capables
d'apprendre)? S‘agit-il de l‘opérationnalisation des contenus de formation sur le
terrain?

La motivation des agents est-elle en cause? Les personnes concernées sont-elles


intéressées par leur travail? Elles peuvent le trouver ennuyeux, ne pas y trouver
du sens, ou les perspectives de carrière souhaitées? Peut-être que
l‘informatisation peut les isoler socialement ou que cela ne change pas grand-
chose pour eux de faire ou de ne pas faire d‘erreurs, parce leur carrière ne
dépend pas de leur performance. Ils peuvent ne pas percevoir l'utilité, le sens de
leur travail.

Est-ce que les relations entre les personnes sont en cause? N‘existe-t-il pas des
conflits interpersonnels qui influencent leur implication au travail? Les erreurs
ou les dysfonctionnements seraient-ils révélateurs d‘un malaise, s‘agissant d‘un
moyen d‘exprimer les problèmes et/ou de les entretenir? Les relations avec les
supérieurs hiérarchiques ne sont-elles pas responsables d‘un climat peu
favorable à un travail de qualité? Ces erreurs n‘expriment-elles pas une
opposition au système en place, ou alors au contraire un appel à l‘aide?

Les conditions de travail sont-elles réunies pour effectuer correctement le


travail attendu? Les erreurs ne sont-elles pas inévitables ou hautement probables
compte tenu du fonctionnement psychophysiologique et cognitif de l‘être
humain? Les exigences de production n‘entrainent-elles pas un conflit rapidité-
précision, plaçant les personnes dans une situation ou toute tentative de satisfaire
l‘exigence de rapidité amènerait à prendre des risques pour la précision du
travail? Par exemple, on a un temps défini pour traiter un client, les travailleurs
[49]

adoptent une stratégie pour gérer les délais. Les outils, les ordinateurs, les
logiciels ne sont-ils pas susceptibles d‘induire des erreurs (outil adapte)? Leurs
modes d‘utilisation sont-ils compatibles avec les procédures, les mécanismes
mentaux? Y a-t-il des procédures de contrôle et d‘aide pour des actions qui
peuvent être problématiques? L‘environnement de travail, le cadre est-il bien
propice au travail? Quelles seraient les nuisances (bruits) susceptibles de
provoquer les erreurs?

Des aspects relatifs aux caractéristiques de vie des personnes seraient-ils


susceptibles d‘influencer le cours du travail? La conciliation vie au travail et vie
hors travail pourrait-elle être problématique et entrainer des difficultés
personnelles? Les conditions d‘emploi sont-elles réunies pour effectuer
correctement le travail attendu?

En synthèse, il y a beaucoup de questions à se poser, il faudrait bien sûr


envisager plusieurs « causes », plusieurs axes de recherche et d‘intervention.
Une analyse préalable des circonstances et des faits sera indispensable avant de
s‘orienter vers certains axes. Il faudra étudier quel type d'erreur est faite et à quel
moment. Est-ce qu'elles sont faites par tout le monde? Les conditions sont-elles
différentes pour les différentes personnes. Le contexte, les possibilités d‘action
détermineront également les axes.

Le tableau n°3, lié au scénario du travail ou Homme-Machine, présente


différents champs de la psychologie du travail.
[50]

Tableau n°3. Différents champs de la psychologie du travail.


Champs d‘études Champs de connaissances Champs d‘intervention (Ex)
psychologiques (Ex.)
Psycho. Système H x M élémentaires
Techn. psychologie différentielle, Sélection, formation, affectation ;
HxM: Caractéristiques du travailleur apprentissage promotion, signification,
implication Ergonomie
HxM : relations HxM Perception, sensori-motricité, décision, élémentaire (du poste) conditions
processus cognitifs de travail
(HxM): poste Id. motivation, vigilance, rythme Organisation du travail, analyse et
nycthéméraux=biologiques évaluation du travail (emploi)
Socio. Systèmes HxM complexes:
Techn. ∑ (HXM): groupes de travailleurs Psychologie sociale, travail en groupe Amélioration du climat de
communication communication, encadrement,
∑ (HxM): ensembles de relations HxM Organisation Ergonomie des systèmes

∑ (HxM): ensembles de postes Structure de groupe, structure de tâche, Organisation, gestion du


organisation personnel
Carrière Dimension historique:
Mobilité professionnelle et sociale, Planification des carrières
h x HxM: carrières vieillissement
Organisation, apprentissage, Ergonomie de conception ou de
h x HxM: évolution des relations HxM changement correction

h x HxM: évolution des postes ou Id. Planification de l‘emploi


emplois
Source: Leplat & Cuny (1977, p. 40).
[51]

Il y a trois grands champs d'intervention de la psychologie du travail :


• La psychologie du personnel: les personnes
• La psychologie des organisations: motivation, ligne hiérarchique...
• La psychologie ergonomique: outils, situation de travail...

5.3.1 Le domaine de la psychologie du personnel

C'est le domaine centré sur l'individu, ce qui est plus habituel pour nous, on
commencera donc à étudier celui-là. Ce premier domaine se définit par des
interventions de la psychologie du travail centrées directement sur la personne
du (ou des) travailleur(s). Ces interventions visent tantôt à connaitre, à évaluer le
travailleur (diagnostic et pronostic), tantôt à le « faire évoluer » (au niveau de
ses connaissances, de ses comportements), tantôt à gérer son insertion et son
devenir dans l‘entreprise. On s‘intéressera ici au recrutement, à la sélection, à
l‘évaluation, à la promotion, à la mutation, à la formation, à la gestion de la
carrière, etc. On serait davantage dans la modalité de l‘adaptation de l’homme
au travail.

5.3.2 Le domaine de la psychologie des organisations

Un domaine spécifique s‘est dessiné autour du constat de l‘importance de la


dimension « organisationnelle » du travail. Le travail se déroule dans le cadre
d‘une organisation qui définit des rôles, des statuts, des échanges entre les
acteurs (travailleurs). Ces notions renvoient à des aspects que l‘on peut qualifier
de fonctionnels (les tâches à réaliser) autant qu‘à des aspects relationnels,
psychosociaux. On s‘intéressera ici aux structures organisationnelles et
motivationnelles, aux relations entre les travailleurs, aux structures
hiérarchiques, aux processus de communication, de participation, de
négociation, de médiation, etc.

On s‘intéresse donc aux interactions entre les individus et les composantes de


l‘organisation et aux répercussions des interactions sociales dans lesquelles les
personnes peuvent être impliquées. Les deux sens de l‘adaptation sont ici sous-
jacents (c‘est-à-dire adaptation de l’homme au travail et adaptation du
travail à l’homme) : chercher à connaitre le « fonctionnement humain » pour y
adapter des structures d‘organisation (ou tout autre aspect étudié dans ce
domaine) et déterminer quel serait l‘homme « adapté » à telle forme
d‘organisation, ou définir comment amener tel individu à s‘insérer dans celle-ci,
à adhérer aux valeurs qu‘elle défend.

Notons que dans le cadre du présent cours, nous n‘allons pas développer des
questions en rapport avec la psychologie des organisations. Car, le cours de
[52]

psychologie des organisations est prévu dans le programme des classes


supérieures.

5.3.3 Le domaine de la psychologie ergonomique

Ce domaine s‘intéresse par définition à la réalisation effective du travail, au


travail vu comme activité. Sont ici au cœur des préoccupations: les aspects
opératoires et techniques du travail, les tâches, leur définition, leur cadre
environnemental (physique, organisationnel, social, etc.), en ce compris les
risques afférents. Une préoccupation marquée pour les aspects opératifs et
cognitifs liés à l'exercice de l'activité professionnelle proprement dite. On
s‘intéressera ici à la conception des outils et des méthodes de travail, aux
conditions de travail, aux interfaces homme-machine, homme-ordinateur, à la
sécurité et aux risques professionnels. Il s‘agit ici d‘adapter le travail à
l’homme.

5.3.4 Les autres domaines / champs de la psychologie du travail

L’insertion socio-professionnelle : des personnes faiblement qualifiées, des


demandeurs d‘emploi longue durée, des personnes présentant une incapacité et
donc des profils bien particuliers.

La sécurité routière via les accidents du travail, donc des risques, de la


perception des risques et de l'adaptation des comportements, la psychologie des
transports (aviation).

La psychologie économique, l‘étude du comportement du consommateur...

Le tableau n°4 présente les actions relatives à l‘adaptation du travail à l‘homme


et celles ayant trait à l‘adaptation de l‘homme au travail.
[53]

Tableau n°4. Actions d‘adaptation au travail.

Il y a deux axes verticaux : l'adaptation du travail à l'homme et l'adaptation de


l'homme au travail. Il y a deux axes horizontaux, la correction et la conception,
ils ne sont pas en opposition, on agit sur les deux. Pour la correction, on ajuste
ce qui existe, on étudie les dysfonctionnements, par exemple, l'étude du stress au
travail. Pour la conception, c'est une banque qui décide d'acheter un nouvel
outil, d'engager des nouvelles personnes et elle se demande quel type de
personne ou de logiciel dont elle a besoin, c'est anticiper une situation.
[54]

CHAPITRE 2. PSYCHOLOGIE DU PERSONNEL

Section 1. Introduction

Le travail est la rencontre entre deux « systèmes » : l‘individu et l‘organisation


du travail. Ces « systèmes » sont animés de principes unificateurs, intégrateurs
(ils essaient de s'ajuster l'un à l'autre) et ces deux « systèmes » sont en constante
évolution.

1.1. Vision GRH, Capital humain

1.1.1. Vision stratégique de la Gestion des Ressources Humaines (GRH)

Suite aux limites des systèmes traditionnels de gestion du personnel (dans les
années 50-60, ça se limite à une gestion de la paie, du salaire) et à la
concurrence accrue sur le marché du travail (l'organisation essaie de capter les
travailleurs qu'elle souhaite et de les garder), à une redéfinition des fonctions
d‘encadrement (la façon dont le chef doit encadrer ses subordonnés : ce que le
chef doit attendre et demander à ses travailleurs et inversement) et à l'influence
de l‘actionnariat (forte introduction de l'économie, demande de rentabilité, de
plus grande productivité), on en arrive à une vision stratégique de la gestion des
ressources humaines. C'est une nécessité interne pour l'entreprise mais elle subit
aussi des conséquences externes.

1.1.2. RH – Capital humain

Le terme ressource humaine est apparu dans les années 70-80. A côté des
ressources matérielles, on veut considérer le personnel comme une ressource
(que l'on nomme humaine en opposition avec matérielle) que l'on veut garder
mais qui est aussi modifiable, supprimable, ce n'est pas forcément une idée
centrée sur l'homme et pas forcément l'affaire des psychologues.

C'est un concept économique introduit par Schultz(1961) et repris par Becker


(1975-1993).

Ce concept désigne les connaissances, les qualifications, les compétences et les


autres qualités que possède un individu et qui intéressent l‘activité économique
(définition de l'OCDE).

C'est un capital qui s‘acquiert (éducation, scolarité), qui s‘entretient (formation,


prévention) et qui produit des bénéfices pour l‘organisation et pour l‘individu.
[55]

Le travail n‘est pas (plus) une évidence, il est incertain, les postes changent, les
compétences demandées évoluent. L'évolution du travail est rapide, pour garder
son emploi et le type d'emploi que l'on veut, il faut une formation continue, on
évolue au cours de la carrière.

Avant l‘emploi, on fait des choix professionnels, orientation scolaire et


professionnelle. Il y a des processus psychologiques influençant les choix
professionnels et les comportements associés : le sentiment de compétence,
l'estime de soi, etc.
[56]

1.2. Les grandes phases tout au long de la carrière


[57]

Le recrutement est la partie qui va jusqu'à la sélection. L'analyse du travail est


l'identification du poste. La sélection consiste à faire le tri, choisir la personne
parmi beaucoup d'autres. La décision est celle de l'engagement ou du non
engagement. La vie au travail, c'est la carrière. Il y a des évaluations des
conditions de travail. Une mutation est un changement de poste. Une
récompense est une augmentation de salaire ou une prime.

La psychologie du personnel comprend donc le recrutement et la sélection du


personnel, l'évaluation du personnel, la formation et l‘entrainement du
personnel, des actions ciblées sur certaines catégories de travailleurs, la gestion
de la carrière.

1.3 Profil du psychologue du personnel

Dans l‘entreprise, le psychologue s‘occupe des personnes qui y travaillent ou


souhaitent y travailler (embauche puis suivi tout au long de la carrière). Hors
organisation, le psychologue s‘occupe de l'orientation professionnelle, bilan de
compétences, (re) insertion professionnelle, formations, etc. et des missions
externalisées (recrutement, formation, évaluation, etc.)

On oppose une action contextualisée à une action externalisée. Un psychologue


interne connait la société, un externe est neutre, à une meilleure connaissance du
marché et une vision plus transversale. On choisit en fonction du type de poste
que l'on cherche.

On oppose aussi une action collective (processus global à mettre en œuvre, grille
d'évaluation) à une action individualisée (sur une personne).

Le psychologue connait des techniques spécifiques, a des compétences et des


approches spécifiques et étudie des objets spécifiques. Il a un intérêt pour la
personne.
[58]

Section 2. Le recrutement

2.1. Evolution historique

Sekiou (1986) présente l‘évolution historique du recrutement en distinguant


deux moments différents, à savoir avant la Révolution industrielle et de cette
révolution à nos jours.
1). Avant la Révolution industrielle.
Jusqu‘à la Révolution industrielle, le travail était considéré comme un facteur de
production simple et peu coûteux. Le travailleur était peu revendicateur et ne se
souciait aucunement de sa production. Cette situation n‘a pas favorisé
l‘utilisation de méthodes très perfectionnées pour recruter le personnel. Les
contextes social, économique et politique suffisaient à le rendre docile et
peureux au travail. Le recrutement se faisait donc, dans la plupart des cas, de
façon rudimentaire. En effet, l‘utilisation du « fouet» était de rigueur lors du
recrutement des esclaves et le chantage de la prison servaient au recrutement des
soldats. Depuis, ce temps est révolu et le recrutement a revêtu plusieurs formes.
2). De la Révolution industrielle à nos jours (reconnaissance de l‘activité de
recrutement)
Tout au long du XXe siècle, au gré des périodes de crise et de prospérité
économique, les activités de recrutement ont été lentes à se préciser. Il n‘y a pas
si longtemps encore, l‘affichage d‘un simple écriteau à l‘entrée du lieu de travail
constituait, dans la plupart des cas, un moyen de recrutement. Depuis quelques
années, les changements en matière de recrutement se sont opérés, on a mis au
point des formulaires de demande d‘emploi, on a effectué un recrutement plus
structuré, avec des critères précis, etc..). Ces changements n‘ont été
généralement déterminés ni par la législation ni par les associations des
travailleurs, mais par les aléas du marché du travail.

Cependant, si considérablement qu‘aient été ces changements tout au long du


siècle, on ne peut pas affirmer qu‘ils aient abouti à notre époque à une pratique
satisfaisante du recrutement. En effet, le recrutement actuel (moderne) devient
un travail de spécialiste, en ce sens que dans un contexte de technologie
avancée, le recruteur doit adopter des techniques de recrutement aux nouveaux
types de postes : informaticien, contrôleur etc. ; par contre, ailleurs, la
[59]

responsabilité du recrutement est parfois laissée à des amateurs qui ne


différencient même pas le recrutement de l‘embauche.

2.2. Définition, objectifs et outils de recrutement

Le recrutement est défini comme un ensemble d‘actions utilisées par


l‘organisation pour attirer des candidats qui possèdent les compétences et
aptitudes nécessaires pour occuper un poste vacant. Selon Jean Guyot (1979), il
consiste à mettre à la disposition des services, atelier, les personnes nécessaires,
leurs fonctionnements en nombre et qualification.
Ainsi, le recrutement désigne les opérations qui précèdent et préparent à
l‘embauche, tandis que l‘embauche implique l‘acceptation du candidat en tant
que membre du personnel de l‘organisation.
Le recrutement vise les objectifs principaux suivants : (i) élaborer des moyens
qui permettent à l‘organisation de recruter des candidats compétents ; (ii)
procurer à l‘organisation des ressources humaines au meilleur coût possible ; et
(iii) placer chaque candidat au poste qui lui convient le mieux et à
l‘organisation, de façon qu‘il utilise ses aptitudes, sa formation, son expérience,
son tempérament et sa motivation de la meilleure manière possible.
Par ailleurs, les objectifs d'optimalisation du recrutement sont le développement
de la motivation au travail, la réduction des accidents de travail si les bonnes
personnes sont choisies, la limitation de l‘absentéisme si elle se plaise au travail,
la limitation du turn-over (taux de rotation du personnel), la constitution
d‘équipes harmonieuses et efficaces (c'est un défi, faut-il rassembler des
personnes différentes ou de même profil?), l'augmentation de la satisfaction au
travail (si le travailleur est sur- qualifié, il ne sera pas satisfait), l'amélioration du
climat social.

Un certain nombre d‘outils sont nécessaires au recrutement. Il s‘agit, entre


autres, des formulaires de demande d‘emploi, du curriculum vitae, de la
correspondance écrite (et l‘utilisation du téléphone) et de la présentation
personnelle du candidat.
[60]

2.3. Importance de recrutement

Le recrutement doit être bénéfique aussi bien pour l‘entreprise que pour les
salariés, car il conditionne le bon fonctionnement de l‘entreprise et la vie des
salariés.
De plus, le recrutement est une opération complexe et coûteuse mais nécessaire.
L‘intérêt des chefs d‘entreprise pour les problèmes de recrutement ne cesse de
croître ; diverses raisons économiques et sociales justifient cette attention de
plus en plus soutenues : (i) la stabilité de la main-d‘œuvre ; (ii) les qualifications
exigées du personnel ; (iii) le coût de la main-d‘œuvre ; (iv) la présence et la
pression syndicale ; (v) la législation du travail qui s‘est grandement spécialisée
et étendue. Elle nécessite de plus en plus d‘habileté, de compétence et de
connaissance pour sa mise en application et elle est omniprésente dans le service
du personnel ; (vi) la conjoncture économique : l‘état actuel du marché du
travail rend l‘activité du recrutement aussi difficile pour les candidats que pour
l‘employeur. En effet, le travail du recruteur est multiple du fait de l‘abondance
des candidatures mais le nombre de candidats dont le profil correspond à celui
défini pour le poste, n‘est pas proportionnel au nombre de candidats qui
postulent l‘emploi. Ainsi beaucoup de chômeurs tentent leur chance en postulant
les emplois pour lesquels ils sont surqualifiés ou pas assez qualifiés en regard
des exigences du poste offert.

2.4. Les étapes du recrutement

En rapport avec les étapes du recrutement, les questions doivent guider l‘action
du recruteur : (i) quelle est la situation ? En d‘autres termes, quel genre de
personnel est nécessaire? Où le trouver? Comment le choisir? (ii) quelle est la
nature du problème qui correspond à chaque situation? (iii) quels sont les
éléments d‘intervention?
Il y a plusieurs étapes dans le recrutement :
• Identification du poste vacant en le positionnant dans la structure : il faut
identifier le besoin, savoir si on crée une nouvelle fonction, si on veut remplacer
quelqu'un qui part ou s'il y a un surplus de travail. Si le poste est vacant pour la
troisième fois en un an, il y a des questions à se poser!

• Analyse du travail et identification des qualités nécessaires à la réussite


professionnelle : quels sont les éléments clés du poste?
[61]

• Fixation des procédures de recrutement: choix des modalités de recrutement


(interne/externe: ouvrir le poste à l'extérieur ou chercher quelqu'un dans
l'organisation), rédaction d‘une annonce (quel critère mettre dans l'annonce? Le
candidat idéal n'existe pas, mentionner ou pas le nom de l'entreprise) et choix
des supports de diffusion (en fonction du profil cherché), méthodologie et
procédures de sélection (mettre à l'épreuve, test, entretien, le choix est fonction
du poste, du contexte et du nombre de candidature).

• Réception et tri (critères) des candidatures (premier tri à partir de contraintes


telles que le niveau de formation)

• Examen des candidatures: méthodes de sélection

• Décision et transmission des informations (aux décideurs et aux candidats):


qui décide? Le psychologue, le supérieur, le patron. C'est en fonction de la
structure. L'employeur est responsable du travailleur. Le psychologue a-t-il la
connaissance du terrain, du métier? Il faut un expert dans le domaine mais il ne
faut pas pour autant passer outre l'avis du psychologue. Lorsque c'est un
psychologue externe, c'est l'employeur qui décide. L'idéal est de trouver un
consensus.

D‘une manière schématique, avec Guyot (1979), on peut représenter comme suit
les étapes du processus de recrutement.
[62]

Tableau n° 5 : Etapes du recrutement

N° Situation Nature du problème Elément d‘intervention


1 Quel genre de 1. prévoir les besoins de Déterminer des effectifs à
personnel nécessaire? personnel recruter quantitativement et
QUALITE 2. Procéder aux études de qualitativement en fonction
(recrutement) poste de l‘ampleur du turn over,
3. formuler la demande d‘exigence des postes, etc.

2 Où le trouver? 1. Intérieur de l‘entreprise Pourvoir les postes par


SOURCE transfert, mutation,
(recrutement) promotion, parrainage, etc.

2. Extérieur de l‘entrepris Susciter des candidats sur le


marché du travail par
l‘information, la publicité,
etc.
3 Comment le choisir? 1. sélectionner les candidats Procéder par des lettres,
(sélection) curriculum vitae..., ensuite
divers entretiens, puis examen
médical puis examen
psychotechnique,
pofessionne1, etc.

- décision d‘embauchage
- signature du contrat de travail
- accueil et suivi.

2.5 Les caractéristiques de la fonction de «recruteur», typologie des


recruteurs

Il doit rechercher des informations valides et fiables (rationalité des choix) tant
sur les candidats que sur les postes.

Il y a toujours incertitude des décisions, on ne sait jamais si on a raison ou pas.


L‘on peut se trouver dans une situation qui exige la rapidité et l‘urgence de la
prise de décision: le poste est vacant et le candidat a peut-être postulé ailleurs
aussi. La pression de l‘environnement pèse également sur le recruteur. On peut
également se trouver devant des relations asymétriques: candidat (public
fragilisé)/employeur (demandeur) ou dans l'autre sens pour certaines fonctions
où il est difficile de trouver un travailleur. En outre, l‘on se trouve aussi devant
[63]

des réponses majoritairement négatives, on doit dire non à des personnes en


difficulté.

Le rôle du psychologue, dans une vision restrictive (technique), c'est juste un


testeur, meneur d‘entretiens, dans une vision intégrée: perspective systémique:
régulation des changements et des dysfonctionnements, ce qui est plus
intéressant, pouvoir suivre la carrière, avoir du feedback sur la personne engagée
et son intégration.

Typologie des recruteurs à travers les offres d’emploi (Bernaud, 2000) :


Bernaud a contribué à l‘étude des représentations sociales des professions sur
base des annonces. Il a analysé 120 offres d‘emploi « recrutement » de
l‘Association Pour l‘Emploi des Cadres (APEC –France) pour des profils de
recruteur et a analysé les critères demandés.

Le titre de la fonction : chargés de recrutement 53%, consultant 16%, chargés de


recherche 12%. Un jeune diplômé est demandé dans 26% des cas, c'est un poste
d'entrée dans l'entreprise. CDI à 79% et donc stabilité de l'emploi.

Les employeurs sont des services en informatique et haute technologie 37%, des
cabinets-conseils en recrutement 27% et des entreprises de service 23%.

Profil de formation : ressources humaines 33%, école de commerce 19 % et


psychologie 18% (sans spécialisation travail). Savoir, Savoir-faire
(Moyenne/annonce 0.58: donc peu d'exigence technique du métier) : maitrise de
l‘anglais, compétences informatiques, connaissance environnementale, socio-
économique et des métiers. Pas mention des compétences scientifiques ou
méthodologiques, soit on considère que c'est implicite, soit que ce n'est pas
important. Savoir-être (Moyenne/annonce 1.82, donc supérieur au savoir-faire) :
relationnel, autonomie, sens de l‘organisation

Axe Entreprises/Cabinets-conseils : opposition si entreprise qui recrute ou si


c'est un cabinet conseil. Axe Jeunes diplômés/Confirmés.

Section 3. La sélection

3.1. Définition, moyens et but de la sélection

La sélection est un processus qui consiste, pour une organisation, à choisir parmi
des candidatures, celle qui satisfait le mieux aux exigences du poste à combler et
[64]

aux besoins de deux partenaires (employeur et candidat), compte tenu des


conditions de l‘environnement.

L‘organisation se sert de trois moyens principaux lors de sa sélection du


personnel : (i) elle utilise les critères de sélection pour évaluer des candidats et
les comparer entre eux ainsi que prédire lequel de ces candidats réussira le
mieux dans un poste donné ; (ii) elle recueille tous les renseignements et les
analyse minutieusement ; et (iii) elle dépouille toute la documentation reçue lors
du processus du recrutement.

Ces moyens desservent deux objectifs essentiels, à savoir : (a) fournir à


l‘organisation un personnel nécessaire et satisfait et (b) placer chaque travailleur
au poste qui lui convient parfaitement, à lui-même et à l‘Organisation, de façon
que l‘employé utilise ses aptitudes, son tempérament et ses motivations à
l‘accomplissement de ses tâches.

3.2. Importance de la sélection.

Comme pour le recrutement, la sélection constitue aussi une de plus importantes


activités de la direction du personnel. Diverses raisons économiques et sociales
justifient cette attention de plus en plus soutenue.

3.2.1. Raisons économiques

Des méthodes de sélection inefficientes permettent l‘entrée dans l‘entreprise


d‘une main-d‘œuvre incompétente, instable, mal adaptée aux tâches qui lui sont
confiées ; il en résulte pour l‘organisation des pertes directes et indirectes
considérables.
1) Frais directs
Certains travailleurs devront être renvoyés, d‘autres quitteront l‘entreprise de
leur propre volonté, découragés, mécontents, car ils n‘auront pu satisfaire aux
exigences de leur emploi. Ces coûts comptent par ailleurs les frais du processus
d‘embauche (tri de documents reçus des candidatures, tests, salaires, formation,
voyages s‘il y a lieu, etc.) sans oublier les coûts de l‘essai du futur employé.
2) Frais indirects
A ces frais directs, il faut ajouter les pertes indirectes subies par l‘entreprise. Car
le travailleur déficient ne quitte pas toujours l‘entreprise, dans ce cas,
l‘entrepreneur peut subir un préjudice grave, suite à un rendement inférieur à la
productivité moyenne, à un gaspillage exagéré des matières premières, à la
[65]

désorganisation que l‘individu déficient amène dans l‘équipe de travail et ce


préjudice pourra durer toute une vie de travail.
Ex. Au cours d‘une carrière, l‘employé aura reçu autant de FC (soit 15.000 FC)
sous forme de salaire sans compter les avantages divers dont il aura joui. C‘est-
à-dire 15.000 FC par mois x 12 mois =

3.2.2. Raisons sociales.


Les travailleurs déficients et incompétents causent non seulement des pertes à
l‘entreprise, mais ils menacent aussi sa stabilité sociale. En effet, les travailleurs
frustrés, parce qu‘ils n‘arrivent pas à s‘harmoniser avec leur travail, deviennent
des éternels insatisfaits, des mécontents qui facilement peuvent devenir des
facteurs de troubles sociaux.

3.3. Facteurs influençant la sélection


La sélection peut être plus ou moins influencée par de nombreux facteurs,
notamment :
1. Les caractéristiques et les exigences du poste : combler un poste qui exige
le secret professionnel et une compétence assez élevée en termes
d‘expérience et de formation académique demande beaucoup plus
d‘attention lors de la sélection qu‘un autre poste ayant moins d‘exigences.

2. Le nombre des candidatures reçues : le rapport entre les postulants et les


postes offerts pour le même emploi modifie les règles du jeu lors de la
sélection. Ce ratio est un rapport entre le nombre des postes à combler et
le nombre des postulats.

3. La qualité de la méthode de sélection utilisée : la méthode utilisée peut


être de bonne qualité et favoriser le juste choix d‘un candidat par rapport à
un autre.

4. La discrimination : l‘origine sociale et ethnique d‘un candidat peut


influencer négativement la sélection.
Avant de discuter de la procédure d‘embauche, il est utile d‘examiner les
considérations qui doivent guider les responsables de l‘embauche lors de la
sélection. Pourquoi? Parce que : (a) le choix de nouveau travailleurs est un acte
aux conséquences importantes pour l‘entreprises (coût économique et coût
social) et (b) il faut se dégager d‘une conception trop étroite de la sélection.
[66]

Jusqu‘ici on ne s‘est intéressé qu‘aux aptitudes professionnelles des candidats et


encore à court terme. La sélection du personnel doit être considérée sous son
aspect plus large à la fois dans le temps et du point de vue des qualités de
l‘individu.

A cet effet, le responsable de l‘embauche doit vérifier si le candidat : (i) pourra


faire le travail demandé, (ii) pourra se développer et trouver dans l‘entreprise un
emploi en rapport avec ses aspirations, (iii) pourra s‘adapter à sa tâche, à son
groupe de travail et à son chef.

Dans le premier cas, il s‘agit de voir si le postulant a les aptitudes, l‘expérience


et les connaissances professionnelles nécessaires pour exécuter la tâche avec
efficience. Dans le second cas, il s‘agit de comparer ses désirs, ses ambitions
avec ses possibilités de développement personnel dans le futur ainsi que ses
possibilités d‘avenir dans l‘entreprise (Universitaire dans une petite entreprise
de famille). Enfin, il s‘agit encore de juger les possibilités d‘ajustement,
d‘intégration à l‘entreprise de la personne étudiée.

Sur ce plan, le responsable de la sélection devra examiner : (i) si le travail qui


incombera au candidat dans le présent et dans le futur correspond à son standing
(universitaire à qui on confie des travaux monotones de second plan), à son
éducation, à ses habitudes, son âge et son sexe ; (ii) si le travail lui donnera
l‘occasion d‘affirmer et de réaliser sa personnalité ; (iii) si son caractère, ses
habitudes, son éducation lui permettront de s‘adapter à ses compagnons de
travail et à son chef.

En guise de conclusion, il y a lieu de noter que la sélection ne doit pas se faire


uniquement en fonction des besoins professionnels présents, mais plutôt sous
l‘angle des possibilités d‘adaptation professionnelle, psychologique et sociale
aux affectations présentes et futures.
[67]

3.4. La Présélection.
Elle comporte un certain nombre d‘éléments, tels qu‘ils sont développés ci-
dessous.

3.4.1. La réception de la documentation.


Elle consiste à amasser tous les renseignements possibles sur les candidats :
lettres, C.V, fiches ou Formulaires de demande d‘emploi dûment remplis, etc.
Afin d‘éviter les autres anomalies, tous documents possibles sur les candidats
doivent être estampillés dès la réception. S‘il y a une date limite pour recevoir
des candidatures, cette échéance doit être respectée scrupuleusement pour rendre
justice à tous les (candidats) postulants.

3.4.2. La mise en place des méthodes de sélection.


Pour arriver à une évaluation équitable de tous les candidats, il importe de
décider quelles méthodes (tests, interviews, concours, etc...) seront utilisés pour
l‘évaluation des candidats.
Ces méthodes doivent permettre d‘établir une comparaison entre les
caractéristiques de chacun de candidats et les exigences du poste à combler. En
plus, il faut que les responsables de la sélection appliquent l‘évaluation de la
même manière à tous les candidats.

3.5. Les phases de la sélection.


Il existe les principales phases de la sélection depuis l‘analyse de la
documentation reçue des candidats jusqu‘à l‘embauche. Il arrive aussi que
l‘organisation ne suive pas dans l‘ordre toutes les étapes suggérées. Cela dépend
de la nature du poste à combler et de l‘importance accordée au processus de
sélection. Ces principales phases sont :

3.5.1. L’analyse de la documentation reçue:


Elle consiste en un triage et une évaluation comparative de toute la
documentation reçue : C.V, lettres, Fiches ou Formulaires de demande d‘emploi,
etc. Ce tri a pour but d‘éliminer un certain nombre de candidatures. Cette
élimination se fait à partir d‘exigences et de critères de base préétablis, comme
l‘expérience, la formation académique, l‘âge, etc.
Au terme du premier tri, et dans les délais les meilleurs, les candidats reçoivent
une lettre pour une convocation. Pour les candidats éliminés, il devrait exister
une procédure de réponse plus courtoise et aussi peu traumatisante que possible.
[68]

3.5.2. L’accueil des candidats retenus et l’application des méthodes choisies


La démarche consiste à poser les questions jugées indispensables pour décider si
le candidat doit être éliminé avant de passer à une étape subséquente, s‘il y a
lieu.

3.5.3. L’examen psychotechnique


L‘application d‘une batterie de tests conforme (eu égard) au profil de l‘emploi et
non une application aveugle de n‘importe quelle batterie de tests.

3.5.4. L’examen médical.

Il est nécessaire pour s‘assurer que les candidats sont aptes physiquement à
remplir les exigences du poste et pour éviter les accidents du travail et les
maladies professionnelles. Enfin, l‘embauche d‘une personne en mauvaise santé
peut entraîner, pour l‘organisation, des coûts inhérents à de futures absences.
D‘où l‘organisation doit classer ses postes selon les catégories qui exigent un
examen médical : postes exposés aux intempéries, à la chaleur, aux poussières,
etc.
Le résultat de l‘examen médical doit être communiqué discrètement sous forme
d‘un code, au service du personnel. Le candidat qui veut obtenir des
renseignements sur son propre examen médical, doit s‘adresser directement au
médecin.

3.5.5. L’interview

Le candidat est interrogé, soit pour être éliminé ; soit pour être embauché. Il faut
toujours choisir plus d‘un candidat pour chaque poste vacant.

3.5.6. L’enquête sociale et la vérification des références.

Cette pratique est surtout d‘application pour les postes des cadres.
Bref, la procédure de sélection varie d‘une entreprise à l‘autre selon les
circonstances et les besoins particuliers. On ne cherchera donc pas à développer
un plan applicable à toute organisation. Il s‘agit plutôt d‘une sorte de schéma qui
devra être adapté selon les dimensions de l‘entreprise, l‘urgence des besoins, la
largeur du marché du travail et le genre de travailleurs, etc.
[69]

Le processus normal de sélection se fait généralement en un certain nombre


d‘étapes qui constituent autant d‘obstacles à franchir par le postulant à un
emploi vacant. Ces étapes peuvent être schématisées comme suit :
PHASE I : Expression du besoin-demande de main-d‘œuvre.
PHASE II: Le service de l‘embauche consulte sa documentation et s‘efforce de
donner une solution interne, soit par une promotion, soit par un
transfert et autre solution.
PHASE III : Appel au marché de la main-d‘œuvre (phase de recrutement)
PHASE IV : Premier triage des candidats (pré-sélection)
PHASE V : Sélection des candidats:
application, examen psychotechnique
examen médical,
enquête sociale,
interview.
PHASE VI: Jugement général et choix par le bureau d‘embauchage
(Psychotechnique)
PHASE VII : Intervention du chef hiérarchique:
- interview parfois couplé avec essaie
- acceptation et mise à l‘essai.
PHASE VIII : Embauchage définitif.
La figure ci-dessous présente le modèle du processus de recrutement selon
Sekiou.
[70]

Figure n°5 : Modèle du processus de sélection de SEKIOU

Formation académique
Analyse de la documentation Elimination des candidats qui
Expérience
reçue et du fiche de demande ne satisfont pas aux exigences
Poids
d‘emploi rempli et aux critères Taille
Etc.

Test

Par groupe Concours


Accueil des candidats
choisis Centre d‘ac.

Individus
Interview

Interview avec les


candidats retenus

Vérification des
références

Recommandation

Rejet possible à l‘un ou


l‘autre des étapes du Examen médical
processus

Accueil des candidats


Examen d‘embauche
embauchés et déclenchement
du processus administratif.
[71]

3.6. Choix des critères de sélection

La sélection constitue une étape clé du processus de recrutement. Comment


choisir le candidat, la personne qui répond le mieux aux caractéristiques du
poste et aux attentes de l‘organisation pour ce poste donné? Doit-on arriver
forcément à une embauche et prendre le meilleur candidat ou si on n'en trouve
pas, relancer le processus dès le départ. Certains critères sont fixés a priori :
conditions (jugées) indispensables, légales (tri CV). D‘autres critères influencent
la décision lors de la comparaison des candidats, ce sont des avantages, le score
absolu n'a pas d'importance, c'est la comparaison entre candidats qui compte. Il
y a un processus de diagnostic (ex: répondre aux conditions d‘emploi :
diplômes, titre requis (psychologue, logopède), âge minimum (être majeur),
taille, permis de conduire, distance domicile-travail, niveaux de connaissances
en langues, etc.). C'est ce que la personne possède aujourd'hui, ce sont les
conditions minimums. Et aussi le processus de pronostic, relatif à la réussite
professionnelle ultérieure (ex: diplômes, qualifications, séjour à l‘étranger,
années d‘expérience, activités loisirs, etc.). On estime la chance de réussite
professionnelle dans le poste. Les activités de loisirs sont surtout prises en
compte lorsqu'il n'y a pas d'expérience professionnelle. On regarde les
compétences utiles pour l'avenir professionnel.

3.7. Le pronostic

Il faut disposer de connaissances permettant de légitimer le fait qu‘un tel


pronostic soit possible. Comment observer de façon fiable des caractéristiques
stables pouvant prédire certains comportements futurs? Il faut posséder des
instruments de « mesure » de caractéristiques « utiles » (fiabilité et utilité). Il
faut pouvoir mettre ces caractéristiques en relation avec le travail, et plus
particulièrement avec des indicateurs d’adaptation et de réussite au poste
(critères). Quels sont les indicateurs? Des indicateurs quantitatifs ou des
appréciations? Une performance comme vendeur, la satisfaction du supérieur
hiérarchique, stabilité dans le poste.
[72]

3.8. Les tests

3.8.1. Introduction

Les tests psychotechniques supposent un matériel standardisé (même test pour


tout le monde), des conditions de passation standardisées (temps, consigne), une
notation standardisée (pas de subjectivité), des qualités psychométriques
déterminées, une « validité », un étalonnage : le score obtenu aux tests n‘a de
sens qu‘en le comparant à ceux d‘une population de référence. La performance
est relative à celles de la population apparentée. On est soit au-dessus, soit dans,
soit en dessous de la moyenne, celle-ci change d'une population à l'autre.

Les tests mentaux sont apparus fin du 19ème siècle avec le développement de la
psychologie scientifique.

Binet et Simon (début 20e) ont déterminé l‘âge mental des enfants afin de
prévoir leur capacité à suivre l‘enseignement élémentaire « ordinaire » (donc
pronostique). Ils définissent une dimension unique Intelligence que l‘on peut
mesurer par un ensemble d‘épreuves. On peut situer les scores par rapport à une
population de référence (courbe normale de distribution). Cette dimension est
prédictive de l‘adaptation scolaire.

Cattell (début 20e) : identification de différences individuelles stables dans des


épreuves. Le score aux épreuves est stable. C'est une mesure de caractères
psychologiques pour prédire l‘adaptation à des postes de travail.

Selon Pichot, on appelle test mental une situation expérimentale standardisée


servant de stimulus à un comportement. Ce comportement est évalué par une
comparaison statistique avec celui d'autres individus placés dans la même
situation, permettant ainsi de classer le sujet soit quantitativement, soit
typologiquement.
[73]

3.8.2. La conception analytique

Des « secteurs » psychologiques (ou fonctions) sont identifiés. On distingue les


comportements adaptatifs en lien avec l‘intelligence et l‘habilité sensori-motrice
et les comportements adaptatifs en lien avec la personnalité. A l‘intérieur de ces
« secteurs », on identifie par la construction d‘épreuves et par leur analyse, les
dimensions « fondamentales » qui les constituent, ce sont le facteur numérique,
le facteur verbal, le facteur spatial, la composante obsessionnelle (personnalité),
le caractère agréable, etc. On décompose donc un comportement en épreuves qui
font référence à des facteurs différents.

L‘idée de base la plus simple sera de découvrir un ensemble de tests (xj) tels que
l‘on puisse définir une équation (linéaire) qui permette de calculer un pronostic
« aussi bon » que possible d‘un critère (y) défini. Le critère sera un (ou des)
indicateurs de réussite ou d‘ajustement professionnel, comme par exemple un
niveau de production, des indicateurs de qualité du travail presté, des notations
par un supérieur hiérarchique, etc. Il s‘agira de pronostiquer, prédire une valeur
qui s‘approche le plus de la valeur réelle du critère et de maximiser la
corrélation entre la vraie valeur du critère et la valeur prédite.

Il convient de remarquer qu‘il existe différentes sortes de pronostic ou


prédiction, dont la prédiction clinique (de nature qualitative, se basant sur les
connaissances que l‘on a sur la correspondance entre les aptitudes ou prédicteurs
et la réussite professionnelle ou critère) et la prédiction statistique (se basant sur
le coefficient de corrélation entre les prédicteurs et le critère). La prédiction
statistique peut être, d‘une part, une prédiction simple ou multiple (sans ou avec
test) et, d‘autre part, une prédiction statistique d‘un critère continu à partir des
variables continues ou une prédiction statistique d‘un critère qualitatif ou
modalités à partir des variables continues.

3.8.3. La qualité métrique des tests, l'analyse factorielle, autres qualités

La fidélité : Un test est fidèle si, appliqué deux fois de suite à un même sujet, il
fournit les mêmes résultats. Il indique la précision de la mesure, reproductibilité
du score, la stabilité temporelle (test-retest) (le résultat doit être identique d'une
semaine à l'autre mais attention à la connaissance du test), la méthode des
[74]

formes équivalentes ou de la consistance interne (2 versions d'un même test), la


méthode du split-half ou partage par moitié.

La validité : selon la nature du test, il existe différentes sortes de validité : la


validité apparente ou faciale : pertinence perçue du test par celui qui passe
l'épreuve (acceptabilité) ; la validité de contenu : le test mesure bien ce qu'il est
censé mesurer ; la validité critérielle : relation entre les scores et le critère réel
(ex. réussite professionnelle) (est-ce que ça prédit bien quelque chose sur base
de critère réel?). On parlera aussi selon la méthode adoptée de la validité
prédictive, on vérifie le score des personnes engagée par une évaluation 6 mois
après l'engagement ou de la validité concurrente (ou validité concourante ou
convergente), on compare les résultats des candidats à ceux des personnes qui
travaillent déjà.

L’objectivité : les mesures doivent être objectives, on a donc une


standardisation des tests.

La sensibilité : le test permet de différencier les personnes (il s‘agit au fait de la


qualité que possède le test de discriminer les personnes).

3.8.3.1. Apport de l’analyse factorielle

Postulat : les facteurs observés dépendent des processus sous-jacents à la


dimension étudiée. Cette méthode est basée sur l‘idée qu‘une performance dans
un ensemble d‘épreuves (tests) dépend de la mise en œuvre d‘un ensemble
limité d‘habiletés ou facteurs qui définissent des caractéristiques fondamentales
de l‘individu (ou aptitudes).

L‘objectif de l‘analyse factorielle est d‘établir des regroupements de variables


(facteurs) de façon à permettre une compréhension des liens qui existent entre
les différentes mesures effectuées. De façon générale, la détermination des
facteurs permet de comprendre la structure des données et de la résumer de
façon succincte.

Pour chacune des observations xij du sujet i (i = 1,2, …, n) à l‘épreuve j (j = 1,2,


…, p), le modèle propose la décomposition suivante : xij = aj1 fi1 + … + ajk
fik + …+ ajq fiq+ uij. fik désigne le score du sujet i dans un FACTEUR
COMMUN hypothétique k (k = 1,2, …,q), ajk désigne l‘importance ou
SATURATION (entre 0 et 1) du facteur k dans l‘épreuve j, cela varie en
[75]

fonction des épreuves, uij désigne le score du sujet i dans le FACTEUR


UNIQUE de l‘épreuve j.

Le but est d'identifier un nombre minimal de facteurs et comparer les facteurs


des différents tests.

3.8.3.2. Nouvelles méthodologies psychométriques

Modèles des équations structurelles: Adéquation entre modèles théoriques et


données. C'est un nouveau modèle statistique qui offre de nouvelles possibilités
de lien entre le modèle théorique et les données.

3.8.3.3. La qualité métrique des tests du point de vue des candidats

L’acceptabilité : validité apparente ; l’équité : ils sont traités de la même façon


que les autres candidats ; l’impartialité : objectivité ; l’utilité : ça change
quelque chose pour l'engagement. La perception de justice dépend pour les
candidats de la possibilité que les différentes méthodes offrent de montrer leurs
points forts et de leur pertinence par rapport à l'emploi à pourvoir. C‘est pour
dire que les tests appliqués dans le cadre professionnel (recrutement) ne doivent
chercher à mettre en évidence que les aptitudes nécessaires à l‘emploi.

3.8.3.4. La qualité métrique des tests du point de vue de l’entreprise

L’utilité: (qui dépend par exemple d‘une évaluation couts-bénéfices et intègre


donc la question de la validité).

3.8.4. La classification des tests: aptitudes cognitives, personnalités, autres


outils

3.8.4.1. Les tests relatifs aux aptitudes cognitives

1. Aptitude mentale générale - intelligence générale: capacité d‘un individu à


apprendre avec rapidité et exactitude une tâche, un sujet et/ou une habileté dans
des conditions optimales d‘apprentissage (Salgado, 2001). Il existe une
multitude de tests: DAT, GATB, matrice progressive de Raven, Cattell, tests de
domino, etc. De la validité prédictive de ces tests : l'estimation de la
performance au travail, la réussite en formation professionnelle, l'apprentissage
professionnel, le statut professionnel.
[76]

2. Aptitudes cognitives et perceptives mobilisées dans les tâches


professionnelles. Les facteurs primaires dégagés par Thurstone, et intègre dans
sa batterie d'aptitudes mentales primaires en constituent une illustration.

Parmi les aptitudes cognitives et perceptives nous pouvons citer celles-ci :

• Aptitude verbale : comprendre la signification des mots et du langage ;


• Aptitude numérique : traiter des opérations numériques avec rapidité et
exactitude
• Aptitude spatiale : percevoir la représentation d‘objets tridimensionnels
à partir de leur représentation en 2 dimensions ;
• Aptitude mécanique : comprendre et résoudre des problèmes de
physique
• Attention sélective : se concentrer sur une tache sans se laisser distraire.
Par exemple, corriger des textes.
• Aptitude mnémonique : se souvenir et reconnaitre des informations
présentées sous diverses modalités sensorielles.
• Aptitude perceptive : comparer rapidement et avec exactitude des objets.

3. Aptitudes spécifiques (négociation, vente, organisation). Ce sont les aptitudes


directement liées à l'activité professionnelle afin de prédire la réussite
professionnelle.

Qu’en est-il de la validité prédictive des tests d’Aptitude Mentale Générale


d’une part et des tests d’aptitudes spécifiques ? Selon Salgado (2006), les tests
d‘Aptitude Mentale Générale (AMG) permettent d'estimer la performance au
travail, la réussite en formation professionnelle, l'apprentissage professionnel, le
statut professionnel. Les aptitudes spécifiques ont une validité prédictive
moindre que les tests globaux de AMG (Aptitude Mentale Générale).

3.8.4.2. Les tests relatifs à la personnalité en sélection

Etymologiquement, le terme personnalité vient du mot latin « personalitas » qui,


lui, vient du mot personne (en latin persona) et signifie la personne totale, c‘est-
à-dire autant la personne psychologique que physique. (Morizot, 2003).

Selon Funder (2001, p.2), la personnalité correspond « aux structures


récurrentes de pensées, d’émotions et de comportements d’un individu, ainsi
qu’aux mécanismes psychologiques cachés ou pas qui sous-tendent ces
structures ». L‘auteur évoque les caractéristiques simultanément stables dans le
temps et de nature psychologique qui sont attribuées à des individus.
[77]

Selon Reuchlin (cité par Bernaud, 1998), la personnalité est une caractéristique
relativement stable et générale de la manière d‘être d‘une personne dans sa
façon de réagir aux situations dans lesquelles elle se trouve.

Pour leur part, Saucier et Goldberg (2006) définissent la personnalité comme


étant l‘ensemble des attributs, qualités et caractéristiques qui distinguent les
comportements, les pensées et les sentiments des individus.

Aussi, peut-on définir la personnalité comme l‘orientation habituelle des


comportements et des conduites. Et, ses dimensions explicatives (facteurs) sont
les « traits ».

Il est important de souligner que la plupart des théoriciens de la première heure,


tels que Allport (1937), Cattell (1946), Eysenck (1970), Guilford (1959, 1975)
ou Thurstone (1947), soutenaient que les traits constituent l‘unité fondamentale
de mesure de la personnalité. En conséquence, Cattell (1957) soutient que la
personnalité est ce qui permet de prédire comment une personne va réagir ou se
comporter dans une situation donnée, mais c‘est surtout la combinaison de
l‘ensemble des traits chez un individu. De même, Eysenck (1970) considère la
personnalité comme étant une combinaison de traits que la personne manifeste
dans différentes situations et qui demeure stable dans le temps. Et, Guilford
(1959), quant à lui, considérait la personnalité comme « le patron unique de
traits de la personne ».

Mais qu’est-ce qu’un trait de personnalité ?

Selon Allport (1937), un trait est un système neuropsychique généralisé et


focalisé ayant la capacité de rendre différents stimuli fonctionnellement
équivalents et d‘activer et guider de façon cohérente (ou équivalente) plusieurs
formes de comportement adaptatif et expressif. Au fait, les traits sont, pour
Cattell (1965), des structures mentales héréditaires qui expliquent le
comportement et la cohérence du comportement dans différentes situations.

Les traits sont des dispositions durables, reflétant des différences individuelles
qui manifestent une relative stabilité temporelle et une relative consistance trans-
situationnelle. Ils différencient les individus. Au nombre des traits de
personnalité, sont cités : l‘image et l‘estime de soi, le machiavélisme, le
sentiment de contrôle, la prise de risque, le narcissisme et
l‘introversion/extraversion. Ces traits ou attributs spécifique de la personnalité
déterminent les comportements des individus au sein des organisations.

Puisque l‘approche des traits a traditionnellement été l‘objet de critiques


soulevant des controverses (Block, 2001; Westen, 1996), la présentation des
[78]

postulats de base permet de relativiser certaines critiques et de démontrer que les


traits constituent des unités de mesure de la personnalité qui sont fiables et
valides. Sur ce, il existe dix postulats de base de l‘approche des traits. Il s‘agit de
postulats généraux suivants, mais plusieurs autres plus spécifiques existent,
selon les auteurs : (i) les traits de personnalité sont des construits latents ; (ii) les
traits de personnalité s‘organisent de façon hiérarchique ; (iii) les traits de
personnalité sont relativement stables dans différentes situations ; (iv) les traits
de personnalité interagissent avec les situations ; (v) les traits de personnalité se
distribuent de façon continue dans la population ; (vi) les traits de personnalité
sont universels ; (vii) les traits de personnalité sont des caractéristiques
évolutives partiellement héréditaires ; (viii) les traits de personnalité sont
partiellement appris avec l‘expérience ; (ix) les traits de personnalité sont des
phénotypes causaux ; (x) les traits de personnalité sont relativement stables dans
le temps.

Du fait de la difficulté d‘établir une liste des différentes personnalités, la


connaissance des traits de personnalité facilite l‘orientation des personnes.
Plusieurs outils sont disponibles pour la mesure de la personnalité. A cet effet,
selon Fourboul (2011), de nombreuses approches théoriques de la personnalité
sont proposées par les auteurs et sont principalement regroupées en trois grandes
méthodes d‘évaluation suivantes : (i) les méthodes projectives, (ii) les approches
différentielles avec les questionnaires auto-évaluatifs et (iii) l‘observation du
comportement par un expert.

Les méthodes projectives s‘appuient sur le concept de projection défini par


Freud (mécanisme inconscient de protection du moi) ; elles supposent que
l‘individu n‘a pas accès directement aux éléments les plus déterminants de son
comportement. Il requiert donc un matériel ambigu, peu défini afin de permettre
au sujet une production de réponses non stéréotypées. La liberté accordée au
sujet de développer ou non ses réponses devront être interprétées par un
spécialiste pour en dégager le sens. Parmi elles, nous citons : le Rorschach et le
TAT (Thematic Apperception Test).

L’approche différentielle est centrée sur les déterminants individuels des


comportements. Elle suppose l‘existence de grands types ou traits qui
caractérisent la personnalité de chacun. Ces traits de personnalité sont
relativement stables dans le temps chez un individu. Peu importe les situations,
[79]

ces traits génèrent sensiblement les mêmes conduites ou comportements chez un


individu.

Cette approche dite différentielle, dont les pionniers sont notamment Allport,
Eysenck, Cattell, Guilford et Jackson, permet de se focaliser sur des
composantes élémentaires de la personnalité (traits ou types) et a comme types
de tests : Questionnaires d‘auto-évaluation. En plus, parmi les tests basés sur
l‘approche différentielle, certains identifient des grands types de personnalité
alors que d’autres proposent une diversité de traits de personnalité ; la
différence entre types et traits de personnalité est assez ténue. La classification
en types de personnalité est un peu plus globale que l‘approche par traits
spécifiques (exemple de tests évaluant des types de personnalité: Myers-Briggs,
Test de Holland et Big-Five).

Le modèle Big-Five est un questionnaire ou inventaire de la personnalité. C‘est


un modèle en 5 facteurs : il s‘agit des facteurs avec une grande stabilité dans le
temps et qui se retrouvent dans différentes cultures. Le modèle se développe de
plus en plus. Les 5 dimensions sont l'extraversion/introversion (opposant
sociable à timide, énergique à réservé), la stabilité émotionnelle (opposant calme
à nerveux, équilibre à vulnérable), l'ouverture intellectuelle (opposant curieux à
sans imagination, intérêts variés à peu cultivé), l'amabilité (opposant affectueux
à inamical, aimable à agressif), la conscience (opposant consciencieux à
inorganisé, actif à négligent). On compare toujours les dimensions par rapport à
un groupe. Le facteur conscience offrirait une validité prédictive avec
l‘efficience au travail, surtout en lien avec les dimensions d‘AMG (aptitude
mentale générale).

Dans la perspective de l‘approche différentielle, Tungisa Kapela, s‘inspirant


notamment de Hellriegel et Slocum (2006), a mis au point un questionnaire sur
la personnalité (sous forme d‘échelle d‘évaluation). Ledit questionnaire vise à
mesurer la personnalité à travers cinq de ses dimensions ou traits, à savoir : le
sentiment de contrôle (série A), l‘image et l‘estime de soi (série B),
l‘introversion/extraversion (série C), le machiavélisme (série D) et la propension
à la prise de risque (série E). Il comporte 25 affirmations, soit 5 pour chacune
des cinq dimensions ou traits (séries) susmentionnés, qui décrivent les
caractéristiques personnelles. Certaines de ces affirmations sont de nature
positive et d‘autres, de nature négative.
[80]

Enfin, on doit faire les inventaires de personnalité en psychologie du travail, les


tests sont spécifiques au monde du travail, ce ne sont pas des tests cliniques qui
visent à déceler des pathologies. Mais il convient de noter que la valeur
prédictive des tests de personnalité est considérée comme assez faible.

3.8.4.3. Les autres outils de sélection

Les tests sont des instruments de mesure qui ont l‘avantage de se référer à des
critères explicites, définis, vérifiables. Ils sont généralement complétés par
d‘autres outils tels que les questionnaires biographiques (c'est comme un CV
mais présenté différemment et/ou avec d'autres informations), les entretiens
(interviews) individuels ou en groupe, les tests de simulation (exercices de mise
en situation, tests « in-basket », « in-tray »), les centres d’évaluation
(assessment centres).

Les trois objectifs des entretiens sont de faire connaissance avec le candidat, de
l'informer et de recueillir des informations utiles pour l'évaluation.

Lors des tests «in-basket», on remet au candidat une pile de courrier avec des
informations, le candidat doit gérer toutes ces informations. Le test se fait
d'abord seul puis les résultats sont présentés devant un jury. Pour évaluer ce type
de test, il faut déterminer les éléments à considérer en priorité pour résoudre le
problème, les différentes actions possibles et leur valeur.

Les centres d'évaluation permettent de tester les compétences professionnelles


en situation de groupe, on mesure le leadership, la gestion de conflit, la relation
interpersonnelle. Cela donne un pronostic sur les compétences futures. La
validité des centres d'évaluation est bonne.

3.8.5 La remise en question de la perspective classique

Critiques du modèle classique de validation des outils de sélection en termes de


validité pronostique, prise en compte des facteurs situationnels, intérêt du test en
tant qu‘outil de diagnostic. La mise en avant de facteurs pour évaluer les gens
décompose le comportement du candidat en petit morceau. A-t-on encore une
[81]

image globale de la compétence des personnes? C'est pour cela que certains
rejettent les tests.

L'entretien est donc fondamental mais sa validité peut être mise en cause car il
est subjectif.

Aspects de « négociation sociale » : Rôle des attentes et valeurs du candidat, le


candidat peut demander des informations sur l‘emploi postulé, il a un contrôle
personnel sur la procédure, il doit être écouté. Une certaine transparence des
tests et autres techniques utilisées, la possibilité de recevoir un feed-back, une
garantie d‘objectivité de la sélection, l'assurance d‘être traité humainement, le
respect de la vie privée et la confidentialité.

La critique du principe d‘une sélection qui ne soit fondée que sur l‘application
de tests (et le modèle analytique sous-jacent) a donné une place à l‘entretien de
sélection, au développement de tests « inbasket », aux centres d‘évaluation mais
aussi à l'utilisation de méthodes non validées scientifiquement comme la
graphologie, l'astrologie, la numérologie.

Le candidat peut rejeter les tests standardisés car ils semblent ne pas avoir de
rapport direct avec le poste, les entretiens sont mieux perçus par les candidats.
Dans le contexte occidental, les candidats acceptent des méthodes comme
l'astrologie car la personne ne se sent pas responsable de son échec, c'est plus
facile à admettre que de rater un entretien.

La graphologie consiste à penser que l'écriture est un indicateur de trait


psychologique. Ceci n'a pas de validité scientifique, le lien est fait par des non-
psychologues, il n'y a pas de fidélité, les résultats sont différents d'un
graphologue à l'autre, il n'y a pas de validité prédictive acceptable non plus par
rapport à d'autres épreuves en termes de pronostic. De plus, la lettre est-elle bien
écrite par le candidat? Et s'il a un problème moteur? Le recours à cette méthode
varie fortement d'un pays à l'autre. La France a été jusqu'à 30% mais c'est en
régression.

3.8.6. Quelques principes déontologiques

L'investigation doit être limitée aux seules perspectives professionnelles (critères


fixés au départ), ainsi que les décisions liées aux dimensions à investiguer. Les
critères doivent être non discutables, ne pouvant pas prêter à discrimination. Les
[82]

informations sur les épreuves doivent être données aux candidats. La prise
d‘informations – références professionnelles (c'est une habitude dans certains
secteurs comme la restauration) ne peut pas être faite à l'insu de la personne et
elle pose la question de la loyauté de l'ancien employeur. Les résultats sont
confidentiels (seul le fait que le résultat est positif ou négatif est transmis au
supérieur hiérarchique). Les décisions doivent être motivées, le candidat a le
droit de connaitre les raisons de son engagement ou de son non-engagement. La
vie privée doit être protégée.

3.9. La recherche en sélection du personnel

Le but de la recherche est de valider les méthodes déjà existantes, d'améliorer les
qualités psychométriques des tests et autres méthodes, d'étudier l'usage du
testing assisté par ordinateur afin de mieux contrôler le temps, le développement
de tests « adaptatifs », d'étudier les biais de sélection – ou du sélectionneur,
l'usage des TIC: recrutement en ligne, cela permet le recrutement à distance.

Les tests adaptatifs sont des tests d'intelligence dont le niveau s'adapte en
fonction de la réponse, les questions deviennent de plus en plus difficiles si on
répond bien et inversement. Cela permet de réduire le temps de passation, le
nombre d'items et de supprimer les items trop difficiles. Cela augmente la
validité et diminue la lassitude.

Section 4. La socialisation organisationnelle

4.1 Accueil des nouveaux engagés

L‘individu recruté va intégrer une organisation. La question fondamentale que


l‘on se pose est celle de sa socialisation dans ce nouvel environnement de travail
et de son adaptation aux différentes facettes de la vie professionnelles (Fischer,
1986). On doit lui donner des informations sur l‘organisation, les mesures de
sécurité, les pratiques, etc. et on doit l‘initier aux processus de socialisation
(valeurs, réseaux, etc.). En bref, les informations à fournir à l‘individu recruté
doivent lui permettre avoir : (i) la connaissance de l‘organisation, de ses règles,
[83]

de ses valeurs, (ii) la connaissance des autres salariés et l‘intégration dans un


collectif de travail, (iii) la maîtrise de la tâche, (iv) la construction d‘une
nouvelle identité professionnelle.

4.2. Orientations dans la socialisation organisationnelle

Trois orientations sont suivies en matière de socialisation organisationnelle. Il


s‘agit de l‘orientation descriptive, de l‘orientation centrée sur les dispositifs
d‘insertion et de l‘orientation centrée sur le nouvel entrant considéré comme
acteur.

4.2.1. Une orientation descriptive

Cette orientation rassemble les recherches qui s‘emploient à décrire les phases
de la socialisation.

Wanous (1992) décrit 4 étapes dans la phase de socialisation :


• une étape de confrontation et d‘acceptation de la réalité organisationnelle:
les attentes de l'individu rencontrent la réalité organisationnelle ;
• une étape de clarification du rôle : familiarisation avec la tâche, définition
des rôles et des relations aux autres ;
• une étape de positionnement dans l'ensemble de l'organisation :
apprentissage des comportements acceptés, intégration des valeurs ;
• une étape finale : sentiment d‘insertion, de réussite professionnelle,
acceptation partagée.

4.2.2 Une orientation centrée sur les dispositifs d’insertion

Les organisations peuvent mettre en œuvre des procédures susceptibles de


favoriser l'intégration des nouveaux. Delobbe et Vandenberghe (2002) décrivent
et comparent des dispositifs de formation :
• Cours destinés à apporter des connaissances et des compétences utiles à
l‘exercice du rôle organisationnel ;
• Le tutorat, dispositif dans lequel la personne recrutée est suivie et
soutenue (accompagnée) par un ancien ;
• L‘auto-formation, marquée par l‘acquisition des connaissances à l‘aide
de supports écrits, informatiques fournis par l‘entreprise ;
[84]

• Les stages, courtes périodes de travail au sein de différents services.

Le processus de socialisation est facilité dans les situations et les dispositifs à


forte composante sociale (caractérisée par une interaction de groupe ou
interpersonnelle) et intervenant dans les situations de travail et pas en dehors. En
termes d‘efficacité ou de performance, les dispositifs d‘insertion peuvent être
selon l‘ordre d‘importance suivant : stage > cours > tutorat > auto-formation. En
plus, les résultats montrent que les cours et les stages s'accompagnent d'une
augmentation significative de l'engagement organisationnel et de la satisfaction.

4.2.3. Une orientation centrée sur le nouvel entrant considéré comme un


acteur

On considère ici les stratégies développées par les nouveaux venus dans
l'organisation. On examine donc la proactivité des entrants, leur recherche
d‘informations, …

Nicholson (1984) propose une théorie des changements des rôles dans les
organisations permettant de décrire les modes d‘ajustement des individus à un
nouvel environnement de travail. Deux paramètres sont importants: l'individu
obéit aux pressions de l'environnement ou manipule celui-ci pour faire passer
ses vues et changement personnel ou pas. Le croisement de ces deux paramètres
aboutit à quatre stratégies :

• Situation de reproduction : passivité c'est-à-dire subir l'environnement et


ne pas changer.
• Situation d‘exploration : changement de rôle (changer l'environnement)
et changement personnel.
• Situation d‘absorption : changement personnel, adoption de rôle, la
personne évolue pour rentrer dans le rôle, il n'essaie pas de changer
l'environnement.
• Situation de détermination : changement de rôle (il essaie de changer
l'environnement), maintien personnel.
[85]

Section 5. L’évaluation au cours de la carrière

5.1. La place de l'évaluation dans le contexte organisationnel

D‘où vient l‘engouement pour tout évaluer? Pourquoi veut-on évaluer, contrôler
les performances des personnes? L'organisation peut être orientée vers
l‘observance des règles. Un cadre et des règles étaient auparavant suffisants pour
déterminer des bonnes performances. Aujourd'hui, on a une organisation
orientée vers l‘atteinte d‘objectifs, il faut être efficace. Il faut donc vérifier que
les buts sont réalisés (modèles néo-rationalistes proposant une gestion non
routinière – non bureaucratique).

Avant, dans les sociétés industrielles bureaucratiques, il y avait contrôle en


amont, contrôle de la présence, de la soumission aux consignes, aux ordres. Il y
avait une relation autorité-soumission, le chef décidait et l'employé exécutait
selon le principe Taylorien.

Après, aujourd'hui, le contrôle est en aval sur le résultat, on a un encadrement


du travail, le supérieur est présent et est là pour faciliter le travail. Pour être
capable d'évaluer, il faut donc des outils (grilles, critères, référentiels). Les
travailleurs se contraignent par rapport à une norme. Ils se fixent leurs propres
objectifs et assimilent la norme.

5.2 Les objectifs et les enjeux de l'évaluation

Quels sont les objectifs de l‘évaluation? Il y a trois types d'objectifs :


• Objectifs administratifs : ce sont des objectifs de gestion : recrutement,
promotion, licenciement, primes, salaires (aide à la décision
organisationnelle)
• Objectifs développementaux: où en est la personne dans son parcours?
Faut-il lui donner des formations? C'est un bilan de compétence.
• Objectifs de recherche et validation : le but dans ce cas-ci est d'évaluer
les tests et voir s'ils prédisent bien la performance au travail.

Contexte, lieux et professionnels: soit dans l‘organisation, soit hors de


l‘organisation.
[86]

Enjeux et conséquences: Pour les objectifs administratifs, les enjeux sont


économiques, on risque de perdre son emploi. Pour les objectifs
développementaux, les enjeux sont personnels, c'est le travailleur qui se remet
en question. Pour les objectifs de recherche et validation, les enjeux sont
externes et sont importants pour celui qui a développé l'outil.

Qui est à l'initiative des évaluations? Certaines évaluations sont initiées par
l‘organisation en vue de primes, augmentations, avancements et d‘autres sont
initiées par l‘individu dans le but d'un changement d‘orientation, d'un bilan
personnel ou d'une promotion.

Il existe des critères d’évaluation : quelles tâches sont exécutées et à quel


degré d‘efficacité? (en lien avec l‘analyse du poste). C'est la même chose pour
les études, quels sont les critères pour évaluer si on est diplomable? Le critère
ultime est la somme totale des performances de l‘individu (Levy-Leboyer,
2000).

5.3 L'évaluation des performances

C'est quoi les performances au travail. Selon Borman & Motowidlo (1997), il y
a les performances sur les tâches et les performances contextuelles : les
performances pro-sociales, la citoyenneté organisationnelle. L'entraide, un
climat positif, participer à des instances, ce sont des missions essentielles.

Le critère réel (celui qu‘on mesure) est constitué de la pertinence et de la


contamination. La déficience n'est pas mesurée, elle est perdue. Le critère
ultime, c'est tout ce que fait la personne, la déficience, ce que l'on perd ; la
pertinence, ce que l'on mesure et qui a du sens. Par exemple, pour un vendeur,
on peut mesurer le nombre de journaux vendus mais celui-ci est fonction à la
fois de sa performance et de condition extérieure.
[87]

5.4. Les méthodes d’évaluation

Certaines méthodes sont dites objectives comme le chiffre de vente, d'autres


subjectives.

5.4.1. Les méthodes objectives

Les méthodes objectives sont par exemple, le nombre d'accidents par an pour un
chauffeur-livreur, le nombre d'incidents par an, le nombre de jours de retard par
an, les montants des ventes. Pour un travailleur de production, le nombre de
pièces produites, pour un enseignant à l'université, le nombre de publications,
pour un avocat, le nombre d‘affaires ou nombre d‘affaires gagnées, pour un
chirurgien, le nombre d‘opérations, etc.

5.4.2. Les méthodes subjectives : individuelles, comparatives, multiples

Les évaluations individuelles (subjectives) : elles sont réalisées soit au moyen


d‘échelles standardisées (répondre à des questions à choix multiple sur
l'exactitude (par exemple : le travail est d'excellente qualité, les erreurs très
rares, etc.) soit par l'utilisation de canevas de référentiel de compétence. Dans ce
dernier cas, le but est de mettre en place une certification pour un métier donné.

Exemple: Référentiel de compétence : professionnels information-


documentation. Les critères sont objectifs mais le jugement est fait par les
examinateurs. Six grands domaines ont été définis dont les deux premiers sont la
recherche de l'information et la publication et l'édition. Ces six domaines
regroupent 20 compétences, on veut repérer où se trouve la personne par rapport
à ces compétences.
[88]

On doit donc fixer des critères de moyenne et des éléments d'exclusion. Dans
chaque domaine, on a quatre niveaux : assistant (exécutant), technicien
(connaisseur technique), manager (supervision) et expert. La complexité est de
plus en plus grande quand on passe du niveau 1 à 4.

Autre exemple: la communication : être attentif aux autres et communiquer


d'une façon efficace qui favorise la communication ouverte. Ici il y a 5 niveaux
qui correspondent à 5 profils différents et des fonctions particulières.

Dernier exemple: operateur-technicien en chimie. Dans ce questionnaire-là, on


a 7 niveaux et on englobe à la fois des aspects positifs et négatifs.

Les évaluations individuelles (subjectives) sont aussi réalisées soit par


l‘utilisation de canevas d‘observation des comportements, soit par la rédaction
libre d‘une description des qualités et faiblesses du travailleur évalué. Ces deux
derniers éléments sont plus qualitatifs. Le canevas d'observation des
comportements est une check-list remplie pour le poste. Quand une personne
travaille, on note le comportement précis, chaque organisation a sa propre grille.
Par exemple : l'opérateur nettoie les machines avec le bon solvant : presque
toujours à presque jamais (5 niveaux). Dans le dernier cas (c‘est-à-dire
rédaction libre d’une description des qualités et faibles du travail évalué),
on fait une liste de ce qui a fonctionné ou pas. Cette méthode est totalement
personnalisée. Il est difficile de comparer les travailleurs avec cette méthode.

Les évaluations comparatives (les travailleurs d‘une équipe, service,


département, sont classés entre eux) ont pour but d'évaluer la performance du
groupe.

Les techniques d’évaluation par plusieurs évaluateurs (exemple : le supérieur,


les subordonnés, les clients, un consultant) ou « l‘évaluation à 360 degrés »
dans laquelle une évaluation est fournie par le supérieur, les subordonnés, les
pairs ou les clients et l‘évalué lui-même. Cela prend beaucoup de temps.
L'évaluation à 360 degrés consiste à proposer à un cadre de remplir un
questionnaire portant sur ses comportements au travail. Il s'agit de
comportement précis et non de formulations vagues. Ce même cadre est
également décrit avec le même questionnaire et de manière anonyme par
plusieurs personnes avec lesquelles il est en relation. Il va pouvoir ensuite
[89]

prendre connaissance de l'évaluation portée par les autres sur ses propres
comportements et les comparer a sa propre perception.

5.5. Le processus d'évaluation

Qui évalue? Comment? Pourquoi?

Il est important que l‘évaluateur ait une maitrise relative des techniques de
l‘évaluation. L'expert, c'est le psychologue mais il a moins de connaissance sur
le travail même. Donc le supérieur hiérarchique doit être formé sur le fond et sur
la forme. La gestion de l’équité (processus équitable pour tous), la gestion du
feed-back (renvoyer un message informatif) ainsi que la gestion de la
compétition (rivalité entre les travailleurs) sont aussi des éléments importants
pour l'évaluateur.

Pour l‘évalué, les effets seront fonction des objectifs, des attentes par rapport au
processus. Quelles sont les récompenses associées? La perceptive de carrière?
Les prix?

5.6. Les biais, l'exactitude des appréciations

L‘administration proprement dite de divers systèmes d‘évaluation et leurs


concomitants psychosociaux. L‘accent a été mis sur différents phénomènes
susceptibles d‘entacher la validité de l‘évaluation: biais dans l‘évaluation

5.6.1. Exactitude des appréciations

Tendances de réponse : indulgence (les cotes sont toujours hautes, on


sanctionne peu les mauvais travailleurs), sévérité (il faut être exceptionnel pour
avoir une cote haute), tendance centrale (mettre tout le monde au milieu). Il faut
donc fixer une ligne de conduite et dire par exemple que les travailleurs doivent
être distribués comme une courbe de Gauss mais ce n'est pas valable pour les
groupes de 10 personnes. On fausse donc les résultats.

Effet de halo : c'est lorsqu'un critère contamine les autres évaluations. On peut
avoir un point très mauvais et quand l'ensemble est bon, on a tendance à
remonter la cote de ce point. Mais un mauvais point est aussi l'occasion de faire
des formations et de s'améliorer.
[90]

Erreur de similarité : on a tendance à mieux évaluer quelqu'un qui nous


ressemble ou qui a des points communs avec nous. Ou on évalue deux personnes
qui sont proches de la même façon.

Erreurs dues au temps (longs délais et récence) : cela est dû à la façon dont on
mémorise les événements, on se souvient mieux des événements très anciens ou
des très récents.

Évaluation qui conforte un jugement a priori : on évalue mieux quelqu'un


qu'on juge bon a priori ou qui a déjà eu de très bonne évaluation.

Dans le domaine de l‘évaluation, la recherche se porte donc sur les processus


mentaux impliqués dans le jugement : observation, encodage en mémoire,
stockage et conservation en mémoire, rappel, jugement, synthèse.

En outre, il est nécessaire d‘assurer pour les différents intervenants dans le


domaine de l‘évaluation, une Formation Cadre-de-Référence : le but est de
former les évaluateurs ainsi que les formateurs des évaluateurs par la
présentation de l‘outil d‘évaluation, la discussion des comportements et niveaux
de performances (se mettre d'accord sur les termes), des activités
d‘entrainement, la confrontation aux évaluations d‘experts, une discussion sur
les divergences, là où il y a un écart. Le référentiel doit être le plus objectif
possible.

5.7. Acceptabilité de l’évaluation

Le modèle du feed-back : acceptation du message, de l‘information et


crédibilité de la source, de l'évaluateur. Il faut que l'évalue ait confiance en
l'évaluateur.

La justice organisationnelle : justice distributive (équité): au mérite (plus on


travaille, mieux on est évalué) et justice procédurale (la façon d'évaluer est la
même pour tous). Il existe beaucoup de moyens pour distinguer les personnes.
Dans la justice distributive, la récompense doit être proportionnelle à la
performance, il faut sanctionner ce qui ne va pas sinon, ça pose des problèmes
pour les autres. La justice procédurale est un traitement équivalent pour tous, le
même processus, même temps, même grille.
[91]

Section 6. La formation

En période de crise, il y a 2 secteurs de la psychologie du personnel qui sont


touchés : la formation et la sélection. Par contre, le processus d'évaluation
augmente.

6.1. Les objectifs de la formation

Meignant (2003) considère que la formation peut répondre à trois objectifs


différents.

Consolider l’existant : formation directement liée au travail, connaissances


complémentaires, combler une faiblesse, s‘adapter à des changements, maintenir
à jour les compétences des personnes principalement dans les domaines
complexes où il y a souvent des nouvelles normes.

Préparer l’avenir : planifier le changement, faire face aux évolutions, à la


transformation des métiers, aux restructurations de l‘organisation du travail, à
l‘implantation de nouvelles technologies.

Accompagner les mouvements individuels : insertion (le processus de


socialisation à l'arrivée), mobilité professionnelle (changement de job),
promotion, suivi d‘une procédure d‘évaluation. « La formation devient une
dimension déterminante en ergonomie quand le travail requiert de plus en plus
de plasticité » (Pastre, 1995). La formation devient un élément très important car
c'est un processus continu qui accompagne la personne tout au long de sa
carrière. D'après une étude, les travailleurs de plus de 45 ans auraient moins de
formation.

6.2. La mise en place d’actions de formation

Il faut une analyse préalable de la demande ; une analyse de la situation de


travail; une définition du besoin de formation (par le chef ou par le formé), des
objectifs (des besoins de la formation); une définition de l‘action de formation
(nature de l‘intervention), la formation est différente de celle reçue à l'école :
andragogie (pédagogie des adultes), contextualisation, étude de cas car la
formation a un objectif à court terme en terme d'usage, on ne veut pas devoir
faire de transfert vers le terrain, e-learning (étude au travers des technologies de
l'information et de la communication) principalement pour les langues. Les
outils sont très importants car beaucoup d'abandon (70%) par manque de temps,
[92]

d'autonomie, de convivialité du système ou FOAD (Formation ouverte à


distance), pas forcément avec les nouvelles technologies mais c'est une auto-
formation. L'évaluation du processus de formation est important (le travailleur
est-il content? Intéressé? Le formateur était-il bon? Est-ce que le travailleur a
appris quelque chose? Quel est l'efficacité de la formation appliquée au champ
professionnel? Celle-ci est liée à la formation, au travailleur et a
l'environnement.).

6.3 La compétence

« Ensembles stabilisés de savoirs, de savoir-faire, de conduites-types, de


procédures-standards, de types de raisonnement, que l‘on peut mettre en œuvre
sans apprentissage nouveau » (Leplat & de Montmollin, 2001) ou l‘ensemble
des savoirs mobilisables et mobilisés en situation de travail (Joras, 2001).

6.3.1. Définition des compétences

La compétence est une notion vague. Elle évolue avec le temps, elle peut
s‘accroître, mais également se détériorer en fonction du temps. Les savoir-faire
peuvent se perdre. La compétence peut être reconnue à un moment donné, mais
elle peut se perdre. La compétence est à mettre en relation avec l‘activité. Elle
est contextualisée, requise par l‘activité et doit se traduire par une performance
exprimée en objectifs (Gilbert, 2002). La compétence professionnelle est une
combinaison de connaissances, savoir-faire, expériences et comportements
s‘exerçant dans un contexte professionnel précis.

Au contraire de la performance, qui est une action efficiente dans une situation
donnée, la compétence est un potentiel d'action efficiente dans un ensemble de
situations. Si on est compétent, on devrait être performant.

On ne peut parler de compétence que lorsque ces ensembles de ressources sont


mises en œuvre dans l‘action. La compétence est relative à une situation ou à un
but préétabli. La compétence est invisible; elle est en quelque sorte sous-jacente
à l‘activité observable, elle se déduit de l‘activité. La performance est visible.
[93]

Etre compétent, c‘est faire face à l‘imprévu, c‘est parvenir à naviguer dans la
complexité. La possibilité de transposition d‘une activité à une autre est bien au
cœur du concept de compétence.

Si nous faisons une analogie avec la musique, on peut considérer que les
modalités prescrites constituent la partition. La partition comporte des règles,
des rythmes, des mesures, une clé, des mouvements… Elle est de l‘ordre du
prescrit et est la même pour tous. La compétence des opérateurs sera la
possibilité d‘interpréter cette partition, d‘en construire une bonne
« interprétation », mais ce ne sera pas l‘interprétation (la performance) en tant
que telle.

La compétence n‘est pas une somme de savoirs, comme une simple addition. Il
s‘agit d‘une combinatoire ou chaque élément se modifie en fonction des
caractéristiques du travail à accomplir.

On ne peut pas établir des listes interminables de savoirs, de savoir-faire et de


savoir-être. Réduite en miettes, fractionnée en unités microscopiques, la
compétence perd de son sens. La compétence ne peut pas être appréhendée en
termes d‘état, elle est un processus, elle est un lien reliant une combinaison de
ressources, une action, une contribution à un résultat par un acteur. C'est donc
combiner ses savoirs pour résoudre un problème.

La compétence est la combinaison de trois facteurs qui sont : le savoir agir, le


vouloir agir et le pouvoir agir.

• Le savoir agir qui suppose de savoir mobiliser et combiner des ressources


pertinentes (connaissance, savoir, réseaux…).
• Le vouloir agir qui se réfère à la motivation personnelle de l‘individu et
du contexte plus ou moins incitatif dans lequel il intervient.
• Le pouvoir agir qui renvoie à l‘existence d‘un contexte, d‘une
organisation du travail, de choix de management, de conditions sociales
qui rendent possibles et légitimes la prise de responsabilité et la prise de
risque par l‘individu. Le contexte rend légitime l'exercice de la
• compétence.
[94]

6.4. Les formes et styles d’apprentissage

L’apprentissage, c‘est une amélioration stable du comportement, des conduites


ou des activités intellectuelles, attribuables aux interactions de l‘individu avec
son environnement physique ou social (Barcenilla & Tijus, 2004).

Il existe différentes formes d‘apprentissage par rapport aux profils des


personnes : apprentissage associatif stimulus/réponse ; apprentissage par la
découverte, l‘action ; apprentissage par imitation ; apprentissage par problème,
etc.

Kolb (1974, 1984) a mis en évidence l‘existence de préférences individuelles


pour des modes d‘apprentissages particuliers : au travers de nouvelles
expériences (style pragmatique) EC ; par l‘observation et la réflexion (style
réfléchi) OR ; par conceptualisation abstraite (style théoricien) CA ; par
expérimentation active (style actif) EA.

Ces modes se combinent pour former deux dimensions d'apprentissage :


concret/abstrait et
actif/réflexif. Il en résulte quatre styles d'apprentissage : divergent (EC/OR),
assimilateur (CA/OR), convergent (CA/EA), accommodateur (EA/EC).
[95]

CHAPITRE 3. RISQUES PSYCHOSOCIAUX ET SANTE


PSYCHOLOGIQUE AU TRAVAIL

Section 1. Le stress au travail

1.1. Introduction

Le travail peut être, dans certaines conditions, source d'épanouissement. Mais, il


peut également, et selon le contexte, amener une détérioration de la santé
physique et psychologique. Dans ce dernier cas, on peut citer le « stress ».

En effet, le stress est un état de tension mentale et physique dans lequel se


trouve un individu face à des opportunités, des contraintes ou des exigences
qu‘il perçoit à la fois comme incertaines et importantes. En d‘autres termes, on
entend par stress, l‘énervement, le sentiment d‘anxiété et, éventuellement la
tension physique se produisant quand les exigences imposées à l‘individu
dépassent sa capacité à y faire face.

Le stress en tant que problème majeur dans le fonctionnement des organisations


peut se manifester de façon positive ou négative. Le stress est positif (ou
l’eustress) lorsque la situation offre l‘opportunité de gagner quelque chose. Par
contre, le stress est négatif (le distress ou détresse) quand s‘imposent des
contraintes et des exigences c’est-à-dire des contraintes d‘obstacles empêchant
de faire les choses à son gré. Avec ce deuxième type de stress, on travaille
moins bien et on peut même être bloqué pour agir.

Dans la littérature sur le stress, on peut mettre en évidence différentes


conceptions du stress, ce qui donne lieu à pas mal d'amalgame. Le stress peut
être un stimulus (analyse des stresseurs, agents de stress et leurs interactions),
un processus (analyse des transactions entre la personne et son environnement,
comment ça se fait qu'une personne est stressée et pas son collègue) et un
résultat (analyse des effets sur la santé physique, sociale et psychologique).
[96]

1.2. L’approche physiologique du stress

Dans cette approche physiologique, le stress est vu comme un résultat. Pour la


psychologie du travail, c'est la théorie la plus ancienne. Le modèle a été proposé
début des années ‘30 par Selye, avec le Syndrome Général d'Adaptation.

Une personne peut être confrontée à un agresseur, elle doit réagir et secrète donc
des hormones pour s'adapter à ce stresseur. C'est comme préparer les muscles à
l'action. Dans la phase 1, on a une réaction générale face à un agresseur
quelconque. Dans la phase 2, les hormones sont secrétées et on résiste. En phase
3, on atteint les limites du corps, on ne secrète plus d'hormone et on a donc un
épuisement physiologique dont découlent la fatigue, les troubles du sommeil, de
l‘appétit, des maux de tête, des douleurs musculaires et articulaires, etc.

Inconvénients de l’approche physiologique

La méthode n'est pas suffisante car elle n'apporte pas de solution. Que sont les
stresseurs? A cause de quoi sommes-nous stressés? Pourquoi, comment, quand,
etc. apparaissent-ils? Que se passe-t-il pour la personne? Comment gère-t-elle le
stress? Toutes les personnes réagissent-elles de la même manière aux différents
stresseurs? Non et même chose pour la même personne face à deux stresseurs
différents. Quelle remédiation proposer?

Selon la logique physiologique, on propose des thérapies centrées sur le corps :


massage, relaxation, yoga, etc. Elles apportent un certain bien-être corporel, on
se sent mieux physiquement mais quelle solution à moyen terme? Quelle
implication de la part de l'employeur? Elles ne sont pas fortes si elles consistent
juste à payer un masseur.
[97]

1.3. L’approche personnologique

Il existerait des traits de personnalité qui immunisent du stress : « hardiness »


(résistance) de Kobasa. Par exemple, l'optimisme. Il y aurait donc des profils
« bonne résistance au stress ». Il existerait des traits de personnalité qui
précipitent le stress par exemple le névrosisme, l'affectivité négative, le type A
(ceux qui font tout vite, les hyperactifs). Cette approche est souvent suivie dans
les recherches en psychologie de la santé. Mais qu'en faire en psychologie du
travail? Quoi faire pour aider les travailleurs à gérer le stress au travail? Ne pas
les engager?! Les renvoyer car « c'est de leur faute » ?! Avec cette théorie, on ne
change rien dans les conditions de travail.

1.4. L'approche environnementaliste

Les sources de stress (= les stresseurs) sont à rechercher dans l‘environnement


du travailleur au sens large, c'est-à-dire dans le contexte organisationnel de
l‘entreprise ou dans le contexte des tâches à exécuter. On veut repérer et
diminuer les stresseurs. Ici, on ne s'intéresse pas au travailleur mais uniquement
à l'environnement.

1.4.1. Stresseurs potentiels liés à l’Organisation

Caractéristiques objectives de l‘Organisation : La taille (Hôpital Pédiatrique


de Kalembe-lembe est plus petit que l'Hôpital Général de Référence de
Kinshasa – ex Mama Yemo et donc moins stressant), le secteur (le secteur
pharmaceutique est moins vecteur de stress que le secteur métallurgique), les
prestations financières (Peloustore par rapport à Congo Futur).

Caractéristiques plus subjectives : le mode de gestion des ressources humaines


(quelle ambiance on essaie d'amener : compétition ou solidarité?), la qualité des
relations direction-syndicat (parfois, ça va bien), la culture, l'identité d‘entreprise
(est-elle centrée sur la sécurité? Sur la production? Sur le respect des règles
administratives? Sur l'autonomie et la prise d'initiative?).

1.4.2. Stresseurs potentiels liés aux tâches

Parmi les stresseurs (sources de stress) potentiels liés aux tâches nous pouvons
noter, entre autres : (i) quantité de travail, pression du temps, surcharge de
travail ; (ii) sous-charge de travail (pas assez de travail à faire), ennui, travail
sous-qualifié ; (iii) complexité de la tache ; (iv) conflits et ambiguïté de rôles (cf.
Qui fait quoi dans un travail de groupe?) ; (v) absence d'autonomie décisionnelle
(des choses à faire mais aucune autonomie) (ou trop!) ; (vi) interruptions de
[98]

travail (clients, collègues, pannes, etc.) ; (vii) machines et outils dangereux,


risque d'accident du travail ; (viii) exigences physiques (posture, position, port
de charge, force, etc.) ; (ix) manque d‘aide, de solidarité et de soutien social de
la part du chef et des collègues ; (x) manque de reconnaissance du travail
accompli ; (xi) charge émotionnelle (cf. thérapeute, enseignant, policier, etc.)
pour ceux qui font de l'aide aux personnes.

L'homme est acteur sur le lieu de travail, il faut donc aussi tenir compte de cet
aspect et pas uniquement de l'environnement.

1.5. L’approche interactionniste du stress au travail

1. Le stress au travail est lié au travail à exécuter : c‘est l‘écart entre les
exigences de la tâche et les capacités, les ressources d‘une personne. Par
exemple, lors de notre premier stage, on ne sait pas trop comment s'y prendre.

2. Le stress au travail est lié à l’environnement de travail : c‘est l‘écart entre


les besoins d‘une personne (par exemple besoin de sécurité et donc demande
d'un contrat à durée indéterminée ou besoin d'accomplissement : apprendre
toujours de nouvelles choses, évolution de carrière) et les besoins pouvant être
satisfaits par son environnement de travail.

Ce modèle est déjà plus riche d‘enseignement. Il tient compte à la fois du


travailleur et de l'environnement.

1.5.1. Le modèle de Karasek (1981)

C'est une étude médicale du stress.


[99]

Tableau n°6. Stress, relation entre latitude de décision au travail et exigences de


la tâche.

Exigences de la tâche

faibles Elevées

Tâche passive : Tâche à hautes


Faible Routine et donc ennui tensions et donc
Latitude de stress négatif comme
décision au pour les ouvriers dans
travail le travail à la chaine

Tâche à basses Tâche active et donc


élevée tensions et donc stress
ennui, car peu à faire positif comme pour
mais on pourrait faire les cadres.
autre chose.

Une exigence de la tâche élevée est par exemple lorsqu'on demande des tâches
qui exigent de la concentration.

En plus de la latitude de décision au travail et les exigences de la tâche, il existe


une troisième dimension dont on ne parle pas ici: le soutien social du chef et des
collègues.

1.5.2. Le modèle de Siegrist (fin des années 90)

Le modèle ER (effort-récompense) : les efforts externes sont les exigences et les


contraintes. Les récompenses sont le salaire et la reconnaissance sociale. On y
ajoute la notion d'effort interne (overcommitment) de la part du travailleur et
donc son implication ou sur-implication.

Le stress est égal au rapport entre l'effort et la récompense. On dit qu'il y a stress
si le rapport est positif.

C'est une approche interactionniste intéressante mais la limite est qu'on ne tient
pas compte de la richesse du processus ayant lieu dans « l'ici et maintenant ».
L'approche est rigide car on évalue l'effort et la récompense de manière générale
et pas à tout instant.
[100]

1.6. L'approche transactionnelle

C'est l'approche la plus complexe mais la plus riche.

Le stress est une perception subjective de la part de la personne : c'est le


déséquilibre qu'elle éprouve/évalue dans sa transaction, en constant changement
(même au cours de la journée), entre les exigences auxquelles elle est soumise
ici et maintenant, et ses ressources et capacités pour y répondre (cf. Stratégies de
coping) à ce moment. On s'intéresse donc au déséquilibre perçu.

1.6.1. Modèle transactionnel de stress de Lazarus et Folkman (1984)

Face à une situation délicate, un obstacle, un stress (on voit le stress en tant que
processus), il y a évaluation et stratégies de coping.

L'évaluation : face à une promotion, on peut avoir une réaction positive, en cas
de stress, on réagit alors bien ou négative car on perd ses collègues, le stress
n'est alors pas bien perçu. On se demande ce que l'on ressent : une menace, une
perte, un défi. On se demande ensuite ce qu'on peut faire si quelque chose peut
être fait. On décide de ce qu'on va faire pour gérer son stress. Le rôle de
l'organisation est fondamental, quelles ressources apporte-t-elle? En fonction de
la manière dont on évalue la situation, la réaction sera différente.

Les stratégies de coping : ce sont des efforts mentaux et comportementaux (par


exemple taper sur le plafond en cas de bruit) mis en place très concrètement
pour gérer la situation stressante, ce sont des stratégies centrées sur le problème,
l'émotion (ce qui résout le stress mais pas la situation), la recherche de soutien
social (appel à quelqu'un qui va aider).

En effet, chacun pourra ressentir, évaluer différemment une même condition de


travail objective ; d'un moment à un autre, l'environnement change, mais aussi
nous-même (notre humeur, notre santé, notre éveil, nos connaissances et
compétences, etc.). Donc pour comprendre le stress en profondeur, il faut
s'attarder sur le processus mais l'approche transactionnelle implique quasiment
une étude qualitative (voire une étude de cas) et non pas quantitative... donc elle
est adaptée pour la recherche mais peu adaptée au monde des entreprises. Que
peut-on faire pour tous les travailleurs de l'entreprise?
[101]

1.7. Une synthèse avec accent sur le cognitif: le modèle du stress


professionnel de Rascle et Bruchon Bruchon-Schweitzer(1996).

On voit ce que nos stratégies de coping ont comme effet. Par exemple, lorsque
l'action de taper sur le plafond pour éviter le bruit a pour conséquence du plâtre
sur la tête, le but n'est pas atteint (le but étant que le voisin fasse moins de bruit).

Par exemple, lorsqu'on a une réunion à 10h du matin et qu'on va avoir des
reproches, si on n'y va pas, on diminue le stress mais ce n'est pas bon pour
l'entreprise.

1.8. Origines du stress

Il existe plusieurs facteurs de stress que l‘on peut classer en deux catégories
principales : les sources organisationnelles et les sources personnelles.

Parmi les facteurs organisationnels du stress au travail, on peut relever les


éléments suivants :

1. la charge de travail ou obligations de tâche liées au poste occupé, on peut


être dans une situation soit de surcharge de travail entraînant un
surmenage soit de peu de travail ;
[102]

2. les conditions de travail : mauvaises conditions physiques de travail


(températures élevées, bruit, éclairage trop fort ou trop faible, pollution),

3. les obligations de rôle : il s‘agit des pressions exercées sur la personne en


fonction du rôle joué dans l‘organisation. On y distingue notamment les
conflits de rôle et l‘ambiguïté de rôle. Dans le premier cas (conflits de
rôle), la personne rencontre des attentes professionnelles difficiles à
satisfaire parce qu‘elles sont contradictoires ou incompatibles. Dans le
second cas (ambiguïté de rôle), les définitions de rôle mal comprises
amènent l‘individu à avoir un sentiment d‘incertitude face à ce que l‘on
attend de lui.

4. l‘évolution de la carrière : la planification et l‘évolution de la carrière


peuvent créer des problèmes liés à la sécurité de l‘emploi, aux
promotions, aux transferts ;

5. les relations interpersonnelles : il s‘agit de la qualité des rapports de


travail et des échanges avec les pairs, les subordonnés et les supérieurs.
Dans ce contexte, on peut relever les tensions interpersonnelles, le
manque de soutien des collègues, des relations interpersonnelles
médiocres ;

6. le comportement agressif : on note principalement à ce propos la


violence sur le lieu de travail (bagarres) et le harcèlement sexuel ;

7. la structure organisationnelle, comme l‘excès de règles et de procédure,


et le mode de direction ou le style de management des dirigeants.

Quant aux facteurs personnels du stress au travail, on peut citer : (i) les
problèmes familiaux, (ii) les soucis économiques et (iii) les traits de
personnalité.

Concernant les traits de personnalité, il est prouvé que le caractère rend


l‘individu plus ou moins sensible au stress. Ce, suivant que l‘individu est d‘une
personnalité du type A ou du type B. Les personnes ayant une personnalité de
type A sont celles qui ont le sentiment chronique d‘urgence, un goût excessif
pour la compétition et une impatience vis –à- vis des obstacles opposés à la
réalisation des tâches. Ces individus sont enclins au stress et sont plus fortement
menacés par une maladie cardiaque.

Par contre, la personnalité du type B concerne les personnes qui sont plus
accommodantes et détendues, moins préoccupées des pressions liées au temps et
moins portées à réagir de façon excessive aux situations de manière hostile ou
[103]

agressive. Ces personnes ignorent le stress et acceptent facilement les


changements.

Il y a lieu de retenir que la liste des stresseurs est quasiment infinie. Les
stresseurs peuvent émaner :
• de facteurs liés à la personne elle-même --> psychologie du personnel ;
• de facteurs liés à l'entreprise --> psychologie des organisations ;
• de facteurs liés au travail --> psychologie ergonomique ;
• de facteur liés « aux autres » --> psychosociologie du travail.

Au-delà de la sélection, le psychologue du travail se doit d'améliorer les


conditions de travail, viser l'élimination, ou du moins, la diminution des risques
à un niveau collectif ainsi qu'informer et impliquer l'employeur dans la gestion
des problèmes de stress.

1.9. Effets du stress

Les indicateurs servant de critères pour reconnaître l‘existence du stress sont de


trois sortes, à savoir : (i) les répercussions physiologiques, (ii) les symptômes ou
effets psychologiques et (iii) les symptômes ou effets comportementaux.

Les répercussions physiologiques font penser aux conséquences du stress sur la


santé du fait des changements métaboliques. Il s‘agit notamment : de
l‘augmentation du rythme cardiaque et respiratoire, de la hausse de la tension
artérielle, des maux de tête, du rythme cardio – vasculaire, de la transpiration,
des tensions musculaires, des troubles gastro – intestinaux.

Les symptômes ou effets psychologiques se caractérisent par une sensation


accrue de tension et d‘angoisse, par des manifestations d‘ennui et de
procrastination. Ces effets sont notamment : la colère, l‘anxiété, la dépression, la
faiblesse de l‘estime de soi, la médiocrité du fonctionnement intellectuel, la
nervosité, le mécontentement professionnel.

Les symptômes ou effets comportementaux s‘observent à travers les actes ou


les comportements que les individus adoptent dans le cadre de leur travail. Ces
symptômes sont notamment : la faiblesse de la productivité, l‘absentéisme, le
niveau élevé des taux d‘accident et de rotation du personnel (turn-over), la
consommation excessive d‘alcool et de substances toxiques, l‘impulsivité du
comportement, les difficultés de communication.
[104]

1.10. Gestion du stress

On reconnaît que les personnes et les organisations ont une variété de stratégies
pour gérer de stress et en réduire les effets négatifs. Mais ici on ne devait
s‘intéresser qu‘aux aspects dysfonctionnels du stress car il est indispensable
qu‘il y ait une certaine dose de stress comme moteur de l‘action.

Par ailleurs, on entend par management du stress (ou gestion du stress) toute
stratégie ou toute initiative qui vise à diminuer le stress en aidant les individus à
savoir comment y réagir, à percevoir les facteurs stressants et à utiliser des
techniques appropriées.

La gestion du stress recourt à deux sortes de techniques : (i) les techniques


individuelles et (ii) les techniques organisationnelles.

La gestion individuelle stress a pour but : (a) éliminer ou maîtriser les sources
de stress, (b) renforcer la résistance de la personne au stress ou sa capacité à y
faire face. Elle passe par les étapes suivantes : (i) impliquer la personne à
connaître les facteurs de stress pesant sur elle, et (ii) amener l‘individu à décider
de ce qu‘il convient de faire.

Dans la gestion individuelle du stress, on peut recourir, entre autres aux


techniques suivantes :
1. planifier et appliquer une bonne gestion du temps,
2. prendre soin de soi en faisant beaucoup d‘exercices physiques, en ayant
un régime alimentaire équilibré et en se reposant suffisamment,
3. avoir une saine philosophie de vie tout en conservant une attitude
positive et un sens d‘humour,
4. équilibrer sa vie professionnelle et sa vie personnelle en prévoyant un
temps de détente,
5. apprendre une technique de relaxation.

Les programmes organisationnels de gestion du stress visent la réduction des


effets négatifs du stress en recourant aux méthodes suivantes :

a) l’identification et la réduction ou l’élimination des facteurs stressants par


notamment :
1. l‘amélioration du milieu physique du travail,
2. la restructuration de l‘emploi,
3. la révision des charges du travail et des échéances,
4. la modification des horaires de travail, la pratique d‘horaire flexible et de
congés sabbatiques,
[105]

5. l‘augmentation des niveaux de participation du personnel, en particulier


pour la planification des changements impliquant ce dernier.

b) l’aide au personnel (membres de l‘organisation) pour que ce dernier


modifie sa perception du stress éprouvé et de ses facteurs ;

c) l’adoption par le personnel des réactions plus efficaces aux effets du stress.

En d‘autres termes, on note que les programmes organisationnels de gestion du


stress se résument en programmes d’aide au personnel visant à combattre des
problèmes personnels et de santé et en programmes de bien-être. Ces
programmes sont appelés aussi « programmes d’hygiène de vie » englobant la
prévention médicale, les soins médicaux, les soins individuels et la promotion de
la santé.

1.11. Législation et bien-être au travail

Pour prévenir les risques psychosociaux au travail, les Etats devraient mettre en
place une législation (loi) sur le bien-être des travailleurs lors de l‘exécution de
leur travail. C‘est le cas, par exemple, de la Belgique qui dispose à cet effet
d‘une loi du 4 aout 1996. Dans cette loi, il est prévu que l'employeur doit
prendre des mesures pour éviter les risques et assurer la sécurité, la santé,
l'ergonomie (taille de la chaise), l'hygiène, l'embellissement (environnement
agréable). Et ils doivent aussi limiter la charge psychosociale, pour cela, on a
besoin des psychologues. Ils doivent donc éviter l'insatisfaction, la démotivation,
le stress, la charge mentale, la charge émotionnelle (cf. Burnout), la violence et
le harcèlement.

Trois niveaux de mesure de prévention des risques psychosociaux peuvent être


identifiés : la prévention primaire, la prévention secondaire et la prévention
tertiaire.

Il existe des mesures pour éviter les risques, entre autres, en éliminant les
dangers, ce sont les préventions primaires qui doivent être les plus présentes.
Par exemple, concernant la sécurité, l'interdiction de l'amiante, concernant
l'aspect psychologique, des conditions de travail moins pénibles et moins
stressantes. Supprimer tout cela est paradoxal par rapport à la productivité.

La prévention secondaire, ce sont des mesures pour éviter le dommage que le


travail pourrait provoquer. Concernant la sécurité, c'est par exemple utiliser des
harnais, concernant l'aspect psychologique, c'est augmenter les ressources et les
[106]

capacités par exemple grâce à une formation à la gestion du temps et des


conflits.

La prévention tertiaire consiste à des mesures pour limiter le dommage.


Concernant la santé, c'est la présence de secouristes dans l'entreprise, concernant
l'aspect psychologique, c'est un programme d'aide aux employés, des personnes
de confiance à l'écoute et aux conseils.
Section 2. Burnout, violence au travail et harcèlement

2.1. Le BURNOUT ou épuisement professionnel

Il ne faut pas le confondre avec le stress extrême.

Pour Freudenberger (1974), le burnout est un état de fatigue ou de frustration


engendré par le dévouement à une cause, a un mode de vie ou à une relation
qui n'a pas conduit à la récompense attendue. Le burnout n'est pas du stress,
mais il est plus élevé dans des milieux de travail où le stress organisationnel est
assez présent (cf. Les exigences élevées, peu de moyens pour y arriver, et peu de
reconnaissance, peu de soutien social). Le burnout est particulièrement présent
dans les professions d'aide aux personnes (cf. Vocation, engagement) :
enseignant, thérapeutes, infirmières, pompiers, policiers.

La définition de Maslach (fin des années 80, elle est encore très actuelle) : pour
lui, le burnout se définit en trois dimensions : l'épuisement émotionnel : « au
bout du rouleau », on se traine pour aller au travail ; la dépersonnalisation (non-
relation avec les autres), on devient insensible au monde qui nous entoure (par
exemple, l'infirmière ne parle plus à ses patients) ; on a un sentiment de non-
accomplissement et l'impression de ne rien pouvoir réussir.

Le burnout s'installe en quatre étapes :

1. L'idéalisme: une grande énergie et ambition d'aider les autres, on se


consacre à son travail même s'il est très exigeant.
2. Le plafonnement: malgré ses efforts, les résultats ne sont pas à la hauteur
de ses attentes, il y a peu de reconnaissance de la part de l'organisation. Le
travailleur n'arrive pas aux objectifs qu'il s'était fixé.
3. La désillusion : la fatigue et la frustration s'ajoutent aux effets de l'étape
2.
[107]

4. La démoralisation : le travailleur est au bout du rouleau, il perd tout


intérêt au travail (alors qu'il l'aimait beaucoup) et à l'entourage.

2.2. Violence au travail

La violence au travail est définie légalement. Il s'agit de toute situation de fait


(concrète) ou une personne est persécutée, menacée ou agressée psychiquement
ou physiquement au travail.

La violence au travail se traduit principalement par des comportements


d'agression physique (coups directs, menaces avec arme) ou verbale (injures,
insultes, brimades). Elle vient d'un collègue, du supérieur hiérarchique, d'un
client, d'un subalterne.

2.3. Harcèlement moral au travail

Le harcèlement moral au travail a pour objet (c'est le but du harceleur) ou


comme effet de porter atteinte à la personne (sa personnalité, sa dignité ou son
intégrité physique ou psychique), de mettre en péril l'emploi de cette personne,
de créer un environnement intimidant, hostile, humiliant ou offensant.

Les comportements de harcèlement doivent être abusifs (dire « tu bosses » n'est


pas abusif) et répétés pour pouvoir être considéré comme tels. Ils se manifestent
notamment par des comportements, des paroles, des intimidations, des actes, des
gestes et des écrits unilatéraux. Par exemple, isoler la victime (l'ignorer,
supprimer progressivement ses outils de travail) ou empêcher la victime de
s'exprimer (l'interrompre continuellement). Ce n'est pas toujours très visible et
c'est donc difficile de monter un dossier.
[108]

2.4. Harcèlement sexuel au travail

Toutes les formes de comportement verbal, non verbal ou corporel de nature


sexuelle dont celui qui s'en rend coupable sait ou devrait savoir qu'il affecte la
dignité des femmes et d'hommes sur les lieux de travail.

Il peut se manifester sous différentes formes, tant physiques que verbales :


regards insistants, remarques équivoques, exposition de photos pornographiques,
attouchements, viol.

Le harcèlement sexuel peut s'accompagner de menaces de représailles (cf.


Licenciement) ou de propositions comme une promesse d'augmentation ou de
promotion. Il y a plus de plaintes dans les pays nordiques ou les normes sont
plus strictes.
[109]

CHAPITRE 4. ANALYSE DU TRAVAIL

Section 1. Analyse du travail comme objet et méthode

1.1. Introduction

L'analyse du travail consiste à recueillir des informations sur les activités, leur
contexte et les qualités en jeu pour les accomplir.

L‘analyse du travail est une méthode. Selon Daniellou (1996), pour comprendre
le travail, il faut l‘identifier, l‘analyser, le décomposer. Il fait donc la description
de l‘homme au travail et l'analyse psychologique du travail.

L‘analyse du travail est un objet de recherche. Daniellou (1996) propose quatre


types de déterminants du travail à analyser :

1. Déterminants matériels et situationnels : environnement matériel,


ambiances physiques (température de la pièce, son et lumière de la pièce),
contraintes matérielles, caractéristiques anthropométriques du poste de
travail (hauteur d'une table de travail, position des objets).

2. Déterminants techniques : moyens mis à disposition, procédures


(processus technique et technologique), contraintes techniques.

3. Déterminants propres à l’opérateur (permanents ou ponctuels): culturels,


éthiques, sociaux, psychiques, biologiques, cognitifs.

4. Déterminants sociaux et relationnels : hiérarchie, organisation de la


production et organisation temporelle, dépendance/indépendance
(autonomie au travail), assistance technique, collectif de travail, climat
social, contraintes humaines.
[110]

De même, Goguelin (1998) décrit les différentes sphères qui influencent le


rapport de l‘homme au travail : la société globale/le marché de l'emploi (la
position de l'entreprise dans un univers plus large), l‘organisation et ses
différents acteurs, le service, le poste de travail (configuration du poste de
travail).

Des variables plus périphériques influencent l'organisation des hommes au


travail. Il faut par exemple prendre en compte la mobilité (temps pour rejoindre
son lieu de travail). Un train en retard peut avoir un impact sur le travail.

1.2. Bref historique

Suite aux répercussions négatives du Taylorisme sur les travailleurs :

Walther veut rechercher la technique de travail la moins fatigante. Myers fonde


en 1921 l‘Institut national de psychologie industrielle de Londres. C'est un des
premiers à sortir un ouvrage sur la psychologie industrielle.
[111]

Lahy et Pacaud créent des méthodes d‘auto-observation et d‘observation puis


comparent les deux sources pour voir les différences et comprendre pourquoi.
Comment étudier le poste de travail? On peut se mettre à la place du travailleur
pendant une heure mais c'est différent par rapport à travailler toute une journée
donc c'est utile mais pas suffisant.

Ombredane et Faverge écrivent l‘ouvrage dont la référence est la suivante :


« L‘analyse du travail. Facteurs d‘économie humaine et de productivité ». Paris,
PUF, 1955. Cet ouvrage est le fondement de la psychologie du travail.

Leplat (1972, 1980,1990), Leplat et Hoc (1983), Curie et Cellier (1987), Karnas
(1987, 1996), etc. ont poursuivi les recherches.

La figure reprise ci-dessous et que nous avons déjà présentée dans les pages qui
précèdent, représente les éléments essentiels de l‘analyse du travail : l‘activité
qui résulte (conséquence) du couplage agent et tâche.
[112]

1.3. Les fondements de l’analyse du travail

C‘est la première phase obligatoire de toute intervention (cf. d‘abord,


comprendre). Elle consiste en une description objective et détaillée, il faut un
maximum d'observation pour couvrir l'ensemble de la situation puis collecter
des données subjectives. Elle vise (et distingue) la tâche (devoir faire : ce que le
chef définit) et l’activité (faire : le vrai travail). Le but est de comprendre
pourquoi il y a un écart alors qu'avant, on s'intéressait uniquement à la tâche.

L'analyse de l'activité est au cœur de la psychologie du travail comme de


l'ergonomie.

1.3.1. La tâche

La tâche, c‘est ce qui est à faire, ce qui est prescrit par l‘organisation, ce qu'on
dit au travailleur de faire. C'est un objectif à atteindre dans des conditions
déterminées (Leplat, 2000; Leontiev, 1976), c'est quelque chose de finalisé, un
but à atteindre dans des conditions physiques (environnement de travail: bruit,
éclairement, chaleur, …), des conditions techniques (outils, instruments,
dispositifs), des conditions organisationnelles (structures, règles de
fonctionnement, horaire, cadences) et des conditions socio-économiques
(situation sociale, concurrence, cadre législatif) données.

Leplat et Hoc (1983) distinguent la tâche prescrite (tâche conçue par celui qui
en commande l‘exécution) et la tâche effective (tâche exécutée réellement du
point de vue du travailleur). Il
Il convient d‘attirer l‘attention sur le fait qu‘il ne faut pas confondre tâche
effective et activité, ici on parle de ce que le travailleur sait qu'il doit faire et la
façon dont il va le faire. L'activité, c'est le comportement, la tache effective
c'est ce que le travailleur a dans la tête qu'il va faire.
[113]

Les différentes étapes de la tâche à réaliser à la tâche réalisée (d’après


Leplat, 1997), exemple pour un enseignant :

1. Tâche à réaliser pour le concepteur, c'est très général, par exemple,


enseigner.

2. Tâche prescrite par l‘organisateur/prescripteur, par exemple, le directeur


d'école décrit ce que recouvre le fait d'enseigner (travail en classe, réunion
avec les parents, surveillance de la cours, etc...). Cela renvoie à la tâche
affichée / explicite – tâche attendue / implicite. Ce qui est implicite par
exemple c'est le fait de garder les enfants calmes. La tâche prescrite est
importante pour l'évaluation, donc il est important de la connaitre au
moment où on commence à travailler et pas uniquement lors de
l'évaluation.

3. Tâche prescrite pour l‘agent : manière dont l'organisateur formule la tâche

4. Tâche redéfinie par l‘agent : l'enseignant s'approprie la tâche, à partir de


ce qu'il a compris, il va ajouter des choses à faire comme par exemple
participer à des formations afin d'arriver au but à atteindre.

5. Tâche actualisée : contextualisation de la tâche par rapport à


l'environnement comme le nombre d'élève par exemple.

6. Tâche effective (exécution).

7. Tâche réalisée pour l‘agent (auto-contrôle) : qu'est-ce que le travailleur


pense qu'il a fait ou pas fait.

8. Tâche réalisée pour l‘analyste (contrôle externe) : ce que la personne fait


vue de l'extérieur comme lorsqu'un inspecteur observe ce que l'enseignant
fait.

L'intérêt est de regarder l'écart entre les différents points et essayer de


comprendre pourquoi, voir si l'environnement est bon, si la tâche est bien
[114]

définie. Donc voir si c'est l'enseignant qui doit s'adapter ou si c'est la tâche qui
n'est pas réaliste.

1.3.2. L’activité

L’activité, c‘est ce qui est fait réellement, ce qui est mis effectivement en œuvre
pour effectuer la tâche. L‘activité est finalisée (elle répond à un but précis) par le
but fixé, à partir du but de la tâche (à réaliser). L‘activité ne se réduit pas au
comportement observable; l‘activité, c‘est aussi des comportements
inobservables (activités cognitives) tels que le raisonnement, le contrôle visuel,
etc.

L’activité se compose de quatre composantes : (i) une composante physique,


motrice (geste que l'on fait), (ii) une composante informationnelle (gestion des
informations), (iii) une composante régulatoire (ajustement des conduites,
organisation des mouvements) et (iv) une composante cognitive.

Par exemple, l‘activité du maçon. La composante physique est importante et on


a tendance à négliger les autres même si elles existent. Ils doivent intégrer les
informations de l'environnement et adapter leurs gestes par rapport aux
informations et aussi prendre des décisions, se coordonner avec les autres. Dans
un emploi de bureau, on sous-estime la composante physique. Les ramasseurs de
poubelles ont beaucoup de coordination à faire.
[115]

Exemple: raffinements dans l’analyse de l’activité «allumer une allumette»

Échelle assez fine: 9 phases Échelle plus grosse: 2 phases

L'exécutant saisit la boite.


Il la place en position. Sortir une allumette.
Il pousse le tiroir.
Il sort une allumette.
Il tient l'allumette en refermant le
tiroir.

Il positionne l'allumette entre ses


doigts. Allumer l'allumette.
Il présente le phosphore sur le frottoir.
Il frotte l'allumette.
Il repositionne l'allumette.

Plus il y a de raffinement, plus on est précis, mieux on peut repérer des


dysfonctionnements et voir ce qui se passe quand ça ne fonctionne pas!

1.3.3. De la tâche à l'activité : une régulation

D‘après Hubault (1995), la tâche réelle (cf. Tâche effective selon Leplat) est une
réinterprétation, par l‘opérateur, de la tâche prescrite dans un processus de
négociation interne/personnel prenant en compte les coûts de l‘exécution de la
tâche par l‘opérateur (coûts physiques et psychiques), les contraintes de la
situation, de l‘opérateur et de la tâche et les gains pour la structure et pour
l‘opérateur.

Par exemple, on a une chaine de construction de plaque électronique, sur un


poste, un robot place et soude des composants électroniques très petits. Un
travailleur passe régulièrement pour contrôler le travail du robot. Le poste est
prévu de façon ergonomique mais le travailleur se trouve de l'autre côté de la
plaque lorsqu'il fait son contrôle et n'est donc pas bien mis. Pourquoi se trouve-t-
il de ce côté? Parce qu'il effectue aussi un autre travail et qu'il devrait faire un
grand tour pour arriver du bon côté du poste. On voit donc l'importance d'aller
sur le terrain et de voir comment le travail se passe réellement.
[116]

La régulation est un mécanisme de contrôle qui compare les sorties d‘un


processus à une production désirée, et qui règle ce processus en fonction de
l‘écart constaté. Ceci suppose l‘existence d‘un système dynamique et non
figé/rigide! Pas comme dans l'auditoire où les radiateurs (climatiseurs) chauffent
alors qu'il fait déjà chaud.

Il existe différents types de régulation, tels qu‘ils sont présentés ci-dessous :

La régulation en boucle longue : ici les informations sont prises sur les sorties
du processus (inertie du système). En fonction du résultat de l'activité, on ajuste
la prescription.

La régulation en boucle courte (au cours de l'activité) : des signes précoces sont
prélevées sur le processus ou ses entrées, permettant de prédire l‘évolution du
système et d‘agir avant que les écarts ne se manifestent (capacité d‘anticipation).
On ajuste pour arriver à la performance voulue au cours de l'activité.

La régulation d’un système : elle consiste à redéfinir les objectifs. Au fait,


l‘opérateur compare les écarts et régule un système technique, on peut faire
appel à un collègue, demander un résumer...

La régulation de l’activité humaine : Ici, l‘opérateur régule sa propre activité,


afin d‘éviter des répercussions négatives de l‘activité sur lui-même, afin
d‘atteindre les objectifs de la tâche, ou afin d‘apprendre : changement de
méthode.
[117]

1.4. Les modèles d’analyse du travail

Différents modèles d‘analyse du travail existent ; tous mettent en exergue


l’activité (ou conduites de l’opérateur), ses antécédents et ses effets.

1.4.1. Leplat et Cuny (1977), Leplat (1980, 2000)

Les contraintes externes sont celles de l'organisation. Les contraintes internes


sont propres au travailleur. L'agent est caractérisé par les différents facteurs le
définissant et qui sont directement impliqués dans la réalisation de la tâche (âge,
acuité visuelle, force, aptitude) mais aussi par ses objectifs personnels.

Le centre, c'est l'activité. Les performances sont le résultat pour le système, les
effets sur l'opérateur sont par exemple la fatigue, un accident, la satisfaction...
Tel que présenté dans la figure ci-dessous, le niveau 1 correspond aux
conditions (contraintes externes et contraintes internes), le niveau 2 à l'activité
(conduite de l‘opérateur) et le niveau 3 aux conséquences (performance et effets
sur l‘opérateur). Les ronds avec les croix à l'intérieur correspondent à
l'évaluation et les ajustements. Les performances sont les conséquences
externes, les effets sur l'opérateur, les conséquences internes comme la fatigue et
la charge de travail.

Figure 2. Système conditions-activité-conséquences


[118]

1.4.2 Karnas, 1996, 2002 : étude du stress au travail

Ici aussi, le centre, c'est l'activité (conduites de l‘opérateur). La partie supérieure


concerne le système et la partie inferieure concerne le travailleur.

Les contraintes individuelles internes sont les éléments constitutifs du travailleur


qui influencent le travail mais aussi si sa rémunération lui convient ou pas. On
ne peut pas exclure des études du stress au travail les contraintes pour l'opérateur
en dehors du travail car elles ont une grande influence sur le travailleur. Ce
modèle va donc plus loin que le précédent.
[119]

1.4.3 Guillevic, 1991

On a trois composantes au départ : l'organisation, les hommes et la technologie.


Ces trois composantes arrivent sur une boucle de régulation, et la tâche est un
compromis entre les 3 composantes. A la sortie, il y a aussi une boucle de
régulation.

Si le rendement n'est pas celui attendu, il y a un effet sur l'opérateur, sur


l'organisation et sur la production. On a plusieurs solutions, le travailleur peut
par exemple tout faire pour arriver à la production mais cela pourrait avoir des
conséquences telles qu'un accident du travail, de l'absentéisme, des grèves...

Une entreprise n'est plus concurrente, elle pourrait acheter des nouvelles
machines pour y arriver mais les travailleurs sont âgés et ne pourraient pas
s'habituer à ce changement, l'entreprise risque de perdre une fortune si elle
licencie tout le monde pour avoir des travailleurs qui pourraient utiliser des
machines, elle n'en a pas les moyens et décide donc de s'orienter vers la
production artisanale de produit de luxe.
[120]

1.4.4. Curie et Hajjar (1987)

On voit apparaitre dans ce modèle, deux fois le modèle de Leplat mais inversé,
une fois pour la vie hors travail et une fois pour la vie de travail. Les concepts
fondamentaux sont toujours les mêmes. Sur le terrain, on identifie chaque case
et le modèle est choisi en fonction du problème.

1.5. L’analyse en tant que méthode

On analyse la tâche. On analyse l‘activité. On analyse les contraintes et


astreintes. On analyse les dysfonctionnements.

1.5.1. L’analyse de la tâche, de l'activité, des contraintes et astreintes, des


dysfonctionnements

1.5.1.1. L'analyse de la tâche

La description du système homme-machine : caractéristiques des personnes


(qui est le travailleur?), caractéristiques techniques, les informations, les actions,
l‘environnement physique, l'environnement social et organisationnel.
[121]

L’identification des exigences liées aux tâches : conditions d'exécution.

La critériologie du système homme-machine : qualité, quantité, sécurité,


collaboration...

1.5.1.2. L’analyse de l’activité

Analyse des gestes et postures, analyse des communications, analyse de


situations problèmes, analyse des régulations, analyse des interactions.

1.5.1.3. L’analyse des contraintes et astreintes

Les contraintes, ce sont les objectifs, les caractéristiques de l'environnement ou


du travailleur, les conditions d'exécution tandis que les astreintes, c'est le
ressenti, l'impact des contraintes sur le travailleur. Les contraintes sont
identifiées si elles provoquent des astreintes chez le travailleur.

L‘identification des exigences liées aux tâches, les indicateurs électro-


physiologiques (rythme cardiaque, indicateur de stress), le questionnement des
sujets (méthode efficace), l'analyse des variations des comportements
(ajustement) opératoires.

1.5.1.4. L’analyse des dysfonctionnements

L‘analyse des accidents du travail, l'analyse des erreurs (pas de connotation


négative, les erreurs sont des écarts par rapport à la norme, ce ne sont pas des
erreurs fautives), l'analyse de la qualité.

1.5.2. Les techniques de l’analyse du travail

L‘observation distante (sans interaction avec l‘observé), participante


(interaction), armée (avec une grille ou avec des moyens d'enregistrement),
l'entretien semi-structuré, la méthode des incidents critiques (Flanagan : elle
consiste à demander à des personnes connaissant bien un travail de décrire des
incidents critiques ; les circonstances de l'incident, ses causes, les
comportements de l'employé dans la situation avec leur résultat figurent dans la
[122]

description), les verbalisations (inviter le salarie à expliciter la logique qu'il met


en œuvre dans son travail), les questionnaires, l'étude des traces (regarder le
résultat du travail).

Section 2. La structuration du travail

2.1. Les formes de spécialisation du poste de travail

Un poste de travail peut se décrire selon plusieurs caractéristiques. La


spécialisation horizontale : selon la variété des tâches effectuées à un poste de
travail. Une forte répétition des tâches correspond à une spécialisation élevée.
Cette répétition présenterait plusieurs avantages tels que l'absence de perte de
temps pour passer d'une tâche à l'autre, une meilleure maitrise de la tâche. La
spécialisation verticale : selon le niveau des contrôles que le salarié effectue sur
son travail. Si la spécialisation verticale est forte, le salarié exécute le travail
sans exercer des responsabilités (contrôle de la qualité ou réglage des machines).
La standardisation : existence de règles, de procédures strictes pour l‘exécution
du travail. On parlera de formalisation lorsque ces règles sont écrites.

Par exemple, le modèle du Fordisme repose sur la production de masse d‘un


seul type de produit : instauration du travail à la chaine.
Friedman (1964) parlera de l'avènement du « travail en miettes ». Par cet
éclatement des anciens métiers, l'ouvrier perd la connaissance du matériau. On
assiste alors à la montée des insatisfactions au travail, à une augmentation de la
fatigue et du turn-over des salariés, à une chute de l'intérêt du travail.

2.2. Nouvelles formes de structuration


On a une nécessité de diversifier les produits (marché de renouvellement), de
répondre aux attentes des consommateurs, etc. Cela renvoie à la réduction de la
standardisation.
On voit donc de nouvelles structurations du travail : (i) la rotation des tâches :
le travailleur occupe plusieurs postes (augmentation relative de la variété des
tâches, rupture avec la monotonie), (ii) l'élargissement des tâches : le
travailleur exécute davantage de tâches à son poste (augmentation du temps de
cycle), (iii) l'enrichissement des tâches : le niveau de contrôle du travailleur
[123]

sur ses tâches augmente (Herzberg), (iv) les groupes semi-autonomes :


réduction de la spécialisation horizontale et organisation du travail par l‘équipe
de travail (planification, gestion des temps de pause, répartition du travail entre
les membres de l‘équipe, etc.).

2.3. Le modèle de production flexible : Toyotisme

On veut favoriser la flexibilité, les capacités d‘adaptation, de réaction des


organisations face aux changements sociaux et économiques, aux aléas, aux
incertitudes.
On voit l'émergence d‘un modèle de production flexible développe au Japon. Par
exemple, le Toyotisme (Japon) sous l'impulsion de Ohno (1912-1990). On veut
limiter les coûts inutiles (on diminue le stock, invendus), organiser la production
à partir des achats (aval : construire une voiture uniquement lorsqu'elle est
vendue), gérer la production en flux tendus (« kanban » : fiche de commande,
production Just-in-time : on construit les pièces au moment où on a besoin de les
monter donc si une entreprise se met en grève, toute la production est
immobilisée, c'est le désavantage de cette méthode), mobiliser les travailleurs
autour de l‘objectif de Gestion de la qualité : processus d‘amélioration continue
de la production par le personnel (« Kaizen ») et donc spécialisation verticale.

Le modèle toyotiste est plus performant sur le plan économique mais le


personnel est moins dépendant de la hiérarchie mais plus soumis aux pressions
de la clientèle, la standardisation demeure ; le coût social de cette nouvelle
forme d'organisation est élevé avec une intensification du travail, source de
stress.

2.4. Les exigences de la flexibilité organisationnelle

La flexibilité organisationnelle nécessite une formation du personnel à la


polyvalence, à la maitrise de la qualité, a la maintenance : la mobilisation des
compétences au sein des collectifs de travail (Thionville & Gilbert, 2000) ;
l'organisation du travail par projet, organisation matricielle donc des groupes
(semi-)autonomes ; la révision de la structure hiérarchique et de la fonction
d‘encadrement, le chef participe au processus de qualité. Tout cela sans remettre
en cause l‘entièreté du modèle rationnel de l‘organisation du travail.
[124]

CHAPITRE 5. LA PSYCHOLOGIE ERGONOMIQUE

Section 1. L’ergonomie

Murrel (1949) Ergonomics Research Society. Apres la deuxième guerre


mondiale, il y a eu un intérêt pour l'adaptation du travail à l'homme.

1.1. Définition

L’ergonomie peut être définie comme l‘adaptation du travail à l‘homme, ou plus


précisément, comme la mise en œuvre de connaissances scientifiques relatives à
l‘homme et nécessaires pour concevoir des outils, des machines et des
dispositifs qui puissent être utilisés avec le maximum de confort, de sécurité et
d‘efficacité (selon la Société d‘Ergonomie de Langue Française, 1970).

Plusieurs auteurs ont écrit dans ce domaine, avec des thèmes comme :
« Adaptation de la machine à l‘homme » (Faverge, Leplat et Guiguet, 1958) ;
« Adaptation de l‘homme à son metier » (Bonnardel, 1947). Dans toutes ces
publications, il s‘agit de considérer l‘ergonomie comme étude de l'interaction
entre la tâche et l'agent.

Selon la définition de l'IEA (International Ergonomics Association),


l’ergonomie (ou l‘étude des facteurs humains) est (i) la discipline scientifique
qui vise la compréhension fondamentale des interactions entre les humains et les
autres composantes d‘un système (pas uniquement le monde du travail), et (ii) la
profession qui applique principes théoriques, données et méthodes en vue
d‘optimiser le bien-être des personnes et la performance globale des systèmes.

C'est une discipline pluridisciplinaire, ce qui s'oppose à la définition de


Louche.

Les praticiens de l‘ergonomie, les ergonomes, contribuent à la planification, la


conception et l‘évaluation des tâches, des emplois, des produits, des
organisations, des environnements et des systèmes en vue de les rendre
compatibles avec les besoins, les capacités et les limites des personnes.
[125]

L‘ergonomie tient compte de facteurs physiques, cognitifs, sociaux,


organisationnels, environnementaux et autres. L‘ergonomie est une discipline
qui utilise une approche systémique (interaction) et holistique (global,
générale) dans l‘étude de tous les aspects de l‘activité humaine (on évite le
découpage).

1.2. Un objet ergonomique?

Un clavier ergonomique? En fait le clavier dit ergonomique est pratique pour


le traitement de texte mais pas pour la comptabilité, il n'est pas le même pour les
droitiers et pour les gauchers. Point de vue psychologique, la position des mains
est plus naturelle, l'appui est plus naturel mais il n'est pas adapté si on tape à une
main, le repérage des lettres est plus difficile... Point de vue tâche, l'encodage est
plus rapide mais la comptabilité est moins aisée (latéralisation dans l'espace).
Point de vue environnement, la taille et la forme du clavier lui font prendre plus
d'espace sur le bureau.

Il faut donc se demander pour qui est le clavier, pour quelle tâche, dans quel
contexte, quel environnement? L'ergonomie n'est pas une caractéristique en soi,
un objet ergonomique n'existe pas. Le mot ergonomique a été utilisé à des fins
commerciales pour les chaises de bureau par exemple, l'utilisateur doit adapter le
fauteuil mais il n'a pas toujours les conditions nécessaires.

Un clavier numérique : les chiffres sont inversés sur les téléphones par rapport
aux ordinateurs. Il y a donc un conflit entre les deux présentations.

Affordance : capacité d‘un produit à être compris et utilisé sans qu‘on ait besoin
d‘informations supplémentaires.

Pour une porte, par exemple, quand on a une barre verticale, on doit tirer tandis
que quand la barre est horizontale, on doit pousser, c'est très important pour les
accès d'urgence. Pour sortir, on doit pousser la porte et non l'inverse.

On ne parle pas d'affordance dans le cadre du travail mais plutôt dans le cadre de
la vie de tous les jours.
[126]

1.3. Approche ergonomique: caractéristiques

Multidisciplinaire: psychologie, physiologie, sociologie, sciences des


ingenieurs, medecine,
sciences de la motricite, sciences cognitives… On peut avoir des competences
en ergonomie en Belgique apres un premier diplome de base, c'est different en
France ou il faut une formation propre.

Globale et Participative : Le travailleur connait le mieux ses contraintes. De


plus, si on veut modifier son environnement, il est préférable qu'il participe à la
discussion!

De conception ou de correction : la conception se trouve en amont, on définit


la situation de travail. Pour la correction, une situation incorrecte va être
modifiée. On a une marge de manœuvre plus importante en termes de
conception mais on utilise souvent l'ergonome en termes de correction. Pour
bien faire, il faudrait faire les deux.

1.4. Les démarches de l'ergonomie

Faverge a identifié quatre démarches de l‘ergonomie :

• Une ergonomie des gestes et des postures ;


• Une ergonomie informationnelle ;
• Une ergonomie des systèmes ;
• Une ergonomie heuristique (traitement de l'information).

Trente ans après l‘analyse faite par Faverge, ces démarches doivent être
reformulées. Ce qui a été fait par Karnas. On a donc une perspective (ou une
ergonomie) physique qui s'intéresse aux gestes et postures ainsi qu'aux
conditions d'ambiance, une perspective (ou une ergonomie) systémique et/ou
organisationnelle travaillant sur les systèmes hommes-machines dans une
perspective élargie prenant en compte les structures organisationnelles (gestion
des horaires) et une perspective (ou une ergonomie) cognitive qui se focalise sur
les dimensions cognitives des activités professionnelles.
[127]

1.5 Ergonomie physique, cognitive, organisationnelle

1.5.1. Ergonomie physique

L‘ergonomie physique s‘intéresse aux caractéristiques anatomiques,


anthropométriques, physiologiques et biomécaniques de l‘homme en rapport
avec le travail physique. Les thèmes couverts comprennent les postures de
travail, la manutention, les mouvements répétitifs, les troubles musculo-
squelettiques d‘origine professionnelle, la conception du poste de travail, la
sécurité et la sante.

1.5.2. Ergonomie cognitive

Le but de l'ergonomie cognitive est d'améliorer le travail humain, sur les aspects
cognitifs. Pluridisciplinaire, l'ergonomie cognitive est une science relativement
autonome, bien qu'elle emprunte largement ses théories et ses méthodes à la
psychologie cognitive et à d'autres sciences telles que l'informatique,
l'Intelligence Artificielle, l‘analyse du travail, la linguistique, la sémiologie et les
neurosciences.

Elle s‘intéresse aux processus mentaux, comme la perception, la mémoire, le


raisonnement, les réponses motrices, qui affectent les interactions entre les
hommes et les autres éléments d‘un système. L'ergonomie cognitive joue un rôle
majeur dans les différents aspects de la conception d'une interface Homme-
Machine : la présentation des objets du dialogue (textes, graphiques, messages
d'erreurs, aides), la conversation entre l'homme et la machine et la guidance ou
l'assistance.

1.5.3. Ergonomie organisationnelle

Elle s‘intéresse à la question de l‘optimalisation des systèmes socio-techniques,


ce qui inclut leurs structures organisationnelles, les politiques d‘entreprise, les
processus. Les thèmes couverts comprennent les relations homme-système en
matière de communications, de gestion des personnels, de conception du travail,
de travail d‘équipe, de conception participative, de travail coopératif, de gestion.

Ce qui est esthétique est-il ergonomique? Il y a une grande variabilité dans les
avis et les arguments. Les couleurs et associations de couleurs sont importantes
pour les gens, il y a donc un aspect émotionnel dans l'ergonomie et dans la
symbiose homme/machine. On ne peut pas dire que l'esthétique n'est pas
ergonomique, l'ergonomie est liée aux affects, aux émotions.
[128]

1.6. Développement de l’ergonomie

Sont, entre autres, à la base du développement de l‘ergonomie les


préoccupations en rapport avec les connaissances sur l‘être humain, ainsi
qu‘avec les connaissances sur l‘action.

On note l‘évolution des situations de travail, on passe du travail manuel (force


motrice) aidé de l‘outil au travail sur machine-outil (signalisation-commande).
On voit se développer l'ergonomie des radars d'avions (2ème guerre mondiale).
Puis arrive le travail dans des systèmes complexes (salle de contrôle,
surveillance navigation aérienne, salle de commande, interactions hommes-
machines), les individus doivent vérifier le bon fonctionnement du système. Et
enfin, le travail se déroule dans des systèmes continus automatisés (diagnostic,
sécurité et fiabilité).

Certains facteurs sont favorables au développement de l'ergonomie : la


séparation entre le concepteur et l‘utilisateur (l'ergonomie permet de rapprocher
le concepteur et l'utilisateur), l'accélération du développement technologique (les
utilisateurs ont moins de temps pour s'adapter, l'ergonomie permet de fournir des
appareils mieux adaptés), les exigences accrues de sureté de fonctionnement, la
diffusion à grande échelle de produits manufacturés (au lieu de concevoir un
nouveau produit, on regarde ce qui existe et on prend ce qui convient le mieux),
les exigences accrues d‘efficacité, la loi sur le bien-être (Belgique,1996).

Les facteurs défavorables sont la crise (réduction des coûts de production et


donc réduction des coûts directs sans tenir compte des coûts indirects (fatigues,
accidents, absentéisme)), le marché du travail (on trouvera toujours quelqu'un
pour faire le travail quelles que soient les conditions), l'image réductrice, le coût
financier et temporel et l'absence de mesure d‘efficience (on ne peut pas mesurer
si c'est vraiment efficace).

1.7. Domaines d’application


Ergonomie de la conduite automobile, ergonomie de l‘aviation, ergonomie
informatique (matériel /logiciel), ergonomie à l‘hôpital, ergonomie scolaire,
ergonomie domestique, etc.
[129]

Section 2. Psychologie ergonomique

C'est la psychologie qui contribue à l‘ergonomie.

S‘agissant du développement de la psychologie ergonomique, il convient de


noter que celle-ci provient du passage du travail physique (travail dans les
charbonnages) au travail mental (on se plaint moins physiquement donc la
psychologie ergonomique prend la place de l'ergonomie), de la psychologie
cognitive et de l'intérêt pour les situations de travail complexes.

La psychologie ergonomique est l'Ergonomie centrée sur l’activité. Elle s'est


développée principalement en Europe. Alors que l'Engineering psychology est
l'Ergonomie du composant humain et provient d'Amérique du nord.

La psychologie ergonomique, à forte dominante cognitive, apporte à la


psychologie des connaissances sur le fonctionnement cognitif en situation
écologique et/ou technologique. Elle est un vecteur essentiel de transfert de
résultats fondamentaux en psychologie, souvent obtenus dans des situations
simplifiées vers des situations complexes (Hoc & Darses, 2004). C'est une
discipline charnière entre la recherche fondamentale et l‘application
(Sperandio).

Elle apporte des connaissances et méthodes de la psychologie pertinentes à


l‘analyse des conduites de l‘homme au travail et à la résolution des problèmes
ergonomiques (Leplatet Cuny, van de Leemput). Elle étudie l‘activité.

2.1. Engineering psychology

C'est une approche plus technique due à l'évolution des sciences et des
technologies. Elle est en lien avec la psychologie expérimentale. Elle analyse les
conduites humaines en situation de travail et aide à la conception de postes et
d‘outils de travail, etc. pour qu‘ils s‘adaptent au mieux aux habiletés et aux
capacités des travailleurs. Elle étudie les tâches.
[130]

Section 3. Interface homme-machine

3.1. Automatisation et informatisation dans l’industrie

L'automatisation est apparue dans différents secteurs. Dans une première phrase,
elle a surtout concerné la production mécanique, par exemple dans l'industrie
textile, les métiers à tisser ont été automatisés. La machine a reproduit une
succession d'opération mecanique.

Ensuite, l'automatisation a concerné l'industrie chimique et pétrochimique.


Dans ce secteur, on transforme de la matière première en un produit, on voit
donc apparaitre la gestion de réactions chimiques automatisées. On a donc une
transformation du procédé de fabrication.

Enfin, on voit l'apparition de robots, l'informatisation dans les industries


automobiles, électriques, électroniques, dans les administrations et les services,
etc. En effet, dans l'administration, il y a beaucoup de données à gérer.

3.1.1. Raisons de l’automatisation et de l’informatisation (Louche)

Le but de l'automatisation est une volonté de maîtriser les coûts de revient


(identification et formalisation des différentes étapes), de réduire les délais de
production (diminution des aléas une fois que le processus est lancé) et
d'augmenter le niveau de production (l'homme peut surveiller plusieurs
machines en même temps, on peut désynchroniser le temps machine et le temps
homme).
Remarquons que ce n‘est pas tant la technologie qui apporte des résultats que la
formalisation nécessaire pour automatiser ou informatiser.

3.2. Ergonomie du matériel et des logiciels

Depuis l'apparition de l'informatique, on assiste à une évolution rapide du


matériel et à une intégration des recommandations ergonomiques.
[131]

Au départ, on a des grands ordinateurs avec des terminaux, ensuite, on passe aux
ordinateurs personnels très encombrants puis aux ordinateurs que l'on connait
aujourd'hui. Le renouvellement du matériel est rapide, il y a donc peu de vieux
matériel. Les besoins de tous points de vue matériels sont semblables. Le
matériel est donc facilement généralisable.

Par contre, pour les logiciels, il y a des difficultés à formuler des


recommandations ergonomiques génériques (généralisables) car il y a une
grande diversité des utilisateurs, des situations, des tâches pour un même
logiciel. Par exemple, pour encoder des données, certaines études ont prouvé
que c'était plus facile horizontalement et d'autres verticalement. En fait, ça varie
en fonction de la relation qu'il existe entre les données que l'on encode. Dans des
logiciels comme Office, il existe plusieurs accès différents pour accéder à la
même fonction et c'est à l'utilisateur de trouver la méthode de travail qui lui
correspond le mieux.

3.3. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication

D'apres Valléry et Bobillier-Chaumon, les nouvelles technologies de


l'information et de la communication (TIC) ont 5 fonctions :

• Diffusion de l‘information (Internet) ;


• Partage de l‘information (groupware: personnes qui travaillent en
commun dans des projets et qui peuvent ainsi travailler à distance) ;
• Gestion et régulation de l‘information (gestion électronique de
documents) ;
• Aide à l'acquisition de connaissances (e-learning : apprentissage à
distance) ;
• Aide à la prise de décision (aide diagnostic, simulation d'événements pour
faciliter la décision)

D'après Brangier et Valléry, les TIC et le fonctionnement organisationnel :

• Favorisent le travail d‘équipe, la transversalité. Elles se mettent au service


d'un fonctionnement par projet qui rompt avec l'organisation hiérarchisée.
[132]

• Favorisent le développement de la flexibilité, on peut consulter les


données, travailler à distance, on peut aussi travailler ensemble même
quand on est dans des fuseaux horaires différents.
• Ils impliquent un changement dans le leadership, les relations avec le chef
sont modifiées, le cheminement de l'information ne doit plus forcément
passer par la hiérarchie pour aller d'un service à l'autre.
• Favorisent le contrôle dans le sens ou on peut identifier où on se trouve et
ce que l'on fait mais ce n'est pas pour cela que le contrôle est forcément
plus élevé.
• Ils permettent d'un côté le développement de compétences et de l'autre la
standardisation des tâches et donc sa simplification. Par exemple, le
télétravail peut donner beaucoup d'indépendance et d'autonomie car on est
seul à prendre des décisions mais il permet aussi plus de contrôle et ce qui
doit être fait peut aussi être défini de façon très précise par peur qu'on ne
fasse rien. Deux comportements sont donc possibles dans l'organisation
du télétravail.

3.4. L’interaction homme – ordinateur aujourd’hui

On constate une extension et une généralisation de dispositifs informatiques au


travail et dans la vie quotidienne. Il y a aussi un élargissement du public
d'utilisateurs, on utilise les ordinateurs dans le monde du travail mais aussi chez
soi, on a donc une diversité des profils et des compétences tant informatiques
que générales.

L'ordinateur est assigné à de nouvelles tâches : travail et formation à distance,


commerce en ligne (qui permet une meilleure comparaison des prix et des achats
plus lointains), programmation et personnalisation par l‘utilisateur.

On assiste à une complexification des systèmes, une complexité d‘utilisation,


sans toujours prendre en compte les besoins des usagers. Des appareils comme
les téléphones portables ont de plus en plus de fonctionnalité et sont donc de
plus en plus complexes à utiliser. Pour remédier à ce problème, on voit
apparaitre des téléphones portables simplifiés pour certains groupes de
personnes comme les enfants et les personnes âgées.
[133]

On constate aussi une généricité, les appareils ont des utilisations non
spécifiques à une tâche, le gsm fait beaucoup d'autre chose que téléphoner. Les
applications servent à plusieurs choses différentes.

On voit aussi l'hybridation et la diversification des technologies, des supports et


des paradigmes d‘interaction.

Section 4. Étude de l’Interaction Homme-Ordinateur

4.1. Évaluation des interfaces par les méthodes d’inspection

Il existe des recommandations, guidelines, normes ISO (standards


internationaux), critères de conception et d'évaluation d‘interface. Il y a des
règles à respecter pour concevoir un logiciel.

4.1.1. Recommandations ergonomiques de Mayhew (1992)

Compatibilité à l‘utilisateur, compatibilité entre logiciels, compatibilité avec la


tâche, compatibilité avec le flux de travail, consistance (homogénéité),
familiarité, simplicité, manipulation directe (objets visibles), contrôle, what you
see is what you get (correspondance entre ce qui apparait à l'écran et ce que l'on
a), flexibilité, réactivité, robustesse.

Pour la réactivité, le temps de traitement doit correspondre à l'idée qu'on en a, ni


plus, ni moins rapide. Si un calcul nous parait trop rapide, on le recommence.

4.1.2. Critères ergonomiques de Scapin et Bastien

Ils définissent huit critères suivants : guidage, charge de travail, contrôle


explicite, adaptabilité, gestion des erreurs, homogénéité et cohérence,
signifiance des codes et dénomination, compatibilité.

Par exemple, pour le critère de cohérence, le principe « être cohérent dans le


choix des mots, formats et procédures » est issu de recherches qui ont montré
que les gens apprennent plus rapidement et transfèrent mieux leurs acquis
lorsque les informations qu'on leur présente et les procédures qu'ils doivent
suivre sont cohérentes.
[134]

La probabilité d‘erreur humaine augmente dans les situations à charge élevée. Il


convient de minimiser le nombre d‘opérations à effectuer par l‘utilisateur ainsi
que les temps de traitement
(Charge de travail).

4.1.3. Objectifs

L'objectif est l'amélioration des applications grâce aux recommandations.


Les principes sont souvent basés sur une analyse de systèmes insatisfaisants, ils
pourraient être réducteurs si on n'analyse pas les tâches et les activités.
L‘utilisabilité ne peut se réduire au seul respect des recommandations. En effet,
celle-ci n'est pas une propriété générique des systèmes informatiques.

4.2. Étude de l’utilisabilité des interfaces

4.2.1. Définition de l’utilisabilité

L‘utilisabilité peut être définie de manières ci-après :

• Degré selon lequel un produit peut être utilisé, par des utilisateurs
identifiés, pour atteindre des buts définis avec efficacité (atteinte des
objectifs, résultats attendus), efficience (ressources utilisées pour attendre
l'objectif, par exemple le temps) et satisfaction (verbalisation de
l'utilisateur) dans un contexte d‘utilisation spécifié (ISO 9241-11).

• Facilité d‘utilisation, d‘apprentissage, utilisation sans erreur, de


mémorisation, etc. On prend en compte le feedback de l'utilisateur. Pour
cela, on observe l'activité des personnes avec l'outil.

4.2.2. Test d'utilisabilité

On fait des tests dans un laboratoire. Le laboratoire est composé d'une pièce
pour l'utilisateur avec des vitres sans teints et une caméra et d'une salle
d'observation où on peut voir aussi une copie de l'écran. Il permet donc
l'observation et l'enregistrement des activités de l‘utilisateur sans interférence.
Les tests sont scénarisés, les tâches sont prescrites dans un contexte défini de
simulation de travail réel. Cela permet de donner quelque chose à faire à la
personne observée et de standardiser l'activité, ce qui rend les résultats plus
faciles à analyser.

On procède par observation et entretiens pour investiguer les activités et


appréhender les éléments déclencheurs des activités observées. Par exemple, on
[135]

demande à l'utilisateur de faire une recherche sur une école, la manière


d'encoder le nom avec majuscule, apostrophe, etc. a une influence sur le résultat.
L'observation met en évidence les difficultés.

Un laboratoire d‘utilisabilité est un outil performant dans l‘étude de


l‘utilisabilité. Il permet l‘étude systématique des comportements humains. Il
constitue un outil de recherche et une aide à la conception et à l‘amélioration
d‘applications informatiques. Et il participe aux processus de changements
informationnels et organisationnels.

L‘utilisabilité n‘explique pas à elle seule l‘usage, il y a un rôle de l‘acceptabilité


et de l‘utilité.

Dans ce type de test, ce sont les concepteurs de l'application qui sont les plus
stressés! Parfois, les besoins de l'utilisateur vont à l'encontre des critères
ergonomiques. Par exemple, les SMS ne sont pas très ergonomiques mais ils ont
un grand succès, l'outil a donc une grande acceptation et l'utilisateur se l'est
approprié.

4.3. Étude de l’acceptation et l’appropriation des technologies

Le modèle de Davis (1986): Technology Acceptance model (TAM)

La perception de l’utilité se définit comme le degré avec lequel une personne


pense que l‘utilisation d‘un dispositif particulier pourra améliorer sa
performance.

La perception de la facilité d’utilisation se définit comme le degré avec lequel


une personne pense que l‘utilisation d‘un dispositif se fera sans effort physique
ou mental.

L'usage (le comportement) est prédit par l'intention d'utilisation. Celle-ci est
prédite par la perception de la facilité d'utilisation et la perception de l'utilité.
[136]

Un certain nombre d‘auteurs (Taylor & Todd, 1995; Ma & Liu, 2005) relèvent
plusieurs limites au TAM. Il est un très bon prédicteur des intentions
d‘utilisation d‘une nouvelle technologie. Mais il est moins informatif pour
comprendre les usages effectifs qui en sont faits. Il faut inclure d‘autres
dimensions comme le sentiment d’efficacité personnelle en informatique
(Compeau& Higgins, 1995) c'est-à-dire la perception qu‘un individu entretient
quant à sa capacité à utiliser un ordinateur et le sentiment d‘efficacité
personnelle est lié à Internet (Ma & Liu, 2005; Igbara & Iivari cités par Rocaet
al., 2006).

Section 5. Les risques professionnels

5.1. Les accidents du travail

L’accident du travail est tout accident survenant à un travailleur dans le cours et


par le fait de l‘exécution de son travail et qui produit une lésion. Est également
considéré comme accident du travail l‘accident survenu sur le chemin du travail,
c‘est-à-dire pendant le trajet normal pour se rendre de sa résidence au lieu
d‘exécution du travail.

En Belgique par exemple, on a observé le parallélisme depuis 2003 entre la


courbe ascendante des accidents sur le chemin du travail et celle de l'emploi et
un relatif statu quo depuis 2004 pour les accidents sur les lieux du travail.

Pour analyser les accidents de travail, deux approches ou démarches sont


possibles, à savoir la démarche statistiques et la démarche clinique.

Pour l'analyse statistique des accidents, on calcule deux indices : le taux de


fréquence et le taux de gravité. Le taux de fréquence est fonction du nombre
d'accidents par rapport au nombre de travailleurs et au nombre d'heures. Le taux
de gravité est fonction du nombre de journée perdue par rapport au nombre
d'heures d'exposition au risque. Les décès et les incapacités permanentes sortent
de cette statistique, c'est pourquoi, on calcule aussi un taux de gravite global qui
tient compte de ces deux derniers cas. Quant à la démarche clinique, elle se base
sur le diagnostic et la prévention, ainsi que sur les conceptions relatives à
l‘accidentabilité.

L'analyse est influencée par la déclaration ou non des accidents (Daubas-


Letourneux et al, 2004; Faverge…). Les accidents bénins, sans gravité ne sont
pas déclarés. Les personnes précarisées (âgées, intérim,…) ont tendance à ne pas
déclarer non plus afin de ne pas perdre leur emploi. Il y a aussi une influence de
[137]

la culture d‘entreprise et de la perception des risques, une certaine pression peut


être mise sur le travailleur afin que les accidents ne soient pas déclarés.

En bref, selon Faverge, les facteurs suivants influencent la déclaration des


accidents : les facteurs économiques, les facteurs familiaux, les facteurs
juridiques, les impacts des campagnes de sécurité, la culture d‘entreprise, la
politique de remise au travail, les jugements subjectifs de l‘incapacité d‘un jour.

La politique de sécurité au travail a évolué à travers l'histoire. Au départ, on a


parlé de protection au travail, le but était de protéger le travailleur en cas
d'accidents du travail et maladies professionnelles, des fonds d‘indemnisation ou
de réparation ont été créés.

Ensuite, à partir de 1973, l'accent a été mis sur la prévention des risques
professionnels afin d'éviter, d'éliminer, d'évaluer et de réduire les risques.

Puis, on voit apparaitre des campagnes de prévention avec des affiches simples
contenant des messages simples : opération main propre, pointus, coupants,
blessants...
[138]

5.1.1. Accidentabilité au travail

Tableau synoptique des conceptions relatives aux accidents du travail


(Monteau et Pham, 1987)

Au début du 20ème siècle, la conception de l'accident du travail est uni-causale.


On postule une prédisposition aux accidents! Certains ont plus d'accidents que
d'autres. On tente donc un processus de sélection (tests psychotechniques) pour
les éliminer. On pense que certains travailleurs ont une attitude de prise de
risques et on met en place des processus de formation pour agir sur les attitudes.
Mais il est difficile de prédire ce qui provoque les accidents car la plupart du
temps, plusieurs facteurs interviennent dont les variables physiologiques (âge,
sexe, fatigue, maladie, etc.), les variables psychologiques (intelligence,
personnalité, attitudes à l‘égard des risques) et les variables culturelles, socio-
économiques (nationalité, ethnie, statut social, etc.).

Ensuite, on passe à une conception multicausale, il y a plusieurs facteurs pour


expliquer un accident. Dans cette conception, on peut noter le modèle linéaire
des accidents de travail et le phénomène de convergence, tels que présentés ci-
dessous :
[139]

En Belgique, des études sont financées par la Communauté Européenne du


Charbon et de l‘Acier (CECA) (Faverge, Leplat, Salengros –années ‘60) afin
d'augmenter la sécurité du travail dans les mines et de prévenir les accidents.
Ces études sont basées sur une approche systémique (conceptions
systémiques) : l'accident est défini comme un symptôme de
dysfonctionnement du système homme-machine. Le but n'est alors pas de
chercher le coupable mais de trouver les facteurs qui interviennent dans les
accidents.

Ces études sont menées au travers des interactions homme-système. Lorsqu'il y


a un accident avec lésion, on se rend compte que quelque chose ne fonctionne
pas. Même s'il n'y a pas lésion, on se rend compte que le système ne fonctionne
pas.
[140]

On voit apparaitre l'analyse par l’arbre des causes (INRS). On suppose que si
on connait les explications d‘un événement (causes, facteur de risques, relations
logiques et chronologiques) on peut inférer sur les conséquences d‘un
événement similaire et donc anticiper des facteurs de risque et les prévenir. Pour
cela, on fait une représentation graphique de l‘enchainement des faits conduisant
à l‘accident.

Exemple analyse par l’arbre des causes: Madame G est employée dans une
cuisine collective. Mardi 5 avril à 9h45, à cause d‘un embouteillage, elle est
arrivée en retard. Pour rattraper le retard, elle ne prend pas le temps de mettre
ses chaussures de sécurité. Dans la matinée, elle va chercher dans le local de
déconditionnement un conteneur volumineux (1m x 0,5m x 0,75m pesant 10kg),
rempli des cuisses de poulets qui doivent être préparées à midi. Elle le transporte
à bout de bras. Madame R, autre employée, vient de sortir un plat du four.
Appelée par son « chef », elle oublie de refermer la porte du four. Madame G ne
voit pas la porte ouverte et la heurte. Déséquilibrée, elle lâche le conteneur, le
reçoit sur le pied et ressent une vive douleur.

On fait donc un arbre qui part du résultat : Mme G ressent une vive douleur au
niveau du pied. Puis on part en arrière pour voir ce qui a causé cette douleur : Le
conteneur tombe sur le pied de Mme G. Et Mme G. n'a pas ses chaussures de
sécurité. On complète chaque branche avec la raison. Donc avant les chaussures,
on peut mettre : Mme G. est arrivée en retard et juste avant : il y a eu un
[141]

embouteillage... Ces arbres permettent de repérer tous les éléments objectifs.


Ensuite, on regarde ou on pourrait couper l'enchainement pour ne plus que ça se
reproduise. Par exemple, on peut changer la façon dont on transporte les charges
lourdes, on peut réaménager l'espace de travail pour que le four ne soit plus dans
le chemin, rappeler les consignes de sécurité. On fait une liste des choses à faire,
une estimation financière et une étude de faisabilité puis on choisit en fonction
des priorités.

Dans les conceptions sociocognitives de l‘accident de travail, on peut noter les


explications naïves des accidents et l‘étude des biais d‘attribution causale.

Explication naïve des accidents (Kouabenan) : les individus ont besoin de


comprendre, d‘expliquer la survenance de l‘accident en tant qu‘événement
regrettable, dommageable et inhabituel. Le point de vue du travailleur complète
donc l‘analyse par les experts des accidents. Les attributions des travailleurs ont
donc une incidence sur la manière dont ils appréhendent leur travail et se
comportent face aux risques.

Étude des biais d’attribution causale : selon que l'accident sera attribué à des
faits internes ou externes à l'individu ou à la malchance, la perception des
risques sera différente. Les travailleurs auront moins tendance à changer de
comportement s'il attribue les causes de l'accident à des faits internes à la
personne. L'attribution causale est influencée par les caractéristiques de
l‘accident (grave/bénin), les caractéristiques de la victime (collègue/niveau
hiérarchique) et les circonstances de l‘accident.

5.2. L'étude des Risques

L‘accident est associé à la sécurité/ non-sécurité et à des facteurs de risque. « Un


facteur de risque est tout événement ou élément qui intervient dans la
production (survenance) d‘un accident » (Leplat, 2003). En soi, le risque est la
probabilité qu‘un évènement ou situation entraîne des conséquences non
souhaitées dans des conditions déterminées (risque de…, risque pour…). En
d‘autres termes, le risque est la probabilité de l‘évènement plus la probabilité de
l‘accident si l‘évènement survient.

Quant au danger, il est un évènement ou situation susceptible d‘entraîner des


dommages.

La fiabilité F(t) d‘un élément dans des conditions de fonctionnement définies


est la probabilité que cet élément ne tombe pas en panne durant un intervalle de
[142]

temps donné (0,t) (Faverge, 1970). Il y a, entre autres, la fiabilité d‘une machine
et la fiabilité humaine.

La fiabilité d'une machine est mesurée par sa capacité à ne pas tomber en


panne pendant un temps donné. On fait des tests sur l'appareillage.

La fiabilite humaine se définit comme la probabilité qu‘un individu effectue


avec succès la mission qu‘il doit accomplir, pendant une duree determinee et
dans des conditions definies (Neboit, Leplat).

L’erreur humaine constitue la mesure de la fiabilité humaine. L‘étude des


erreurs est associée à l‘étude des accidents et des incidents (accidents sans
conséquences dommageables) et au développement d‘une politique de
prévention. L‘erreur doit être analysée non seulement sous l‘angle de ses
conséquences sur le système ou comme un écart à une procédure écrite mais
comme le symptôme d‘un mauvais couplage opérateur-tâche (Neboit, 1990, cf.
Leplat).

La fiabilité est la capacité d‘avoir les moyens (cognitifs et organisationnels) de


réaliser sa tâche en sécurité et de façon efficace et, en relation avec la tolérance
du système, de récupérer une erreur ou un incident éventuels (De La Garza&
Fadier, 2004). Le système doit permettre à l'individu de récupérer ses erreurs.

Il y a une évolution des études sur les erreurs et la fiabilité car les exigences
sont de plus en plus grandes par rapport à la fiabilité des systèmes suite à
l'évolution technologique. L'exigence augmente aussi suite à des sujets
d‘actualités : Accident de Three-Miles-Island (1979); sécurité routière ;
aviation ; accident Seveso (1976)…
La maitrise des risques repose sur la connaissance des risques (identification et
évaluation) et la réduction des risques.

Du fait de la dualité des effets des activités risquées qui peuvent être positifs ou
négatifs, le risque est évalué tantôt comme tolérable (on accepte la présence du
risque) ou intolérable, gérable ou ingérable, bénéfique (quel est le gain?) ou
dommageable.

La notion de risque acceptable est une évaluation du rapport entre coût des
mesures de protection et prévention et coût des dégâts. Les trois dimensions du
risque sont la gravité, de la fréquence et du dommage possible. Par exemple,
avec la présence du nuage de cendre, était-ce tolérable de faire voler les avions?
Il y a un équilibre à avoir et ce n'est pas facile de savoir si on a pris la bonne
décision.
[143]

D‘après Kouabenan (2005), au centre des processus d'évaluation et de


construction du risque, du fait de l'incertitude et de la complexité des situations à
risque, les croyances et les processus inféréntiels occupent une place importante.
Leur connaissance et leur prise en compte deviennent donc incontournables dans
le management de la sécurité (résultat bonne articulation fiabilité humaine et
fiabilité technique).

5.2.1. Le risque: un construit cognitif et un construit social

L'évaluation ou la perception du risque varie suivant les époques, les générations


et les épreuves de la vie. L'appréciation du caractère risqué ou non des situations
dépend des individus, des groupes, des circonstances. Tous les risques ne sont
pas perçus ou redoutés de la même manière d'un individu à l'autre, ni d'une
communauté à l'autre. Un risque acceptable pour un groupe ne l'est pas
forcément pour un autre. Un risque acceptable aujourd'hui peut ne pas
(nécessairement) l'être demain.

L'acceptabilité du risque évolue selon différents paramètres : évolution des


connaissances scientifiques, de la législation, des mentalités, position et
responsabilités dans l'organisation et par rapport au risque, expériences, degré
d'exposition, valeurs, croyances, profession exercée, etc.

Il y a parfois dénégation du risque dans certaines corporations


particulièrement exposées : construction, sidérurgie, chimie, sports
acrobatiques, etc. Le seuil de perception ou d‘acceptation du risque élevé ; « la
prise de risque fait partie du métier ».

Il existe un certain nombre de biais perceptifs susceptibles de générer des


attitudes défensives et de provoquer des attitudes négatives vis-à-vis de la
sécurité. Il peut y avoir des illusions positives : une vision positive qui empêche
les personnes de réaliser qu‘elles sont aussi vulnérables qu‘autrui et les amènent
parfois à prendre des risques appréciables. Il y a aussi le biais de supériorité ou
de sur-confiance : la plupart des personnes, lorsqu‘elles se comparent aux autres,
s‘estiment meilleures, plus habiles ou plus aptes à faire face aux situations,
particulièrement face aux risques. Et enfin, on parle aussi d'optimisme
comparatif et l’illusion de contrôle : certaines personnes entretiennent
l‘illusion qu‘elles pourront contrôler les situations dangereuses ou éviter les
événements fâcheux, plus qu‘autrui (Kouabenan et al., 2006). Cette impression
de ne pas être concerné augmente avec l'affichage de statistique sur les
accidents. Les gens ne se sentent pas concernés.
[144]

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION ....................................................................................................................................... 1
CHAPITRE 1 : CONSIDERATIONS GENERALES .......................................................................................... 3
Section 1 : Le Travail ............................................................................................................................ 3
1.1. Qui travaille? Qu'entend-on par travail?.................................................................................. 3
1.2. Historique et évolution de la notion du travail ........................................................................ 3
1.3. Valeurs et place du travail dans la vie .............................................................................................. 4
1.4 Centralité relative et absolue du travail ............................................................................................ 8
1.5. Définitions du travail ........................................................................................................................ 9
1.6. Typologie des formes de travail ..................................................................................................... 11
Section 2 : Psychologie du travail et diversité d’expressions ................................................................ 12
2.1. Introduction ................................................................................................................................ 12
2.2. La psychologie industrielle ..................................................................................................... 12
2.4. La psychologie du travail ................................................................................................................ 13
2.5. La psychologie du travail et des organisations ............................................................................... 14
Section 3. Genèse de la psychologie du travail ..................................................................................... 15
3.1. Le XIX siècle et les relations humaines ........................................................................................... 17
3.2. Prémices d’une réaction humanitaire ............................................................................................ 18
3.3. Apparition de l’organisation scientifique du travail (O.S.T) et le facteur humain ......................... 19
3.4. Reconnaissance de l’importance capitale du facteur humain dans l’industrie.............................. 26
Section 4. Mutations récentes du monde du travail ............................................................................. 33
Section 5. Finalités, modalités et domaines de la psychologie du travail ............................................. 35
5.1. Finalités de la psychologie du travail.......................................................................................... 35
5.2. Modalités d’intervention de la psychologie du travail ................................................................... 37
5.3 Domaines et champs de recherche et d’intervention ..................................................................... 47
CHAPITRE 2. PSYCHOLOGIE DU PERSONNEL ......................................................................................... 54
Section 1. Introduction ...................................................................................................................... 54
1.1. Vision GRH, Capital humain .................................................................................................... 54
1.2. Les grandes phases tout au long de la carrière .............................................................................. 56
1.3 Profil du psychologue du personnel ................................................................................................ 57
Section 2. Le recrutement ..................................................................................................................... 58
2.1. Evolution historique ................................................................................................................... 58
2.2. Définition, objectifs et outils de recrutement ................................................................................ 59
[145]

2.3. Importance de recrutement ........................................................................................................... 60


2.4. Les étapes du recrutement ........................................................................................................ 60
2.5 Les caractéristiques de la fonction de «recruteur», typologie des recruteurs ............................... 62
Section 3. La sélection ........................................................................................................................... 63
3.1. Définition, moyens et but de la sélection .................................................................................. 63
3.2. Importance de la sélection. ............................................................................................................ 64
3.3. Facteurs influençant la sélection .................................................................................................... 65
3.4. La Présélection. .............................................................................................................................. 67
3.5. Les phases de la sélection. ......................................................................................................... 67
Figure n°5 : Modèle du processus de sélection de SEKIOU ................................................................... 70
3.6. Choix des critères de sélection ....................................................................................................... 71
3.7. Le pronostic ............................................................................................................................... 71
3.8. Les tests .......................................................................................................................................... 72
3.9. La recherche en sélection du personnel ........................................................................................ 82
Section 4. La socialisation organisationnelle ..................................................................................... 82
4.1 Accueil des nouveaux engagés ................................................................................................ 82
4.2. Orientations dans la socialisation organisationnelle...................................................................... 83
Section 5. L’évaluation au cours de la carrière..................................................................................... 85
5.1. La place de l'évaluation dans le contexte organisationnel......................................................... 85
5.2 Les objectifs et les enjeux de l'évaluation ............................................................................... 85
5.3 L'évaluation des performances ....................................................................................................... 86
5.4. Les méthodes d’évaluation ............................................................................................................ 87
5.5. Le processus d'évaluation .............................................................................................................. 89
5.6. Les biais, l'exactitude des appréciations .................................................................................... 89
5.7. Acceptabilité de l’évaluation .......................................................................................................... 90
Section 6. La formation ......................................................................................................................... 91
6.1. Les objectifs de la formation ...................................................................................................... 91
6.2. La mise en place d’actions de formation................................................................................ 91
6.3 La compétence ................................................................................................................................ 92
6.4. Les formes et styles d’apprentissage ............................................................................................. 94
CHAPITRE 3. RISQUES PSYCHOSOCIAUX ET SANTE PSYCHOLOGIQUE AU TRAVAIL ............................. 95
Section 1. Le stress au travail ............................................................................................................ 95
1.1. Introduction ............................................................................................................................ 95
1.2. L’approche physiologique du stress ............................................................................................... 96
[146]

1.3. L’approche personnologique .......................................................................................................... 97


1.4. L'approche environnementaliste ............................................................................................... 97
1.5. L’approche interactionniste du stress au travail ............................................................................ 98
1.6. L'approche transactionnelle ......................................................................................................... 100
1.7. Une synthèse avec accent sur le cognitif: le modèle du stress professionnel de Rascle et Bruchon
Bruchon-Schweitzer(1996). ................................................................................................................. 101
1.8. Origines du stress ..................................................................................................................... 101
1.9. Effets du stress ............................................................................................................................. 103
1.10. Gestion du stress ........................................................................................................................ 104
1.11. Législation et bien-être au travail............................................................................................... 105
2.1. Le BURNOUT ou épuisement professionnel................................................................................. 106
2.2. Violence au travail ........................................................................................................................ 107
2.3. Harcèlement moral au travail................................................................................................... 107
2.4. Harcèlement sexuel au travail ...................................................................................................... 108
CHAPITRE 4. ANALYSE DU TRAVAIL ..................................................................................................... 109
Section 1. Analyse du travail comme objet et méthode ................................................................. 109
1.1. Introduction .......................................................................................................................... 109
1.2. Bref historique .............................................................................................................................. 110
1.3. Les fondements de l’analyse du travail ........................................................................................ 112
1.4. Les modèles d’analyse du travail.................................................................................................. 117
1.5. L’analyse en tant que méthode .................................................................................................... 120
1.5.2. Les techniques de l’analyse du travail ....................................................................................... 121
Section 2. La structuration du travail .............................................................................................. 122
2.1. Les formes de spécialisation du poste de travail.................................................................. 122
2.2. Nouvelles formes de structuration............................................................................................... 122
2.3. Le modèle de production flexible : Toyotisme ......................................................................... 123
2.4. Les exigences de la flexibilité organisationnelle........................................................................... 123
CHAPITRE 5. LA PSYCHOLOGIE ERGONOMIQUE ................................................................................. 124
Section 1. L’ergonomie .................................................................................................................... 124
1.1. Définition .............................................................................................................................. 124
1.2. Un objet ergonomique? ............................................................................................................... 125
1.3. Approche ergonomique: caractéristiques .................................................................................... 126
1.4. Les démarches de l'ergonomie................................................................................................. 126
1.5 Ergonomie physique, cognitive, organisationnelle ....................................................................... 127
[147]

1.6. Développement de l’ergonomie .................................................................................................. 128


1.7. Domaines d’application ................................................................................................................ 128
Section 2. Psychologie ergonomique .............................................................................................. 129
2.1. Engineering psychology ........................................................................................................ 129
Section 3. Interface homme-machine ................................................................................................. 130
3.1. Automatisation et informatisation dans l’industrie ................................................................. 130
3.2. Ergonomie du matériel et des logiciels ........................................................................................ 130
3.3. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication ..................................... 131
3.4. L’interaction homme – ordinateur aujourd’hui ........................................................................... 132
Section 4. Étude de l’Interaction Homme-Ordinateur ........................................................................ 133
4.1. Évaluation des interfaces par les méthodes d’inspection ........................................................ 133
4.2. Étude de l’utilisabilité des interfaces ........................................................................................... 134
4.3. Étude de l’acceptation et l’appropriation des technologies ........................................................ 135
Section 5. Les risques professionnels .................................................................................................. 136
5.1. Les accidents du travail ............................................................................................................ 136
5.2. L'étude des Risques ...................................................................................................................... 141
TABLE DES MATIERES........................................................................................................................ 144

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