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le pourvoi formé par Patrick BALKANY, Isabelle BALKANY et Alexandre BALKANY, lequel a
cassé et annulé l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 27 mai 2020 en ses seules dispositions
relatives aux peines et aux intérêts civils, toutes autres dispositions étant expressément maintenues
et a renvoyé la cause et les parties devant la cour d’appel de Paris autrement composée pour qu’il
soit statué conformément à la loi et dans les limites de la cassation prononcée.
La cour précise qu’Alexandre BALKANY déclaré coupable et condamné par jugement du tribunal
correctionnel de Paris rendu le 18 octobre 2019, n’ayant interjeté appel que des dispositions civiles
et de la décision de non restitution du bien immobilier dénommé “moulin de Cossy” de cette
décision, la peine prononcée le concernant est définitive.
A partir du témoignage de Didier SCHULLER, ancien directeur général de l’office HLM, mettant
en cause son prédécesseur, Patrick BALKANY, une information a été ouverte contre ce dernier le 4
décembre 2013 du chef de blanchiment de fraude fiscale.
A la suite de quatre signalements de la cellule Tracfin des 2 mai, 9 juillet et 29 septembre 2014 et
30 juin 2016, l'information a été étendue, s'agissant des époux BALKANY et de leur fils Alexandre,
aux faits de :
- corruption passive par personne chargée d'une fonction publique (Patrick BALKANY),
- prise illégale d'intérêt par personne dépositaire de l'autorité publique et chargée d'une mission
de service public (Patrick BALKANY),
- blanchiment aggravé par le caractère habituel de fraude fiscale aggravée (Patrick BALKANY et
Isabelle BALKANY),
- blanchiment de fraude fiscale (Alexandre BALKANY),
ainsi que, par réquisitoire supplétif du 21 mai 2015, aux délits d'omissions déclaratives et
évaluations mensongères de patrimoine à la suite d'une dénonciation de la Haute autorité pour la
transparence de la vie publique (HATVP).
Les investigations entreprises ont mis en évidence que les époux BALKANY se sont constitués, au
fil des années, un important patrimoine mobilier et immobilier au travers de la commission de
plusieurs infractions.
Il a été établi que les fonds employés par la société BELEC pour ces acquisitions provenaient pour
partie de la fondation Frontenac dont Patrick BALKANY était bénéficiaire, représentée par la
société liechtensteinoise INDUSTRIE UND FINANZKONTOR ETABLISSEMENT (IFE).
Patrick BALKANY indiquait, en interrogatoire, avoir acheté le terrain sur lequel avait été
construite la villa Serena en 1989 et financé les travaux avec les avoirs que lui avait laissé son père
en Suisse.
Le compte bancaire de la société BELEC, ouvert à la LGT BANK au Liechtenstein, qui détenait la
copie du passeport de Patrick BALKANY ainsi qu’une déclaration de personne politiquement
exposée, a été crédité entre 2001 et 2004 par différentes sommes, dont le produit de la vente de la
Villa Serena diminué du montant des dettes fiscales de la société BELEC qui avait refusé de livrer à
l’administration le nom de son bénéficiaire économique. C’est depuis ce compte que les charges de
la villa Serena et les travaux de la villa Pamplemousse ont été payés. Il a également servi à
alimenter les comptes de sociétés écrans dont Patrick BALKANY était le bénéficiaire économique,
dont la société panaméenne HFM et à payer la société SEAWIND INVESTMENT
ESTABLISHMENT, chargée du suivi des travaux effectués dans la villa Pamplemousse.
Le même jour, la société HMF et tous les biens gérés par elle ont été donnés à la fondation BIELLA
créée le 8 août 2003 et domiciliée au Liechenstein, par acte signé de Patrick BALKANY. Patrick et
Isabelle BALKANY en étaient les deux bénéficiaires.
Le 20 décembre 2013, cette fondation a été mise en liquidation et ses biens ont été transférés à la
société des Seychelles UNICORN BUSINESS DEVELOPMENT SA (UNICORN) avec effet
immédiat.
Cette société, détenue par la société panaméenne MESWICK HOLDING, avait pour seul actif la
créance de 2.132.741 euros sur la société FWI qui lui avait été cédée par la fondation BIELLA afin
d'échapper aux nouvelles dispositions fiscales du Liechtenstein.
Après avoir nié durant l’information être au courant de l’existence de cette fondation et de son
actif, Patrick BALKANY a finalement admis en première instance être le bénéficiaire économique
de l’ensemble de ces structures mais être resté dans l'ignorance de la réalité des montages opérés.
Isabelle BALKANY était l’unique bénéficiaire économique de la société FWI jusqu’au 8 juillet
2004, date à laquelle, aux termes d’une décision du conseil d’administration Patrick BALKANY
devenait également bénéficiaire économique de FWI.
Après avoir soutenu n’être avec son époux que locataires de la villa Pamplemousse, Isabelle
BALKANY excipait de ce que cette villa aurait été acquise et entretenue grâce à une somme de 10
millions de francs qui lui aurait été remise par ses frères et soeurs en 1995 lesquels lui auraient
demandé expressément qu’il n’y ait aucun lien fiscal avec la France qu’ils avaient pourtant quittée
depuis plus de 20 ans.
L'examen des comptes de Patrick BALKANY par Tracfin a montré qu'il payait les assurances
«multi-risques habitation» pour la villa Pamplemousse et que les époux BALKANY effectuaient
des séjours fréquents et réguliers à Saint-Martin.
La villa a été mise en location et gérée par l'agence CARIMO, qui adressait les loyers aux époux
BALKANY, lesquels bénéficiaient également de la villa, et les frais d’entretien et les travaux à la
société FWI qui les prenaient en charge.
Les époux BALKANY pouvaient ainsi bénéficier de cette villa sans que les dépenses d’entretien y
afférant n’apparaissent sur leurs propres comptes bancaires.
Le 22 mars 2011, le compte de la société FWI, ouvert auprès de la Neue Bank au Liechtenstein a
été crédité de la somme de 259 553 francs suisses en provenance de la fondation suisse Springpark,
cette somme étant, selon Isabelle BALKANY, le produit de la vente d’un bijou de famille. Elle
indiquait avoir, sur demande de son frère, procédé de la même manière que lors de la réception de
la somme de 10 millions de francs.
La SCI Dar Gyucy, dont le nom correspondrait à la contraction des prénoms des deux petites filles
des époux BALKANY, Gyula et Lucy, a été créée le 20 juillet 2009 par deux actionnaires, dont la
société panaméenne HAYRIDGE INVESTMENTS CORPORATION (HAYRIDGE), laquelle
détenait 99% des parts.
Mr ANGST indiquait que tant Jean-Pierre AUBRY que son conseil, Arnaud CLAUDE, lui avaient
avoué que Patrick BALKANY était l’ayant droit des sociétés HAYRIDGE et HIMOLA.
Les investigations ont montré que Jean-Pierre AUBRY exerçait les fonctions de directeur général de
la SEMARELP, société d'économie mixte en charge de l'aménagement de la ville de Levallois-
Perret (présidée par Patrick BALKANY) et était également gérant de la société SCRIM (société de
promotion immobilière), filiale de la SEMARELP à 100 %.
Jean-Pierre AUBRY déclarait ne pas être le propriétaire de la villa marocaine et n’avoir rien retiré
de cette opération.
Une note Tracfin du 29 septembre 2014 révélait que, sur la somme de 5 millions de dollars virée
sur le compte bancaire d'HIMOLA, la somme de 3,6 millions de dollars (soit 2,5 millions d'euros)
représentant un “dessous de table”, avait été virée sur le compte du vendeur de la villa Dar Gyucy,
le 6 janvier 2009, soit deux jours avant l'achat devant notaire de la villa par la SCI Dar Gyucy.
Par ailleurs, le compte de la société HIMOLA était utilisé pour payer l’ameublement de la villa Dar
Gyucy, notamment par Isabelle BALKANY dès 2009, mais également les honoraires des différents
intervenants dans la vente.
L’exploitation des comptes bancaires des époux BALKANY, attestant de nombreuses dépenses à
Marrakech et le témoignage du majordome de la villa Dar Guycy ont confirmé la présence régulière
des époux BALKANY dans la maison, ce dernier rapportant que personne ne pouvait venir sans
eux.
Les époux BALKANY ont toujours nié être les propriétaires de la villa Dar Gyucy soutenant que
cette villa était en réalité louée par leur fils Alexandre BALKANY, lequel produisait deux contrats
de bail chacun pour trois ans, l'un en date du 16 mars 2011, l'autre du 24 avril 2014, signés par
Mme EULOGE représentant la SCI Dar Gyucy et prévoyant un loyer mensuel de 45.000 dirhams
(2011) puis 30.000 dirhams (2014) et précisait que la réduction du loyer était justifiée par le fait
qu’il avait pris à sa charge, le salaire des 5 employés de la villa, qu’il disait payer en espèces sans
établir de fiches de paie.
Les perquisitions effectuées dans la villa Dar Gyucy ont permis de saisir de nombreux documents et
objets appartenant aux époux BALKANY alors qu’aucun effet personnel de leur fils n'était
découvert.
La cour a retenu que les fraudes fiscales dont les produits directs ou indirects ont été blanchis par
les époux BALKANY résultaient de la non-déclaration des sommes perçues et déposées sur des
comptes bancaires détenus à l’étranger, eux-mêmes non déclarés.
La cour, s’agissant de Patrick BALKANY, a retenu que les investigations avaient mis en évidence
que contrairement à ses allégations, les fonds ayant servi à l’acquisition de la villa Serena n’avaient
pas une origine exclusivement successorale et que de plus il ne justifiait aucunement de l’existence
de fonds détenus par son père en Suisse de sorte que l’ensemble des fonds blanchis dont il a disposé
depuis 1989 avaient une origine presque entièrement indéterminée. Elle retenait qu’il en était de
même pour les fonds reçus sur le compte de la société BELEC dès 2001 pour un montant total de
622 000 € avec la mention “héritage de ma mère”et 260 000 dollars.
S’agissant d’Isabelle BALKANY, la cour retenait qu’elle reconnaissait ne pas avoir déclaré les
sommes de 10 millions de francs que lui avaient versés ses frères et soeurs sur le compte de la
société FWI dont une partie lui avait servi à acquérir la villa Pamplemousse et celle de 259 553
francs suisses provenant de la vente d’un bijou de famille. La cour soulignait que son frère
démentait avoir choisi le compte sur lequel ces fonds devaient être versés.
La cour relevait encore que l’absence de déclaration des sommes perçues de la location de la villa
Pamplemousse, dont les époux BALKANY avaient à minima la libre disposition, constituait
également une fraude fiscale tout comme celle de la somme de 5 millions de dollars perçue de Mr
FORREST et celles ayant abondé le compte ouvert à l’Arab Bank au nom de la SCI Dar Gyucy,
précisant qu’il résultait de l’arrêt définitif rendu le 4 mars 2020 par la cour d’appel de Paris que les
époux BALKANY ont été déclarés coupables de fraude fiscale pour avoir notamment dissimulé à
l’administration fiscale être les bénéficiaires économiques des sociétés HAYRIDGE et HIMOLA et
être propriétaires de la villa Dar Gyucy à Marrakech.
La cour a retenu que l’information avait mis en évidence l’existence de sociétés écrans administrées
par des prêtes-noms, dont les époux BALKANY étaient les bénéficiaires économiques uniques,
sociétés, qui à l’exception d’UNICORN, étaient toutes détentrices de comptes bancaires non
déclarés leur permettant de dissimuler des fonds. Elle retraçait aussi les flux de devises enregistrés
sur ces différents comptes et les transferts de fonds opérés entre les comptes des différentes sociétés
écrans, destinés à masquer que les époux BALKANY en étaient les bénéficiaires, leur permettant
ainsi d’acquérir la vila Dar Gyucy et d’améliorer et entretenir leurs biens immobiliers et notamment
la villa Pamplemousse. La cour a retenu que ces agissements constituaient des opérations de
placement et conversion parfaitement occultes, cachées à l’administration fiscale dans le seul intérêt
des époux BALKANY.
La cour a retenu le caractère habituel des faits de blanchiment et a déclaré Patrick et Isabelle
BALKANY coupables des faits de blanchiment habituel de fraude fiscale considérant qu’ils
constituaient un couple au sens fiscal et qu’ils avaient eu le même intérêt dans la dissimulation des
fonds.
Ce délit est lié au financement de la villa Dar Gyucy en 2009 dont le prix officiel de cession a été
effectué par 3 virements provenant de deux sociétés égyptiennes : AJWA FOOD INDUSTRY Co.
Egypt (AJWA) et la société de courtage MASHREQ TRADE, le président de la société AJWA,
sheikh Mohamed Bin Issa AL JABER, ayant entretenu une relation d'affaires avec la ville de
Levallois-Perret, au travers de sa société MBI International and Partners.
Les investigations menées sur cette relation d’affaires mettaient en évidence que le 18 décembre
2006, la société d'économie mixte pour l'aménagement, la rénovation et l'équipement de Levallois-
Perret, la SEMARELP, gérée par Jean-Pierre AUBRY, a été désignée en qualité d'aménageur de la
ZAC du Front de Seine par la commune de Levallois-Perret en vue de la construction de deux tours
susceptibles d'accueillir des bureaux, des commerces et des hôtels.
Dans cette optique, la SEMARELP a créé la société SCRIM, dont Jean-Pierre AUBRY est devenu
gérant et dont l'objet social était l'activité de promoteur-constructeur, la société SCRIM ayant deux
filiales : la société Tours de Levallois, bénéficiaire d’une promesse de vente de plusieurs parcelles
de la ZAC et la société Hôtel Tours de Levallois, créée en vue de l’activité d’exploitation hôtelière.
Des négociations ont été engagées avec Mohamed AL JABER, investisseur important dans le milieu
de l’hôtellerie, en vue du rachat de ces deux filiales. Ces négociations aboutissaient à la signature
d’une promesse de cession d'actions le 30 juin 2008 entre la société JJW IMMOBILIER, détenue
par Mohamed AL JABER, la société SCRIM et la SEMARELP, aux termes de laquelle la société
JJW IMMOBILIER devait racheter la société Tours de Levallois pour 6.196.000 euros et la société
Hôtel Tours de Levallois pour 200.000 euros.
Par ailleurs, le compte courant de la société SCRIM dans la société Tours de Levallois était
également cédé pour un montant de 13.150.000 euros.
L’enquête révélait l’existence de liens entre Mohamed AL JABER et les sociétés égyptiennes AJWA
et MARSHREQ TRADE dont émanaient les virements ayant financé le prix de vente officiel de la
Villa Dar Guycy.
La cour a retenu que Patrick BALKANY, en sa qualité de maire de la commune de Levallois-
Perret, avait la charge de surveiller l’opération “Tours de Levallois” dans laquelle la SEMARELP,
dont il était le président, et la SCRIM ont confié au groupe MBI dirigé par Mohamed AL JABER la
construction des tours. Elle retient que les investigations et l’information judiciaire ont mis en
évidence que Patrick BALKANY a reçu et conservé des intérêts matériels de l’opération entreprise
puisque Mohamed AL JABER, par l’intermédiaire d’une société de son groupe a participé au
paiement d’une partie de la villa “Dar Guycy” et a en outre mis à la disposition de Patrick
BALKANY son jet privé, pour lui-même, sa famille et ses amis. La cour précise que compte tenu
des fonctions qu’il exerçait, Patrick BALKANY ne pouvait ignorer que son comportement était
répréhensible de sorte qu’il s’est rendu coupable du délit de prise illégale d’intérêt par personne
chargée d’une mission de service public et par personne dépositaire de l’autorité publique
Le 13 mars 1997, les époux BALKANY ont donné la nue-propriété de leur résidence principale, le
Moulin de Cossy, à leurs enfants, Vanessa et Alexandre, pour la somme de 4 880 000 francs
(743.951 euros), en conservant l'usufruit de ce bien, évalué à la somme de 1 952 000 francs
(297.580 euros).
Patrick BALKANY a adressé en janvier 2014 en qualité de député une déclaration de situation
patrimoniale à la HATVP dans laquelle il n’a déclaré, au titre des immeubles bâtis et non bâtis, que
la moitié de l'usufruit du Moulin de Giverny pour un montant de 148.790 euros, en se référant à la
valeur figurant dans l'acte de donation du 13 mars 1997 et s’est abstenu de déclarer un quelconque
bien ou compte détenu à l'étranger.
Les biens immobiliers et avoirs du couple à l’étranger ont été ci-avant décrits.
S’agissant du domicile des intéressés sis à Giverny, l’administration fiscale, se fondant sur les
transactions réalisées entre 2008 et 2013 sur des biens immobiliers de valeur équivalente dans la
région, l’a évalué pour chaque année et déterminé un prix allant de 4.580.000 euros en 2010 (soit
3.206.000 euros après abattement lié à la résidence principale) à 4.795.000 euros en 2013 (soit
3.356.000 euros après abattement lié à la résidence principale) alors que les intéressés ont fourni
une estimation chiffrée à 1.577.000 euros en 2014.
En outre, les enquêteurs ont établi un état descriptif des meubles et bijoux découverts au Moulin de
Cossy, dont la valeur globale a été estimée par des commissaires-priseurs à 542.880 euros
Personnalité:
Il a été placé sous contrôle judiciaire pendant l’information. Il a été détenu ensuite du jugement
rendu le 13 septembre 2019 par le tribunal correctionnel de Paris qui l’a condamné et a décerné
mandat de dépôt à son encontre. Il a été libéré pour raison de santé le 12 février 2020.
Isabelle BALKANY est âgée de 75 ans. Elle est mère de deux enfants. Aujourd’hui retraitée, elle a
travaillé comme directrice de la communication chez Europe 1 avant d’exercer les fonctions de
vice-présidente du conseil général des Hauts de Seine en charge de la vie scolaire entre 1988 et
2011 et de première adjointe à la mairie de Levallois Perret du 19 mars 2001 au 5 mars 2020. Elle a
été chevalier de la légion d’honneur et officier des palmes académiques.
Isabelle BALKANY a été placée sous contrôle judiciaire pendant l’information judiciaire avec
notamment obligation de verser un cautionnement d’un million d’euros avant le 30 août 2014,
obligation à laquelle elle a satisfait.
Sur appels de Patrick BALKANY, Isabelle BALKANY(leurs appels portant sur l’entier dispositif
excepté les relaxes, s’agissant de Patrick BALKANY), d’Alexandre BALKANY(qui a interjeté
appel des dispositions civiles et sur le rejet de sa demande de restitution du bien immobilier
“Moulin de Cossy”), de l’Etat français, du ministère public et de Vanessa BALKANY, partie
intervenante (son appel portant sur la décision de non-restitution), la Cour d’appel de Paris s’est
prononcée par arrêt du 27 avril 2020.
Elle a:
-déclaré recevables les appels interjetés à titre principal par Isabelle BALKANY, Patrick
BALKANY, Alexandre BALKANY et à titre incident par l’Etat français, partie civile et le
ministère public
-constaté que le ministère public se désistait de son appel incident sur les infractions de corruption
et blanchiment de corruption
-déclaré recevable l’intervention de Vanessa BALKANY pour demander la restitution de sa quote-
part de nue-propriété indivise portant sur le bien immobilier “Moulin de Cossy”
-confirmé le jugement sur la déclaration de culpabilité d’Isabelle BALKANY des chefs de
blanchiment de fraude fiscale commis de façon habituelle et de déclaration mensongère ou
incomplète de situation patrimoniale à la HATVP par une personne titulaire ou délégataire d’une
fonction exécutive locale
-confirmé le jugement sur la déclaration de culpabilité de Patrick BALKANY des chefs de
blanchiment de fraude fiscale commis de façon habituelle et de déclaration mensongère ou
incomplète de situation patrimoniale à la HATVP par un parlementaire
-infirmé sur la relaxe prononcée du chef de prise illégale d’intérêt et déclaré Patrick BALKANY
coupable de prise illégale d’intérêt par personne chargée d’une mission de service public et par
personne dépositaire de l’autorité publique
et s’est prononcée sur les peines ainsi que sur les demandes formées par l’État français partie civile.
Pourvoi en cassation était formé contre cet arrêt par Isabelle BALKANY, Patrick BALKANY et
Alexandre BALKANY.
Par arrêt du 30 juin 2021, la chambre criminelle de la cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt
rendu par la cour d’appel de Paris le 27 mai 2020 en ses seules dispositions relatives aux peines et
aux intérêts civils, toutes autres dispositions étant expressément maintenues et renvoyé la cause et
les parties devant la cour d’appel de Paris autrement composée pour qu’il soit à nouveau statué
conformément à la loi dans les limites de la cassation ainsi prononcée.
Le 21 octobre 2022, Arnaud CLAUDE et Jean-Pierre AUBRY ont interjeté appel du jugement
rendu le 18 octobre 2019, précisant que leurs appels ne portaient que sur les dispositions civiles. Ils
ont également indiqué intervenir volontairement à la procédure.
DEVANT LA COUR,
Patrick BALKANY comparaît assisté de ses conseils. Il sera statué par arrêt contradictoire à son
encontre. Il fait état de ses nombreux problèmes de santé, des conditions très difficiles de sa
détention réalisée à l’isolement et alors que son épouse était hospitalisée, de l’impossibilité pour lui
de travailler du fait des décisions de justice intervenues et des difficultés psychologiques qui en sont
résultées. Il demande la confusion des peines indiquant que son épouse et lui sont à bout.
Isabelle BALKANY ne comparaît pas mais est représentée par ses avocats. Il sera également statué
par arrêt contradictoire à son encontre.
Alexandre BALKANY ne comparaît pas mais est représenté par ses avocats. Il sera statué par arrêt
contradictoire à son encontre.
Vanessa BALKANY ne comparaît pas mais est représentée par son avocat. Il sera également statué
par arrêt contradictoire à son encontre.
Jean-Pierre AUBRY ne comparaît pas mais est représentée par son avocat. Il sera également statué
par arrêt contradictoire à son encontre.
Arnaud CLAUDE ne comparaît pas mais est représentée par son avocat. Il sera également statué
par arrêt contradictoire à son encontre.
Par voie de conclusions régulièrement déposées à l’audience, l’Etat français conclut à la non-
admission des appels formés hors délais et à l’irrecevabilité des demandes formées par Arnaud
CLAUDE et Jean-Pierre AUBRY qui n’ont pas relevé appel du jugement rendu le 18 octobre 2019
les condamnant. L’Etat français relève que la chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé
à de nombreuses reprises et encore le 21 avril 2020 que les juges saisis de l’appel principal du
prévenu et de l’appel incident de la partie civile, ne peuvent statuer que dans les limites de leur
saisine et ne peuvent réviser la condamnation prononcée en première instance contre des co-
prévenus dont la situation ne leur est pas soumise. L’Etat français ajoute que la Cour de cassation
n’a pas entendu faire application en l’espèce des dispositions de l’article 612-1 du code de
procédure pénale lesquelles lui permettent, lorsque l’ordre public ou une bonne administration de la
justice le commande, d’ordonner que l’annulation qu’elle prononce aura effet à l’égard des parties
qui ne se sont pas pourvues devant elle. L’Etat français indique que Jean-Pierre AUBRY et Arnaud
CLAUDE n’ont pas relevé appel de la condamnation prononcée à leur encontre par le tribunal
correctionnel de sorte que la situation qu’ils dénoncent existait déjà lorsque la cour a statué par son
arrêt du 27 mai 2020. L’Etat français soutient que cette situation ne porte pas atteinte aux principes
du procès équitable en ce qu’ils ont choisi de ne pas former de recours. Il conteste que l’autorité de
la chose jugée s’attachant à une condamnation définitive à des dommages et intérêts puisse être
constitutive d’une atteinte disproportionnée au droit de propriété dès lors que cette atteinte est
inhérente à la nature même d’une telle condamnation.
Par voie de conclusions aux fins de restitution régulièrement déposées à l’audience, le conseil
d’Alexandre BALKANY demande à la cour :
-de juger régulier et effectif l’acte de donation-partage régularisé le 13 mars 1997 par les époux
BALKANY au profit de leurs enfants
-de dire inapplicable la peine de confiscation du bien Moulin de Cossy prononcée à l’encontre de
Patrick et Isabelle BALKANY comme inapplicable en raison du principe de non-rétroactivité des
lois pénales plus sévères
-de juger que la clause d’inaliénabilité insérée dans l’acte de donation fait obstacle à la confiscation
du bien à titre de peine complémentaire à l’encontre de Patrick et Isabelle BALKANY
-de juger que le démembrement du droit de propriété opéré sur ce bien fait obstacle à la
confiscation des droits des nus-propriétaires sur ledit bien
-de juger que la nature indivise de la nue-propriété dudit bien fait obstacle à la confiscation des
droits des nus-propriétaires
-d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande de restitution formée par
Alexandre BALKANY
-statuant à nouveau, ordonner la restitution à Alexandre BALKANY de sa quote-part indivise de la
nue-propriété de ce bien
-A titre subsidiaire, juger que la confiscation du Moulin de Cossy porte une atteinte
disproportionnée aux droits d’Alexandre BALKANY
-d’infirmer en conséquence le jugement entrepris et ordonner la restitution à Alexandre BALKANY
de sa quote-part indivise de la nue-propriété de ce bien.
Le conseil d’Alexandre BALKANY soutient que la donation-partage intervenue est licite, régulière
et effective, que toute action en contestation est prescrite de sorte qu’elle ne peut être écartée.
Il rappelle que la législation en vigueur au moment des faits, seule applicable en l’espèce, le délit de
blanchiment étant considéré comme une infraction instantanée et donc réputée consommée ici au
1er janvier 2007, ne prévoyait qu’une peine de confiscation portant sur les biens dont le condamné
était propriétaire de sorte que la confiscation de la pleine propriété du bien ne peut être ordonnée et
ne pourrait porter que sur les droits que les époux BALKANY détiennent en qualité d’usufruitiers.
A titre subsidiaire, il fait état de ce que la nature indivise de la nue-propriété fait obstacle à la
confiscation des droits des nus-propriétaires sur ce bien, la saisie d’une part indivise n’étant pas
possible dans la mesure où elle se heurte au droit dont dispose chaque indivisaire sur l’ensemble du
bien indivis et non sur une portion déterminée de la chose.
Il excipe encore de l’atteinte disproportionnée portée aux droits d’Alexandre BALKANY, nue-
propriétaire de bonne foi, par la mesure de confiscation laquelle le sanctionnerait alors même qu’il
n’a pas été condamné à une peine de confiscation et le priverait de ses droits sur le seul bien sur
lequel il dispose d’un droit de propriété et ce d’autant qu’il s’agit de la résidence familiale depuis
des années. Il ajoute qu’à supposer applicable la loi n°2012-409 du 27 mars 2012, ce qu’il conteste,
la confiscation des biens démembrés relève d’une interprétation extensive des articles 131-21 alinéa
6 et 324-7 12° du code pénal comme n’étant pas textuellement prévue et portant atteinte au principe
de l’interprétation stricte de la loi pénale.
SUR CE
LA COUR,
En la forme
Les appels interjetés à titre principal par Patrick BALKANY, Isabelle BALKANY, Alexandre
BALKANY ainsi que les appels incidents du ministère public et de l’Etat français ayant été
régulièrement reçus par la précédente formation dont la décision n’a pas été censurée sur ce point,
de même que l’intervention volontaire de Vanessa BALKANY, il n’y a pas lieu de les recevoir à
nouveau, ceux-ci étant en tout état de cause recevables.
L’arrêt rendu par la Cour de cassation saisie des pourvois formés par Patrick BALKANY, Isabelle
BALKANY et Alexandre BALKANY cantonne le périmètre de la cour de renvoi aux seules
dispositions afférentes aux peines et intérêts civils prononcées par l’arrêt rendu le 27 avril 2020 par
la cour d’appel de Paris autrement composée. La cour précise s’agissant d’Alexandre BALKANY,
que celui-ci n’ayant interjeté appel que des dispositions civiles du jugement rendu le 18 octobre
2019 qui l’a reconnu coupable et condamné du chef de blanchiment, la peine prononcée à son
encontre par le tribunal correctionnel dans le jugement du 18 octobre 2019 est définitive.
S’agissant des appels interjetés par Jean-Pierre AUBRY et Arnaud CLEMENT le 21 octobre 2022 à
l’encontre des dispositions du jugement rendu contradictoirement à leur encontre par le tribunal
correctionnel de Paris le 18 octobre 2019, il convient de relever que ceux-ci ont été formés hors
délais par application des dispositions de l’article 498 du code de procédure pénale.
La cour rappelle en outre que les règles applicables en matière pénale sont celles prévues par le
code de procédure pénale et que l’article 509 dudit code énonce que l’affaire est dévolue à la cour
d’appel dans les limites fixées par l’acte d’appel et par la qualité de l’appelant ainsi qu’il est dit à
l’article 515 lequel prévoit les effets des appels des différentes parties.
Ainsi, au visa de ces textes, la cour, ne peut remettre en cause les dispositions d’un jugement ayant
acquis force de chose jugée, l’appel d’un prévenu ne pouvant en aucun cas bénéficier à ses co-
prévenus non appelants même en cas de condamnation solidaire.
En l’espèce, Jean-Pierre AUBRY et Arnaud CLEMENT n’ont pas interjeté appel du jugement rendu
le 18 octobre 2019 lequel est définitif à leur encontre en toutes ses dispositions, l’appel de la partie
civile ne permettant aucunement de le modifier les concernant dans un sens défavorable à cette
dernière.
La cour retient encore que les dispositions de l’article 6§1 de la convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales énonçant le droit pour toute
personne à un procès équitable et les dispositions de l’article préliminaire du code de procédure
pénale qui consacre le droit à un procès équitable, contradictoire et préservant l’équilibre des droits
des parties ne peuvent recevoir application en l’espèce, Jean-Pierre AUBRY et Arnaud CLEMENT
ayant délibérément et en toute connaissance de cause et alors même qu’ils étaient depuis le début de
l’information assistés de conseils, fait choix de ne pas interjeter appel et de passer condamnation de
sorte qu’ils ne peuvent désormais valablement exciper d’une quelconque atteinte à leurs droits.
La cour relève d’ailleurs que la chambre criminelle n’a pas entendu faire application des
dispositions de l’article 612-1 du code de procédure pénale lequel lui permet, lorsque l’intérêt de
l’ordre public ou une bonne administration de la justice le commande, d’ordonner que l’annulation
qu’elle prononce produise effet à l’égard des parties qui ne se sont pas pourvues.
Au vu de l’ensemble de ces éléments les appels formés par Jean-Pierre AUBRY et Arnaud
CLEMENT sont rejetés.
S’agissant de leur intervention volontaire, la cour retient que si l’article 459 du code de procédure
pénale prévoit que le prévenu, les autres parties et leurs avocats peuvent déposer des conclusions,
Jean-Pierre AUBRY et Arnaud CLEMENT ne peuvent valablement exciper de la qualité de partie à
la présente procédure ayant été définitivement condamnés dans le cadre de cette affaire par le
tribunal correctionnel de Paris de sorte qu’ils n’ont plus qualité pour agir à quelque titre que ce soit.
En effet l’admission de leur intervention volontaire conduirait à remettre en cause l’autorité de la
chose jugée.
Pour les raisons sus-énoncées, la demande de Jean-Pierre AUBRY et Arnaud CLEMENT tendant à
ce que l’arrêt à intervenir soit déclaré par eux opposable à l’Etat français ne saurait prospérer.
Par application des dispositions des articles 130-1, 132-1 et 132-24 du code pénal, la juridiction
prononce les peines et fixe leur régime en fonction de la gravité et des circonstances de l’infraction
comme de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur. La nature, le quantum et le
régime des peines prononcées sont fixées en tenant compte des circonstances de l’infraction et de la
personnalité de son auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale et ce de manière à
concilier la protection effective de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime
avec la nécessité de favoriser l’insertion ou la réinsertion du condamné et de prévenir la
commission de nouvelles infractions.
Patrick BALKANY
Patrick BALKANY a été déclaré coupable des chefs de blanchiment de fraude fiscale commis de
façon habituelle, de prise illégale d’intérêts par personne chargée d’une mission de service public et
de déclaration mensongère ou incomplète de situation patrimoniale à la HATVP par un
parlementaire.
Ces faits sont d’une particulière gravité en regard de leur durée, près de sept années, des sommes
considérables sur lesquelles ils portent, et de la sophistication des procédés utilisés pour y parvenir
à savoir le recours à des fiduciaires suisses qui ont créé des sociétés offshores, détentrices de
comptes bancaires sur lesquels des flux de devises d’origine indéterminée ont transité, permettant
aux époux BALKANY d’acquérir des biens immobiliers, de les entretenir et d’assurer leur train de
vie. Ils témoignent d’une organisation délictuelle construite, structurée et soigneusement organisée
par Patrick BALKANY attestant d’une volonté constante de commettre et poursuivre ses
agissements délictueux.
En outre, en sa qualité de maire, Patrick BALKANY, agent de l’Etat et officier de police judiciaire,
était tenu à un devoir de probité et d’exemplarité. Or, il a usé des prérogatives que lui offraient sa
fonction de président de la SEMARELP, société d’économie mixte détenue à 80% par la ville de
Levallois-Perret et gérant des fonds publics pour tirer des avantages personnels de l’allocation du
marché de construction des tours de Levallois aux sociétés de Mohamed AL JABER.
S’agissant des faits d’omission déclarative à la HATVP, la cour retient l’ampleur de la dissimulation
voire l’absence totale de déclaration d’une partie de son patrimoine.
La cour tient compte du fait que si Patrick BALKANY reconnaît in fine les faits qui lui sont
reprochés, il les a longtemps contestés et les a minimisés jusque devant la cour d’appel. A
l’audience, il ne s’en explique pas et exprime des regrets indiquant qu’il « aurait dû faire
autrement ».
Patrick BALKANY est âgé de 74 ans. Il est marié et père de deux enfants majeurs. Il a connu une
longue carrière politique débutée comme conseiller général des Hauts de Seine à compter du 22
mars 1982. Il a ensuite été député du 23 juin 1988 au 21 avril 1997 puis du 19 juin 2002 au 20 juin
2017. Il a aussi été maire de Levallois-Perret du 14 mars 1983 au 18 juin 1995 puis du 19 mars
2001 jusqu’en mars 2020 où il a dû abandonner ses fonctions compte tenu de la peine d’inéligibilité
prononcée à son encontre avec exécution provisoire. Il a ainsi été maire de cette commune pendant
21 ans.
Retraité, il déclare percevoir avec son épouse des revenus mensuels de l’ordre de 11 000€ après
retenue à la source. La déclaration de revenus des époux BALKANY pour l’année 2021 mentionne
un revenu imposable de 163 273€ soit 13 606€ par mois et fait apparaître l’emploi d’un salarié à
domicile auquel ils versent un revenu annuel de 35 273€ soit 2952€ par mois leur ouvrant droit à un
crédit d’impôt ce qui atteste de leurs facultés contributives. Ils justifient en outre acquitter la
somme mensuelle de 1300€ outre un versement de 5000€ en mai 2022 à l’administration fiscale en
remboursement des sommes dues. Son épouse et lui sont en effet redevables de très importantes
sommes envers l’administration fiscale.
Compte tenu de la donation partage consentie au profit de leurs enfants par Isabelle et Patrick
BALKANY le 13 mars 1997, rectifiée par acte notarié du 4 septembre 1997, les époux BALKANY
sont propriétaires du droit d’usufruit de leur résidence principale “moulin de Cossy” sise sur les
communes de Giverny et Limetz dont la valeur en pleine propriété était alors estimée à 4 880 000
francs. S’il fait état de charges importantes d’entretien de cette propriété, Patrick BALKANY n’en
justifie pas. Cette donation partage ne porte que sur les biens immobiliers sis à Giverny et Limetz et
ne concerne pas les biens mobiliers..
Son casier judiciaire porte mention de trois condamnations dont une réhabilitée de plein droit, une
prononcée le 1er mars 2016 par le tribunal correctionnel de Nanterre à la peine de 3000€ d’amende
avec sursis pour diffamation envers un fonctionnaire, un dépositaire de l’autorité publique ou
chargé d’une mission de service public et une autre prononcée le 4 mars 2020 à la peine de 4 ans
d’emprisonnement dont un an avec sursis, interdiction de gérer pendant 10 ans et privation du droit
d’éligibilité pendant 10 ans avec exécution provisoire pour fraude fiscale, faits commis entre 2000
et 2005. Mandat de dépôt a alors été décerné à son encontre.
Il a été incarcéré le 13 septembre 2019 et remis en liberté pour raison médicale le 12 février 2020.
Dans le cadre de la condamnation pour fraude fiscale, Patrick BALKANY, a été admis au bénéfice
de la libération conditionnelle, comme étant âgé de plus de 70 ans, par jugement du juge de
l’application des peines en date du 18 février 2021 lequel relevait le bon déroulement de son
placement sous surveillance électronique à titre probatoire.
Cette mesure lui a été retirée par jugement du tribunal de l’application des peines en date du 17
décembre 2021 confirmé par arrêt de la chambre de l’application des peines près la cour d’appel de
Rouen au motif qu’il n’avait pas accepté ni respecté les contraintes inhérentes à la surveillance
électronique et il a été réincarcéré le 7 février 2022.
Il a, à nouveau été admis au bénéfice de la libération conditionnelle à compter du 1er juin 2022, par
décision en date du 30 mai 2022 confirmée par arrêt de la chambre de l’application des peines du 4
août 2022. Si aux termes de cette décision, le faible recul de Patrick BALKANY sur les faits a été
relevé, ses efforts initiés en vue du règlement des sommes dues au trésor public et sa prise de
conscience de devoir se soumettre aux décisions judiciaires ont été soulignés.
Le docteur MAHE, psychiatre, dans son rapport du 15 octobre 2020, établi alors que Patrick
BALKANY était détenu, a retenu l’absence de pathologie mentale lourde ou potentiellement
aliénante mais une symptomatologie dépressive, l’absence de demande de prise en charge, une
évolution personnelle limitée au regard de la condamnation intervenue pour fraude fiscale et des
regrets exprimés sans sentiment de culpabilité.
Le collège d’expert nommé concluait le 21 octobre 2020 que Patrick BALKANY présentait de
multiples pathologies et un état dépressif susceptible d’entraîner un syndrome de glissement. Une
prise en charge médicale et psychologique avec traitement antidépresseur était préconisée.
Les éléments médicaux produits, et notamment le courrier établi le 20 janvier 2022 par le Pr
DOUSSET, attestent de ce que depuis 2019 Patrick BALKANY souffre de problèmes cardiaques et
gastro-entérologiques ayant nécessité plusieurs hospitalisations et interventions et que son état de
santé demeure très précaire.
Il a été opéré en octobre 2022 d’une hernie inguinale droite.
Pour les mêmes motifs et eu égard aux gains importants procurés par la commission des infractions
au détriment de la collectivité et tenant compte des revenus des époux BALKANY, de la valeur du
mobilier et des bijoux évalués à plus de 542 880€ lors de la perquisition de leur domicile, la cour
condamne Patrick BALKANY au paiement d’une amende délictuelle de 100 000€ qui apparaît
proportionnée à ses revenus, patrimoine et charges tels que décrits.
Au visa de ces mêmes éléments, du statut de Patrick BALKANY, à l’époque des faits, de président
de la SEMARELP, société d’économie mixte gérant des fonds publics, fonction qui exige une réelle
éthique, et afin d’éviter tout renouvellement des faits, la cour confirme la peine complémentaire
d’interdiction d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de
gérer ou de contrôler, à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte
ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale
pour une durée de 10 ans en application des dispositions de l’article 324-7 1° du code pénal
prononcée par le tribunal.
Sur la base de ces éléments, la cour entend encore, par application des dispositions des articles 432-
17 2° et 131-27 du code pénal prononcer à l’encontre de Patrick BALKANY l’interdiction à titre
définitif d’exercer l’activité à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise soit en l’espèce
l’interdiction d’exercer toute fonction ou emploi dans un organisme gérant des fonds publics.
Pour assurer son effectivité et l’exécution immédiate, cette interdiction d’exercice sera assortie de
l’exécution provisoire en application des dispositions des articles 131-10 du code pénal et 471
alinéa 4 du code de procédure pénale.
Isabelle BALKANY
Isabelle BALKANY a été déclarée coupable des faits de blanchiment de fraude fiscale commis de
façon habituelle et de déclaration mensongère ou incomplète de situation patrimoniale à la HATVP
par une personne titulaire ou délégataire d’une fonction exécutive locale. Ces faits sont d’une
gravité certaine en ce qu’ils ont été commis dans un but exclusivement lucratif, de manière
consciente et délibérée, se sont déroulés pendant plusieurs années, de manière continue, à un
rythme soutenu, sans qu’à aucun moment Isabelle BALKANY envisage d’y mettre spontanément
fin, et ce, afin de maintenir un train de vie fastueux alors même que les revenus licites tirés de son
activité professionnelle, ainsi que ceux de son mari et les sommes héritées de sa famille lui
assuraient une situation matérielle confortable. Ces faits témoignent d’une organisation délictuelle
construite et structurée à laquelle elle a pris une part active étant notamment en relation avec les
différents acteurs, les gestionnaires suisses et étant bénéficiaire économique de certaines des
sociétés écrans pour dissimuler ses avoirs. Ces faits ont été commis alors qu’elle était investie de
mandats électifs et était chevalier de la légion d’honneur et officier des palmes académiques et
tenue à ces titres d’un devoir de probité et d’exemplarité tant dans sa vie publique que privée.
La cour retient aussi, s’agissant de l’omission déclarative à la HATVP, l’ampleur de la minoration
et la dissimulation de la villa Dar Guycy.
Isabelle BALKANY est âgée de 75 ans. Elle est issue d’une famille aisée et rapporte une jeunesse
dorée. Elle est mariée et mère de deux enfants. Titulaire d’une maîtrise, elle a toujours travaillé,
comme journaliste puis directrice de la communication à Europe 1, avant de s’engager elle-même
en politique, aux côtés de son mari qu’elle a toujours soutenu. Elle a ainsi été élue vice-présidente
du conseil général des Hauts de Seine en charge de la vie scolaire de 1989 à 2011 et première
adjointe à la mairie de Levallois-Perret de 2001 à 2020. Elle a été nommée chevalier de la légion
d’honneur et officier des palmes académiques.
Elle justifie d’importants problèmes de santé étant soignée pour un cancer du poumon et souffrant
d’un syndrome dépressif l’ayant conduite à plusieurs tentatives d’autolyses.
S’agissant de sa situation matérielle, les éléments ci-avant développés concernant son époux,
Patrick BALKANY seront repris, tant Patrick BALKANY qu’elle-même excipant d’une
communauté et d’une solidarité financière absolue.
Son casier judiciaire porte mention de deux condamnations dont une réhabilitée de plein droit et la
seconde prononcée le 4 mars 2020 par la cour d’appel de Paris à la peine de 3 années
d’emprisonnement, interdiction de gérer pendant 10 ans et privation du droit d’éligibilité pendant
10 ans avec exécution provisoire pour fraude fiscale.
Admise par décision du juge de l’application des peines d’Evreux en date du 18 février 2021au
bénéfice d’une détention à domicile sous surveillance électronique probatoire à une libération
conditionnelle, cette mesure a été révoquée par décision du tribunal de l’application des peines
d’Evreux intervenue le 17 décembre 2021 confirmée par la chambre de l’application des peines de
Rouen en date du 3 février 2022 laquelle relevait qu’Isabelle BALKANY n’avait jamais accepté les
contraintes inhérentes à la détention à domicile sous surveillance électronique ni le cadre imposé ce
dont attestait notamment le caractère outrancier et ironique de ses propos envers le personnel de
l’administration pénitentiaire. Cette décision retenait aussi qu’elle n’avait jamais entrepris le
règlement des sommes dues aux finances publiques malgré l’importante dette fiscale.
Cette décision n’a pas reçu application compte tenu de ses problèmes de santé.
Elle justifie désormais des efforts entrepris pour apurer les sommes dues à l’administration fiscale à
laquelle elle verse mensuellement la somme de 650€.
Elle a été exclue du droit de l’ordre national de la légion d’honneur par décision de la grande
chancellerie de la légion d’honneur en date du 23 juin 2021.
La cour retient qu’alors qu’elle avait admis devant la cour «une faute», qui, «si elle n’avait pas
d’excuses avait des explications» indique reconnaître désormais les faits.
Dans le cadre de cette procédure, elle a été placée sous contrôle judiciaire par ordonnance du juge
d’instruction en date du 22 mai 2014 et a versé la caution de 1 000 000€ mise à sa charge. Elle
indique avoir emprunté cette somme à son fils et produit à cette fin la reconnaissance de dette
établie entre eux le 5 août 2014 dûment enregistrée.
Eu égard à la gravité des faits, à la personnalité d’Isabelle BALKANY qui s’est inscrite
durablement, sans jamais se remettre en cause, dans une forme de délinquance financière structurée,
à sa situation matérielle, familiale et sociale, il convient de la condamner à une peine de 42 mois
d’emprisonnement, toute autre sanction apparaissant manifestement inadéquate.
Le jugement déféré sera donc, en conséquence, infirmé sur la peine.
Au visa de ces mêmes éléments, compte tenu des circonstances de commission des infractions et
afin d’éviter tout renouvellement, Isabelle BALKANY ayant démontré qu’elle se servait de sociétés
pour opacifier des flux d’argent frauduleux, la cour confirme la peine complémentaire
d’interdiction d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de
gérer ou de contrôler, à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte
ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale
pour une durée de 10 ans en application des dispositions de l’article 324-7 1° du code pénal
prononcée par le tribunal.
L’article 131-21 du code pénal en vigueur au 5 mars 2007 énonce que la peine complémentaire de
confiscation est encourue dans les cas prévus par la loi ou le règlement. Elle est également
encourue de plein droit pour les crimes ou délit punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée
supérieure à un an, à l’exception des délits de presse. (alinéa 1)
La confiscation porte sur tous les biens meubles ou immeubles, quelle qu’en soit la nature, divis ou
indivis, ayant servi à commettre l’infraction ou qui étaient destinés à la commettre, et dont le
condamné est propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il avait la
libre disposition. (alinéa 2)
Elle porte également sur tous les biens qui sont l’objet ou le produit direct de l’infraction, à
l’exception des biens susceptibles de restitution à la victime. Si le produit de l’infraction a été mêlé
à des fonds d’origine licite pour l’acquisition d’un ou plusieurs biens, la confiscation ne peut porter
sur ces biens qu’à concurrence de la valeur estimée de ce produit. (alinéa 3)
La peine complémentaire de confiscation, s’agissant d’un délit puni de cinq ans d’emprisonnement
et ayant procuré un profit direct ou indirect, porte également sur les biens meubles ou immeubles,
qu’elles qu’en soit la nature, divis ou indivis, appartenant au condamné qui, mis en mesure de
s’expliquer sur les biens dont la confiscation est envisagée, n’a pu en justifier l’origine. (alinéa 5)
Lorsque la loi qui réprime le crime ou le délit le prévoit, la confiscation peut aussi porter sur tout
ou partie des biens appartenant au condamné quelle qu’en soit la nature, meubles ou immeubles,
divis ou indivis. (alinéa 6)
Lorsque la chose confisquée n’a pas été saisie ou ne peut être représentée, la confiscation peut être
ordonnée en valeur. (alinéa 9)
La chose confisquée est, sauf disposition particulière prévoyant sa destruction ou son attribution,
dévolue à l’État, mais elle demeure grevée, à concurrence de sa valeur, des droits réels licitement
constitués au profit de tiers. (alinéa 10)
La loi 2010-768 du 9 juillet 2010 a modifié l’article 131-21 en prévoyant la confiscation dans les
mêmes conditions des droits incorporels quels qu’en soient la nature, divis ou indivis (alinéa 8)
La loi n°2012-409 du 27 mars 2012 a encore modifié les dispositions de l’article 131-21 en
prévoyant pour les alinéas 5 et 6, la confiscation de tout ou partie des biens du condamné ou, sous
réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, qu’elle qu’en soit la
nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.
L’article 324-7 alinéa 7 du code pénal, dans sa version applicable du 6 août 2008 au 29 mars 2012,
prévoit notamment que les personnes coupables de blanchiment encourent notamment la
confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en
est le produit, à l’exception des objets susceptibles de restitution (8°) et la confiscation de tout ou
partie des biens du condamné, qu’elle qu’en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis
(12°).
La loi n°2012-409 du 27 mars 2012 a modifié les dispositions de l’article 324-7 12° du code pénal
prévoyant la confiscation de tout ou partie des biens du condamné ou, sous réserve des droits du
propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, qu’elle qu’en soit la nature, meubles ou
immeubles, divis ou indivis.
Les époux BALKANY ont été déclarés coupables de blanchiment de fraude fiscale commis de
façon habituelle entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2014.
Il est constant que la peine complémentaire de confiscation n’est encourue que dans les cas prévus
par la loi et le règlement et qu’il doit être fait application du principe de non-rétroactivité de la loi
pénale plus sévère par application des dispositions de l’article 112-1 du code pénal. Pour autant, il
convient de rappeler que si l’infraction de blanchiment s’exécute en un trait de temps et constitue
une infraction instantanée, le caractère habituel a été retenu de sorte que les faits commis
postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle sont soumis à celle-ci et qu’en conséquence
il ne saurait être valablement soutenu d’une part que le blanchiment constitue une infraction
continue ni qu’il ne saurait être imputé à Patrick BALKANY une peine non en vigueur à la date du
début de l’infraction soit au 1er janvier 2007. Les époux BALKANY encourent donc la peine
complémentaire de confiscation générale de tout ou partie de leur patrimoine, conformément aux
dispositions des articles 131-21 al 6 et 324-7 du code pénal, ces dernières dispositions ayant été
introduites dans le code pénal par la loi du 27 mars 2012. En effet, lorsqu’une loi crée une
circonstance aggravante d’habitude, elle est applicable, sans qu’il soit fait échec au principe de non-
rétroactivité, dès lors que le deuxième acte constitutif de l’habitude a été perpétré sous ladite loi.
Tel est bien le cas en l’espèce.
La pleine propriété de la villa Dar Guycy sise à Marrakech et le solde créditeur du compte bancaire
n°5250691400200 ouvert dans les livres de l’Arab Bank à Marrakech au nom de la SCI Dar Guycy
ont fait l’objet d’une saisie conservatoire effectuée par les autorités marocaines agissant sur
commission rogatoire internationale (PV du 24 juin 2015). Le titre au porteur de la société
HAYDRIDGE composé de 100 actions pour un capital de 10 000 dollars a été saisi par ordonnance
du juge d’instruction du 8 janvier 2015.
La villa Dar Guycy a été acquise en 2010 par la SCI Dar Guycy détenue à 99% par la société
HAYDRIDGE et à 1% par Mme BRUSCH, salariée de la financière GESTRUST.
La cour a retenu que les époux BALKANY avaient mandaté Mr ANGST, représentant la société
GESTRUST, par l’intermédiaire de Jean-Pierre AUBRY pour créer deux structures de droit
panaméen, la société HAYDRIGE en vue d’acquérir la maison Dar Guycy et la société HIMOLA
aux fins de percevoir une commission de 5 000 000 dollars, le compte de la société HIMOLA ayant
été débité de 3 600 000 dollars versés sur le compte bancaire du vendeur de la villa deux jours
avant l’achat devant notaire. Mr ANGST, a dénoncé au bureau de l’office fédéral de la police de
Berne le montage réalisé dans le cadre de l’acquisition de cette maison et indiqué que les époux
BALKANY étaient, au travers du montage réalisé, les véritables bénéficiaires économiques des
sociétés HAYDRIDGE et HIMOLA et les véritables détenteurs des parts sociales de la SCI Dar
Guycy.
Mme BRUSCH a déclaré ne rien ignorer de cela.
Les investigations ont mis en évidence que les époux BALKANY ont choisi cette villa, ont négocié
son prix avec le vendeur, l’ont meublée et entretenue, s’y rendaient fréquemment, personne ne
pouvant venir sans eux.
Au vu de ces éléments, la propriété juridique apparente doit être requalifiée, les époux BALKANY
étant les propriétaires réels de la villa Dar Guycy. En outre, au vu des éléments ci-avant développés,
la SCI Dar Guycy et la société HAYDRIDGE ne peuvent être considérées comme propriétaires de
bonne foi de cette villa.
Les époux BALKANY sont aussi les seuls bénéficiaires économiques des parts des sociétés
HAYDRIDGE, HIMOLA et de la SCI Dar Guycy.
La villa Pamplemousse sise à Saint Martin a été saisie par ordonnance du juge d’instruction du 14
mai 2014 puis vendue sur autorisation judiciaire pour la somme de 2 000 000 dollars américains.
Après dédommagement des créanciers, le solde du prix de vente, soit la somme de 1 357 767,70€ a
été versée à l’AGRASC.
L’information judiciaire a établi que société FWI, dont Isabelle BALKANY était seule bénéficiaire
économique jusqu’au 8 juillet 2004, date à laquelle son époux devenait également bénéficiaire
économique aux termes d’une décision du conseil d’administration, propriétaire officiel de la villa
Pamplemousse, n’était qu’une société écran, les époux BALKANY en étant les véritables
propriétaires.
Il est avéré qu’ils séjournaient régulièrement dans cette maison, la donnait en location et
percevaient les loyers, acquittaient l’assurance multirisque habitation et décidaient des travaux
d’entretien et d’aménagement qui étaient supportés par la société FWI. La cour a retenu qu’ainsi,
les époux BALKANY pouvaient bénéficier de cette maison sans que les dépenses y afférent
n’apparaissent sur leurs propres comptes bancaires. La cour a aussi retenu que les statuts
complémentaires de la société FWI, adoptés le 8 juillet 2004, prévoyaient expressément que les
époux BALKANY possédaient leur vie durant les droits sur la fortune et les revenus de la société
FWI.
Suite à la saisie du bien, les époux BALKANY ont demandé au juge d’instruction l’autorisation de
pouvoir la vendre, démontrant par là même en disposer.
Les représentants de la société FWI ne pouvaient ignorer ces éléments de sorte que cette société ne
peut être qualifiée de propriétaire de bonne foi.
Au vu de ces éléments, la propriété juridique apparente doit être requalifiée, les époux BALKANY
étant les propriétaires réels de la villa Pamplemousse.
Le moulin de Cossy.
La pleine propriété de ce bien a fait l’objet de deux ordonnances de saisie pénale rendues par le
juge d’instruction le 9 juillet 2015 et confirmées par arrêts de la chambre de l’instruction de la cour
d’appel de Paris le 3 novembre 2016.
Les époux BALKANY ont acquis cet ensemble immobilier sis à Giverny et Limetz entre 1986 et
1990. Il s’agit de leur domicile familial. En vertu d’une donation partage passée devant notaire le
13 mars 1997, rectifiée par acte du 4 septembre 1997, ils ont fait donation de la nue propriété de ce
bien à leurs deux enfants, Alexandre et Vanessa BALKANY, et ont conservé l’usufruit de ce bien
leur vie durant. Cette donation partage est parfaitement légale et Alexandre et Vanessa BALKANY
sont donc des nus-propriétaires de bonne foi.
S’il est acquis que le principe de proportionnalité n’a pas vocation à s’appliquer à la confiscation
d’un bien qui est dans sa totalité le produit de l’infraction, une mesure de confiscation de tout ou
partie du patrimoine doit être motivée en regard de la gravité des faits, de la personnalité de son
auteur, de sa situation personnelle ainsi qu’en tenant compte de l’atteinte portée au droit de
propriété de l’intéressé.
En l’espèce, la gravité des faits de blanchiment commis de façon habituelle est manifeste. Elle est
caractérisée par la mise en place de procédés complexes et sophistiqués, l’instauration de sociétés
écrans, dont les époux BALKANY étaient les bénéficiaires économiques uniques, sociétés qui
disposaient, à l’exception d’une seule, de comptes bancaires, établies dans des paradis fiscaux et
gérées par des sociétés fiduciaires. Ces mécanismes ont permis aux époux BALKANY d’une part
de dissimuler à l’administration fiscale des flux de devises conséquents issus de fraudes fiscales
parfois très anciennes et l’important patrimoine financier et immobilier qu’ils ont ainsi, au fil des
ans pu constituer, d’autre part de l’entretenir et également de financer leur train de vie luxueux.
Ces faits attestent du mode de fonctionnement des époux BALKANY, consistant à éluder le
paiement de très importantes sommes d’impôts. Ils en ont tiré un profit considérable.
Les faits ont perduré pendant sept ans. Les époux BALKANY n’ont pas mis fin spontanément à
leurs agissements frauduleux et n’ont pas collaboré à la manifestation de la vérité pendant
l’information. S’ils expriment à présent des regrets, lis ne paraissent pas encore prendre la pleine
mesure de la gravité de leurs agissements.
Ils sont âgés de 74 et 75 ans. Leur situation matérielle, sociale et personnelle sera reprise telle que
précédemment décrite. Ils ont déjà été condamnés et il convient de prévenir toute réitération des
faits. Ils rencontrent tous les deux d’importants problèmes de santé nécessitant un suivi régulier. Ils
justifient de revenus mensuels de 13 606€ lesquels leur assurent des conditions de vie tout à fait
confortables. Ils ne justifient pas de leurs charges et notamment des frais d’entretien du domicile
familial dont ils excipent. Lors de la perquisition, le mobilier et les bijoux se trouvant dans leur
domicile ont été évalués à la somme de 542 880€. Isabelle BALKANY a déclaré en juin 2014 à la
HATVP posséder des biens mobiliers (valeurs cotées en bourse, assurance-vie, mobilier) pour une
valeur de 444 494€.
La villa Pamplemousse, résidence secondaire, a été vendue à la demande des époux BALKANY et
le prix de vente saisi.
La villa Dar Guycy était aussi à usage de résidence secondaire.
S’agissant du bien immobilier dit « Moulin de Cossy » sis sur les communes de Giverny et
Limetz,les époux BALKANY ne sont titulaires que de l’usufruit. Ainsi, seul l’usufruit est
susceptible d’être confisqué et dévolu à l’État, les nus-propriétaires de bonne foi conservant leurs
droits. Dès lors, Alexandre et Vanessa BALKANY ont vocation à devenir pleinement propriétaires
lorsque l’usufruit de leurs parents prendra fin. En outre, il ne saurait être dévolu à l’État plus de
droits que n’en ont les condamnés. L’article 619 du code civil énonce que s’agissant d’une personne
morale, l’usufruit ne dure que 30 ans. En l’espèce, en vertu de la donation partage, les époux
BALKANY se sont réservés l’usufruit leur vie durant, cet usufruit étant stipulé entièrement
réversible sur la tête et au profit du survivant. Ainsi ne peut être confisqué que l’usufruit du bien
immobilier dit « Moulin de Cossy » jusqu’au décès du survivant des époux BALKANY et dans la
limite de 30 années conformément aux dispositions de l’article 619 du code civil régissant
l’usufruit des personnes morales.
La cour estime qu’au vu de leur situation personnelle, la confiscation de l’usufruit de leur résidence
principale et de la pleine propriété de leurs résidences secondaires permettra néanmoins aux époux
BALKANY de continuer de vivre dans des conditions dignes.
La cour estime que l’atteinte portée à leur droit de propriété et à leur droit au respect de leur vie
privée et familiale par la confiscation de cet usufruit, d’une de leur résidence secondaire et du prix
de vente de la seconde, le montant total des confiscations étant très inférieur au montant du produit
infractionnel, est nécessaire et proportionnée à la nature et la gravité des faits ci-avant établie, aux
manquements commis ainsi qu’à la situation personnelle de Patrick et Isabelle BALKANY et
apparaît nécessaire à l’effectivité de la loi pénale et à la cessation d’une situation gravement
attentatoire aux intérêts de l’État le privant de revenus substantiels.
L’État français a détaillé de façon plus précise dans le cadre de l’instance d’appel les conséquences
dommageables de son préjudice sans qu’il puisse être argué de demandes nouvelles, la demande
formée devant les premiers juges tendant à la réparation globale de son préjudice incluant les chefs
de dommages dont s’agit.
Le jugement entrepris sera donc infirmé s’agissant des dommages et intérêts alloués à l’Etat
français.
La cour rappelle qu’à concurrence des montants pour lesquels ils sont condamnés, Patrick
BALKANY, Isabelle BALKANY et Alexandre BALKANY seront tenus solidairement au paiement
de ces sommes à l’Etat français avec Jean-Pierre AUBRY et Arnaud CLEMENT définitivement
condamnés.
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire à l’égard de Patrick BALKANY, Isabelle
BALKANY, Alexandre BALKANY, Vanessa BALKANY, Jean-Pierre AUBRY, Arnaud CLEMENT
et de l’État français, en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi
Déclare irrecevables les appels formés par Jean-Pierre AUBRY et Arnaud CLEMENT
Infirme le jugement déféré sur les peines principales prononcées à l’encontre de Patrick
BALKANY et d’Isabelle BALKANY
Statuant à nouveau
Dit que s’agissant d’Isabelle BALKANY, la caution sera affectée prioritairement au paiement de
l’amende
Rappelle que cette peine d’inéligibilité emporte interdiction d’exercer une fonction publique.
Y ajoutant
Dit que ces peines d’inéligibilité seront assorties de l’exécution provisoire en application des
dispositions de l’article 131-10 du code pénal et 471 alinéa 4 du code de procédure pénale
Dit que cette interdiction sera assortie de l’exécution provisoire en application des articles 131-10
du code pénal et 471 alinéa 4 du code de procédure pénale
Statuant à nouveau
Confirme les confiscations des biens suivants sauf à substituer aux fondements juridiques retenus
par les premiers juges ceux des articles 131-21 alinéa 6 et 8 et 324-7 12° du code pénal:
- les deux biens situés à Sidi Youssef Ben Ali Ennakhil lieudit Dar Tounsi à Marrakech, acquis le 8
janvier 2010 par la SCI Dar Guycy, en l’étude de Maître Mohamed Jazouli, notaire à Marrakech et
saisis à titre conservatoire par les autorités du Royaume du Maroc :
-la propriété dénommée « Menzeh Ennakhil 4 », d’une superficie de 01 ha 00 a 29 ca, située
à Marrakech Sidi Youssef Ben Ali Ennakhil Lieudit Dar Tounsi consistant en un terrain sur lequel
sont édifiées des constructions à usage d’habitation comprenant une petite cave, au rez-de-
chaussée : salon marocain, salon européen, salle à manger, cuisine, 3 chambres à coucher, 3 salles
de bain, cour de service et jardin, maison de gardien avec deux petites pièces, cuisine et douche et à
l’étage, 2 chambres à coucher, deux salles de bain. Le tout faisant l’objet du titre foncier
n°10.556143
la propriété dénommée « Menzeh Ennakhil 5 », consistant en un terrain d’une superficie de
01 ha 00 a 50 ca, située à Marrakech Sidi Youssef Ben Ali Ennakhil Lieudit Dar Tounsi, consistant
en un terrain nu. Le tout faisant l’objet du titre foncier n°10.557143
-le prix issu de la vente la villa dite « Villa Pamplemousse » située à Saint-Martin, soit la somme de
1 357 767,70€ consignée entre les mains de l’agence de gestion et recouvrement des avoirs saisis et
confisqués,
-le solde créditeur du compte bancaire n°5250691400200 ouvert dans les livres de l’Arab Bank à
Marrakech au nom de la SCI Dar Guycy
-le titre au porteur de la société HAYDRIDGE Investments Group Corp composé de 100 actions
pour un capital de 10 000 dollars américains saisi pénalement par ordonnance du 8 janvier 2015 et
placé sous scellé n°2015/100018
Rappelle que conformément aux dispositions des articles 706-151 et 707-1 du code de procédure
pénale, les formalités de publication des saisies et confiscations immobilières sont réalisées par
l’agence de gestion et recouvrement des avoirs saisis et confisqués
Infirme le jugement
Statuant à nouveau
Dit qu’à concurrence de ces montants, ces sommes seront acquittées solidairement avec Jean-Pierre
AUBRY et Arnaud CLAUDE dans les termes du jugement devenu définitif à l’égard de ces derniers
Dit que ces sommes seront payées in solidum avec Jean-Pierre AUBRY et Arnaud CLAUDE dans
les termes du jugement devenu définitif à l’égard de ces derniers
Y ajoutant