SBAI
SBAI
SBAI
Sous la direction de
M. LAFARGE François
Soutenu par
SBAI Chaïmae
Juin 2018
Remerciements
département de l’artisanat qui m’ont porté conseil, et à tous mes amis pour leur
support.
A ma famille.
2
Table des matières
Introduction............................................................................................................................................. 4
1. La préfiguration des départements ministériels des institutions publiques à la réforme .............. 8
1.1. Les modalités de la préfiguration ............................................................................................ 8
1.1.1. La refonte de la nomenclature budgétaire ..................................................................... 8
1.1.2. L’élaboration du projet de performance ....................................................................... 11
1.2. La conduite de la préfiguration ............................................................................................. 12
1.2.1. Les quatre vagues de préfiguration ............................................................................... 12
1.2.2. Les acteurs de la conduite de la réforme ...................................................................... 15
2. La préfiguration du département de l’Artisanat et les prémices de mise en œuvre .................... 17
2.1. La restructuration du budget autour de programmes .......................................................... 17
2.1.1. La définition de la stratégie et l’identification des projets et des programmes ........... 17
2.1.2. De la structure administrative aux programmes et aux régions ................................... 19
2.1.3. Des dépenses aux activités ............................................................................................ 21
2.1.4. La complexité de l’intégration : gouvernance et système d’information ..................... 23
2.2. L’élaboration du projet de performance ............................................................................... 25
2.2.1. La définition des objectifs ............................................................................................. 25
2.2.2. La validation du projet de performance ........................................................................ 26
2.2.3. Le pilotage des programmes ......................................................................................... 27
2.2.4. La budgétisation sensible au genre ............................................................................... 29
3. Les indicateurs de performance du département de l’Artisanat : leur évolution et les contraintes
de performance ..................................................................................................................................... 31
3.1. Le choix des indicateurs ........................................................................................................ 31
3.1.1. Les indicateurs du programme « Support et pilotage » ................................................ 31
3.1.2. Les indicateurs du programme « Artisanat » ................................................................ 33
3.2. Les contraintes de la performance ........................................................................................ 38
3.2.1. Le système d’information .............................................................................................. 38
3.2.2. Les aléas d’exécution du programme............................................................................ 39
3.2.3. Le souci budgétaire dans les indicateurs ....................................................................... 40
3.2.4. La portée de l’évaluation ............................................................................................... 42
Conclusion ............................................................................................................................................. 44
Ressources bibliographiques ................................................................................................................. 47
Liste des figures ..................................................................................................................................... 49
Liste des recommandations .................................................................................................................. 50
Liste des abréviations ............................................................................................................................ 51
Annexes ................................................................................................................................................. 52
3
Introduction
Depuis les années 80, le Maroc s’est engagé, sous l’incitation de la banque mondiale et du fond
monétaire international, dans une politique de redressement de ses finances publiques et d’une
modernisation de son économie.
A partir de l’an 2000, en respect des dispositions de l’Accord d’association signé avec l’union
européenne, le Maroc amorce une modification de sa législation dans le domaine économique
et financier conduisant à des réformes structurelles qui lui ont permis de se voir reconnaitre en
2008, le « statut Avancé » et devient un partenaire privilégié de l’union. C’est dans ce cadre
que la réforme constitutionnelle est survenue en 2011 au Maroc, en sus des circonstances
politiques et sociales dans la région du Maghreb et du Moyen-Orient.
1
Note de présentation du projet de la loi organique de la loi de finances n°130-13.
2
Liste des projets de l’union européenne au Maroc consultable sur le site https://eeas.europa.eu.
3
Projet: MA-Support New Governance Framework (P143979)
4
D’après les données présentées dans le dépliant institutionnel de la direction du Budget, portant sur le jumelage
institutionnel d’appui à la mise en œuvre de la réforme de la loi organique relative à la loi de finances, édition
Octobre 2015 et la fiche projet sur le site internet d’Expertise France.
5
Agence française chargée de l’aide technique au développement à l’international.
4
mobilisation d’une expertise publique et d’une assistance technique au ministère de l’Economie
et des finances de juillet 2014 à décembre 2017 6.
C’est dans ce contexte que la nouvelle loi organique n°130-13 relative à la loi de finances (LOF)
est promulguée le 2 juin 2015. Son entrée en vigueur est progressive sur 5 ans, à compter de
2016, afin de prendre en compte les capacités des services de l’administration publique à mettre
en œuvre la réforme et de s’assurer de sa réussite. La modernisation de la gestion budgétaire
est structurée autour de trois axes : la performance de la gestion publique, le renforcement de
la transparence des finances publiques et l’accroissement du contrôle parlementaire.
Sur le plan organisationnel, la réforme propose une refonte de l’architecture budgétaire avec
l’apparition d’un nouvel acteur qu’est le responsable de programme. Par ailleurs, le parlement
a vu son pouvoir de contrôle et d’évaluation des politiques publiques renforcé notamment grâce
à l’appui de la Cour des comptes dont les missions ont été étendues à la certification des comptes
de l’Etat.
Cette démarche est définie par la direction du Budget relevant du ministère de l’Economie et
des Finances comme étant « un dispositif de pilotage des administrations ayant pour objectif
l’amélioration de l’efficacité de la dépense publique en orientant la gestion publique vers
l’atteinte de résultats prédéfinis, en matière d’efficacité socio-économique, de qualité de
service et d’efficience, dans le cadre de moyens prédéterminés ». Et c’est cette démarche qui
est au cœur de cette étude.
6
Ce jumelage a été renforcé pour une période supplémentaire allant jusqu’à décembre 2019 avec un budget
de 1,2 millions d’euros. Les références de la fiche projet du jumelage institutionnel sont : MA 15 ENI FI 01 17
(MA/49).
5
Si la démarche est plutôt claire dans l’objectif qui lui est assigné aussi bien vis-à-vis du citoyen
en termes d’efficacité socio-économique, de l’usager en matière de qualité du service à rendre
que du contribuable quand il s’agit d’efficience qui intègre la notion d’optimisation du coût, les
outils proposés pour sa mise en œuvre sont quant à eux perfectibles même s’ils ont dès à présent
permis de faire évoluer la gestion des finances publiques de l’Etat marocain.
Par ailleurs, par anticipation à la promulgation du nouveau texte de la LOF, des travaux
préparatoires à la mise en œuvre de la réforme ont été entamés depuis 2013, faisant adhérer de
façon progressive des départements ministériels et des institutions publiques, à l’application
des nouvelles méthodes de programmation budgétaire et à l’usage des nouveaux référentiels.
Cette étape, dite de préfiguration, allait même jusqu’après l’entrée en vigueur de la LOF en
2016, pour certains départements et institutions publiques. Par département est désigné un
domaine délimité d’activités relatives à un secteur public autonome attribué à un ministère. Il
constitue l’unité de base de préfiguration à la réforme.
Cependant, bien que cette étape ait permis de montrer la capacité de l’administration à se
réformer, elle n’a pas manqué de mettre en exergue des difficultés auxquelles la direction du
Budget a essayé de répondre par un accompagnement personnalisé et par la consultation des
experts internationaux en la matière.
C’est autour de ces éléments que la problématique de la présente étude est formulée ainsi : Dans
quelle mesure, le département de l’Artisanat s’est approprié la démarche de la performance ?
Quelles étaient les modalités de la mise en œuvre de la réforme au sein de ce département ? et
quelles sont les contraintes identifiées ?
En s’appuyant sur une expérience de 4 ans dans la gestion du budget de l’Etat, et en tant que
membre de l’équipe opérationnelle chargée de la mise en œuvre de la réforme de la LOF au
sein du département de l’Artisanat depuis les premières opérations de préfiguration, les
réponses apportées par ce dernier à la problématique seront présentées dans le cadre de cette
étude.
Cette expérience est enrichie grâce à la lecture du corpus normatif, des écrits scientifiques et
professionnels et de la documentation officielle de la direction du Budget relevant du ministère
de l’Economie et des Finances et des publications du département de l’Artisanat. A noter par
6
ailleurs, la rareté des publications post promulgation de la LOF abordant d’un point de vue
critique l’état d’avancement de sa mise en œuvre au Maroc. A cela s’ajoute également, les
enseignements reçus à l’ENA, principalement ceux en liaison avec les aspects de la réforme de
la loi organique relative à la loi de finances en France et du stage pratique effectué à la Cour
des comptes, portant sur l’évaluation d’une politique publique.
7
1. La préfiguration des départements ministériels des institutions
publiques à la réforme
Le travail préparatoire engagé par la direction du Budget relevant du MEF reposait sur deux
axes de préfiguration allant de pair : la restructuration du budget autour des programmes et
l’élaboration du projet de performance.
En effet, les départements ministériels et les institutions publiques étaient invités par circulaires
du chef du gouvernement, en premier lieu, à mener une réflexion sur leur stratégie. Pour certains
départements c’était déjà fait, tel que la stratégie « Maroc Vert » pour le département de
l’Agriculture ou « Halieutis » pour le département de la pêche. Pour d’autres, il s’agissait de
définir les lignes de conduite et les grandes orientations à moyen et long terme en matière de
politiques publiques, en adéquation avec leurs attributions réglementaires.
En second lieu, il fallait identifier un ensemble d’activités et d’opérations9 effectuées par ces
départements et concourant à l’accomplissement de la stratégie. Cet ensemble est désigné par
7
Les institutions publiques préfigurées selon la présentation de Mme BENRGRINE Mouna, cheffe de la division de la réforme
budgétaire à la direction du Budget, lors du lancement de la 4ème vague de préfiguration au titre du projet de loi de finance
de 2017, le 1er mars 2016 : le Haut-Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte contre la Désertification, le Haut-
Commissariat au Plan, le Haut-Commissariat aux Anciens Résistants et Membres de l'Armée de Libération, la Délégation
générale à l'Administration Pénitentiaire et à la Réinsertion, le secrétariat générale du Gouvernement, les Juridictions
Financières, le chef du Gouvernement, la Chambre des Conseillers, la Chambre des Représentants, le Conseil Economique
Social et Environnemental et la Délégation Interministérielle aux Droits de l'Homme.
8 www.lof.finances.gov.ma
9
Article 40 de la LOF n°130.30 : « Un projet ou action est un ensemble délimité d’activités et d’opérations
entreprises dans le but de répondre à un ensemble de besoins définis ».
8
les termes « Projets ou Action » qui devront être « conçus de façon pérenne ou du moins se
déroulant sur plusieurs années10 ».
Ensuite, les « projets et actions » les plus cohérents ont été rassemblés pour faire ressortir
le « Programme » auquel est affecté une enveloppe budgétaire bien précise et qui permet une
libre circulation des crédits entre les différents projets et actions qui le composent.
Les programmes et les projets ou actions étant identifiés, ils viennent en substitution des
« articles » et des « paragraphes », qui traduisaient respectivement, la « structure administrative
des départements », et « un ensemble cohérents de dépenses », dans l’ancienne nomenclature
budgétaire.
Titre Titre
(Dépenses de fonctionnement ou (Dépenses de fonctionnement ou
d’investissement) d’investissement)
Chapitre Chapitre
(Personnel, matériel ou investissement) (Personnel, matériel ou investissement)
Article
Programme
(Structure admin : Admin. générale, Directions
Métiers d’un département ministériel, 12 (Un ensemble cohérent de projets ou actions:
Régions du royaume) un article ou un ensemble d'articles)
- Région
(12 régions du royaume)
Paragraphe Projet/action
(Catégorie d’actions de la structure (Ensemble d'activités/opérations: 1paragraphe
administrative)
ou ensemble de paragraphes cohérents )
10« Guide de construction des programmes budgétaires », élaboré par la direction du Budget-MEF, Maroc, Page 16.
11 Elaboré par la direction du budget vers fin 2016/début 2017.
9
Désormais la morasse budgétaire12 des départements ministériels est structurée autour de 6
éléments présentés en colonne, en plus du code fonctionnel et économique de la dépense, au
lieu de 5, comme suit :
Avant la réforme :
Après la réforme :
L’intérêt de cette nouvelle structure est d’organiser les dépenses par politique publique
exprimée en programmes et en projets ou actions. Elle permet aussi une visibilité plus claire
sur les activités du gouvernement au moment du vote des crédits de la loi de finances et aussi
une meilleure transparence quant à leur contrôle.
Au niveau des agents publics et des ordonnateurs, cette structure leur a permis de mieux
organiser leur programmation budgétaire en ciblant l’affectation des crédits en fonction de leur
projet de performance et des objectifs à réaliser.
12
Document de répartition des crédits par chapitre, programme, région, projet et lignes budgétaires pour
chaque Ministère.
13
Matériel et dépenses diverses.
10
1.1.2. L’élaboration du projet de performance
Concrètement, le projet de performance (PDP) est un document écrit que les départements
ministériels élaborent annuellement pour présenter leur stratégie, leurs programmes, leurs
objectifs et leurs projets, selon une maquette (un modèle) élaborée par la direction du budget.
Les programmes peuvent se présenter comme support ou comme politique publique. Les projets
et les actions pour un programme support désigne le regroupement des fonctions de soutien au
sein du département ministériel ou de l’institution publique et des dépenses transverses mises
en œuvre pour l’accomplissement de l’ensemble des programmes de politiques publiques dudit
département ou institution. Et un programme de politique publique est un ensemble cohérent
d’activités et d’opérations relatives au cœur de métier du département, indispensables à
l’accomplissement même sa raison d’être.
14
1er alinéa de l’article 39 de la LOF n°130.30.
15
« Guide de la performance », la direction du Budget, présentation du cadre logique de la démarche de la
performance, page 7.
11
important qui est la programmation triennale16 des crédits. Toutefois, certains départements
n’ont pas tout à fait adhéré à cet aspect de par la complexité des calculs à faire pour estimer les
besoins en crédits nécessaires pour la réalisation des projets à venir17.
Par ailleurs, les axes de préfiguration identifiés, il fallait préciser encore la démarche de
préfiguration que le MEF, en accord avec le chef du gouvernement, a déroulé sur 4 années, en
précisant pour chaque année le nombre et la désignation des départements et institutions
préfigurateurs, en donnant à chaque fois les éléments sur lesquels porterait cette préfiguration
et qui en seraient les acteurs.
16
Une circulaire du chef du gouvernement publiée en mars 2018 annonce son entrée en vigueur à compter de
2019 et invite tous les départements ministériels et les institutions publiques à présenter le budget triennal 2019-
2021.
17
Présentation de M. MORDACQ Franck, chef du projet de jumelage institutionnel entre le Maroc et Expertise
France à l’occasion des ateliers des ministères préfigurateurs à la LOF de la quatrième vague, en date du 1er mars
2016, diapositive 22.
18
Circulaire du chef du gouvernement n°12_2013 portant sur la préparation du projet de loi de finance de
2014.
12
Articles du PLF 2013 Articles du PLF 2014
1. Administration générale 1. Support et pilotage
2. Agence judiciaire du royaume 2. Politique économique et stratégie des finances
3. Direction des affaires administratives et publiques
générales 3. Facilitation, sécurisation des échanges et
4. Administration des douanes et impôts protection du consommateur
indirects 4. Exécution de la dépense publique,
5. Trésorerie générale du royaume recouvrement et tenue de la comptabilité
6. Direction générale des impôts publique
7. Direction du budget 5. Mobilisation et recouvrement des recettes
8. Direction du trésor et des finances extérieures fiscales
9. Direction des études et des prévisions 6. Gestion du domaine privé de l'Etat
financières
10. Inspection générale des finances
11. Direction des entreprises publiques et de la
privatisation
12. Direction des assurances et de la prévoyance
sociale
13. Direction des domaines de l'Etat
Figure n°4 : « Evolution de la structure budgétaire du MEF après la réforme », tirée de la présentation
de Mme Bougrine Mouna, cheffe de division de la réforme budgétaire, lors du lancement de la 3ème
phase de préfiguration.
19
Circulaire du Chef du Gouvernement N° 06/2014 en date du 12 juin 2014.
20
Matériel et Dépenses Diverses : Sous-catégorie des dépenses de fonctionnement, en plus des dépenses du
personnel.
13
Par ailleurs, au cours de cette deuxième vague, l’accent est mis sur une dimension managériale
de la réforme qui fait émerger la fonction de responsable de programme « désigné au sein de
chaque département ministériel ou institution, [et] chargé de définir les objectifs et indicateurs
dudit programme et d’assurer le suivi de sa mise en œuvre»21.
Cette troisième vague de préfiguration a été caractérisée également par la mise en place de deux
objectifs et indicateurs transversaux relatifs à des fonctions supports qui sont la modernisation
des outils de travail de la fonction publique et la gestion des ressources humaines.
Une 4ème et dernière vague en 2016 a été aussi lancée pour 26 nouveaux départements
ministériels et institutions publiques23, tout en encourageant les précédents préfigurateurs à
capitaliser encore plus sur l’expérience des années passées pour améliorer leur programmation,
en vue de bien maîtriser les dispositions de la LOF relatives à la budgétisation par programme
(envoi au parlement des propositions budgétaires par programmes accompagnées des PDP et
avec mise en œuvre de la fongibilité24) qui entrent en vigueur à compter de 2018.
21
2ème alinéa de l’article 39 de la LOF n°130.30.
22
Lancée par la circulaire n° 4/2015 du 18 juin 2015 du chef du gouvernement.
23
Lancée par la circulaire n° 6/2016 du 23 mai 2016.
24
Liberté de redéploiement des crédits entre les programmes d’un même chapitre ou à l’intérieur d’un même
programme, selon des modalités souples.
14
1.2.2. Les acteurs de la conduite de la réforme
La deuxième vague de préfiguration était accompagnée par la mise en place d’un système de
pilotage de la préfiguration mais aussi de la mise en œuvre de la LOF. C’est un système de
gouvernance structuré en 3 niveaux, comme suit :
Au niveau opérationnel, l’unité Najaa, dirigée par trois fonctionnaires marocains, est en
jumelage institutionnel avec Expertise France25, représentée par trois professionnels experts
dans les finances publics dont deux ont contribué à la mise en œuvre de la LOLF en France et
qui devront apporter leur expertise pratique au MEF26 marocain, en général, et à l’unité Najaa
en particulier. Cette expertise prendra la forme de plusieurs activités d’appui, d’assistance
technique et de sessions de formation. Le jumelage est supervisé par un représentant de la
Banque Mondiale qui intervient dans le cadre du jumelage d’origine relatif au programme
« Hakama » (gouvernance en arabe) entre le Maroc et l’union européenne et pour qui la réforme
de la LOF constitue l’une des principales actions de réforme.
25
Agence française chargée de l’aide technique au développement à l’international.
26
Dépliant institutionnel de la direction du Budget, portant sur le jumelage institutionnel d’appui à la mise en
œuvre de la réforme de la loi organique relative à la loi de finances, édition Octobre 2015.
15
L’unité Najaa et les experts français organisent des réunions régulières, de façon ponctuelle,
avec les représentants de l’équipe projet dédié au niveau ministériel, pour le suivi et la
validation des livrables à chaque moment clef du calendrier budgétaire, pour pouvoir passer
d’une étape à l’autre de façon assez confiante.
En outre, le niveau stratégique, ayant adhéré totalement à la réforme dès le départ, a donné les
consignes nécessaires au niveau opérationnel pour la mise en œuvre de la réforme dans les
meilleures conditions. Si les comités interministériel et ministériel se réunissent de manière
épisodique, les échanges entre les différentes parties prenantes au niveau opérationnel sont très
fréquents.
De ce fait, les équipes en charge de la préfiguration, au sein des ministères, ont été fortement
sollicitées, devant mener à bien simultanément cette réforme tout en pilotant les activités
courantes et variées avec parfois des fonctions de responsabilité.
Bien que la recommandation de la direction du budget porte sur la diversification des profils de
l’équipe en charge de l’animation de la mise en œuvre de la réforme à l’échelle ministérielle,
néanmoins, cela présente un risque considérable quant à la conciliation entre l’accomplissement
des activités courantes et des nouvelles activités incitées par la réforme et le degré de
consécration qui devra leur être accordée. Des considérations relatives à l’aménagement de
l’horaire de travail et des mesures de compensation pouvaient être prévues.
16
2. La préfiguration du département de l’Artisanat et les prémices de
mise en œuvre
Comme tous les départements qui l’ont précédé, la préfiguration du département de l’artisanat
consistait principalement à la refonte de la structure de son budget et à l’élaboration de son
projet de performance.
Afin de mener à bien cet axe de préfiguration, le département a commencé par développer ses
principales orientations stratégiques, ses projets et actions et finalement faire ressortir ses
programmes.
Pour les réaliser, un plan d’action a été mis en œuvre, donnant le coup d’envoi à des chantiers
substantiels autour des trois domaines d’activités suivants :
Une fois que ce choix a été arrêté, les activités du département ont été énumérées de la façon la
plus exhaustive possible tout en distinguant les activités principales, des activités de support.
Pour les activités principales du département, elles peuvent être présentées de façon sommaire
dans le tableau suivant :
Domaine
Principales activités
d’activités
Contribution aux projets de développement locaux : Création et aménagement
des infrastructures d’artisanat (Village d’artisanat, Ensembles…)
Création des centres d’appui technique : un fond d’équipements à usage
collectif
Création de Dar Sanaa (centre de production et de commercialisation dédiés aux
-1-
femmes artisanes du milieu rural)
Appui à la
Achat de matériel technique de production et de protection au profit des
production
groupements d’artisans (coopératives et associations professionnelles)
Normalisation du secteur : adoption des normes marocaines spécifiques au
secteur de l’Artisanat dont des normes d’application obligatoire
R&D et innovation : partenariat avec les écoles supérieures et les universités,
Prix national des meilleurs artisans
Stratégie de labellisation : création de marques collectives de certification et
-2- certification des unités de production.
Promotion du Organisation ou participation à des manifestations promotionnelles à l’échelle
secteur et nationale et internationale
labélisation
Réalisation des opérations de communication institutionnelle
Création des centres de formation ‘’nouvelle génération’’
-3- Formation continue des artisans, déploiement des unités mobiles de formation
Formation des dans le milieu rural…
artisans Formation initiale
Alphabétisation fonctionnelle
Figure n°7 : « Domaines d’activités stratégiques du secteur de l’artisanat » élaborée par l’auteur sur
la base du bilan de la « Vision 2015 », publié sur le site du secrétariat d’Etat27 en juillet 2016.
Les activités de l’axe 1 et 3 sont menées par 3 directions métiers au sein du département, à
savoir la direction de la Stratégie (DSPC), la direction de la Formation (DFPFCA) et la direction
27
www.artisanat.gov.ma
18
de la Préservation (DPPIP)28. Alors que l’axe 2 est partagé entre la direction de préservation et
un établissement public sous la tutelle du Ministre et rattaché tout particulièrement au
département de l’Artisanat, appelé la Maison de l’artisan.
A partir de catégories homogènes de ces activités, six projets pertinents ont été identifiés et
rattachés au seul programme de politique publique du département.
Alors que les autres activités de support en matière de coordination, soutien des missions, de
gestion des ressources humaines et de modernisation des outils de travail des agents du
département, ont fait l’objet d’un programme support sous la responsabilité de la direction des
ressources (DRSI)29.
Dans l’annexe 1, un organigramme simplifié des différents acteurs du secrétariat d’Etat chargé
de l’Artisanat et de l’Economie sociale présente le positionnement du département de
l’Artisanat et ses directions, en particulier.
C’est autour de ces éléments que la refonte de la nomenclature du budget du département a été
opérée, allant de la structure administrative aux programmes et des catégories de dépenses aux
activités.
Pour passer à la nouvelle structure du budget, il a fallu fusionner les rubriques budgétaires
(articles, paragraphes et lignes de crédits) de trois directions métiers, aussi bien au niveau du
budget d’investissement qu’au niveau du budget de fonctionnement.
Malgré la diversité de la nature des activités menées au niveau de chaque direction, le comité
de pilotage stratégique du département, sous le conseil et les recommandations de l’unité Najaa
et des experts français, a préconisé une logique de mutualisation au sein d’un seul programme
dénommé « Artisanat ». Ce choix a été aussi motivé par le fait que le programme n’ait pas
atteint une taille critique en termes de l’enveloppe budgétaire qu’il représente et qui pourrait
obliger le département à prévoir plusieurs programmes à la fois.
28
DFPFCA : Direction de la Formation Professionnelle et de la Formation Continue des Artisans.
DPPIP : Direction de la Préservation et de l’Innovation et de la Protection du Patrimoine.
DSPC : Direction de la Stratégie, de la Programmation et de la Coopération.
29
DRSI : Direction des ressources et des systèmes d’information.
19
Toutefois, la notion de taille critique des programmes n’a jamais été explicitée au moment de
la préfiguration et aucun plafond ou seuil en terme budgétaire n’a été donné, et le pouvoir
d’appréciation était donné au Secrétaire général ou au Ministre pour en juger en dernier ressort.
En réalité, cette intégration a été plus motivée par la grande marge de manœuvre qu’elle
permettra une fois la fongibilité30 en vigueur.
C’est ainsi que de 2015 à 2016, la structure budgétaire a évolué comme suit :
Le niveau qui vient juste après les programmes dans la nouvelle architecture du budget est celui
des régions. Elles sont en nombre de douze, depuis la dernière organisation territoriale du Maroc
en 2015, et ne sont déclinées qu’au niveau du budget d’investissement du programme
« Artisanat ». Néanmoins, aucun crédit ne leur est affecté puisque le département ne procède
jusque-là que par délégation après le vote de la loi de finances.
30
Liberté de redéploiement des crédits entre les programmes d’un même chapitre ou à l’intérieur d’un même
programme, selon des modalités souples.
31
Projet de loi de finances.
32
Circulaire du ministre de l’Economie et des finances du 19 juillet 2017, sous le n°4973/E.
20
Pourtant, cela présente un risque majeur de perte de temps et de non responsabilisation des
gestionnaires au niveau déconcentré puisqu’ils manquent d’une autonomie financière bien que
relative, sinon une sur-responsabilisation des gestionnaires au niveau central qui se voient en
charge de gérer les projets à portée aussi bien nationale que régionale.
A ce niveau de passage vers la nouvelle structure budgétaire, il a fallu opérer une mutualisation
et une consolidation des lignes de crédits homogènes et/ou récurrentes (comme les activités de
partenariat et d’études) des différents paragraphes budgétaires de l’ancienne structure, pour
pouvoir représenter toutes les activités opérées par le département, réparties cette fois-ci par
projet.
Les écarts entre 2015 et 2016 se justifient ainsi par la réduction des niveaux de répartition du
budget et la fusion des rubriques redondantes que l’on pouvait trouver au niveau de chaque
direction et qui sont désormais, en majorité, consolidées au niveau des projets.
Une amélioration de cette structure verra le jour dans les années qui suivront, après
reclassement des rubriques budgétaires relatives à l’administration territoriales dans la
catégorie « Région » pour préparer l’entrée en vigueur de la nouvelle nomenclature du budget
(Cf. figure n°1).
33
Matériel et Dépenses Diverses : Sous-catégorie des dépenses de fonctionnement, en plus des dépenses du
personnel.
21
Du point de vue qualitatif, ne considérant que le programme « Artisanat », et en retirant les
articles liés au budget des directions régionales, la structure du budget d’investissement est
apurée et allégée et les rubriques budgétaires qui constituaient un ensemble de dépenses
homogènes et redondants ont été consolidées et intégrés dans les projets. Ces évolutions sont
présentées dans le tableau suivant :
Loi de finance 2015 Loi de finance 2016
Article/ Paragraphe/
Article Paragraphe
Programme Projet
Etudes sur le secteur de l'artisanat Appui à la production et à
Participation à la création et aménagement la commercialisation
d'espaces d'activités artisanales
5000
Partenariat et appui
Centre international de promotion de
l’artisanat
Appui à la production artisanale
Programme: hygiène, santé et sécurité des
artisans
Prix du meilleur artisan Labellisation, certification
Programme de normalisation et de et innovation*
6000 certification de la qualité
Partenariat et appui
Protection du patrimoine de l'artisanat Promotion de l'artisanat *
Participation à la création, aménagement 2000
et animation des centres d'appui technique
et Dar Sanaa
Etudes Formation initiale
Etablissements de formation
professionnelle
Organisation de stages pour formateurs
Formation continue des artisans
Partenariat et appui Formation continue des
7000
Contribution aux dépenses artisans
d’investissement d’établissements de
formation professionnelle (SEGMA)
Unités mobiles de formation
Institut supérieur des arts et métiers Alphabétisation
d'artisanat fonctionnelle *
*Ce sont des projets de regroupement, chacun regroupant 1 à 2 sous projets déclinés ensuite en
des lignes de crédits.
Figure n°10 : « Evolution de la structure du budget d’investissement formant le programme
« Artisanat » et ses projets après la réforme», élaborée par l’auteur sur la base des morasses
budgétaires du département de 2015 et de 2016.
22
D’une part, ce choix a été opéré pour que le projet « promotion du secteur » n’inclut que les
activités de l’établissement « Maison de l’artisan » afin de permettre un suivi particulier de
l’évolution des crédits de cet établissement, tout en reconnaissant la spécificité des activités de
la labélisation qui, non seulement promeuvent le secteur, mais aussi appuient les artisans en
améliorant la qualité de leurs produits et de leurs outils de production.
Quant aux projets liés à la formation, ils ont été répartis en trois catégories traduisant au mieux
l’offre du département en la matière.
Dès lors que la refonte de la nomenclature budgétaire a induit l’intégration et la fusion des
activités de plusieurs directions, une problématique de gouvernance a été relevée.
Avec la nouvelle architecture budgétaire, les sous-ordonnateurs des deux directions se voient
partager un montant des crédits mis à leur disposition affectés au même projet et sur une ligne
bien spécifique intitulée « Contribution aux projets initiés en partenariat avec les organismes
publics, privés et de recherches et développement » sans distinction apparente de la part de
chacun des deux sous-ordonnateurs :
23
Avant restructuration Après restructuration
Article Paragraphe Article Paragraphe
5000 Partenariat et appui 2000 Appui à la production et à la
6000 Partenariat et appui commercialisation
Bien que l’objectif ait été justement orienté vers la mutualisation des moyens et la
rationalisation de la structure budgétaire, l’absence d’un système d’information performant
permettant le suivi de l’exécution des crédits à la fois par projet que par ordonnateur nuit à
l’organisation des services des sous-ordonnateurs et entrave à l’accomplissement du principe
de la transparence, non seulement pour des raisons de contrôle mais aussi de planification et
d’aide à la décision.
Par ailleurs, le projet « Promotion de l’artisanat » ne comporte que des versements au profit de
la maison de l’artisan – un établissement public, placé sous la tutelle du département, qui joue
un rôle exclusif en matière de promotion des produits d’artisanat à l’échelle internationale mais
qui mène également quelques actions à l’échelle nationale - et n’accorde au responsable de
programme qu’une visibilité très limitée de la destination des crédits versés.
Cela remet encore la gouvernance au cœur du débat, d’autant plus que le responsable du
programme doit rendre compte des résultats des six projets constituant le programme. Tenant
compte de ce dernier aspect, cela est presque « Mission impossible » puisque le RP ne dispose
pas des éléments nécessaires sur la destination de crédits alloués à un projet dont le budget
représente 37% des crédits d’investissement de la loi de finances de 2018.
24
2.2. L’élaboration du projet de performance
Partant de la stratégie définie par le département, il n’a pas fallu hésiter longtemps pour choisir
les objectifs des deux programmes qu’il a identifiés.
Quant au programme « Artisanat », les objectifs retenus tournent autour des 3 principaux
domaines d’activités de la stratégie identifiée auparavant, à savoir : l’appui à la production et à
la commercialisation, la promotion du secteur et la formation. En effet, ce ne sont que la
consolidation des objectifs de l’ancienne stratégie, et ils se présentent comme suit :
Ces objectifs n’ont pas évolué dans les années suivantes et chacun d’eux a été décliné en
plusieurs indicateurs de performance, ce qui sera traité amplement dans la 3ème partie de l’étude.
34
Circulaire du chef du gouvernement, n°4/2015 du 18 juin 2015.
25
Toutefois, l’élaboration d’un projet de performance, qui reprend le cadre logique de la
démarche de performance, a fait l’objet de plusieurs réunions de concertation et d’échanges
entre l’unité Najaa et l’équipe projet dédiée à l’animation de la réforme au niveau du
département pour le faire valider. Cette étape est cruciale puisque dès lors que le projet est
validé, il est rendu public, téléchargeable sur le site dédié 35 du ministère de l’Economie et des
Finances (MEF).
La validation du 1er PDP du département a profité d’une certaine marge de tolérance de la part
des accompagnateurs (représentants du MEF : Unité Najaa et experts français) et d’une faible
exigence quant à l’exactitude des données renseignées et les choix effectués, l’objectif étant
d’initier le département à la démarche, susciter la réflexion des gestionnaires et la production
d’un livrable en dépit de la pertinence des informations qui y sont transcrites. Cette approche a
favorisé un climat de confiance entre les accompagnateurs et les agents de l’administration
publique et a éliminé d’avance les tensions de la contrainte réglementaire de la LOF.
Cependant, la complexité des travaux d’élaboration du PDP, n’a pas toujours permis la
validation du PDP et donc a empêché sa publication sur le site dédié à la LOF, notamment en
2016, au moment de la préparation du projet de loi de finances de 2017, en raison de la
désapprobation des accompagnateurs de la proposition du département.
Cette désapprobation a porté principalement sur le choix des indicateurs de performance qui ne
font pas toujours consensus, entre ce que doit être un indicateur (une proportionnalité entre les
formules possibles : Taux, nombre, coût…) et ce qui est possible de renseigner en réalité par
les directions métiers (en nombre, en majorité).
En 2017, la publication du PDP de l’année 2018 a été faite, quoique en retard, vers la fin du
mois de mars/ début avril 2018, au lieu de fin décembre 2017.
35
Plateforme dédiée à la communication sur la LOF, élaborée par la direction du Budget relevant du ministère
de l’Economie et des Finances au Maroc : www.lof.finances.gov.ma
26
En effet, l’année 2017 avait connu des contraintes spécifiques dues à la nomination tardive du
nouveau gouvernement. La nouvelle formation gouvernementale a changé le rattachement du
département en le plaçant en tant que secrétariat d’Etat auprès d’un nouveau ministère et de ce
fait, un délai d’adaptation et de compréhension des processus a été nécessaire avant d’obtenir
l’aval du nouveau Ministre pour permettre l’envoi du PDP pour publication.
A tout cela s’ajoute, un dernier aspect linguistique, quant à la langue de rédaction des
documents administratifs officiels, une polémique survenue en fin d’année 2017, induisant
l’instruction de la maquette du projet de performance en arabe, au lieu de celle en français. Cela
a nécessité notamment un délai de traduction et d’harmonisation du vocabulaire.
Cela étant dit, le PDP du département n’est pas figé. Bien au contraire, il est perfectible d’un
exercice à l’autre au fil des discussions entretenues avec les accompagnateurs et en fonction du
retour d’expérience propre au département. En effet, les résultats que le département obtient
chaque année, après le déploiement de ses projets et les écarts qu’ils dégagent par rapport aux
prévisions établies dans les exercices antérieurs, l’ont engagé dans un processus d’amélioration
continue.
36
Circulaire du Ministre de l’Economie et des Finances n° 1693/E en date du 13/03/2017 relative à l’élaboration
des projets de performance (PDP).
27
Le responsable du programme (RP) de politique publique du département de l’Artisanat est la
directrice de la Stratégie, désigné par le Ministre, après concertation entre le Secrétaire général
et des Directeurs centraux du département qui étaient encouragés à faire preuve d’initiative.
C’était aussi parce que ce rôle est cohérent avec ses attributions dans la définition et le suivi de
la stratégie du département justement.
Cela étant dit, la RP se retrouve face à une réalité délicate avec les autres Directeurs centraux
du département. Car bien qu’il n’y ait pas de relation hiérarchique entre eux, néanmoins, une
supériorité fonctionnelle désormais prend place et obligent ces Directeurs à rendre compte de
leurs activités, à leur collègue RP. Cette approche ne manque pas de susciter des inquiétudes
quant aux risques d’ingérence dans l’exercice de leur pouvoir, dans leur périmètre de
compétence.
D’un autre point de vue, la RP qui garde toujours ses prérogatives de sous-ordonnateur37 de la
direction qu’elle dirige, comme pour le reste des Directeurs centraux d’ailleurs, est comme prise
au piège d’une exigence de connaissance et même de compétence transverse aux projets gérés
par ses collègues en deçà des projets portés par la direction qu’elle dirige. Sachant que le budget
des deux autres directions concernées par le programme « Artisanat » est important et les
activités sont diversifiées.
D’une part, cela relève une incompatibilité entre les prérogatives de responsable de programme
et de sous-ordonnateur à cause des risques que présente l’association de deux responsabilités
aussi importantes et engageantes en termes de temps et d’effort. Surtout que la responsable de
programme est, dans le cas présent, sous-ordonnateur d’environ 30% seulement, du budget
d’investissement du programme dont elle est responsable. Pourtant, elle est responsabilisée du
suivi et de la mise en oeuvre de tous les objectifs du programme.
En sus, l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la nouvelle LOF mène à l’adaptation
de l’outil aux nouvelles exigences réglementaires dont l’exemple le plus pertinent à nos jours
est la budgétisation sensible au genre. Bien qu’elle soit intervenue au-delà de la période de
37
Prérogatives relatives à la gestion des finances publiques, en matière de gestion des crédits.
28
préfiguration, sa mise en œuvre était l’occasion de mettre en exergue des aspects pertinents de
la réforme.
La préparation du projet de loi de finances de 2018 a été accompagnée par la préparation d’un
projet de performance tenant compte de l’approche genre38. Il s’agissait de présenter les efforts
de chaque département ministériel et institution publique, y compris le département de
l’artisanat, dans le projet gouvernemental pour l’égalité Homme-Femme et l’introduction
d’indicateurs renseignant sur la part des femmes et des hommes dans les prévisions et les
résultats de chaque indicateur de performance, quand cela est bien évidemment possible.
Cependant, dans la logique de programmation, cela suppose avoir des objectifs par genre. Cela
n’est pas une nouveauté pour des départements dont la programmation est historiquement
sensible au genre. C’est le cas du département de la santé dans son objectif de ‘’mise à niveau
de l’offre de soins sur la base des critères de planification de la carte sanitaire’’, un objectif lié
à l’adéquation de l’offre de soins présentée aux femmes mariées en âge de procréation, ou de
l’objectif ‘’amélioration de la santé reproductive et maternelle’’, tout aussi dédié à la situation
sanitaire des femmes dans la société marocaine.
C’est le cas aussi par exemple pour le département de la jeunesse et des sports, le département
de l’éducation nationale, le département de la fonction publique et le département de la famille,
de la solidarité et de l’égalité qui intègrent tous l’approche genre à des niveaux différents de
leur programmation (programmes, projets et objectifs). Pour le reste des départements dont les
actions couvrent une population donnée, sans distinction de genre, cette programmation n’était
pas facile à mettre en place.
Cette difficulté est assez perceptible au département de l’Artisanat qui travaille sur un seul
chantier d’appui exclusif pour la femme, consistant à créer un espace de travail dédié aux
groupements d’artisanes dans le milieu rural (associations, coopératives…), appelé Dar Sanaa.
Un espace doté de matériels de production, d’hygiène et de sécurité nécessaires et à même de
renforcer leurs capacités de production et améliorer leurs revenus. Et si le nombre de Dar Sanaa
créés peut être connu à l’avance par le ministère, le nombre des bénéficiaires est laissé au bon
vouloir des circonstances (la capacité d’accueil des locaux disponibles à l’aménagement,
proportion de l’activité artisanale dans la localité où Dar Sanaa a été créée...), tout en veillant à
38
Conformément à l’article 39 de la LOF mis en œuvre par la circulaire du chef du Gouvernement n°7/2017.
29
en faire bénéficier le maximum d’artisanes possible. La contrainte est d’autant plus grande
lorsque le local n’a pas été construit par le département lui-même et finalement, les bénéficiaires
s’adaptent à la capacité d’accueil potentielle de l’espace ou le potentiel d’activité qui peut y
avoir lieu parmi les différentes filières d’artisanat (tissage, poterie…).
Les autres actions d’appui aux mono-artisans et aux groupements et les différentes actions de
formation sont menées auprès des artisans sans distinction de genre et sans objectif préalable
sensible au genre. De ce fait, il n’est pas possible de donner des chiffres au stade des prévisions
annuelles de performance puisque l’information ne devient disponible qu’après l’écoulement
de l’année et recensement des bénéficiaires des différentes actions.
L’exercice auquel s’est prêté le département dans l’élaboration du PDP 2018 a finalement
dégagé la pauvreté des programmes dédiés aux femmes du secteur mais a confirmé aussi la
difficulté de collecte d’informations due cette fois-ci non seulement à la défaillance du système
d’information adapté mais à un défaut de prévision.
30
3. Les indicateurs de performance du département de l’Artisanat :
leur évolution et les contraintes de performance
Sur le PDP de 2016, les objectifs et les indicateurs de ce programme se présentaient comme
suit :
Programme Objectif Indicateur
Support Développer un Système Taux d’efficacité du Système
et pilotage d’Information sécurisé et couvrant d’information
les différents besoins fonctionnels Taux d’efficience bureautique
du Ministère
Améliorer les compétences des Nombre de formations en jour/Homme
ressources humaines du Ministère (JHF)
Ratio d’efficience de la gestion des
ressources humaines (GRH)
Figure n°14 : « Présentation des objectifs et des indicateurs du programme « support et pilotage » en
2016 », élaborée par l’auteur sur la base du projet de performance du département de l’Artisanat de
2016.
Les deux indicateurs relatifs à l’efficience bureautique et de la GRH sont des éléments
transversaux avec tous les ministères mis en place par la circulaire du chef du Gouvernement39
39
Circulaire n°4/2015 portant sur le lancement de la 3ème vague de préfiguration de la LOF n°130.30.
31
en date du 18/06/2015, en vue de pouvoir « faire des comparaisons entre tous les départements
ministériels et diffuser les bonnes pratiques en la matière40 ».
Le taux d’efficience bureautique étant un indicateur de mesure du coût annuel moyen du poste
bureautique pour un parc donné de postes, sa formule se présente comme suit :
Taux d’efficience bureautique = Dépenses annuelles de bureautique
Nombre de bureaux
Les dépenses incluent, entre autres, aussi bien les dépenses d’achat d’ordinateurs,
d’imprimantes et de consommables que les frais de maintenance du matériel. Toutefois, il
n’inclut pas les frais de connectivité au réseau d’Internet. Alors que le nombre de bureaux
renvoi au nombre de postes bureautiques correspondant aux bureaux et aux locaux où le
matériel informatique est affecté et est fonctionnel41.
Cet indicateur fait joindre alors aussi bien des dépenses de fonctionnement relatives aux frais
de maintenance et de consommables que d’investissement pour tout ce qui est achat de matériel,
toutefois la relation entre ces dépenses est assez proportionnelle. On obtient finalement un
indicateur assez représentatif de l’effort de modernisation de l’administration en termes de sa
dotation du minimum nécessaire des outils de travail mais qui est calculé en fonction de bureaux
à équiper mais pas de fonctionnaires à doter des outils de travail appropriés !
En effet, l’indicateur est voulu par la direction du Budget42 en tant que tel pour mesurer l’effort
de l’Etat dans la modernisation des outils de travail mais, sans le rapporter au besoin réel, la
mesure de performance n’a finalement pas eu lieu.
40
Tiré de la présentation de Mme BENGRINE Mouna à l’occasion des Sessions d’information et de partage sur
les dispositifs de la nouvelle Loi Organique relative à la loi de Finances organisées par le ministère de la Santé
avec l’appui de l’Organisation Mondiale de la Santé, le 9 décembre 2015.
41
D’après les éclaircissements fournis sur le PDP du département de l’Artisanat de 2016 et celui de 2018.
42
« Guide performance », élaboré par la direction du Budget, page 40.
43
« Guide performance », élaboré par la direction du Budget.
32
Toutefois, bien en intégrant le concept d’efficience au niveau de l’intitulé, les dépenses
n’apparaissent pas dans les éléments de calcul du résultat de cet indicateur qui ne renseigne
finalement pas sur le coût de la fonction GRH. Cela remet en question la pertinence de
l’indicateur, du moins, vu son intitulé et la capacité de la direction du Budget à évaluer
l’efficience d’un dispositif sans le rapporter à son coût.
En 2018, le programme « Support et pilotage » est maintenu avec un léger changement au
niveau des indicateurs afin de s’adapter aux exigences de la budgétisation sensible au genre
(BSG) en vigueur depuis 2018, comme suit :
44
Maquette du projet de performance de 2016.
34
qui auraient pu être présentés comme indicateurs. Cette pratique de détourner le nombre limite
des indicateurs nuit à la clarté du PDP, et entrave la fluidité de l’organisation du document.
Par ailleurs, pour l’établissement de ces projets de performance, le département a capitalisé sur
l’expérience de certains départements ayant participé à la 1ère et la 2ème vague de préfiguration,
principalement le département de l’Agriculture qui opère une activité similaire en matière de
labellisation et de normalisation, le département de l’Education nationale et le département de
la Formation professionnelle pour les objectifs et les indicateurs relatifs à la formation.
Toutefois, tout n’a pas été créé à partir de zéro car le département disposait, bien avant
l’avènement de la réforme, des objectifs et des indicateurs de mesure de ses résultats. A titre
d’exemple, l’indicateur relatif au taux de certification découle en fait d’une stratégie de
labellisation dans le département engagée depuis 2007, grâce à laquelle, un nombre d’unités de
production à certifier était fixé chaque année et dont les résultats orientaient le département
pour le réajustement de ses objectifs les années suivantes.
De même, l’indicateur relatif au taux d’insertion des lauréats à la sortie des établissements de
formation faisait l’objet d’une enquête spécifique menée par le département tous les deux ans.
Ce taux a été particulièrement suivi et orientait le département quant à l’amélioration de son
offre de formation et de sa capacité à mettre sur le marché de l’emploi, des lauréats-artisans
capables de répondre aux besoins des consommateurs.
Les indicateurs relatifs au taux des foires organisées et au taux de compagnes de communication
et de rencontres B to B, sont spécifiques à la Maison de l’Artisan.
Quant à l’intitulé des indicateurs présentés en « taux », à part « le taux d’insertion des lauréats »,
ils présentent une aberration totale, puisque dans la réalité, ces indicateurs renseignent sur le
nombre des réalisations, sans les rapporter à aucun dénominateur pertinent, si ce n’est parfois
que la valeur cible relative à chaque indicateur et dont la définition est encore très floue et
départagée entre le résultat annuel à atteindre pour chaque indicateur ou le résultat cumulé à
une année cible.
35
En 2018, les objectifs et les indicateurs du programme « Artisanat », se présentent comme suit :
Ce qui ressort à ce stade est le changement remarquable dans l’appellation des indicateurs
notamment en remplaçant ‘’Taux‘’ par ‘’Nombre’’. Cela rend les indicateurs en effet plus
sincères mais pas plus pertinents puisqu’ils renseignent surtout sur des éléments d’activité sans
aucun rapport avec une référence de base ou d’objectifs. Cette évolution est le résultat des
36
nombreuses concertations entre l’équipe ministérielle et les accompagnateurs, où il y avait
toujours un décalage entre ce que recommandaient ces derniers (un certain équilibre
proportionnel entre Taux, ratios et nombre dans les indicateurs) et ce que les gestionnaires
pourraient éventuellement renseigner (pour la majorité des indicateurs ce sont que des
nombres). En plus, à aucun moment, le département, ni aucun département ministériel ou
institution publique d’ailleurs, ne précise clairement sur son PDP la catégorie de l’indicateur,
s’il renseigne sur l’efficacité, l’efficience ou la performance.
Le changement majeur que relève ce PDP aussi, est le remplacement de l’indicateur « Taux de
certification » par « le nombre d’unités de production auditées » en vue de l’octroi du droit
d’usage des marques collectives de certification. Cette modification a été opérée pour montrer
l’effort du département dans le déploiement de la stratégie de labellisation en précisant le
nombre des unités auditées qui est largement supérieur aux unités réellement certifiées, ce qui
peut considérablement justifier les crédits budgétaires dédiés à cette action d’audit pour laquelle
la certification n’est que l’aboutissement. Cet indicateur ainsi que d’autres sur le PDP de 2018
impliquant des personnes bénéficiaires de l’action de l’Etat, renseignent désormais, dans la
mesure du possible, sur la part des femmes dans les résultats enregistrés quant à l’atteinte des
objectifs du programme, à travers un sous-indicateur dédié dont l’appellation est suivit par
« selon le genre ».
Par ailleurs, un nouvel indicateur a aussi vu le jour appelé « Capacité d’accueil » renseignant
sur le taux de couverture des établissements de formation placés sous la tutelle de la direction
de la Formation45.
L’un des indicateurs défini pour la Maison de l’Artisan a aussi été révisé pour parler de deux
dimensions des compagnes de communication (média et hors-média) réalisées par
l’établissement au lieu de parler des rencontres B to B ou des réseaux de distribution. C’était
en effet, la première fois que l’occasion se présentait à cet établissement pour revoir ses propres
indicateurs, établis au départ par l’administration centrale du département de tutelle, sans le
consulter. Ce comportement était justifié par le délai très court, de quatre semaines46, qui était
accordé à l’administration centrale pour transmettre le PDP de tout le département à la direction
du Budget en 2015.
45
Selon les précisions méthodologiques présentées dans le PDP 2018 du secrétariat d’Etat de l’Artisanat et de
l’Economie Sociale.
46
Entre la publication de la circulaire de lancement de la 3ème vague de préfiguration le 15 juin 2015 et la
deuxième semaine de juillet 2015, date limite de sa transmission à la direction du Budget.
37
Cela étant dit, le premier rapport de performance établi par le département de l’Artisanat en
2016, à titre volontaire et sur les recommandations des accompagnateurs était une opportunité
pour s’exercer à la pratique de rendre compte avec une obligation de justification des écarts
constatés. Et si ce rapport n’a pas remis en question les programmes, les projets et les objectifs
du département, c’était l’occasion pour s’arrêter sur des réalités importantes au sujet des
modalités pratiques de collecte des informations sur les indicateurs remettant en question
l’intérêt et la qualité des indicateurs.
La place du numérique dans la gestion de l’information n’est plus un sujet à débattre de nos
jours et son rôle de facilitateur d’accès aux données n’est plus un secret pour personne. Il a fait
même l’objet d’une priorité gouvernementale grâce au plan « Maroc numérique » ensuite
« Digitale Maroc ». A nos jours, les résultats sont ressentis (système de gestion intégrée des
dépenses (GID), dématérialisation de la procédure des marchés publiques …), néanmoins un
bon bout de chemin reste à parcourir en matière de dématérialisation des services publics et de
la dotation des départements ministériels et des institutions publiques des moyens à même
d’accompagner le défi de la modernisation des outils de travail.
47
Considéré ici comme étant « l’atteinte par une administration publique des objectifs préalablement définis
dans la réalisation d’un programme », tiré du glossaire du site dédié à la LOF au Maroc : www.lof.finances.gov.ma
38
Les opérations d’audit sont menées aussi bien à l’échelle nationale par l’administration centrale
que régionale par l’administration territoriale pour cinquante-deux marques, avec une fréquence
variable : annuelle pour le label national « Maroc Fait main » et occasionnelle pour le reste des
marques ; les deux actions étant dépendantes des demandes de certification reçues et le budget
disponible pour engager des opérations d’audit de certification. Tandis que certaines opérations
pilotes de certification sont organisées à l’occasion de la création de nouvelles marques.
Le projet de certification est piloté par une équipe de cinq personnes au niveau de
l’administration centrale en plus de comités territoriaux de labellisation de proximité qui gèrent
toute la chaine de valeurs depuis l’expression du besoin jusqu’à l’octroi du droit d’usage sur
tout le territoire du pays.
Bien que ce problème soit omniprésent depuis des années, la réforme a le mérite de le mettre
en exergue et de le placer dans le registre des priorités.
La gestion des imprévus s’impose à tout fonctionnaire tout au long de sa carrière et le désordre
que ces imprévus peuvent causer est perceptible sur les résultats de performance de tout
département. Dans le cas présent, deux indicateurs du programme « Artisanat » illustrent
39
parfaitement l’impact des aléas d’exécution du programme sur le projet de performance du
département.
Si la fongibilité des crédits vient au secours des sous-ordonnateurs et du RP lorsque de tels aléas
se produisent, néanmoins cette disposition présente le risque d’amplifier la problématique du
défaut des prévisions budgétaires.
Dans le même sens, il serait pertinent d’opter pour la mise en œuvre progressive de la
fongibilité, afin de permettre d’en mesurer l’impact.
Au niveau du même indicateur relatif au « nombre des unités auditées », il est difficile de
distinguer la nature/la catégorie de l’indicateur et l’objectif auquel il répond et donc son intérêt.
S’il est :
40
- Un indicateur d’activité, à travers lequel le responsable de programme se prononce sur
le volume de ses réalisations, sachant que l’opération de certification est un élément
incontournable du plan d’action du département de l’artisanat ;
- Un indicateur de moyens qui justifie le budget alloué aux actions d’audit et qui
représentait en 2016, environ 3% du budget du programme « Artisanat » auquel
l’indicateur est rattaché (une dépense d’environ 7,2 millions de Dirham par rapport au
total des dépenses du programme d’environ 265 millions de dirham) ;
Pourtant, tel que la direction du Budget le précise dans le guide de performance qu’elle a élaboré
en 2015, dans un effort d’orientation des départements ministériels et institutions publiques
dans leur démarche de performance, est que cette dernière n’est justement pas « une
budgétisation basée sur la performance [qui lie] directement la performance à l’exercice
budgétaire, mais de faire en sorte que la performance apporte un éclairage à la
budgétisation ». Il s’agirait au fait, « d’une part d’éclairer les décisions d’allocations
budgétaires et d’autre part de détecter des pistes d’économie potentielles à travers l’analyse
des résultats relatifs à la performance », selon le même guide.
Un autre indicateur appelé « Normalisation » serait assez intéressant à analyser dans le cadre
de cette approche budgétaire puisqu’il rend compte du nombre des normes adoptées par le
département, c’est-à-dire des textes juridiques portant sur des critères de définition, de
41
description et d’essais assurant l’amélioration de la qualité des produits de l’artisanat, pourtant,
il coûte zéro unité monétaire.
L’élaboration des normes est une action normative et exclusive du département de l’Artisanat
pour les aspects liés à son secteur. Elle se fait par voie de concertation entre les différents
partenaires intervenant dans le domaine de la normalisation notamment l’IMANOR (Institut
Marocain de Normalisation), les associations des professionnelles du secteur et même parfois
des responsables d’autres ministères quand le périmètre de la norme l’impose, par exemple les
questions liées à la protection de l’environnement. Pourtant, elle ne génère pas de coût pour le
programme autant que tel, mais un coût de mobilisation des ressources humaines en charge de
cette action qui est pris en compte dans la rémunération du personnel.
Des principales dispositions de réforme apportées par la LOF, le rôle du parlement dans sa
mission d’évaluation des politiques publiques est très attendu, de même que la démarche de
l’institution de la Cour des comptes dans le renforcement de cette mission. En sus, la démarche
de performance fournie des outils d’évaluation, notamment le projet de performance et le
rapport qui s’en suit, permettant l’analyse du couple objectif/indicateur, se faisant appuyé par
une morasse budgétaire adaptée.
A titre d’exemple, l’objectif « Améliorer les moyens de production et accompagner les acteurs
du secteur », des différents indicateurs qui sont sensés mesurer le degré de sa réalisation, on
retrouve l’indicateur intitulé « Nombre des bénéficiaires de l’appui aux groupements
d’artisans» qui renseigne justement sur le nombre des bénéficiaires de l’appui en matière
d’achat d’équipement.
42
Sachant que le budget qui était prévu à cette action est d’un peu plus de 12 millions de dirham
en 2016 et les résultats relevés par cet indicateur pour la même année est de 191648. Par une
approche comparatiste, rapportant les moyens mobilisés […] aux résultats tangibles et
identifiables49, l’objectif de 2017 est de l’ordre de 120050 et les crédits qui lui sont alloués sont
de l’ordre de plus de 9 millions de dirhams. Ainsi, l’évolution du nombre des bénéficiaires ne
suit pas l’évolution du budget dédié à cette action d’appui :
Par ailleurs, à part le suivi de livraison du matériel acheté, aucun suivi auprès des bénéficiaires
permettant d’apprécier le degré d’impact de cette amélioration des moyens de production sur la
situation des artisans. Dès lors, il est difficile de statuer sur le besoin d’engagement de l’Etat et
de sa performance illustrée à travers cette action et s’il faudrait la consolider ou pas. Certes le
département trace l’évolution du chiffre d’affaires des artisans sur tout le territoire du royaume
à l’aide d’une enquête annuelle menée par l’observatoire de l’artisanat, mais ne démontre pas
justement la liaison directe entre cette évolution et l’action d’appui, ou n’importe quelle autre
action d’ailleurs.
Cela nécessiterait évidemment des études spécifiques justement, qui engageraient l’Etat dans
des budgets supplémentaires. C’est pourquoi, le département se limite à communiquer sur ses
réalisations ainsi, en estimant que de toute façon, l’impact socio-économique que devrait
ressentir l’artisan en réalité, n’est pas le résultat d’une seule action mais de la synergie d’un
ensemble cohérent d’actions.
Recommandation 4 : Reconsidérer les indicateurs du programme « Artisanat » en privilégiant
des indicateurs plus synthétiques renseignant davantage sur le bénéfice pour les citoyens et
donc sur l’efficacité socio-économique51. Des indicateurs qui peuvent être renseignés de façon
périodique mais qui apporteront plus de visibilité aux citoyens sur l’action du département et
permettraient à ce dernier de mesurer l’impact de ses projets.
A l’instar des pays en voie de développement, cherchant à se faire une place dans le village
mondial, il est indispensable de respecter les standards en vigueur et de converger vers les
modèles de développement les plus appropriés. Cependant, quand on est sous contrainte
budgétaire et que la souveraineté de l’Etat entre en jeu, le souvenir du programme d’ajustement
structurel rappelle à l’ordre et impulse même, de grandes réformes structurelles. Pour le
bonheur de certains et le malheur d’autres, le Maroc ne fait pas l’exception.
La réforme de la LOF au Maroc, comme partout ailleurs, selon les standards de la nouvelle
gestion publique, est une évolution considérable du fonctionnement de l’administration et de la
gestion des dépenses publiques en particulier, toutefois, la réforme s’étend à bien d’autres sujets
que la finance.
En effet, la motivation des fonctionnaires est un volet ignoré de la réforme, partant même de la
désignation d’un responsable de programme. Ce dernier, à qui on n’a pas pensé offrir une
amélioration statutaire ou prévoir une rémunération appropriée aux responsabilités qui lui
incombent. Cela étant dit, ce volet est historiquement banni de l’administration marocaine et
les sources classiques de motivation demeurent l’emploi stable, la rémunération constante et
l’horaire de travail raisonnable, toutes importantes, mais le jeune fonctionnaire d’aujourd’hui
en demande plus encore.
En réalité, l’institution du parlement est sensée y jouer un rôle de facilitateur quid à ce que les
représentants du peuple soient eux même conscients de l’intérêt de la réforme et participent au
changement.
S’agissant de la reddition des comptes, le rôle de l’institution de la Cour des comptes est fort
attendu. Et s’il n’entre en vigueur qu’en 2020, c’est justement pour donner le temps aux
départements ministériels et aux institutions publiques de s’approprier les nouveaux outils
introduits par la réforme. Etant concernée aussi par un jumelage institutionnel avec la Cour des
comptes en France, cette expérience se présente en effet, comme levier d’appropriation du
dispositif de la certification des comptes de l’Etat et de la démarche pédagogique du contrôle
en général. Toutefois, la faiblesse du système de contrôle interne au sein des administrations,
augmente la marge d’appréciation des magistrats et risque de porter atteinte à l’objectivité des
jugements.
52
Benzerafa Alilat, Manel, et Patrick Gibert. « Dynamique des indicateurs de reporting externe : le cas des
indicateurs des projets et rapport annuels de performance annexés aux lois de finances », Revue française
d'administration publique, vol. 155, no. 3, 2015, pp. 763-778.
Et Gibert, Patrick, et Manel Benzerafa-Alilat. « De quoi l’État rend-il compte dans ses rapports annuels de
performance ? », Revue française d'administration publique, vol. 160, no. 4, 2016, pp. 1041-1064.
45
Le chantier de mise en place du dispositif de contrôle interne au sein de l’administration
publique marocaine est lancée depuis un certain bon nombre d’années, mais n’est pas généralisé
sur l’ensemble des départements et institutions publiques à ce jour, et rencontrent des
résistances dans son appropriation. La vulnérabilité de son portage par le top management en
est en partie responsable, craignant d’une part de porter atteinte à la fluidité du service ou tout
simplement par insuffisance d’appropriation de la démarche du contrôle au sommet de la
hiérarchie même.
Ainsi, la réforme propose de changer une culture administrative, malgré le poids des habitudes,
où la ressource humaine est le principal moteur et où la logique de résultats est primordiale
aussi bien dans la programmation à priori que dans l’évaluation à postériori. Néanmoins, malgré
tout ce que l’on peut dire sur la démarche de performance, sa pertinence ne peut se mesurer
qu’au degré de sa soutenabilité, mise à l’épreuve de son exécution à moyen et long terme.
46
Ressources bibliographiques
Corpus normatif :
Publications du MEF :
47
- Présentation de M. MORDACQ Franck, chef du projet de jumelage institutionnel entre le Maroc
et Expertise France à l’occasion des ateliers des ministères préfigurateurs à la LOF de la quatrième
vague, en date du 1er mars 2016.
- Liste des projets de l’union européenne au Maroc consultable sur le site internet du service de
l’action extérieure de l’union européenne : « https://eeas.europa.eu».
- Fiche de suivi du projet HAKAMA par la banque mondiale: MA-Support New Governance
Framework (P143979).
- Dépliant institutionnel du bureau de la Banque mondiale au Maroc, portant sur le projet Hakama.
- Fiche de projet de jumelage entre le Maroc et l’union européenne au sujet du «Renforcement des
capacités dans le cadre de la mise en œuvre de la LOF ».
- Lettre d’accord de soutien de la banque mondiale au projet Hakama.
MBENGUE Seydina, Mémoire professionnel portant sur « l’enseignement supérieur public du Sénégal
et le défi de la gestion par la performance », Juin 2017.
Benzerafa Alilat, Manel, et Patrick Gibert. « Dynamique des indicateurs de reporting externe : le cas
des indicateurs des projets et rapport annuels de performance annexés aux lois de finances », Revue
française d'administration publique, vol. 155, no. 3, 2015, pp. 763-778.
Gibert, Patrick, et Manel Benzerafa-Alilat. « De quoi l’État rend-il compte dans ses rapports annuels de
performance ? », Revue française d'administration publique, vol. 160, no. 4, 2016, pp. 1041-1064.
Sites internet :
www.lof.finances.gov.ma
www.artisanat.gov.ma
48
Liste des figures
Figure n°1 : « La structure de la nomenclature budgétaire au Maroc avant et après la réforme de la LOF »
élaborée par l’auteur d’après le guide de construction des programmes budgétaires.
Figure n°2 : « Présentation de la morasse budgétaire du budget de fonctionnement –MDD au Maroc, avant
la réforme », adaptée par l’auteur d’après la loi de finances de 2014.
Figure n°3 : « Présentation de la morasse budgétaire du budget de fonctionnement –MDD au Maroc, après
la réforme », adaptée par l’auteur d’après la loi de finances de 2018.
Figure n°4 : « Evolution de la structure budgétaire du MEF après la réforme », tirée de la présentation de
Mme Bougrine Mouna, cheffe de division de la réforme budgétaire, lors du lancement de la
3ème phase de préfiguration.
Figure n°5 : « Evolution du nombre d’articles et de paragraphes dans la morasse budgétaire du ministère
de la Santé, après la réforme de la LOF de 2014 à 2015 », tirée de la présentation de Mme
Bougrine Mouna, cheffe de division de la réforme budgétaire, lors du lancement de la 3ème
phase de préfiguration.
Figure n°6 : « Le système de pilotage de la réforme de la LOF », tirée de la présentation de Mme Bougrine
Mouna, intitulée « Loi organique relative à la loi de finances : consécration des valeurs de la
transparence » lors du cycle de formation consacré aux finances publiques organisé par
Transparency Maroc, le 4 et 5 décembre 2015.
Figure n°7 : « Domaines d’activités stratégiques du secteur de l’artisanat » élaborée par l’auteur sur la base
du bilan de la « vision 2015 », publié sur le site du secrétariat d’Etat en juillet 2016.
Figure n°8 : « Evolution de la structure budgétaire du département de l’Artisanat après la réforme »,
élaborée par l’auteur sur la base des morasses budgétaires du département de 2015 et de 2016.
Figure n°9 : « Evolution du nombre d’articles et de paragraphes dans la morasse budgétaire du département
de l’Artisanat, après la réforme de la LOF, de 2015 à 2016 », élaborée par l’auteur d’après les
morasses budgétaires du département de 2015 et de 2016.
Figure n°10 : « Evolution de la structure du budget d’investissement formant le programme « Artisanat » et
ses projets après la réforme», élaborée par l’auteur sur la base des morasses budgétaires du
département de 2015 et de 2016.
Figure n°11 : « Présentation de l’intégration d’une activité redondante au projet d’appui à la production et à
la commercialisation, après la réforme », élaborée par l’auteur sur la base des morasses
budgétaires du département de 2015 et 2016.
Figure n°12 : « Présentation des objectifs du programme « support et pilotage » », élaborée par l’auteur sur
la base du projet de performance de 2016 du département de l’Artisanat.
Figure n°13 : « Présentation des objectifs du programme « Artisanat » », élaborée par l’auteur sur la base du
projet de performance de 2016 du département de l’Artisanat.
Figure n°14 : « Présentation des objectifs et des indicateurs du programme « support et pilotage » en 2016 »,
élaborée par l’auteur sur la base du projet de performance du département de l’Artisanat de
2016.
Figure n°15: « Présentation des objectifs et des indicateurs du programme « support et pilotage » en 2018 »,
élaborée par l’auteur sur la base du projet de performance du département de l’Artisanat de
2018.
Figure n°16 : « Présentation des objectifs et des projets du programme « Artisanat » en 2016 », élaborée par
l’auteur d’après le projet de performance du département de l’Artisanat de 2016.
Figure n°17 : « Présentation des objectifs et des indicateurs du programme « Artisanat » en 2018 » élaborée
par l’auteur d’après le projet de performance du département de l’artisanat de 2018.
Figure n°18 : « Evolution des réalisations et du budget dédié à l’action d’appui aux groupements d’artisans »
élaborée par l’auteur sur la base du PDP de 2018 et des états d’exécution du budget du
département de 2016 et de 2017.
49
Liste des recommandations
50
Liste des abréviations
DRSI : Direction des Ressources et des Systèmes d’Information
51
Annexes
Annexe -1-
Maison de l'artisan
Secrétariat
Générale
Département de Département de
l'Economie sociale l'Artisanat
RP Economie RP Support et
sociale RP Artisanat
Pilotage
52