Saint Andre
Saint Andre
Saint Andre
Très glorieux Apôtre du Seigneur, crucifié sur le bois qui s'écrit fiché en terre avec la lettre du
Christ, Créateur et Rédempteur, avec vous, je dis : "Je te salue, O croix, consacrée par le Corps du Christ et
parée de mes membres comme par de précieuses perles... Puissent les fidèles et mes amis connaître ta
joie, et les dons qui sont conservés en toi...".
Pour nous, cher Père et Souche des Apôtres, prémices de l'Appel du premier de nos Saint Pères, avec
tous nos frères d'Orient et d'Occident, nous prenons cette croix avec vous, O, saint André, comme avec
Celui-là même que vous avez suivi, je veux dire avec Notre Seigneur et Sauveur. Ce qui faisait toute sa joie
et toute son allégresse, c'est que vous perceviez et éprouviez intensément que vous alliez mourir, non
seulement pour Lui, mais encore avec Lui, et vous trouver enté en Lui par la ressemblance de sa mort (Rom.
VI, 5), partager son royaume, comme vous Le laissiez partager Ses souffrances et les mêler aux vôtres.
Avec vous, Apôtre crucifié avec Lui, nous prêtons l'oreille et écoutons, avec le coeur, les paroles qu'Il nous
adresse quand il dit : «Que celui qui veut venir après moi se renonce soi-même, porte sa croix et me suive
(Luc. IX, 23).» C'est comme s'il disait : Qu’il se méprise lui-même, celui qui veut faire Ma volonté, qu’il
apprenne d'abord à rompre la sienne.
Mais, voici que de nos jours, la guerre eschatologique est déclarée; nos ennemis prennent les armes contre
nous. Eh bien! Prenons-les aussi de notre côté avec vous ; imitons les armes de notre Roi : prenons, nous
ainsi, notre croix, pour triompher, par elle, de tous nos ennemis. Faites nous entendre les promesses que
nous fait le psalmiste, et que le Saint-Esprit nous les fasse écouler dans l'âme de sa propre bouche: «Sa
vérité vous entourera comme un bouclier (Ps. XC, 5). Pourquoi nous entourer d'un bouclier, sinon parce que
nous sommes de toutes parts entourés par les ennemis? ». Pour que vous ne craigniez rien de tout ce qu'on
peut appréhender pendant la nuit, non plus que la flèche qui vole durant le jour, ni les maux qui se préparent
dans les ténèbres, ni les attaques du démon du midi. Vous le voyez, O saint Apôtre, combien il est urgent
que Sa vérité nous couvre tous de son bouclier, puisque nous sommes environnés de tant d'ennemis? Les
frayeurs de la nuit s'élèvent d'en bas, les flèches sont décochées du côté gauche pendant le jour, les
machinations ténébreuses se font à droite, et, pour que rien ne manque, le démon du midi fond sur nous d'en
haut. Et nous, misérables et malheureux hommes que nous sommes, dans le voisinage de tant de serpents et
sous une telle grêle de traits enflammés, qui partent de tous côtés, au milieu d'ennemis qui s'élèvent de
toutes parts, nous nous laissons aller au sommeil avec une sécurité et une négligence pernicieuse, nous nous
engourdissons dans l'oisiveté, nous cédons à l'entraînement de la vanité et de la bouffonnerie, nous nous
montrons si mous pour les exercices spirituels, qu'on pourrait croire que nous sommes en paix et en sûreté,
et que la vie de l'homme sur la terre n'est pas une guerre continuelle. Voilà, O grand Saint de quelle
turpitude vous nous retirerez; voilà les maux qui, lorsque je les considère, répandent une grande terreur dans
mon âme, et me percent le coeur du grive de la plus poignante inquiétude : c'est qu'au milieu de tant de
périls nous paraissons presque sans crainte, nous ne nous exerçons point à la lutte, et nous ne témoignons
point l'inquiétude qu'il faudrait avoir. Que cette négligence de notre part ne puisse plus prouver, ou que nous
sommes déjà livrés à l'ennemi sans même nous en rendre compte, ou que nous nous sommes installés peu à
peu d'une bien grande ingratitude envers Celui qui nous protège, après qu'Il nous ait fait échapper à tant
d'écueils. Je vous supplie donc, O Saint André bien-aimé, que la malice si vigilante de nos ennemis, et la
persévérante malignité avec laquelle ils travaillent, pleins de zèle et d'ardeur à nous perdre, nous remplissent
aussi de soins et de circonspection, et nous fassent, opérer notre salut avec crainte et tremblement.
Oui, j'en suis sûr en voyant votre transfigurante crucifixion, notre salut est dans la croix pourvu seulement
que nous nous attachions visiblement à elle. L'Apôtre à dit : «.La parole de la croix, à la vérité, est une folie
pour ceux qui se perdent; mais pour ceux qui se sauvent, c'est-à-dire, pour nous, elle est la vertu de Dieu (I
Cor. I, 18). » La croix est le bouclier qui nous entoure et ses quatre bras repoussent les traits des ennemis du
salut. Le bras qui descend sera dirigé contre les craintes nocturnes, c'est-à-dire contre la pusillanimité
qui procède de l'affliction de la chair, et nous fera châtier courageusement la partie inférieure de notre être,
celle de notre corps charnel, et le réduire en esclavage. S'il se trouve quelqu'un pour nous maudire en face en
raison de notre Amour pour le Seigneur, ou pour nous conseiller ouvertement ce mal, c'est la flèche qui vole
durant le jour, elle vient du côté gauche: que le bras gauche de la croix la reçoive. Si, au contraire, on nous
flatte, si, sous l'apparence d'un conseil d'ami, on veut nous faire boire le poison de la détraction fraternelle,
semer la zizanie parmi nous, ou nous persuader quelque chose d'injuste comme si c'était juste, avec vous et
sous votre ombre, qu'elle soit contrée comme l'attaque de droite: le trait de Judas qui trahit par un baiser, et
que le bras droit de la croix repousse cette attaque de ténèbres.
Mais je vois venir le démon du midi, avec son esprit d'orgueil qui fond avec d'autant plus de fureur sur nous
que notre vertu a plus d'éclat, redoutable vice, principe de tout péché, et cause de notre perte à tous. Placez
sur notre tête le bras d'en haut de la croix à cause de lui pour que nous ne nous laissions plus aller à l'orgueil,
ni enfler notre coeur, et enfin pour ne pas nous élever au dessus de nous-même dans des pensées de
grandeur (Ps. CXXX, 1). Tous ces traits qui nous sont lancés d'en haut, c'est le bras de Votre croix qui
s'élève au dessus de notre tête qui vient les écarter. C'est sur ce bras que se trouve placée l'inscription du
royaume et du salut, attendu qu'il n'y a que ceux qui s'humilient qui mériteront d'être sauvés.
Que ces quatre bras de la croix de Jésus et de la votre impriment dans notre chair et notre lumière intérieure:
la continence, la patience, la prudence et l'humilité. Heureuse mon âme parce qu'elle vous l'a demandé et
que vous l'exaucez immédiatement en raison de Votre unité si parfaite à Jésus Crucifié,
vous qui mettez, même encore au ciel votre gloire et votre triomphe dans la croix. Qu'avec votre victoire
inscrite dans mon coeur demeurant sur la croix, nous ne nous laissions plus abattre jamais par aucune
tentation. Que ceux qui désespèrent pour se trouver sur une croix qu'ils estiment trop difficile à porter,
viennent vous prier,O saint André, et recueillir les grâces qui s'écoulent librement de vous glorifié dans son
Seigneur et maître.
Ah! A quel excès d'audace le Malin ne peut-il point se porter, quelle tentative n'aura-t-il point la
présomption de faire ? Ce qu'il voulait exécuter par les mains même d'Egée sur le disciple, il avait eu la
pensée de le faire sur le Maître par la langue des Juifs; mais il eut lieu de s'en repentir, un peu tard
il est vrai, car il fut vaincu et s'éloigna plein de confusion. Passe le ciel grâce vous, et qu'il s'éloigne ainsi de
nous, vaincu par Celui qui a triomphé en lui-même et dans son disciple.
Que Celui qui est Dieu et béni par dessus tout, dans les siècles des siècles, nous fasse la grâce de
consommer heureusement notre vie sur la croix de la pénitence, quelle qu'elle soit, dont nous nous sommes
chargés pour son nom. A tout jamais en Jésus, le Verbe qui nous relève dans la victoire inextinguible.
Ainsi soit-il.