Delinquance Juvenile

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 70

RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL

UN PEUPLE - UN BUT - UNE FOI


UNIVERSITÉ CHEIKH ANlA DIOP

INSTITUT NATIONAL SUPÉRIEUR DE L'ÉDUCATION


POPULAIRE ET DU SPORT
INSEPS - DAKAR

MONOGRAPHIE

en vue de l'obtention
du CERTIFICAT D'APTITUDE AUX fONCTIONS D'INSPECTEUR
DE L'ÉDUCATION POPULAIRE DE LA JEUNESSE ET DES SPORTS

Présenté par: Directeur de Monographie:

Gertrude KUBWIMANA M. Moussé Dior DIOP


Inspecteur de l'Education
Populaire, çie la Jeunesse
et des Sporls
Directeur de la Jeunesse et des
Activités Socio-Educatives

ANNÉE ACADÉMIQUE: 1995 - 1996


RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL
UN PEUPLE - UN BUT· UNE FOI
UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP
INSTITUT NATIONAL SUPÉRIEUR DE L'ÉDUCATION
POPULAIRE ET DU SPORT
INSEPS - DAKAR

MONOGRAPHIE

en vue de l'obtention
du CERTIFICAT D'APTITUDE AUX fONCTIONS D'INSPECTEUR
DE L'ÉDUCATION POPULAIRE DE LA JEUNESSE ET DES SPORTS

Présenté par: Directeur de Monographie;

Gertrude KUBWIMANA M. Moussé Dior DIOP


Inspecteur de l'Education
, Populaire, de la Jeunesse
i et des Sports
• Directeur de la Jeunesse et des
.l • Activités Socio-Educatives
~

ANNÉE ACADÉMIQUE: 1995 - 1996


DE D: IC AC E

Je dé die ce tra va il;


ur. la pr ote cti on et
le
Ames pa ren ts po ur l'a mo rte r.
ces sé de m1 ap po
so uti en qu 'il s nIa nt jam ajs
do nt la pré sen ce à mes
A mes frè res et soe urs
cô tés a été san s fa ill e.
REMERCIEMENTS

Ce travail n1aurait pas connu un aboutissement si je n'avais


été aidée.
C'est ici l'occasion de remercier tous ceux qui de près
ou de loin ont participé à l'élaboration de ce document.
Je pense notamment à la CONFEJES pour son intervention
combien louable au moment où il fallait.
A Monsieur Moussé Dîor DIOP: Directeur de la Jeunesse
et des Activités Socio-Educatives qui, malgré ses multiples
occupations professionnelles et familiales, a bien voulu
diriger ce modeste travail.
Au corps enseignant de 1 'INSEPS.
A mes amis: MUKAZIBERA Marie Agnès et SOLOKOFFI Eloi,
pour leur sympathie et leurs contributions à l'élaboration de
ce travail.
Enfin, que tous ceux dont le nom n'a pu être cité,
trouvent ici pour leur geste amical, notre plus sincère
gratitude.
SOMMAIRE

Pages
DEDICACE
REMERCIEMENTS
INTRODUCTION 1

CHAPITRE 1 : DU PHENOMENE DE LA DELINQUANCE JUVENILE 6

1. Description du phénomène 7

1.1 Les principaux déterminants de la


délinquance juvénile 8

1.1.1 La famille 8

1.1. 2 10

1. 1. 3 La société Il

1.2. Les manifestations et répercussions


sociales de la délinquance juvénile. 13
I. 2.1 Les manifestations 13

1. 2.2 Les répercussions sociales 14

II. RECUPERATION DES JEUNES DELINQUANTS 15

1 I. l. De l'importance d'agir 15

1 I. 2. Des solutions mises en oeuvre 17

CHAPITRE II DESCRIPTION DU FOYER DE l'ESPERANCE DE


MVOLYE 20

1. Situation du Foyer et historique 20


II. La délinquance pédagogique 21
II.1 L1accueil au Foyer 21
ILl.1 L'équipe de formateurs 21
11.1.2 La démarche d'accueil 22
II.2 Les activités proposées aux enfants 25
11.2.1 Les cours 26
11.2.2 Les travaux pratiques 28

11.2.3 Les activités socio-culturelles et


sportives 34

CHAPITRE III. ANALYSE fONCTIONNELLE DU FOYER ET


PROPOSITIONS 38

l Analyse fonctionnelle du Foyer 38

1.1. Une capacité d'accueil limitée 38


1.2. Un équipement précaire 39
1.3 Une formation insuffisante 41
1.3.1 Au niveau des cours 41

1. 3.2. Dans les ateliers 45

II. PROPOSITIONS 47

II.l. Au niveau des relations publiques 47


II.2. Au niveau du contenu du programme et
des méthodes d1enseignements 50

CONCLUSION 53
BIBLIOGRAPHIE 65
INTRODUCTION

1. PROBLEMATIQUE

L'étude de la délinquance Juvénile mène nécessairement à


l'analyse de l'évolution de la prise en charge de la jeunesse
à travers les structures de socialisation tradHionnel1es
comme modernes.

Dans la société traditionnelle. l'enfant était pris en


charge par le groupe familial, qui le conduisait à sa
maturité en vei 11ant à son insertion harmonieuse dans la
société.

Aussi, si la délinquance juvénile était-elle moins


préoccupante dans la société traditionnelle, c'était sans
doute dû au fait que l'individu y était éduqué dans la
participation par 1 exemp1e et sous la vigilance de toute la
1

communauté.

Auj ourd hu i,
1 une observat ion quot id; enne de no tre
société en pleine mutation permet de constater que la famille
ne semble plus avoir les moyens d'encadrer le jeune.

Le nombre toujours grandissant d1enfants vagabonds qui


traînent dans les marchés, devant les salles de cinéma, les
grands magasins et autres places publiques des centres
urbains, s'expliquerait à priori par le relâchement du
contrôle parental.

Les personnes chargées de l'encadrement familial de la


jeunesse ne sont pas suffisamment préparées ou ne semblent
2

pas aptes à lui donner une éducation favorable à son


épanouissement dans un monde en perpétuel changement. La
rupture dans la continuité entre l'éducation en famille et
1 ' é ct u c a t ion à 1 ' é col e est en t r eau t r e a van cé e co mm e
explication à ce phénomène.

Par ailleurs. la crise économique particulièrement grave


dans nos pays en développement est donnée comme une des
principales causes de ce fléau.

En effet. de pu i sune di za i ne d'années nos pays sont


soumis à des mesures d'ajustement structurel imposées par le
Fond Monétaire International et la Banque Mondiale qui ont eu
comme conséquences la dégradation du niveau de vie déjà très
bas de nos populations suite à une compression des dépenses
sociales et des possibi lités d'emplois.

Dans ce sens S.BESSIS (1991) remarquait que "pour faire


des économies. les fonctions publ iques des Etats les plus
pauvres ont stoppé leurs recrutements : de DAKAR à ~AOUNDE.
le nombre des diplômés privés de débouchés et condamnés au
chômage dês 7eur entrée dans vie active s'est
considérablement accru".

Elle déplore également "la grande fragilité des


économies en développement et la rudesse des médecines
auxquelles elles sont soumises ... "

Ces mesures à la limite anti-sociales ont largement


contribué à l'effritement des cadres de social isation et de
prise en charge de la jeunesse et créé les condjtions d'un
développement de la délinquance juvénile sous toutes ses
formes.
3

La preuve la plus manifeste de cette dégradation sociale


est aujourd'hui la baisse drastique de l'âge des dél inquants
de plus en plus jeunes.

L'avenir de nos sociétés dépend du combat que nous


mènerons contre ce phénomène et qui appelle la contribution
de tous.

2. INTERET DU SUJET

La délinquance juvénile est llun des symptômes les plus


palpables de cette crise généralisée que traversent nos pays.
Le CAMEROUN à l'instar des autres pays en développement, est
confronté au problème d'insécurité suite à la situation de
crise.

Si nous avons choisi de parler de lutte contre la


délinquance juvénile au CAMEROUN, c'est que le phénomène
prend de l'ampleur dans les centres urbains.

Pa rai 11 eurs, l a ph il osoph i e du déve 1oppement veut que


toutes les forces sociales soient associées pour le progrès
commun. C'est pourquoi la société Camerounaise s'efforce de
récupérer la jeunesse égarée en vue de sa réinsertion 50cio-
économique. Autrement dit, clest son avenir qui est en jeu.

3. DELIMITATION DU SUJET

Dans cette modeste étude, nous portons notre attention


sur une structure qui s'occupe de la récupération des enfants
de la rue: Le Foyer de l'Espérance de MVOLYE à YAOUNDE.

Cette étude aurait pu dépasser le cadre du Foyer et


slétendre sur toutes les structures socio-éducatives de la
ville de Yaoundé. Malheureusement le temps imparti et surtout
4

la modicité de nos moyens nIant pas favorisé une telle


amb it ion.

Toutefois, force est de constater après de multiples


démarches, que les problèmes évoqués le long de cette étude,
ne sont pas spécifiques au Foyer mais intéressent
pratiquement toutes les institutions ayant pour vocation la
formation et l'insertion socio-professionnelle des jeunes
délinquants, ou ceux en situation difficile.

4. METHODOLOGIE

Les résultats de nos investigations sont rassemblés


grâce à des démarches et des méthodes complémentaires.

En fonction de la nature de la structure, nous avons


privilégié l'observation participante qui nous a amené à nous
introduire au Foyer pour découvrir la vie et l 'ambiance qui y
règnent.

Nous avons ainsi observé à loisir les différents


parte na ires en présence dans les divers moments de leurs
interactions.

Les entretiens informels que nous avons eus avec les uns
et les autres nous ont beaucoup édifié sur les situations
observées et vécues.

Nous avons observé nos sujets à' différents moments


pendant les activités, pendant les loisirs, aux heures de
repos et dans d'autres circonstances, ce qui nous a permis de
saisir leur personnalité de manière, nous osons dire assez
profonde.
5

5. ANNONCE DU PLAN

Pour la présentation du travail ainsi réalisé, deux


orientations se sont livrées à nous;

La première a consisté à présenter le phénomène de la


délinquance juvénile ainsi que l'institution cible de notre
étude le Foyer de l'espérance de MVOLYE (chapitres 1 et
II) .

La deuxième porte sur l'analyse des problèmes inhérents


au fonctionnement de l'institution et des voies et moyens
pouvant permettre d'y remédier (chapitre III).
6

CHAP l DU PHENOMENE DE LA DELIN~UANCE JUVENILE

Il Y a quelques décennies. le phénomène de la jeunesse


délinquante était presque négligeable. Mais aujourd'hui avec
la destruction progressive des valeurs culturelles africaines
accélérée par la crise économique. la paupérisation des
masses. l'instabilité politique. les déperditions scolaires,
le chômage. la perte de confiance en l'avenir. la crise
morale. le phénomène a pris de l'ampleur.

Il suffit de visiter les cellules des commissariats, et


d'observer nos vues pour en être convaincu.
Cette jeunesse est en général considérée comme une population
dangereuse.
Ce qu i a condu i t l' ensemb 1e de l a soc i été à déve lapper
beaucoup plus à son égard des mécanismes de défense, voire
des stratégies de reprise en main dans un fond de méfiance.

La plupart des structures mises en place pour résoudre


1es problèmes de cette jeunesse s'appellent très souvent
"structure de récupération". Malheureusement les bilans
prouvent que la majorité des jeunes sortis de ces structures,
au lieu de se sentir intégrés dans la société, éprouvent un
sentiment de rejet plus renforcé. qui pour certaîns cas
creuse davantage le fossé entre eux et la société normée.

Nous tenterons tout d' abord de décrire le phénomène de


la délinquance juvénile. avant d'aborder le volet
récupération des jeunes délinquants.
7

1. DESCRIPTION DU PHENOMENE

D'abord qu'est-ce qu'une délinquance?

Du point de vue juridique, la délinquance est une


vio1ation de 1a loi exposant son auteur â une sanction
pénale.

Pour les travailleurs sociaux (psychologues,


sociologues, ... ) la délinquance est une situation
d'inadaptation sociale.
Le délinquant est une personne qui présente des
difficultés d'intégration et de prise en charge de ses
exigences sociales.

Selon MICHARD.H (1978) "la délinquance des jeunes est


l'ensemble des infractions commises par les enfants et
adolescents âgés de moins de 18 ans".

Pour le dictionnaire PETIT ROBERT 11la délinquance est


une conduite caractérisée par des délits répétés, considérée
surtout sous son aspect social»

La délinquance désigne une catégorie sociale qui vit à


l'encontre des valeurs sociales et met ainsi le désordre dans
la société.
La délinquance juvénile renferme la tranche d'âge qui va de
la grande enfance à l'adolescence [entre sept et seize ans].
Elle a ses origines dans les crises qui frappent nos société.

A travers les développements qui vont suivre, nous


traiterons des déterminants et des manifestations de la
délinquance.
8

1.1. LES PRINCIPAUX DETERMINANTS DE LA DELINQUANCE JUVENILE

Les raisons qui amènent les jeunes à se retrouver dans


la rue sont si nombreuses que l'on ne peut en dresser une
liste exhaustive.

La délinquance juvénile ne serait pas seulement la


conséquence de certains facteurs comme l' industrial isation,
le cosmopolitisme ou le brassage des moeurs dû à une
population hétérogène mais également l'action négative
directe ou non des institutions éducatives comme l'école et
la famille, qui apparaissent chacune comme les sous systèmes
auxquels la société confie une mission délicate celle
d'éduquer ses membres.

Nous soulignerons dans les prochaines lignes comment les


trois institutions éducatives susmentionnées peuvent parfois
contribuer à la marginalisation sociale des jeunes.

1.1.1. LA FAMILLE

La famille constitue le milieu naturel du jeune.


Diverses considérations expliquent l'influence capitale de la
famille sur l'adaptation sociale.
Clest d'abord dans la famille que l'enfant cherche des
exemples à imiter. Par la façon dont elle a rempli sont rôle
éducatif, Ja famille peut se rendre responsable de la
délinquance juvénile.

Les désaccords familiaux. la diminution de l'intimité


familiale, la perte de l'autorité parentale, la dislocation
de la fami lle entraînent un sentiment dl inconfort permanent
chez 11 enfant.
Ce dernier tente alors de sortir de ces situations par une
attitude délinquante.
9

Aussi, partageons-nous avec Y.ROUMAJON (1977) l'idèe selon


laquelle, la délinquance juvénile prendrait naissance
précocement dans la famille.

On peut ct ire que 1es enfants lai ssés à 1a cha rge d' un
seul parent sont encore abandonnés à eux-mêmes. Ces enfants
ne peuvent pas subl imer les exigences de leurs sens, se
trouvent souvent dans la rue et se nourrissent de tout ce qui
leur tombe sous la main, ou s'adonne à Ta mendicité, au '.101
et à des agressions diverses.

Par ailleurs, dans les familles polygamiques. on assiste


à l'existence de c1ans qui se livrent en sourdine à la
bata ill e de l'exp l 0 Hat i on de l' homme groupe de chaque
femme et ses enfants et groupe des parents maternels et
paternels de l'homme. L'isolement du noyau central de la
famj] le Que constitue l'homme entraîne non seulement la
déchéance de la puissance paternelle auprès des enfants, mais
surtout l'insuffisance d'encadrement et d'affection.
Les conditions de vie en milieu familial sont souvent à
l'origine de la délinquance juvénile. Pour étayer ce point de
vue, H.E.ERICKSON (1971) soutenait que u1a crise de l'enfant
est d'abord une crise dans l'histoire de la famille".

L1alcoolisme. les mésententes entre les parents ou des


frères et soeurs sont sources de troubles profondes pour
l'enfant.
D'après les études statistiques menées par J.LEIF et J. DELAY
(1968) "80% de cas de délinquant~ mineurs et 90% des
jeunes vagabonds s'expliquent par la situation du milieu
familial".

Quand A P.FRANZ (1964) il affirmait que: "nombreux sont


ceux qui arrivent à la délinquance juvénile par l'alcoolisme
du père.
10

1.1.2. L'ECOLE

Aujourd' hui, l'école souffre du phénomène de la


désco1arisation qui frappe la majorité de la population
scolaire des pays sous développés.
Beaucoup de jeunes n'arrivent pas à boucler normalement leur
cycle d'études primaire, secondaire ou universitaire.

Par exemple, pour un certain nombre de jeunes notamment


ceux ayant échoué dans leurs études pour des raisons
psychologiques. l'école a accentué le phénomène de
"dissocialisation". L'école est créatrice des disparités
socia1es.

L'obtention des diplômes favorise l'acquisition des


privilèges sociaux.
Tout au long du cursus scolaire. l'examen, mécanisme de
sélection apparaît comme une technique malthusienne qui
élimine certains du processus éducatif.

L'échec scolaire est inhérent à la nature du système


d'éducation institutionnel. On peut dire que J'élève Qui ne
réuss i t pas à l' éto le n'est pas forcément mauva i s mai s
plutôt que l'école ne convient pas à tous les enfants. Le
maintien en milieu scolaire d'un jeune en difficulté est
ressenti par lui comme une punition et non comme une
promotion.

J.M.ELA (1982) n'a pas manqué de souligner que "pour


les individus, l'école n'est qu'un jeu de hasard dans la
compétition sociale".

L'adolescent, déjà insatisfait par ses antécédents


scolaires en révolte contre l'institution, sans parler de ses
11

difficultés familiales. se trouve coincé et contraint de


faire l'école.

L'échec scolaire peut occasionner aussi celui de la vie.


C'est ce qu'affirme G.AVANSINI(1967) lorsqu'il déclare
ce lui qui échoue risque de plus en plus de devenir déclassé,
II

une sorte de hors-la-loi pour qui l'intégration sociale


deviendra sans cesse plus difficile ll

Un autre aspect néfaste du mi lieu scolaire qui favorise


l'expansion de la délinquance juvénile est l'état de
saturation des classes et le manque des locaux suscitant
parfois l'utilisation d'un même local pour deux classes,
l'une le matin, l'autre l'après-midi.
C'est la technique du double flux.
Les enfants échappent à la fois au contrôle des maîtres et
des parents et à la vigilance de la police.

Certains enfants finiront par devenir délinquants par le seul


fait d'adhérer à la bande des élèves délinquants qui
s'adonnent à l'école buissonnière.

L'école apparaît comme un "ca talyseur de la délinquance


ll

juvénile. Selon S.BllONGO (I9Bl) "Avec celle d'autres


facteurs exogènes multiples, l'école conjugue son action pour
accentuer la désadaptation des adolescents, d'autant plus que
sous la tyrannie des maîtres, elle façonne avec dureté, ce
qui rend l'unité de la personnalité déracinée difficile à
réaliser placée entre modèles traditionnels et modèles
modernes. modèles familiaux et modêles scolaires) etc ... "

1.1.3. LA SOCIETE

Nous avons précédemment démontré que la délinquance


juvénile pouvait résulter des carences éducatives en milieu
familial et des inadéquations en milieu scolaire.
12

Dans cette section, nous verrons également que ce fléau


social émane du grand ensemble que constitue l'environnement
social. Il s'agira en quelque sorte d'identifier les facteurs
sociaux saj1Jants Qui générent la délinquance juvénile.

Certa i ns auteurs, à " instar de P.MOMO (l969) ou de


B.BILONGO( 1981) ont insisté dans leurs ouvrages sur le fait
que l'exode rural des jeunes est à l'origine de la
dél inquance juvéni le.

La vi lle rayonne sur la campagne environnante. elle est un


milieu pourvu de toutes les infrastructures dont le jeune a
besoin. la ville est, pour reprendre l'expression de
J.KIZERBO (1972) "le laboratoire de la société nouvelle en
gestation".

Dautres facteurs qui provoquent l'inadaptation juvénile


sont: le milieu culturel et les mass média. Nul doute que la
lecture des brochures pornographiques ou des romans photos,
les films, les émissions radiophoniques, les affiches
publicitaires contribuent à modeler la personnalité du jeune.
Certains films diffusés sans tenir compte des âges conduisent
à la perversion.

Certes la société moderne a engendré la mode, les


loisirs, 7es besoins économiques, mais elle a entraîné en
même temps la détérioration des relations familiales, la
rupture de la communication entre groupes d'âges,
l'effritement de l'autorité parentale et l'accentuation de
llécart entre la ville et la campagne.

Compte tenu de tous ces aspects, la société apparaît


bien comme un facteur de modelage des tendances des individus
jeunes vers la délinquance. C'est ce que veut dire en
substance P.ZUMBACH (1963) lorsqu 1 i1 soutient Que la
délinquance juvénile individuelle s'expliquerait par un
13

déséqu il i bre soc i al. Le dé 1i nquant peu t à cet effet être


considéré comme le produit de son milieu social. Tout homme
ne serait-il pas d'ailleurs le produit de son milieu.

La société cependant comme la fami lle et l'école ne


produisent pas que des délinquants et continuent dans une
large part de jouer un rôle sain de socialisation par
ailleurs réussi.

1.2. LES MANIFESTATIONS ET REPERCUSSIONS SOCIALES DE LA


DELINQUANCE JUVENILE

La délinquance juvénile étant une déviation sociale,


elle entraîne évidemment des conséquences néfastes pour la
société. Quel qu'en soient les manifestations ou modes
d'expression, tout délinquant cause du tort à la société.

1.2.1. LES MANIFESTATIONS

Les enfants de la rue. pour s'affirmer et pour


survivre
Pratiquent le vol classé le plus souvent en tête des
délits.
Dans la plupart des cas, il s'agit de vol pour
satisfaire des besoins immédiats : de consommation courante,
les vêtements ou toutes choses pouvant être revendue en ',lue
de se nourrir.

Les délinquants pratiquent aussi le vagabondage qui


représente dans certains pays un dél it sanctionné
couramment.
Le vagabondage contribue largement au développement
de la délinquance urbaine.
14

Dans les délits de vagabondage sont également pris


en compte les fugues d'enfants.

rl y'a aussi Jes coups et blessures, délits


fréquents mais souvent réglé à l'amiable, dans nos
sociétés africaines.

D'autre délits tels que les jeux du hasard,


l'ivresse sont évoqués ainsi que la consommation de
drogue ou la prostitution des jeunes filles.

1.2.2. LES REPERCUSSIONS SOCIALES

Les délinquants sont de nature désinvoltes, violents,


vicieux, et provocateurs. Ces jeunes agressifs ont un
comportement antisocial.
Ils s'opposent aux tentatives de récupération. Ils méprisent
l'aurorité, ont des tendances à la destruction des biens et
des personnes.

Ils passent du désir à l'acte sans inquiétude ni


remords. Leurs act i ons peuvent aller des simples larcins à
des homicides.

Ces enfants ont des règles et des valeurs en porte à


faux avec celles reconnues et promues par la société.

Ils ont leur monde à part avec leur lois et leur


langage. Ils refusent la société, ses normes et ses valeurs.

Selon R.MUCCHIELLI (1986) les délinquants manifestent


Il une certaine aversion pour la vie socialisée régulière
capable de se dérouler sans conflit avec l'aurotité
socialité insuffisante ou soc7aJjté inacceptée .. ,11.
15

Cette attitude s'exprime dans la tendance ou


dénigrement. à la critique de tout ce qui représente une
autorité ou une valeur admise dans la société.

les maîtres. les notables, les pesonnes respectables,


les vieux sont sans destruction dlobjet de raillerie ou de
mépris. Cela s'accompagne d'un refus de la responsabilité
personnelle sociale et de tout rôle conduisant a assurer "une
fonction". Ille travail c'est pour le délinquant le
contraire de la liberté ll • (lest un effort imposé, une
obligation sociale.

Les jeunes dé l inquants recherchent des moyens de défense


contre 11 autori té, mépri sent 11 au tor i té, man i festent du
désinteressement à li égard des comportements effectifs des
parents et semblent éprouver du plaisir dans llacte
antisocial.

Bref. cette catégorie sociale est difficilement


maîtrisée par la société qui compose tant bien que mal avec
elle et cherche sans cesse les moyens de prévenir sinon de
pallier ses comportements déviants qui nuisent au bien être
social.

II RECUPERATION DES JEUNES DELINQUANTS

11.1. DE L'IMPORTANCE D'AGIR

La récupération des jeunes déviants est un devoir qui


incombe à la société et se justifie pour entre autres deux
raison: économique et sociale.

Sur le plan économique les jeunes plus que toutes les


autres catégories sociales constituent une force avec
laquelle il faut compter pour le développement économique de
16

la société. La société compte sur les jeunes pour évoluer. se


maintenir et s'immortaliser dans l'espace et dans le temps.
La jeunesse est appelée "moteur" du développement, "fer de
lance" de la nation.
Les jeunes par leur nombre et par leur vitalité
constituent un atout certain surtout pour les pays en
déve 1oppemen t où ils représentent 1a majorité de la
population totale et celle active.

Les jeunes délinquants sont une source d'énergie qu'il


faut récupérer et canaliser afin de les rendre utiles et
rentables.

Les laisser dans l'égarement c'est amputer la nation de


plusieurs de ses membres valeureux. Les jeunes. sont la vie
et l'avenir de la société. On peut dire qu'il n'y a de
richesse d'un pays que d'homme. Autrement dit, ce sont les
hommes qu i font un pays. Seu l s 1es hommes sont capab l es de
travailler et de transformer les ressources naturelles dont
dispose un pays. Plus on est nombreux et solidaires, mieux on
travaille et on progresse rapidement.

L'adage populaire ne dit-il pas que c'est l'union qui fait la


force ?

Sur le plan social, la récupération des jeunes déviants


est une urgence dont dépendent la survie et la quiétude de la
société.

En effet 1es jeunes dé 1i nquants const i tuent une menace


perpétuelle pour la sécurité des personnes et de leurs biens
matériels.

Les jeu nes dév i ants comme nous l'avons sou 1igné plus
haut, forment un bloc qui va en guerre contre la société à
17

laquelle ils en veulent pour des raisons diverses, exprimées


ou inavouées.

Les enfants étant encore trop jeunes posent des dégâts


dont la portée est l imitée mais on ne peut pas prévoir ou
estimer l'ampleur et les conséquences que leurs actes
entraîneront quand ils seront adultes.

('est pourquoi la société, pour assurer la tranquillité


de ses citoyens et sa stabilité socio-politique doit cherCher
très tôt à réintégrer ses jeunes membres déviants.

L'enjeu que constitue la jeunesse dans le développement


et le bien être social préoccupe de plus en plus les
responsables à divers niveaux.

Clest pourquoi un contemporain déclarait que "le


chômage qui concerne surtout les jeunes constitue l'une des
menaces 7es p1us graves qui pèsent sur l'avenir des sociétés.
Si l'angoisse de la jeunesse se transforme en désespoir, quel
avenir peut avoir la société? Ne risque-t-on pas de voir
Si instaurer une cassure entre générat ion ancienne et
génération nouvelle, entre forces du passé et forces de
renouvellement ?"

II. 2. DES SOLUTIONS MISES EN OEUVRES

La jeunesse délinquante ne cesse de s'accroître et nous


ne devons pas la négliger. Elle est de nos jours très
présente dans nos villes. dans les marchés, les désaventures
des hôtels. les lieux de fréquentation et en grand nombre.

Tous ces jeunes 1aissés à eux-mêmes const,tuent un


danger pour notre société, ce qui a conduit l'ensemble de
cette dernière à développer beaucoup plus à son égard des
mécanismes de défense. Pour des besoins de sécurité des
18

personnes et de leurs biens et de justice sociale, il est


nécessaire et urgent de chercher les voies et moyens
permettant de réaliser une harmonieuse insertion socio-
professionnelle de la jeunesse délinquante.

PROCESSUS DE L'INSERTION sOCrO-PROFESSIONNELLE DE LA JEUNESSE


DELINQUANTE

Ce processus est divisé en trois étapes.


Première étape: accueil
Elle consiste à descendre dans la rue pour rencontrer
les jeunes afin de faciliter le contact direct, ensuite, dans
1es commissariats et dans les pénitenciers pour leur rendre
visites.
LI accue il et 11 hébergement des. jeunes dé 1 i nquants
constituent dans la quasi total ité des pays des fonctions
fondamentales dans la lutte contre la délinquance juvénile
urbaine. Oes institutions et même des familles volontaires
recueillent un nombre de ces enfants et tentent de les
socialiser.

Deuxième étape: intégration sociale

Selon que le jeune est dans un pénitencier ou laissé a


lui-même dans 1a rue, cet t e é ta pe va ê t r e p 1U sou mo in s
longue.

* Opération préparatoire de la famille certaines


familles ont coupé les relations avec leurs
e n fan t 5 , i 1 f a ut 1e s r é t.a b 1 i r , favoriser la
résolution des conf1 its entre jeunes et parents.
Cette préparation se déroule pendant le séjour en
prison, au Foyer ou au centre d'accueil et
hébergement.
19

* Détermination et préparation de la famille


tutrice: quand ce jeune n'a pas de famjl1e ou Que
sa famille l'a rejeté. celle-ci doit être remplacée
soit par un Foyer ou un centre, soit par une
famille tutrice.

Troisième étape formation professionnelle et


insertion

Les Foyers ou les centres développent en général


beaucoup d'activités, par exemple l'alphabétisation, la
mécanique, la couture, la broderie. le tricotage,
l'électronique, la maçonnerie, la menuiserie, l'agricu1ture,
)'élevage ...

Le choix de l'activité est en fonction des possibilités


intellectuelles et physiques du jeune.

Ces centres ont pour mission de contribuer au plein


épanouissement et à l'insertion socio-économique des jeunes,
en leur offrant la possibilité d'acquérir une formation
professionnelle. civique. morale et intellectuelle et de
développer leur genTe, 1eur talent et leur esprit
d'entreprise dans les domaines économique, socio-culturel,
artistique et sportif.

Ces centres de jeunesse et d'animation fonctionnent sur


la base d'une pédagogie non directive.

Ces expériences sont nombreuses et variées même au


CAMEROUN lieu de notre étude. Clest pourquoi, pour les
raisons déjà mentionnées dans l'introduction, nous avons
choisi d'en étudier une seule:
Le Foyer de l'ESPERANCE de MVOl YE. Etude qu i sera
éclairée par les éléments théoriques que nous venons
d'exposer.
20

CHAPITRE II: DESCRIPTION DU FOYER DE l'ESPERANCE DE MVOLYE

L'objet du présent chapitre est de procéder à la


description de l'expérience de lutte contre la délinquance
juvénile qu'est le Foyer de l'ESPERANCE DE MVOlYE.

Pour ce faire, nous aborderons la description sous


l'angle situationnel, historique et pédagogique.

1. SITUATION DU FOYER ET HISTORIQUE

Le Foyer de l'Espérance de MVOLYE est une structure de


récupération des enfants en situation difficile de la ville
de Yaoudé, il est situé dans un quartier de MVOLYE, derrière
le centre Jean XXIII de MVOLYE, en aval par rapport à la
grande route qui passe devant ce centre, un grand lieu de
culte d'accès facilement répérable.

Le Foyer existe depuis une dizaine d'années mais aucun


texte ne nous a permis de connaître avec précision ses
débuts.

Selon les temoignages, Je Foyer a vu le jour en 1977


grâce à l'initiative d'un religieux catholique, le Frère YVES
que le développement rapide de la dél inquance juvénile dans
les artères de la ville de Yaoundé et ses environs avait
frappé. Son intention était de venir en aide à ces jeunes en
déperdition et en détresse.

L'objetif du Foyer est donc de recueillir les enfants de


la rue, dans un cadre qui leur permet d'avoir une vie de
famille, une vie communautaire, faite de partage et de
service mutuel. Ainsi les enfants redécouvrent le goût de
,.

...... . ...
~(' \ ,~

vivre en famille, où l'on se sent aimé et utile pour les


siens
Bref, il slagit de récupérer les enfants, de les
sensibiliser et les réintégrer dans leur famille et pàr
ricochet dans leur société. Jusqu1au moment de notre visite,
l'objectif initial du Foyer n'a pas changé.

II. LA DEMARCHE PEDAGOGIQUE

Elle repose sur l'accueil et les activités proposées aux


jeunes.

II.1 L'ACCUEIL AU FOYER

11.1.1 L'EQUIPE DE FORMATEURS

Le Foyer compte une dizaine de responsables qui sont


chargés de recevoir d1encadrer les enfants.

L'équipe est composée de religieux, et de laïcs,


expatriés et nationaux t hommes et femmes j tous sont appelés
IItuteurs l1 par les enfants. Ce sont de volontaires engagés qui
oeuvrent pour un meilleur bien être social.

La gestion administrative du Foyer est assurée par un


prêtre Italien secondé par un laïc Camerounais. Chaque jour,
t

la permanence est assurée par au moins cinq encadreurs qui se


relayent ou travaillent de concert selon les nécessités.

Les encadreurs rentrent 1e sa i r mais quatre parmi eux


(jeunes cél ibataires) sont logés au Foyer et assurent le
contact permanent avec les enfants.
Les tâches ne sont pas cloisonnées.
22

Chaque encadreur est appelé à survei 11er les enfants


pendants les jeux ou les travaux, à les écouter, à régler
leurs conflits, à les soigner, à les corriger, bref à se
mettre à leur disposition.
Mais par souci d'organisation. une tâche précise peut
être confiée à chaque responsable.

11.1.2. LA DEMARCHE D'ACCUEIL

l'accueil ne se fait pas au Foyer. Les responsables sont


appelés à aller vers les enfants et à les découvrir dans les
coins stratégiques (gares, marchés, magasins, cinémas et
autres endroits de spectacle) afin de les suivre dans leurs
activités et ~es inviter à venir au Foyer.

Les enfants découvrent le foyer grâce aux interventions


des encadreurs qui viennent auprès d'eux dans les endroits
qui ils fréquentent et essaient d'entrer en contact avec eux.
Pour établir un climat de confiance avec les enfants, les
encadreurs leur rendent de petits services partage de
nourriture, petits soins, petits cadeaux et causeries
intéressantes.

Quand le contact est établi, on invite les enfants à se


présenter au foyer où on leur promet des moments agréables.
Les enfants se présentent au foyer soit à 1 r invitation des
encadreurs soit aux recommandations des autres enfants de la
rue qui leur ont vanté le foyer.

L'accueil des nouveaux arrivés est une étape très


importante. L1enfant vient avec ses appréhensions, ses
doutes, ses inquiétudes, habitué qu'il est à vivre alerte,
toujours prêt a offenser ou a se défendre (violence,
fuite ... ). Le premier geste des encadreurs est de le mettre à
l'aise en 1ui témoignant de la douceur et de l'attention. On
le laisse évoluer quelques instants au milieu de ses am1s
23

pour qu'il se familiarise un peu avec le cadre et l'ambiance


du foyer.

Ensuite. un ou deux responsables se retirent avec


le nouveau venu dans un bureau. pour un premier entretien qui
permet de mieux connaître son cas. Les questions posées à
l'enfant portent sur son histoire et son évolution
personnelle. Les réponses recueillies sont inscrites sur une
fiche d'identification qui sera gardée dans un dossier ouvert
et tenu au quotidien pour chaque enfant.

L'essentiel de l'entretien consiste à connaître le nom


de l'enfant et celui de ses parents. son village d'origine et
le temps passé hors de la famille. la situation sociale de la
famille et les relations de l'enfant avec ses parents et ses
frères, les causes de l'abandon de la maison et les projets
de llenfant.

Les enfants sont souvent méfiants au début et ne donnent


pas toujours les réponses exactes. Ils prennent les
entretiens pour des interrogatoires de police et refusent de
parler librement. Tout au long de llentretien, on est obligé
de leur rappeler qu'ils n'ont rien à craindre.

La plupart des enfants se donnent des noms inventés,


ainsi qu'à leurs parents et lieu de résidence. Au fond dieux
ils craignent un éventuel retour forcé à la maison. Quand aux
raisons qui poussent à fuir la maison, elles sont les une
plus curieuses que les autres.

Tel enfant affirme avoir battu son frère et fuir la


colère de son père, tel autre déclare avoir été puni
injustement à la place d'un frère ou d'un ami qui a volé à la
maison. Un autre répéte volontiers qu'il n'a rien fait de mal
à la maison et Qu'il aime se promener dans le train. Ces
premières informations permettent de connaltre le cas
24

particulier de chaque enfant et de le suivre quotidiennement


dans ses mouvements.

Les enfants ne réagissent pas tous de la même manière


quant ils sont reçus au Foyer.

Le dossier ouvert le premier jour est sans cesse


complété par des nouveaux rens~ignements sur 1 enfant et sur
1

sa famille.

A la fin du premier entretien avec l'enfant, deux


situations se présentent soit l'enfant est retenu
i mm é dia t emen tau Foyer pou r y v i vr e , soi t i 1re ç 0 i t une
assistance sommaire et regagner la ville avec une exhortation
à revenir souvent au Foyer surtout les samedis.

En effet tous les samedis sont des journées portes


ouvertes et tous les enfants de la rue sont i nv ités à venir
au Foyer pour prendre part aux activités de loisirs et
partager le repas avec leurs amis qui vivent au Foyer.

On retient llenfant quand sa situation est dél icate


quand il est trop jeune, quand il est trop loin des parents.
quand il ne travaille pas et n'a aucune source de revenu et
enfin quand il dort dehors et s'expose ainsi à tous les
dangers.

Le foyer laisse rentrer en ville les enfants qui se


débrouillent mieux que d1autres. par exemple ceux qui rendent
de petits services rémunérés (nettoyage, gardiennage. vente
des denrées), ou encore les enfants qui fréquentent la rue
mais peuvent dormir à la maison.

Le Foyer accorde une attention particul ière à la santé des


enfants. Ainsi, on leur assure en cas de besoin les premiers
25

soins nécessaires sinon on les conduit à l'hôpital quand le


cas l'exige.

les enfants résidant au Foyer sont nourris a raison de


trois repas par jour (petit déjeuner, repas à midi et repas
le soir).

Par ailleurs, tous les enfants présents au Foyer pendant


les journées portes ouvertes ont droit au repas de midi. Pour
cela, ils sont prles de s'inscrire le matin vers Bh pour
permettre à la cuisine de prévoir une quantité suffisante.
Pour les enfants résidents au Foyer, ils disposent pour leur
hébergement de deux petits dortoirs, d'une capacité totale de
vingt places. Les dortoirs sont équipés' de lits à étages, qui
peuvent chacun prendre plusieurs enfants.

Enfin, quelques chambres individuelles permettent de


loger quelques responsables qui veillent sur les enfants à
tout moment.

Plusieurs activités qui permettent d'éduquer pour faire


ct ' eux des ho mm es ut i 1es et r es p 0 nsa b1e s son t 0 r gan l sée S d
leur intention.

II,2, LES ACTIVITES PROPOSEES AUX ENFANTS

Les activités proposées aux jeunes déviants sont


diverses et variées afin d'assurer à chacun plusieurs
possibilités de choix.

Ces activités vont des cours dispensés aux travaux


pratiques en passant par les activités de loisir.
26

IL2.l LES COURS

Pour les cours, le Foyer dispose d'une salle de classe


dont la capacité est de 30 places maximum.
La salle est équipée de tables-bancs pour les élèves. soit 22
places assises. Les cours sont dispensés tous les ap~ès-midi,
de 14h30 ' à 17h30 ' du l und i au vendred i, à ra i son ct 1 une
discipline par jour: catéchèse le lundi. lecture le mardi,
grammaire le mercredi, calcul le jeudi et mathématique le
vendredi.
Un des responsab l es du Foyer est l'encadreur permanent des
enfants. Il est assisté par des intervenants de divers
horizons: religieux, volontaires. laïcs, stagiaires, membres
des as soc i at ions human i ta ires qu i viennent consacrer un peu
de leur temps à 11 instruction des enfants.

Le programme des cours est conçu à part i r du programme


officiel en vigueur dans les établissements publics au
CAMEROUN.

Les enfants qui ont accompli les trois ou quatres


premières années du primaire sont les plus nombreux. Les deux
extrêmes sont ceux qui n'ont jamais été à l'école et ceux qui
ont achevé le cycle primaire, et ayant passé ou non le
certificat d'études primaires.

La méthode d'enseignement est classique. Chaque enfant


reçoit du Foyer un cahier de 100 pages lui servant de support
pour tous les cours dispensés. Les enfants prennent dans une
boîte posëe sur la table du maître les stylos, les crayons à
gomme. les régles et les crayons à dessin dont ils ont
besoin.

Les cahiers sont gardés par le maître principal qui les


partage au début de chaque cours.
27

Pour les cours de catêchèse. les enfants n'écrivent rien


et font appel à leur mémoire pour écouter, retenir et répéter
les histoires qui leur sont narrées. L'enseignant procède à
une explication du texte et un commentaire actualisant le
texte pour l'appliquer au contexte et à la vie des enfants.

Un récit sur le pardon par exemple est l'occasion de


faire la morale aux enfants.

Les cours sont ponctués de chansons ou de petites pauses


qui permettent de tenir éveillés les enfants qui ont tendance
à dormi r surtout pendant les ense; 9 nements où ; l s écoutent
sans écrire eux-mêmes dans leurs cahiers.

A la fin de chaque cours. les enfants rassemblent et


déposent sur Ja table du maître tout le matériel qu'ils ont
utilisé pendant la leçon. C'est le maître qui garde ces
matériels en lieu sûr.

Les cours dispensés au foyer permettent de combler les


lacunes et les insuffisances en matière d'éducation.

On cherche à déve lopper chez eux une pe rsonna lité aux


dimensions intellectuelle, spirituelle. morale et civique
afin qu'ils deviennent des citoyens normaux vivant en
harmonie avec leur société.

Une bone instruction est capable d'adoucir les moeurs et


d'humaniser les enfants et de les rendre plus sociables.

En plus des cours théoriques. le Foyer organise des


travaux pratiques au profit des enfants.
28

11.2.2 LES TRAVAUX PRATIQUES

Les travaux prat i ques sont orga ni sés autou r de tro i s


pôles: les atelierrs de production, les plantations et les
services divers.

Un responsable permanent chargé des travaux organise


quotidiennement et de concert avec les autres chefs
d'atelier) la répartition et l'exécution des tâches.

La distribution des enfants selon les tâches est


hebdomadaire et chacun dieux est tenu de respecter son poste.

A la fin de la semaine) une nouvelle répartition est


fa i te et tout enfant peu t passer ct une tâche à une aut re,
1

dlun atelier à un autre.

Toutefo i s, un enfant part i cul i èrement apte dans une tâche


spécialisée (mécanique, menuiserie •... ) peut éventuellement
garder son poste afin de se perfectionner davantage.

Les travaux se déroulent tous les matins, du lundi au


vendredi. les samedis et les dimanches étant réservés aux
loisirs et au repos.

Les apprentissages les plus enrichissants se passent


dans les ateliers.

· LES ATELIERS DE PR~DUCTI~N


On en dénombre au moins quatre, les uns plus importants
et plus équipés que les autres.

* LA MENUISERIE: C'est l'atelier le plus


grand et le mieux équipé du foyer. Son équipement technique
29

est nettement supérieur A celui des menuiseries individuelles


de nos quartiers. Une quinzaine de machines permettent
d'accomplir les tâches 'les plus variées.

Nous avons pu retenir dans la panoplie des machines, la


dégauchisseuse qui redresse le bois. la toupie pour décorer
les meubles, la ponceuse qui sert à polir le bois,
l'aspirateur, la raboteuse, la scie circula1re qui fend le
bois, la mortaise A pointes qui fabrique des mèches, la scie
à ruban qui sert à faire des courbes, la scie radiale qui
trace des angles sur le bois etc.

Quand le bois est préparé et transformé en meuble, il


sort du grand atelier et passe dans des ateliers plus petits
pour le vernissage ou le tapissage selon la nature du meuble.
Ces dernières opérations utilisent un matériel technique
assez sophistiqué.

L'atelier produit des meubles de toutes sortes : lits,


chaises, tables. fauteuils, buffets, tiroirs. portes et
divers accessoires de décoration des maisons. 1l l ivre ses
produits en général sur commande.

La menuiserie est dirigée par un chef d'atelier qui est


l un des encadreurs du Foyer.
1

Il passe les contrats avec les clients et assure la


livraison. Il coordonne les activités dans llatelier et
répartit les tâches.

Deux ou trois travailleurs de lratelîer sont des


professionnels recrutés par le Foyer. Le reste clest les
enfants du Foyer. Ceux-ci exécutent des tâches secondaires ou
assez simples sous la direction des spécialistes et
progressivement apprennent à faire les travaux les plus
compliqués ou les plus délicats.
30

La menuiserie contribue beaucoup au bon fonctionnement


du Foyer dont elle renforce les ressources financières grâce
aux produits des ventes. Elle équipe également le Foyer en
meubles lits pour les enfants. tables et bancs pour les
classes et les autres salles (réfectoire. bureaux etc).

* L'ATELIER-GARAGE

L'atelier-garage est d'un équipement moyen qui permet


d'exécuter un certain nombre de travaux ordinaires.

Il est dirigé également par un des responsables du


Foyer. entouré de quelques mécaniciens et des enfants
"affectés" du garage.

Comme à la menuiserie, les enfants apprennent en


observant et en exécutant de pet i tes tâches aux côtés des
spécialistes.

L'équipement du garage lui permet de réaliser trois


sortes de services la tôlerie, l'électricité et la
menuiserie méta17ique.

Le garage s'occupe en priorité des véhicules du


personnel du Foyer mais reçoit beaucoup de clients venant de
la ville.

Il contribue à sa manière au bon fonctionnement du Foyer


et à la formation des enfants.

* LA MAÇONNERIE

On ne peut pas parler d'un atelier en tant que tel au


Foyer. Cependant il existe un équipement pour effectuer des
travaux de maçonnerie.
31

Quand un chantier est initié au Foyer, par exemple la


construction d'un nouveau bureau ou d'une nouvelle salle
quelconque, les enfants sont associés à la fabrication des
par pa i n9 s. à l' é l é vat ion des mur 5 et à l a pau s e dut 0 i t. br e f
à toutes les étapes dans la construction d1un bâtiment.
Ce qui leur donne ainsi lloccasion de tester et de découvrir
le métier de maçon.

Le Foyer dispose d'une porcherie abrttant une dizaine de


bêtes de race sé l ect i onnée. Les enfants apprennent à les
nourrir, à les soigner, à assurer leur ration d'eau et à
net toyer 1eurs enc l os. Les porcs engra i s sés sont vendus et
rapportent des sommes consistantes au F9yer.

LES PLANTATIONS

A l'intérieur des périmètres du Foyer, trois petites


surfaces sont exploitées pour les travaux agricoles. La
première portion est plantée de bananiers. La seconde est un
verger complet, on y trouve des goyaviers, des papayers, des
mandarines, des citronniers, des avocatiers et plusieurs
autres espaces. La dernière surface est plantée de manioc.

Les enfants travaillent régulièrement dans ces


plantations pour désherber et entretenir les plantes.

Le chef des travaux conduit lui même les enfants dans la


plantation où il organise et survejJJe. le travail. Il confie
à chaque enfant une portion à nettoyer, ce qui oblige à
l'effort.

Ainsi, tout le monde travaille et la tentation de tomber


dans la paresse est moins grande.
32

Le chef des travaux travai lle lui même avec les enfants
pour les stimuler et sa présence permet de prévenir des
gaffes éventuelles.

C'est une occasion d'initier les enfants aux travaux de


la terre.

Les produits des plantations complètent l'alimentation


des enfants qui consomment quotidiennement les fruits
récoltés, et servis à table.

En dehors des atel iers et des plantations, les enfants


du Foyer rendent des services divers qui contribuent à la
bonne marche du Foyer.

LES SERVICES DIVERS

Il yale service quotidien à la cuisine consistant pour


les enfants. d'aider à nettoyer les plats avant et après les
repas, de mettre de l'ordre au réfectoire, d'arranger la
cuisine et enfin de trier le riz ou les haricots afin de les
débarrasser des saletés avant leur préparation.

Le service à la cuisine est essentiellement réservé aux


enfants les plus petits et les plus fragiles qui
éprouveraient plus de difficultés dans les plantations ou
dans les ateliers.

Les enfants peuvent être sollicités à tout moment pour


d'a ut r e s pet i t s s e r vic es. A; nsi, ils p' e u ven t arr a n9e rte 1l e
ou telle pièce pour des réunions, nettoyer un espace, arroser
des fleurs. laver les voitures des responsables. accompagner
un responsable pour faire des courses en ville.
33

Toutes les activités que les enfants pratiquent au Foyer


visent un objectif unique: leur formation et leur insertion
socîale harmonieuse.

Ils se sentent utiles et importants aux yeux des


autres; Ils apprennent à gagner honnêtement leur vie au prix
d'un labeur et d'efforts soutenus. Ainsi, le sentiment d'être
rejeté par la société. s'atténue un peu chez les enfants.

Ils sont encouragés et incités à se perfectionner dans


un métier ou dans une tâche afin d1avoir droit à une place
méritée dans la société.

Afin de développer chez les enfants toutes les


dimensions de la personne, le Foyer. en plus de la formation
i nte 11 ectue 11 e et des apprent i ssages prat i ques. met à la
disposition des enfants des activités de loisirs.
34

11.2.3 LES ACTIVITES SOCIO-CULTURELLES ET SPORTIVES

Le loisir. rappelons-le. est le temps consacré à une


activité par un individu) en dehors de ses obligations
primaires, pour se reposer, se divertir. se délasser,
développer ses capacités humaines et partager la vie de son
milieu. Le loisir constitue un puissant moyen de rééducation
pour les jeunes délinquants.

En effet, par sa fonction de délassement, le loisir est


une thérapie contre l'agressivité des enfants. Souvent
violents et impulsifs, c'est aux heures de loisir que les
enfants libèrent leurs pulsions agressives. Ils se défoulent
de leur angoisse et deviennent moins nerveux.

Le loisir humanise les enfants et les rend plus


perméables.

En effet, ce n'est qu'aux moments des loisirs qu'on les


voit sourire plutôt que pendant les autres activités.

Au Foyer. la journée de samedi est par excellence celle


des loisirs. Elle leur est entièrement consacrée et est
déclarée journée portes ouvertes. A cette occasion, tous les
enfants de la rue sont invités à prendre part aux
distractions.

Les samedis matin à 8 heures, les enfants de 1 a rue


viennent de tous les horizons et se joignent à leurs
camarades hébergés au Foyer.

Les enfants venus de la ville sont particulièrement


épanou i s pendant les loi sirs. Le cadre du Foyer leur perme t
de se reposer des tracasseries de la vi lle où ils sont en
perpétuelle alerte, toujours prêt à fuir devant la police ou
toute personne qui peut se plaindre de leur comportement.
35

Le matin, les enfants aiment jouer au Football à l'image


de leur pays le CAMEROUN.

Le Foyer dispose d1un petit terrain de sport Où ils


peuvent jouer au ba 11 on. Le match peut durer jusqu'à ce
qu1ils soient fatigués.

Après, ils pas sent à la piscine mais se lavent d'abord


sous des robinets avant de plonger dans la piscine. un
rectangle de 10 mètres sur 5 peu profond, aux eaux bleu ciel.

La piscine est bien entretenue selon les normes et les


règles d'hygiène. Les enfants de la vi lle profitent de
l'occasion pour laver leurs habits et les faire sécher
pendant qu' ils SI amusent dans l' eau.

Certains enfants profitent de ces occasions pour voler


et camoufler les habits de leurs camarades. Mais. dans la
plupart des cas les victimes finissent par découvrir et
dénoncer le voleur.

Les responsables du Foyer font alors pression sur le


voleur et lu? intiment J'ordre de remettre les habits volés
aux propriétaires. sinon il est frappé d'interdiction de
visite au Foyer.

Mais généralement, les enfants s'exécutent pour ne pas


être rejetés par leurs camarades ou par le Foyer.

A 12 heures, les responsables convient les enfants à


quitter la piscine et à se rendre au réfectoire, collé à la
cu i sine où on procède à l' appe ,. 1 l s trouvent 1e repas déj à
servi sur les tables et après une courte prière prononcée par
le responsable, les enfants mangent.
36

Les responsables se regroupent sur une table qui leur


est réservée et prennent leur repas~ l'oeil vigilant sur les
enfants.

Le Foyer peut ai ns i recevo i r le samed i entre 40 et 50


enfants.

Après le repas, les enfants enlèvent les tables et les


arrangent sur les côtés, dégageant ainsi un espace qui leur
sert de piste de danse.

Un responsable leur diffuse de la musique (toutes


variétés confondues) et ils se trémoussent.

Certains responsables dansent avec les enfants pour leur


témoigner une certaine affection et partager leur JOle. Ce
geste plaît beaucoup aux enfants qui se ruent sur eux afin de
les acclamer et leur montrer leur satisfaction.

L' après mi di, autour de 14h30 les enfants se mettent


dans une salle où un responsable leur fait passer des films à
la vidéo.

Les films éducatifs sélectionnés permettent de les


informer et de les sensibiliser sur certains maux sociaux.

C'est ainsi qu'on leur montre des films sur les maladies
sexuellement transmissibles (MST), sur la protection de
llenvironnement, sur les mesures d1hygiène.

Mais les enfants slennuient ou slendorment devant les


films éducatifs. Ils revendiquent des films d'action (films
de gue r r e. die spi 0 n nage ~ dia ma ur ... ) fan a t i que s
inconditionnels du Cinéma commercial, ils adorent les fi1ms
de violence et d'honneur qui leur permettent d1exorciser leur
agress i v ité.
37

Les films d'honneurs présentent en grand nombre des


modèles et des héros que les enfants cherchent à incarner.

On les retrouve aussitôt après le film en train de


reproduire les gestes et de répéter les paroles des acteurs.

A la fin de la journée. les enfants de la ville sont


invités à rentrer. Seuls les enfants du Foyer peuvent
continuer à regarder les programmes de la Radio-Télêvision
Camerounaise (CRTV) jusqu'à ce que le sommeil les oblige à
aller se coucher.

Tout au long de ce chapitre nous avons essayé de saisir


et de présenter le Foyer dans toutes ses dimensions les
principaux acteurs, les diverses activités organlsees allant
de la formation à l'apprentissage pratique sans oublier les
activités socio-culturel1es et sportives.

Cette découverte du Foyer nous interpelle et nous amène


à nous poser une question principale Le Foyer atteint-il
son objectif primordial qui est la récupération et
1 'insertion des jeunes délinquants?

Dans le chapitre suivant, nous a110ns nous appliquer à


une analyse critique du milieu concerné pour estimer le degré
de satisfaction ou de réussite, les résultats réalisés.
38

CHAPITRE III ANALYSE fONCTIONNELLE DU FOYER ET PROPOSITIONS

l.ANALYSE fONCTIONNELLE DU FOYER

En procédant à l'étude descriptive du Foyer de


l'Espérance de MVOLYE. nous avons remarqué beaucoup de bonne
va l onté et de dévouement de la part des encadreurs. Ma i s la
mission que le Foyer s'est donnée est délicate. exigeante et
nécessite des moyens dont il ne semble pas disposer. Nous
analyserons les résultats obtenus en utilisant les paramètres
suivants:

la capacité d'accueil
l' équ i pement
la formation
le suivi des jeunes.

1.1. UNE CAPACITE D'ACCUEIL LIMITEE

La première impression que l'on a en arrivant au Foyer


Cl est que ce lui -c i présente une a tmosphère ct 1 éc l a tement et
d'étouffement.

En effet, la capacité d'accueil du Foyer est trop petite


par rapport au nombre d'enfants qui y viennent.

L'espace dépasse à peine celle d'une concession


familiale moyenne.

Hormis les atel iers. le Foyer ne compte que deux (2)


"blocs" constitués de petites salles qui servent tant bien
que mal à mener les activités.
39

Selon le témoignage du responsable principal, "le Foyer


a démarré tout doucement et doit se mettre en place,
s'améliorer progressivement".

Autrement dit, le Foyer était au début une action


empirique qui visait à répondre à des beso l ns ponctuels à
savoir: venir en aide à des enfants abandonnés.

Les fondateurs ont juste aménagés et adaptés les


structures qui servaient à d1autres fins.

Aussi, la capacité d'accueil est tellement limitée qu'on


est obl igé de trier les enfants qui se présentent pour ne
retenir que les cas les plus graves.

Mal gré t 0 ut) ceux qui 0 nt 1a c ha·n ce der est ers 0 nt à


l' étro i tesse.

Les deux dortoirs sont minuscules, la salle de vidéo


suffit à peine à contenir cinq personnes. Il n'y a qu'une
salle de classe et la salle d'attente sert en même temps de
salle de soi n .

Les structures d'accueil n'évoluent pas alors que la


demande est de plus en plus forte, du fait d'une montée
vertigineuse de la délinquance dans les artères de Yaoundé et
ses alentours. Et, en plus de sa capacité d1accueil limitée,
le Foyer fonctionne avec un équipement trop précaire.

1.2 UN EQUIPEMENT PRECAIRE

La vie au Foyer est assez austère. Le matériel est


limité au stict minimum) frisant 11 inconfort, voire
1 indigence.
l
40

Les pensionnairs se contentent tout juste de leur ration


alimentaire assez régul ière et plus ou moins équilibrée.

Les bonnes chairs ne sont pas monnaie courante. A table,


le couvert est sans goût. Le niveau de vie est très bas par
rapport à celui des familles moyennes.

Les enfants conservent les hai 110ns qu' i ls avaient dans


la rue, étant donné que le Foyer ne leur fournit pas de
vêtements.

Mais au Foyer ils dorment en sécurité et peuvent gagner


leur pain par des voies honnêtes. La précarité de la vie au
Foyer n'est pas sans conséquence sur l'action d'éducation et
de récupération.

En effet. les enfants sont souvent insatisfaits et le


Foyer a tendance à reproduire le difficile cadre familial
qu'ils ont quitté par nécessité.

Dans la rue,ils ont appris à se procurer de l'argent de


poche pour satisfaire leurs petits caprices.

Trop habitués aux cinéma. bars. à l'argent. leur arrivée


au Foyer constitue une coupure brûtale avec leur ancien mode
de vie. Ils ont l'impression de reculer d'un cran dans la
vie.

C'est ainsi que beaucoup d'enfants regagnent la rue soit


clandestinement, soit en provoquant des situations de conflit
avec leurs camarades ou avec 'es responsables.

D'autres enfants. plus courtois partent en ville après


avoir demandé la permission sous prétexte des courses. ce qui
leur permet de se "ressourcer" dans la rue avant de regagner
le Foyer.
41

Ils profitent de leur sortie pour se procurer un peu


d1argent de poche. Ils sont porteurs à la gare, plongeurs
dans les cafés. balayeurs, laveurs des voitures.

Mais dans certains cas, ils n'hésitent pas à commettre


des larcins qui représentent pour eux une preuve
d'intelligence et d'habileté. Ils disent à ce propos que
celui qui se fait prendre "est un apprenti voleur",

La vie au Foyer est perçue par les enfants comme un mal


nécessaire. Ils se considèrent comme de passage, le temps de
se reposer des tracasseries de la ville.

Le Foyer n'est pas perçu comme un paliatif intéressant.

ces
A problèmes slajoute une formation trop
insuffisante.

1.3 LA FORMATION INSUFFISANTE

Le dernier point mais certainement pas le moins


important concerne la formation donnée aux enfants au Foyer.

Nous estimons qu'elle est insuffisante tant au niveau de


la durée qu'au niveau des moyens déployés. A tous1es niveaux,
dans les cours théoriques comme dans les atelies, la
formation des enfants est superficielle. Plusieurs facteurs
expliquent cette situation de défaillance.

1. 3.1 AU NIVEAU DES COURS

Nous remarquons et déplorons :

Une durée trop courte et un faible équipement. Le


Foyer par manque de moyen ou par fidél ité à son
objectif (recueillir pour un temps les enfants et
42

les ramener dans leur famille), ne met pas l'accent


sur une bonne formation des enfants. les enfants
apprennent à peine quelques riduments.

Le temps qu'un enfant peut mettre au Foyer varie de deux


semaines â trois mois. Peu d'enfants atteignent six mois de
présence.
Le Foyer utilise donc très peu de moyen pour l'éducation
des enfants la salle de classe unique permet de les
rassembler pour quelques heures de lecture et de calcul.

Les évaluations sont juste formatives, on ne prévoit pas


de passage en classe supérieure. les cours sont réduits à une
simple occupation des enfants. Un responsable affirmait que
"c'est pour que les enfants ne s'ennuient pas !Il

Le matériel didactique est rédu i t à deux livres qui


servent au maître pour la préparation des cours et une
vingtaine de cahiers.

Le travail s'arrête donc en classe, et les enfants n'ont


pas la possibilité de lire ou d'apprendre après les classes.
Ils sortent dela salle les mains vides.

Il n1y a pas non plus de bibliothèque pour leur culture


générale.

Des méthodes inadéquates c'est le point le plus


dél icat dans la formation de ces enfants qui ne
sont pas tout à fait comme les autres.

En effet, les jeunes dél inquants' étant des inadaptés


sociaux, ils ont besoin préalablement d'une cure de
redressement, d'une rééducation avant toute formation.
43

La rééducation renferme un ensemble de mesures


sociologiques, éducatives, médicales et psychologiques
concourant à faciliter la réinsertion sociale.

Elle permet de faire cesser les comportemtns déviants


pour les remplacer par des attitudes positives et
valorisantes. La rééducation nécessite un matriel complexe et
un personnel spécialisé (psychologue. psychalyste,
psychiatre ... ).

Or, le Foyer ne dispose ni des moyens techniques ni d'un


personnel compétent. Il fait la politique de ses moyens.

La conséquence immédiate de cete défaillance est que les


enf ants restent menta 1ement l es mêmes. Il n' y a pas une
transformation sérieuse de leur personnalité. Ils jouent le
jeu en se conformant plus ou moins' aux règles de vie
communautaire pour satisfaire les responsables.

Mais ils révélent leur vraie nature chaque fois que


l'occasion se présente.

Au niveau des cours, l'idéal est de mettre en place une


formation et un suivi individualisé pour chaque enfant, étant
donné que les cas et les degrès d' inadaptation ne sont pas
les mêmes.

A la limite, on doit regrouper les enfants en fonction


de la nature de leur handicap.

Malheureusement. au Foyer. tous les enfants sont


rassemblés dans une même classe et suivent un même
enseignement.

Ce qui rend la tâche très difficile au maltre et diminue


considérablement les chances de réussite.
44

On ob5erve surtout :

Une indiscipline chez certains enfants dont le cas


pathologique est grave et qui sont sourds à toute
reproche ou même aux punitions.
Ceux-ci influencent beaucoup les autres qui leur
emboitent le pas. Ce qui crée une atmosphère de
marché aux séances de cours.

Il règne une anarchie totale en classe. les enfants


sortent. se lèvent. se rasseoient. partent en balade.
reviennent en classe comme bon leur semble.

Ils interviennent et interrompent le maître dans ses


explications et sans demander la permi ss ion. se mettent à
poser des questions ou à faire des commentaires.

Un mot évoqué par le maître suffit pour qu'un enfant se


mette à raconter tout une histoire.

Un comportement agressif des enfants qui passent le


temps à se bagarer et à se disputer en classe. On
cherche délibérément à perturber le cours.

Une attitude passive de certains enfants qui font


semblant de dormir pendant tout le cours et qui en
réalité suivent tout ce qui se passe autour d'eux
mais ne prennent part à rien. Ils demeurent sourds
aux conseils et refusent de répondre aux questions
du maître. Ils attendent tranquillement la fin des
classes pour aller se promener ou jouer au ballon.

Les responsab les se trouvent dans une situation


embarrassante quant au comportement à adopter devant les
enfants.
45

Entre une attitude de sévérité qui risque de frustrer


davantage et un laisser faire pouvant conduire à des
débordement sans limites. le juste milieu est difficile à
trouver. Les enfants sont allergiques à toute autorité.

Les responsables font de leur mieux supportant


patiemment les débordements et ne réagissant lorsque les
cho~es tournent au drame.

Au Foyer, clest la loi de la rue qui continue de régner


et les responsables sien accomodent tant bien que mal. Ils
vont jusqulà tolérer chez les enfants le port de certains
objects dangeureux ....

Toute cette s; tuat; on étant la conséquence d'une


impréparation de l'encadrement. Le Foyer à la limite
reproduit la rue et de manière plus dangereuse.

1. 3.2. DANS LES ATELIERS

De même que nous avons déploré des insuffisances dans la


formation théorique au Foyer. nous relevons des faibles dans
les apprentissages effectués dans les ateliers. Ces
défaillances, nous les avons constatées à deux niveaux

la faib1e diversification des ateliers spécia-


li sé s :

les ate1 iers où lion peut apprendre effectivement


des techniques sont réduits à la menuiserie et au
garage. Il nly a pas suffisamment dlateliers
spécialisés qui puissent offrir une expérience plus
riche et plus variée aux enfants. En dehors des
deux ateliers précités, les autres tâches effectuées
au Foyer se ramènent à des services de maintien et
d'entretien des installations. Ce qui n'offre pas
46

assez aux enfants, l' occas i on de découvri r leurs


talents.

l'implication insuffisante des enfants dans les


atel iers : ceci est un peu la conséquence logique
de 'a première défaillance. En effet, 'es deux
ateliers spécialisés ne reçoivent pas suffisamment
les enfants ou plus exactement ne reçoivent pas
tous les enfants.

A la menuiserie. tout comme au garage, c'est quatre


ou cinq enfants et toujours les mêmes qui y ont accès. Ce
sont ceux qui se sont révélés les plus aptes dans ces
domaines. Ils participent aux travaux comme apprentis ou
aides et apprennent par expérience.

Les autres POUf. la plupart. sont occupés dans des


tâches de maintien, juste pour qu'ils fassent quelque chose,
étant donné qu'il n'y a pas d'autres ateliers où 1'on peut
les orienter.

Cette brève analyse dela politique de récupération mis e


en oeuvre au Foyer nous a révélé d'énormes limites. Nous
avons vu que la formation donnée aux enfants, qu'elle soit
théorique ou pratique est insuffisante parce qu'elle est
confrontée à de multiples obstacles.

Les enfants n'ont pas beaucoup changé, l'action du Foyer sur


eux étant un peu comme de l'eau sur les plumes d'un canard.
Revenus à la maison, les enfants ne sont pas assez armés pour
se réadapter à la famille. Ils n'évoluent pas positivement,
ne maîtrisent aucun métier et socialeme~t ou moralement, leur
comportement déviant ne change pas sinon empire.

La plupart des enfants ramenés en fami 11 en' y restent


pas longtemps. Soit ils regagnent aussitôt la rue, soit ils
47

reviennent au Foyer qui est obligé de les accuillir à


nouveau.

Notons l'attitude négative de certains parents qui ne permet


pas aux enfants de réintégrer la famille: certains parents
refusent de recevoir leurs enfants et déclarent aux
responsables de Foyer que, puisqu'i 1s les ont récupérés, ils
n'ont qu'à les garder au Foyer. Ils démissionnent ainsi de
leur responsabillté et laisse le Foyer dans un grand
embarras. Pour notre soulagement. nous avons aussi noté que
quelques parents acceptent de récupérer leurs enfants.

Enfin, le Foyer a déjà formé depuis sa création 1996


enfants dans les flliaires suivantes la maçonnerie, la
menuiserie et l'atelier- garage. Les possibilités d'emploi
après la formation sont également réduites.

Face à ces difficultés qui 'empêchent le Foyer


d'accomplir pleinement sa mission, nous nous proposons de
faire que1ques suggestions visant à améliorer son action en
vue d'obtenir des résultats plus encourageants.

II PROPOSITIONS
Pour améliorer les prestations de service du Foyer

II.1 AU NIVEAU DES RELATIONS PUBLIQUES

Jusqu'à présent, le Foyer évolue un peu en vase clos.


Mais nous encourageons une collaboration et un
partenariat entre le Foyer et les pouvoirs publics, les
organismes non gouvernementaux (ONG) et les autres services
impliqués dans la récupération des enfants en situation
difficile.
48

Ce partenariat permettrait au Foyer en amont. de se


doter de structures plus adéquates

une structure d'accueil offrant un cadre de vie


plus décent.

un matériel didactique varié et performant

Des ateliers spécialisés plus nombreux et variés:


couture, coordonnerie. poterie. sculture. tissage,
vannerie, peinture. af,n que tous 1es enfants
y trouvent leur compte.

En aval, ce partenariat permettrait d'élaborer une


politique de réinsertion et de suivi des jeunes récupérés.

A 1 1 heure actuelle, le Foyer se contente de ramener les


enfants à la maison alors qu ' i1 faut plutôt:

assurer la continuité de leur instruction pour ceux


qui peuvent ou veulent poursuivre les études.

Assurer et faciliter leur installation


professionnelle leur trouver des sources de
financement ou des crédits pour qu ' i1s puissent
ouvrir un atelier de production.

Négocier leur recrutement chez des individus ou


dans des entreprises privées.

Ainsi ils pourront mettre en valeur leur formation et


gagner honnêtement leur vie.
49

II. 2. AU NIVEAU DU CONTENU DU PROGRAMME ET DES MET'HODES


D'ENSEIGNEMENT

1lest souha i tab l e que le Foyer pro longe la durée du


seJour des enfants (entre 6 mois et 3 ans) ce qui lui
permettra de mettre sur pied un programme plus élaboré de
formation. A côté des enseignements communs, l'on devra
prévoir des options pour orienter les enfants en fonction de
leurs aptitudes.

Il faut former le personnel pour plus d'efficacité

Pour cela. il faut prévoir des recyclages


périodiques du personnel, organiser par exemple à leur
intention des cours de psychologie sociale appliquée afin de
leur doter des instruments de lecture du comportement humain.
Ils seront ainsi familiarisés avec les mécanismes
psychologiques normaux et les manifestations pathologiques du
psychisme humain.

Il faut également donner au personnel l'occasion de


participer à des séminaires et autres travaux consacrés au
problême de la délinquance, leur offrir des voyages à
l'étranger ou dans les autres régions où il existe des
centres de récupération des jeunes délinquants le centre de
Bétamba par exemple qui ~ccueille et éduque les enfants de la
rue pour une durée de 3 ans).

Ainsi. les formateurs au Foyer découvriront ce qui se fait


ailleurs et s'inspireront de l'expérience des autres centres
qui sloccupent des jeunes délinquants.

Par ailleurs. les parents peuvent apporter une contribution


déterminante dans l'application des mesures de suivi de leurs
enfants d'une part. et de promotion de l'emploi d'autre part.
50

D'abord, pendant le sejour au Foyer, les parents doivent


visiter leurs enfants, discuter avec les responsables. afin
d'apporter les éclaircissements sur la situation de l'enfant.
Cette visite rétablirait les relations, favoriserait la
solution des conflits entre jeunes et parents.

Ensuite. après le séjour au Foyer les parents peuvent créer


des Petites et Moyennes Industries (PMI) ou des Petites et
Moyennes Entreprises (PME) pour l'insertion économique des
jeunes.

La famille peut exploiter par exemple. une unité


agricole, pastorale, artisanale, commerciale ...• elle dispose
là d1un moyen de lutte contre le chômage et la paresse. Si
elle accepte d'héberger deux ou trois jeunes, c'est souvent
pour disposer d'une main-d'oeuvre assez bon marché.

Ce faisant, elle crée de l'emploi et limite le parasitisme.


Cette famille apporte. ainsi un frein au banditisme et à la
délinquance.

Cette panoplie de solutions que nous proposons lei, nous


en somme conscients, nécessite des moyens considérables
qu'ils faut trouver malgré la récession.

La situation du Foyer est celle de tous les autres


centres spécialisés en matière de jeunesse au CAMEROUN.

Le séminaire de la conférence des Ministres de la Jeunesse et


des Sports des pays d'expression Française (CONFEJES)
organisé par l'Institut National de la Jeunesse et des Sports
(INJ5) du 06 au 09 Novembre 1990 sur le thème "réflexion
internationale sur le soutien scientifique et technique des
activités de formation et d'insertion professionnelle des
jeunes" a souligné au Cameroun:
51

L'inexistence ou l'existence réduite des structures


d'accueil des jeunes (centre de jeunesse).

L'état de délabrement des structures existantes.

L'insuffisance des encadreurs désignés.

Un manque de politique globale en matière de


récupération des jeunes déviants.

Un tel constat appelle de la part des autorités


Camerounaises des réactions rapides et rigoureuses pour
sauver de la délinquance de milliers d'enfants des banlieues
de Yaoundé.
52

CONCLUSION

La délinquance Juvénile est llun des problèmes le plus


courant et le plus socialement troublant de l'adolescence.

Nombreux sont les facteurs qui expliquent ce fléau.

En orientant la présente étude vers une contribution à


l'étude du phénomène de la délinquance juvénile à travers
l'exemple du Foyer de l'Espérance de MVOLYE, nous avons voulu
mettre en exergue les sources, les facteurs les plus
déterminants et les solutions empiriques.

Nous avons ainsi remarqué que la délinquance juvénile


est attribuable aux défaillances de la famille, de l'école et
de la société.

Ma i s des de bonne vo l onté se 1 èvent et luttent


hommes
pour contrecarrer ce fléau social.

La politique de récupération mise en place au Foyer


produit cependant des résultats limités.

Un partenariat s'impose donc entre les pouvoirs publics


ou autres organismes et les centres de récupération des
jeunes délinquants pour une action concertée et une politique
nationale plus dynamique en matière de lutte contre la
délinquance juvénile.

Mais il faut reconnaître que l'action des pouvoirs


publics ne peut être elle aussi que très 1 imitée dans le
contexte actuel de crise généralisée.

Les urgences sont si nombreuses que les questions


sociales risquent d1être négligées au profit des secteurs
53

économiques. C'est ic; que l' intervention de la société


cîvile s'avère nécessaire. Celle-ci doit se mobiliser et
mieux contribuer à la lutte contre la délinquance.

Cette lutte ne peut cependant produire de bons résultats


que si elle touche les sources et facteurs qui la produisent.

En effet, la famille est le premier milieu social dans


lequel baigne l'enfant, le lieu où il établit ses premiers
contacts et le milieu dans lequel l'enfant vit ses premières
expériences dans tous les domaines.

Ces expériences sont fortifiées par l'école qui à son


tour façonne l' i nd i v i du en vue de f ac il i ter son i nsert i on
sociale.

La récupération des jeunes déviants est un devoir qui


incombe la société. Le Foyer de l'Espérance s'est donné une
mission de récupérer les jeunes en si.tuatiQn difficile pour
une réintégration sociale harmonieuse, maîs cette mission
exige des moyens dont le Foyer ne dispose pas suffisamment,
alors que la vitesse avec laquelle cette population s'accroit
et les difficiles conditions de crise économique aidant, nos
pays exposent à un grave danger.

Les jeunes plus que toutes les autres catégories


sociales constituent une force avec laquelle il faut compter
pour le développement économique de la société.

la société compte sur les jeunes pour évoluer, se


maintenir et s'immortaliser dans llespace et dans le temps.
La jeunesse est appelée "moteur" du développement "fer de
lance" de la nation. les jeunes par leur nombre et par leur
vitalité constituent l'essentiel de la population active
surtout dans les pays en développement.
54

Si cette jeunesse est négligée, les délits vont galoper


à pas de géant et on observera l'augmentation de
l'insécurité des personnes et de leurs biens.

La lutte contre la délinquance juvénile est une


impérieuse nécessité et d'une importante vitale pour l'avenir
de ces jeunes et la sécurité de tous.

Ainsi, après avoir examiné le rôle et l'importance des


différentes structures intervenants dans le processus de
lutte contre la délinquance juvénile, nous avons envisagé de
nouvelles perspectives susceptibles de donner une impulsion
nouvelle à cette tâche.

Notre apport se situe à plusieurs niveaux la famille,


l'école, la société etc.

1. AU NIVEAU DE LA FAMILLE

A ce niveau la lutte visera à faire en sorte que les


parents ne soient plus les premières causes de la
délinquance de leurs enfants.

A cet égard, il serait indispensable et opportun de


multiplier des associations des parents d'élèves.

1l s' ag it en fait d'une éducation des adultes qui


reposera sur un certain nombre d'informations relative à leur
préparation à une parenté responsable. Mieux, 1es parents
devraient avoir 1e nombre d'enfants que leurs moyens leur
permettent d'élever.

Il sera également question de montrer aux parents


l'importance. sur le plan éducatif des cinq premières années
de vie de l'enfant.
55

En effet, au moment ou l'enfant atteint six ans, les


structures essentielles de sa personnalité sont formées; et
cette personnalité, 11 1a portera en lui toute sa vie.

Pour faire comprendre aux parents, l'importance de cette


phase de la vie de leurs enfants, certains canaux de
communication comme les causeries éducatives, les tables
rondes et les conférences seront tout à fait indiqués. Ces
techniques de diffusion des messages permettent aux parents
d'être conscients de leur rôle primordial dans la formation
de la personnalité de base de l'enfant.

L'éducation dans la famille devra trouver en l'école un


prolongement qui favorisera l'éclosion de la personnalité
infantile.

2. AU ~IVEAU DE L'E~~LE
Le système scolaire serait tout a 'fait à repenser.
L'enseignement à l'école ne devrait plus être uniquement sous
forme de Ucatéch i sme".

En outre, l'éducation à l'école doit aussi assurer un


apprentissage des normes de la vie active. l l faut éviter une
rupture entre l'éducation en famille et ce 11 e reçue à
l'école. L'éducation morale et civile des enfants doit être
assurée dans les écoles.

On pourrait aussi introduire dans les programmes


scolaires des lycées et collèges un chapitre de préparation à
la responsabilité parentale. qui permettra aux futurs parents
de ne pas commet tre l es mêmes erreurs éducat ives que les
parents qu i n ' ont pas eu l' occas; on de recevo i r de te l s
enseignements.
56

Une autre réforme du système éducatif résiderait au


niveau de l'orientation scolaire.

L'erreur commi se le pl us souvent consiste à orienter


l'enfant dans l'enseignement technique alors qu'il ne réussit
pas dans l'enseignement général.

Ce faisant, on oublie qu'il existe un autre système


aussi performant et qui serait susceptible de générer le plus
réussite: le système éducatif non-institutionnel ou système
extra-scolaire.

C'est d'ailleurs le système qui prend en compte les


potentialités réelles de chacun, en ce sens qu'il ne produit
pas de déchets mais donne à chaque individu la possibilité de
s' insérer dans le circuit socio-professionnel.

De ce fait, notre voeu le plus ardent, c'est la mise sur


pied d'un modèle de conciliation entre les objectifs globaux
(nation) et les objectifs individuels de l'éducation (liés à
la personnalité du jeune en apprentissage).

Il faut rendre l'enseignement obligatoire. non


compétitif et non sélectif jusqu1à la classe de troisième.

Dans cette perspective, on ne devra plus faire reprendre


la classe à un enfant, encore moins le renvoyer de l'école
sans le consentement ou l'autorisation de ses parents.

Nous souha i terons que 1e modè 1e du ma ître et ce lu; de


l'élève fasse bon ménage: c'est-à-dire que le maître ne doit
pas seulement demander à l'élève de reproduire son savoir,
mais il doit également lui donner la possibilité de découvrir
ses potentialités et d'exprimer son talent ou son génie au
niveau globale de la société.
57

Il faut une surveillance et dépistage précoce des


attitudes de refus des obligations pré-sociales ou
pré-scolaires et des comportements de prédélinquance (vols,

fugues d'éritement, école buissonnière, désengagement précoce


A l'égard du travail).

Dépistage différentiel de ces attitudes par rapport à


des conduites d10rigine autre (difficultés scolaires,
problêmes affectifs névrogènes, etc ... )

3. AU NIVEAU DE LA SOCIETE

La délinquance juvénile apparait comme un symptôme d'une


maladie de la société globale. Pour cela il est nécessaire de
trouver des solutions pour remédier à cette maladie qui
frappe surtout la population jeune.

Il s'agit de créer et développer des clubs culturels et


les mouvements de jeunesse qui contribuent d'une façon
complémentaire au développement de l'adolescent et l'aident à
créer son propre comportement.

La plupart de ces clubs ont pour but de familiariser la


jeunesse de moins de 16 ans avec le monde technique et
scientifique, tout en leur apprenant à utiliser leurs heures
de loisirs pour développer des qualités techniques dans
divers domaines.

Lorsque les activités de récréation sont bien


organisées, les heures de loisirs sont orientées dans une
direction constructive.
58

Il faudra également développer les centres de


récupération et d1encadrement social en vue de la réinsertion
des jeunes déviants.

Ces cent res devront ct i spos er d' un perso nne l éducat if


qualifié pouvant déterminer avec eux les domaines d'études et
d'orientation professionnelle qui leur seront utiles.

Il s'agit de mettre en situation, entre deux pôles de


formation. le jeune à récupérer. C'est en fait une formation
en alternance qui supposera d'un côté, le centre de
réadaptation et, de l'autre, llentreprise de formation
professionnelle qu'il sera question de mettre sur pied.

A cet effet, on pourrait discuter avec certaines


entreprises et sociétés de la place sur les possibilités de
placement des jeunes dans leurs ateliers. Ce placement vise à
aider la plupart de ces jeunes à apprendre un métier. Après
leur formation, ceS jeunes seraient insérés dans le circuit
économique.

Le travail est un facteur de stabilisation de la personnalité


de l'individu j il ne peut y avoir de réinsertion sociale du
jeune délinquant sans sa réinsertion professionnelle.

En réponse aux difficultés que connaissent les parents


qui travaillent et qui ne peuvent pas s'occuper de leurs
enfants, lesquels traînent dans les rues surtout pendant Jes
vacances, nous 1eur proposons 1es co 11 ec t i v i tés éduca t ives,
l tanimation sportive et les activités de plein aire.

La colonie de vacances est 1 June des oeuvres de vacances


qui concerne les jeunes de 7 à 13 ans. Elle a pour but de
contribuer à l'éducation de la jeunesse en enrichissant leurs
connaissances. Elle occupe sainement et rationnellement leur
temps libre, par des activités ludiques variées: Elle
59

éveille en eux le sens de la créativité par la transformation


des objets naturels en objets d'arts. Enfin. la colonie de
vacances accentue chez l es enfants l' espr i t de la vie en

groupe. Elle apporte un changement au niveau du comportement


habituel de l'enfant et contribue aussi à sa socialisation.

L'animation sportive est également tout à fait indiquée


pour satisfaire les besoins du jeune.

Durant ce temps de récréation. on peut renforcer les


traits positifs et réprimer ceux qui sont indésirables.
L1animation sportive apporte de ce fait une aide à la
solution des problèmes d'indiscipline de la jeunesse.

A ce sujet. il faut noter que les problèmes


d'indiscipline sont presque inexistants lorsque le programme
d'animation sportive pour la jeunesse est, à 1a fois, bien
organisé et bien exécuté.

Enfin, pour atténuer les effets de la délinquance


juvénile, les animateurs pourraient organiser des camps de
jeunes.

Il s'agit d'activités de plein air qui permettront aux


jeunes d'améliorer leurs connaissances pratiques en ce qui
concerne la fabri ca t ion d' out ils. En organ i sant un camp de
jeunes, la possibilité leur est offerte de développer leur
ingéniosité, de se former à la vie de plein air de façon à ce
qu'ils soient en mesure de s'y adapter sans heurt. Ce sera
également l'occasion au jeune et à son groupe, la possibilité
de passer leur temps ensemble de manière organisée. Ce qui
permettra de guider leur énergie vers des buts constructifs,
de manière divertissante, intéressante et amusante.
60

Pour ce faire, une préparation des tâches devra se faire


à l lavance pour chaque genre de tâche et aucun jeune ne devra
être laissé sans travai l spécifique. Afin que la vie en plein
air devienne intéressante et plus fascinante, un esprit de
compétition devra être encouragé parmi les membres du groupe.

C'e s t a i ns i qu' 0 n 0 r 9a ni s e r a par 'e xemp le. ct es con cou r s


pour les idées les plus réussies, les mets les plus
savoureux, 11 improvisation •...

Bref. le temps passé en plein air a une grande valeur


éducative que lion doit savoir mettre à profit si l'on veut
lutter contre la délinquance des jeunes.

Tout compte fait, la contribution des animateurs de la


jeunesse dans ce combat contre la délinquance sera vaine si
elle ne bénéficie pas du concours ou du support de tout le
monde.

Nous pensons pa rt i cu 1i èrement à l' act i on des


municipalités, des industriels privés locaux et bien d'autres
entrepreneurs. action qui consisterait à favoriser. des aires
de divers jeux (terrain de jeux avec balançoires, différents
jeux de balle. outils de travaux manuels .•. ), des camps de
vacances, des maisons des jeunes. des centres de loisirs ...•
en vue de promouvoir une meilleure socialisation de la
jeunesse nationale.

Les loisirs par le biais des activités attrayantes,


constituent un moyen efficace de lutte contre la dél inquance
dans un but préventif et curatif.

Les loisirs éducatifs existent j de ce fait. il faudrait


affecter dans les clubs. salles et centres de loisirs. des
animateurs qui pourront aider les délinquants à mieux
61

satisfaire leurs aspirations, en les ramenant dans les


structures sociales adéquates.

En définitive, la contribution de l'inspecteur de la


jeunesse et des sports à la préven t ion de l a dé 1 i nqua nce
juvénile peut revêtir des formes multiples et être conduite à
plusieurs niveaux. Elle peut être le fait d'une animation
conduite:

A partir des structures du Ministère de la jeunesse


et des sports (équipe mobile d'animation, centre de
jeunesse. village de vacances etc).

Auprès des cadres de la jeunesse détachés auprès du


Ministère des Affaires Sociales et de la Condition
Féminine et qui y apporteraient leur technicité.

Par des cadres du Ministère des Affaires Sociales


et de la Condition Féminine à partir des structures
de ce Ministère.

Il apparait alors que cette contribution de l'animation


ne peut être le fait des seuls cadres de la jeunesse. Elle ne
peut résulter que de 1 linteraction éducative et constitue le
type même de l'action multidimensionnelle qui n'exclut aucune
collaboration.

Au terme donc de notre ana lyse, nous ne pouvons guère


prétendre avoir épuisé le sujet.

Tout au plus, espérons-nous avoir démontré l'importance


des centres de récupération et de redressement comme facteur
déterminant de la lutte contre la délinquance juvénile.

Si tel est le cas, l'objectif de notre étude aura alors


été atteint.
62

Il resterait cependant à espérer que cette contribution


débouche sur une meilleure appréhension du phénomène de la

délinquance juvénile ainsi que la responsabilité de la


famille, de l'école et de la société dont les rôles sont
successifs et complémentaires.
,
1

BIBLIOGRAPHIE

* Ouvrages généraux et spécifiques

AVANZINI, G. (1967). l'échec scolaire. Paris,


éditions universitaires.
BESSIS, s. (199). la faim dans le monde. Paris,
édition la découverte, col. Repères.
OOOOSON, F. (1978). Tout se joue avant six ans.
Paris, A. Colin.

ELA, A.J. (1982). l'Afrique des villages. Paris,


Karthala.
ERICKSON, H.E. (1971). Enfance et Société.
Neuchatel, Oelachaux et Niestlé, 4ème édition.
ERNY, P. (1977). L'Enseignement dans les pays
pauvres : modèles et propositions. Paris,
l'Harmattan.
ILLICH, I. (971). Une Société sans école. Paris,
seuil.
INJS (1991). Sciences et techniques d1animation
tome 1, Youndé, CIAG.
LEIF. F. et DELAY, J (1968) Psychologie et
éducation, Tome II : l'adolescence. Paris, Fernand
Nathan
MICHARD, H. (1978). La délinquance des jeunes en
France. Paris, documentation française.
MUCCHIELLI. R. (1986). Comment ils deviennent
délinquants. Paris.
ROUMAJON, Y. (1977). ils ne sont pas nés
délinquants. Paris, Robert Laffont.

* Mémoire

MOMO, P. (1969). la délinquance juvénile dans les


grandes villes du Cameroun: Mémoire de licence en
droit. Yaoundé, université de Yaoundé.
64

* Ra pp ort s
BllONGO, B. (19 81 ). Jeu sse
psy ch olo giq ue de la dé linnequ
ma rgi na le. Approche
19 80 , doc um ent po lyc op ié. Yaan ce juv én ile de 1971 à
oun dé.

FRANZ, P. (19 64 ). Dé lin qu an ce


Ca me rou n: Ra pp ort fla mb eau juv én ile au
. Youndé.

ZUMBACH, P.( 19 63 ). la
Ca me rou n: Ra pp ort N°T.A.O dé lin qu an ce juv én ile au
: CAMER / 2 au 10 Ju in.

Vous aimerez peut-être aussi