9-2 - Décolonisation Au Sénégal Cours

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 3

CLASSES DE TERMINALES Année scolaire 2014/2015

Leçon 9-2 : LA DÉCOLONISATION EN AFRIQUE NOIRE : LE SÉNÉGAL

Objectifs spécifiques
1 - Identifier les facteurs qui ont contribué à l’indépendance.
2- Expliquer les fondements de la loi cadre et de la communauté franco-africaine.
3- Analyser les causes de l’éclatement de la fédération du Mali.

En 1960, le Sénégal accède à l’indépendance. Celle-ci, loin d’être le résultat d’une lutte de
libération, a été le fruit d’une négociation avec la France. En effet, dès avant la fin de la seconde
guerre mondiale, la France a tracé pour ses possessions d’Outre-mer un cadre d’évolution qui
permet le passage de l’Empire à l’Union puis à la Communauté. Plusieurs facteurs contribuent à la
maturation des consciences au Sénégal et ailleurs. Ils obligent, à la fin des années 50, la France à
alléger son dispositif et à prévoir l’indépendance des colonies.

I/ LES FACTEURS D’ÉVOLUTION


1°) L’impact de la guerre
Le Sénégal, à cause de sa position stratégique, a très tôt été un enjeu de la guerre en Afrique.
Mais ce n‘est qu’en 1942, après le débarquement anglo-américain en Afrique du Nord que l’AOF
passe aux mains de la France de De Gaulle.
S’en suit alors un effort de guerre très lourd pour le Sénégal. La colonie redécouvre le travail
forcé généralisé, le portage et la corvée. Le Sénégal, qui avait envoyé une part importante des
80 000 tirailleurs d’AOF en France en 1940, doit accentuer la levée des troupes. Tout
naturellement, la guerre accélérait la prise de conscience et marque les mentalités. Le retour des
anciens combattants dont certains avaient été massacrés à Thiaroye en novembre 1944 accentue
le désir de changement.

2°) Les partis politiques


Comme partout, ils jouent un rôle essentiel dans l’accession à l’indépendance. Le Sénégal dispose
d’une tradition politique ancienne par rapport au reste de l’Afrique française. À partir de 1945, la
vie politique y est dominée par le Bloc Africain, parti d’inspiration socialiste fondé par Lamine
Guèye. Il deviendra la section sénégalaise de la Section française de l’internationale ouvrière
(SFIO). Les leaders en sont Lamine Guèye et Léopold Sédar Senghor.
En 1948 un nouveau parti fait son apparition : le Bloc démocratique sénégalais (BDS). Il naît
d’une scission de la SFIO orchestrée par Senghor et ses amis. En 1951, le BDS, s’appuyant sur
l’électorat des campagnes, remporte dans une atmosphère tendue les élections.
À partir de 1955, les positions des partis politiques envers la France deviennent plus dures, en
rapport avec le contexte caractérisé par la défaite de Diên Biên Phû et de la guerre d’Algérie.

3°) Les syndicats


Le Sénégal a joué le rôle d’avant-garde syndical de l’Afrique noire française. Jusqu’en 1952, le
syndicalisme en AOF et au Sénégal est le prolongement du syndicalisme métropolitain. En 1952,
avec le vote du code du travail d’Outre-mer, les syndicats affirment leur spécificité. La Fédération
des cheminots d’AOF est créée suivie de la Confédération générale des travailleurs africains
(CGTA) en 1954 qui deviendra en 1957 l’Union générale des travailleurs d’Afrique noire (UGTAN).
Cette confédération, la plus représentative, réclame la fin de l’oppression coloniale, donc
l’indépendance.

Mr GUÈYE 1
CLASSES DE TERMINALES Année scolaire 2014/2015

II/ LES ÉTAPES DE L’ACCESSION À L’INDÉPENDANCE


1°) De l’empire à l’Union française
A/ La Conférence de Brazzaville de janvier 1944
En janvier 1944, le Comité français de la libération nationale (CFLN) créé à Algérie en 1943 sous
l’autorité du général De Gaulle décide de convoquer à Brazzaville, capitale de l’Afrique équatoriale
française (AEF), tous les gouverneurs d’Afrique française et les hauts fonctionnaires. L’objectif
officiel, à l’approche de la fin de la guerre, était de réfléchir sur l’avenir des colonies.
À Brazzaville, ne fut convié aucun représentant africain. Par conséquent, les conclusions de la
conférence, même si elles permettaient un petit relâchement de la camisole de force coloniale,
restaient conservatrices. Il y était affirmé que « les fins de l’œuvre de civilisations accomplie par
la France dans les colonies écartent toute idée d’autonomie, toute possibilité d’évolution hors du
bloc français de l’Empire ».

B/ Les textes de 1946


L’année 1946 a vu s’opérer une certaine amélioration dans la politique coloniale française grâce
aux recommandations de la conférence de Brazzaville.
- la loi Lamine Guèye du 25 avril 1946 fait accéder tous les sujets à la citoyenneté française.
- une loi supprime le code de l’indigénat.
- la loi Houphouët Boigny du 7 mars 1946 abolit le travail forcé.
La même année a consacré la mort de l’Empire français remplacé par l’Union française. Le
Sénégal devient désormais un territoire français d’Outre-mer.

2°) La Loi-cadre de 1956


La Loi-cadre1 ou loi Gaston Deferre (Ministre de la France d’Outre-mer) voté le 23 juin 1956
inaugure la décentralisation en modifiant le statut des Territoires d’outre-mer(TOM) qui dispose
chacun d’un conseil de gouvernement et d’une assemblée territoriale. En instituant un exécutif
local dans chaque colonie, la loi-cadre consacre la balkanisation de l’AOF.
Ainsi, les partis politiques se réorganisent pour conquérir le pouvoir :
Le BDS et l’UDS (Union démocratique sénégalaise) de Thierno Bâ fusionnent pour donner le BPS
(Bloc populaire sénégalais) qui remporte les élections du 31 mars 1957 face au PSAS (Parti
sénégalais d’action socialiste) de Lamine Guèye. Élu vice-président du conseil du gouvernement,
Mamadou Dia transfert la capitale de Saint-Louis à Dakar. Majmouth Diop créé un parti
communiste, le PAI (Parti africain pour l’indépendance) qui revendique immédiatement
l’indépendance. En avril 1958, le BPS fusionne avec le PSAS pour donner l’UPS (Union progressiste
sénégalaise) devenue PS. Quelques mois plus tard, la classe politique sénégalaise sera
profondément déchirée par la question de la Communauté française2.

3°) La Communauté franco-africaine


Suite aux événements d’Alger, l’instabilité gouvernementale s’installe en France. Elle favorise le
retour de De Gaulle au pouvoir en juin 1958. De Gaulle entreprend alors un voyage à travers
l’Afrique francophone pour vendre le projet de communauté franco-africaine qui doit-être adoptée
à l’issue du référendum du 28 septembre. L’objectif de sa campagne est de convaincre les Africains
de voter « Oui ». Les principes qui régiront désormais les rapports entre la France et ses colonies

1 Loi-cadre : loi qui permet la création d’Assemblées locales (dans chaque territoire) élues au suffrage universel et disposant d’assez
larges pouvoirs en matière locale. Le Conseil de gouvernement, élu par l’assemblée est présidé par le gouverneur qui représente la France.
2 Communauté française : association entre la République française et les États d’Afrique Noire. Il s’agit d’un organisme auquel les
États africains adhèrent s’ils le désirent – en cas de refus ils obtiennent immédiatement l’indépendance et ne gardent aucun lien avec la
France.

Mr GUÈYE 2
CLASSES DE TERMINALES Année scolaire 2014/2015

sont fondés sur « l’autonomie interne de chaque territoire, la libre détermination des territoires et
la création d’un vaste ensemble politique économique et de défense appelé communauté ».
De Gaulle arrive à Dakar le 26 août en l’absence de Senghor et de Mamadou Dia. Il est accueilli
par Valdiodio Ndiaye ministre de l’intérieur et de l’information à la place Protêt, actuelle place de
l’indépendance.
La question provoqua la scission de l’UPS avec la création du PRA-Sénégal (Parti du
rassemblement africain) par Abdoulaye Ly, Assane Seck et Amadou Mactar Mbow. Le PRA, le PAI,
certains étudiants et syndicalistes sont partisans du « Non ». Mais à l’issu du référendum du 28
septembre, le « Oui » l’emporte par 97,6 % des voix. Le 26 novembre 1958, le Sénégal devient un
État de la Communauté. Seule la Guinée de Sékou Touré avait voté contre le projet de De Gaulle.

4°) La Fédération du Mali


En Janvier 1959, fut instituée la Fédération du Mali entre le Sénégal et le Soudan français.
Modibo Keita est le président, Mamadou Dia le vice-président et Senghor le Président de
l’Assemblée fédérale. En fin 1959, la France d’abord hésitante finit par consentir à accorder au
Mali l’indépendance. Le 04 avril, un accord transférait les compétences communautaires au Mali. Le
20 juin, le Mali obtient l’indépendance dans le cadre de la Communauté remaniée.
La Fédération fut éphémère à cause des disparités géographiques et économiques entre les
États. Ces divergences aboutissent dans la nuit du 19 au 20 août à son éclatement suite à des
désaccords au sommet que les Sénégalais assimilent à un coup d’État soudanais. Le 20 août, le
gouvernement du Sénégal se retire unilatéralement de la Fédération et renvoya les soudanais à
Bamako dans un wagon blindé du Dakar-Niger. La République du Sénégal fut proclamée. Le 04 avril,
date du transfert des compétences communautaires au Mali, fut retenu comme jour de
l’indépendance.

CONCLUSION
Dans ses grandes lignes, l’indépendance du Sénégal est presque octroyée par la métropole,
malgré l’inéluctabilité de la fin du système colonial. Elle n’est revendiquée que tardivement par
l’élite politique. C’est ainsi que pour l’essentiel de l’AOF et du continent en général, les
indépendances portent déjà en elles-mêmes, les germes du néocolonialisme.

Mr GUÈYE 3

Vous aimerez peut-être aussi