Étude de Ronsard
Étude de Ronsard
Étude de Ronsard
Introduction
Contexte
XVIe LE grand siècle poétique en France :
• Installation de la langue française => envie d’expérimenter (importation du sonnet italien, promotion
de l’alexandrin)
• Essor de l’imprimerie => transmission des textes et des traductions antiques
• Courants d’auteurs Ecole lyonnaise (Scève, Labé), La Pléiade (Du Bellay, Ronsard …)
RONSARD
• S’inspire des élégies antiques, des poèmes amoureux d’Ovide : Les amours, dédiés à des muses
(Hélène, Cassandre & Marie)
• Poèmes – vanités (conscience de la mort)
• Poète engagé patriotique
• Esthétique de la surprise
3 mouvements
• 1e strophe « Amour tu es trop fort… prison. » un poète dominé, expression pathétique de l’amour =
posture de la plainte (élégie) traditionnelle dans la poésie antique
• V.5-10 réveil, sursaut du poète : résolution « Je veux… »
• V. 10-14 renversement des polarités dominé (poète) > dominant et l’amour qui avait le dessus n’est
plus en position de force, de « Mais… contre un grand Prince…un grand Roy »
Projet de lecture
Glissement de logique : on passe d’un discours sur l’amour à un discours sur soi et sur son ethos => modèle
de l’homme fort, résistant et virtuose dans son art.
Etude de texte
Constat pessimiste :
• Lexique dépréciatif, on le voit par ex. dans les préfixes privatifs (« défaire ») ou les termes à connotation
négative comme « prison » qui clôture la première strophe. La rime choquante raison/prison semble
invalider la première.
Mouvement 2 : le sursaut
Affirmation de la volonté du poète
Le poète qui reprend le dessus : répétition anaphorique de « Je veux », démultiplication des instances de la
première personne du singulier (le poète) : successivement « Je », « mon » (possessif), « me » (pronom
complément).
Le poète trouve des alliés
• Mention d’un allié non nommé (d’autant plus mystérieux et impressionnant), désigné par des périphrases
seulement (jeu d’appositions en cascade) : au lieu de désigner Dionysos, on a : « ce deux-fois né, », « ce
Thébain, », « ce Bon-père,», « lequel » (pronom dont Dionysos est l’antécédent)
Transition
• Fin du vers 10 jeu des polyptotes de « mort » : conversion de la mort à la vie, « mortel » =>
« immortel » (oxymore)
• Volta (virage, tournant du sonnet de tradition italienne) à partir de la conjonction de coordination à
valeur adversative « Mais » .
Promotion de l’héroïsme
Intensification de l’enjeu :
• Répétition (reprise) dans le même vers de l’adjectif mélioratif « grand » (« un grand Prince »/ « un
grand roi »)
• « Amour, tant sois tu fort, tu perdras la bataille » idéal de force (porté par l’adverbe d’intensité
« tant ») rappelé par un effet d’écho, plus précisément l’allitération en -t- « tant », « tu », « tu »,
« bataille »
Ton polémique & combattivité
(polemos = guerre)
Retour (3 occurrences) de la préposition « contre » qui vient renforcer le verbe « opposer » et qui vient faire
écho au préverbe qu’on avait déjà au vers 8 : « Contrepoison …). Ici, au dernier tercet, on obtient :
Contre toi… [1 syllabe, ennemi intime]
contre Amour… [2 syllabes, ennemi lyrique, sentimental]
contre un grand Prince » [3 syllabes, ennemi politique, i.e. sérieux)
= allongement des groupes antagonistes successifs : la polémique nourrit, entretient,
renforce le combattant.
Renversement des valeurs, état de confusion assumé
Chiasme, cf. l’ordre d’apparition des termes
(v. 1) Amour … Raison de part et d’autre de l’hémistiche (irréconciliables)
(v.13 La Raison contre amour ne peut chose qui vaille le poète renvoie dos à dos l’amour et la raison
Leur préférant des valeurs supérieures :
- Une nommée déjà même indirectement : Dionysos (le « deux-fois né ») = dieu de l’alcool & de la
désinhibition, dieu de l’inspiration,
- Une à déduire : la capacité créatrice du poème. Finalement après avoir craint de ne plus être capable,
le poète a fini son sonnet = preuve par l’exemple.
Le poète affirme sa puissance dans le futur prédictif ou prophétique : « tu perdras ».
Conclusion
Bilan
Le poète a établi une hiérarchie telle que : Amour < Raison < Poésie
Le sonnet aura servi au poète à se positionner et s’affirmer, au moyen d’une démonstration inattendue,
paradoxale (à contre-courant des idées reçues) : même la raison est insuffisante.
Ce sonnet n’est pas simplement un réquisitoire contre l’amour et la dérive des sentiments, il est un plaidoyer
subtil en faveur de la création poétique.
Ouverture
Une autre vision paradoxale de l’amour, censément dissuasive et plutôt ambiguë en vérité : Les ombres de
Francesca et Paolo Malatesta1 apparaissent à Dante2 et Virgile cf. en enfer (1854) :
https://collections.louvre.fr/ark:/53355/cl010065982
1
Amants adultérins.
2
L’enfer, dans La divine comédie, XVe s.