Mourret. Histoire Générale de L'église. 1921. Volume 8.
Mourret. Histoire Générale de L'église. 1921. Volume 8.
Mourret. Histoire Générale de L'église. 1921. Volume 8.
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L'ÉGLISE CONTEMPORALNE
Première Partie (1823-1878)
OUVRAGES DU MÊME AUTEUR
(en préparation.)
A LA LIBRAIRIE DESCLÉE :
FERNAND MOURRET
PROFESSEUR d'hISTOIRE AU SÉMINAIRE DE SAINT-SULPICE
• • • • •
• • •
L'ÉGLISE CONTEMPORAINE
Première Partie (1823-1878)
PARIS
LIBRAIRIE BLOUD ET GAY
3, RUE GARANCIÈRE, 3
1921
Reproduction et traduction interdites.
150 3 S
Nihil obstat.
A. Berrué.
IMPRIMATUR :
'M
INTRODUCTION
L'action de l'Eglise au xix® siècle ne peut être bien comprise sans Vue générale
sur
un aperçu du mouvement général du monde pendant celte même le mouvement
période. Le recul dos âges permettra sans doute à la postérité de du monde
au xix^ giècle.
fixer le rôle de cette époque de l'histoire par rapport aux temps qui
l'ont Nous pouvons au moins
précédée et à ceux qui ront suivie.
discerner, dès maintenant, en dehors du mouvement religieux, qui
fera l'objet propre de notre récit, quatre mouvements particuliers,
l'agitation
définir le xix" siècle « le siècle de la révolution sociale ». Quelque
sociale. vives, en effet, qu'aient été les discussions politiques pendant cette
période, les questions sociales ont paru, de plus en plus, les domi
ner et les conditionner. L'avènement du « capitalisme », déterminé
par les progrès industriels et commerciaux, et la diffusion des
idées d'égalité politique, ont donné naissance à ce qui a été appelé
INTRODUCTION
Bax
77
.Ml
INTRODUCTION
laissé pénétrer dans les esprits, sous des formes plus ou moins équi-
Cetto voques, un venin d'idées fausses et d'utopies, dont Rousseau avait
T*AF ts 11 m ti on
doit été le plus éloquent propagateur et dont les formules avaient reçu
être à la foi» ^^g sorte de consécration officielle dans la Déclaration des droits de
disciplinaire i >-, • • • •; i / / t i-» / i •
vrai, avait, par ses excès mêmes, opéré dans beaucoup d'esprits une
réaction salutaire. L'échec ridicule de ses tentatives de religion
civile d'abord, puis d'athéisme pratique, avait fait prendre conscience
au peuple du besoin d'une autorité religieuse solidement établie et
Quoi qu'il en soit de ces généralisations, dont les faits que nous
allons raconter dans le présent volume permettront d'apprécier le
bien ou le mal fondé, l'étude impartiale de l'iiistoire du catholi-
cisme au XIX® siècle nous apparaît, par la variété même et par F im-
portance des questions qui s'y sont agitées, comme particulièrement
utile aux chrétiens du xx^ siècle. On
a fait déjà remarquer qu'on y L'hîsloifft
de l'Eglise
trouve presque tous les genres de luttes que l'Eglise a eu à soutenir au xix^ siècle
présente
depuis son origine, et qu'elle présente ainsi, comme en raccourci, un
comme
tableau de l'iiistoire ecclésiastique tout entière. « Rien en effet n'y un tableau
raccourci
manque : ni les luttes avec les puissances temporelles, ni l'oppression
de l'histoire
de l'Eglise parla force, ni les déchirements intérieurs par l'éclosion ecclésiastique
nous fournir bien des indications utiles ; et, si nous savons, à tra-
vers les conflits qui ont divisé plusieurs grands catholiques, garder
notre admiration pour tout ce qu'ils ont eu de grand et de généreux,
quels spectacles plus passionnants et plus réconfortants à la fois
que ceux d'un Montalembert consacrant, à vingt ans, sa vie entière
« à la cause glorieuse et sainte de son pays et de son Dieu » ;
DOCUMENTS.
est question dans le présent volume : Léon XII, Pie VI II, Gré-
goire XVI et Pie IX. Ces actes se trouvent dans : i° la Bullarii
romani continuatio, 19 tomes in-f", Rome, i835-i857, qui com-
mence à Clément XIII (1768) et se termine à la cinquième année
du pontificat de Grégoire XVI (26 septembre i835 ) 2"la Collecî'O ;
Rome, 1888- 1898, qui donne tous les textes relatifs aux missions
jusqu'au pontificat de Léon XIII ;
4° les Monumenta catholica pro
independentia poteslatis ecclesiaslicae, de Roskovaut, 2 vol. in-8.
Quirique-Ecclesiis, 1847, dont le second volume donne des actes
importants de Léon XII, de Pie VIII et de Grégoire XVI. BER!«fAS-
coM a donné, de 1901 à 190A, sous les auspices du cardinal Vin-
cenzo Vannutelli, en f\ volumes in-4, les Acta Gregorii papae XVL
De nombreuses pièces inédites ont été mises au jour dans cet im-
portant ouvrage. Les critiques qae son apparition a suscitées portent
sur des détails ; mais ces détails ont leur importance en un travail
mais aussi sur « les progrès de la religion, tant en France que dans
toutes les parties du monde catholique », sont, parmi les périodiques
français et étrangers, les plus utiles à consulter pour les documents
qu'ils renferment.
Sous le iïiTG d'Annales ecclésiastiques, la librairie Gaume a publié,
II
0UAT\AGE3
1. Voir Gard. Mathieu, le Concordat de 1801, un vol. in-8«, Paris, 190^, p. 257.
2. Voir sa biographie par le chanoine Maynard, Jacques Crélineau-Joly, (faprè»
ses M (^moires, un vol. in-8", Paris, 1875.
NOTICE BIBUOGRAPHTOUE i3
sous Léon XII, Pie VIII et Grégoire XVI ; mais on doit se mettre
en garde contre les appréciations de cet écrivain u complètement
antichrétien n suivant une expression de Jules Lemaitre, et systéma-
tiquement hostile à la papauté On trouvera des appréciations plus
justes de ces trois papes dans Hergenrôcher-Kirsgh, Handbiich
dcr allgemein Kirchengeschichle, t, III,in-8°, Fribourg-en-Brisgau,
1909-
Trois grands mouvements religieux se sont réalisés au temps des
trois papes dont nous venons de parler : en Allemagne, sous la direc-
tion de Goerres ; en France, sous l'impulsion de La Mennais ; en
Angleterre, sous la conduite de Newman. Ces mouvements sont
racontés dans trois ouvrages, déjà cités, de Georges Goyau, V Alle-
magne religieuse, le catholicisme, et de Paul Thureau-Dangin, VHis-
ioire de la monarchie de juillet et la Renaissance du catholicisme en
Angleterre ; mais on en trouvera l'histoire plus complète dans les
biographies des personnes qui y ont été mêlées. Plusieurs de ces
biographies sont du plus vif intérêt. On en trouvera les références
au cours du présent volume. Nous devons citer, comme indispen-
sables à lire : le Louis Vcuillotd'Eugène Velillot, 4 ^ol. in-8,
Paris, 1899-1913, et le Montalembert du P. Lecanuet, 3 vol. in-8,
Paris, 1895-1901. On rencontrera aussi de très utiles renseigne-
monts dans les biographies suivantes : Mgr Lagrange, Vie de
Mgr Dupanloup, 3 vol.' in-8<*; Mgr Baunard, Histoire du cardinal
l4 NOTICE BIBLlOGRAPHlQtJR
sincère et le paladin du Saint Siège ». Dans son livre^ qui est mani-
festement une œuvre d'apologie, il se fait le défenseur de tous les
actes de Pie IX, mais il donne des documents très utiles à connaître.
Pour ce qui concerne plus spécialement la question du pouvoir
temporel sous le pontificat de Pie IX, on consultera ; Gii. Van
DuERM, S. J., Vicissitudes politiques du pouvoir temporel des papes
de 1790 à nos jours, i vol. in-8, Lille, 1890 ; Zeller, PieIX et
Victor-Emmanuel, i vol. in-12, Paris, 1879 ; A. Bouillier, Un roi
et un conspirateur^ Victor- Emmanuel et Mazzini, i vol., Paris, i885 ;
documents qu'elle contient, mais qui ne fait connaître que les préli-
minaires du Concile ; YHistoire vraie du Concile du Vatican par le
cardinal Manning, trad. Chantrel, i vol. )n-8, Paris, 1872, et le
Paris, 1877. Ces deux derniers ouvrages ont une valeur toute spé-
ciale par le fait que leurs auteurs ont vu et entendu ce qu'ils racon-
tent, et que l'un et l'autre ont rempli dans l'assemblée un rôle im-
Manning comme un des chefs des « infaillibilistes », Fessier
portant,
comme secrétaire .général du concile. L'ouvrage de Fessler sur la
NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE I7
Vraie et la Fausse hiJailUhilité des papes ^ trad. française, i vol. in- 12,
Paris, 1873, doit être lu si l'on veut avoir le sens très net de ia prin-
Paris, 1872.
Les biographies de Mgr Darboy, de Mgr Dupanloup et surtout
celledu cardinal Manning par Purcell, non traduite en français,
mais dont M. Hemmer s'est inspiré dans sa biographie française de
Manning, contiennent aussi d'utiles renseignements sur le concile.
V. — L'histoire des œuvres pieuses et charitables se trouve dans
les biographies de ceux qui les ont fondées. On trouvera les références
de ces biographies au dernier chapitre de ce volume. Quant à l'his-
toire des missions étrangères, elle a été faite, d'une manière géné-
rale, par Marshall, en deux volumes in-8, traduits par L.deWaziers.
Paris, i865, sous ce titre : les Missions chrétiennes. Les missions
protestantes y sont racontées et mises en parallèle avec les missions
catholiques. Malheureusement l'histoire ne va pas au delà de i86/i.
On complétera cet ouvrage, on le remplacera au besoin par celui de
LouvET, les Missions catholiques au XIX^ siècle^ i vol. in-4, Lille et
Paris, 1897, ou par celui de Werner, S. J., les Missions catholiques
auXÏX' siècle, trad. Groffier, Fribourg, 1886. Le P. Piolet S. J.
a dirigé une publication collective, les Missions catholiques françaises
au XIX'^ siècle, 6 vol. in- 8° illustrés, Paris, 1901. M. L'abbé Ka>'>'en-
gieser a publié les Missions catholiques^ France et Allemagne, i vol.
Hist. géo. de l'Kylise. — \!il a
l8 NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE PREMIER
Le 24 août 1828, le pape Pie VII était mort en prononçant Vue générale
^"'^
ces mots :« Savone... Fontainebleau... » L'empereur Napoléon ..
, . .
cette premier»
l'avait précédé de deux ans dans la tombe et 1 on avait aussi re-
; partie.
1 V ' •
18A8, anéantis, en 1860, 1866 et 1870, par la création dune Bel- politique
naire, Metterniclî et
germe d'une inévitable
son sens moral et de ses sentiments
vue plus élevé et rendait
réaction.
...
pouvaient avoir de légitime de ce qu'elles contenaient de révolution-
Talleyrand
par
^
là
Un
même 1^
sans
avaient
trop distinguer ce qu'elles
diplomate que
religieux
imprudemment semé
plaçait à
.
la
plus grands de ces princes se sont laissé visiblement pénétrer par les
idées philosophiques et politiques du siècle ; et cependant jamais les
nations n'ont été plus niéprisées, foulées aux pieds d'une manière
plus irritante pour elles... C'est une semence éternelle de guerres et
de haines^. ))Consalvi, de son côté, écrivait à Metternich : « Un
jour, les plus vieilles monarchies, abandonnées de leurs défenseurs,
se trouveront à la merci de quelques intrigants de bas étage, auxquels
aujourd'hui personne ne daigne accorder un regard d'attention pré-
ventive 3. ))
Allitude
Quelle pouvait être, dans ces circonstances, l'attitude de la papauté?
>
ia papauté
dans ces Elle ne pouvait s'inféoder à aucun des deux mouvements qui allaient
lijonclures.
se partager le monde. Celui dont Metternich et Talleyrand venaient
de prendre la direction, s'il répondait par un côté aux tendances
conservatrices de l'Eglise, n'était pas inspiré par un esprit purement
catholique. Si, en dehors des considérations purement utilitaires,
tine idée avait plané sur les délibérations du congrès de Vienne,
c'était bien celle de la Sainte-Alliance, idée pour le moins suspecte
quence dont les suites furent affreuses, dit Crétineau-Joly, les souverains coaliséf
voulaient muscler la Révolution, et ils déchaînèrent les révolutionnaires ». (Créti-
NEAU-JoLT, l'Eglise romaine en J ace de la Révolution, 2 vol. in-80, Paris, iSôg, t. II,
II
guerres européennes, avait été le point de départ d'un grand progrès Ses causes
t
industriel,
. • % '
agricole et
1 . -ir»*
commercial. L invention
i" JiJa
de V.*'a
machine
économiques,
^
vapeur par Watt, de la lampe du mineur par Davy, des machines à Nais»anc«
-.,.„,
Les législations commerciales des diverses nations rendent par-
^
lois très aiguës Jes relations entre ces deux puissances sociales. L'in-
,. ^®l. .
divers titats
cherchent
34 HISTOIRE GENER \LE DE L EGLISE
à remédier Icrêt du grand manufacturier est que les produits étrangers soient
au , . ,
.
malaise social ^^^^^ ^i fortement à leur entrée qu'ils coûtent plus cher que les pro-
par des A
réglementa-
lions ^^^^
ijo/ lor
demande
duits nationaux.
^^ loï^ ^t
la
taliste et l'ouvrier. Pour ce qui cobcerne les céréales, une loi fran-
çaise de i8i4 avait satisfait les consommateurs; une loi de 1819,
s inspirant d'un système pratiqué en Angleterre depuis la fin du
xvu* siècle, vient au secours des producteurs. Elle établit une
« échelle mobile » ; c'est-à-dire qu'elle taxe les blés étrangers plus
ou moins lourdement, suivant que le prix des blés indigènes sont
en baisse ou en hausse. Ce système subsistera, avec quelques inter-
ruptions dans son application, jusqu'en 1861. « En fait, l'échelle
mobile ne réussit pas à relever le cours du blé, ainsi que l'avaient
espéré ses défenseurs ; elle ne réussit guère qu'à en entraver la baisse,
mais ce bien relatif est chèrement payé par les perturbations cons-
tantes des cours, causées par son application *. »
des classes ouvrières en France depuis 17 89, Paris, 1867 P. Clément, Hisl. du s/s- ;
lutionnaire.
de sa valeur marchande et qui enlevait à la propriété son caractère
;
de la société, sur les domaines ecclésiastiques, puis, au nom d'une Les spolîatîont
I
plus forte que beaucoup de lois votées sous l'Empire semblaient avoir
été dictées par la préoccupation exclusive des intérêts de la bour-
geoisie. Une loi de i8o3 avait interdit les coalitions d'ouvriers, mais
ne s'expliquait pas sur les coalitions des patrons. L'article 1781 du
code civil disait: « Le maître est cru sur son affirmation pour la La pariiallté,
... , 1 ,
, 1 • 1 1. r / 1
au moins
quotité des gages, pour le payement du salaire de 1 année échue et apparente
pour les acomptes donnés sur l'année courante. » Une loi de 1806 ^^
avait créé des conseils deprudhommes dans 26 villes de France ; mais ^ 1 é^ard
l'organisation de ces conseils avait paru suspecte aux ouvriers :
<^es patron*,
III
des patrons, et, malgré les efforts énergiques d'Owen, échouer com-
plètement.
Saint-Simon Le système élaboré par le comte de Saint-Simon avait été gra-
(i 760-1 825;.
duellement exposé, en i8o3, dans ses Lettres d'un habitant de Genève
à ses concitoyens ; en 181 8, dans ses Vues sur la propriété et la
On ne peut pas refuser ce dernier titre à Charles Fourier, qui, Gh. Fourier
'*
dans son Traité de l'association domestique agricole, publié en 1822, '
faisait, dès le début du xix® siècle, les vraies fins et les vraies condi-
tions de la vie sociale, il n'ait été le précurseur de l'école social©
catholique *.
IV
Par ses qualités comme par ses défauts, par son idéalisme vague
et son christianisme rêveur, Ballanche appartenait pleinement à ce
mouvement romantique qui, vers 1828, s'épanouissait pleinement
dans la littérature de l'Europe. Lamartine et Vi^^nv venaient de ^^ litteratiir»
créer la a
,.,,..
poésie méditative ».
\r.
Victor
TT
Hugo
• •
f
avait publié ses premiers
•
romantique,
les Essais de palingénésie sociale el plusieurs poèmes en prose [Antigone, Orphée, etc.)
dont l'auteur se sert pour envelo[>pcr ses doctrines. Cf. vt<^ de Gliche:*, la Franc*
morale et religieuse à la fin de la Restauration^ 1 vol. in-8, Paris, 191a.
30 HISTOIRE GÉNÉRALE DE L*ÉGLISE
plus à ces doctrines, aux yeux des hommes de ce temps. Victor Cou- L'éclectisme
de
sin, après son voyage de 1817 en Allemagne, colora son éclerlisme Victor Cousin
d'une teinte kantienne fortement marquée. Les esprits conservateurs
essayèrent d'opposer d'abord à ce courant un cartésianisme addi-
tionné de philosophie écossaise. D'autres, comme Bonald, tentèrent
de le combattre par tin traditionalisme outré. En 1823, l'abbé de Le
Iraditionalisroe
La Mennais, dans son Essai sur l'indifférence, donna à cette doctrine de
l'éclat de son grand talent. Selon lui, l'accord du genre humain La Mennais.
sur une doctrine morale était la suprême, et, à tout prendre, l'unique
garantie que nous pussions avoir contre l'erreur. La Mennais
croyait alors, û est vrai, que l'Eglise catholique était l'incarnation
concrète et vivante de la croyance générale des hommes, et par là il
Mais les esprits réfléchis dénonçaient déjà les vices de cette doctrine
trop étroite et trop absolue, qui devait conduire son malheureux
auteur vers ce même gouffre du panthéisme où les héritiers de Kant
étaient d(*jà parvenus.
Le péril était d'autant plus grave, que le criticisme kantien, Le
mouvement
franchissant le domaine des sciences purement philosophiques, théologiqua.
ej^erçait visiblement son influence dans le domaine des croyances
gieuses.
Leur influence Le catholicisme allemand ne devait pas échapper à cette influence.
sur
ia théologie
Un professeur de théologie de la faculté de Bonn, Georges Hermès,
catholique émettait, en i8o5 d'abord, dans ses Recherches sur la vie intérieure
allemande.
du christianisme, puis, en 1819, dans son Introduction philoso-
Oeorges phique, l'idée d'une apologétique nouvelle, qui, négligeant le rôle de
Hermès
la grâce dans la production de l'acte un produit de
de foi, en faisait
(i775-i83i).
la (( raison pratique », entendue au sens de Kant. Pour Hermès, les
faits historiques, prouvés vrais par l'histoire d'une vérité « exté-
Il n'en était pas ainsi des idées subversives de tout ordre religieux et
social qui se propageaient dans les sociétés secrètes.
Evolution Soit que les crimes de l'impiété révolutionnaire eussent discrédité
de la franc-
maçonnerie.
italien, lequel exerça, à son tour, une influence importante sur les
Crétineau-Joly, qui eut sous les yeux des documents sur les sociétés
3. « Les statuts de diverses afTiliations allemandes, saisis dans le temps par les
autorités françaises, dit un Rapport de police de i823, semblent avoir servi de
types aux règlements adoptés par les associations de France, avant que celles-ci
connussent le nom de carbonari. Il importe peu de rechercher les modificationf
que les sociétés italiennes ont pu apporter aux premiers plans empruntés aux
sociétés allemandes mais il peut n'être pas sans intérêt d'établir qu'on les doit à
;
aurait pour l'armée la « légion », les « cohortes », les « centuries », ses doclrines.
avec la franc-
nerie. 3 Louis XVÏII jugea de bonne politique de ménager les loges, maçonnerie.
de subir même leur influence*. Aussi vit-on les idées voltairiennes
envahir rapidement la France. Paul-Louis Courier dang ses pam-
phlets, Béranger dans ses chansons, les popularisèrent. Qu'il suffise I iffurion
c'esidées
d'ailleurs de rappeler qu'il y eut, de 181 7 à 182/4, douze éditions voltairiennei
de Voltaire et treize de Rousseau. On publia 3 16.000 exemplaires sous la
Restauralivû,
des oeuvres du premier et 2^0.000 des œuvres du second, soit un
total de plus de deux millions de volumes raillant ou méprisant
l'Eglise catholique. La lutte contre le u parti-prêtre », comme on
disait alors, fut le fruit de cette propagande \
elle devait durer autant
que la Restauration et arracher même au roi Charles X, en 1828,
l'expulsion des jésuites 5,
I. Louis Bla.nc, Hist. de dix ans , t. I, p. ga. Cf. Descramps, les Sociétés secrètes
'
I. II, p. 387.
a. A.ch. de Va.ulabelle, Hist. des deux Restaurations, t. V, p, i48, i5i. Sur
l'action de la Charbonnerie dans les divers complots de cette époque, voir Guilloh,
les Complots militaires sous l'empire et la Restauration^ d'après les documents inéditSy
a vol in-i8, Paris, 1894. et Rev. intem. des soc. secrètes, 1918, p. 5a6-554- Une
prétendue Histoire des sociétés secrètes de Varmée^ publiée par Charles Nodier, est une
œuvre d'imagination.
3. Voir le témoignage de l'historien franc-maçon Jean de Witt, Mémoires 5ccr<f*,
p. 6.
4 Deschamps, op cit.. t. Il, p. 225 et s. « Louis XVIII, dit M. Gauthbrot, —
tout comme le comte d'Artois et le duc de Berry - était ou avait été franc maçon»
{Dict. apologét. de la foi catholique, au mot Franc-maçonnerie, t. II, col. iii).
5. Thuheau-Damoiii, le Parti libéral sous la Reslauratioa, un vol in- 18, Paris,
1876, passim.
58 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISK
VI
Le* forces Pour [)arer aux divers p.'rils que nous venons d'indiquer, quelles
de l'Eglise.
étaient les forces de l'Eglise ? Ces forces, depuis ravènement de
populaire ;
Vive la France !
Vive le Roi I
Toujours en France
Les Bourbons et la foi l
due enfin à la parole sainte, doit intéresser tous les amis de la reli-
gion et réaliser leurs espérances... M. l'abbé Rauzan, M. l'abbé
Legris-Duval et M. l'abbé de Forbin-Janson sont à la tête de l'éta-
blissement*. ))
Les noms des trois directeurs de l'œuvre nouvelle étaient des gages
de succès. L'abbé Jean-Baptiste Rauzan, né à Bordeaux en 1707, ^•"?* ^V***"
'
était un des plus vénérables prêtres de 1 Eglise de France. Succès-
sivement vicaire et directeur d'un petit séminaire dans son diocèse
natal, puis obligé de s'expatrier pendant la tourmente révolution-
naire, il avait laissé partout la renommée d'un prêtre instruit, zélé,
1. Ami de la religion, ann. i8i5, q» 84, p. gS-gô. Dans le numéro suiv il,
lAmi de la rtligion, revenant sur ce sujet, ajoute que l'œuvre nouvelle a reçu lei
•ncouragements du roi (/6i(/., p. 107-iog}.
4o TTTSTOrBE GK^ÎKRALE DE L EGLISE
été mis en demeure de s'exiler, parce que, non pourvu encore d'une
position dans l'Eglise au moment oij parurent les lois persécutrices,
I. On trouve uu écho de
ces récrimination» amères et injustes dans l'Histoire des
deux Vaulabelle, t. IV, p, ^2b-l^28. Le tableau que l'historien
ficslaurations par
trace des missions est une pure caricature. On trouvera des documents plut
authentiques dan» le» relations publiées à l'issue même de ces prédications et où
les rédacteur» n'ont pas cherché à modérer leur enthousiasme. Voir Détails sur la
Mission donnée à Bordeaux pendant le carême de 18i7, brochure de 66 page»,
Bordeaux, chez Heaume, 1817 Mission d'Arles ^1817), br. de i4 p., Arles, impr.
;
impr. Baralicr, 1820 (ce compte rendu contient le cantique pour le roi) Mission de ;
Blois, br de 2^ p., Blois, impr, Aucher Eloy, i8a4 Lettres ù un ami sur la mission ;
Défense Une voix: éloquente s'éleva pour la défense des missions : ce fut
des missions
par l'abbé celle de labbé de La Mennais : « Quand J^sus Christ apparut sur la
F. de Lt terre, dit-il, il ouvrit une grande mission, qui, continuée pendant
Mennais,
dix-huit siècles, souvent entravée, toujours triomphante, ne finira
qu'avec le genre humain... On a demandé si la France était dor.c
peuplée d'idolâtres, pour qu'il fût nécessaire d'envoyer de ville en
ville des missionnaires annoncer la foi... Chose étrange I On répète
sans cesse que le christianisme est mort ; et, dès qu'un prêtre ouvre
la oouche pour Tannoncer au peuple, on s*écrie : A quoi bon ? Il
VII
lorsque seize ans plus tard, il peut fonder, à Agen, avec le concours marianistef.
ayant pour objet de poursuivre, par tous les moyens que les circons-
tances providentielles montreraient opportuns, le même but aposto-
lique : « multiplier les vrais chrétiens )). En 1828, les deux sociétés
fondées par Guillaume Chaminade ne dirigent encore que des
écoles gratuites, des ouvroirs et des pensionnats dans le Midi de la
France et en Franche-Comté ; mais leur saint fondateur ne cesse
de leur recommander de se tenir prêtes à voler, pour faire des
chrétiens, «jusqu'aux extrémités de la terre ». Ses vues se réalise-
ront, et, peu de temps après sa mort, son œuvre aura des rejetons
dans les cinq parties du monde *.
autres prêtres, a la juridiction episcopale et aux lois du royaume, ne d^ns ies p( lits
vice, lui aussi, dans l'armée du prince de Condé. D'une piété angé-
lique, comme ses amis du séminaire, enthousiaste et brave, comme
ses anciens camarades de guerre, Joseph Varin ne tarda pas à devenir
l'âme de la jeune compagnie. L'abbé Emery, ayant eu l'occasion
de rencontrer la petite colonie, dans un voyage à sa sortie de prison,
en 1796, exprima son admiration en ces termes : « Ces jeunes gens
vivent comme des saints. Ils roulent dans leurs têtes les projets les
plus étonnants comme les plus saints. J'admire leur foi et leur cou-
rage K » Trois ans plus tard, en avril 1799, la Société du Sacré-
Les Pères
de la foi,
Cœur fusionnait avec une société des Pères de la foi, qu'un prêtre
. . . , .
gieuse des jeunes filles en fondant en 1800, avec l'aide de Madeleine- LcsDamet
Sophie Barat, l'instilut des Dames du Sacré-Cœur. Le décret de Sacré-Gœur.
dissolution de la Société des Pères de la foi, rendu le 2 novembre
1807 par Napoléon, eut pour effet la dispersion de ses membres,
mais non la ruine de leur apostolat, qui se multiplia dans différents
diocèses, y fit connaître le véritable esprit de saint Ignace, y mul-
tiplia des germes de vocation ; de telle sorte que, même avant la
YIII
Les Pères de la foi n'avaient pas été des jésuites, mais ils s'étaient La
préparés à devenir à la première occasion ^^"f''^^**'®^
le 3, et, en attendant, ils
Vierge en usage dans les maisons d'éducation des jésuites, puis parmi
leurs anciens élèves, depuis le milieu du xvii* siècle. Ces associa-
tions de piété et de bonnes œuvres, dont les règlements n'avaient
rien de mystérieux, avaient été louées par plusieurs papes, notam-
ment par le pape Benoît XIV ^. Les réunions avaient lieu tous les
quinze jours, ayant uniquement pour but l'édification de leurs
membres. La société se développa peu à peu. Aux étudiants vinrent
se joindre quelques industriels et commerçants. A la fin de i8o5,
lorsque Pie Vil vint à Paris, la Congrégation comptait 180 membres.
Le pape l'autorisa à s'agréger des congrégations de province. En 1808,
elle admit dans son sein deux savants du plus haut mérite : le géo-
mètre Gauchy et le physicien Biot. La Congrégation s'attira les
son infatigable activité. Avec lui, une phase nouvelle s'ouvrit pour la
lever. Le mot de « jésuite » avait été déjà exploité par Pascal ; elle
IX
congréganistes dirigeaient tout dans l'Etat Il est facile de vérifier cette asser-
I
par Napoléon I", sur les instances de son oncle le cardinal Fesch, Les écoles
primaires.
les écoles primaires n'étaient plus soustraites, depuis i8o3, à l'en-
seignement religieux. Non content d'avoir donné aux Frères une
existence légale par son décret de décembre i8o3 (ii frimaire Les Frères
des écoles
an XII), l'empereur avait voulu, dans son décret du 17 novembre chrétiennes.
1808, qui créait en France le monopole de l'enseignement, incor-
porer les Frères à l'Université *. Une telle disposition, il est vrai,
182 1 alla plus loin. Elle régla : i** que l'évêque, pour ce qui concerne
la religion, aurait le droit de surveillance sur tous les collèges de son
diocèse (art. 11 4) *» 2° que les maisons particulières qui avaient
mérité la confiance des familles pourraient être élevées au rang de
collèges « de plein exercice » (art. 21, 22, 23) ;
3° que les curés ou
desservants pourraient se charger de former deux ou trois jeunes gens
pour les petits séminaires. Enfin, le i*"" juin 1822, Mgr Frayssinous,
Mgr Frays- évêque d'Hermopolis, fut nommé Grand Maître de l'Université et
sinous
est nommé président du conseil royal de l'Instruction publique. Le savant et
Grand Maître pieux prélat, que ses Conférences de Saint-Sulpice venaient de rendre
de
célèbre, paraissait bien être l'homme de France le plus qualifié pour
l'Université.
I, t. 1, p. 687.
Conservateur,
a. « de tristesse traversait le cœur de celte femme bénie, lorsqu'elle
Un nuage
venait à songer qu'elle navait plus autour d'elle un seul chrétien, et qu'aucun de
ses enfants ne pouvait Taccompagner aux mystères sacrés de sa religion
».
X
Le Un mouvement analogue, pareillement mêlé de rêves plus ou moins
mouvement ambitieux et d'élans sincères vers le christianisme, se dessinait en
religieux
•n Italie. Italie, à Ira mort de Napoléon et de Pie VIÏ.
Le potentat qui venait de disparaître avait laissé sur la péninsule sa
puissante empreinte. En créant ce royaume d'Italie, dans lequel les
Réveil secondé ses tendances vers l'unité, ravivé les souvenirs d'une natio-
du patriotisme nalité endormie, suscité les plus grandes espérances. Mais quand,
italien.
après la chute de l'empereur, l'Italie avait demandé l'indépendance à
ceux qui l'avaient vaincu, ceux-ci lui avaient répondu par un nouveau
partage ; et l'Autriche,non contente de s'attribuer, comme une con-
quête et sans condition, la Lombardie et la Vénétie, s'était hardiment
posée comme la protectrice des pouvoirs absolus contre toutes les
tentatives d'affranchissements. De là était né ce mouvement, fait
I. César Cantù, Histoire de Cenl ans (1750-1880), trad. Am. Henée. 4 vol. i
12, Pans, 1860, t IV. p. 339-331.
56 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
Xi
Schlegel,
Haller
l'Eglise n'est nullement subordonnée à l'Etat et aux intérêts de l'Etat...
1. Fr. Schlegel, Phil. de l'histoire, trad. Lechat, 2 vol. in 80, t. II, p. iSo-iôg.
2. Haller, Lettre à sa famille pour lui déclarer son retour à VEglise catholique,
.
Paris, i8ai, p. 5.
3 GoYAu, op. ci7.,t, I, p. 380-390.
!i. GoYAU, op. cit.. t. I, p. 25r) 2- fi.
5. Ibid., p. 391-309.
6. Menzel, Neuere Geschichte der Deuts^chen von der Reformation bis zur Bundeg
acte, i4 vol. in-8f», Breslau, i835-i848, t. XII, 3« partie, ch. xxix.
58 HISTOIRE GE?IERALE DE L EGLISE
Xîi
{
ÉTA.T POLITIQUE, SOCIAL ET RELIGIEUX DU MONDE CHRETIEN 69
des cantiques pour chaque dimanche et pour chaque fête, ainsi que
John Henry Le livre ne devait paraître qu'en 1827 sans signature, sous ce
Ncuinan
(1801-1890).
titre : The Christian Year. A cette date, le mouvement de renaissance
religieuse avait un autre représentant en la personne d'un jeune
vicaire de la paroisse de Saint-Clément, à Oxford. Ce jeune ecclé-
siastique s'appelait John-Henry Newman. « Né en 1801, fils d'un
banquier de Londres, il avait reçu de sa mère, qui descendait de
huguenots français, une éducation religieuse tout imprégnée de cal-
vinisme. Ecolier précoce, il a seize ans à peine quand, en décembre
18 16, il est admis dans Trinity Collège, à Oxford... Dès cette
époque, il a une vie intérie;pre intense, s'absorbe volontiers dans la
méditation des choses invisibles, cherche avec ardeur et avec angoisse
à faire le bien et à connaître levrai^. » Un moment il subit l'influence
du libéralisme, alors puissante dans l'Université. Mais l'attachement
«qu'il professe déjà pour les anciens Pères, l'étude qu'il en fait, lui
Sont une sauvegarde. <( Avec leur indépendance d'esprit un peu capri-
'cieuse, les Orlelmen se trouvaient parfois mêler à leurs thèses libé-
rales quelques autres à tendance catholique : c'était celles auxquelles
Newman s'attachait de préférence et qu'il retenait le mieux 3. » On
raconte qu'un de ses amis, en l'entendant exprimer ses idées théolo-
giques, lui disait souvent : « Ah ! Newman, cela vous conduira à
l'erreur catholique ».
Thurea.u-Da.ngih,
I. la Renaissance catholique en Angleteire au XIX^ siècle, t. I,
p. 10-12.
•2. Jbid.^ p. 18-19,
3. Ibid., p. a4.
.
LÉON XII
(1823-1829)
et rcligii'n
beaucoup d'éléments incendiaires en Europe ^ » Cette assertion,
en i8a3.
émise le 11 avril 181 5, était plus vraie encore en 1823. Nous avons
vu comment, aux causes de troubles politiques, apportées par le fait
même d'une « adjudication de souverainetés pour de simples raisons
de convenance » ^, étaient venues se joindre des causes de troubles
sociaux et religieux, dont les partis extrêmes du socialisme, les
sociétés secrètes, la presse, et ces mouvements complexes, équi-
voques, qui se produisaient, dans tous les domaines, sous les noms
de romantisme et de libéralisme, étaient les plus apparentes manifes-
tations.
Le congrès Joseph de Maistre n'était pas loin de penser que le célèbre congrès
de Vienne
porte-t-il
portait la responsabilité de tous ces troubles ^. Ce qui est certain au
quelque moins, c'est que cette « fédération de couronnes», qui venait de
responsabilité
de cette
remanier à son gré les nations de l'Europe, avait suscité aussitôt
situation P contre elle une réaction qui, sous le nom de libéralisme et de na-
tionalisme chez les peuples, de « zélantisme » à la cour romaine,
n'avait pas désarmé. Le a parti des couronnes » et le parti des
Zelanti allaient partager le conclave au moment de l'élection du suc-
cesseur de Pie VIL
p. SaD.
2. Ibid.
(( Il j a de même
3. passé en maxime que Ton peut priver une nation, malgré
de son légitime souverain. Voici la première conséquence, directe et inévitable :
elle,
donc on le peut, à plus forte raison, si la nation le demande. Mais si la nation
peut fi' ire juger son souverain, pourquoi ne pourrait-elle pas le juger ? » (J. di
M.VISTRB, lûc. cit.)
.
LEON XII 63
Le parti des Zelanti n'apparaissait pas pour la première fois dans Le parti
des Zelanti
l'histoire des conclaves. Compose des cardinaux qui se donnaient au conclavd
pour tâche de ne considérer, dans leur choix, que l'inlérêt de la de i8a3.
Effet L'effet produit par ce coup de théâtre ne fut pas précisément celui
de cette
démarche.
que la cour de Vienne attendait. Cette hautaine intervention de
l'Autriche exaspéra les cardinaux italiens. Le candidat des Zelanti
se trouva écarté ; mais celui des couronnes, Castiglioni, qui avait
obtenu dix-sept voix au scrutin de la matinée, n'en obtint que huit
au scrutin du soir. Il fallait choisir un nouveau candidat.
Dans de pareilles conjonctures, on avait vu parfois les voix se
réunir sur le nom d'un vieillard, dont le court pontificat servirait
de préparation à un accord définitif. Un calcul de ce genre entra-
t-il dans l'esprit de quelques électeurs } C'est possible. Des considé-
rations plus directes semblent avoir inspiré la majorité des cardi-
Election naux, lorsque, le 28 septembre, ils élurent, par trente-quatre voix,
du cardinal
délia Genga
le cardinal Annibal délia Genga, âgé de 63 ans seulement, mais
(28 septembre dont les infirmités faisaient un vieillard *. Tous s'accordaient pour
i8a3).
reconnaître la valeur de ses talents, le sérieux de ses vertus. Les
anciens se rappelaient comment, un jour. Pie VI, faisant l'inspection
Voir les détails du conclave de i8a3 dans Artavd db Montor, Hist. de Léon XIl^
I.
t. p 26-79, ^^ ^^"* Terlihdbn, le Conclave de Léon XII, Revue d'histoire ccclé'
I,
l'empereur Joseph II, prononcée, en 1790, dans la chapelle Six- le nouvel élu
vers le cardinal Castiglioni, dont Pie VII avait prononcé le nom sur H choisît
sur son lit de mort ^ » Les traits de son visage étaient habituellement
impassibles. Cependant, au rapport d'un autre témoin, « ses souf-
frances devenaient parfois si aiguës, que sa seule présence inspirait
la compassion et l'effroi ^. » « Mais son regard et sa voix compensaient
le y avait dans sa physionomie une douceur et une péné-
tout. II
II
I . Gard. Wiseman, Souvenirs sur les quatre derniers papeSy trad. Gobmare, un
vol. in-8^, Bruxelles, i858, p. 199.
3. Artaud de Montor, Hist. de Léon XII, 2 vol. in-80, Paris, i843, p. 18.
3 WisEMAN, op.
y
aia-ai3.
cit. p. —
Le portrait le plus authentique de Léon XII
est celui qui a été peint par Giorgiacomo et gravé par Lepri {Roma^ calcograplùa
R. G. A.). Au lendemain de l'éleclion de Léon XII, un éditeur parisien, pressé de
publier un portrait du nouveau pape, ne trouva rien de mieux que de reproduire
le portrait de M. Olier, peint par Strésor et gravé par Boulanger, et d'y insérer le
nom de Léon XII. On peut en voir des exemplaires au Gabinet des Estampes.
LÉON XII 67
Zelantiy dont le cardinal Délia Genga avait fait partie avant son
élection, qui le considérait comme son élu, avait déjà fourni, par les
I. En 1 8 14, tandis que Consalvi était accrédité auprès de tous les souvcraint
réunis à Pans, un parti politique peu favorable au cardinal avait fait donner
à
Mgr Délia Genga, alors archevêque de Tyr, une mission auprès de Louis WIII.
Consalvi. blessé du procédé, dans lequel il vit une marque de méfiance à
son
endroit, se laissa aller à des paroles vives, dirigées contre
le prélat (Artaud, op. cit.,
i. l, p. i5 16). Cl. P. RiNiERi, Missione a Parigi di Monsignor Délia Genga t dd
cardinale Consalvi [maggio iSlù) Civiltà cattolica, 18c 1902, série, t. VI, p. 27a-
soD maître. Dès cet instant nul ne put plus douter qu'ils ne fussent
unis par le plus sacré des liens *. »
Il est secondé, secrétaire d'Etat. Puis le secrétaire d'Etat lui-même, cardinal Délia
dans
Somaglia, notifia, avec une sorte de publicité, au corps diploma-
cette politique,
par tique, que la susdite Congrégation n'était pas un Conseil d'Etat,
ion secrétaire
qu'elle ne serait qu'une assemblée consultative, et qu'on y appelle-
d'Etat,
le cardinal rait, dans les occasions, tels et tels autres cardinaux que ceux qui en
Délia
Somaglia.
faisaient officiellement partie. « Toutes ces explications, dit un rap-
port diplomatique du 2 décembre 1828 adressé au vicomte de
Chateaubriand, alors ministre des affaires étrangères, toutes ces
explications furent données du ton d'un homme qui était aussi jaloux
de son autorité ministérielle qu'aurait pu l'être Consalvi *. »
De semblables tentatives de domination se renouvelèrent. A Rome,
le cardinal Severoli, poussé par la faction dont il avait été naguère
Autres le candidat, abusa de la confiance que la chevaleresque générosité
tentatives
de domination
de Léon Xll lui accordait, pour faire prévaloir les idées et les ran-
ou d'entraves. cunes zélantistes. Le pape dut mettre fin aux agissements de ce com-
promettant collaborateur 2. En France, les partisans du comte d'Ar-
tois, généralement plus dévoués à la cause catholique que les gens
de l'entourage du roi, mais qui comptaient parmi eux nombre d'es-
prits exagérés et bruyants, lièrent partie avec les Zelanti de Rome,
De concert avec ces derniers, ils entreprirent d'indisposer le pape
contre la politique de Louis XVIII, qu'ils lui représentèrent comme
systématiquement inspirée par des sentiments d'hostilité envers le
1. Artaud, I, iSa.
2. Id., I, 336-337.
LEON XIT 71
son avènement au siège de saint Pierre, l'avait assuré de son désir Trompé
par quelque»
« d'accroître le bien de noire sainte religion » et « de perpétuer esprits
pouvant contenir en lui-même son émotion, Léon XII écrivit le à Louis xvin
une lettre
4 juin 1824, et fit aussitôt parvenir au roi Louis XVIII une lettre d'une excessive
où, après lui avoir reproche de « ne pas protéger suffisamment le Revérité.
Une crise redoutable était S'jr le point de s'ouvrir. Il était à craindre Danger
de
qu'un Etat étranger ne profitât d'un conflit entre Paris et Rome pour la situation.
prendre la place de la France dans ses relations avec le Saint-Siège.
Les diplomates français et les diplomates romains comprirent en
même temps ce que l'une et l'autre y pouvaient perdre. Le chargé
d'afl'aires français qui joua le principal rôle dans l'apaisement de ce
diflérend s,
nous a laissé le récit ému des démarches qui aboutirent
des couronnes.
III
tisme religieux, sous ses formes les plus diverses, et sous les noms
différents de tolérantisme, de libéralisme, de modernisme ou encore
de « parti des politiques », devait être la grande erreur du xix® siècle.
En 1809, le vicomte de Bonald, dans ses Réflexions philosophiques
qui ne sont pas de dogme et qu'on appelle politiques, Rome est le seul pays oii
on ne fasse jamais une maladresse à fond. » (Ibid.^ p. 827. } Cf. ibid., I, 345-346,
2. Ibid., \, 345-346,
3. Ami de la Religion, du 8 juillet 182^, p. 245,
LEON XII 73
sar la tolérance des opinions, avait signalé ces hommes qui, « intolé- L'indifTérence
religieuse,
ranU sur tout autre objet, réclament une tolérance absolue sur fruit
donnait une explication qui revient fréquemment dans ses lettres. Il dislingue en
lui doux moi, entre lesquels les affaires élèvent une barrière infranchissablo.
« Ma
vie, l'crit-il. est composée de deux parties, que mon caractère me permet de
con-
duire parallèlement l'une avec l'autre, et qui jamais ne se confondent. » (Ch. db
Lacombe, le Prince de Metternich, dans le Correspondant du 10 déc. 1882,
p. 913.)
74 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
min des fidèles pèlerins, mais à leur donner aide et protection. Puis
1. Artaud, I, 337-366.
2. Wiseman, Souvenirs sur les quatre derniers papes, p. 255.
3. « Si dira quel cht si dira ; si ha da far il Giubbileo » (Artaud, I, 369).
vÉny xri 76
Le jubilé eut lieu, au milieu des cérémonies les plus touchantes Célébration
et
.1
les
,
plus grandioses
T OTLe
^. pape
iiT
maladit,
If.-
que les factions
'i.
avaient
solennelU
'^'"'^s
du jubilé
d'abord rêvé de soumettre à leur influence, n'avait pas seulement
déjoué leurs espoirs, il triomphait maintenant d'une opposition où
s'étaient trouvés engagés les plus puissants hommes d'Etat et plu-
sieurs même de ses ministres. « Léon XTf, dit Crélineau Joly, n'a-
vait pas douté delà foi des peuples; les peuples lui tenaient compte
de celte paterneFle confiance » ^.
IV
satisfait de tous les soins qu'on avait pris pour le recevoir ; et, me
il
Persistance
tiles qu'un garde-fou après qu'on a comblé le précipice au bord
du duquel il a été élevé » ^. Le gallicanisme parlementaire cependant
;,'allicanisme
parlementaire.
n'avait point disparu. Parmi les hommes politiques qui entouraient
le trône restauré des Bourbons, les uns n'avaient pas renoncé à l'es-
D'autres enfin, parmi les plus recommandables par leur vie privée,
parmi ceux-mêmes qui avaient courageusement résisté à la persécu-
tion révolutionnaire, restaient attachés, comme à un héritage qu'ils
jugeaient digue de respect, à certaines maximes, à certains usages
courants dans l'Eglise de France. L'abbé Frayssinous, qui se ratta-
chait à ce dernier parti, écrivait : « Je dirai sans détour qu'on ne Le
gallicanisme
doit chercher nos libertés gallicanes, ni dans des factams d'avocats,
modéré
plus jurisconsultes que théologiens, ni dans une jurisprudence qui de
Fray&sinous.
tendait autrefois à tout envahir et qui ne faisait que donner des
chaînes au ministère ecclésiastique » ^. Et il citait, en les prenant
pour règle, ces paroles de Bossuet ; « Dans mon sermon sur l'unité
de l'Eglise, je fus obligé de parler des libertés de l'EgHse galhcane ;
nels, tous les sectaires qui ont paru dans ces derniers temps, s'en
sont prévalus pour autoriser leur rébellion. Flétrie dès sa naissance
du double caractère de la pression et de la servilité, quel catholique,
instruit par l'expérience, oserait la défendre aujourd'hui? » * Tou-
dans son ensemble, subissait sans trop protester,
tefois, le clergé,
critique de l'assemblée du clergé de France en 1682, des traités sur l'Appel comme
a abus, ei sur l InaniovibilUé des pasteurs du second orJre, et plusieurs'
ouvrages
spécialement dirigés contre les jésuites : Essai sur l'état des jésuites en France,
Du
pape et des jésuites.
3. Frayssinous. les Vrais principes de l'Eglise gallicane, dans les Œuvres de Frays-
sinous, MiGNE, Orateurs sacrés, 2' série, t. X, un vol in-4°, Paris, 1861, col. 1026.
3. Ibid., col, 1027.
4. F. DE La Mennais, Nouveaux mélanges, un vol. in-S», Paris, i8a6, iSq-Uo.
p.
78 HISTOIRE GENERALE DB L EGLISB
de l'Eglise canes, fut supprimée par une ordonnance royale sous prétexte d' « a-
gallicane.
bus D'un ton calme et ferme, le rédacteur en chef de l'Ami de la
».
Mennais, Réflexions
I. L.v et Mélanges, un y o\.\n-%'^^ 1819, p. 333-323.
a. Ami de la religion et du roi, du 3i janvier 1824, p. 376.
LÉON XII 79
nue. Nous le verrons plus tard, sous Charles X, défendre les droits
de l'Eglise, avec plus de force encore, contre les prétentions abu-
sives du pouvoir civil.
Essai sur l'indifférence, par l'éclat de ses récentes polémiques, par ses
dons exceptionnels d'intelligence, de verve, d'initiative et d'entrain,
par certains côtés de son caractère, séduisant et impérieux à la fois,
qui faisaient bientôt de lui, pjur ceux qui se donnaient à sa cause,
le plus affectueux des amis et le plus autoritaire des maîtres, l'abbé
de La Mennais était devenu le centre d'un groupe de jeunes gens, en
lequel on pouvait facilement deviner le germe d'un parli nouveau. L'abbé Félicité
de
Ceux qui se rangeaient ainsi autour du maître s'appelaient Gerbet, La Mennais.
Gousset, Guéranger, Rohrbacher, Lacordaire. Ils se disaient ultra- Son influence
sur
montains, et se réclamaient volontiers, en religion, des idées de la jeunesse.
Joseph de Maistre ; mais une sympathie non dissimulée pour les
raison de cette infirmité, à des spasmes douloureux dont il souffrit toute sa vie et
qui, plus d'une fois, mirent ses jours en danger. » (Boutard, La Mennais. t. I,
p. 6-7. Cf. Peigné, La Mennais, sa vie intime à la Chênaie, un vol. in-32, Paris,
1864, p. 5i-56.)
'6. (Jhr. Maréchal, la Jeunesse de La Mennais, p. 3. Cf. Maréchal, la Fanulle de
La Mennais sous l'Ancien Réyinie et la Révolution, un vol. in-S", Paris, lyiiJ.
.
Lfoïf xn 8i
1. La Monnais était plus violent encore dans l'intimité que dans ses pamphlets.
Il de la Chambre élue en 1824, la plus royaliste et la plus religieuse de U
disait
Restauration (( Jamais
: on n'avait vu une dégradation aussi burlesque et une
corruption aussi bête ». Puis il concluait « Les trois pouvoirs de l'Etat, comme on
:
VI
Le comte
^^"^ porte-parole fut un gentilhomme septuagénaire, le comte de
de Montlosier. Montlosier. Issu d'une vieille famille d'Auvergne, il avait gardé,
« dans ses manières et dans son esprit, la sauvagerie forte, rude,
abrupte, du coin de montagne où il était né » ^. De son titre de
noblesse, qu'on lui avait naguère contesté, mais que Louis XVIII
venait de lui confirmer, il ne tenait guère qu'une morgue inso-
lente. Partisan du pouvoir absolu des rois, il nourrissait jalousement
dans son cœur les préjugés les plus obstinés des vieux légistes contre
l'Eglise romaine. Chrétien pratiquant, ne craignant pas d'affirmer
publiquement sa foi, mais d'un ton raide et hautain, qui rappelait la
Messieurs, quoi qu'on puisse faire, qu'on parvienne à forcer les évêques à quitter
leur siège. Si on les ciiasse de leur palais, ils se retireront dans la cabane du pauvre
qu ils ont nourri. Si on leur Ole une croix d'or^ ils prendront une croix de bois c'est ;
une croix de bois qui a sauvé le monde. » Plus tard, dans les Mémoires d' Outre-tombe,
Chateaiibriand est revenu sur cet incident. « Montlosier, écrit-il, était resté à cheval
sur la renommée de sa fameuse phrase de la croix de bois, phrase un peu ratissée par
moi quand je l'ai reproduite, mais vraie au fond. » (Ghatea.ubriaîïd, Mémoires
d'Outre- tombe, édition Biré, t. II, p. i56). La phrase, en effet, porte bien la
manjuc de (Chateaubriand le style rocailleux du gentilhomme auvergnat a dû être
:
ratissé par l'harmonieux écrivain. Cf. Hemuoh, Vie du P. Loriquet, ch. xvi.
I, BuRHicuoN, op. cit., t. ler^ p. 347-887.
a. Mémoire, p. 10-2 1.
3. Ibid., p. 28.
II. Ibid., p. 27.
5. Ibid., p. 35-36.
6. Ibid., p. 36.
7. Ibid., p. 37.
84 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
de la célèbre société.
Le roi Charles X, qui avait succédé, en 1824, à son frère Le roi
Louis XVIII, avait paru offrir à la cause de l'Eglise des garanties sé-
rieuses. Après une jeunesse orageuse, il était revenu, depuis quelques
années, à la pratique de la religion ; une de ses premières prroccu- Son caraclèr*.
de Dieu sur son règne ; et le pape Léon XII lui en avait témoigné une
joie sincère ^. Mais, faible de caractère, incertain, mobile, facile à
influencer, Charles X était incapable de présider les conseils avec la
décision et l'autorité de son prédécesseur ; il moins encore de
était
commis avec effraction ou pendant la nuit dans une église, avait été ,
ga^r^lèrt-
attaquée, en même temps, à la Chambre des pairs par Chateaubriand,
à la Chambre des députés par Royer-Collard, et dans la presse par
par les premiers actes du roi, faisaient cause commune avec les libé-
raux, un parti de royalistes mécontents, mené par Chateaubriand
et surnommé « le parti de la défection », faisait au gouvernement une
guerre acharnée. Les chansons de Béranger entretenaient à la fois
dans le peuple le culte de l'empereur et la haine des jésuites ;
I. Voir dans la Vie de Mgr Frayssinous par le baron Henrion, un vol. in-8*,
Paris, 1842, des détails du plus haut intérêt, empruntés aux notes de Mgr Frayssi-
nous, sur les circonstances qui précédèrent et déterminèrent les fameuses ordon-
nances. Voir aussi, sur la même question, Aktaud de Montor, Hist. de Léon Xfl,
p. 372-890 Ami de la religion, du 27 février i844. Les détails les plus complets
;
est celle ci Etiuinsi omnes, ego non. C'est aussi celle de ma conscience o.
:
a. Voir A. LiHAc, les Jésuites et la llb. relig. sous la Rest., Cf. Artaud, Vie de
Léon XII, t. II, p. 388 et s. Le texte intégral de la note du cardinal Bernetti n*a été
connu qu'en i8i!|0. (]f. Blrmichon, op. cit., t. I, j). 387-^70.
H. A. Nettement, Hist. de la Bestauration, t. Mil, p. 128,
88 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
VII
catl ol'ue
L'homme d'Etat qui présidait alors aux destinées de rAutrîche
•n Alleaiagne. avait uue tout autre altitude. Charles X aimait les jésuites, el les
proscrivait ; Metternich détestait l'esprit jésuitique et protégeait la
Compagnie de Jésus.
En
1825, des jésuites, chassés de Russie et de Pologne et établis
en Galicie, sollicitèrent de l'empereur d'Â^utriche la reconnaissance
officielle de leur établissement. Le prince de Metternich écrivit, à
cette occasion, à l'empereur, le 18 octobre de la un même année,
Les jésuites , ,
cénéraie"^
politique ne visait à rien de moins qu'à organiser l'Europe. Une
telle prétention, du reste, était soutenue par lui avec un orgueil
prodigieux. Il se tenait pour infaillible. '< L'erreur, disait-il un
jour à Guizot, n'a jamais approché de mon esprit. — J'ai été plus
plus dévoués au culte de la suprématie germanique, tels que Gœrres Elle provoque,
en Italie
et Schlegel, au lieu de suivre le mouvement absolutiste de Metternich
en
et
dans l'organisation des Etats, et ses tendances joséphistes dans les Allemagne,
ra[)porls des pouvoirs civils avec l'Eglise, se firent,
une réaction
au contraire, les
ibérale.
apôtres passionnés des idées libérales en politique et de l'indépen-
dance absolue de l'Eglise en regard des Etats. Tandis que le « sys-
tème Metternich » voyait presque exclusivement, dans l'Eglise comme
dans l'Etat, les principes d'autorité et de hiérarchie, un jeune prêtre
de l'université de Tubingue, Jean-Adam Mœhler, publiait, en
1825, sous «e titre. De l'unité dans lEglise, un livre plein de fraî- Le traité
de l'Unité
cheur et de vie, où il mon-lraît comme principe d'unité dans la
de. l hAflise^
de Mœhler
(i8a5;.
f.Gmzoy, Mémoires pour servir à Vhistoire de mon temps, t. IV, p. 30. Dans son
Autobiographie, insérée autome I de ses Mémoires, Metternich se donne comme le
lioulciidnt de Dieu. Il convient que Richelieu et iMazarin étaient gens de
mérite,
mais comble de sarcasmes ses contemporain» le < petit Nesselrode », Tliiers « un
:
AVUti'i
90 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
YIU
1. Sur ce livre, qui exerça une action puissante sur les jeunes catholiques
alle-
mands de cette époque, voir Gotau, Mœhler, dans la collection la Pensée chrétieve^
uu vol. in-i2, Paris, 1906, et l'Allemagne religieuse, le catholicisme, t. II. p 24 '^5,
2. GoYAU, V Allemagne religieuse, le calhoUci^me, t II, p 43.
'6.Saint-René-Taillanoier, Revue des Deux Mondes du i«r octobre i843, p. 96.
4. GoYAL, op cit., t. II, p. 44-45.
5. Id., ibid, t. Il, p. 43-53.
LEON XII QI
bâtis pas sur le sable fugitif des opinions humaines, mais fais le re-
poser sur Dieu, citadelle de tout ce qui est solide. Sois un prince
€hrétien. Je veux dire une colonne de la foi et un protecteur de la
:
f 445-/I/47.
6. Hisi. g('n. de l'Eglise, l. VII, p. Ao8-V^Q.
92 HISTOIRE GENERALE DE L ÉGLISE
L«s premiers déjà que les soucis contemporains et une préoccupation immodérée
travaux
de réformes hantent et troublent cet esprit inquiet, qui, après avoir
de Dœllinger.
répandu à profusion dans de nombreux écrits les richesses de sa
science, essayera d'entraver par ses intrigues l'œuvre du concile du
Vatican et mourra obstiné dans le schisme ^. Brentano, converti du
Clément libertinage à la piété, se fait l'humble secrétaire d'une voyante illet-
Brentano
trée, Catherine Emmerich, au fond d'une bourgade de Westphalie,
et
les révélations et consacre sa vie à faire connaître au grand public les révélations
de Catherine
de la pauvre servante du Christ ; mais il le fait de telle sorte, qu'on
Emmerich.
a peine à distinguer, dans son œuvre, ce que Dieu a révélé à sa ser-,
vante et ce que l'imagination romantique de Brentano lui-même a pu
inconsciemment lui suggérer *. Moins profond que Gœrres, moins
1. ((Je n'ai jamais su verser de l'eau dans un verre sans le faire déborder, disait
Clément Brentano je ne comprends rien à la mpcJération et à la mesure ». (Blazb
;
DE BuRY, Revue des Deux Mondes, du i5 mars i845, p. ii24-; Un autre Allemand
de cette époque, Frédéric Schlegel, écrivait « Que 1 Allemand, que lui surtout ne
:
le plus eCQcace contre cet esprit de l'absolu qui caractérise si proprement la science
allemande et sa direction spéculative ».(Fréd. Schlegel, Phil. de Vkist,, trad.
Lechat, Paris, i836, t II, p. 892.)
2. Sur la Mystique de Goerres, voir une étude de l'abbé Freppel, le futur évêqut
d'Angers dans le Correspondant du 25 mars i852, p. 742-758, et du 25 juillet i85a,
P- ^^^'^^^-
•
oa oc . .
1867 et 1870
; Wegener, Anna Kalharina Emmerick und Clemens Brentano
«^'"ui.v,
Julmeti, 1900.
I. GoYAU, op. cit., t. II, p. 82-85.
3. Lecanlet, A/on/a/tm6erf, t. jer^
p. 383.
3. Ward, le card.
Wiseman, trad Gardon, Paris, 1900, t. I,
p i52
II. t/.LLovx Mémoires d'un royaliste, a vol. in-80, Paris,
1880, t. I F-
p i-2-i"3 •.
Rio, Epilogue a l art. chrétien, t. Il, y^
p. i65 et s
> •
IX
catholi"isme
g^^^se. Depuis quatre cents ans que l'Angleterre l'avait conquise,
en Irlande, l'Irlande n'avait pas cessé d'être soumise à ce régime de terreur que
Ton comprend à peine, comme mesure transitoire, au lendemain
d'une conquête. Or, ce régime atteignait aussi bien la foi religieuse
riches sur les pauvres, des protestants sur les catholiques, y fut
affermie ;
et l'ont put prévoir avec certitude que les promesses faites
tifie alors avec son peuple, il vit de sa vie, il rit de ses joies, il saigne
de ses plaies, il crie de ses douleurs... Mais il s'enferme et se mure
dans la légalité, comme dans une forteresse inexpugnable. Il est
hardi, mais il est peut-être encore plus adroit que hardi. Pointilleux,
retors, madré, fin procureur, il ravit par la ruse ce qu'il ne peut arra-
I. En
i8i5, il avait eu le malheur d'accepter un duel et de tuer son adversaire.
Dans douleur, il fit le vœu de ne jamais plus donner ni accepter un défi, et il
sa
resta fidèle à ce vœu, malgré les vives polémiques auxquelles il fut mêlé pendant le
reste de sa vie.
a. Timon (L, dk Gormenin), le Livre des orateurs.
LEON XII OT
l'emancipatiott
[rib< liions dans chaque paroisse par l'inlermédiaire des curés, soiis
la surveillance des évoques, et concentra les plaintes elles vœux des cailioiiques
agitation,
. .
toujours légale,
w 1
niais
. •
toujours croissante,
-, de
1
^}
de
^f,
l union.
«'onlre
Il
un membre du
' '
qu mconnu dans 1 1
la cir-
• de Clare
',8a8L
conscription, bien que légalement incapable de siéger au parlement
en tant que catholique, il fut élu avec de telles démonstrations popu-
laires, qu'au soir de l'élection le grand agitateur s'écria : (( Main-
l(jiia[it, l'Irlande est libre ! » Il voulait dire que sa cause était désor-
liques. Le roi Georges IV consentit, puis refusa. Peel offrit sa démis- hésite
sion. Mais le roi ne trouva personne qui voulût se charger du mi-
nistère. La voix d'O'Connell se faisait plus redoutable. Il prétendait
hautement, malgré sa qualité de catholique, siéger à la Chambre des
Communes. S'i' refusait de reconnaître la suprématie prolestante, il
qui jurerait fidélité au roi serait déclaré électeur et éhgible. Tout l3av^il^8.'^^)
1 Sur les négociations qui précédèrent le vole du bill, voir ARfAtu, Uhl.de
Léon XJI, t. 11, n. 286-290, 335-34a, 39^899, 4n-4iO.
Hisi. aeii. (lo l'E^lise^ — Mil n
9^ HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
!à'-^'
O'Connell n'avait pas seulement libéré
les catholiques d'Irlande,
'd'^m^anci
tionetde L'acte d'émancipation embrassait, dans la plénitude de ses
termes
la campagne lont l'empire britannique, non seulement l'Irlande, mais
l'Ecosse'
la Orrande-Brelagne et ses colonies. Plus de cent millions
d'hommes,
sur des rivages baignés par vingt mers, pouvaient désormais
se dire
catholiques sans être traités comme un troupeau d'esclaves.
Tous les partis Le d'émancipation des catholiques
I accueillent ,,.
bill
,, ...
fut salué comme un bienfait
^, . .
avec ^ immense portée par 1 opinion publique et par les cours de l'Europe,
enthousiasme, par les représentants les plus avérés du libéralisme en France et en
Allemagne et parles porte-voix les plus autorisés des vieilles dynas-
ties. Tandis que les disciples de La Mennais et de Gœrres y voyaient
« une préparation, pour les siècles à venir, de l'affranchissement des
peuples chrétiens opprimés par la main de fer du despotisme ^
», !e
prince de Metternich écrivait, le 19 avril 1829, au nom de l'empereur
dViutriche, à l'ambassadeur Esterhazy Nous voyons dans cet
: «
élrauger, admis presque sur le même pied que le culte établi, leur
qu'il avait effacé, dans son Gradiis ad Parnassum, les épithètes qui Chez
.Nevvrnnn,
accompagnaient le mot pape, comme vicarius Christi, sacer inter-
ces prf.ijgéi
pres, et les avait remplacées par des qualifications injurieuses » ^. tombent
peu à pe««
De 1822 à 1824, Newman vit tomber quelques-uns de ses préjugés,
s'éteindra jamais.
eurate.
f^ "f&-.c^
8T. l«HCKACL''d
LmkKH
LLON XII 10 1
XI
aussi ciïicace que discrète, et c'est ajuste titre que ses historiens lui
^^^^"^^^[1'^^^
en font honneur ^. Une intervention directe du Saint-Siège dans la
ne voir que les menées d'un parti politique, aurait pu avoir plus
d'inconvcuicnts que d'utilité. Léon XII s'en abstint ; mais par les
chie que par instinct batailleur, rancune contre les classes élevôcs,
bourgeois, nobles, lettrés, qu'un roi absolu dominerait, qu'une inqui-
sition puissante frapperait sans pitié, « démagogie de forme particu-
lière, moins bideuse qu'ailleurs, parce que le peuple avait plus de
foi, un plus baut sentiment de dignité et d'honneur national, et que
1 action de la religion comprimait, ennoblissait en partie ses pen-
chants » ^ Ces masses joignirent leurs clameurs bruyantes aux accla-
mations par lesquelles la noblesse de cour, le clergé presque entier
et nombre de hauts dignitaires de l'armée et de la magistrature,
Le roi accueillirent, en i8i4, le retour du roi Ferdinand VÏI. Celui ci,
de son j)ouvoir monarchies arbitraires se font pardonner leur despotisme. Les inté-
rêts généraux de l'Etat ne furent pas moins sacrifiés que les inté-
t^oséobistes
^evenus des sièges vacants ; et l'Inquisition sembla devenir, entre ses
«i-joséphistes.
mains, un rouage de l'administration royale.
Une réaction était inévitable. Elle éclata, injuste, violente, révo-
principe de vie ^. » La France, engagée à fond par ses deux plénipo- cnT^^p'^ie
tentiaires, Montmorency et Chateaubriand, se chargea seule de l'ex- (iS^a^.
iionorifiqiies s'était montré aussi modéré dans que vaillant dans h^s
ses conseils
au duc combats hommage
; e! il fit au duc d'AngouJême des deux insi'?nes
traditionnels par lesquels ses prédécesseurs avaient honoré les grands
défenseurs de la chrétienté : don Juan d'Autriche, après la bataille
Uépubliques tions avec les Etats d'Amérique qui venaient de se séparer de l'Es-
americaines p^ .^^ gj ^ç, gg constituer
^
en Républiques*. Plusieurs siècres
o épisco-
qui viennent ^ /
.
"^
,
i.
de se séparer paux y étaient vacants. L'Espagne, bien qu ayant perdu toute auto-
«iel Espagne,
j-ité eiTicace sur ces pays, réclamait avec persévérance le droit de
présenter des candidats à ces évêchés. Léon XII, dans le consistoire
du 21 mai 1827, déclara aux cardinaux qu'il venait de pourvoir ces
Eglises « de dignes serviteurs, par les soins desquels, bientôt lavées
de leurs souillures, elles refleuriraient, et donneraient des fruits
abondants de salut » ^. Il venait d'agir ainsi sans le concours de per-
sonne, mais en vertu de sa seule autorité apostolique et de son devoir
Protestations primordial de paître les agneaux et les brebis. La cour de Madrid
de la cour montra du mécontentement. Ferdinand VII manifesta sa mauvaise
de Madrid. , , •
nr rn-i • ^ ' ht 1 •
i
2. A gouvernement français
la date du 2 décembre 1828, le chargé d'affaires du
à Rome, Artaud de Mentor, écrivait à Chateaubriand « Léon XII, en maniftslant :
son assentiment aux mesures nobles et vigoureuses qui ont contribué au rétablisse-
ment de l'autorité du roi d'Espagne, cherche les mo)ens d'éviter d'être dominé en
cela par la faction qui Ta élu. » (Artaud, op. cit. y t. I, p. i3o).
3. Artaud, t IT. p. 3/i-35, 43-^6.
'j. De i8io à 1832, le Mcxi-Tue, le Guatemala, la Colombie, le Pérou, l«
vous menaciez
douze ans, vous ne commandez plus, faut-il que
Encrgîqne«i
même vos Etats d'Espagne, restés fidèles, d'un système d'altercations déclaralions
avec le Saint Siège? Nos devoirs viennent
d'En haut. Vous ne pou- de Léon XII.
vez pas dire que nous n'avons pas écouté votre ambassadeur,
M. de
Vargas. Il serait lui-niéme auprès de vous, qu'il vous
rendrait
XII
L'E^'li-e
Les troubles d'Espagne avaient eu leur répercussion en Italie ; et
catholique
îà aussi Léon XII, tout en ap[)laudissant à la répression des menées en Italie.
non plus seulement dans les Abruzzes, mais aussi dans les Romagnes,
dans le Piémont, dans la Lonibardo-Vénétie et dans les duchés,
l'Italie avait désormais des cadres constitués pour une agitation
révolutionnaire. Pour qu'elle éclatât, il suffisait qu'un peuple voisin
don ; \l l'exemple, ou qu'une mesure répressive extraordinaire, éma-
nant de l'autorité, parût une provocation. Les deux faits se produi-
Insurrection
sirent presque simultanément. En 1820, Ferdinand I*', roi des Deux-
de iSao.
Siciles, essaya d'opposer aux carbonari les calderari ou chaudron-
niers, qui se firent les soutiens du pouvoir absolu. En même temps,
la nouvellede la révolution d'Espagne parvenait en Italie. Le 2 juillet,
deux jeunes Ta
sous-lieutenants de l'armée napolitaine, Morelli et
Constitution
Silvali, à l'instigation du prêtre Minichini, soulèvent la troupe, se espagnole
diligent vers iNaples, el forcent le roi de i8ia
à jurer la constitution espa-
estacclamée
en Itali •.
les princes, et les princes dorment encore Nous avons averti leurs !
une fois revenir sur cette éternelle question de la haquenée ^^ qui, depuis le
de plus,
la « question
moyen âge, avait si souvent mis aux prises la monarchie sicilienne
de la avec le Saint-Siège, et que le concordat de 1818 semblait avoir défi-
haquenée ».
nitivement réglée. Le 9 avril 1826, le baron de Damas, ministre des
affaires étrangères en France, est chargé par l'ambassadeur de Naples,
Fuscaldo, d'intervenir à ce sujet auprès du Saint-Siège. Le langage
'
La France du plénipotentiaire est d'une hauteur presque insolente. « Ces préten-
et i'A'Uriche
appuient tions du Saint-Siège, écrit-il dans sa dépêche, remontent au temps
les où il en avait sur la plupart des couronnes. » Mais, ajoute -t-il, « le
réclarnalioris
du roi
cours des siècles les a fai,t tomber en désuétude ; l'indépendance du
de Naples. trône est devenue la plus sûre garantie de la prospérité des Etats et
même de la religion. » L'ambassadeur d'Autriche s'associe aux
3 "
reffervescence soulevée par cette hostilité dans les provinces de
Belgique.
Depuis que le Chapitre janséniste d'Utrecht s'était arrogé le droit, Election
d'un évêqu3
en 1722, de nommer un évéc|ue, le schisme s'était perpétué en
sch/suiatiqu»
Hollande. En 1825, un certain Guillaume Vet, ayant été illégalement à Deventer
élu évêque de Deventer, un des prétendus sièges sufTragants d'Utrecht,
eut l'audace de faire part à Léon XII de son élection. Le souverain
pontife, à celte occasion, adressa, le 17 août 1820, un Bref aux fidèles
de Hollande. Il y déclarait l'élection de Vet nulle, son sacre illégi-
a<3S Belges mais il fit écrire, en même temps, par Mgr Mazio, une lettre par
{var ie pape.
laquelle il recommandait aux catholiques et au clergé de garder « une
attitude passive », jusqu'au moment où le Saint-Siège jugerait à
propos de statuer sur la situation *.
que chaque diocèse des Pays-Bas aurait son Chapitre et sou séiui-
Xlîl
du même L'Eghvn
Un conflit ffenre, mais plus ai^fu, a^^itait, à Test de
1 Lurope, la catholique Pologne, asservie a 1 empire schismatique en Rnwie,
des tsars.
Politique
Le tsar Alexandre P'', fidèle à la politique reli "pieuse de son prédé-
. . . . .. Teligieo.««
cesseur Paul P% n'avait pas repris les traditions persécutrices de l'im- du tsau-
Oukase de Nicolas P^. Les faits démentent cette assertion. « Ce fut en pleine
de paix, par un oukase du mois de février 1826, que Nicolas commença
février 1826.
la guerre contre l'Eglise unie, que l'humanité de Paul et
autorité Aussi tous les actes qui suivirent ne furent que le dévelop-
».
réitérées des biens des couvents ^ » : tels furent les premiers attentats
catholique.
Parallèlement à ces mesures de persécution religieuse^ des actes L'oppressioa
de la nation
répétés d'oppression systématique visaient particulièrement la nation polonaise
polonaise. « Nicolas avait accepte d'être couronné roi de Pologne ;
est
particulitic-
mais il cessa de convoquer la Diète et laissa gouverner la Pologne
par des absolutistes qui parlaient de révoquer la charte de i8i5. L'un
d'eux déclara : u II ne s'agit pas de discuter, mais d'obéir. » Ce
régime irritait tous les Polonais ; mais, sur la conduite à tenir, ils
se divisaient en deux partis. Les grands propriétaires et le clergé Deux par lis
en Pologne :
Prudente des Eglises? » Léon Xïl ne vit dans toute communication à cet égard
politique
de Léon XII. que le danger de se compromettre ; il se déroba à tous pourparlers, et
Les missions d'autant plus pénible au cœur de Léon Xlï que de tristes nouvelles
catholiques
en Grèce. lui parvenaient des missions établies dans ce pays. En cette même
année 1825, le duc de Laval, ambassadeur de France auprès du
Saint-Siège, confiait au cardinal secrétaire d'Etat la copie de deux
lettres que le baron de Damas venait d'écrire à Mgr Frayssinous,
plus que treize religieux, répartis entre les maisons de Péra, Snijrne,
Scio Naxie, Syra et la Canée. Les résidences d'Athènes, de Parchia,
d'Argentière, de Milo et d'une partie de Candie n'avaient plus per-
sonne.
L'Egli!«e
La mission de Syrie, également desservie par les Capucins, se trou-
, , 11 T-.li
Elle ne
-1
comptait plus
j
que deux
calholiane
vait dans un état plus lamentable. ^^^ Orient,
XÏV
jjjj^g
des négociations poursuivies avec les divers Etats européens ne
ion centre, détournaient le zélé pontife des soins de son gouvernement temporel
et spirituel.
du pieux pontife.
Léon XII, alors qu'il était cardinal-vicaire, avait souvent demandé Léon XH
et les juifs.
à Pie VII un adoucissement au sort des juifs, relégués à Rome dans
un quartier fort étroit. Pie VII avait accédé à ces vœux mais ;
les autres souverains ^ ». Par là, Léon XII venait en aide aux efforts
des souverains alliés, qui, dans les congrès ou conférences d'Aix-la-
Chapelle, Garlsbad, Troppau, Laibach, Vérone, tenus tous, sauf le
dernier, avant la publication de l'encyclique, avaient étudié les
11 n'est pas mesures à prendre afin d'anéantir la funeste influence des sociétés
assez secondé,
dans secrètes. Mais « telles étaient les ramifications que le mal avait déjà
celte anivre, poussées, tel était l'aveuglement de cei taines cours, habilement trom-
par les cours
de l'Europe. pées par des adeptes adroits et hardis, que jamais ils ne purent
atteindre ce but, qu'ils poursuivirent d'ailleurs dans des vues trop
exclusivement politiques ^ ». Le grand moteur de la politique con-
servatrice en Europe, le prince de Metternich, si renommé pour sa
clairvoyance, n'avait-il pas, dans sa chancellerie, pour secrétaire
intime, un membre de la Haute- Vente, dont le nom de guerre était
Gaetano - ? De telles compromissions n'étaient-elles pas de nature à
annuler tous les efforts tentés par des mesures de répression exté-
vants d'un autre âge, est gravement mis en échec par la jeune école
catholique ; en Allemagne, l'Ecole de Munich jette un vif éclat ; en
Angleterre, une renaissance à la foi romaine se prépare. L'Irlande, la
Belgique et la Pologne marchent vers leur libération ; et, pour res-
Pie VIII
doctrine et par l'autorité du passé, n'en connût pas moins les besoins
du présent et de l'avenir ^ ».
Les deux tendances qui se manifestaient ainsi étaient celles-là La tendance
conservatrice
mêmes donl le violent conflit allait, un an plus tard, renverser plu- et la teudancc
sieurs trônes de l'Europe et les ébranler tous. L'opinion publique ne libérale.
avait, par son exemple, relevé le courage de plus d'un esprit chan-
celant.
Situation Les événements qui allaient se dérouler sous son pontificat, et que
de l'Eglise
les esprits perspicaces prévoyaient déjà, demanderaient précisément
M du monde
à son au pontife romain cette fermeté tempérée de prudence dont François-
avènement.
Xavier Castiglioni avait donné tant de preuves au cours de sa car-
rière. La date de i83o va marquer un des points culminants de
La crise l'histoire du xix® siècle. C'est le moment d'une réaction à peu près
politique,
générale contre les pouvoirs absolu, en faveur des régimes consti-
sociale,
littéraire, tutionnels ; c'est la période d'une agitation sociale sans précédent,
artistique
^eligieu^e
où les idées les un
plus révolutionnaires n'ont pas encore dépouillé
et
de i83o. vernis superficiel de christianisme c'est l'apogée d'un mouvement
;
II
Les souverains pontifes ont souvent, dès les premiers jours de leur Le nouveau
pape choisit,
règne, indiqué l'orientation de leurs pensées par le choix de leur
comme
secrétaire d'Etat et par la publication de leur première encyclique. secrétaire
d'Etal,
La nomination faite par Pie YfH du cardinal Albani comme le cardinal
secrétaire d'Etat n'étonna pas la cour romaine et la diplomatie Joseph Albaui.
européenne. On savait quelle conformité de vues avait toujours
existé entre le cardinal Gastiglioni et le descendant de l'illustre
IIL
avis, un des ouvrages les plus remarquables qui aient été publiés
IV
Mais, aux yeux des esprits sages, l'élan du mouvement catholique Triple péril
le caractère
ment de celui qui s affirmait comme son chef. Certes, le feu d'une
violent éloquence entraînante ne manquait pas à l'abbé de La Mcnnais. On
et absolu
de l'abbé
se répétait la superbe évocation de l'avenir qui terminait son livre
deLaMennais. sur les Progris de la Révolution « Ne voit-on pas, disait-il, que
.
Et ils se lèveront, et, le regard fixé sur cette divine splendeur, ils
Oriens ex alto ^. n
Mgr de Qué- Mais ce même livre des Progrès de la Révolution contenait des
ien, dans
une lettre
pages pleines d'une aigreur mal contenue. Mgr de Quélen, arche-
pastorale, vêque de Paris, dans une lettre pastorale adressée au clergé et aux
prémunit les
fidèles contiô
fidèles de son diocèse à l'occasion de la mort du pape Léon XII, crut
se»tendances devoii' prémunir ses diocésains contre les tendances dangereuses de
dangereuses.
l'abbé de La Mennais. a Tandis, écrivait-il, que nous croyions
n'avoir à craindre que de l'audace ou des embûches de nos ennemis
déclarés, voilà que l'esprit de système, triste et dangereuse tenta-
tion des plus beaux talents, s'est introduit, se manifeste dans les
camps du Seigneur et nous menace d'une guerre intestine ^, » La
remarque était juste et pleine d"à-propos. L'ultramontanisme, tel
éfense des libertés de l'Eglise. Mais nous avons vu plus haut comment, pa
i:>8 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
Les uns et les autres furent déçus. Le pape Pie VIII ne jugea pas
que la faute de La Mennais fût assez grande pour le frapper d'une
condamnation qui aurait jeté le désarroi parmi le groupe d'ardeiils
catholiques qui combattaient à ses côtés. D'autre part, condamner le
diverses causes, surtout par le contact avec le parti des libéraux rationalistes, cette
notion s'était altérés.
I. E. FoRGUES, Correspondance de Lamennais^ lettre du 3 mai 1829 à la coKitesse
de Senfft.
a. Thureau-Dangin, Royalistes et Républicains, un vol. in-8'', Paris, 1871^,
p. 024-325.
.
les
1-
lignes suivantes: «
'
t I
La J
source du
1-1
mal vient
déclarations
d'un journal
d'une Charte impie et athée. La religion, la justice et Dieu même d'extrême
/
L'expédition Le gouvernement de Charles X ne pouvait se dissimuler la gravité
d'Alger.
de la crise. Au commencement de l'année i83o, un grand effort fut
tenté pour relever le du pouvoir.
prestige et l'autorité
Causes Depuis seize ans, la France et la Régence d'Alger étaient en conflit
lointaines
au sujet d'une créance importante de deux sujets algériens sur le
de la gu'^rro.
Trésor français. Le dey d'Alger, Hussein, vrai tyran, qui terrorisait
la ville d'Alger, avait écrit, à ce sujet, au gouvernement de Charles \
des lettres insolentes, et s'en était même pris au consul français, qu'il
avait, en 1827, frappé du manche de son chasse-mouches. Une
escadre française, depuis lors, faisait le blocus d'Alger, mais sans
résultat. Le 3i janvier i83o, un conseil des ministres décida
d'envoyer devant Alger une flotte de cent bâtiments de guerre,
escortant cinq cents vaisseaux de transport, qui conduiraient trente-
sept mille hommes de troupes de débarquement. Venger l'honneur
Cause de la France et abolir sur les côtes de la Méditerranée la piraterie
prochaine :
relever
et l'esclavage étaient certainement deux des buts de l'expédition ;
n'ont jamais créé un pouvoir fort, mais elles l'acceptent toujours. faire un coup
d'Etat.
Ainsi raisonnaient les politiques d'extrême droite. Polignac, cepen-
dant, hésitait encore. « Eh quoi I Monseigneur, lui dit un jour
Michaud, le rédacteur delà Quotidienne, vous hésitez à faire un coup
Les cris de : Vive la liberté! dominèrent les cris de: Vive la Charte!
Pendant cette journée, plus de la moitié de Paris tomba au pouvoir
des insurgés. La garde nationale, aidée par un régiment d'infanterie,
qui venait de se joindre à elle, s'empara de l'Hôtel de Ville. Le len-
demain, 29, l'émeute, guidée par des élèves de l'Ecole poly-
technique, força les barrières du Louvre et s'installa dans le palais,
« roi des était populaire dans la bourgeoisie par son accueil facile et sa
Français »
(5 août i83o).
bonhomie il ; attirait volontiers auprès de lui, au Palais-Royal, les
VI
libéral. La Mennais,
1° qu'il n'était point le disciple fanatique et exclusif de
penchants de ceux-là * ? n
Nous avons longuement exposé cette controverse, parce qu'on y Sens et porire
trouve déjà formulés, dans leur substance, les arguments qui seront
nre^miT
apportés plus tard, de part et d'autre, dans la grande querelle du débats,
VII
Relation de Telle fut, daiis ses origines, tiaos ses caractères et dans ses pre-
célébration d'un jubilé. Le roi des Pays Bas publia la bulle, mais en
faisant ses réserves sur « les clauses qu'elle pourrait contenir contre
les droits du souverain et les libertés de l'Eglise belgique )>. u Les
libertés de l'Eglise belgique sont bien placées là, écrivait Y Ami de la
religion, dans un temps où cette pauvre Eglise n'a pas encore les Nouvelle!
vexations.
évêques qu'on lui avait promis et où un concordat solennel est resté
5. Ibid., p 173
6. Ibid., t. LXI, p. 167.
5
Le pape Pie VIII, qui, dans un esprit de pacification, avait cherché Inquiétudes
trop de bonne foi pour que les autres ne soient pas tentés d'y mêler
un peu de duplicité. » Plus loin, il ajoutait ces paroles, où se ma- ges saffci
VIII
Se» causes anciennes et prolondes, que nous avons déjà eu l'occasion d'étudier;
anciennes. .
, , '
i .• r • j t i.
mais son explosion, préparée par i
la révolution française de Juilli t,
100.000 calvinistes avaient 9 temples 3/i5.000 juifs, 27^ synagogues les grecs
; ;
non-unis, six églises, et les mahométans deux mosquées. Pour plus de détails, voir
Ami de la religion^ t. LXI, p. 225-23o t. LXIII, p. 3i2-3i4. Voir les articles
;
—
de la constitution polonaise qui ont trait à l'Eglise catholique dans VAmi de la
religion, t. LXil, p. 66, note.
2. Ami de la religion, t. LXIII, p. 347.
PIE Vin i/i3
IX
La cause de
.1
enthousiasme
.
1
presque
Irlande suscitait,
aussi
.
r
fervent. Au
11-
chez les jeunes catholiques,
retour d un voyage en
un Lagiiahon
iriaodaise.
catholicisme, la fraude. Elle n'a aucune force obligatoire. Les Irlandais, toujours
nV aino
traités comme des étransfers de race et de religion, demandent le
gique et en Pologne.
Tactique a La stupéfaction fut grande en Angleterre, dit un des meilleurs
e agitateur.
j^ij^^Qi-ieiis de l'agitation irlandaise, quand, au lendemain de l'éman-
cipation des catholiques, on vit s'organiser en Irlande une associa-
lion nouvelle aux cris du « rappel de l'union ». Une loi autorisa
a-itateur imagina de créer des sociétés sous des noms différents, qui,
1. Jules GoNuoN, l'Agitation irlandaise depuis 1S29, un vol. in-i2, Paris, iS^â,
P- 7^-7:)-
a. A. de la /?., t. LXIV, p. 5ai-523.
llisl. sén. de l'Kgliïe. Mil 10
i46 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
i. A. de laR.r t. LXIII, p. 182. Sur l'état de l'Eglise d'Irlande vers i83o, voir
A. de la /?.. t. LXII, p. i-5. Sur le clergé anglican et catholique en Angleterre, cf.
A. de la /?., LXI, 278, LXII, ^9, LXUI, 55, 129.
2. Ibid.
B Ibul., t. LXI, p. 145-1/47.
PIE VIII ï47
lui orirait
il
!-« T T'A»
ne pouvait s'empocher de
son Lglis«. Lui-même a résume
, la
^n»
doctrine J«
Newmap
ainsi les réflexions que ce contraste lui suggérait : « A cette u Eglise
établie » d'Angleterre, si divisée, si menacée, si ignorante de sa
force réelle, je comparais cette puissance vivace et énergique dont
j étudiais l'histoire dans les siècles primitifs... J'étais toujours pour-
suivi par cette pensée, qu'il existait quelque chose de plus grand que
1 Eglise établie, et que ce quelque chose était l'Eglise catholique et
apostolique, instituée dès l'origine^». Ainsi surgissait ce qui devait
ctrc désormais, pendant plusieurs années, l'idée maîtresse de Newman :
L'Eglîse
catholique
Par certains côtés, la situation du catholicisme en AJIemagne était
en Allemagrw analogue aux conditions de son existence en Angleterre. Là aussi une
minorité de catholiques était dominée par une majorité protestante.
Là aussi les catholiques, groupés en certaines régions, tcMes que la
Bavière et l'Autriche, avaient la faculté de s'organiser entre eux.
Mais là s'arrêtaient les ressemblances.
Etat politique
de Au point de vue politique, l'Allemagne, telle que les traités de
TA Ile magne i8i5 l'avaient faite, était une organisation instable, divisée entre
en i83o.
deux grands Etats d'une part, l'Autriche et la Prusse, qui cherchaient
controverses.
Gontre-coup
des En Allemagne, pas plus que dans les autres pays qui subirent k
événements
secousse de i83o, les événements de Juillet ne créèrent les conflits,
de .înillet en
Alleiuagae, mais ils en déterminèrent la crise violente. Alix premières nouvelles
de l'insurrection parisienne, des émeutes éclatèrent dansleBrunsAvick^
la Saxe, la Hesse-Cassel, le Hanovre et plusieurs arutres petits Etats.
PIE VIII 1^9
Ad
.....
évêchés dont les bulles
1827, avaient
.
du i6 août 182 1,
,
fornié la
.de
province
et , tl^^^ r
Francfort.
Les articles 25, 26, 27, 28, 29 avaient trait au recrutement des clercs,
soumis, soit avant leur entrée au séminaire, soit pendant leurs études
ecclésiastiques, soit après leur sortie du séminaire, à des examens
passés devant les autorités religieuses et civiles. L'article 36 donnait
le droit aux ecclésiastiques aux laïques de recourir auprès des
et
Puis il écrivit une seconde fois à tous les chefs des Etats compromis.
La question La question des mariages mixtes, qui devait, dans la suite, pro-
des mari a go
miites. voquer des résistances héroïques, fit voir d'abord, dans l'êpiscopat
allemand, les mêmes faiblesses.
prêtres retractaires aux ordonnances, et exigea que les eveques leur i^i^^^
une solution cative du cardinal Albani, qui déclara vahdes mais illicites les ma-
à la
controverse riages mixtes conclus sans observer les règles prescrites par le con-
'a*: mars cile de Trente. Le pape obligea les prêtres à exiger des fiancés,
^
i83o}.
avant la célébration du mariage, promesse que tous les enfants
la
XI
Les
Il n'en était pas de même en Italie, où îl est permis de suivre, à
mouvements
révolu- l'aide de documents authentiques, le mouvement des sociétés secrètes
tionnaires
et leur action sur les révolutions politiques et religieuses de la pénin-
en Italie.
sule.
2 Gustave
. Bord, les Illuminés de Bavière, le Tagend-Bund et les sociétés de mal"
faiteurs, dans la Rev. inlern. des soc. secr.y du 5 juillet 19 13, p. 217a.
3. Ibid.^ p. 217/1-2170.
PIE vni i53
nettement anticalholique.
Ils sont
Ce caractère lui viendra précisément
*
des sociétés secrètes. L'Ita-
1 1 /
• ' L
presque ton?
lien, plus que tout autre, sait à la fois se soumettre à la nécessite et provoquée
occultes eurent, par les soci- 's
conspirer
t
dans l'ombre. En i83o, les associations
secrètes,
en Italie, deux centres : les Etats pontificaux et la province de
Bonaparte
dans la réunion nombreuse des membres de la famille Bonaparte, un et du duc
fût invitée à quitter la ville ; elle se retira en Autriche 3. Plus tard, ^^^ luîieî
les deux fils de la reine Ilortense avoueront leur participation aux
complots italiens. Un des chefs d'Etat de la péninsule, le duc de
Modène, entra aussi en relations avec les car6onar/. Caressant le
rêve de se mettre à la tête d'un mouvement libéral, qui ferait de lui
3. Mrtternich, Mémoires^ t. V,
i54 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
Saint-Siège*.
I. Sur les sociétés secrètes de la Basse-Italie à cette époque, voîr Oreste Dito, :
Massoneria, carboneria ed altre società segrete nella storia del Risorgîmento italiano,
Turin, igoS A. Ga.valotti, Memorie sulle società segrete delVItalm méridionale,
;
Xll
tournaient les yeux vers Rome, pour lui demander les pasteurs, les
d'Euro o
ressources, les aides de toutes sortes dont elles avaient besoin.
Les Annales de la Propagation de la foi d'avril 1829 exposaient la
était la pénétration, dans l'administration des paroisses, d'un esprit Les trasue».
Accroissement et, en i83o, une somme à peu près égale 2, aux diverses missions
du nombre
dos qui sollicitaient son secours. Le nombre des ouvriers évangéiiques
mibsioaiiaircs. augmentait en proportion de la générosité des fidèles. Le séminaire
des Missions étrangères, qui n'avait que 25 missionnaires en 182 4,
en comptait 53 en i83o ^. Les lazaristes, les jésuites, les Pères du
Saint-Esprit donnaient à l'évangélisation des contrées lointaines des
ouvriers de plus en plus nombreux. Pie VIII toutefois ne put voir
la grande renaissance des missions étrangères, réservée aux pontifi-
cats de Grégoire XVI et de Pie IX. Après avoir occupé vingt mois
seulement le Siège apostolique, le sage et pieux pontife, se sentant
mortellement atteint par une maladie dont il souJBPrait depuis long-
Mort temps et que les soucis de son gouvernement avaient aggravée, de-
de Pie Vin
(3o novembre manda à recevoir les derniers sacrements, et rendit paisiblement le
l830;. dernier soupir le 3o novembre i83o. Sous son pontificat, au milieu
d'événements qui bouleversèrent l'Europe entière, des idées très éle-
C'est en Italie, c*est dans les Etats mêmes du pape, que le mot de
Le libéralisme couvrit les aspirations les plus divergentes. Expression
mouvement
libéral en
d'un noble sentiment d'indépendance nationale pour les uns, de
Italie et dans vagues tendances constitutionnelles ou démocratiques pour les
les Etats du
autres, de sourdes méfiances envers le Saint-Siège pour plusieurs, il
Saint-Siège.
fut, pour les sociétés secrètes, qui s'emparèrent du mouvement, le
mot sonore par lequel des meneurs hypocrites tentèrent de justifier
les attentats les plus sacrilèges contre l'Eglise et les conspirations les
plus dangereuses contre Tordre social.
Les sectes L'homme qui allait devenir l'inspirateur et le chef de l'agitation
révolution-
naires entre- révolutionnaire en Italie, l'organisateur de la Jeane Italie et de la
prennent Jeuae Europe, Giuseppe Mazzini, a résumé sa tactique dans ce
de le liiriger.
passage de ses Instructions : « En Italie, le peuple est encore à créer ;
Il (. :nloite L'idée de l'unité nationale de l'Italie fut une de celles que les
le sentiment
national et la sociétés secrètes exploitèrent avec le plus de succès, u L'histoire de
haine contre l'Italie pendant le xix® siècle, écrit Claudio Jannet, montre plus
l'Autriche.
qu'aucune autre comment l'action néfaste de la franc-maçonnerie et
1. Cité par LuBiENSKi_, Guerres et révolutions d'Italie, Paris, 1862, p. 46, et par
Claudio Ja-Nnet, la Franc-Maçonnerie au XIX siècle, un vol. in-80, Avignon, iSSa,
p. 1/18-149. .
'
1. Cl. Jin^sET, la Frenc Maçonnerie au XlX* sièx^le, p. i47-i48. (Le livre pul'Iié
sous ce titre n'est que la reproduction du tome III de l'ouvrage les Sociétés secrètes :
et la société, par Deschamps, lequel tome III est l'œuvre de Claudio Jannct.)
2, MmeRATTAZzi. Ralta::i et son temps, documents inédits, Pari>, 1881, l. I, p. ao,
4^'. (jf. SiLB!<G\iiDi, Ciro Menotliy au chapitre intitulé / carbonari e le associa: ioiU
ugrcU,\
Hisl. gén. de l'Eglise. — \\l\ II
l62 HISTOIRE fîÉNéRALE DE l/ÉGLISE
n
L'œuvre fameux homme d'Etat poursuivait ces négocia-
Pendant que le
du libéralisme
révolution- tions à peu près stériles, les sectes avaient profondément bouleversé
naire
l'Etat pontifical.
. dans l'Etat
L'étincelle qui détermina l'explosion révolutionnaire était partie
poiilifical.
. „ 1 I TT f7 •
I- • • f i.f T • conspiration
miluent de la Haute-Vente italienne, avait organise 1 émeute. Lais- de Modène
sant entendre au vieux duc, son maître, dont il cultivait avec soin (décembre
, * ... ^ j ,.,,..
,.,,.,,
les rêves ambitieux, qu il s agissait uniquement de conquenr 1 inde-
. i83o-ianvier
i83ii.
pendance politique de la péninsule et d'affermir cette œuvre en pla-
çant sur la tête du prince la couronne constitutionnelle de l'Italie ^^^^ Menotti.
Mais le duc avait a temps ouvert les yeux. Comprenant enfin que
Tentreprise de Menotti ne tendait à rien de moins qu'à déchaîner une
révolution sociale, dont le Saint-Père et les souverains de l'Europe
seraient les principales victimes, il prévint le mouvement insurrec^
tionnel ; et, au moment où Menotti préparait l'invasion du palais
ducal, il le fit arrêter comme parjure et révolté.
Ces mesures venaient malheureusement trop tard pour empêcher L'Insurrection
if , .. ,, ,.1 . ^ i Bologne
En même temps que
1 r T-<
1 exécution d un complot solidement organise. ^janvier-
Menotti essayait de révolutionner Modène, ses afliliés, fidèles au février i«3i).
^. SïtiVikii*, Grégoire XVI et son poiUiJicat, un vol. in-8% Paris, 1889, p. Sô'
39.
i64 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
Tenue '
Quarante-cinq cardinaux prirent paît aux divers scrutins. Dès le
du conclave
(i4 décembre
premier jour, le cardinal Pacca, doyen du Sacré Collège, le ©ardinal
i83o-a Cappellari, préfet de la Propagande, et le cardinal Giustiniani, an-
février i83i).
cien nonce à Madrid, recueillirent les plus nombreux suffrages ;.
Pierre, les Marches et les Légations. L'art. io3 de l'acte du 9 juin i8i5 était ainsi
conçu « Les Marches, avec Gamerino et leurs dépendances, ainsi que le duché de
:
tants, mais très appréciés de ceux qui en avaient été les témoins,
recommandaient à ses collègues. Pacca, plus connu du monde
diplomatique, eût été facilement accepté par les couronnes. Cappellari
était le candidat préféré des Zelanti. Pendant près de deux semaines,
les deux partis se balancèrent, l'écart des voix entre les deux candi
dats étant à peine de quatre ou cinq voix. Pour en finir, Albani,
dont les relations avec les couronnes étaient connues de tous, se
rangea au parti des Zêlanti. La plupart des cardinaux qui avaient
suivi ses inspirations, l'imitèrent ; et, le i février i83i, jour de la
III
pape.
gre ses soixante-cinq ans révolus, Grégoire XVI n avait point, dans
les traits de son visage, cette fine distinction que respiraient les
physionomies de Léon XII et de Pie VÏII ; et la malice de ses enne-
mis chercha, plus d'une fois, à caricaturer les lignes fortement
accentuées de son visage, ses lèvres légèrement proéminentes, ses
grands yeux noirs, ses sourcils largement arques. Mais, au dire de
tous ceux qui l'approchèrent, l'expression de son âme le transfigu-
rait, aussitôt qu'il avait à remplir une fonction religieuse ou qu'il
entrait en conversation. La majesté recueillie qu'il apportait dans les
cérémonies du culte, la spirituelle honhomie qu'il savait mettre dans
ses entretiens, le ton simple, animé, affectueux par lequel il mettait
à l'aise le plus humble de ses visiteurs, touchèrent lame de plus
d'un hérétique. On remarquait toutefois qu'en présence d'une injus-
tice flagrante, son visage prenait rapidement un air sévère, presque
terrible ; mais cette expression cédait bientôt à son air habituel de
bonté, et il était facile de deviner que le pontife n'avait fait violence
à sa bienveillante nature que pour obéir à un impérieux devoir
de sa conscience *
tion, t. lî, p, 189 190 Mgr Gaume, les Trois Rome, 4^ édition, t. 11, p. i5o
;
D'autre pari, les délicates fonctions qu'il eu* à exercer, soit comme
visiteur cks collèges et universités, soit comme correcteur des livres
comme préfet de Propagande, avaient Ses diverse»
des Eglises orientales, soit la
missioiis.
mis en lumière cet art de manier avec souplesse les hommes et les
choses, que beaucoup d'historiens ont gratuitement dénié à Gré-
goire XVI, mais que l'clude impartiale de sa vie montre avec évi-
dence. C'est lui qiii, sous Léon Xll, fit prévaloir, comme préfet de la
domestique, qui venait prendre ses ordres pour sa table : c Grois-lu que mon
•blomac suit changé parce que je suis pape ? »
I. Voir, plus iiaut, p io4-io5.
a. Gard. ZuRLA, Mtmorie inlomo alla vita ed agli studii dd Padre don Lodovico
iVac/ii, abate camaldolese
3. Los camaldulcs du Mon^Gœlius possèdent encore les manuscrits de plusieurs
des thèses aiors enseignées par Dom Maur Gappellari.
4. Get ouvrage, traduit en français par l'abbé Jammes, se trouve au tome XVI
des Di'inonstrations évangéliques de Migivb.
5. Gf. MoRONi, Di:ionario di eriidizione^ t. XXXII, p. 3i3 et s. Moroui, familier
de Grégoire XVÎ, C5l un témoin exactement informé des événements de son ponti-
ficat. Le tome XXXII, p. 3i3-328, donne une chronologie assez détaillée de ces évé-
nements.
iC8 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
IV
mou-
j^g souverain pontife ne pouvait se faire illusion sur la portée des
vcMicnt rcvo- '^ '^
^
*^
cardinal Bornetti.
Thomas Bernetti, né à Fermo, le 29 décembre 1779, doit être Le caHinal
, , I • 1 i-^ 1 • A, •
1 BcrneUi
place, non loin de Consalvi, son maître, au premier rang des ^^^ nommé
hommes d'Etat qui ont servi l'Eglise au xix* siècle. Après avoir ter- [ro ^orrétaire
miné ses études littéraires et son cours de droit dans sa ville natale,
Grégoire XVI, Conformément aux vues de son conseiller, le pape adressa d'a-
pour
ciômentir
bord un paternel appel à son peuple. Répondant aux calomnies de
les calomnies ceux qui le représentaient comme l'ennemi de tout progrès, il prolesta
de
«es ennemis,
du désir qu'il avait de contribuer au bien-être matériel et spirituel
promet de ses sujets ^. Mais l'émeute s'étendait. Elle avait gagné les villes
et réalise des
réformes d'Imola, de Faenza, de Forli, de Ravenne. Sercognani, parcourant
favorables au les Marches, à la tête d'une armée de 2.000 hommes, adressait aux
bien
de ses sujois.
Romains une proclamation pour les exciter à la révolte. Les deux
fils de la reine Hortense quittaient la Toscane pour se joindre aux
rebelles. Le pape, en vue de prouver à ses sujets que ses promesses
de réforme n'étaient point vaines, et pour répondre à la tactique
1. Bernetti fut créé cardinal par Léon XII le a octobre i8a6 {A. de la /?.,
t. CLVII, p. 133).
2. Maymard, op. cit., p. 343.
3. Lettre apostolique du 9 février i83i, Bernasconi, Acta Gregorii papae XVI^
in-4% Komae, 1901, t. I, p. 1-2. hxRBERi. Bull. Roman, contiimalio, t. XIX, p. i-a
GREGOIRE XVI ET LES ETATS PONTIFICAUX 171
tuer une garde civique. Cet appel ayant reçu un accueil enthousiaste
parmi les populations de la ville de Rome et de la campagne romaine,
un nouvel acte du gouvernement pontifical organisa, le 21 février, la
trône bonapartiste » ^.
les moyens qui étaient en son pouvoir, a reconnu la nécessité d'im- Grégoire W I
demande
le secours dé
i' Au triche.
1, Mettermich, Mémoires^ t. V, p. i53 et »,
3. Barbehi, Bull. Rom., t._XlX, p. a-3.
.
i83i). l'autorité du Saint-Siège fut rétablie dans toutes les provinces. Tout
indique que le prétendu soulèvement populaire avait été le fait de
quelques meneurs habiles et turbulents, trompant les uns par leurs
perfides calomnies, terrorisant lee autres par leurs brutales agressions.
Ces meneurs disparus, tout rentra dans l'ordre. On vit renaître
L'ère des désordres semblait close. Elle Peut été peut-être en Etrange
politique
réalité, si les puissances, fidèles aux règles les plus élémentaires du de l'Autriche
droit public international, s'étaient contentées de protéger Tordre etde la France
à t'égard du
extérieur dans les Etats du Saint-Siège, en s'abslenant de toute ingé- Saint-Siège.
rence dans sa politique intérieure. Malheureusement, on apprit
bientôt que gouvernement de Louis-Philippe et le gouvernement
le Elles
prétendent
de François I" venaient de se m«ttre d'accord pour faire prévaloir intervenir dans
une politique toute différente. Le cabinet de Casimir Périer, qui le gouverne-
ment intérieur
préconisait si fort une politique de non-intervention absolue, préten- de l'Etat
dait intervenir dans les rouages les plus intimes du gouvernement pontifical,
pour y
pontifical; et le cabinet du prince de Metternich, qui professait,
introduire
avec le culte de la papauté, celui des institutions les plus autoritaires des réformes
libérales.
du passé, s'associait aux désirs du gouvernement de Juillet, pour
demander au pape des réformes libérales. Bientôt après, les deux Intervention
de
gouvernements décidaient de réunir, à cet effet, une conférence, à l'Angleterre,
laquelle la France convoquait l'Angleterre protestante, tandis que de la Prusse
et
l'Autriche y appelait la Prusse hérétique et la Russie schismatiquo.
de la Russie.
La conférence projetée s'ouvrit, à Rome même, sous les yeux du
Saint-Père, mais sans sa participation. Quel était le but des souve- Conférence
de Rome.
rains d'Autriche et de Russie en prenant part à une telle démarche ?
Guizot, dans ses Mémoires, conjecture qu'ils « s'y prêtèrent par pru-
dence, dans un moment d'orage, surtout par égard pour la France et
l'Angleterre, dont ils redoutaient l'action libérale et qu'ils espéraient
contenir en ne s*en séparant point *. » Leur attitude, en ce cas,
manquait au moins de fierté. On peut ajouter qu'elle n'était, au
fond, ni habile ni digne, et que, pour ce qui concerne l'Autriche,
elle était suspecte d'une arrière-pensée joséphiste. Le cabinet de
Vienne, lorsqu'il agissait ainsi, prêtait au soupçon de vouloir re-
prendre les pires traditions de Joseph II, en s'ingérant abusivement
dans les affaires du Saint-Siège.
Le Mémorandum rédigé par les plénipotentiaires des cinq puis- Le
Mémorandum
sances -, à l'issue de la conférence de Rome, le 21 mai i83i, ne du 2 1 mars
i83i.
VI
Gravité La situation était des plus critiques. Les armées française et autri-
du coiiûit.
chienne se trouvant en conflit sur le sol pontifical, s'y heurtant peut-
être, ce pouvait être le déchaînement d'une guerre qui, étant donnée
la tension des relations diplomatiques en ce moment, l'entente qui
Grégoire XVI ne lespérait sans doute pas ; car, s'il avait momen-
tanément écarté un danger imminent, les causes profondes de la crise
par tous les signataires, n'en étaient pas moins considérables. D'autre
part, la situation du Saint-Siège, sans véritable armée, sans moyens
importants de défense, offrait aux sectes une occasion favorable de
reprendre leurs complots. Le 22 décembre i83i, les prolégats et les
Lo c^r linal Albani, dont l'énergie et l'expérience des affaires étaient connues,
AiLaiii
est iiomnu' fut nommé commissaire extraordinaire dans les quatre Légations;
commissaire avec les pouvoirs civils et militaires les plus étendus. Les milices
exlraordiiiaire
pour pontificales, précédemment organisées, lui fournirent cinq mille
les I «"rations. hommes ^
; malheureusement leur formation militaire n'était pas
achevée ; leurs cadres laissaient à désirer ; elles apportèrent à leur
action plus d'enthousiasme que de discipline. Arrivées aux frontières
des Légations, elles se heurtèrent à des troupes de paysans, soulevés
parles agents révolutionnaires, qui, avec les grands mots habituels
de liberté, d'indépendance, de haine de l'oppresseur et de l'étranger,
en avaient fait des fanatiques, désespérés et prêts à tout. Le cardinal
Albani s'exagéra t-il le danger ? Des historiens l'ont conjecturé. En
De sa propre tout cas, le péril était réel, et la nécessité de la répression était
initiative,
urgente. Les Autrichiens se tenaient toujours sur les frontières, l'arme
il fait appel
aux au bras. Eux seuls pouvaient apporter un secours immédiat. Albani
Autrichiens.
n'hésita pas. Sans consulter le pape, dont l'intervention personnelle
aurait pu soulever des complications diplomatiques *, il pria le géné-
Grûce à eux, ral Radetzky, commandant en chef de l'armée autrichienne, de lui
l'autorité
envoyer les troupes nécessaires. Tandis que lui-même, à la tête des
pontificale est
rétablie dans milices pontificales, occupait Ferrare, Forli et Ravenne, Radetzky
toutes
s'emparait de Bologne et de toutes les positions abandonnées six
les provinces
(fin janvier mois auparavant. Aux derniers jours de janvier 1882, l'autorité du
i832).
Saint-Siège était rétablie dans toutes les provinces.
Irritation du L'émoi fut grand en France. Ainsi les grands efforts faits par la
gouvernement
français.
diplomatie de Casimir Périer pour écarter l'Autriche de l'Italie et
cardinal Albani d'appeler les troupes autrichiennes avant d'avoir sondé les intentions
dre Sa Sainteté, j'acquiers de plus en plus la conviction qu'il a agi ainsi non seule-
ment à cause de l'urgence des circonstances, mais aussi pour prévenir toutes les
difficultés diplomatiques possibles, n
GRÉGOIRE XVI ET LES ETATS PONTIFICAUX I79
douleurs des Italiens, les excès des soldats du pape, la rentrée des
les uns, par une combinaison habilement calculée, prétendent les (féviier i83a).
autres, tandis que le général Cubières fut retardé dans son voyage par
des vents contraires, l'escadre fit la traversée avec une extraordi-
naire célérité. Pendant qu'à Rome le comte de Saint-Aulaire cher-
chait à faire accepter au cardinal Bernetti une occupation militaire
simultanée de l'Autriche et de la France, et avant même que le géné-
ral Cubières eût débarqué en Italie, la flottille fraivçaise paraissait en
vue d' Ancône. C'était'le 22 février 1882. a Le commandant Gallois
et le colonel Combes, écrit un historien particulièrement informé de
ces événements, se trouvèrent dans un extrême embarras. Ils avaient-
reçu l'ordre formel de ne rien faire sans avoir reçu les ordres de
l'ambassadeur de France. Personne, ni à Ancône ni à Rome, ne les
Emotion des Le pape ne fut pas seul à protester. A la cour de Vienne, on dé-
chancelleries
européennes.
clara que l'occupation d'Ancône était une affaire européenne. Metter-
nich écrivit gouvernement français veut la guerre, il aurait
: « Si le
Protestation tort de commencer par le pape o 3. La cour de Londres elle-même
•du pape.
fit entendre des observations à la cour de Paris. Mais il fut visible
que cette dernière protestation, celle même que le pape notifia aux
puissances, visait moins le fait de l'occupation française que la
I. M. DB
Ba^kiiïte, Notice sur M. le comte de Saint-Aulaire, p. ii4.
a Guizot, Mémoires, t. Y, p. 2^g.
'. Metternich, Mémoires, t. V, lettre du 39 février au comte Apponj^i,
eRfîGOinE XVI ET LES ÉTATS POriTIFTCAUX i8i
vn
'ijès Euts^'
avoir trompé plusieurs historiens sur le caractère de ce pape. Sa pontificaux,
Grégoire XVI vait-il à son ambassadeur à Rome, ne sait pas gouverner *... Le gou-
admiaistrateur
par le prince
vernement pontifical appartient à la catégorie de ceux qui sont le
de Melternich. moins capables de gouverner 2. » Metternich, qui cherchait à substi-
tuer l'influence autrichienne à l'influence pontificale en Italie, avait
Injustice un intérêt politique à parler ainsi. Son jugement malheureusement
a
de ce
jugement. été partagé par des historiens réputés pour la mesure de leurs appré-
ciations 3. Il est démenti par l'examen attentif de la correspondance de
ce pontife et de ses actes. Conservateur décidé, plus porté vers la
tradition que vers la nouveauté, Grégoire XVI fut, en même temps,
un esprit juste, prudent modéré. Son gouvernement intérieur en
et
rait sur toutes les affaires. Celles qui touchaient aux finances locales
se décidaient à la majorité des voix. Pour celles qui touchaient à l'ad-
ministration générale, la congrégation governatlve n'avait que voix
consultative ; mais les avis de ses membres, quand ils étaient con-
Le conseil
le nombre des membres de ces conseils était proportionné à la popu-
provincial.
lation des provinces. Aucun ne pouvait être composé de moins de
dix membres. Les conseillers étaient nommés par le souverain, mais
sur une liste de candidats présentés en nombre triple par des élec-
teurs choisis librement parles conseils municipaux.
Ses
« Les conseils provinciaux réglaient le budget, approuvaient les atlrii>utioni.
comptes des dépenses de la province, faisaient la répartition des
impôts entre les districts, ordonnaient les travaux publics, en adop-
taient les plans, et en faisaient suivre l'exécution par des ingénieurs
l8/i HTSTOinE GÉNr^RALE DK l'ÉOMSE
cipes analogues,
,
i»i''«i
ladmmistration des communes,
m
loutes recevaient
des conseils municipaux de quarante-hui4;, trente six et vingt-quatre
Le consew membres. Ce dernier nombre s'appliquait aux villes d'une popula-
municipal, . , -n i i
'
t i i •
i -n .
même esprit que cet édit du 5 juillet sur la réforme de l'ordre admi-
nistratif. Un règlement organique de la justice civile parut le 5 oc-
tobre, et fut suivi, le 3i du même mois, d'un autre édit beaucoup
plus développé, qui établissait sur des bases toutes nouvelles l'instruc-
tion des affaires criminelles, In hiérarchie et la compétence des tribu-
GREGOIRE XVI ET LES ETATS POTïTIFIGAUX i85
»aux. Ces deux actes législalifs, les plus importants du pontificat 'le
civiles, qui furent toutes renvoyées à leurs juges naturels dans l'or-
dre établi par le droit commun. îl supprima pareillement les tribu-
de la métropole.
u Les tribunaux de province, à tous les degrés de juridiction, n'é-
taient composés que de laïques.
L'organisation « A Rome etComarque, l'administration de la justice ne
dans la
judiciaire
à Rome. recevait pas des améliorations moins importantes. Par le règlement
organique du 5 octobre i83i, douze juridictions, composées unique-
ment de prélats, étaient supprimées. Il ne restait plus en exercice
que le tribunal du Capitole, celui de l'A. G. (ainsi nommé par con-
traction de Auditor Camerae) tX celui de la Rote.
Le tribunal Le tribunal du Capitole, magistrature municipale, était présidé
«
du Capitule.
par le sénateur de Rome et composé de trois avocats. Il jugeait
cumulativement, en première instance, avec le tribunal de l'A. C,
toutes les causes où des laïques étaient intéressés. Le demandeur
pouvait, à son choix, porter sa cause devant l'une ou l'autre juridic-
Le tribunal tion. Le tribunal de l'A. C. était composé de cinq avocats et de trois
de VAuditor
camerae. prélats, divisés en deux sections. L'appel au premier degré était
porté de l'une à l'autre. Si les jugements étaient conformes, il n'y
GREGOIRE XVI ET LES ETATS PO.'fTIFICAUX 187
judiciaires favorables à la liberté ; et, sur ces trois points, les édits
pontificaux donnaient plus que les puissances n'avaient dû espérer
après le refus du pape de prendre aucun engagement envers elles. * »
YUI
R en fut de même dans l'ordre financier. Sans accepter les injonc- Réformes
financières.
tions du Mémorandum, Grégoire XVI, de sa propre initiative, réa-
lisa, par l'établissement du bon ordre dans les finances de ses Etats,
des réformes plus efficaces que celles que lui demandaient les puis-
sances. Celles-ci réclamaient la convocation à Rome d'une junte
centrale. Par un édit du 21 novembre i83i, il institua une commis- Institution
Réformes Les agitations dont les Etats pontificaux furent le théâtre, obli-
militaires.
gèrent Grégoire XVI à s'occuper d'organisation militaire; et, dans
cette branche du gouvernement, comme dans celle de l'ordre admi-
nistratif, de l'ordre judiciaire et de l'ordre financier, il révéla des
Institution
d'un corps
qualités d homme d'Etat prévoyant et attentif. Il institua im corps
de volontaires de volontaires destinés à maintenir l'ordre dans les Légations et dans
pontificaux.
les Marches. Les membres de cette nouvelle milice s'engageaient par
•erment à défendre le Saint-Siège jusqu'à l'effusion de leur sang et
utiles au bien être matériel et moral de ses sujets. Ceux qui taxent
ques inondations ;
qu'il avait achevé de régulariser le Corso, entre-
pris les fouilles du Forum, poursuivi l'embellissement du Pincio et la
haut ; fonda des écoles du soir pour les apprentis et les ouvriers ;
favorise le
'^® progrès des sciences, des lettres et des arts ne laissa pas indiffé-
œouvemeni rent Grégoire XVI. Si les universités romaines durent interrompre
inte eciuel.
j^^j,g cours pendant les troubles de i83i et i832, elles furent rou-
vertes à l'automne de i833, et de savants maîtres furent appelés à y
enseigner. Sous se» auspices, l'Académie des Arcades et celle dei
de chemins de fer dam ses Etats ; a<* d'avoir favorisé le rapide enrichissement de la
famille Torlonia au détriment du trésor public ; 3" d'avoir interdit à ses sujets la
participation aux congrès scientifiques. Le premier reproche n'est pas sans quelque
fondement. Comme beaucoup dé ses contemporains, Grégoire XVÏ concevait quel-
que méfiance à l'égard du nouveau mode de locomotion il craignait surtout qu'il ;
me devînt, dans ses Etats, un agent très actif de la Révolution cosmopolite. Mais
son appréhension n'était nullement inspirée par une opposition de parti pris au
progrès matériel. Il adopta avec empressement les bateaux à vapeur, voyant dans leur
découverte un moyen très puissant de servir les intérêts commerciaux et moraux de
'l'aaicien et du nouveau monde (Sylvah*, p. 2^6). Quant à l'enrichissement de la
famille Torlonia, on ne saurait en faire un grief à l'administration de Grégoire XV,
En prenant possession du Saint-Siège, ce pontife trouva l'administration des tabac»
dans un état déplorable. Les" dilapidations et les abus de toutes sortes étaient sans
nombre. Dans l'impossibilité d'y remédier par lui-même au milieu des soucis que
lui donnait la révolte d'une partie de ses Etats, Grégoire XVI prit le parti de
mettre cette administration aux enchères. La famille Torlonia, ayant obtenu la
concession par les voies les plus régulières, y fit de grands profits, mais sans priver
le trésor d'aucune de ses ressources ordinaires. Enfin l'interdiction faite par le pape
à ses sujets de prendre part à divers congrès scientifiques ou littéraires, s'expliquait
par ce fait que ces congrès n'étaient que de» moyens habilement imaginés pour
propager en les dissimulant les doctrines révolutionnaires des sociétés secrèlei
^oTLVAiw, a55-a56).
GRÉGOIIŒ XVI ET LES ETATS PONTIFICAUX IQI
que, dans son palais même, son fidèle serviteur Moroni rédigeait cet
important Dizionario di erudizione dont les trois cents volumes nous
donnent, non seulement le résultat d'immenses recherches, mais
encore des détails précieux sur les institutions romaines au temps de
Grégoire XYI et sur la personne du pontife *. Nous aurons l'occa-
sion de revenir sur ces travaux en faisant l'histoire du mouvement
nements et son intervention dans les grandes querelles qui les agi-
taient au lendemain de la Révolution de i83o, va nous le montrer
aux prises avec des problèmes semblables sur un plus vaste théâtre.
I. Notamment t. XXXII, p. Sia-SaS, au mot Gregorio XVI. Voir aussi les mots
Ferrara^ Forli^ sur les révolutions dans les Etats pontificaux.
CHAPITRE V
(i83i-i846).
Politique
extérieure du
Si délicates que fussent les questions de politique intérieures sou-
Saint-Siège. levées par le gouvernement de l'Etat pontifical, les relations axec les
divers Etats de l'Europe offraient à Grégoire XV] des difficultés plus
Premier
ardues. L'Autriche et les puissances catholiques qui gravitaient dans
problème :
quelle sera son orbite, telles que l'Espagne elle Portugal, représentaient la tra-
1 altitude du
Saint-Siège
dition, Tordre, l'autorité, la protection officielle du Saint-Siège ;
vis-à-vis mais leurs intentions étaient parfois gênantes, et leurs services indis-
des gouver-
nements
crets. La Belgique, l'Irlande, la Pologne avaient fièrement combattu
issus des pour leur foi catholique, mais en s'attaquant à des autorités réputées
révolutions
récentes ?
légitimes, en invoquant des formules qui semblaient équivoques,
en acceptant des alliances qui paraissaient compromettantes. De
Deuxième
problème :
pareilles causes d'anxiété se présentaient, d'autre part, quand on pré-
quelle sera tait l'oreille aux ardentes polémiques qui passionnaient la jeunesse
l'altitude du
Saint-Siège
d'alors. INul ne défendait avec plus d'intrépidité les droits de la
des hommes
mais nul ne se montrait plus complaisant pour les libertés moder-
qui, tout en
.défendant nes, pour les formules sonores qui séduisent les masses, pour les
avec ardeur
son autorité
réclamations des peuples contre les entreprises des rois. Que, dans
suprême, des questions si complexes et dans des conflits si passionnés, Gré-
favorisent les
goire XVI, obéissant a la tendance profondément conservatrice qui
mouvements
populaires était dans sa nature et qu'il croyait être dans son devoir, n'ait pas su
contre les
discerner toujours toutes les nuances d'un problème, que tel asp(ct
anciennes
monarchies ? d'une situation politique lui ait parfois échappé, et qu'il n'ait | a»
toujours su se garder, dans les formules de ses décisions, d'une viva-
cité qui fut douloureuse à ceux qu'il eut à frapper : qui oserait, eu
égard aux circonstances que nous venons de rappeler, lui en faire un
crime ? Mais que sa conduite gé';érale ait été, comme l'ont trop sou-
inspirée par une passion mal contenue, par une farouche inlransi-
'reance ou par une excessive étroitesse d'esprit, c'est une
calomnie que
siarum, Grégoire XVI décida que, dans les cas de « changements (7 ^^"^^ ^^^^•
de gouvernements » et de u vicissitudes des Etals », ci les pontifes ,,
roniams entreraient en rapports d affaires, pour les Eglises de ces ^ue ic pane
contrées, spécialement pour la nomination des *ui-rera
évèques,
^ avec ceux
en pourjiarlen
qui seraient, de ,
tait, en possession du pouvoir » ; mais il serait ivec les
Uùl. gOn. de l'Kgli ,'. u
194 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGMSB
doua Maria da Gloria, âgée de sept ans, et confia la régence à son frère
cadet dom Miguel, à qui il promit la main de la jeune reine. Cette
combinaison parut d'abord acceptée par dom Miguel ; mais un pa^ii,
dont la reine mère, dona Joachine, était l'âme, déclara formelle-
ment la repousser. Dom Miguel, disait-on, a droit à la couronne
comme successeur légitime et direct de son père, en vertu des
antiques lois du royaume, lesquelles ont établi qu'aucun étranger
ne pourra régner en Portugal ^. Etranger, Pedro l'est devenu en
acceptant la couronne du Brésil, qui s'est séparé du Portugal. Per-
dant ses droits, il ne peut les transmettre à personne. Au fond, ce
par Grégoire XVI s'appuyait sur des précédents. Les papes Clément Y, Jean XXII,
Pie II et Clément XI s'en étaient inspirés dans des actes que rappelle la bulle
Solliciludo Ecclesiarum. -r- Il est inutile de faire remarquer que la doctrine ici pro-
clamée par Grégoire XVI n'a rien de commun avec la fameuse théerie des « faits
accomplis», dont Pie IX devait condamner la formule dans la 6ie proposition du
Syllabus « Une injustice de fait couronnée de succès ne porte aucune atteinte à U
:
sainteté du droit ».
2. Wiseman, Souvenirs..., p. ^ol^.
3 Une vieille tradition rapporte qu'en iiSq, A^bonse l" ayant «té élu roi par
ses soldats sur le champ de bataille d'Ourique après une brillante victoire sur les
Maures, les trois ordres du royaume en racclaraant et l'archevêque de Braga en le
couronnant, avaient décidé, au nom du peuple, au nom du roi et au nom de Dieu,
que jamais un étranger ne deviendrait seigneur du royaume. C'était là, disait on,
le uucte fondamental de la monarchie portugaise.
l'église EPf PORTUGAL, ESPAG!<E, RUSSIE, SUISSE ET ITALIE IQS
qui rendait l'opposition des deux partis irréductible, c'est que dom Le conflit
Jean, son mari, pendant tout le temps de son règne, avait eu pour
cause l'acceptation par celui-ci d'une constitution, et dom Miguel
constamment montré favorable aux idées de sa mère. Le conflit
s'était
régime constilulionnel.
Conformément à la règle de conduite qu'il s'était tracée, et malgré Grégoire W'I
entre
les réclamations des pédristes, Grégoire XVI accepta d'entrercn en relations
relations diplomatiques avec dom Miguel et poursuivit des négocia- diplomatiques
avec
tions avec son gouvernement tant que le fils cadet de Jean VI occupa dom MigueL
efl'ectivement le .trône de Portugal. Mais dom Pedro, appuyé par
l'Angleterre et par la France, réussit à chasser son frère
du roy;4ume
et à (ransmcllre la couronne à sa fille dona Maria. Le 26 mai i834.
dom Mi-uel, vaincu et découragé, s'engagea, moyennant une pension
196 HISTOIRE GENERALE DE L ÉGLISB
Le 1*"^
août i834, le pape renouvela ses protestations, et menaça le
Une escadre française força l'entrée du Tage, captura la flotte portugaise, bloqua
Lisbonne et força Miguel à accorder toutes les réparations exigées par le gouverne-
ment français (juillet i83i). Le caractère impérieux et dur de dom Miguel n'est pas
contestable ; mais la baine des sectes a noirci à plaisir la mémoire de ce prince, et
les appréciations de la presse libérale sur sa personne et sur ses actes doivent itr«
contrôlées avec attention.
3. BARBERi,t. XIX, p. 276-277; RosKovANT, MonumeTitt cathoUca pro independen-
tia poteslatis ecclesiasdcae, 2 vol. in 80, Quinaue-Ecciesiis, 1847, t. II, p. 336-34o,
PORTUGAL, ESPAGNE, RUSSIE, SUISSE ET ITALIE I97
l'ÉGMSE E?I
en un concordai,
en obtenir des dispenses. Les négociations furent reprises, et,
IT
(1 une crise
.
, . , 1 T^
semolable en Lspagne. La aussi, absolutisto.s
T . -Il- et
.
consti-
'•
d'î^spagnt.
léguant sa couronne à sa fille Isabelle, âgée de trois ans et placée entre Marie-
sous la tutelle de la reine mère Marie-Christine. Don Carlos, frère Chrisiine
d'envo)er à ur. prince catholique, ^'oir Gosculbr, Dict. Je (héol. au mot Hosc dor.
198 HFTOIRE GENERALE DE L ECI TSE
(îouverne-
ment
encourues ^ La chute d'Esparlero en 1 8^3, k proclamation de la
m
/*(Ta-ros
Moins complexe dans ses causes, mais plus aiguë dans ses ma-ni-
de lologne. r • f •
i
lesta tions, était la crise politique et religieuse
•
i- •
i- •
qui
... agitait toujours et
Grégoire XVl crut devoir céder aux instances du gouvernement Grégoire XVI
Ti 1 1 r 1 • 1 ., u* 1 r 1 recommande
russe. 11 adressa au cierge polonais une Lettre encychque, datée du ^^^ Polonais
sans traiter aucune autre question, soumission
9 juin i832 où
2, il lui rappelait, ia
Réponse « C'cst le clergé, disait le ministre russe, qui, par sa conduite cou-
hau laine de ,
.
w i
• / i
. , .
la chancellerie pable et ingrate, a décline le pacte qui lui assurait la jouissance pai-
russe. sible des bienfaits qui en découlaient... Le gouvernement rentre
dans le plein exercice de ses droits de vainqueur... C'est à lui seul
qu'il appartient de prononcer sur les moyens qu'il jugera les plus
efficaces pour prévenir de nouveaux désordres » ^.
fide...
« Un Anglais, qui se trouvait dans une partie du palais que le visi- Caractère
de
teur impérial traversa au retour de son entrevue, décrivit l'appa-
cette enlrerut.
rence altérée du monarque, fsicolas, en entrant, avait déployé la
était bien cet aigle impérial, « aux plumes unies et au regard per-
çant », dans toute la force d'un bec et de serres auxquels jamais
proie n'avait résisté. Il retourna, la tête découverte, les cheveux en
désordre, l'oeil hagard, le teint pâle, comme si, pendant cette heure,
il avait souffert tous les maux d'une fièvre prolongée. Il n'attendit
pas que sa voiture vînt se placer au bas du perron. Il s'élança dans la
cour intérieure, et se fit éloigner au plus vite de ce théâtre d'une
défaite évidente. C'était l'aigle arraché de son aire ; ses plumes étaient
froissées, et son œil éteint par une puissance méprisée jusqu'a-
lors. » 2
les lois avaient été appliquées ; et il lui avait remis un écrit clans
lequel toutes ces choses se trouvaient appuyées de pièces justifica-
tives. Nicolas était sorti en promettant qu'il supprimerait tous les
abus dont il prendrait connaissance ; et sans doute faut-il attribuer
Ses à cette entrevue l'origine d« concordat que le tsar signa, le 3 août
conséquences.
1847, ^^^^ ^^ successeur de Grégoire XYI. Quoi qu'il en soit, la
IV
Conflit Une des décisions les plus sages du congrès de Vienne avait été
politique entre
^j'as^^u^er l:i neutralité de ki République helvétique, en lui rendant,
I. Un
des épisodes les plus émouvants de la persécution des catholiques polonais
i>ar le gouvernement russe, est l'histoire des odieux traitements inflij,'('!S aux reli-
gieiises basiliennes de Minsk. Voir Martyre de sœur Irena Macrina Mieczysloska et
de ses compagnes en Pologne, 4' édit., Paris, Gaume frères, i846.
L ÉGr.lSE EN i'OH riJGAL, ESPAGNE, RUSSIE, SUISSE ET ITALIE 200
qui, le i5 avril de cette année, créa à Berne une alliance cosmopolite en faveur du
parti radical.
sous le nom de Jeune Europe. Celte alliance centralisait les efforts de
plusieurs sociétés particulières, confédérées entre elles : la Jeune Italie,
Il )' cul plus tard la Jeune France, la Jeune Pologne, la Jeune Espagne.
I.
projet de revi-
et protestante de la diète de gouverner l'administration civile et
sion du pacte religieuse de chaque canton, était, nous l'avons vu, le premier article
fédéral (i833).
du programme du parti radical. Il fit appel, pour la préparer, à la
en France, en 1818, d'un traité de droit pénal qui lui avait valu la
Deuxième Mais la secte qui avait, dans cette affaire, directement visé le catho-
incident ;
licisme, ne se tint pas
pour battue. Le 20 janvier i83/i, des délé-
conférence
de Baden gués des cantons de Berne, de Lucerne, de Soleure, de Thurgovie,
{i834).
de Bâle-Gampagne, de Saint-Gallet (t'Argovie, se réunirent à Baden.
Le président de la réunion, Edouard Priffer, déclara, dans son dis-
cours d'ouverture, que la Suisse devait être indépendante en matière
de religion comme elle l'était en politique. Puis il proposa les
mesures qui devaient, selon lui, assurer cette indépendance. Le résul-
Les quatorze tat de la conférence de Baden fut le vote de quatorze articles, dont
articîes
l'un mettait a les assemblées synodales sous la surveillance du gou-
de Baden.
vernement »), dont un autre « soumettait les publications et les actes
àc l'autorité ecclésiastique au placet de l'autorité civile », dont un
troisième déclarait les ecclésiastiques a tenus, non seulement à ne
faire aucun cas de tout ce qui serait contraire aux présentes dispo-
iiltions, mais, de plus, de le dénoncer à l'autorité respective ». La
conférence prétendait aussi obliger les prêtres catholiques à bénir
Ils constituent les mariages mixtes, s'engageaità diminuer le nombre des fêtes et des
une sorte
de Constitu- jours de jeûoe, soumettait à une approbation gouvernementale les
tion civile règlements intérieurs des séminaires et des couvents. Les quatorze
du clergé.
articles de Baden rappelaient, en un mot, la Constitution civile du
clergé de France.
Condamnation Le 17 mai i835, Grégoire XVI condamna les quatorze articles
des quatorze
articles par de Baden par une Lettre aux évêques et aux fidèles de Suisse ^ Il
Grégoire Wl dénonça « les hommes méchants qui, disait-il, sous le masque impos-
(17 mai i835).
teur de l'intérêt publia, faisaient passer en lois des doctrines per-
verses et erronées ». Les radicaux répondirent à cette condamnation
en expulsant de Lucerne, le 4 novembre i835, le nonce aposto-
Persécution lique, Mgr de Angelis, en fermant des écoles catholiques et des novi-
des
catLoiiques. ciats, en tracassant les communautés religieuses par des inventaires
répétés et des visites incessantes, en multipliant les écoles protes-
tantes, en donnant une chaire de théologie au professeur allemand
Strauss, fameux par ses attaques contre la di\initc de Jésus-Christ.
Le i*"" avril i842, Grégoire XVI protesta publiquement contre ces Energique*
prolcstation»
nouveaux attentats, dcQlara nulles de droit toutes les mesures prises (lu pape.
contre les lois de l'Eglise, et exhorta les catholiques à résister à ces
tentatives criminelles*.
L'appel du pontife fut entendu. Les catholiques suisses prirent
vrai, pour obtenir que les jésuites déclinassent la mission qu'on vou-
lait leur confier^. L'avis de Leu prévalut. Le rappel des jésuites fut
voté en i844.
Troisième Les radicaux, exaspérés, répondirent par la violence à ce qu'ils
incident coup
:
i> ^ wr •
r ^ i. • •
t i a tt
de force du appelèrent c« un detijetéa 1 opmion protestante et radicale^ ». un
parti radical coup de force, tenté, en février i845, contre le gouvernement con-
contre le ,
i xr i r i •
i i ^ i» t -
politique ne
... un
s était ainsi
historien a
montre
pu
a
,
dire
,
que brigandage
«
i% ». a
nu dans un pays civilisé* Au
jamais
-
le
-y
(février 1 845). mois de mars, les Lucernois, attaqués par une armée de huit mille
hommes, brisèrent leur assaut avec un effectif bien moins nom-
breux. Mais les bandes des factieux, protégées par les autorites
Assassinat radicales, répandaient partout la terreur. Meyer échappa à graud'-
de Joseph Leu .
i a i
. , . ,.
i t i t »
(20 juillet peine aux embûches qui lui turent tendues. Joseph Leu n eut pas
i845). la même chance. Le 20 juillet i845, il fut tué traîtreusement dans
son lit, d'un coup de fusil.
Quatrième Les cantons catholiques pensèrent qne l'heure était venue de s'or-
aux
,.
traditions
. 110-
de buisse.
la
r
Les radi-
j-
de la Suisse ^aux en avaient donné plusieurs fois l'exemple. Ces derniers n'en
i8/j5). crièrent pas moins à la violation du pacte fédéral ; mais l'énergie
qu'ils déployèrent, les moyens qu'ils mirent en œuvre pour combattre
la nouvelle confédération, prouvèrent qu'ils ne se faisaient pas
VI
nord, les Etals sardes, replacés sous l'antique autorité de la maison de Savoie, cl
agrandis de l'ancienne république de Gênes au sud, le rojraume des Deux-Siciles,
;
Sa méthode : Pour parvenir au régime idéal qu'il rêvait, Mazziai préconisait un©
l'éducrtion
niélliode toute différente de oelle qu'avaient employée les révolu-
et par tionnaircs qui l'avaient précédé en Italie. Jusque là, les mécontents
msurrecuou.
j^yaient organisé des sociétés secrètes, dont les projets formaient un
mystère pour les populations indifférentes. A. leur tactique, Mazzini
voulut substituer le soulèvement de tout un peuple, conscient de sa
force et de ses droits. « Les moyens dont la Jeune Italie compte
se servir pour atteindre son but, disait il, sont l'éducation et l'in-
loi (le Dieu sur la terre ^. Le Christ est un saint, dont la voi^ a été
l'unité
jusqu'au bout. Dans son livre Dêl primato d'Italia^ publié en de l'Italie ok
iS^o, il n'exaltait pas moins que le maître, k primauté de sa patrie son hégémonit
sur le monde
pa*mi les peuples, mais il voyait la condition de cette primauté
sous le
dans la papauté, protectrice antique de la nation, et, ajoutait-il, « de protectorat
du pape.
nos jours asile inviolable de tolérance civile et d'hospitalité géné-
reuse, ouvert* à tous les hommes honorables, surtout s'ils sont
malheureux, quel que soit leur culte »,
VII
de l'Italie. Ilalie et dans les sociétés similaires, une « loi du secret » plus stricte
encore que celle des conspirateurs de 1820. «Ceux qui n'obéiront
poiut aux ordres de la société, disait l'article 3o du règlement de la
Jeune Ilalie, ceux qui en dévoileront les synthèses, seront poi-
gnardés sans rémission *. » D'ailleurs Jeune Italie et carbonarisme
lienne ^.
reproches de fougue excessive dans sa polémique et, partant, d'injus- ^ ^^^ °wj.
tice dans quelques-unes de ses appréciations. Mais, somme toute, ses secrètes,
deux œuvres capitales avaient, dans leur ensemble, rendu des services
à la cause de l'Eglise et de la conservation sociale ^ ; et puis il était
religion II n'^ revint qu'au moment de sa mort. Voir Mavsa.rd, J. Grétineau- JoIy,
un vol. in-S", Paris, 1875.
4. iMiïNARD, Crclineau-Joly^ p. 34o.
2 1 6 HISTOIRE GÉNÉRALE DE i/ÉGLISE
les associations les associations pieuses ayant pour but le développement de la foi ou
ayant pour
j^ pratique de la charité. Il enrichit de faveurs spirituelles les deux
Vérone et à Venise K
Parmi les œuvres que Grégoire XVI bénit et approuva, il en est
deux qui, par l'intérêt particulier que leur témoigna le pontife, par le
l'héritier par la mort de son père, pour y mener une vie de prière,
d'étude et de bonnes œuvres. Il avait pris pour devise ces trois
mots : Adorare, tacere, gaudere, et n'avait pas voulu que les popu-
lations des environs, au milieu desquelles il prodiguait ses charités,
le connussent par un autre nom que celui de don Antonio. Une
pieuse chrétienne, la marquise Madeleine Canossa, fondatrice d'une
association charitable dont faisait partie la sœur du jeune prêtre,
Marguerite Rosmini, l'aidait dans ses œuvres de bienfaisance. Deux Affectueux
iniéréi
sentiments profonds unissaient l'abbé dom Maur Cappellari et Don
A .f' n c" '
que lui porte
Antonio: c étaient un grand dévouement au Saint-Sicge et un grand Grégaire XVI
de la Charité, approuva, sans une seule modilication, les règles qui lui avaient ete
soumises ^.
Ses erreurs, pl^s pur, mais S Orientant, pour reiuter plus directement les erreurs
modernes, dans des voies non encore frayées, ne devait pas échapper
aux condamnations de l'Eglise. Un décret du Saint- Office, du i4 dé-
cembre 1887, censura quarante propositions extraites de ses ouvrages
> r
L EGLISE EN PORTUGAL, ESPAGNE, RUSSIE, SUISSE ET ITAI-IK :2
1
des Frères de la Charité et celui des Sœurs de la Providence. Les Les Frères
Frères de la Charité devaient avoir pour but, « tout d'abord leur delà Charité,
propre sanctification, et, par le moyen de cette sanctification, toutes
les œuvres quelconques de charité, avant tout, celles qui ont pour
objet le salut éternel des âmes » ^. La souplesse de ce but devait
permettre à la Société de s'adapter, suivant les circonstances, aux
besoins des temps et des lieux. Le pieux fondateur avait voulu intro-
duire, dans l'organisation de sa Société, une plasticité pareille. Caradèro
^j. T • • original
Vivant en commun comme 1
des religieux, pratiquant comme eux jg i^ nouveiia
une stricte pauvreté dans leur manière de vivre ^, les Frères de la fondation.
français, 3 vol. inrSo, Paris, 1888 Trlllet. Examen des doctrines de Rosmini, trad;
;
SUve.tre de Sacy, un vol. in-80, Paris, 1898 Dullelin critique, t. XIV, 1698; ;
rieur. Les succès qu'elles obtinrent dans les diverses œuvres qui leur
furent confiées, notamment dans l'éducation des jeunes filles, fit de-
mander de tous côtés les maesire rosminiane^ comme on les appela.
GRÉGOIRE XVI.
l'église en ANGLETERRE, EN ALLEMAGNE ET EN FRANCE
(i88i-i846).
O'ConnoU uhésila pas ; et les succès qu'il obtint pendant les dix-
sept années qu'il passa à la Chambre des Communes justilicrent son
audace.
S;i ctmpaijnc ^ieu que l'émaucipation des catholiques eût été accordée par les
(»ohtimu> O'Connell se rangea résolument du côté des
tories. ^vhii:s. Ceux-ci
demandaient alors une reforme électorale, et avaient besom, pour
vaincre au parlement leurs advei^saires, de l'appoint des voix irlan-
daises. Cet appoint. O'Connell le leur otTrait. 11 pouvait, eu retour,
leur demander dos engagements favorables aux catholiques ~. Les
tories d'ailleurs, conservateurs de l'état de choses existant, se posiiieut
nettement comme les délenseui*s de « l'Eglise établie j>.
sance. La lultc qu'il soutint, pendant les onze jours que dura la
les sarcasmes, qui soulevaient naguère les foules de ses compatriotes. parlcaicuUire.
Le discours qu'il improvise le 5 février i833 est, au jugement de
Micbelet, le plus vibrant morceau d'éloquence que l'Europe ait
cinq cent mille hommes, décidés à donner leur vie pour leur pays.
Le gouvernement anglais le fit arrêter, condamner, emprisonner
Emprisonne- comme coupable de conspiration. Mais la Chambre des Lords, en
ment
et libération septembre i8/^/i, cassa la sentence du tribunal et rendit la liberté à
de O'Connell. En même temps, le cabinet tory n'osait pas exécuter ses
r «agitateur».
menaces. A la fin de i842, Robert Peel, en frappant l'Angleterre de
V income-tax n'osa pas imposer ce fardeau
, à l'Irlande. L'année sui-
vante il déclarait « être décidé à tout faire pour le bien des Irlan-
dais ». Quant à O'Connell, dans sa foi profonde, il écrivait: « La
main de l'homme n'est pas là dedans. C'est la Providence qui
répond aux prières du fidèle peuple d'Irlande. »
Les amertumes
Les grandes manifestations populaires dont l'agitateur fut l'objet
de
ses dernières après sa libération, furent ses derniers triomphes ; car ce grand chré-
années. suivant les expressions de Lacordaire, que Dieu
tien « mérita, le
exagérés dont nous avons fait mention, et qui voulaient conquérir la Le groupe
II
conservateur
agir ainsi que par leur peu de zèle à l'égard de la religion nationale ; en Angleterre
129 i3o.
2. Ilnd., p.
3. Abbé de Madauxe, Ignaoe Spencer et la renaisiame diÀCÇ^ihil. *n Angleterre, on
Vol. in-8j, Paris, 1875, p. i55 et s.
ti. Thurbau-Dangin, op. eh.j p. 58-i33.
5. /6(c/.,p: i38.
l'église en ANGLETERRE, EN ALLEMAGNE ET EN FRANCE 229
Cependant Newman restait fixé dans sa Via média, et son influence NcAvman
commence à
ne faisait que grandir. Quand on demandait à l'un des esprits les
se méfier de la
I, Wilfrid Ward, le cardinal Wiseman, sa vie et son temps, trad. Cardon, a vol.
în-ia. Paris, if)oo.
a. Nfwman, Ilist. de mes opinions religieuses, Irad. du Pré de Saint-Maur, un vol.
in-ia, Paris, 18O6, p. i83-i83.
23o HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
III
I. Newuan, Hist. dudével. de la doci. chrét., trad. Gondon, un vol. in-8o, Paris,
1849.
a. Parmi ouvrages catholiques de Faber, on doit citer
les Tout pour Jésus, le
:
nique était justement célèbre, et l'historien John Lingard, dont ÏHistoire d'Angle-
terre,publiée en 6 volumes, était appréciée des protestants eux-mêmes.
3. Gladstone, Life of Bishops Wilberforce, t. i, p. 3a8, lettre du 10
décembre
'
»845. , ,. ,
Pic Vin.
La cour de Berlin qui, à la réception du Bref Lltleris de Pie VIII, Suite
de l'affaire
condamnant ses prétentions, n'avait rien trouvé de mieux à faire des « mariagef
que de cacher le document au public et d'essayer de faire Hécbir le mixtes n.
L "b**^ hini
CCS artificieuses combinaisons, Lambruschini, ayant eu vent de ses
menées, lui demanda des explications. Le diplomate prussien paya
d'audace. Il poussa de hauts cris quand on lui parla de la conven-
tion de juin i83/|, disant d'abord qu'une pareille convention était
par une équivoque. Ils avaient bien, répondirent-ils, conclu une de Cologne.
IV
ment des monastères avait formé le mâle courage des Athanase et des
Grégoire VII, et que la piété, qui incline les âmes vers les misères
des faibles, les aide à se redresser contre les menaces des forts. Dans
la question de l'hermésianisme et dans celle des mariages mixtes,
Dropte-Vischering ne tarda pas à se révéler comme étant de la race
des plus intrépides champions de l'Eglise.
Il peut sembler étrange, au premier abord, de considérer comme
de grands épisodes de l'histoire ecclésiastique les conflits qui s'éle-
portée de ces luttes qu'en les considérant dans leurs relations avec la
politique générale de l'Allemagne à cette époque.
Dès i835, Exercer sur le monde une domination politique, intellectuelle et
rAlIemagne
rêve d'exercer religieuse : tel avait été, depuis longtemps, le rêve de plusieurs
une hommes d'Etat de la Germanie. Ce rêve, en i835, avait pris une
domination
iiniverselle forme précise ; et, sur ce point, les libéraux ne pensaient pas autre-
sur le monde. ment que les partisans de 1 absolutisme.
Les démocrates allemands, à qui la révolution de i83o avait donné
un nouvel élan, les princes, qui, dans le Biunsv^ick, la Saxe et le
sous
sociétés secrètes, depuis longtemps centralisées à Berlin, qui en mon- l'hégémonie
trèrent le défaut et qui prônèrent la réalisation du rêve allemand du roi
de Prusse
sous la direction du roi de Prusse ^. Cette organisation devait s'affir-
pour exécuter
mer officiellement en 1842, lorsque, à l'occasion de la pose de la ce rêve.
1. Voir l'opinion de Ranke dans J. B.vinvillb, Hisi. de deux peuples, un vol. in-
la, Paris, 1915, p. 220-aai.
a Les loges jugèrent que la Prusse était, de tous les Etals de l'Europe, le plu»
.
1. G'oTAU, op.
cil , p. 12. Cf. îbid., p. i43 i45. Pour plus de développements
sur doctrine d'Hermès, voir Goyau, op. cit., p. a-12, i43 i^iô, 166-169;
la
Kleltge», la Philosophie scolastique, t. 1, p. 432 et s. ; l'article Hermès dan» le
K'.rchenlexikon, i. V, p. 1875-1899.
2. Denzisgeh Baîj.nwart, n. 1618 1621.
l'église en ANGLETERRE, EN ALLEMAGNE ET EN FRANCE 287
lité.
plus efficace pour réahser cette fusion dans le domaine de la vie pra-
tique.On aurait alors une religion allemande, une philoso{)hie alle-
mande, comme Une patrie allemande. Mais pour arriver à ce but on
avait besoin de la compUcité silencieuse du clergé. L'archevêque de
Cologne mettait obstacle à ces plans on décida de l'interner dans ;
rien - »
Protestation Si un centre d'unité manquait en Allemagne, il existait à Rome.
solennelle de
Grégoire Wi C'est de Rome qu'arriva, solennelle et péremptoire, la protestation.
(lO décembre Le 10 décembre 1837, Grégoire XVI, en présence du Sacré-Collège,
1837).
se plaignit « de l'injure très grave qu'il venait de recevoir ». Au
nom « de l'immunité ecclésiastique violée, de la dignité épiscopale
^°^^" '
fenêtres des chanoines coupables de n'avoir pas défendu leur arche- ^n^farif*
vcque. A Coblentz et à Paderborn, on vit des hommes faire le guet, de Droste-
^i^chering.
jour et nuit, pour proléger des prêtres dont ils redoutaient l'arresta-
lion par la police. En Weslphalie, la noblesse décida de ne point
s'amuser, de suspendre les bals et les grandes soirées tant que
Droste-Vischering serait en prison. Dans les églises d'Aix-la-Chapelle,
le peuple assemblé récitait à haute voix des prières pour la libération
de l'archevêque.
Dans les sphères oflicielles, à Berlin, on était à la fois très humilié Embarras du
et très inquiet. C'était au moment oiî l'on s'était senti tout 'près du gou^»;»'-^.'" "»
de Bcrlui.
magne fit écho aux paroles du pape. On vit des prêtres supprimer
la pompe du culte dans leurs églises, et des laïques s'astreindre à un
deuil permanent pour tout le temps où l'évêque serait captif. L'émo-
Emotion
produite par
tion gagnait même des âmes jusque-là mondaines ou indifférentes.
ce nouvel Le jeune Auguste Reichensperger, le futur grand orateur du Centre
aitentat.
allemand, se sentait arracher à une vie de littérateur désœuvré pour
se donner à une vie d^action et de lutte. L'Europe entière s'intéressait
vr
gieuse ^ »
Réveil
gj^ même temps les catholiques, sortis de leur torpeur, ne ces-
catholique. saient plus d'agir. « Vous avez éveillé Michel, criait aux souverains
d'outre-Rhin le poète politique HolTmann de Fallersleben ; vous ne
le rendormirez plus -. » « S'éveillant lors de l'affaire de Cologne,
écrivait Eichendorff, une merveilleuse puissance a surgi : c'est
des premiers résultats heureux de cette agitation se fit sentir Réforme» dan»
Un
dans l'éducation religieuse du peuple. On a critiqué les constructions ^
^
ment'^
ihéologiques de Jean-Baptisle Hirscher, professeur à la Faculté de caiéchistique.
sont des chefs- d'œavre de pédagogie. Le jésuite Deharbe, les prêtres g^^^
L'art catholique lui-même devenait, pour ainsi dire, plus catho- Renaissance
de l'art
/ calholiq .0.
I. Lenni^, au congrès catholique de Mayence, en 18 '|8.
a. Déjà, en 1802, la grande littérature catholique s'était enrichie de la Symbo-
lique de Mœhler, œuvre capitale, qui mettait en regard, pour en faire une antilhèsô
vivanlo, la logique calholique et la logique protestante. Tout le plan de cet ouvrage
puissamment construit, se trouvait dans cette phrase de son auteur « Pourquoi :
VII
L'Eglise
En racontant l'histoire du réveil catholique eu Allemagne, nous
en France,
avons eu plus d'une fois lieu de constater l'écho qu'il rencontrait en
France, parmi la jeune école dont le comte de Montalembert était
seurs de Julien l'Apostat. Nous sommes les fils des croisés, et nous
ne reculerons pas devant les fils de Voltaire *. n
était son action, vers quel but marchait-il ? C'est ce qu'il nous reste
une lutte contre des doctrines et des passions envers lesquelles le gou- (lescatholic|uc#
. ... •
r •! r '
\
c^ Franc* :
vernement montrait une excessive I
Rïanife» talions C'est à partir de i83o que les plus grands poètes de l'époque,
diverses
de l'esprit Lamartine et Victor Hugo, tournèrent au rationalisme déiste ; et de
voluirien. bons critiques ont pensé qu'entre l'émancipation de l'imagination
qui s'exprima par le romantisme d'alors, et l'émancipation de la rai-
son individuelle qui ressuscita le voltairianisme, il n'y eut point
simple coïncidence, mais intime relation *.Un homme d'un talent
Le médiocre, au style « incolore et banal » ^, et, en même temps, d'une
chansonnier
Béranger. telle popularité que « nul écrivain de ce temps, pas même Victor
Hugo, ne put rivaliser alors avec sa gloire » 3, le chansonnier Dé-
ranger, que Chateaubriand lui-même, cédant au courant général, osa
comparer à La Fontaine, à Horace et à Tacite *, exprimait à merveille
l'esprit sceptique, gouailleur et satisfait de la bourgeoisie triom-
phante. Dans son Dieu des bonnes gens, souriant et facile, Sainte-
style plus mesuré des uns, plus violent des autres, n'avait pas ré-
Bûchez.
lisatrice de l'Eglise romaine. 11 prêchait, avec la même ardeur et la
dégénéra, avec
'ij-'ijc-ic
de saint-oimon, en
les disciples
t
un sensualisme qui
ne se contenta plus d'être théorique et aboutit aux désordres les plus
point pour le mal ». 11 a laissé un virus malsain, qui n'a que trop
jurer
Vin
1.Ces qualités en font la source la plus précieuse que l'on puisse consulter sur
l'histoire religieusependant la première moitié du xixe siècle. L'Ami de la religion
eL du roi supprima, après la révolution de Juillet, une partie de son titre, et devint
IWmi de la religion. Il parut alors trois fois par semaine, au lieu de deux fois. Voir
Ledos, à l'article Ami de la religion, dans le Dict. d'hist. ecclés.^ t. II, col. laaS.
2. Le Correspondant ne parut sous forme de Ilevue qu'à partir de i8^3.
l'église en ANGLETERRE, EN ALLEMAGNE ET EN FRANCE 25 1
le maître ajoutait sans doute celui d'avoir un organe de son école, de (octobre i83o).
sa pensée personnelle, car tous les futurs rédacteurs qui s'enrôlèrent
liberté 'religieuse ^.
IX
vague
et utopique. société future, constituée par des peuples libérés et par une Eglise
indépendante, l'auteur voit s'élaborer trois choses : d'abord une
science vraiment catholique, et non plus « verbale, abstraite et
vide », comme celle du moyen âge*, qui « pénétrera assez avant dans
le dogme pour y découvrir et en dégager, en quelque sorte, les lois
I. Avenir à\i i8 octobre i83o. Cf. Lamennais, Articles publiés dans le Mémorial
calholiqueet VAvenir, un vol. in-8, Paris, i836 1807, p. i56 Mélanges catholique:^
;
t. I, p. i5o.
a. Avenir du 3o juin i83i Mélanges, t. I, p. 82. Cf. Avenir des 28 et 29 juia
;
Charte ;
3° la liberté de la presse, car il faut avoir « foi dans la
vérité, dans sa force éternelle » ;
4** la liberté d'association, qui est
de droit naturel ;
5" la liberté de l'élection, qu'il faudra faire péac-
trer « jusque dans le sein des masses » ;
6° la liberté des provinces
et, comme l'a fort bien dit le dernier historien de La Mcnnais, les
jiar un grand
la lutte. Dans cette même lettre, l'abbé Guéranger ajoutait : «J'es-
nombre père travailler toujours sous votre direction, et me rendre digne, de
de ses lecteurs.
plus en plus, de la bienveillance que vous m'avez toujours témoi-
gnée ». Et le jeune et ardent chanoine du Mans lui annonçait
l'envoi d'un livre qu'il venait de publier sur l'abolition des
concordats, espérant que « ce livre, en fixant un peu les idées du
de vous. Les plus pures intentions sont méconnues. Les calomnies s'accumulent.
Un évèque écrit à un de ses prêtres « Je sais que vous êtes de cette secte de pres-
:
bUériens, qui ne veut plus de hiérarchie »... 11 n'y a qu'à voir les armes dont (vo»
aiversairos) se servent les intrigues, les insinuations, les outrages, la cr.lonmie. »
:
fondants inconnus, un vol. in-18, Paris, 1912, p. 189 281. L'abbé Prosper Guéran-
ger avait été un des botes de la Gbênaie et collaborait à VAvenir. L'auteur de Dom
(îuéranger, abbé de Solesmes, 2 vol. in 8, Paris, 1909, dit justement que l'abbé
(«uéranger en s'attachant à La Mennais, vit surtout en lui «le chef incontesté et
vénéré de l'école ultramontaine » ^^t. I, p. 44l ; mais il est moins exact en affirmant
qu' « il était fort éloigné d'épouser son système philosophique » doc. cit.). Aladate
du i5 mars i83o, Prosper Guéranger écrivait à La Mennais: «.La guerre contre le
^c'ns commun yc'est à-dire contre le système philoso^yhiqne de V Essai sur l indifférence)
i !ses conséquences est toujours flagrante à Saint-Sulpice. Carrière vient do M
PK.tlrc la dernière main à son in-folio de l'aiinée dernière... Du reste, c'est le plut
î.jyal de vos adversaires. H vous a lu et relu il vous sait même par cœur. Seulement,
;
il ne \ou8 entend |)as, et tout fait craindre qu'il ne vous entende jamais. » iRolssel,
<;/). cit., p i4). L'abbé Rc^hrbachcr, autre collaborateur de VAvenir, attire vers
L.T Mennais, comme l'abbé (juéranger, parle désir de défendre les doctrine» ultramon-
et
Mennais sur les Affaires de Rome et la correspondance incomplète
Montalembert de ses deux compagnons, le récit de cet épisode important dans
l'histoire de l'Eglise au xix^ siècle, a été fait trop souvent en des
termes peu favorables à la renommée du pape Grégoire XVI. On
a représenté l'illustre écrivain attendant en vain, pendant deux
mois, la réponse qu'un pontife « pieux, mais ignorant de l'état
ministère des Affaires étrangères de France, publiés par le P. Paul Dudox, dans
6on Lamennais et le Sa'vd Slèje, un vol. in-8, Paris, 191 1.
livre r , • •
direction de sa
touché de l'accueil gracieux du bon religieux, qu'il lui confia la
conscience pendant son séjour à Rome.
l'église E5 ANGLETERRE, E^f ALLEMAGTïE ET EN FRATfCE 269
est nommée pour étudier le mémoire; et, pendant que ces théolo-
Tactique goire XVI fait prévenir La Mennais, par le cardinal Pacca, que
du pape l'examen de ses doctrines, devant être « aussi profond que réfléchi »,
« ne pourra pas être fait de sitôt », et « qu'il peut retourner en
France avec ses collègues » *. Lacordaire seul comprend ^. La
Mennais s'obstine. 11 déclare que cet examen approfondi est un
triomphe pour sa cause, et qu'il veut rester à Rome pour a fournir
Obstination les explications indispensables, répoudre aux objections ^ ». Une
La Mennais. audience du pape, qu'il obtient le i3 mars 1882, et dans laquelle
Grégoire XVI ne dit pas un mot de l'affaire en question, est inler-
prêtée par lui comme une seconde victoire *. Il ne parle plus à ses
amis que de son projet de reprendre la publication de V Avenir, et,
XI
vain fut celui d'une obéissance complète. Après avoir pris connais-
sance de l'encyclique, il se contenta de dire à voix basse à ses deux
collaborateurs : une Lettre du pape contre
« Je viens de recevoir
nous; nous ne devons pas hésitera nous soumettre ». Revenu en
France, il s'empressa, dès le 10 septembre, de signer et de publier,
conjointement avec les rédacteurs de l'Avenir, membres du Conseil
Soumission ^q V AqencB Générale pour la défense de la liberté reliqieuse, une
des rédacteurs . .. . ..
de l 'H venir, déclaration de soumission. YJ Avenir, provisoirement suspendu, ne
paraîtrait plus ; VAcjence était dissoute. Ces déclarations furent bien
accueillies à Rome, et le cardinal Pacca en félicita l'abbé de La
Mennais au nom du pape.
Cependant la nouvelle encyclique faisait l'objet, de part et d'autre,
de commentaires passionnés. L'attention des amis de 1*^4 ve/iiV, comme
celle de ses adversaires, se porta surtout sur quelques passages où
le libéralisme, dans les divers articles de son programme, liberté de
conscience, liberté de la presse, liberté des cultes, était vivement
condamné; et, de nos jours encore, quelques historiens semblent n'y
pas voir autre chose. C'est méconnaître l'ampleur de la fameuse
Lettre pontificale. Elle commençait par formuler, en termes discrets,
laient en elles tous les éléments de désordre pour saper les instilu-
Père, que nous venons" à vous... pour vous parler de ce dont nous j^ toutes les
pleurons et gémissons ensemble... La majesté du culte divin est rovendicaiiom
/
tournée en dérision par des
ir • • 11hommes pervers... T
Les
1
lois
•
de
1 i»r»
1 Lglise,
!• létritimes
exposées
ses droits, ses institutions, ne sont pas à l'abri des insultes'dfes dans l'Avenir,
dUsimus indifferentismi fons », d'où sortaient les maux dont souf- ^^ i^ nberié
lier comme découlant de cette source: i" cette u liberté d'opinions et entière •
pleine et sans bornes, plena illa atque immoderata libertas oplnlo- et « l'ardeur
nuni », qui, « contre tout bon sens, permet de laisser se répandre, d'une
vendre et boire même tous les poisons, sous prétexte qu'il existe indépendance
dant aux princes de « mettre tous leurs soins à maintenir intacts la envers Dieu»
religion et la piété envers Dieu, in eani potissimum curam incum-
haiit ul incolumis sil religio et pielas in Dcum » *.
éviter l'occasion d'irriter un homme célèbre qui pourrait faire beaucoup de bien,
a jugé à propos, dans sa sagesse, de donner une réponse indirecte qui suiïira à lui
faire comprendre que ses sentiments sont en opposition avec ceux que Sa Sainteté
recommande à tous les évêques ». (Lettre inédite. Archives de Saint-Sulpice.)
3. Le P. Lacordaire a toujours prétendu, pour ce qui le concerne, qu'il n'avait
jamais entendu soutenir, dans l Avenir, la thèse de « la liberté religieuse prise dans
un sens absolu », laquelle, dit-il, « est manifestement absurde » mais il reconnaît ;
l'encjclique.
quaient ; et la presse libérale, à son tour, considérait malheureuse-
ment la Lettre pontificale sous cet aspect. La Mennais s'était retiré
II décembre 1882, furent pour lui des douleurs aiguës, qu'il aigris-
sait encore en les repassant dans son esprit ; de telle sorte que la soli-
La Mennais, paraît n'avoir jamais été ou n'avoir été que bien rare-
ment cette « rosée qui rafraîchit l'âme », dont il a parlé dans ses
Paroles d'un Croyant, en disant plutôt ce qu'il cherchait dans l'o-
raison que ce qu'il y trouvait en réalité 3. Se sentant abandonné des
urement^et
claration par laquelle il s'engageait à « suivre uniquement et
simplement absolument la doctrine exposée dans l'encyclique » *. Mais la lettre
^'
if f7tVne ^^^^^ ^^^ communiquait à Montalembert le texte de cette déclara-
dérlaratlon de tion contenait cette phrase, qui épouvanta son correspondant : « Je
pure orme,
renouce... à tout, sans exception, ce qui a rempli ma vie anté-
CL .vktion. rieure » ; et, sur une demande pressante de son jeune ami, il
temps, avait cessé, sous le prétexte de ses travaux, de réciter le saint bréviaiie, et
que celte omission de la prière liturgique avait dû déterminer sa défection, y^'id
les laits qui ont dû donner lieu à cette légende. Il résulte d'une lettre écrite par
Félicité
de La Mennais sonà frère Jean, le 35 août 1819 (Blaizb, Œuvres inédites de F. La-
mennais, t. I, p. 390) que Lamartine, àl'insu de La Mennais, avait obtenu pour lui,
de Rome, la dispense du bréviaire, en invoquant le mauvais état de ses yeux mai» ;
l'église en AT^GLETERRE, en ALLEMAGNE ET Eîf FRANCE 267
place de Dieu qu'il a chassé, un ver qui le ronge sans relâche », et sur
le pape Grégoire XVI lui-même, outragé en des termes q«i passaient
toute mesure, les pages les plus virulentes que jamais pamphlet
politique ait mises au jour ^. Ce livre cependant contenait, en même
temps, sur la prière, « qui rend le cœur plus léger et l'âme pluj
contente » 3, sur le bonheur, « qui n'est pas de posséder beaucoup,
mais d'espérer et d'aimer beaucoup * », sur la vertu, « la seule
chose sur la terre qui ne se fane ni ne passe » ^, sur la justice, « qui
protège les droits », tandis que la charité « adoucit les maux inévi-
tables ^ », sur Fcxilé, « qui partout est seul "^
», sur la paix, « qui est
s,
le fruit de l'amour », et sur l'amour « qui repose au fond des
âmes pures comme une goutte de rosée dans le calice d'une fleur »,•
des paroles simples, limpides, pénétrantes, que l'on sent jaillir d'un
remplaça par des points la page qui le concernait. Plus tard, il laissa imprimer inté-
gralement le texte primitif. —
A partir du moment de sa rupture avec i'Lglise, il
signa Lamennais, en un seul mot, et supprima la particule.
3. llfid., ch. XV 11.
4. Ibid., ch. XXIV,
5. Ibid., ch. XXX.
6. Ibid., ch. xxxT.
•7. /6/(i , ch. XL.
8. Ibid., ch, XV.
<) Ibid.^ ch. XV.
2 68 HISTOIUE GKtSKRALE DE L FGMSE
Ainsi une des impressions qui contribuèrent le plus à irriter La Mennais contra
I.
Rome et à précipiter sa chute, fut la crainte presque morbide des pièges qu'il
redoutait de la part de la curie romaine et des jésuites. Malheureusement quelques
jeunes et imprudents correspondants entretenaient en lui cette crainte. L'un d'eux,
î'abhé Emmanuel dAIzon, lui écrivait de Rome " M. G... (Mac Garthy) m**
:
communiqué le projet que certaines gens avaient eu de vous faire venir à Rome.
Je puis vous assurer que c'était un piège, et j ai de fortes raisons de croire que ceux
qui voulaient le tendre habitent le Gesîi ». (Boutabd^ Lamennais, t. II, p. 4o) Cf.,
t. I, p. 366
t. II, p. 367
; t. III, p. 67.
;
a. C'estpar suite d'une confusion de dates qu'on a pu noter parmi les causes qui
ont préparc la défection de Félicité de La Mennais, sa rupture avec son frère Jean.
Voici les faits. Après l'apparition des Paroles d'un croyant, l'évéque de Rennes,
Mgr de Lesquen, crut devoir demander à l'abbé Jean de La Mennais une lettre par
laquelle il désapprouverait explicitement le dernier ouvrage de son frère. Cette lettre,
le prélat promit qu'elle ne sortirait pas de ses mains, et qu'il ne s'en servirait que
pour confondre les dénonciateurs du vénérable prêtre. La lettre demandée fut écrite
le 10 mai i834, et, à peine parvenue à l'évêché, fut livrée à la publicité. Le a^ mai
1834, VAmi de la Religion l'empruntait à la Gazette de Bretagne. L'irritation de
Félicité de La Mennais fut extrême. A partir de ce moment, il ne témoigna plus à
son frère la même confiance qu'auparavant, dt, en 1837, il cessa complètement de
le voir. La seule influence vraiment efficace qui pouvait s'exercer encore sur l'abbé
Félicité, depuis la mort de M. Tejsse;/rre, disparaissait ainsi^ au moment où !•
l'église en ANGLETERRE, EN ALLEMAGNE ET LN FRANCE 269
Xll
un 1» déJecUon
Chateaubriand au début du siècle, La Mennais, avant d'être chef,
s'était fait l'élo-
futun écho. Dans son Essai sur l indifférence, il leur maîirt.
âme ? Non. Pour que ce grand exemple servît d'enseignement. Dieu a permis que
cotte fin fût dépourvue de toute espérance. Mais celte âme avait contribué à relever
le sentiment religieux dans notre pa\s. Ne pouvons-nous pas penser qu'il y aura eu
Un retour caché à nos rc^^nrds, cl qu'rllo aura obtenu miséricorde ? »
I. SiLVESTRB DE Sact, Variétés littéraires, t. II, De la réaction religieuse.
270 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISB
Guéranffer
'
d^^^^^^^s. En i835, Lacordaire inaugura ses conférences de Notre-
e* Dame, tandis que Montalembert portait hautement à la tribune par-
Rohrbacher.
lementaire les revendications catholiques. La restauration de l'Ordre
bénédictin en France, en i836, par dom Guéranger, et le rétablis-
I. de ses plus jeunes disciples, l'abbé Emmanuel d'Alzon, qui, même après
Un
l'apparition des Paroles d'un croyant, lui avait envoyé de iiome les témoignages
d'une ardente fidélité (Boltard, t. lil, p. 67. Cf. Ibid., II, 867, 4oo), devait fonder
lui aussi, plus tard, une congrégation religieuse, celle des Augustins de l'Assomp-
iion.
3. a L'Avenir, écrit Eugène vint à son heure... et il rendit de grands
Veuillot,
services... Par gallicanisme, il servit etricacemcnt la cause reli-
sa lutte contre le
gieuse sur le terrain des doctrines ; il la servit aussi sur le terrain politique, en ne
cessant d'établir que les catholiques ne doivent pas lier les intérêts religiouK à une
forme gouvernementale, fût-elle la royauté légitime.. Une élite se levait... L'ency-
clique Mirari vos tua V Avenir... Mais si le journal avait disparu, les idées et les
besoins, sources du mouvement, existaient toujours... Il ne fallait pas laisser le
champ libre à la presse gallicane et étroitement royaliste.. Le dimanche 3 novem-
bre i833, parut le premier numéro de VUnivers ». (E. Veuillot, Louis Veuillolf
t. I, p 35i, 354, 356, 363, 364, 365.) Parmi les premiers rédacteurs de l'L'/iiuers,
Gerbet, Léon et Eugène Bore, Montalembert, Tabbé Jules Morel, étaient d'anciens
disciples de La Mennais. Plus tard, à l'époque du Concile du Vatican, le rédacteur
en chef de l'Univers, Louis Veuillot, rappellera que nul plus que La Mennais n"a
travaillé à « acheminer la France vers le dogme sauveur de l'infaillibilité du pape»
(Louis Veuillot, Rome pendant le concile, t. II.)
L EGLISE EN ANGLETERIlE, EN ALLEMAGNE ET EN FRANGE 27 1
de Vi'ans
ils demandèrent à l'archevêque de Paris, Mgr de Quélen, de vou- (i83i).
un vol. in la, Paris, i883 ; Miv.laUmbert, un vol. in-12, Paris, i884 Rohrbacher^ ;
homme, écrivait-il, a toujours son heure. Il suffit qu'il l'attende, et qu'il ne fa'^se
rien contre la Providence » (Lettre à Montalembert, du 3o juin iS33 D'ailleurs, )
dans sa vie de solitude, la pensée de conférences à faire à la jeunesse lui avait été
toujours présente. Au lendemain de son départ de la Giiênaie, le 18 décembre
i832, il écrivait à Lorain qu'il allait pré^iarer des conférences aux jeunes geni.
272 HISTOIRE GENERALE DE L ÉGLISE
lique, avide d'entendre une parole qui, par son accent tout nouveau,
par ses néologismes tout modernes, lui donnait, ainsi qu'on l'a dit,
peu préparé par sa nature et par son éducation à goûter les choses
modernes, mais saisi par cette éloquence, proclamait Lacordaire « un
Les critiques Des hommes s'étonnaient de
qu elles ri
p^opi^ète nouveau . »
i 1 1
~ •
1 / •
ces
.
hardiesses,
,. .
frnits. Sa parole, à laquelle on avait reproché un accent trop profane, Leurs fruits
spirltueU.
c.,..ii pit'parc ses auditeurs à s'agenouiller au tribunal de ta péni-
tence et à s'approcher de la sainte Table, quand la parole évangé-
lique du P. de Raviguan les y convia avec onction. *
XIII
Montalembert
Pendant que, sous les voûtes de Notre-Dame, un fils de celte ^ 1^ tribune
, .. ,. ... i-Jiiit -4 parlemeulaire.
^
bourgeoisie sceptique et jouisseuse que monarchie de Juillet venait
I
la
l'aiis, 18GG FoissET, Vie du P. Lacordaire, 2 vol. in la, Paris, 1870; Il -D.
;
rSoBLE, Lacordaire apôlre et directeur des jeunes gens, un vol. in-12, Paris. 1908
;
J.-D. FoLGHÉRA, V A poloçjélique de Lacordaire, brochure in 13, Paris (Collection
Silence et religion). Sur le P. de Raviguan, voir P. de PoM,fivoT, Vie du P. de
Havignan, a vol. in-8*, Paris, 1860.
i. TutA£A.u-DAntiix(, VEyliscel l'Elat...^ p. 49.
Son action. son âge », et passa outre. De i835 à i84i, il prit part aux discussions
sur la presse, sur la nationalité polonaise, sur l'émancipation des es-
claves dans les colonies, sur la propriété ecclésiastique, sur les éta-
blissements d'aliénés, sur la police du roulage, sur diverses ques-
tions de politique étrangère, sur le travail des enfants dans les ma-
nufactures, sur la liberté d'enseignement *
; et, quel que fût l'objet
immédiat de la discussion, il eut toujours en vue la défense du catho-
Son licisme, dont champion avec une éloquence
il se fit le alerte, vive,
éloquence.
ardente, remarquablement souple, où l'émotion savait faire place à
catholique.
plus anciens, de plus élevés, de plus saints ^.,. S'il y a des vérités
absolues en politique, j'espère bien qu'il y en a aussi en religion ))3.
Montalemberl fut un des premiers à qui Lacordaire annonça son
Le projet de rétablir en France l'Ordre de Saint-Dominique. « Je dis
rétablissement
en France que cet acte est le dénouement de ma vie, lui écrivait il à la date du
de l'Ordre des i®'" juillet i838. Dieu m'appelle à revêtir une nouvelle force...
Frères
Prêcheurs. Soyons humbles, uniquement à Dieu, sans esprit de parti, prêts à
vivre ou à mourir... » Peu de temps après, en iSSg, paraissait le
Mémoire pour le rétablissement des Frères Prêcheurs. L'entreprise fut
couronnée d'un plein succès. Les meilleures recrues de la nouvelle
fondation lui vinrent de cette jeunesse que les conférences de Notre-
Dame avaient ramenée à la foi. Pendant les premières semaines de
i84i, le P. Lacordaire, revenant de Rome, traversa, sous son nou-
veau costume, la France étonnée et sympathique, et, en arrivant à
Portée Paris, il put dire, en montrant sa robe blanche : « Je suis une
d« cet acte.
liberté ». Il avait gagné devant l'opinion, et, par suite, devant le
Restauration
Quelques années plus tôt, avec moins d'éclat, un disciple, alors
en France
moins célèbre, de LaMennais, l'abbé Prosper Guéranger, avait rétabli, de l'ordre à%
Saint- Benoît.
dans l'ancien prieuré de Solesmes, un ordre non moins illustre et
destiné à rendre à l'EgliSe de France des services non moins signa-
lés : l'Ordre de Saint-Benoît. Depuis sa première jeunesse, Prosper
Guéranger avait rêvé de vie monastique. Cette vie, dit son biographe,
pour L'abbé Prosper
« s'offrait à lui comme un centre de prière, un levier d'action
Guéranger
l'Eglise, en même temps qu'un loisir studieux. Ce souci persé\érant (1806-1875),
explique l'intérêt qu'il avait porté à la Société fondée par l'abbé de
de mes frères pour vous, très cher ami, et pour toute votre famille » *.
trois œuvres
de Do m Il allait désormais se consacrer sans réserve auxtrois missions qu'il
Guérânger. s'était proposées en restaurant en France l'Ordre de Saint-Benoît le :
Vous feriez, je crois, un bien réel en continuant ». Mais quelques es- l^ Mennais.
prits modérés se montraient choqués des exagérations qu'ils croyaient
y trouver. « Pourquoi, s écriait Michel Picot dans l'Ami de la Reli- ElUeatblâmée
gion du 2 juin^ représenter les liturgies diocésaines comme des ten- dftaReîiqhn.
latives de schisme, comme des fruits de l'espritde secte? Il y a là de
la prévention et de l'exagération... L'auteur fait un éloge magnifique
de la liturgie romaine. S'il s'était borné à dire que celte lilurgâe est
la plus vénérablepar l'autorité dont elle émane et par son ancienneté,
nous serions entièrement de son avjs. Mais il suppose que celte
liturgie n'a jamais varié, que toutes les Eglises la suivaient il y a
plusieurs siècles... Ces suppositions sont démenties par l'histoire.
Dès la naissance de l'Eglise, il y a eu diversité dans les rites et dans
les prières II y avait des usages différents à Rome et à Jérusalem...
Les Eglises des Gaules avaient leurs rites particuliers, et, en Italie
même, l' Eglise de Milan avait sa liturgie distincte... Saint Grégoire
le Grand
exhortait saint Augustin de Cantorbéry à prendre dans les
Eglises des Gaules ce qu'il jugerait convenir aux Anglais... 2. » Dans
<ypportunité le fond, malgré ses excès de langage, Tabbé Guéranger avait raison:
d'une
restauration les liturgies diocésaines, et en particulier la liturgie parisienne,
de la liturgie
avaient subi quelque influence du gallicanisme et du jansénisme, et
romaine
les hymnes des Santeul et des Coffîn, le chant de Le Beuf, malgré
la science et l'habileté technique dont ils témoignaient, ne pouvaient
être mis en comparaison avec les hymnes simples et touchantes que
Rome et l'antiquité chrétienne nous avaient léguées ; et tout catho-
iique de ce nom devait applaudir sans réserve aux paroles de l'abbé
Guéranger, lorsqu'il disait, en un langage pénétré d'émotion : « J ai
vquelquefois entendu dire qu'il était avantageux de trouver dans son
office les plus beaux arguments de la religion... Mais qu'arrive-t-il ?
On étudie, et l'on ne prie pas... Etrange abus I Gomme si toute étude
dans la prière n'était pas criminelle, sinon cette étude du cœur qui
«e fait sans bruit de paroles et qui forma les Augustin, les Bernard
et les Thomas d'Aquin * I »
Le premier L'apparition, en i84o, du premier volume des Institutions litur-
volume
des Institutions giques, dont l'auteur pouvait dire, dans sa préface, qu'il était le fruit
liturgiques
de douze années d'études *, ranima le zèle des amis de dom Guéran-
(i84o).
ger et les polémiques de ses contradicteurs. Cette publication ouvrait
une série de cinq volumes « destinés à initier les jeunes clercs aux
mystères du culte divin et de la prière ». Les impressions furent par-
tagées. (( En lisant votre livre, écrivait M'"* Sw^etchine, j'ai respiré un
air de vérité pur et sans mélange ^. » Mais le P. Lacordaire était
rebuté par l'idée de l' « hérésie antiliturgique », qui, selon lui,
Le premier n'avait jamais existé *. L'Année liturgique, dont le premier volume,
volume
de l'Année Y Avent liturgique, parut à la fin de i84i> vint compléter les précé-
liturgique
dents travaux de dom Guéranger. Cette nouvelle publication avait
pour but de rendre accessibles à tous les fidèles les enseignements que
nous donne l'Eglise lorsque, au cours des douze mois de l'année
chrétienne, elle rappelle et reproduit, en quelque sorte, les divers
mystères de notre Rédemption par Jésus-Christ. Chacune des périodes
liturgiques de Tannée chrétienne devait être expliquée : i®par l'histo-
rique de ses origines, 2" par l'interprétation mystique de ses rites, et
set, sur les droits et les devoirs des évêques relativement à la liturgie.
XIV
d'une rcfornie de U société. Celle coucc]>lion se fait jour d'une manière frappante
2S0 HISTOIRE GEXERALE DE L EGLISE
lique, il faisait consister la vérité en une sorte de suffrage universel des esprits il
voyait déjà l'infaillibilité dans le peuple il y vit plus tard la justice et le droit Seu-
;
lement, il crut d'abord que lorgane du peuple était le roi, puis le pape, puis enfin
il admit que l'infaillibilité du peuple était une sorte de privilège incommunicable.
Ce dernier état de sa pensée a été exprimé par lui, en i848, dans l'ouvrage qui a
pour titre De la sociéié première et de ses lois, ou de la religion.
:
I. Ozanam formulait les deux aspects de ion œuvre en deux mots, qu'on a quel-
l'église en ANGLETERRE, EN ALLEMAGNE ET EN FRANCE SiSi
La visite des pauvres à domicile resta toujours le but essentiel des Objet!
d« l'ouvre.
conférences ; mais des œuvres spéciales ne tardèrent pas à s'y joindre :
veux pas dire qu'il s'agit de s'allier à Mazzini, mai» au peuple que Mazzini trompe.
Nous ne convertirons probablement pas Attila et Genséric, mais petil-étre viendronç-
nous à bout des Huns et des Vandales. » De même le mot « Allons aux pauvre o :
qu'il jr a de plus agréable à Dieu. Donc il faut faire ce que faisait N.-S. en pio-
chant l'Evangile. Allons aux pauvres ».
1. Origines de la Société de Saint Vincent- de Paul d'après les souvenirs de fs»
premiers membres^ brochure in-i8, 67 pages, Paris, 1909, au Secrétariat de la
Société de Saint-Vincenl-de-Paul.
a. C'étaient les conférences de Saint- Jacques, de Saint-Germain de Saint Pb il' pne
du Roule et de Notre-Dame de Bonne-Nouvelle. Le nom de conférence fut adot i
Sar «uiledcs traditions de la Société des Bonnes Etudes, dont le» premiers membre*
e la Société do Sainl-Vincent-de- Paul faisaient partie.
3. r.a Société comptait, «n 1916, 7.000 conférences, groupant plus de i4o.oo«
confrère»*
282 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
I. Dès le début, il fut entendu que les conférences de Saint- Vincent de-Paul
seraient ouvertes aux catholiques de tous les partis. « Je voudrais, écrivait Ozanam
en i835, l'anéantissement de l'esprit politique, au profit de 1 esprit social ». Il
n'entendit pas, d'autre part, faire prévaloir dans la Société de Saint- Vincent-de-
Paul un système spécial d'organisation sociale. On pourrait cependant recueillir
dans ses écrits des vues philosophiques sur la propriété, qu'il considère comme une
fonction sociale (Elude sur les Biens d'Eglise ;i837), Mélanges, t. II, p. SSg et s.),
«ar le salaire, dont il analyse les conditions normales en dehors desquelles le travail
do l'ouvrier devient une exploitation de l'homme par l'homme [Mélanges, t II,
I\'oles sur l'association, qui attache les ouvriers à leur
d'un cours de droit commercial) ^
travail comme à chose et les conduit à des habitudes de moralité [Ibid.^y sur
leur
la démcicratie, où il voit le terme naturel du progrès (Lettre du ii mars 18^91.
2 Vie de M
Le Prévost, un vol. in-8", Paris, 1899. La Congrégation des Frères
de Saint ^ incent-de-Paul fut fondée rue du Ilegard,
3. Sur Fréd. Ozanam, voir Mgr Ozanam, Vie de Frédéric Ozanam, ua vol. in-8».
l'ÉGLISL EIN ANGLETERRE, EN AI,LEMAGNE l^T EN FRANCE 283
XV
De toutes les campagnes catholiques du xix* siècle, il n'en est pas La campagne
des catholiques
peut-être de plus glorieuse, il n'en est pas, à coup sûr, de plus pour
féconde en utiles leçons, que celle qui a abouti, après vingt ans de la conquête
de la liberté
luttes, à l'abolition du monopole de l'Université. Elle demande à d'ensei-
ThiIs, i88j Mgr Biunard, Frédéric O^auam, un vol. in-8»^, Paris, 1913
; ; (Jurmir,
la Jeunesse de Frédéric Ocanani, un vol. in -8', l^aris, 1S88.
I E. Spl'ller, Lamennais, un vol. in-ia, Paris, 189a, p, laa.
a. Mêl. calhol, 1. 1, p. aSS-aSg.
284 TIISTOIRE GE-HERALE DE L EGMSB
Cliarte et non encore réglé par une loi. S'il a pu le faire, jai pu le
l'instruction primaire, connue sous le nom de loi Guizot, peut être rinsiructio.i
montre hostile "PP^^ ^ était vraie que d une manière générale. Il était une question
au sur laquelle le roi se montrait particulièrement réfractaire aux rccla-
mouvement .
t w i •
i .
i i i-,
dirigé contre mations cattioliques c était : la question de la liberté d'enseignement ;
1. Mgr
Besson, Vie du cardinal Mathieu, t. I, p. i46.
a.L'abbé Gruice, le futur évêque de Marseille a raconté l'anecdote suivante :
« Le roi Louis- Philippe se plaisait à témoigner à l'archevêque de Paris, Mgr Affre,
•on estime et son affection... Souvent il le consultait sur les nominations aux sièges
épiscopaux. Mais quand le prélat abordait la question de la liberté d'enseignement,
le roi, par mille détours, échappait au sujet delà conversation... Un jour que l'ar-
chevêque revenait avec insistance sur la question a Monsieur l'archevêque, dit le :
roi, vous allez prononcer entre ma femme et moi. Combien faut il de cierges à ua
mariage ? Je soutiens que six cierges sufEsent ; ma femme prétend qu'on doit en
mettre douze. Je me rappelle fort bien qu'ai mon mariage, c'était dans la chambre
de mon beau- père, il n'y avait que six cierges. Sire, reprit l'archevêque, il —
importe peu que l'on allume six cierges ou douze cierges à un mariage mais ;
XVI
de loi, 'était Villeniain. Guizot, soit qu'il fût découragé par l'échec /iS/i)
d'un projet qu'il avait présenté en i836, soit plutôt qu'il fût alors
disait-il, mais qui ne lui est pas essentielle » ; et, dans les disposi-
tions de son projet, il u'hésitait pasà soustraire aux évêques ladirec--
tion exclusive des petits séminaires pour les placer sous la juridic-
tion de l'Université.
Jusque-là les évêques, par esprit de conciliation, en considération H provoqua
des efforts de bienveillance que la monarchie de Juillet montrait proiestatioua
depuis quelque temps à l'égard de l'Eglise, ne s'étaient point mêlés de l'épiscopat.
et passait pour peu favorable aux idées nouvelles. Or, alors que
Montalembert et les anciens rédacteurs de ï Avenir semblent hésiter,
l'évêque de Langres précise le caractère que doit prendre la lutte
contre l'Université, indique les procédés de polémique qui lui
exercées ou réclamées par les catholiques^ Mgr Parisis alla jusqu'à dire que « tout
bien pesé, nos instiîiilions libérales, malgré leuri abus, étaient les meilleures pour
l'Etat et pour l'Ek'lise ».
l'église en ANGLETERRE, EN ALLEMAGNE ET EN FRANCE 289
l'âme et le centre *.
Presque en même temps que Monlalembert publiait son appel sur Union
de tous les
le Devoir des catholiques et Mgr Parisis sa première brochure, Louis cttholique^
Vcuillot fît paraître sa Lettre à M. Vlllemain, pamphlet véhément, dans
U campagne
dont près de lô.ooo exemplaires furent vendus en quelques semaines. menée pour
Tous les groupes catholiques fraternisaient. Veuillot écrivait dans le k liberté
de renseigne-
Correspondant, et V Univers ouvrait ses colonnes à Montalembert. ment.
L'archevêque de Paris et ses sufiTraganls avaient envoyé au roi un
mémoire confidentiel contre le monopole ; le rédacteur en chef de
VUnivers s'en procura une copie, la publia et obtint ainsi une mani-
festation publique de cinquante-six évêques, qui adhérèrent au
mémoire *. Les légitimistes venaient prendre place à côté des
anciens rédacteurs de V Avenir ; l'un des signataires des ordonnances
de 1828, Vatimesoil, se rangeait à côté de Montalembert, et, tout en
recevant le mot d'ordre d'un comité de laïques, les catholiques
reconnaissaient Mgr Parisis, évêque d'Arras, comme « le chef ecclé-
siastique de la campagne * », comme son inspirateur doctrinal.
Un second projet de loi, présenté par Villemain le 2 février i844, Nouveau
projet de loi
ne fit que resserrer l'union. Par une misérable lactique, le gouver- présenté
nement essaya d'obtenir l'adhésion ou du moins le sTlence de par Villemain
(18^4).
l'cpiscopat en multipliant les bourses accordées aux petits sémi-
naires, et d'adoucir l'opposition parlementaire en faisant confier le
rapport de ia loi devant les Pairs à un catholique notoire, le duc
Victor de Broglie. La loi nouvelle, en proclamant la liberté,- orga-
nisait et perfectionnait le monopole ; elle admettait la fondation
d'écoles libres, mais les soumettait à la surveillance, au contrôle et à
la juridiction de l'Université dans les détails les "plus minimes de leur
fonctionnement. Louis Veuillot exprima le sentiment de tous les Ce projet
ne fait
catholiques, en s'écriant : « Pour l'amour de Dieu, soyons victimes, que resserrer
mais ne soyons pas dupes ». La plupart des prélats, groupés autour les liens
du monde mais nous sommes heureux de voir que ces droits sont consacr parés
;
la constitution de notre patrie... La Charte, c'est le sol sur lequel nous nous
appuyons... La liberté, c'est notre soleil, et il n'est donné à personne d'en éteindre
la lumière... Quoi parce que nous sommes de ceux qu'on confesse ^ croit-on que
I
nous nous relevions des pieds de nos prêtres, tout disposés à tendre les mains aux
menottes d'une légalité anticons^Hutionnelle ?... k\x milieu d'un peuple libre, nous
ne voulons pas être des ilotes, ffoos sommes les successeurs des Martyrs, et nous n«
tremblons pas devant les successeurs de Julien l'Apostat ; nous sommes les fils des
Croisés, et nous ne reculerons pas devant les fils de Yoltairo ». (Discours du 16
avril i844> Montalembert, Œuvres^ t. I, p. 364-4oi).
I. Veuillot, Correspondance, t. I, p. 179.
a. E. Veuillot, Louis Veuillot, t. I, p. 4 a 6.
3. Correspondant, t. X, p. 984 et s. ; t. XIII, p. 58l,
4- E. Vbuullot, 0/). ei<., p. 487.
l'<gmse en Angleterre, en ALLEMAoïtE et en frange îqS
XVII
Ce serait une erreur et une injustice que de voir dan« tous ceux Divenioft
tentée par lei
qui furent alors les défenseurs du monopole de l'Université, des «Dnemis
sectaires acharnés à la destruction de l'Eglise. Ni Victor de Broglie, de l'Eglis*
catholique.
ni Guizot, ni Cousin, ni Villemain ne méritent une pareille qualifi-
cation *. Mais derrière ces hommes il en était pour qui la lutte
a illemain était cependant obsédé par une peur des jésuites qui devait le con-
N
duire à l'aliénation mentale. « Il s'imaginait toujours, écrit Thureau-Dangin, voir
auprès de lui des jésuites, le guettant et le menaçant. Un jour, il sortait, avec un
de ses amis, de la Chambre des pairs, où il avait prononcé un brillant discours, et
causait très librement, quand, arrivé sur la place de la Concorde, il s'arrête, effrayé.
« Qu'avez-vous ? lui demande son ami. — Gomment ? Ne voyez-vous pas ? Non.» —
Montrant alors un tas de pavés « Tenez, il j a là des jésuites allons-nous-en. >
: ;
Dans les derniers jours de décembre i844, Villemain, fléchissant sous le poids des
chagrins de famille et des déboires politiques, eut un accès violent de folie et st
précipita par l'une des fenêtres de l'hôtel ministériel. » (Thurbau-Daugin, Hist. de
la Mon. de Juillet, t. V, p. 546.)
3, Sur cet incident, voir BtnifiCHOi*, op. cit., t. II, p. 493-573.
294 HISTOIRE GÉNÉRALE DE L*ÉGLISE
S.J.
l
a.
Le monopole
« Il suffit
universitaire^ destructeur de la religion et des lois,
,
d'ouvrir les Monita et de les lire sans prévention, pour s apercevoir
qu'ils sont une satire... L'ouvrage, paru à Gracovie en i6i4, est l'œuvre d'un jésuite
...
par le P. Deschamps,
expulsé de l'ordre » (Bcehmbr Monod, les Jésuites, un vol. in-12, Paris, 1910,
P. 64 66j.
Toutes les citations que fait Quinet, dit Alfred Monod, toutes les traductions
3. «
qu'il donne trahissent le parti pris avec lequel il a lu et interprété les textes. »
(BcEaMER- Monod, les Jésuites, p. 12.) Saint Ignace avait écrit « Quand un supé- :
rieur ordonne, persuadons nous que tout est juste, rejetons tout sentiment contraire,
cours,
toutes les fois qaon ne pourra y apercevoir quelque péché ». Michelet, dani son
cite ce passage, mais en supprimant la rcslriclion u {Ibid.),
L EGLISE EN ANGLETERRE, EN ALLEMAGNE ET EN FRANCE 295
suites, renouvelant contre eux, avec une violence plus grande, ces
émeutes qui avaient tant attristé la France catholique au lendemain
de la révolution de Juillet, le roi Louis-Philippe personnellement bien-
veillant pour l'Eglise, mais constitutionnellement impuissant à ré-
XVIU
du roi
lippe, éclairé par l'expérience, disait tristementà sou premier ministre :
Loui»-Plii-
lippe. u Vous avez raison ; c'est au fond des esprits qu'il faut combattre
l'esprit révolutionnaire ^. »
Mais un des
T , r
événements
11-
lièdes, des indifférents, des politiques
reh^euse
*.
de 1 abbé
Dupanioup
de cette époque fut la publication, en i845, d'un écrit intitulé De la (i8A5).
I. Thurbàu-Dangih,
Hisl. de la Mon. de Juillet, t. V, p. 444-495.
Faclkt, Mijr Dupauloup, uu vol. in 8°, Paris, igi.i, p. a.
a. E.
3. Avant d'enlrer au relit Séminaire de Saint-Nicolas, t'élix Dupanloup avait
é':iic dans linslilulioa de M. Puiloup, rue du Regard.
300 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
son âme, au niveau des plus nobles esprits. Aucun compliment ne lui
alla sans doute plus au cœur que celui que lui adressa Royer-Gollard
en le rencontrant auprès du lit de mort du prince de Talleyrand :
'
la Pacification religieuse n'était pas d'ailleurs, sur ce point, démenti le terrain
du droit
par le rédacteur en chef de VUnivers. « Nous l'avons dit et nous le
commun ou
i répétons, s'écriait Louis Veuillot, une ère nouvelle commence, de la « liberté
pour tous M.
fruit des longues révolutions qui nous ont agités. La démocratie
s'élève, et l'Eglise est là comme une mère auprès du berceau...
Citoyen au même titre et avec les mêmes attributions que l'impie,
que le chrétien soit en toute rencontre l'apôtre et le défenseur de sa
croyance, comme celui-ci est l'avocat et le serviteur de son incrédu-
lité. Cet usage si noble et si nouveau du droit politique suffit en
quelque sorte à conjurer tous les périls *. » Aux élections de i846,
XIX
Le pape Grégoire XVI avait suivi d'un œil paternel toutes ces he pape
luttes. Grégoire XVI
et la France.
Il s'était réjoui de voiries évêques de France reprendre le chemin
de Rome, soit pour y rendre compte de leur administration spiri- Les voyages
des évêques
français
I. Louis Veuillot signait: rédacteur en chef adjoint. Le rédacteur en chef, à
partir du 3 août i8/i5, était Charles de Goux. Voir Univers du 3 août i845.
à Rome.
a. Univers du 7 déctmbre i845.
303 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
I. Lettredu 6 août i842, Bernasconi, Acta Gregorii papae XVIf t. III, p. 224.
a, Baumard, Unsièclede l'église de France, un vol. in-8*, Paris, 190a, 3« édition,
p. 271.
3. Voir rénumération de ces œuvres dans Baunard, op. cit.^ ch. xiii, p. 370-297.
l'ÉGTJSE en A?îGLETERRE, ETf ALLEMAG!HE ET EN FRANCE 3o3
avait été celle d'une charité se faisant non seulement servante, mais
mendiante pour les pauvres; cette sublimité liardie de confiance en
Dieu, s'interdisant de rien posséder : aucune fondation ni dotation ;
titut,
_,•_.,
qui devait, en 1900, compter de 3. 000 à ^.000 religieuses, ré-
200 ma)6ons eparses sur
parties en 9,00 a
111.
le globe.
LcsœuMcs
de piAij.
Les Annales parmi les catholiques, les Annales de philosophie chrétienne elles-
de philosophie mên>es, fondées en juillet i83o par un membre de la Société
chrétienne
(i83o). Asiatique, Augustin Bonnetty, étaient une importante manifestation.
Elles avaient pour but, dans le principe, de « faire connaître tout ce
que les sciences humaines, en particulier l'histoire, les antiquités,
ment supérieur. En i8/i5, Mgr AfTre avait fondé à Paris l'Ecole des
J'^"'^^,*'''*^
Carmes, destinée, disait il, « A former des écrivains capables de com- ^^^ Carme.
la religion ». Les étudiants s'y (i845).
poser de solides écrits en faveur de
préparaient à la licence et au doctorat, soit pour les lettres, soit
pour les sciences. En i8/|8, l'Ecole des Carmes avait fait recevoir
Migne. d Vers 18/10, on apprit tout d'un coup qu'un prêtre auver- Ljh PatroîogU
gnat, l'abbé Migne, se proposait de publier une édition nouvelle et ^'g^^bé Migne.
commode de la patrologie tout entière, celle des Grecs et celle des
Latins. C'était une colossale entreprise. Sans être lui-même un théolo-
gien de profession,, l'abbé Migne était doué d'un sens théologique
remarquable. Son projet rencontra des difficultés de toute sorte ;
p. 47. Migne avait conçu son projet en 1806 La Pulrologie latine, panic de iS.i4
à i855, comprit aai volumes in-^i^ la Patrologie grecque, parue de 18Ô7 à 1866,
;
i. Antoine Genou, plus connu sous le nom d'Eugène de Genoude, surtout après
de noblesse que lui conféra Louis XVJII en i8aa, avait cto un disciple
les Icltres
de La Mennais. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages estimés.
à
L ÉGLISE EN A!fGLETERRE, EN ALLEMAGNE ET EN FRANCE SoQ
I. Sur l'affaire des frères AUîgnol, roir J. Paqcblli db Follbnat, Vie du cardU
nal Guiberlf 2 yoI. in-S, Paris, 1896, t. II, p. 43-97.
CHAPITRE VII
GRÉGOIRE lYI.
(l83l-l846).
Vue générale. Lorsqu'il n'était encore que cardi-nal, Grégoire XVI s'était beau*
coup préoccupé de la propagation de la foi dans les pays infidèles,
hérétiques et schismatiques. Son élévation à la dignité suprême de
l'Eglise lui permit de donner à cette œuvre une plus grande expan-
sion. La Turquie d'Europe et la Turquie d'Asie, l'Extrême-Orient,
l'Afrique, l'Amérique et TOcéanie, furent l'objet de ses sollicitudes.
au point de vue ^'^P®* Aoutes les questions secondaires qui se rattachèrent à cette
delà préoccupation principale, constituèrent dès lors ce qu'on appelle
Fondation Grégoire XVI était fait pour comprendre les sages vues d'apostolat
ê''T^^\^^
préconisées par Eugène Bore. Aucune œuvre d'évangélisation directe
en Orient. des musulmans ne fut organisée en Orient ; mais les œuvres d'édu-
cation y furent multipliées, et une grande impulsion y fut donnée à
l'évangélisation des chrétiens, tant européens qu'orientaux unis ou
orientaux séparés. En i84o, M. Daviers, lazariste, ouvrait à Smyrne
et confiait aux Filles de la Charité un ensemble d'œuvres compre-
nant un orphelinat, une crèche, un dispensaire, en un mot toutes
les œuvres qui constituent habituellement le ministère charitable des
Sœurs de Saint-Vincent-de-Paul. En i84i, un Père de la Congréga-
tion de Picpus fonda, dans la même ville, un collège destiné aux
enfants des familles aisées. En même temps, les jésuites, spécialement
encouragés par le souverain pontife lui-même, développaient leurs
œuvres de Syrie. Dès la première année de son pontificat, Gré-
goire XVI, très informé de l'état des missions par ses fonctions
de préfet de la Propagande, qu'il venait de remplir, avait mis à la
1. Eugène Boré, ordonné prêtre en i85o, entra peu de temps après au noviciat
des Prêtres de la Mission, ou lazaristes, et fut envoyé en Orient, aussitôt après ses
vœux prononcés, comme missionnaire. 11 y exerça les fonctions de supérieur de la
mission de Bébek, puis de préfet apostolique. Appelé à Paris comme secrétaire de
Bon supérieur général, M. Etienne, il lui succéda en 187/^, etmouruten 1878, après
tvoir mérité le titre qui lui fut donné d'apôtre de l'Orient,
GREGOIRE XVI 3l3
I. Voir Cyrille Gh\ron (P. Cyrille Karalevsky), Histoire des patriarcats melkites^
3 vol. in-8, Paris,1910, t. II, p. 163-207.
a. Marshall, les Afissions chrétiennes, trad. L. de Wazibrs, t. II, p. a5.
GREGOrRE XTI 3i5
II
pas moins d'énergie à encourager le culte des idoles qu'à opposer des
entraves à la prédication de l'Evangile. « Les actes de faiblesse
commis par des hommes se disant anglais et fonctionnaires, écrit un
protestant anglais, dépassent toute idée ^. » A la fin du xviii** siècle,
7. Ibid., p. a 48.
3i6 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
UeiiaÎMance Dieu cependant veillait sur les régions évangélisées par les Fran-
<lesmissions
çois-Xavier, les Britto, les François Laynez, et leurs héroïques
«l'Extrême-
Orient sous compagnons et le pontificat de Grégoire XVI devait être marqué
;
(ir«5goire XVI.
par un remarquable développement de l'apostolat catholique dans les
Indes.
Bien des causes favorisèrent ce développement. Le mouvement
catholique qui se manifestait en i83o dans la jeunesse suscita un
certain nombre de vocations apostoliques ; et la Congrégation des
CatiseB Missions étrangères, réorganisée en 1826, vit ses membres se mul-
de celle
renaissance.
tiplier. L'Œuvre de la Propagation de la Foi, fondée à Lyon en 1822,
fournissaitaux missionnaires des secours pécuniaires de plus en
plus abondants. Les communications par mer devenaient plus faciles.
Depuis la construction, en 181 4, du premier steamer à roues, l'art
de la navigation s'était développé. Dès 1824, le Sirus faisait en
dix-sept jours le trajet de Londres à New-York. D'autre part, les
longs travaux, en apparence stériles, des missionnaires catholiques
avaient porté leurs fruits. L'infatigable dévouement de ces hommes
de Dieu, et des œuvres scientifiques comme celles de l'abbé Dubois 2,
une intelligence très perspicace servie par une activité très souple.
Ses^ourrage*
Une de ses premières préoccupations fut de publier plusieurs
ouvrages d'exposition et d'apologie de la foi catholique, capables de logétique.
les pratique l'Eglise du xix' siècle, avec ses fêtes, ses sacrements, ses
mais, avant d'être appelés aux ordres majeurs, ils étaient chargés
Foi, les progrès de la mission des Indes depuis 1820. Vers 1821, dans les Indci.
I. Launat, op. cit., t. UI, p. i/ia-147. Cf. Hist. gén. de lEcjlise^ t. VII, p. ^49-
45o.
a. Le séminaire colonial est confié, depuis 1879, aux Pèresdu Saint-Esprit,
3. Dijiiois, Mirurs rfes peuples de llnde^ î vol. in-S", Paris, iS?5, l, l, p. ^76
3l8 HISTOIRE GÉNÉRALE DE L*ÉGLISB
liSecliisme Pour combler les vides qui s'étaient produits dans le clergé de
di» Goa. leurs colonies, en particulier dans le diocèse de Goa, les Portugais
avaient fait ordonner, sans préparation sacerdotale suffisante, des
prêtres indigènes ou métis, dont la conduite peu édifiante avait donné
au clergé « goanais » une fâcheuse réputation et pouvait discréditer
gravement la religion catholique. En prenant possession du Siège
apostolique, Grégoire XVI, déjà mis au courant de la situation par
la charge de préfet de la Propagande qu'il venait de remplir, pensa
Mesures prises q^Je la première mesure à prendre pour rendre leur ancien lustre aux
P*'" missions d'Extrême-Orient, était de mettre fin aux scandales que le
Grégoire XVI 1 t. 1 • * i ti
pour restaurer gouvernement de Lisbonne ne savait pas empêcher, il commença
la discipline à instituer dans l'Inde des vicariats apostoliques, et les confia
donc
rlans à diverses sociétés de missionnaires. Ainsi furent établis, en i834 et
les colonies
i835, les vicariats de Geylan, de Sirdhana, de Bengale, et, en i836,
u^ais s.
^^^^^ ^^ Madras et de Pondichéry. Le gouvernement portugais pro-
testa. Le pape répondit à cette protestation par la bulle Multa prae*
1. i\1arshall, t. I, p. 23 1,
a. Ibid.
3. Ibid.
4. Op. cit., p. 283.
5. Op. cit., p. 233 Le P. Bertrand, écrivant du Maduré, en 1889 raconte co
fait, si souvent cité depuis «' Parmi ces Hindous, il en est qui, lorsqu'on leur
:
demande s'ils ont commis quelque faute, répondent « Autrefois j'en commettais, :
Ill
D'un autre point de vue, on pourrait dire qu'il n'est pas de date
Intervention plus honteuse dans l'histoire de la civilisation en Extrême-Orient.
de plusieurs
piiissances
Plusieurs puissances chrétiennes s'émurent et jugèrent le moment
européennes. venu d'intervenir, ne fût-ce que pour protéger leurs intérêts maté-
riels. En 1842, l'Angleterre, se bornant à ces préoccupations, obtint
de la Chine l'ouverture d'un certain nombre de ports pour son
commerce. En i844, les Etats-Unis stipulaient, par un article spé-
cial, la liberté de la religion chrétienne dans les ports ouverts. Vers
Traité la fin de cette même année, le 28 octobre, M. de Lagrenée, ministre
Lagrenée
plénipotentiaire du roi Louis-Philippe, signa, à Canton, avec le
(i844).
ministre chinois Ki-Ying, un traité semblable, mais plus explicite
dans ses clauses. Ce ne fut pas tout. Dépassant ses instructions
premières, mais non sans en avoir référé à M. Guizot, alors premier
ministre, qui l'approuva, M. de Lagrenée obtint du négociateur
chinois que deux édits fussent rendus, au nom et sous le sceau de
l'empereur, en faveur des chrétiens indigènes. Le premier, en date
du 28 décembre, leur accordait le libre exercice de leur religion.
Le second, daté du 20 février i846, leur promettait la restitution
Les missions Un autre empire, voisin de la Chine et son vassal, la Corée, était
de Corée,
ragea point. Son projet, d'ailleurs, était le résultat d'une entente avec
les autorités ecclésiastiques. Quand, en 1882, le Saint-Siège avait
érigé la Corée en vicariat apostolique, en
y joignant les îles Riou-
Kiou, c'était dans l'espoir que ces îles, voisines et dépendantes
du Japon, seraient la porte par où le christianisme pénétrerait de
nouveau dans ce pays. Ni Mgr Bi-uguière ni Mgr Imbert ne purent
aborder aux îles Kiou-Kiou mais en i844 l'amiral français pro-
;
IV
Les missions Parmi les terres que Grégoire XVI désirait le plus ardemment
d'Afrique.
arracher au joug de l'infidélité, il en était une dont l'antique Eglise
avait jadis rivalisé d'éclat avec celle d'Alexandrie. Evangélisée dès le
Utilepour bien des raisons, entre autres pour conquérir l'estime des
indigènes, d'organiser en Algérie le culte catholique. Des pourpar-
Erection lers engagés avec la cour de Rome aboutirent à l'érection à Alger
de 1 evêché
d'Alger d'un évêché, qui dépendrait de l'autorité métropolitaine de l'arche-
(i838). vêque d'Aix. Une bulle de Grégoire XVI, datée du 9 août i838 et
promulguée en France par le Moniteur du 5 août, consacra olïiciellô-
ment cette érection. Peu de temps après, le pape désignait, pour
occuper le nouveau poste, un jeune vicaire général de Bordeaux,
i'abbé Antoine Dupuch.
Mgr Dupuch, Né dans Guyenne en 1800, d'une hono-
l'ancienne capitale de la
évêque
d'Alger. rable famille de négociants, Antoine Dupuch avait d'abord été,
comme étudiant en droit et comme avocat, un des membres les plut
zélés de la Congrégation que dirigeait alors le P. Ronsin. Gomme
pour plusieurs de ses jeunes camarades, la pratique des œuvres de
charité avait été pour lui le prélude d'une vocation plus haute. En
«82a, il était entré au séminaire de Saint-Sulpice, et, une foie
prêtre, il avait dépensé, dans son diocèse d'origine, comme mis-
soit
par suite de la conversion des Arabes, la couleur locale disparaîtrait, ce qui serait
bien dommage. « Il est sûr, répliqua Louis Veuillot, que nous y perdrions ces pitto-
resques coups de fusil qui accidentent U marche de nos troupes. Car on devrait
comprendre que les Arabes ne seront à la France que lorsqu'ils seront Français ;
ils ne seront Français que lorsqu'ils seront chrétiens; et ils ne seront pas chrétiens
tant que nous ne le serons pas nous-mêmes. »
I. Thureau-Damcim, op. cit,^ t. III, p, 54i.
GREGOIRE XVI 325
Pendant l'année qui suivit l'entrée de Mgr Dupuch en Algérie, Les missioQi
d'Abjssinie.
une autre vieille terre chrétienne d'Afrique, l'Abyssinie, perdue
pour l'Eglise et tombée dans le schisme depuis deux siècles, rece-
vait à son tour un grand missionnaire, le P. de Jacobis.
Un explorateur français, Antoine d'Abbadie, qui avait pu, en
1837, pénétrer au cœur de l'Ethiopie ^, et qui avait été frappé de la
profondeur et de la délicatesse des sentiments religieux des habi-
tants, s'était rendu à Rome afm de communiquer à la Congrégation
de la Propagande le résultat de ses observations. La création d'une
mission en Abyssini^ fut décidée, et la direction en fut confiée à un
prêtre de la Mission, originaire de Naples, le P. de Jacobis, qui dé-
barqua à ^L1ssaouah, en 1839, avec le titre de préfet apostolique. Mgr
La douceur, la patience, l'inépuisable charité de ce véritable apôtre, de Jacobis.
Louis VBUtLLOT, les Français en Algérie ^ un vol. in-80, Paris, 6' édition, i863,
I.
p. 397 Les soldats firent génàralemenl bon accueil au nouvel évêque. Un capitaine
quelcjue peu lettre lui adressa même un compliment en vers, qui débutait ainsi :
Illustre successeur du grand saint Augustin,
Qui fut martyrisé, dit-on, sous Constantin.
réunie sept ans plus tard à celle du Saint-Esprit, a depuis porté ce Saint-Esprit,
double titre. Le premier soin du fondateur, mort en i852 et depuis
déclaré Vénérable, fut d'évangéliser les noirs des colonies, alors
encore soumis à l'esclavage, et de les préparer doucement à la liberté.
L'Amérique elle-même avait alors grand besoin d'être évangé- Les missionf
de l'Amérique
lisée.
du ISord.
Le Native Amerlcanism, dont nous avons parlé plus haut *,
essayait de soulever, contre les catholiques des Etats-Unis, une véri- Persécutions
sou e>ec5
table persécution. « On tenta de les exclure des charges civiles. A
Philadelphie, en i843, des églises furent détruites et le sang coula* catholiques.
I. Mgr Le Rot, dans le Dict. do Vaca:«i , l. I, col. 544-5^5. Pour plus de détails,
voir Gard. J.-B. Pitra, Vie du /?. P. Libermann, un vol. in-80, Paris, a« édition,
1873.
a. Voir plus haut, p. 157.
Sq8 HISTOIRE GÉNÉRALE DE i/ÉGMSB
nisa des missions, dont les fruits merveilleux furenk confirmés par
l'établissement de retraites paroissiales *. En iSl^i, Mgr Bourget,
premier évêque de Montréal, appela dans son diocèse les Oblats de
Marie, qui réalisèrent sur le sol canadien leur évangélique devise :
de l'esclavage.
goire XVI éleva la voix pour rappeler la doctrine de l'Eglise à ce
sujet. Après avoir montré comment le christianisme, par des me-
Intervention sures prudentes, avait peu à peu fait disparaître l'esclavage de tous les
de
Grégoire XVI
pays où il s'était établi, le pontife ajoutait : « Toutefois, nous le
en faveur disons avec douleur, même parmi les chrétiens d'aujourd'hui, des
des esclaves.
hommes honteusement aveuglés par le désir d'un gain sordide
n'hésitent pas à réduire en servitude, sur des terres éloignées, d'au-
tres hommes, leurs semblables, ou bien encore aident à cet indigne
forfait, en organisant le commerce de ces malheureux, que d'autres
ont chargés de chaînes... En vertu de notre autorité apostolique,
nous réprouvons toutes ces pratiques comme absolument indignes du
nom chrétien, et nous interdisons à tout ecclésiastique ou laïque
d'enseigner, en public ou en particulier, de manière ou d'autre, quoi
que ce soit de contraire à ces Lettres apostoliques*. »
Grégoire XIV. ne faisait pas oublier au Saint-Père les épreuves dont elle était
Mais l'histoire dira qu il est intervenu dans toutes ces questions avec
toute la mesure qui convient à la situation présente de l'Eglise; que,
8 il a respecté le droit des couronnes, il a proclamé le droit des
consciences, et qu'en présence de tant de faits violents, révolution-
naires, accrédités par l'Europe, il a maintenu, autant qu'il le pou-
vait, l'empire des idées et la sainteté des maxiiïies chrétiennes *. »
(i846-i849).
pas d'acclamer un pape qui jadis avait accueilli leurs frères de Spo- il est tccuellK
par un
lèle avec des paroles de bonté et de paix. Quelques-uns
ajoutaient
enthousiasme
que, par les traditions de sa famille et par ses sentiments personnels. universel.
Ce qui paraît incontestable, c'est que le nouveau pape, sans avoir Trois partis
politique!
jamais fait jusque-là œuvre politique, se rattachait nettement, par
en Italie.
lie, était décidée à passer sur toutes les lois et sur tous les devoirs, Le parti
révolution-
à sacrifier le pouvoir temporel des papes et à réaliser l'unification
naire.
de l'Italie par la démocratie, et l'école conservatrice, baptisée du
surnom d'allemande ou tedesca, qui cherchait le mot d'ordre en Le parti
conservateur^
Autriche, se prononçait pour le statu quo de tout ce qui avait été
Pic IX conçoit Pie IX résolut de répondre à ces vœux populaires dans la plus
le projet
large mesure. Etait-ce calcul politique de sa part ? Avait-il pour but
de les réaliser
dans une large de ramener à la cause du Saint-Siège l'opinion publique égarée par
mesure.
des calomnies, et d'obliger, en même temps, à se démasquer, les
l'âme très noble et très élevée de Pie IX. Le jour même de son élé-
d'amnistie
conçut de promulguer une large amnistie, pour rendre à leuis
l'idée
(17 juillet
leur
1846). familles tous les exilés politiques, et, dès ce jour, il accorda
des papes, de
i. Gh. VAN DuERM, S. J., Vicissitudes politiques du pouvoir temporel
Î700 à nos jours, un vol. in-8», Lille, 1890, p. 170-171,
2. Voir plus haut, p. 181-igi.
3. On avait répandu dans Rome l'anagramme:
'
grâce à tous les proscrits qui la lui demaudèrent. Un mois après, le
main, le décret d'amnistie fut affiché dans toutes les rues de Rome.
a. Louis Veuillot, Pie IX, op. cit., p. Sg-^o.
. 3/|0 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
es juiis.
gj 1^ JQig f^t gi grande parmi les Israélites, que plusieurs d'entre eux
crurent voir dans le nouveau pontife le Messie attendu *.
à New- York, votait une adresse à Pie IX. « Nous vous offrons,
disaient les signataires, le témoignage d'une sympathie sans bornes,
non point comme catholiques, mais comme fils d'une république et
comme amis de la liberté 3. »
Vrai caractère En présence de pareilles approbations, quelques historiens se sont
demandé si, pendant les deux premières années de son pontificat.
mesures
Pie IX n'avait point méconnu les limites qui séparent la vraie liberté
de la licence et même celles qui séparent le libéralisme politique du
libéralisme religieux. Une étude superficielle des actes du pontife
Du libéralisme peut seule avoir suggéré de pareils doutes. Il résulte des dépêches
<f^P"^^?x
envoyées, au mois d'août i8/i6, par l'ambassadeur français de Rome
à cette époque, à son gouvernement, que Pie IX, dès le début, s'était fixé, même
dans l'ordre de la politique, certaines bornes, au delà desquelles il
a. Cité par Rohrbacher, Hist. univers, de VEglise, édit. Guillaume, t. XII, p. 2/^6.
3. Cité par Desdevises du Dezert, l'Eglise et l'Elat en France, 2 vol. in-8^, Paris,
1908, t. Il, p. 116.
du 9 no- De son
si loin de Tadopler, que, dans sa première encyclique, datée prétendu
vembre 1846, on peut remarquer, en germe, la réprobation des prin- libéralisra*
religieux.
cipales erreurs que devaient condamner plus tard l'encyclique
Quanta cura, le Syllabus et les deux Constitutions du concile du
plus énergiques, cet Sa premier*
Vatican. Pie IX y dénonce, en termes des «
encyclique
épouvantable système d'indiiïérence qui ôte toute distinction entre (9 novembre
i846).
la vertu et le y démasque « ces sectes
vice, la vérité et l'erreur » ; il
ne pourrait s'établir que par la ruine des droits et des vrais intérêts
de tous » ; il y condamne la théorie du progrès absolu dans l'huma-
nité, « qui devient sacrilège quand on veut l'introduire dans la reli-
gion catholique, comme si celte religion était l'œuvre des hommes et
non l'œuvre de Dieu » ; il
y proclame enfin « l'existence
d'une auto-
rité vivante et infaillible dans l'Eglise, que le Seigneur Christ a bâtie
sur Pierre, chef, prince et pasteur » *.
n
Les sectaires, qui avaient escompté, sinon la complicité incons- Vrais dètiemi
des sectaires
ciente, du moins le silence timide de Pie IX, pour exécuter leurs révolulion-
desseins, feignirent d'ignorer ces sages restrictions et ces déclarations ntiret.
L' < émeute Ces appréhensions n'étaient pas sans quelques fondements. Si le
permanente
peuple manifestait au pontife une sincère reconnaissance pour ses
des OYations )>
I. Deschaups, p. a85»
les Sociétés secrètes et la société, t. II,
a. Van Duerm, op. 173-174.
cit., p.
3. Massimo d'Azeglio, Correspondance politique^ p. a.
4. GtizoT, Mémoires, t. YIII, p. 81^9.
5. Ibid.^ p 354.
6. îbid.. p 374- Cf. Metternich, Mémoires^ t. VII, p. 394-4o3, 4o5 et 9,
foule força les portes d'une prison et en fit sortir les détenus aux
Pie IX Les acclamations, réglées par un pouvoir
Un pouvoir
cris de : Vive !
occulte
occulte, se faisaient plus ou moins enthousiastes, suivant les actes réglemente
les manifesta-
pontificaux de la journée, suivant les personnages que le gouverne-
tions
ment du pape mettait en relief. On avait fait des ovations à Gizzi, publiques.
lions dont l'Ilalie était le théâtre, s'était cru autorisé par l'article io3
du Congrès de Vienne à faire pénétrer dans la ville de Ferrare un
balaillon de troupes de ligne, un détachement de hussards et une
batterie d'artillerie. A cette nouvelle, les patriotes honnêtes se joi-
gnirent aux révolutionnaires pour jeter de hauts cris ; et, naturelle-
ment, ces derniers cherchèrent à exploiter l'événement à leur pro-
fit. La situation était extrêmement délicate pour Pie IX. Il décida
de se tourner vers la France. Le gouvernement de Louis-Phi li[)pe
avait maintes fois déclaré qu'il ne voulait laisser le champ libre, en
Pie IX fait
appel Italie, ni à la Révolution ni à l'Autriche ; et Pie IX connaissait
i la France.
peut-être quelque chose des jugements désobligeants que portait le
prince de Metternich sur sa personne et sur sa politique*. La ré-
ponse du gouvernement français fut favorable. Le 27 septembre 1847,
le comte Rossi, ambassadeur français à Rome, reçut, de la part de
m
Le II janvier i848, Montalembert, prenant iti parole, à la Impression
proàuite
Chambre des pairs, sur les affaires d'Italie, disait : « Je ne puis pas, ,
'
r i^ ' dans le monde
moi, catholique, avoir la témérité de juger le pape Pie IX. Mais, si catholique
je le pouvais, je dirais qu'il a été irréprochable... en dix-huit
Il a,
les Jfc^rmes
mois de temps, accordé à son peuple l'amnistie, la garde civique, libérales
2. J.-B. de Rossi donnait cette impression comme ayant été celle de son véné-
rable père et de plusieurs catholiques d'une orthodoxie éprouvée.
PIE IX ET LES ETATS PONTIFICAUX 34 7
prenait deux Chambres : l'une nommée par le pape, l'autre élue par
le peuple. C'était introduire le système constitutionnel dans les Etats
pontificaux. Mais celte mesure, loin d'apaiser le mouvement popu-
laire, le surexcita. La nouvelle s'étant répandue que le royaume
lombardo-vénitien était en pleine insurrection contre l'Autriche,
règne, les dernières années du roi Charles-Albert^un vol. in S», Paris, 1890.
4 Le quadrilatère vénitien était formé par les places de Vérone, Legnago,
Poschiera et Mantouc. — Dans un mémoire diplomatique, destiné à justifier son
348 niSTOIRE GÉNÉRALE DE l/ÉGLTSE
Le pape désire L'idée bien arrêtée du pape était de garder, au point de vue
garder
la noutralilé
militaire, une stricte neutralité, en se tenant sur la défensive contre
dans le conflit toute invasion de ses Etats. Dans cette vue, dix-sept mille hommes
survenu entre
furent expédiés à la frontière, sur la rive droite du Pô, avec mission
la Sardaigne
outrepasse ses adressa à ses troupes, le 5 avril, une ardente proclamation, décla-
instructions
et attaque
rant, au nom de Pie IX, la guerre à l'Autriche, et exhortant ses
l'Autriche. soldats à entreprendre la sainte croisade de l'Italie. Ce fut la première
trahison dont Pie IX eut à souffrir pendant cette malheureuse cam-
pagne.
Par une note insérée dans la Gazette officielle de Rome, par une
Protestations allocution solennelle prononcée le 29 avril 18^8 ^ et par une lettre
de Pie IX
(avril-mai écrite le 3 mai à l'empereur d'Autriche 2, Pie IX protesta que, bien
loin de favoriser les agitations révolutionnaires, et d'exciter son peu-
ple à la guerre contre l'Autriche, il repoussait de toutes ses forces
de pareilles tendances. Ses actes de réforme politique n'étaient
que la continuation de l'œuvre commencée par son prédécesseur,
dans du Mémorandum rédigé par les grandes puissances
l'esprit
pontificaux, créant
,
du papier-monnaie, instituant même 1
des comités de salut
,
IV
De nouveau, « Dans ces tristes conjonctures, Pie IX tourna les yeux vers la
f it a^^ 1 à la
France. De toutes les puissances catlioliques, c'était celle dont le
France S.?iril-Père pouvait invoquer le plus utilement l'appui. Dans les pre-
(aou I
4 j
n^iers jours du mois, d'août, il s'adressa directement au général Cavai-
gnac, et sollicita de lui l'envoi à Rome de quelques milliei-s de sol-
dats. Sous le gouvernement de Juillet, au mois de janvier précédent,
alors que les périls étaient beaucoup moins graves, Guizot s'était
Opprimé par
u ses propres sujets, se croyant délaissé par la
il aurait
Révolution dans l'espoir de l'apaiser à force de sacrifices ;
la police et, par intérim, celui des finances. Peu d'hommes étaient,
Père, <( dans les mauvais jours qu'il venait de traverser, avait ap-
trateur distingué, le
...
premier ministre des Etats pontificaux possédait
habile,
.
gouvernement
du nouvei^u
niimsiere.
ces deux qualités caractéristiques de l'homme d'Etat : la perspicacité,
qui voit du premier coup les mesures à prendre, et l'énergie, qui les
do l'émeute.
débridement des forces anarchiques, dont il fut le signal. Des foules
en désordre parcoururent la ville en vociférant la veuve et les ;
son du pape,
,,_^,
Mgr Palma,
,.
fut
,, .^.
mortellement atteint. Au
-la
du ib no-
soir
'^
Mamiani.
^icrhi
xin.
vembre, Pie IX, se voyant délaissé de tous, céda aux rebelles, pour Galetti.
et
...
confiant l'administration des affaires à une
fait à
.
la ,
(^7 Hovemurt
i848}.
capitale de ses domaines, garantis par tous les traités qui forment la
base du droit public européen » ^.
vwî témoigna une grande confiance dans la direction des affaires tem-
porelles. Ce prince de l'Eglise, qui ne fut jamais prêtre, ne s'occupa
jamais des affaires 'proprement spirituelles que pour en transmettre la
présidence de fe Louis-
à .'appel de Pie IX ^. En France, l'élection à la
Napoléon
République du prince Louis-Napoléon Bonaparte, le 10 décembre Bonaparte, éla
Président de
18/18, sembla, un moment, compromettre la politiqued'intervenlion.
la République
Le fils du roi en i83i, pris part à l'insurrection
de Hollande avait, française
(10 décembre
des Romagnes contre le pape, et, depuis, il n'avait pas suffisamment i84»).
désavoué cette coupable incartade. Le 3o novembre, à la Cham-bre,
Obstacles à
il s'était abstenu dans le vote relatif à l'expédition de Givita-Veo- l'interventi.jn
cbia 2 ; et si, à la veille de l'élection présidentielle, il avait, par une française :
du prince-
de Rome, ce désaveu, paru à la veille du scrutin, avait eu trop l'air président ;
haut patronage du pontife romain. A défaut des princes italiens, qui 4» Finterreft-
tion
accueillirent froidement ce projet, le premier ministre de la cour de de Gioberti.
Turin rencontra la plus grande sympathie à l'Elysée. Il était dans le
Progrès D'une part, l'anarchie devenait, à Rome et dans les Etats ponti-
de l'anarchie ficaux, de plus en plus menaçante. L'élément romain s'était absorbé
dans les Etats
pontificaux. dans Télément italien el cosmopolite. Les pires représentants des
sociétés secrètes s'étaient donné rendez-vous dans la Ville Eternelle,
côté du président.
D'autre part, l'Autriche, qui se sentait la première menacée par
Défaite de cette agitation, s'était hâtée d'intervenir. Le 21 mars, les troupes im-
Tarmée sarde
périales franchirent la frontière italienne. Trois jours après, l'armée
i Novare
(a4 mars piémonlaise était écrasée à Novare *, et Charles-Albert, craignant que
i849).
sa personne ne devînt un obstacle à une paix nécessaire, transmettait
sa couronne à son jeune fils, Victor-Emmanuel II.
Effet produit Ces événements eurent pour résultat d'imprimer une allure déci-
par ces
sive à notre politique vis-à-vis de Rome. « On pouvait deviner que
événements
en France, l'Autriche victorieuse ne résisterait pas 1 la tentation d'ajouter à ses
VI
plan, proposé par le pape, d'après lequel la France occuperait Civita- dirige
'*^"
Yecchia, la province de Spolète et celle de Pérouse l'Autriche, les
;
*°°R^e
Légations, jusqu'à Ancône ; l'armée napolitaine, les provinces de
explicjiieut par là les ménagements que le prince aurait eus pour les partisans de
Mazzini et pour Mazzini lui même (Créti:<eal-Jolt, lEglbe romaine en face de la
licvulittion, t. Il, livre II ; Dbschamps, les Socictt's secrètes et la société, 4« édition, t. II,
p 3oo 3i3) Mais
il n'est pas facile délablir si les complaisances du Président de la
,34^^
nécessaire aux forces autrichiennes, espagnoles et napolitaines. Par
l'article i**" d'une convention conclue le 3i mai entre l'agent fran-
dépenser son activité dans une voie différente, et y acquérir une gouvernement
français.
Wtentissante célébrité.
Une Assemblée nouvelle venait de se réunir, 28 mai 1849, ^^°* le L'Assomblée
législative
la majorité venait d'être élue sur un programme catholique ou
favorable au catholicisme. Dès le lendemain, le général Oudinot '
reçut l'ordre de reprendre les hostilités. Le siège de Rome fut aussi- Elle se montre
tôt commencé, sous les ordres des erénéraux
° Oudinot et Vaillant. Le f.*^°"!!'':
à 1 expcilitioa
de Rome.
I Falloux, Mémoires d'un royaliste^ l. I, p. ^5a,
a. Desgha.mps, op. cit., t. Il, p. 807.
3, Falloux, lac. cil.
5G2 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
Le pape diffère Toutefois Pie IX ne jugea pas à propos de rentrer aussitôt dans
son retour se contenta d'y envoyer une commission de trois car-
sa capitale. Il
à Rome.
dinaux, chargés de prendre en son nom les mesures les plus
urgentes. Par cette tactique, le pape voulait ménager les susceptibi-
Qu'elle eut
politique capricieuse
sur les
. .
affaires
et
11 italiennes et
•
12 septembre 1849, il déclara que les « vaillantes armées des puis- jg/^
sauces catholiques » qui étaient venues à son secours ne pouvaient
avoir eu pour objet et pour résultat que « de rétablir sa pleine
liberté et indépendance dans le gouvernement des domaines tempo-
rels du Saint-Siège ». Cette indépendance, il protesta vouloir a la
maintenir dans sa plénitude en face du monde» *. En couséquence,
en vertu d'un acte libre et spontané de son autorité, il créa un Con-
seil d'Etat chargé de donner son avis sur tous les projets de loi, et
une Consulte d'Etat, ayant voix délibéra tive sur les questions finan-
cières. Les membres de la Consulte seraient choisis par le pape sur
une liste dressée par les Conseils provinciaux. Le Motu proprio
assurait, de plus, des libertés provinciales et communales étendues,
et annonçait la réforme des lois civiles et judiciaires *.
femme, si cette femme n'est pas la dernière des créatures, elle peut
le braver impiinémeût. Elle lui dit : Frappez, mais vous vous désho-
norerez, et vous ne vaincrez pas 1 Eh bien 1 l'Eglise n'est pas une
femme ; elle est bien plus qu'une femme, c'est une mère 1 C'est la
mère de l'Europe, c'est la mère de la société moderne, c'est la mère
de l'humanité moderne I. » « A ces mots, disent les journaux du
temps, des applaudissements éclatèrent, tels qu'on n'en a sans doute
jamais entendus dans une assemblée délibérante ^ »
Le 12 avril i85o. Pie IX fit dans la Ville éternelle son entrée Rentrée
triomphale
triomphale. Le 17 du même mois, il écrivit au général Baraguey- de Pie IX
d'Ililliers, commandant en chef du corps expéditionnaire d'Italie :
à Rome
(la avril
« Il est doux à mon cœur d'exprimer les sentiments de vive gra- i85o;.
titude que je professe pour la nation française, qui n'a épargné ni
ses fatigues ni son sang pour assurer au Vicaire de Jésus-Christ
son indépendance ^. » Il avait déjà écrit au général Oudinot : « Le
triomphe de l'armée française a été remporté sur les ennemis de la
» r
PIE IX ET L EGLISE DE FRANCE PENDANT LA PREMIERE PARTIE DE SON
PONTIFICAT (l 846-1 854).
toi
et dans
propagation
de la
catholique.
toujours.
^^'^1^6
Le
partie
....
soif
du
de sa rentrée
service intérieur
au Vatican, il
par des
soldats français. Une armée française devait, jusqu'en 1870, rester
à Rome pour protéger son indépendance spirituelle et temporelle.
D'autres motifs engageaient le pape à porter sans cesse ses regards
vers la Fille aînée de l'Eglise. Malgré les troubles politiques qui
agitaient celte nation, malgré les controverses religieuses qui s'y
soulevaient de temps à autre, elle apparaissait toujours comme un
foyer ardent de vie catholique ; et, au moment où la seconde Répu-
blique allait faire place au second Empire, un prélat non suspect de
tendance libérale, Mgr Pie, évêque de Poitiers, exprimait à la fois la
gratitude due par l'Eglise au gouvernement qui allait disparaître et
républicaine qui expire. Plaise au ciel que, durant les années qui se
préparent, notre action continue à se développer aussi librement et
aussi efficacement qu'elle s'est exercée depuis quatre ans... Le prince
qui va monter sur le trône n'a pu donner jusqu'ici toute sa mesure...
Mais quand Dieu, dans ses desseins mystérieux et impénétrables,
prend par la main un homme, quel qu'il soit, pour l'élever à la
gloire d'être, ne fût-ce que momentanément, le chef d'une nation
PIE IX ET l'Église de fhance 867 v
telle que la FraDce, il lui ojffre toujours des grâces au moyen des-
quelles il pourra, si sa volonté y correspond, accomplir utilement
sa mission *. »
L'intense développement de la vie et des œuvres catholiques en Vue générale
I .
dont les
pagne ouverte en 18/I7 ne souleva pas l'enthousiasme
catholiques de France avaient donné en 18U le magnifique
spec-
Il
Il ne nous appartient pas de nous appesantir sur les causes loin- ^* Révolution
taines et prochaines de la révolution de i848 et sur les divers inci- causes
lointaines
dcnls de cet important événement politique. Le caractère instable
. . . . . et prochaines,
de la monarchie de Juillet, qui, pour faire un compromis entre le
la liberté 3. »
l'accord de tous les catholiques entre eux, pour une même action,
masses populaires. Au soir du 24 février, dans les bureaux de Y Uni- Union dei
catholiques
vers. Veuillot, Lacordaire et Falloux s'étaient réconciliés; Veuillot
avait consenti à prendre pour mot d'ordre la liberté de droit com- tous les pariii.
Cet unanime accord ne devait pas durer longtemps. Les républi- Germci dî> er»
gouvernement ^^ désunion
cains socialistes allaient bientôt s'insurger contre le
des républicains conservateurs; parmi les uns et les autres, le5 enne-
mis du catholicisme allaient reprendre leur campagne contre l'E^'ise ;
et les catholiques eux-mêmes allaient voir se réveiller parmi eux 'es
conflits qui avaient déjà mis aux prises les libéraux et les intransi -
III
tion fut ouverte séance tenante, et s'éleva à la somme de onze mille Fondation
de l'Ere
cinq cents francs. Le nom d'Ere nouvelle fut donné par acclamation
nouvelle.
hligion, le peuple et Jésus- Christ. Si ces deux forces se divisent, nous Esprit
du nouveau
•sommes perdus ; si elles s'entendent, nous sommes sauvés. Elles
journal
peuvent s'entendre si l'Eglise travaille au bien de la nation et si la catholique.
;
])!aires.„Le nouveau journal faisait une place de plus en plus grande
•
aux questions sociales, u Les tiiéories politiques, disait-elle, n ayant
|) ;s produit les félicités promises, l'infatigable pensée demande une
a itre solution au problème de l'harmonie sociale. » Cette solution, Son
programmt
social.
M. l'abbé Bazin revendique pour abbé Maret l'initiative de reniie[>rise. Quoi qu'il
,1
Les journées Les journées de juin portèrent un coup terrible à l'Ere nouvelle.
de juin 1848. Cette bataille de cinq jours souleva l'opinion générale, non seule-
ment contre les socialistes, mais contre tous ceux qui se plaçaient
sur le même terrain, fût-ce pour Ce
les combattre et les supplanter.
que ÏEre nouvelle avait appelé « le parti de la confiance » commença
è se disloquer. Beaucoup de catholiques, suivant le mouvement gé-
néral, se tournèrent vers l'autorité plus que vers la liberté. Certes,
Rôle Ozanam et ses amis avaient eu, au fort de l'émeute, un rôle coura-
d'Ozanara geux glorieux. C'est à leur initiative que fut due
et l'héroïque dé-
et de ses amis
au milieu marche de l'archr vêque de Paris, entreprenant de se faire médiateur
de l'émeute. au milieu de l'effroyable guerre civile. C'est accompagné d'Ozanam,
deCornudet et de Bailly, que Mgr Affre alla prévenir le général Ca«
vaignac de sa périlleuse tentative ; c'est avec eux qu'il prit la route des
quartiers insurgés ; et, s'ils durent le laisser s'avancer seul vers les
barricades, ce ne fut que par obéissance à l'ordre du prékt, qui
voulut se présenter seul, pour que sa présence eût une apparence
Mort plus pacifique. La mort du prélat, tué d'une balle devant une
de Mgr Affre.
barricade du faubourg Saint-Antoine, au moment où, tenant en
main la promesse de grâce, il commençait i incliner les coeurs à la
i.G. B^zin, Vie de Mgr Maret, t. I, p. agd-agS. Voir dans les Œuvres complètes
d'Ozanam, t. VII. plusieurs fragments de ses articles parus dans VEre nouvelle, eu
particulier une étude philosophique et historique sur les Origines du socialisme
PIE TX ET L'éOLlSE DE FRANCE 377
IV
p. 57.
S.Revue des Deux Mondes du 3o septembre i848.
*
3.Falloux, Mémoires d'un royaliste, t. I, p. 89 1-899.
/i, Thureau-Dangim, V Eglise et VEtat sous la Monarchie de Juillet, p. 483.
5. Parmi les initiatives privées qui avaient favorisé la cause de la liberté d'en-
seignement, il faut mentionner celle de l'abbé Emmanuel d'Alzon, qui, depuis
1843, mettait sa jeunesse, sa parole, son ardeur, sa brillante fortune au service
de cette cause, et avait créé à Nîmes, sous le titre du collège de l'Assomption,
un des plus beaux collèges du Midi. Voir Mgr Besson, le t\. P. d'ALZON, dans la
collection Les Contemporains. (CEuvre de la Bonne Presse.)
PIE IX ET l'Église de frange 879
se réservait :
1" la collation des grades universilaires ; 2**un droit
Le projet Falloux (c'est ainsi qu'on l'appela) était défendu par Ses
défenseurs,
îles partis du centre. « Nous n'avons pas pensé, écrivait l'abbé Du-
panloup, que le moment fût venu, s'il doit jamais venir, de dire :
Tout ou rien... L'Eglise peut affronter des périls, elle ne doit Dupanloup.
quons de prolonger sans fin un régime qui a fait tous les maux de
l'Eglise et de la société Dans notre
I... contrée, tous lisent et
AÎmentV Univers ; mais les membres les plus intelligents du clergé se
des débats Le projet de loi fut attaqué, du côté srauche, par Barthélemy-Saint-
à la Chambre „., . ^ ,,. tt t •
.m
(i4 janvier ndaire et par Victor Hugo. Le premier orateur s éleva contre le
i85o}. principe de la liberté d'enseignement : i° au nom de l'Etat et de
l'Université, dont la loi proposée « serait, dit il, une sorte de des-
truction 6 » ; 2° au nom des principes de 89, c'est-à-dire, dit -il,
« de l'esprit même du siècle, de ses œuvres, de ses espérances et
la croyance en un monde
t il, etje lui dis : Celte loi est votre loi Je me défie devons. Instruire,
c'est construire. Je me défie de ce que vous construisez. Je ne veux
pas vous confier l'avenir de la France, parce que vous le confier, ce
serait vous le livrer^. » Puis il évoqua les souvenirs des prétendus
martyrs de l'intolérance cléricale : Gampanella, Harvey, Galilée,
Molière et Pascal ^,
l'introduction des évêques dans les conseils, a côté des rabbins et des
pasteurs protestants. M. d'Olivier insista sur ce dernier point :
société qui peut bien vous être inditférente, mais qui nous touche
profondément ^. » Et, comme il avait été longuement question des
jésuites : « Maintenant, dit-il, je passe aux jésuites. (A gauche :
Vote de la loi La loi fut votée le i5 mars i85o, à une majorité de Sgg voix
(i5 mars
contre 287 *. Le lendemain, Louis Veuillot écrivait dans V Univers :
i85o).
« Qu'il soit bien entendu que cette loi n'est pas notre ouvrage...
Cette loi n'est, à nos yeux, que la forteresse restaurée et agrandie
du monopole... C'est un compromis plein de pièges, un pacte avec
des adversaires à la loyauté desquels nous ne croyons pas. » Mais
l'article se terminait par cette chrétienne et méritoire déclaration :
YI
Division
l'attitude h prendre vis-à-vis du pouvoir nouveau. Ils se divisèrent
des
on plusieurs groupes. Les uns, comme Lacordaire, refusèrent obbli- catholiques.
Il faut reconnaître que les premiers actes de l'empereur a^utori- Les débuts
du second
saient la confiance des catholiques. La loi sur l'enseignement était empire
appliquée dans un esprit de bienveillance à Tégard de l'Eglise. Un sont marqués
par
cuinilé de l'enseignement libre travaillait sans entraves à la fonda- des mesure»
lion de collèges catholiques ^. De nombreux conseils municipaux bienveillante*
à l'égard
remettaient leurs collèges à des supérieurs ecclésiastiques, ou même des
catholiques.
les offraient aux évêques. Le droit d'inspection sur les petits séiui-
naires, institué par la loi de i85o, était exercé avec une courtoisie
et une déférence dont le clergé était touché. Les instituteurs pri-
maires convaincus de propager des doctrines subversives de l'ordre
social ou de la religion, étaient réprimandés ou destitués. L'ensei-
gnement supérieur lui-même était surveillé par le pouvoir à ce
même point de vue. Bref, l'athéisme et l'anarchie étaient proscrits à
l'école comme dans la rue, et l'enseignement chrétien, sous un con-
trôle discret de l'Etat, pouvait se dire vraiment libre dans ses mé-
thodes et dans son organisation.
Quelques catholiques pensèrent alors que le moment était venu
d'organiser un système d'éducation purement catholique, dégagé de
La question ^q^^ élément étranger à la pure doctrine et aux saines traditions de
des classiques
u i.
, .
Montais, que nous avons vu défendre avec tant de fougue les idées
une plus large part, au moins dans ses programmes, aux chefs-
d'œuvre de la littérature chrétienne. L'Univers protesta qu'il ne
demandait pas « l'exclusion absolue des auteurs païens », qu'il ne
voyait pas dans l'enseignement « l'unique du paganisme
source
moderne * » ; et Mgr Dupanloup, par ses beaux travaux sur ÏEda-
cation et la Haute éducation intellectuelle ^ ainsi que par les succès
éclatants de son séminaire de La Chapelle, montra clairement que
son intention était bien, comme il l'avait toujours soutenu, de
subordonner à la religion toutes les branches du savoir humain.
Encyclique En i853, une nouvelle polémique s'étant élevée au sujet des
Inler
droits respectifs du journalisme catholique et de l'épiscopat, une
mulUp lices
(ai mars encyclique du 21 mars, commençant par ces mots Inter multipliceSt
i853j. fit entendre la voix du pontife suprême sur les deux conflits qui
avaient agité l'Eglise de France. Pie IX recommandait aux évêques
de former la jeunesse u à l'art décrire avec élégance en étudiant et
les ouvrages si excellents des saints Pères, et les écrits des écrivains
païens les plus célèbres, soigneusement expurgés ^ ». Il leur deman-
dait ensuite « d'encourager les journalistes catholiques à détendre la
VII
Presse qui ont à eux seuls trois fois plus d'abonnés que
et le Siècle,
6. En 1854
Barni avait traduit en français la plupart des ouvrages de K ni.
7. A de Broglie, dans le Correspondant de janvier i856 ; A. de Falloix, dani
le Correspondant d'avril et mai i856.
Sgo HISTOIUE GENEllALE DE L ÉGLISE
sociale ^ ». D'autre part, Ozanam avait fait paraître ses belles études
sur la Civilisation chrétienne et sur les Poètes franciscains ; Gratry,
Publications ses travaux sur la Sophistique contemporaine et sa Thêodicée ;
diverses.
Montalembert, des fragments de ses Moines d'Occident ; Pitra, son
Spicilège de Solesmes ; Blanc de Saint-Bonnet, ses méditations
philosophiques sur la Restauration française et sur la Douleur ;
Ginoulhiac, son Histoire des dogmes chrétiens pendant les tirais pre-
miers siècles ; Migne, la plus grande partie de sa Patrologie ; l'abbé
de Ségur, ses Réponses aux objections les plus familières contre la
religion. Par toutes ces publications, une apologétique, traditionnelle
par ses principes, nouvelle par sa forme et par son adaptation aux
tendances intellectuelles du temps, se faisait jour.
Fondation En 1862 deux prêtres pleins de zèle, labbé Gratry, ancien aumô-
de l'Oratoire
nier de l'Ecole normale supérieure, et l'abbé Pététot, curé de Saint-
de
rimmaculée- Roch à Paris, avaient résolu de donner une impulsion nouvelle et
ConceptioQ
une organisation à ce mouvement, en fondant ce que Gratry appe-
(i85a).
l'histoire, le droit et les lois : c'est une pensée qui fermente dans
l'Eglise *. » Ce grand idéal ne put se réaliser ; et Gratry, découragé,
parlait, vingt ans plus tard, de ce qu'il appelait « l'avortement de
son projet ^ » ; mais l'Oratoire avait communicjué un grand élan à
un mouvement qui devait se continuer pendant tout le cours du
XIX® siècle et auquel le pape Léon XIII devait donner les encoura-
gements les plus solennels.
Pendant qu'à Paris des prêtres éminents entreprenaient de fonder l^
un foyer de science chrétienne, un humble village du diocèse de Bienheureux
impuissant a satisfaire
* ^
par lui-même
•
1 • A .
et par
1
le
A,
prêtre zèle
fw (1786-1859).
qui s'était fait son collaborateur depuis dix ans, aux besoins spiri-
tuels des nombreux pèlerins qui affluaient vers lui, s'était adjoint
un groupe de missionnaires. Le saint prêtre qui attirait ainsi les
foules, était né le 8 mai 1786, au village de Dardilly, dans le dépar-
tement du Rhône. Sa première enfance avait été occupée aux tra- Ses origines,
vaux des champs. Sa première instruction religieuse lui avait été
donnée en cachette pendant la persécution révolutionnaire. 11 avait
Père, qui êtes aux cieux )>. Il avait, en parlant des choses surna-
turelles, du ciel, de l'enfer, de l'Eucharistie, du sacerdoce, du péché,
des paroles dune pénétration merveilleuse. « Dans le ciel, disait il,
dresser un grand bûcher, entasser des fagots les uns sur les autres,
I. Voir A. MoNNiN, Vie du curé d'An, a vol, in-12, Paris Vunney, le Bienhe'J'
—
;
reux J.-B. Vianney ; Monîjiit, Esprit du curé d'Ars^ un vol. in-ia, Paris. J.-B,
Vianney a élc béatifié par Pie X en 1904.
a. Ilebr., IV, la.
CHAPITRE X
Le mouvement Gomme les Etats pontificaux et comme la France, les divers Etats
libéral
en Europe. de l'Europe, et principalement l'Italie, l'Autriche, la Prusse, la
Sou caractère Suisse, l'Angleterre, la Hollande, la Belgique, l'Espagne, avaient été
équivoque.
plus ou moins agités vers l'année i848. Là aussi, le mouvement
libéral s'était montré équivoque, plein de malentendus, mêlé de mal
et de bien. Ce n'est qu'en l'étudiant en particulier dans chaque Etat,
qu'il est possible d'en déterminer les véritables éléments, d'en dis-
cerner les propres caractères.
son caractère même, semblaient l'en écarter. « C'est aux plus vieilles
de gouverner'^. »
Telles étaient les apparences. Mais le jeune roi possédait, comme
l'avenir de son règne le montra, une faculté naturelle d'intuition,
Sa politique : qui souvent lui tint lieu d'étude ou de génie. Il comprit bien vite,
réaliser par
dès les premiers contacts avec son peuple, que les rêves mystiques
des moyens
pratiques de son père Charles-Albert sur « l'Italie une et libérée parle Piémont »
les rêves
Aî son père
trouvaientun écho profond dans l'opinion publique. Il ne s'agissait
Charles- que de les réaliser par des moyens pratiques. De tous les groupe-
Albert.
ments ethniques de la péninsule, ces peuples sarde, piémontais,savof-
sien, que la diplomatie de Vienne avait placés sous la domination
de la maison de Savoie, lui apparurent comme les plus robustes, les
plus habiles au maniement des armes, les mieux assouplis à la
sentait entouré d'hommes d'élite. Dans l'armée, il ne tarda pas à Ses principaux
auxiliaires :
autres ^ »
II
quiconque voudra faire en avant un seul pas doit être des nôtres ^. »
gieuses, et, dans certains cas, la personne même des clercs à la juri-
diction des tribunaux civils, pour les rendre justiciables des tribu-
naux ecclésiastiques. Ces prescriptions étaient tombées en désuétude
dans la plupart des Etats; mais elles étaient encore observées en Sar- Origine»
daiG:ne, et le concordat du 27 mars i8/ji , conclu entre Gréofoire XVI ^^ '* ^o' '^^f®.
,
• ^, , 4 1. 1
.
V . • • •
du Foro ou loi
et le roi Charles-Albert, les avait confirmées, amsi que certams Siccardi,
vestiges de l'ancien droit d'asile ^. Que cette législation fût destinée
à disparaître peu à peu dans les Etats Sardes, cofnme dans les autres Les privilège»
Etats européens, on pouvait le conjecturer. A mesure que la foi s'af- canoniques
faiblissait dans les masses, elles devenaient moins aptes à comprendre siastique ».
la raison de pareils privilèges ; et le scandale injustifié qui en résul-
tait pouvait ne pas être compensé par le bien que ces privilèges
procuraient à l'Eglise. Nul n'eût donc trouvé mauvais que le gouver-
nement des Etats Sardes entrât en pourparlers avec le Saint-Siège
pour discuter loyalement la question des modifications àapporter au
concordat de Charles-Albert.
On put croire que telle était l'intention du roi de Sardaigne, quand, Députaiion
en octobre i84q, il députa à Portici, où le pape résidait encore, ^^,
1 o- !• 1 f 1. 1 1 1 •
comte Siccardi
lecomte biccardi, charge d entamer des pourparlers concordataires. auprès
Mais la démarche parut suspecte, quand on vit l'envové extraor- ^" P^P^
1- • 1 • , , . (octobre 1849;.
demander préalablement, au nom de son
1 1 1
, ,
dinaire du roi souverain,
que l'archevêque de Turin et l'évêque d'Asti, coupables d'avoir pro-
testé contre les empiétements du pouvoir civil, fussent invités à
Yaincre sans vous, mais nous ne le voiflons pas » (Cité dans l'Ami de la religion d»
17 mars i85o, p. 442).
2. Après le départ du comte Siccardi, le Saint-Père députa à Turin Mgr Gharvaz,
archevêque de Sébasle, pour expliquer au roi le motif de son refus. Le roi dans
sa réponse, du 25 janvier, lui promit sa protection pour les deux prélats de Turiu
et d'Asti, et déclara que les négociations entreprises pour le concordat seraient
reprises en temps opportun. Un mois plus tard, il prétendait trancher lui-même la
question par un acte unilatéral, sous prétexte que le pape avait (( refusé obstiné-
ment un nouveau concordat». L'histoire de toutes ces négociations, appuyée sur
les documents diplomatiques, a été publiée dans un mémoire qui se trouve inséré à
la suite de l'allocution pontificale du 22 janvier i855, dans les Acta Pa IX, pars
prima, t. Il, p. 9 et s. Ce mémoire est une source historique du plus grand intérêt.
3. Voir le texte complet dans l'Ami de la religion du i5 avril i85o, p. 200-201.
PIE IX ET LES I)lVï:nS ETATS DE L EUROPE 401
projet de loi devant la Chambre des députés et devant le Sénat Vote cl jjro-
mulgalion
passèrent légèrement sur ces derniers points, et s'appliquèrent sur- de la loi
-
la loi Siccardi 1
caces de se faire respecter ; mais Pie IX n'a pas d'armée, Pie IX est
en exil *. »
,
milation et d'une volonté qui ne connaissait pas d'obstacle. Cavour
allait prendre sur lui l'immense tâche de poursuivre la lutte contre
la cour de Rome et la cour de Vienne, et de travailler à faire de
l'Italie une des grandes puissances de l'Europe, en l'organisant autour
du royaume de Piémont,
III
Camille Renso, Agé de quarante-deux ans, Camille Benso, comte de Cavour, était
dont il avait été comme le carrefour ; mais l'unité d'un but très
avec l'Eglise : tels sont les buts que le premier ministre de Victor-
Emmanuel se propose. Il les poursuivra au prix d'efforts inouïs^
qui l'useront avant l'heure, mais l'impulsion donnée par lui sera
paternité il dit, au contraire, qu'un <( écrivain illustre, dans un moment lucide »,
:
avait voulu, au moyen d« cette formule, démontrer à l'Europe que la liberté avait
puissamment contribué au réveil de l'esprit religieux [Actes ofjîciels de 1860,
p. 094). Il est de fait que le comte de Monlaiembert se plaignait que cette formule
lui eût été dérobée et mise en circulation par un grand coupable [Correspondant^
août i863/. On saille jugement que d'Azegiio portait sur cette formule, et il a été
démontré, par la session de juillet 1867, quel cas en faisaient les députés... Comme
toutes les formules vagues, celle-ci n'a d'autre sens que celui qu'on lui donne....
Elle va fort bien à ceux qui aiment à créer des situations équivoques pour en
profiter » (Ca-ntiIi, les Hérétiques d'Italie, t. V. p. 285-286). Cf. Charles Benoist^
la Formule de Cavour: VEgise libre dans l'Etat libre^ dans la Revue des Deux Mondei
du i5 juillet 1906.
PTTÎ TX KT T,ES mVT.RS RTATS DE l'kLROPE 4o5
7^6.
4o6 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
l'égard de l'Eglise.
Déchaînement Tandis qu'on exilait les évêques et qu'on mettait le clergé sous la
des passions
révolution- surveillance de la poRce, toute liberté était laissée à la presse révolu-
naires. tionnaire et impie d'insulter le pape et les prêtres, aux émeutiers d'in-
terrompre les prédicateurs dans les églises, aux théâtres de parodier et
de ridiculiser les saints mystères ; si bien que M. Sauzet, dans le
gard tourné vers les regrets »,qui avait frappé Lamartine^ ; et l'auteur
I. cit., p. 3lB.
DupAiîLoup, op.
a. Notamment 19 septembre i852, par une lettre adressée au roi du Piémont,
le
3. Lamartine, Harmonies poétiques^ commentaire de V Hymne au Christ.
4. Lettre à Antoine de Latour,
PIË IX ET LES DIVERS ETATS DE l'eUROPE UO'J
saient présager.
lY
20 avril i85o, le placet fut aboli, les relations avec Rome furent
déclarées libres, ainsi que le plein exercice de l'autorité disciplinaire
et du culte ; le contrôle légitime des évêques sur le haut enseigne-
ment fut garanti 2. Le joséphisme, semblait-il, avait vécu.
La chute de Metternich n'avait pas été étrangère à cette émancipa-
tion de l'Eglise catholique. L'on put croire que c'en était fini de
cette politique à double face, qui, secrètement, en vertu des tradi-
tions joséphistes, chicanait l'action de l'Eglise, et qui, publique-
ment, luttait contre la Révolution^. Le cardinal Schwarzenberg,
l'Autriche est celle-ci elle est engagée dans une guerre secrète contre
: l Eglise,
tandis qu'elle se trouve en état de guerre ouverte contre la Révolution. » Metter-
Nicii, Mémoires, t. VII, p. ^\.
I. WoLFSGRUBBR, Joscph Othmar, cardinal Rauscher..,, Fribourg, Herder, 1898,
p. 98.
3. Voir René Pinon, François-Joseph dans la Revue des Deux Mondes du iC jan-
vier 1917 Henry WicKAM, la Monarchie des Habsbourg, trad. F. Roz, Paris. 191 4,
;
hongroise *. »
Malgré les Un autre sujet de tristesse était donné au pape par l'empereur
réclamations
François-Joseph. Malgré les exhortations pressantes de Pie IX, les
de Pie IX,
empereur troupes impériales maintenaient toujours la Lombardie et la Vénétie
continue
sous le joug oppresseur de l'Autriche ; et l'empereur restait sous le
à occuper
militairement coup des reproches sévères adressés par le souverain pontife à son
la Lombardie prédécesseur, lorsque, dans sa lettre du 3 mai, il suppliait Sa Ma-
et la Vénétie.
jesté apostolique de (( retirer ses armes d'une guerre qui, impuissante
Le péril était d'autant plus grand que ce dessein d'une Allemagne Rôle
groupée autour de des sociétéi
la Prusse et régentée par elle, était celui que pour-
secrètes dan
suivaient depuis longtemps ces sociétés secrètes que nous avons vues les projets
en Europe jusqu'à quel point on peut compter sur le roi de Prusse et quel cas on
doit faire de sa parole. La France a pu s'en apercevoir dans diverses circonstances.
Et voilà cependant le souverain qui a la prétention de s'ériger en protecteur et en
dictateur de r Allemagne. Ce qui est plus extraordinaire encore, c'est que les puis-
sances ne songent pas à s'unir pour prévenir un tel malheur, dont toutes, tôt ou
tard, auront à subir les conséquences funestes. Ce que je viens d'avancer concerne
toutes les puissances de l'EuropeL'avenir ne m'apparaît pas sous un jour riant...
Si l'on continue à laisser gagner terrain à ce principe prussien, qu'auront à
du
espérer ceux qui nous succéderont un jour ? » (Cité par Deschamps, les Sociétés
secrètes et la société, t. 11, p. 898.)
I. Mémoires du général Lamarque, Paris, i835, t. il, p. 4,
a. Dbschamps. op. cit., p. 4oo.
PIE IX ET LES DIVERS ÉTATS DE i/eUROPE /il3
que cet homme n'énonçait pas une opinion personnelle, mais qu'il
« conquête
V Allemagne religieuse, la Prusse gagna sur l'Autriche, progressive-
iî l l'ectuelle » ment, insensiblement, sourdement, une première victoire, d'abord
de la Bavière.
inaperçue des états-majors et même de beaucoup de diplomates.
Cette victoire, obtenue sur les bords de l'Isar, fut la conquête mo-
rale, non plus du peuple bavarois, mais de l'intelligence bavaroise,
et la formation à Munich d'un parti libéral-national » nettement
f<
2. Ibid., p. 24-20.
3. Ernest De:«is, la Fondation de V empire allemand, p. i32-i33.
4. GuiLLATïD, C Allemagne nouvelle et ses historiens, Paris, 1900, p. 169.
PIE IX ET LES DIVERS ÉTATS DE l'eUROPE 4»5
Bismarck.
trente deux ans, il avait déjà cette attitude autoritaire, cet air roide
•^
, , , .
T Son portrait.
et sec, ce regard dur, et, sous la moustache épaisse, ce pli sarcas-
tique des lèvres, qui ne que s'accentuer avec l'âge, lorsque les succès
fit
les jugeait épuisés aussitôt qu'il en avait tiré tous les avantages dési-
rés ^ » « Les conflits, disait-il, deviennent des questions de force.
Celui qui a la force en main va de l'avant. » C'est cette parole que
le comte Schwerin précisa dans la formule célèbre : a La force
gence que la Prusse aurait montrée, selon lui, à établir son hégé-
monie en Allemagne. Aussi, à peine arrivé au pouvoir, le vit-on aller
droit au but, foncer sur ses adversaires avec une audace impertur-
bable. A la Diète, le représentant de l'Autriche avait des preroga- Son
ï™P^'"^j^'"babie
tives exceptionnelles.
^ Il avait seul,' entre autres ^
privilégies,
o le droit
audace.
d'y fumer. Bismarck y apporte un long cigare, et ose demander du
feu à l'ambassadeur autrichien. Tout Bismarck est là, dans ce mince
détail. L'incident du cigare lui conquiert un prestige parmi les diplo-
mates. Désormais, il n'est rien qu'il n'ose tenter. « L'unité de Son plan:
l'Allemagne, a-t-il écrit dans un rapport célèbre, sera réalisée, non 'V^^jl^^Jj^"
par des discours ni des décisions de majorité, mais par le fer et le allemande
^^^^^^
sang, Jerro et saïKjaiae. » Cette unité, en ctfel, se réalisera pai' trois
VI
Attitude En présence de tels desseins, quelle avait été l'attitude des catho-
des catholiques
liques allemands? La plupart d'entre eux acceptaient volontiers,
allemands.
prônaient même avec enthousiasme l'idée d'une unification de l'AUe-
magne. Mais ils repoussaient l'idée d'une Allemagne unifiée qui
aurait Berlin pour capitale et qui exclurait ou absorberait l'Autriche
Leur catholique. Le député rhénan Auguste Reichensperger se fit l'élo-
conception
de 1 unité
quent défenseur de cette conception, qui opposait à la u Petite Alle-
allemande. magne » protestante une «
Grande Allemagne » catholique par ses
éléments et par ses visées. Plus tard, une nouvelle idée se fera jour
parmi les catholiques, comme plus conforme à l'état des esprits et
comme plus facilement réalisable : celle d'une unité allemande fon-
dée sur la liberté des Eglises. Mais la situation faite au catholicisme
était si différente dans les diverses souverainetés, qu'elle doit être
l'objet d'une étude particulière pour chacun des principaux Etats.
Le En Prusse, l'attitude des catholiques fut d abord hésilante,
catholicisme
en Prusse.
anxieuse. D'une part, en entendant des hommes d'Etat comme Bis-
marck affirmer si haut l'alliance, l'identité de l'idée prussienne et de
l'idée prolestante, ils se demandaient s'ils n'allaient pas subir le sort
Ils se placent leur avait donné la liberté. Gomme le faisaient, en ce moment même,
sur le terrain les catholiques de France dans leur campagne pour la liberté d'ensei-
de la
Constitution gnement, les catholiques d'Allemagne, tout en réprouvant le libéra-
et du droit lisrnedoctrinal, se plaçaient hardiment sur le terrain de la ConstitutioQ
commun.
libérale et du droit commun *. Ils ne réclamaient aucun droit pour
eux-mêmes qu'ils ne le réclamassent en même temps pour autrui. Au-
guste Reichensperger intervint plus d'une fois à la Chambre pour défen-
dre les droits lésés des protestants ^. Cette politique lui valut, à lui et
à ses collègues catholiques de la Chambre, une vraie popularité. En
1802, le groupe des députés catholiques siégeant à la Chambre
prussienne, au nombre de soixante-dix, était une puissance politique
avec laquelle il fallut compter. *
1. G. GoYAu, 180-191.
op. cit., t. III, p.
2. Cité par la aoùt-ic septembre i85i.
Civiltà callolica, 11
3. Eu 1843, la Société Gustave-Adolphe s'était fondée pour «soutenir en terre
catholique les petites chrétientés protestantes ». Le roi de Prusse en avait accepté
le protectorat.
4. Pastor, Reichensperger^ t. I, p. 337-338, 356,
suivant ses propres lois. Au surplus, pour Bismarck, l'alliance d'un j^ Bismarck,
certain nombre de protestants libéraux avec la fraction catholique
était impardonnable. Il conçut le plan machiavélique de compro-
mettre, l'un par l'autre, les deux partis. Le mot d'ordre fut donné de
déconsidérer auprès du peuple les protestants libéraux comme alliés
I. C'est ainsi que la Chambre ayant manifesté son mécontentement île la poK-
tique royale par le refus du budget, Bismarck passa outre, et gouverna contre U
majorité, déclarant hardiment que la Constitution n'avait pas prévu le cas où le
parlement refuserait à TEtal les ressources nécessaires,
a. Bis^i.vRCK, p. 129.
3. /6^(i., p. 125.
420 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
Négociations
budgétaires ^. Ce fut ensuite l'entreprise de négociations occultes
avec le entre le Saint-Siège et le gouvernement prussien, dans lesquelles on
Saint-Siège.
faisait espérer au pape la conclusion d'un concordat. Au printemps de
Double jeu i853, Manteuffel parut même vouloir mettre au service du Saint-
de Bismarck. Siège l'influence politique de la Prusse sur les autres Etats de
l'Allemagne. Soit que la diplomatie romaine eût deviné le double
jeu de la diplomatie prussienne ^, soit que d'autres courants eussent
prévalu à Berlin, ces négociations cessèrent brusquement en i854.
Il n'y avait pas à en douter : Bismarck donnait « une sorte de répé-
VII
dans duché de Le
Dans grand-duché de Hesse-Darmsladt,
le le
catholicisme
Nassau, dans le royaume de Wurtemberg, dans le grand-duché de dans les Elats
Dans le dernier de ces Etats en par- rhénans.
Bade, la lutte avait déjà éclaté.
ticulier, elle avait atteint une tragique intensité.
Hostilité
Non seulement les cours de Darmstadt, de Wiesbaden,de Stuttgart
de ces Elats
et de Karlsruhe n'avaient pas suivi, en iSliS, l'exemple de la Prusse, conlreTEglise.
mais elles s'étaient concertées depuis 1820 pour maintenir une
même politique religieuse ; et cette politique était celle d'une bu-
reaucratie tracassière et tyrannique. Le souverain, chef suprême de
l'établissement protestant, y revendiquait les mêmes attributions sur
laisser leur libre autonomie. Que le peuple régisse lui-même les af-
faires communales : un apprentissage de la vie politique, et
il y fera
acquerra la capacité que donne à l'homme le sentiment de sa res-
ponsabilité. » Le nouveau député alla s'asseoir à l'extrême-gauche, et
demanda « le plus de liberté possible pour tous, y compris les catho-
liques » ^.
n est promu A peine installé, en juillet i85o, le nouvel évêque déploya, dans
évêque
de iMayence l'exercice de sa charge, l'activité apostolique que pouvaient faire pré-
(i85o). voir ses précédents travaux . La fondation d'un grand séminaire et de
retraites pastorales annuelles réveillèrent l'esprit sacerdotal, depuis
longtemps assoupi. Des congrégations d'hommes et de femmes, des
confréries, des associations charitables, bravant les tracasseries du
Les œuvres joséphisme, se fondaient ici et là. Ketteler allait, d'un bout à l'autre
de son
de son diocèse, éveiller le zèle des uns, dissiper les malentendus ou les
épiscopat*
conflits des autres, soutenir tout le monde de ses conseils. Ce sei-
gneur féodal avait, dans le premier mandement qu'il avait adressé à
tenait ostensiblement.
Les progrès du catholicisme dans le diocèse de Mayence com-
mençaient à soulever les protestations des protestants et à inquiéter
1. J. LiOKNET, Un évêque social, Ketteler, un vol. in- 12, Paris, 1906, p. 25.
a. Voir ces discours dans Decurtins, Œuvres choisies de Myr Ketteler, Bâle, 1892;
LiONNET, op. cit.. p. 28-89, ^^ donne le résumé.
3. Voir dans Goyau, op cit., i. IV, p. 11- 12, comment Pie IX, passant outre aux
volontés du chapitre de Mayence et de la cour de Hesse Darmstadt, désigna Ketteler.
Cf. LiOMNET, op. cit., p. 43-44»
PIE IX ET LES DIVERS ÉTATS DE l'eUROPE A23
mesure de ces agitations et de ces inquiétudes, i'ardcnt prélat rêvait Pour répondre
à la coaiilion
d'étendre son action au delà de son diocèse de Mayence. Si les sou- des Etats
verains se concertaient pour le maintien de leur politique religieuse, de ia province
rhénane,
pourquoi les évoques ne se fédéreraient-ils pas, de leur côté, pour la
il propose une
défense des droits de l'Eglise i*
•
fédération
des évêques
Les évoques rhénans, sous la conduite de leur vénérable métro- de cette
politain, l'archevêque Vicari, de Fribourg-en-Brisgau, répondirent province.
à son appel.
VIÏI
essaya de peser sur les prêtres. Sur 800, 740 lui opposèrent le même
refus que leur archevêque.
Les Etats Le 5 mars 1 853, les quatre gouvernements de Hesse, de Nassau,
de Hesse,
de Nassau, de Wurtemberg et de Bade se résolurent à répondre aux mémoires
de Bade et de épiscopaux de i85i et de 1862. Ils rejetaient, en bloc et en détail,
Wurtemberg
rejettent les toutes les demandes. Vicari répliqua à cet acte gouvernemental en
réclamations signifiant au ministère badois que les évêques catholiques étaient
des évêques.
résolus à gouverner librement leurs diocèses, à administrer librement
Les évêques les biens ecclésiastiques. Presque en même temps, Ketteler disposait
administrent
leurs diocèses au gouvernement de Darmstadt Blum,
des cures sans en référer ;
aux jésuites qu'ils seraient épargnés s'ils blâmaient les actes de l'ar-
les désirs d'entente avaient fait place, dans l'esprit des deux souverains,
à la volonté de poursuivre à outrance la répression de toute manifes-
tation jugée hostile au gouvernement. Le 19 mai iSo\, Vicari, accusé Arrestation
de Mgr Vicari
d'excitation à la désobéissance, fut déclaré en état d'arrestation et (19 mai
l8J4).
Œuvres, t. V, p. 289-341.
426 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
IX
contre les mesures prises par la diète, qui leur parurent violer le
pacte fédéral. Les douze cantons, formant la majorité, rép >ndirenl en Guerre du
Sonderbund
levant une armée de 5o.ooo hommes commandés par le général
(1847).
Dufour, qui, le lo novembre, fit occuper militairement le canton de
Fribourg. Successivement, les sept cantons, envahis par des forces
1. Saint René Taillandier, dans la Revue des Deux Mondes du i5 janvier i864.
3. Sainte Beuve, Portraits contemporains, t, II, p. 11.
3. A. Vinet, Essais de philosophie morale et religieuse, ip. 3i3.
PIE IX ET LES DIVERS ÉTATS DE l'eUROPE 43 1
Lausanne une « Eglise libre », qui eut son école spéciale de théo-
logie. Mais cette via média n'était pas plus tenable que celle que
Newman avait tentée en Angleterre. Dans l'espace de vingt ans, elle
ne recruta pas plus de trois nnille membres, et eut souvent à essuyer
les hostilités du gouvernement et les railleries du peuple. Alexandre
I. Les deux principaux ouvrages qui assignent à Dalgairns une place honorable
parmi les auteurs spirituels, sont: La Dévotion au Sacré Cceur de Jésus, trad. franc,
par Poulide, un vol. in i3, ae édition, Paris, 1868, et la Sainte communion, trad,
françaiiie de Godard, a vol. in-i3, Pari?, i863.
432 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
Un
• 1 1
à son tour, un résultat non moins imprévu, et, cette fois -ci, heu-
reux pour le catholicisme : ce fut la conversion de celui qui devait
être le successeur de Wiseman sur le siège de Westminster, le car-
dinal Manning.
Henri-Edouard Manning, fds, comme Newman, d'un banquier de Henri
la Cité, était de six ans moins âj^é
D que
^
lui. Gomme Newman, '
il .
o o"°ô"^\
(1808-1892).
• , , , , . .
que, chez Newman, toutes les énergies étaient dirigées vers le déve-
loppement d'une vie intérieure toujours plus intense, la vie exté-
rieure fut toujours, chez Manning, le but de son activité. Dès sa pre-
c'était de la voir gouvernée par une autorité civile. Pour lui, les
1. En 1845, Newman, devenu son ami, lui ayant fait part de son abjuration,
Manning lui en témoigna sa peine, ne lui cachant pas qu'à ses yeux, cette défection
étai^; un péché, ou, comme il disait ailleurs, « une chute » (Li/e of Manning, t. I,
-
p. 309).
2. Sur le procès Gorham, voir Hemuer, Vie du cardinal Manning^ un vol. in-80,
Paris, 1898, p 66-67.
PIE IX ET LES DIVERS ETATS DE L EUROPE 435
préparer
pas de revivifier l'Eglise anglicane, continua à emprunter à l'Eglise
une uuion
romaine ses dévotions, ses formules de prières et ses rites. Il réta- des Eglises
par la
blit deux institutions qui semblaient identifiées à l'essence du catho- restauration
licisme : la vie monastique et la confession. Il fit de l'Eucharistie le de l'Eglise
anglicane et
centredu culte. Mais on se serait trompé en voyant en son œuvre
en détournant
un acheminement vers la soumission à Rome. Pusey ne voulait pas les anglicans
de toute
entendre parler d'une telle démarche. L'Eglise d'Angleterre devait, conversion
selon lui, s'élever par elle-même à la pureté de doctrine et de culte individuelle.
Fondation personnage pour qui toute opinion nouvelle et hardie eut un attrait
de l'Eglise
particulier. Il fit profession de puiser ses informations dans la littéra-
large ,Broad
church). ture et dans la science allemandes. La plupart des opinions témé-
Caractère de raires soutenues depuis en Angleterre sur l'interprétation de la
cette nouvelle
Bible et sur la transformation des dogmes, furent défendues par des
Eglise
pruleeUiite. broad churchmm *,
XI
l^Q Les événements religieux qui s'accomplirent dans les autres Etats
catholicisme ^q l'Europe pendant la première partie du pontificat de Pie IX, de
autres Eiate i8Zi6 à i855, n'eurent pas l'importance de ceux dont la France,
de l'Europe. l'Italie, l'Autriche, la Prusse, la Suisse et l'Angleterre furent les
leva tout à coup trois partis contre lui : le parti dit orthodoxe, étroi-
tement attaché au calvinisme, et qui ne désirait rien de moins que le
gion d'Etat ; le parti dit conservateur, qui, sans aller jusqu'à une Emotion pro-
duite
pareille prétention, craignait devoir disparaître son influence et ses
par l'ado
privilèges ; et enfin le parti des sociétés secrètes, lesquelles, en Hol- pcaiiHcal.
gieuse.
Le Politiquement isolée de l'Europe depuis la chute des Bourbons,
catholicisme
•n Espagne. l'Espagne, sous les coups des événements de iS48, courait le risque
de tomber au pouvoir des factions. Mais le gouvernement avait
eaux K Pie IX, dans son allocution du 20 mai i85o, donna des éloges
à l'Espagne et exprima sa reconnaissance au gouvernement d'Isa-
belle II. L'heure était venue de reprendre, avec plus de chances de
entre catholiques, de longs conflits, qui seront le principal objet des partout
préoccupations de Pie IX pendant la seconde partie de son pontificat, «n Europ©
disait-il peu de temps avant sa mort, est la plus grave, la plus diffi-
cile qui soit au monde mais je ne m'en inquiète guère.. Pie IX est,
; .
recourt,
D^'S son enfance, celui qui devait être le pape Pie IX s'était fait Il
dans
remarquer par une tendre dévotion envers la Sainte Vierge. Chassé de ses épreuves,
à la
Rome par la Révolution, à peine arrivé au lieu de son exil, il conçut
Sainte Vierge.
l'idée, pour conjurer les fléaux qui menaçaient l'Eglise et la société,
Le moyen le plus propre à obtenir une rénovation de piété envers Son projet
de définir
la Vierge Marie lui parut être la proclamation du dogme de son le dogme de
Immaculée Conception. Il demanda à tous les évêquesde l'univers de l'Immaculée
Conceolion
recueillir dans leurs diocèses les traditions touchant la croyance à la
(1849).
conception immaculée de la Vierge.
Lésâmes pieuses comprirent seules la portée de la nouvelle ency-
clique. La plupart des hommes politiques, qui avaient donné une
grande attention aux réformes administratives de Pie IX, sourirent
ou dédaignèrent de s'occuper de cet acte. Il avait dans la pensée du
souverain pontife, et il devait avoir dans l'histoire de son pontificat
une importance considérable. Jusque-là, Pie IX, sans rien abandon-
ner des dogmes catholiques et sans rien céder des droits du Saint-
Siège, avait voulu montrer que l'Eglise était prête à répondre à toutes
les aspirations légitimes des temps modernes : la preuve était faite,
du Sjllubus,
II
ces dix ans d'intervalle, les erreurs modernes vont peu à V"« général»
Pendant
sur le
peu démasquer. La politique d'opposition au Saint-Siège, dirigée
se mouvement
par Gavour, aboutira à l'invasion des Etats pontificaux par les troupes anUcathohque
de Garibaldi et le rationahsme nébuleux de la philosophie aile-
; 1354 à i864.
mande, à la Vie de Jésus d'Ernest Renan.
La politique de Gavour avait inauguré une nouvelle forme de L* ^^^^^
contre
l'opposition des Etats à l'égard du Saint-Siège. Jusque-là, les papes \q Saint-Siège
avaient eu à lutter, soit contre des puissances nettement hostiles à ^*"^
1.1-,
1 Eglise,
,.
qui
. 1
la
,
•
miscer dans ses afl'aires ; mais c'était à la condition que l'Eglise cette politique
n'intervînt d'aucune sorte et sous aucun préte;i.te, fût-ce pour le bien religieuse,
spirituel des âmes, dans les affaires de l'Etat. Tel était le sens qu'il
donnait à la devise qu'il adopta plus tard : rEylise libre dans l'Etat L'Eglise libre
libre. G'était l'introduction de la thèse libérale dans les relations i^iai in^re,
diplomatiques des Etats avec l'Eglise.
La politique religieuse de Gavour eut deux autres caractères. Bien
qu'ayant. pour point de départ et pour biUfinai un intérêt strictement
national, elle eut l'ambition d'entraîner dans son mouvement tous
les Etats de l'Europe ; et, tout en voulant se maintenir sur un terrain
conservateur et catholique, elle eut la prétention de capter à son pro-
fit les forces révolutionnaires : tâche ardue
gageui^ entre toutes,
irréalisable, mais devant laquelle ne recula pas l'audace de Gavour.
Afin de faciliter l'intelligence dei faits qui vont être racontés, nous croyons
I.
utile de donner ici la division des Etats pontificaux, telle qu'elle avait été établie le
jo novembre i85g. Elle comprenait l'arrondissement de Rome et quatre Légations,
i/arrondissement de Rome se composait de la Ville éternelle, de sa banlieue, des
provinces de Viterbe, d'Orvieto et de Givita-Vecchia. La première Légation, connue
sous le nom de Romagnes, renfermait les provinces de Bologne, Ravenne, Forli et
Ferrare. La seconde Légation, désignée sous le nom de Marches, était formée des
provinces d'Urbino, Pesaro, Macerata-Loreto, Ancône, Fermo, Ascoli, Gamerino.
La troisième se composait des provinces de Rieti, Spolète et Pérouse et la quatrième,
—
;
dont elle jouissait, que son seul objectif était de séparer le domaine
temporel du domaine spirituel, TEtal de TEglise ' » ; tandis que le
. . . . .
evçque
aux intérêts romains, qui fut la caractéristique de sa carrière épisco- de Poitiers.
pale, fit entendre des protestations indignées, qui, par delà les agi-
III
des avocats, des hommes de lettres s'y rencontrèrent avec des artisans
et des ouvriers. Partant, l'action de ses membres fut très variée : tandis
que i'hoiiime du peuple propageait la doctrine de la rénovation de
l'Italie parmi ses camarades d'atelier, des poètes, des artistes, des
u romanciers exaltaient la patrie italienne, et des savants recueillaient
collaboration
du parti
patiemment tous les vieux textes qui pouvaient servir à la glorifi-
mazzinien cation de la cause nationale. Naturellement, la grande majorité des
avec Cavour
lincline vers associés appartenait aux sectes révolutionnaires ; les idées de Mazzini
l'hostilité formaient le fond de leur profession de foi ; et, s'ils désiraient l'unité
envers
le Saint-Siège.
italienne avec autant de passion que le ministre Cavour, pour eux le
11
;
Désireux de faire servira son entreprise toutes les forces qu'il pour- Cayour
mam, sans
111
trop regarder a leur valeur morale,
» abouche
avec GaribaMi
Cavour ne pouvait négliger l'étrange condolllere qui, depuis 18^8, (^^^7)'
pi« micrc fois vers la lin de l'année 1857, sans se dissimuler qu'un
Ilisl. gén. de 1 Eglise. _ VIII ^9
45o HISTOIRE Gryr.RVT.E DE I- FGMRE
par contre-coup, dans toute l'Europe 2». Mais le seul souci de ne pas
s'aliéner la portion la plus compacte du parti conservateur pouvait
suffire à rendre l'empereur hostile à toute entreprise menaçante pour
la tranquillité du Saint-Siège. Avec une sollicitude anxieuse et une
persévérance obstinée, dont sa correspondance porte les témoignages,
Gavour s'appliqua à combattre, dans l'esprit de l'empereur, tout ce
qui pouvait le préoccuper fâcheusement dans l'entreprise piémon-
a» du CÔÎ6 taise 3. La tâche était d'autant plus difficile, qu'il fallait, d'autre
de Mazzini,
mécontent part, apaiser Mazzini, lequel profitait alors du mécontenteme t
d'avoir été populaire provoqué par une récente levée d'impôts, pour donner une
écarté de toute
combinaison vitalité nouvelle à son parti. Quant au clergé italien, s'il était en
politique ; grande partie favorable à un mouvem^ent national, il était surtout
sensible à toute attaque, à toutemenace dirigée contre le pape. Dans
30 de l'ensem- son allocution Probe rnemineritis du 22 janvier i855, Pie IX s'était
ble des
catholiques, plaint de « la hardiesse » avec laquelle le roi de Sardaigne ne crai-
(iue les plaintes gnait pas de « violer l'indépendance de l'Eglise » et de « faire les
de Pie IX
ont émus.
1. Un cousin de l'empereur, le prince Lucien Murât, avait été élu, en janvier
i853. un mois après le coup d'Etat du 3 décembre, Grand Maître de la franr-
maçonnerie. C'est lui qui aclieia le fameux immeuble de la rue Cadet.
2. Ba.ln.vrd, Hist. du card. Pie^ t. I, p. SgS. Cf. Marquis de Ségur, Souvenirs et
récits d'un frère, l 1, ch. ixetxi.
3. Gavoor, LeUere édite e inédite, t. Il, p. 48/j, hç}2, 6o5 ; t. VI, p. 69, lOO.
DE LA BULLE lne[Jahifi<i a l'engycltque Quanta cura /|5i
une tournée dans ses Etats, et provoqua sur son passage lès accla-
rv
I. Recueil des allocutions^ encycliqueSf elc, cilées dans le Sjllabus, un vol. in-8»,
Paris, i865, p. 347.
a. Sur ce voyage, voir CuAr^iREL, Annales ecclésiastiques, p. a58, aSï-aSô,
45S). niSTOlRTî GÉNÉRALE DE l/ÉGMSE
d'Orsiui ». de taire lire, en pleine cour d assises, par son avocat, Jules Favre,
une lettre à l'empereur, qui se terminait par ces mots : « J'adjure
Votre Majesté de rendre à l'Italie son indépendance... Que Votre
Majesté se rappelle que les Italiens versèrent avec joie leur sang pour
Napoléon le Grand... Qu'Elle se rappelle que, tant que l'Italie ne
sera pas indépendante, la tranquillité de l'Europe et celle de Votre
Majesté ne seront qu'une chimère... » Peu après, le préfet de police,
Pielri, alla trouver le condamné dans son cachot, et obtint de lui
qu'il écrivît une seconde lettre, pour engager ses amis politiques à
renoncer aux moyens violents, tels que l'assassinat, et leur faire
entendre que raffranchissement de Tltalie était à ce prix. Orsini
écrivit la lettre, puis, payant sa dette, monta sur l'échafaud, où il
pour eût été en état de siège; plus de deux mille républicains furent
Napwléon III
arrêtes
.,
; et
, ,
p. bl\o-blii.
i
DE LA BULLE TieJJahUh A l'e!^ctchque Quanta nira /i53
Cette affaire fût permis d'exercer sur lui une influence religieuse dans le sens du
devient
judaïsme. Dès que la presse hostile à l'Eglise fut au courant de ce
Toccasion
de fait, ce fut un toile général contre les « lois surannées » du gouver-
vives attaques
nement pontifical, contre « l'oppression du droit naturel par le droit
contre le
gouvernement théologique ». Depuis longtemps les ennemis du pouvoir temporel
pontifical.
n'avaient pas trouvé terrain plus propice à leurs attaques. Presque
seul dans la presse catholique, V Univers prit nettement et dès le
« Permisit tamen divina Providenlia ut ipsis nostris temporibus quaedam exempki da-
rentar, tum in manifestalionem sanrtitalis et effîcaciae sacramenti, tum in attestationem
jurisatque ojficii quod habet Ecclesia apud baplizatos ï> (Billot, loc. cit,].
DE LA BULLE Ineffabllls A. l'enctclique Quanta cura 455
(4 février
étaient abordées et envisagées dans toute leur ampleur. Le gouver- 1869).
nement pontifical y était représenté comme ayant un besoin urgent
de rénovation, d'adaptation à l'esprit moderne, et le pape comme
incapable de réaliser cette rénovation. Les autres princes d'Italie y
étaient dépeints comme également impuissants, soit du fait de leur
assujettissement à l'Autriche, soit du fait de leur isolement. Le salut
de l'Italie, suivant l'auteur de labrochuie,nepouvaitluivenir quepai
son unification, réalisée en vertu du principe des nationalités. Le chef
de la dynastie napoléonienne avait jadis nettement proclamé ce prin-
cipe, lorsque, en ceignant la couronne d'Italie, il s'était écrié : u J'ai
Napoléon III veut les aiTranchir sans les conquérir ». Ou eut plus tard
la certitude que la brochure avait été écrite par un serviteur dévoué Importance
de cette
du second empire, M. de la Guéronnière, sous l'inspiration de l'em- publication
pereur Napoléon III lui-même.
Le projet exposé dans la brochure n'était qu'une application de la
dfl''° *d^"^ll
1-0^^'» repoussait énergiquement l'idée d'une agression violente du
de Cavour patrimoine de saint Pierre, agression qui, pensait-il, briserait l'har-
^ nionie de ses rapports avec France, donnerait trop au
à^ C
la d'élan
ifld'
parti révolutionnaire et blesserait en outre ses sentiments intimes,
qu'il professait être ceux d un catholique respectueux du chef de la
pide : les plus hésitants seraient amenés à dire, avec le roi Victor-
lutte à la fois sur TAdige et sur le Rhin, et il avait cru plus prudent
de traiter avec l'ennemi. Quant aux clauses consenties à Villafranca,
que le traité de Zurich devait ratifier le lO novembre suivant, l'em-
pereur les notifia au pape, le i4 juillet, en ces termes : « Très Saint-
Père, je viens de conclure la paix avec l'empereur d'Autriche aux
Clauses conditions suivantes : i" les deux empereurs s'efforceront de cons-
relatives au
Saint-Siège. tituer une fédération italienne sous la présidence du Saint-Père ;
la confédératioû italienne ;
6** une amnistie pleine et entière sera ac-
cordée à ceux qui ont pris part aux derniers événements *... »
Cette paix Cette paix ne contenta personne. On raconte que Pie IX, à la lec-
ne contente
ture de la lettre impériale, s'écria : « C'est beau : le doge soulevant
personne :
ni le pape, ou apaisant d'un geste les flots de l'Adriatique ! Mais je ne veux pas
ni l'opinion
de cette fédération ni de ce gouvernemeat laïque 2. » Il comprenait
publique
française, que la présidence qu'on lui offiait ne serait qu'honoraire, et que la
ni l'opinion
présidence effective de la confédération appartiendrait au Piémont.
publique
italienne. De son côté, l'opinion française fut défavorable au traité. « Nous
vivions tous alors, a écrit Emile Ollivier, sur l'idée de la puissance
irrésistible de l'armée française... Aucune qualification blessante
ne fut épargnée à l'empereur, parce qu'il avait douté que nos soldats
pussent victorieusement soutenir le choc des Autrichiens surl'Adige,
des Prussiens sur le Rhin. Mais si en France on fut déçu, en Italie
1. Voirie texte in extenso de la lettre dans Enaile Ollivier, qui l'a publiée le
premier dans son ouvrage l'Eglise et VEtal au concile du Valicany t. II, p. 455-456.
2. E. Ollivier, op. ci/., p. 457.
3. Ibid., p. 453-454.
DE LA BULLE Incff^abills A l'engycliql'e Quanfa cura libg
objets constants de son zèle infatigable. H eut le sens avisé des si-
tuations, des opportunités, et, plus d'une fois, celui des interventions
courageuses- Pour le diocèse de Bordeaux, qui se glorifie d'avoir vu
passer sur son siège métropolitain plusieurs princes de l'Eglise d'un
mérite éminent, le cardinal Donnet est resté, par excellence, « le car-
dinal 0.
le monde attribua,
1
des sa publication, a
1
la même ins- ^g p^^g
Congrès
piration et à la même rédaction que la brochure de février intitulée «' le
Napoléon III et L'Italie. L'œuvre nouvelle avait pour titre : LePape et i85y).
le Congrès. Elle avait été effectivement inspirée par Napolcoi III lui-
même et rédigée par M. de la Guéronnière 3. Avec un n.éldnge sin-
le n . .
en termes empreints
.
de
,
respect, la brochure
qu'« il s'était trouvé impuissant à arrêter l'établissement du nouveau (^^^ janvjcr
régime
, .
»
,
et laissa
.
\
entendre que,
.
si le
,
pape consentait a
. , ^
taire
. ,
le sa-
1860).
^ Pie iX.
1. Chantrel, p. 389.
2. Cf. Villemain, la France, Vempire et la papauté, Paris, 1860. Voir dans
G. Vauthier, Villemain, un vol. in-i2, Paris, igiS, p. igS-iQÔ, la lettre adressée
à Villemain par le comte de Chambord au sujet de cet écrit.
3. Sur la suppression de VUniverseih fondation duMonde, voir Eugène Vbuillot,
Louis Veuillol, t. 111, p. 808-379.
DE LA BULLE IiicJJahîlh .\ L*ENCTCLiQUE Quanta cura /i63
VI
Napoléon lU, dont la politique était aussi hésitante dans la pra- « Combinai-
tique qu'elle était aventureuse dans ses conceptions, essaya d'enrayer **^" "
tiouiiair';.
La pltiparl de ces polémistes, aussi bien que les libéraux non catholiques qui,
1.
telsque Thlers, s'ôlaient prononcés contre la politique italienne de A'apoléon ill,
condamnaient également la violation du domaine temporel de la papauté et l'unité
italienne. Presque seul, le P Lacordaire, dans sa brochure De la liberté de l'Eglise
et de ritaliey parue le 26 février 1860, faisait entendre une note sensiblement
dilTérenle. « Afiîrmons-le, disait-il, le domaine temporel de la papauté, à le consi-
dérer dans son essence et dans son histoire, n'a rien d'incompatible avec la
nationalité et la liberté de l'Italie» (Lacordaire, QEaures, édit. Poussielgue, t. VU,
p. 3i4). « L'écrit sur la Liberté de l'Eglise et l'Italie, dit Foisset, fit une sensatiou
très vive. Douze mille cxciripUires s'en écoulèrent on moins de quinze jours.
L'impression première, à Rome mémo, fut favorable » (Koisset, Vie de Lacordaire,
t. 11, p. 388).
2. CUANTHEL, p. 887,
46/. HISTOIRE GliNKRALE DE L EGLISE
Echec ques jours, disait-il, nous recevrons de France, sur tout cela, une
de cette «com- d'ultimatum à l'eau de rose
sorte « ». « L'empereur montre les
binaison ».
dents, disait un autre Italien ; mais ce sont des dents artificielles. »
Comme conclusion de tous ces pourparlers, le 24 mars i86u, le
L;i présence ment chargé de défendre, contre toute attaque, les Etats pontificaux.
d'un corps
Mais « d'abord la protection n'était que partielle : 1res ellicace à
de troupes
françaises Rome et dans l'ancien patrimoine de saint Pierre, elle ne couvrait
à Kome ne
garantit pas
ni matériellement ni même moralement les territoires situés au delà
suffisamment de l'Apennin... Puis, le protecteur s'autorisait de ses services pour
riiiclépendance
donner ses avis, pour conseiller des réformes... En outre, les Fran-
du
Saint-Siège. çais avaient une manière à eux de soutenir le pouvoir pontifical ; ils
Le monde pour ne pas sentir ces nuances *. » Il était visible que le gouverne-
catholique
ment pontifical ne jouirait d'une entière indépendance que lorsqu'il
cherche
à pourvoir pourrait disposer, d'une part, d'un budget suffisant à son entretien et
à cette
Dès l'année 1849, ^^^^ ^® l'exil de Pie IX à Gaëte, des catho- création du
corps des
liques de diverses nations s'étaient spontanément empressés de venir, a Voiontaircb
par leurs offrandes, au secours du pontife spolié. En i85o, un catho- ponllEcaui ».
raient au monde en offrant à leur Père conlmun, sous les seules ins-
pirations de leur foi et de leur amour, le tribut qu'ils lui fournis- Initiative
de.
saient autrefois en obéissant aux ordres de leurs princes. Cet appel catholiquei
fut entendu. Des quêtes, des souscriptions furent organisées en Bel- belges.
1. De KalhoUck^t XIX, p. 69 et s.
3 Sur l'ancien Denier de Saint Pierre, voir le Dict. de théologie de WEizEuet
AN KLTE, au mol Denier de Saint- Pierre; au même mot, le Dict. d'archcoli.yie de Dom
C .uuoL, l, 111, col. 58.") 5S7. Cf. lîevue calh de Louvain, t. XMll, p. oy et s.
3. Revue catU. de Louvain, t. X\ III, p. ôSô-ôgd.
A. Revue cath., t. XIX, p. 218-222.
5. Ami de la reUjion du i5 novembre 18Ô0, p. 383-384*
Hist. gén. de 1 Eglise. — VI H âo
466 HISTOIRE GÉNFRAF.E DE i/ÉGMSB
conquis, sur les champs de bataille et dans les luttes de la poli- Lamoricière.
par les sophismes des rêveurs qui prêchaient une vague rénovation
sociale, il avait récemment retrouvé la foi de son enfance, et l'affir-
mait avec courage devant ses anciens amis. Quelques mois aupara-
vant, M. de Corcelles, ancien ambassadeur de France à Rome,
ayant parlé devant lui de la cause pontificale : « C'est une cause,
avait-il dit, pour laquelle il serait beau de mourir, i) Quand, le 3 mars
18G0, Mgr de Mérode vint le trouver en Picardie pour lui trans-
sud pour remonter vers le nord. Soyez sûr que, quand l'heure sera
L'expédition venue, je ne le céderai en audace à personne *. » Officiellement, le
des Mille.
Garibaldi
premier ministre de Victor-Emmanuel désavoua l'expédition 5.
1ère libéral, fit prévoir une alliance avec le Piémont, puis, changeant
de tactique, se tourna vers la Russie, l'Autriche, la Prusse, la France,
l'Angleterre, appelant l'altenlion de ces puissances sur le péril d'un
agrandissement excessif du Piémont *. Pse trouvant aucun écho
favorable dans ces puissances, se sentant abandonné, trahi, dans
Naples même, et jusque dans son entourage, par suite d intrigues
auxquelles Cavour n'était, dit-on, pas étranger, le 6 septembre 1860,
le roi de Naples s'embarqua, avec sa famille, sur un navire espagnol
à destination de Gaëte, au milieu d'un peuple S}mpathique, mais
silencieux, dont le respect craintif n'osait se manifester par aucun
signe extérieur. Le lendemain, sans coup férir, Garibaldi, devançant
sou armée avec quelques compagnons, piit possession de Naples -.
VI
force, ce bonheur inouï dans l'audace, fit de lui, aux yeux des je GariISjL
masses, une sorte de héros mystérieux, surhumain. Il fut l'Impre-
tel
1
ascendant,
,
qu'allait
, . .
il
.
faire?
11 personnifie
désormais
Envahir les Marches, suivant son plan primitii ? Se diriger vers le ^® mouvement
Pian peu êcrupuicux sur le choix des moyens que l'était Cavour, un
pour empocher "^ojeu se présentait de parer au danger : on n'avait pu devancer Gari-
Garibaldi baldi à Naples, il fallait le devancer à Rome. Le parti de Cavour
•on profit ^^^ aussitôt pris en ce sens ; et, chose étonnante, quidoime une idée
le mouvement Jg l'état d'esprit de cette époque, quelques patriotes italiens, de
nalional . .
. .i i- i i> . r -
,
italien :
nuance conservatrice et catholique, semblèrent se résigner a cette
devaucer le extrémité, Que voulez-vous ? disait le comte Pasolini, ancien
a
ie territoire
nuuistre de Pie IX je comprends maintenant qu'il ne reste plus à
;
(28 août ^^^^ AU parait avoir été vaincu, a son tour, par le raisonnement qui
1860). avait décidé Gavour. Des mystères planent encore sur l'entretien que
l'empereur des Français eut, le 28 août 1860, à Ghambéry, avec
. le ministre italien Farini et le général Gialdini. Si Napoléon ne dit
pas la parole célèbre : « Fate presto. Faites vite », qui lui a été
attribuée 2, elle semble bien exprimer le fond de sa pensée, telle que
ses actes subséquents la révèlent. Un grave historien a cru pouvoir
écrire, à propos de l'attitude de Napoléon dans cette affaire : « Je
ne sais si le mot de complicité serait tiop dur ; mais le mot de fai-
leddomaine du
5
]^ conscience publique de l'Italie et de l'Europe » *. Il demanda,
par la voie d'un ultimatum, le désarmement immédiat des nouvelles
troupes du Saint-Siège. La sagacité d'Antonelli vit le piège. On vou-
lait provoquer une réponse violente de la chancellerie romaine, la-
Aïo, et ViLLEFRANCHE [Pie IX, a' édition, Lyon, 1876, p i88j, qui déclare tenir
de témoins bien informés certains détails très importants de l'entretien.
3 La Gorge, t. III, p. 4o8,
4. Ibid., p. 4 10.
DE LA BULLE IneJ[]ahUis a l'e.nctclique Quanta cura 471
était, après Rome, à peu près la seule qui pût être efficacement dé- Plaa
stralégiqi.e
fendue, au moins pendant un certain temps. On
y prolongerait la de
défense jusqu'à l'arrivée des renforts français. Car, fort des assu- Lamoricière.
p /»8a, 486, 488, 4y3. Le duc de (îramont t'crivait au consul d'Aiicôue « L'em- :
pereur a écrit que, si les troupes sardes péi ètreul sur le territoire ponliHcal. il
sera forcé de s'y o^)pu» r » {lUd., p. 493). Comment la perspicacité dAntonelli s'est-
eile trouvée en défaut dans de si graves circonstances ;
3. Voir une description détaillée du champ de bataille dans Lamoricière, Iiapport,
p. 497-^98.
^72 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISB
(18-20 septern-
^^f^^^^'® ^^^ soldats valides, capables de défendre la ville. G était peu
bre 1860) pour une place dont les ouvrages de défense avaient sept kilomè-
tres de développement et qui se trouva bientôt assaillie, du côté de
la terre par l'armée de Cialdini, du côté de la mer par une flotte de
onze gros navires portant plus de 4oo pièces d'artillerie. C'était
comte de Ségur, les Martyrs de Castelfidardo, un vol. in- 12, Paris, 1860.
DE LA BULLE IneffabiHs A l'ewctclique Quanta cura 473
1. Le général de Go)on était, on le sait déjà, le chef des troupes françaises desti-
nées à protéger l'Etat pontifical.
2. L.vMORiciiDRn, liapporl, p. 5o8-5a5.
3. A en croire Thouvenel, l'empereur n'aurait été pour rien dans la brochure :
l'inspiration en appartiendrait au comte de Persigny. (^THOUVEitEL, h Secret de l'em-
pereur, t. I, p. 432).
4. Baunard, Ilist. du card. Pie, t. Il, p. 116.
Ixik HISTOIRE GENliUALE DE L ÉGLISE
baldi, en même temps que vous vous disiez son plus grand ennemi ;
comme l'était resi)rlt de Napoléon, par les nuées d'une idéologie sans
contact avec les réalités, pour ne pas voir qu'au point où en étaient
venues les choses, ni le pape ne sanctionnerait les violentes injustices
si faire se peut. »
Nous verrons bientôt con ment cette convention, au lieu d'assurer
VIII
Portée de la
^^^ yeux de tous les catholiques, le traité franco-italien parut
Convention
du i5
.
exprimer, suivant
^ .
les expressions d
•
j'
un w ,
historien,
'
v
i' u
l abandon
ï
a
'
toire sarde. Cet ordre fut signé par l'empereur ; mais, deux heures
plus tard, il était rapporté. Devant les observations de ses ministres
et de ses principaux généraux, consultés par lui, qui lui rappelèrent
les vides de son année, qui lui montrèrent les blessures de Magenta L'empereur
François-
et de Solferino saignant encore, qui lui firent entrevoir la France
Joseph
passant de nouveau les Alpes et la révolution se déchaînant sur son seprononce
monarque continua à demeurer à l'ancre, pour la non-
pays, le recula, u Sa flolte
intervention
dans le port de ïriesLe, d'où elle put entendre, quelques jours après, dans
la question
le bombardement d'Ancône ; et l'armée du Mincio s'immobilisa iré-
romaine.
missante dans son quadrilatère, en attendant que l'unité itaiienne,
devenue une réalité, se coalisât avec la Prusse pour l'expulser*. »
Les puissances signataires des traités de Vienne, qui avaient juré Inaction
d'intervenir à main armée contre quiconque essayerait de briser des puissances
signataires
l'équilibre établi par elles, restèrent immobiles. La Russie contem- des traités
pla, sans rien dire, la catastrophe 2. L'Angleterre, par l'organe de ses de i8i5.
Ajoutant à ses agressions dans Tordre temporel des empiétements dont î'Ëglise
e6t l'objet
dans l'ordre spirituel, le roi d'Italie, par un décret du i6 mars i863, de la pari
des dilTérents
soumettait à Vexequatur royal « toute provision ecclésiastique venant
Etats
d'une autorité non résidant dans le royaume », et un grand nombre de l'Europe.
d'actes concernant les bénéfices, les legs pieux, les aliénations de
Le
biens d'Eglise, les dispenses d'empêchement de mariage,' les dispenses gouvernement
de vœux monastiques et autres questions analogues^. L'année sui- italien
s'ingère
vante, le 12 juillet i86/i, une ordonnance royale exigeait le placel, abusivement
dans le royaume d'Italie, pour tous resciits ou décretô des Ûidinuires dans
l'organisation
de la
hiérarchie
cathuliquc.
1. VlLLEFRANCHB. Pie IX, p. IqS.
2. (( L'anlipalhie qui lui était commune avec l'Autriche à l'égard du principe des
nationalités, le respect qu'elle professait pour l'ancien droit européen et pour let
traitesmenacés, tout semblait faire un devoir à la Russie de prendre parti contre
luiiilé italienne, mais la logique de l'intérêt et des passions l'emporta sur la logique
des principes. On la vit, par ses manœuvres, fournir aux révolutionnaires l'appoint
qui leur manquait «(Lescuklh, lE(jlise catholique en Pologne, ^ aiG)
3. Voir le texte complet du décret dans Chantrel, Annales ecclésiastiques, p. D22-
478 HISTOIRE GE\ER\LE DE L EGLISE
3. Chantrel, p. 45o.
4. Circulaire de Persigny du 6 octobre i86i (Ghantrkl, p. 459). Cf. Cuamtr£l,
p. 406, 479. 48o.
5. Ibid , p. 470.
DE LA BDLLE InejffdbUis A l'engtcltque Quanta cura A 79
s'immisçait dans la direction des séminaires et des couvents, et don- j^^ mêmet
oait au clergé de nombreux sujets de plainte. Les tribunaux de erremenii.
Rome et lança l'idée de l'union avec l'Eglise catholique. Dès 1860, ^ *j^^^
I. CnAtfrREL, p ^86.
2. Ibid., p. /187 ',88, 495-^96 ; 534.
3. /6«(/., p. 399.
4. Ibid., p. /i*54.
48o HISTOIRE GÉNéRALE DE l'ÉGLISE
orthodoxes.
Solennellement la liberté aux catholiques, ni en 181 5, tandis
qu'Alexandre 1" se faisait le chef de la Sainte-Alliance contre la
Révolution, elle ne s'était fiée sans réserve aux promesses de lem-
pire des tsars. Au fond, ceux-ci ne se considérèrent jamais comme
liés par de tels engagements ni envers les nations dont ils se faisaient
les protecteurs, ni envers les catholiques ruthènes de leurs Etats, ni
envers ceux de Pologne. Le principe de la « raison d'Etat », qui,
sous les gouvernements absolus^ sert trop souvent à couvrir les
catholiques romains ^
Vers i856, au moment même oij sévissait la persécution russe PersécuUo»
Paris, 1903.
2 N oir les faits cités par Lesccbur, op. cit., p. 220-22S,
3. Ijid., p 225-2a6.
4. Ibid.^ p j43.
Hist. gén. de TEglise. - VIII •
48a HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
ne laissaient pas entendre qu'elles appuieraient leurs réclamations par des actes, \h
Russie se contenta de répondre qu'elle ne se tenait pas pour liée par les traités d-
DE LA BULLE ïneffabUis À l'enctclique Quanta cura l\S'i
Prusse, dont la politique était gouvernée par Bisnnarck^ elle aida le Bismarck
aide le
gouvernement russe à écraser Pologne, en signant une convention gouTernemont
la
siège ou dans les catacombes, est toujours le même, et que son carac-
tère est indélébile.
Et que personne ne dise qu'en m'élevant contre le
potentat du Nord, je fomente la révolution européenne. Je sais biea
IX
LemouYemenf L'année i863 avait donné au Père commun des fidèles un autre
•nticljrétien.
grand sujet de tristesse. Les Etats de l'Europe, qui avaient assisté,
impassibles ou favorables, à l'invasion du domaine pontifical et à
l'écrasement de la Pologne catholique, avaient laissé se propager sans
entraves un écrit blasphématoire, qui renouvelait, en l'adaptant à
la mentalité des temps modernes, l'hérésie d'Arius. Cet écrit, qui
avait pour titre Vie de Jésus et pour auteur un professeur au Collège
de France, Ernest Renan, avait vu le jour à Paris; mais il exprimait
un mouvement d'idées qui, né en Allemagne, avait influencé plus ou
moins la pensée européenne.
Ses origines En i835, un Allemand, Henri Heine, terminant une étude inti-
^" tulée De Kant à Heqely écrivait « Ne riez pas de ces conseils, quoi-
^ „
:
AUemagne. .,
qu ils
•
. j» * • • •. '
j t j
viennent a un rêveur, qui vous invite a vous défier des
kantistes, des fichtéens, des philosophes de la nature. . . La pensée
précède l'action, comme l'éclair le tonnerre. Le tonnerre allemand
n'est pas très leste, et vient en roulant un peu lentement ; mais il
en i835. sachez que le tonnerre allemand aura enun touche le but^ ». JNous
n'avons ici à parler que de la malfaisante influence exercée par
l'Allemagne, au milieu du xix* siècle, sur la philosophie religieuse.
Les idées Kant, en voulant réduire l'enseignement évangélique à la morale
'"^^^ç®"^^^ de limpératif catégorique, et toute la loi surnaturelle du christia-
connaissance, et, en 1020, Jbdgar Qumet, dans une étude sur allemandei
Herder, avait invoqué et glorifié « l'idéalisme créateur de l'Aile- P'"
-,.,,.... , ., , .
, ^ . , . \ ictor Cousia
magne ». Mais 1 initiation philosophique tentée par Lousin était et Eigar
incomplète, et l'œuvre de Quinet n'était qu'un appel éloquent. Quiuek,
Kants.
Après trois ans de séminaire, et avant de prendre les engagements
définitifs du sous-diaconat, Renan, « voulant, suivant ses propres
expressions, quitter un intérieur qui ne pouvait plus être qu'un
mensonge » 6, abandonna l'état ecclésiastique, et se livra aux études
Rentn orientales. Son incrédulité, son hostilité contre l'Eglise se manifes-
commence tèrent d'abord en des écrits pleins de fiel. « Ses premiers manifestes,
par attaquer
violemment
l'Eglise 1. RB!tA!», Souvenirs d'enfance et de jeunesse, p. 268. Il y a ici un mot de trop,
•t ses dogmes. JËrnesl Renan perdit la foi avant d avoir étudié l'hébreu. Voir Cognât, M. Renan
hier et aujourdkui, 2^ édition, p iia.
2. Ibid., p. 740.
3. Ibid.. p. 7/Î2.
4. A.bbé Cognât, M. Renan hier et aujourd'hui, un vol. ia-8, Paris, 1886, a e édi-
tion, p. 3i, lia. Cf.ViGOUROux, Mélanges bibliques, un vol. in-ia, a® édition, Paris,
1888, p. 53a, note 3. Les Souvenirs de Renan doivent toujours être contrôlés par
«eux de 1 abbé Cognât, son condisciple de séminaire,
5 . J'aime beaucoup la manière de tes penseurs allemands. Si tu vas jamais à
Ci
« pour se faire adorer comme il l'a été, il faut qu'il ait été adorable»*,
qu' « il est permis d'appeler divine sa sublime personne » ^ sous La
;
Vie de Jésus.
cette apparente sérénité, où perçait une ironie hautaine, toute
l'œuvre reposait sur deux partis pris philosophiques qu'il avait pui-
sés, le premier chez Kant, et le second chez Hegel, à savoir : i que
toute révélation est d'avance condamnée par la philosophie, car elle
seraitune dérogation aux lois générales de la nature; et a qui dit au- L«t deux
principes
dessus ou eu dehors des lois de la nature dans l'ordre des faits, dit pseudo-philo-
une contradiction » 6 ; 2" que tout est en voie de se faire, même sophiques
sur lesquels
Dieu. Sur ces principes, la pensée et la phrase de l'historien, ou repose
plutôt de l'exégèse
l'artiste, du dilettante, se jouent, se nuancent, s'opposent,
d'Ernest
se contredisent, essayent de se concilier en des formules ambiguës, Renao.
sonores et chantantes, où l'auteur se plaît à faire résonuer le
a carillon » qu'il prétend avoir reçu, comme un dou inné, de la
et de ses déiste ? On l'ignore, car « si Dieu n'est pas encore, il sera peut être
méthodes.
un jour ». Sa méthode d'exégèse est elle naturaliste comme celle de
Pauhis, mythique à la manière de Strauss ? Gela dépend ; car il est
prêta adopter l'explication la plus commode, la plus poétique, ou la
plus pittoresque, peu lui importe, pourvu que le surnaturel soit
exclu. Finalement, est-il religieux? Il répond lui-même: oui et
non ; car ce disciple de la pensée allemande semble avoir pris pour
devise le distique de Schiller : « Quelle religion je professe ?
Aucune de celles que tu nommes. — Pourquoi aucune ? — Par
religion. »
tère du livre ^ . »
Les prêtres en chaire, les évêques dans leurs mandements, les
plus véhémente fut celle de Mgr Pie, évêque de Poitiers, qui, non
Vive content de flétrir, lui^ successeur de saint Hilaire, les blasphèmes du
protestation
nouvel Arius *, fit tomber une part de la responsabilité du scandale
de Mgr Pie.
sur les pouvoirs publics*. La Revue des Deux Mondes^ le Jouih'.. /es.
nettement sur
,
le
.
.
Jugez à quels temps nous gommes arrivés, pour que, dans une nation catho-
I. «
lique, un homme, nonle premier venu, mais un homme public, comblé d'hon-
neurs insignes, soutenu de l'argent des contribuables, bien plus encore, occupant
d'office une des chaires académiques les plus émioentes, ait pu néanmoins, sans
réclamation d'aucune autorité, avec l'applaudissement de la foule des journalistes,
tveo d'autres encouragements encore, écrire, publier et répandre partout un livrt
d'une telU impiété, m (Bauhard, op. cit., t. II, p. 199 )
a. Baunard, II, 199-300.
S.Eugène Veuillot, op. cit., III, 485
4. Compte rendu ojjîciel de l assemblée, introduction, p m.
5. Montalembert, l Eglise libre dans lElat libre, discours prononcés tu congrèf
catholique de Malines, une brochure in-8, Paris. iS63, p. 93. On trouvera aussi
les discours de Montalembert dans le Correspondant de i863, tomes LIX et LX, et
dans le Journal de Bruxelles des a5eta6 août i863.
490 HISTOIRB GÉ?JÉRALB DE l'ÉGLÎSE
nous avons la vérité. » (Mo.^talembbrt, l'Eglise libre dans l'Etat libre, p. i37.) Au
bas de la page qui contenait ce passage, Montalembert renvoyait à plusieurs
articles de l' Univers.
ô. Quelques-uns même crurent pouvoir découvrir un argument contre le pou-
voir temporel des papes dans une phrase de Montalembert, protestant contre « cette
horrible confusion dei deux pouvoirs qui est Tidéal de toutes les tyrannies l«
(Montalembert, l'Eglise libre dans l'Etat libre, p. 102.) L'orateur, qui avait tou-
jours si ardemment pris la défense du pouvoir tera^porel du Saint-Siège, ainsi que
ses amis, Mgr Dupanloup et M. de Falloux, protesta avec indignation contre cette
accusation tibid., p. i02-io5, en note). —
Sur une inscription du château delà
Roche en Brény. commémorant l'engagement pris, en 1862, par Dupanloup, Fal-
loux, Foisset. Montalembert et Albert de Broglie, de a comLaltre pour 1 Eglise
libre dans la pairie libre », voir deux interprétations différentes, données, d'une
part, par Lecanuet [Montalembert, III, 33o-333) et par Lagrange Vie de Mgr Du- (
panloup, II, 395) d'autre part, par Eugène Vbuillot (Louis Veuillot, III, 487-
;
492) et par l'abbé Jules Morel [Somme contre le catholicisme libéral, 2 vol. in S,
Paris, 1877, t. II, p. 445 544j.
DE LA. BULLE IneJJabU'is A L*E?rGYCLiQUE Quanta cura 491
I. Voir plus haut, p. 444-445. Le document qui paraît avoir servi de point de
départ à l'encyclique Quanta cura et au Syllabus est une lettre pastorale publiée lo
23 juillet i86o par Mgr Gcrbet, évêque de Perpignan. On a souvent écrit que la
forme définitive donnée au Syllabus est due au cardinal Bilio. Lo commandeur
J.-B. de Rossi, interrogé par nous à ce sujet en i884, au moment de la mort du
savant cardinal, se croyait en mesure de donner un démenti formel à cette infor-
mation. Le cardinal Bilio lui avait déclaré que toute sa coopération à la
rédaction du document pontifical avait été d'en avoir pris connaissance avant sa
publication et d'en avoir fait retrancher quatre ou cinq propositions. Sur les ori-
gines du Sylldbus, voir Pierre Hourat, le Syllabus, étude documentaire, 3 vol. in-
i8, Paris, collection Sci<?mc elrelujion. Sur la participation de Louis \'euillot à la
rédaction ànSyllabus, voir Eugène \ buillot, Louis Veuillot, t. Ili, p. 493.
3. Denzinger-Baî(nwa.rt, n. 1689.
3. Ibid , n. 1694.
4. Ibid., n. 1691.
494 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGUSE
nisme des chefs d'Etat et de leurs conseillers, suivant qui « les actes
I DENZirfGER-BAN5WA.llT, H. 1697,
a. Ibid., n. 1690.
3. Ecclesiam catholicam... smant {principes) uli legibus sais, nec Ubertati ej'us quem-
quam permittant obsistere.
4 Denziuger-Banwwart, n. 169a.
lôgS.
5. Ibid., n.
6. Nihil tam prxceps ad casnm... si hoc solumnobis pulantes posse sufjicere. quod
Uberum arbitrium, quum nasceremur, accepimus, ultra jam a Domino nihil quxramus,
id est, Auctoris nostri obliti, ejus potentiam, ut nos ostendamus liberos, abjuremus.
7. Certum est enim, hoc rébus suis esse salatare, ut, quum de causis
Deiagatur, juxta
ipsius constitulum, regiam voluntatem saeerdotibus Christi studeant subdere, non prae-
ferre.
,
Cause de «on
Tout d'abord, Pie IX s'exprimait d'une manière plus vive et plus retentissement
spontanée, exhalait ses plaintes en accents plus émus, formulait ses exceptionnel :
doc- i' la vivacité
reproches en termes plus directs. C'était moins, semhlait-il, le
des termes
teur qui enseigne, que le père de famille qui, devant ses enfants, employés par
le souverain
ouvre son âme « navrée de douleur à l'aspect de l'horrible tempête » ^
pontife.
soulevée d'indignation à la vue « des honibles machinations » par
lesquelles « des hommes méchants..., promettant la liberté, bien
qu'esclaves de la corruption.., s'efforcent de dépraver les âmes » ^,
Aussi, alors même qu'il supplie « le Cœur très doux du Sauveur
d'entraîner à lui les âmes par les liens de son amour » ^, et « la
très aimante Mère de Dieu d'avoir pour nos misères la plus large
pitié » *, Une peut, comme le divin Maître, retenir sa main prête
Une seconde cause était de nature à exciter les esprits. L'ency- ao les
applications
clique Quanta cura ne se contentait pas de condamner des principes. qu'il en uit
Plus que l'encyclique Mirari vos, elle en faisait des applications. ou qu'il
en suggère
Quand elle parlait des prétentions du pouvoir civil à contrôler les
à des
actes de l'Eglise, quand elle
à l'exclure des écoles publiques, fai- événements
récents,
sait allusion à des campagnes de presse contre ses dogmes, elle
trahal.
4 Amantissima Mater... omnium nécessitâtes amplissimo quodam misereatur affecta,
5. Iinpium absurdumque naturalismi principium.
6. Fallacissimi isli homines.
7. Insignis impudenlia.
8. Déliramentum.... libertas perditionis,... humanse sapientise loquacitas. V —
l'exemple de la plupart des historien!, nous donnons, de l'encyclique, la traduction
contemporaine de l'apparition du document, celle qui a éU donnée tant par Ut
catholiques que par les libres penseurs.
496 HISTOIRE GÉNÉRALE DE L*ÉGL1SE
conflit entre les deux pouvoirs (civil et religieux), le droit civil pré-
vaut ; Prop. i5 ; Il est libre à chaque homme d'embrasser et df
3. Mgr d'IIllst, le Droit chrétien et le Droit moderne^ préface, p i/j i5. Cf.
Mgr Baudrillart, Vie de Mgr d'Hulst, a vol. in 8, Paris, 1914, l- H, p. 8
4. On trouvera ce commentaire dans les Nouvelles Œuvres choisies de Mgr Dlpah-
LuLP, t. IV. Voir dans Lagrange, Vie de Mgr Dupanloup, i. II, p. 456 et s., les in-
toressants détails de la composition, de la publication et de l'extraordinaire dif-
Tusion de cet ouvrage.
5. (( A titre d'hypothèses, avaient écrit les Pères de la Compagnie de Jésus rcMac-
téurs de la Civiltà cattoUca, les libertés modernes peuvent èire légitimes, et les
c«;li61iques peuvent les atmtrr et les défendre n {Civiltà cattoUcadu 17 octobre i863).
Attitude I-'CS catholiques qui avaient signalé des doctrines suspectes dans
descatholiqucs ]gg allocutions prononcées aux congrès de Malines, dans les articles
qui avaieut " ^ .
et le
.
libéralisme
, .
catholique
.
^.
,
S'en trouva-
t il, parmi ces derniers, qui donnèrent aux documents pontificaux
« des interprétations forcées », qui « prêtèrent à ces pièces un ca-
ractère qu'elles n'avaient pas dans la pensée du Saint-Père » ? Un
théologien non suspect de tendances libérales, l'abbé Freppel, l'a pré-
tendu dans une lettre écrite à la veille du concile du Vatican ^. Si le futur
évêque d'Angers avait en vue, en s'exprimant ainsi, quelque œuvre de
polémique écrite au lendemain de l'apparition du SyUabus, il visait
libérale. Le célèbre écrivain catholique pensait ainsi combler une lacune re-
9. fbid., p. 5oi.
10. Louis Veuillot, Vlllusion libérale, ch. iy, $• édition, Ptrif, 1866, p. a3-a4«
DE l'encyclique Quanta cura au concile du Vatican 4 99
On avait parlé des limites posées par la nature des choses aux pou-
voirs du pape et de l'Eglise, en citant en ce sens des paroles de
Bossuet et de saint Bernard *. « Bravons la fourberie des mots,
s'écriait Veuillot. Nous devons obéissance à l'Eglise dans les limites
qu'elle a elle-même posées... Si cette obéissance est la théocratie,
ceux qui en ont peur n'ont pas assez peur d'autre chose 2. » Les écri-
vains que le polémiste voulait réfuter avaient blâmé l'emploi inop-
portun de la force contre les incrédules, prétendant que c'était là per-
pétuer le despotisme païen. «Les chrétiens, ripostait Veuillot, ont
pris à la société païenne ses armes pour les transformer, non pour
les détruire... Comme le droit est par lui-même une force, la force,
fait matériel », qu'il y a d'autres forces que celles qui résident dans
la matière, que a l'Etat n*est pas l'origine de tous les droits », que
« la violation d'un serment n'est jamais licite, même quand elle est
était le sens des propositions 58, 69, 60, 89, 4o, 6/4, du Syllabns ^
fait que ce catalogue d'erreurs fait corps avec l'encyclique Quanta cura^ laquei •»,
l'adressant au monde catholique pour condamner des erreurs, a lei caractère.*
d'un acte ex cathedra a" sur le fait que l'Eglise entière a accepté l'autorité doctri-
;
autorité spéciale comme collection, il ne suffit pas que cette collection ait été faite
par l'ordre du pape ou acceptée comme authentique par le peuple chrétien ;il faut,
luivantla doctrine acceptée par tous les canonistes, que le pape l'ait « faite sienne»
ou par sa signature ou par son sceau ou par une déclaration formelle. Ainsi les
Dccrétales collectionnées, sur l'ordre du pape, par saint Raymond de Pennafort,
n'ont eu une autorité propre que par la Constitution Rex pacijicus de Grégoire IX,
qui a approuvé expressément la collection au contraire le viic Livre des Décré-
;
tales, bien que rédigé par l'ordre du pape, n'a pas d'autorité propre. Il en est de
même du décret de Gratien, qui a été unanimement accepté comme texte officiel
dans les écoles, mais qu aucun pape n'a « fait sien » par un acte exprès. Tel est,
dit on, le cas du Syllabus. Il a bien été rédigé et envoyé par l'ordre du pai)e,
comme le VIT Livre des Décrétales il a été reçu et accepté par l'E ;Ji<e, comme le
;
comme son acte propre, par PielX, il ne peut avoir d'autorité propre Les proposi-
tions dont il se conqjose ont tout juste autorité des documents d'oii elles sont
1
extraites, comme elles ont tout juste le sens que leur donne le contexte de ces
documents. Le R P. Choupin cite, à propos du Syllabus, une parole qu'aurait
prononcée le pape Pie X, dans une audience particulière accordée à M. (Iharles
A Brigii;s. ^'oici les paroles de M. Briggs « The Holy Father himself assured me
:
that it \the Syllabus of Pius IX) did not corne under the categoij of infaiUlillity »
(Ch Brigcs The Papal Commission and the Pentateuch, London, 1906, p 9).
(L. CiiOLriN, Valeur des décisions doctrinales et disciplinaires du Saint-Si^ge, in-vol ,
Paris, 1907, p 132". Au fond, la controverse dont nous venons de parler a moins
d'iniporlance pratique qu'il ne le semblerait an premier abord car ceux qui défen-
;
dent le caractère ex cathedra du Syllabus concèdent que chaque proposition doit être
prise dans le sens donné par la pièce d'où elle est extraite et ceux qui refusent de
;
reconnaître au Syllabus la même autorité qu'à l'encyclique, sont bien forcés d ad-
mettre que cette dernière contient tous les principes des assertions données par '«
Syllabus. —On a publié divers commentaires du Syllabus. Nous n'en connaissons
Boa HISTOIRE GENERALE DE L ÉGLISE
III
but de cette marche était connu c'était Rome capitale. Et, Rome
:
pas de plus sûr que le simple Recueil des allocutions consistoriales, encycliques et
autres lettres apostoliques des souverains pontifes cités dans l'encyclique et le
Syllabusdu 8 décembre 186à, un vol. in-8, Paris, i865 Ce volume contient le texte
lalin et la traduction française de l'encyclique, du Syllabus et de tous les autree
documents.
I. Parlamento italiano, i864, p. 8728.
a. Ibid., p. 3790,
DE i/encyclique Quanta cura au concile du va.tican 5o3
qui lui avaient valu tant de popularité aux débuts de son règne. « Vif,
aimable, plein de reparties, il avait toujours de ces mots qui sont des
portraits, de ces remarques fines qui mettent les choses dans leur
jour *. » Mais, de temps en temps, le fond triste de son âme se révé-
lait. « Vous voyez, disait-il à des pèlerins, un pauvre pape, chargé
d ans et de malheurs 2. » « C'est sans doute la dernière fois », décla-
rait-il, le I" janvier 1866, aux officiers commandant le corps de
troupes françaises, c'est sans doute la dernière fois que je vous bénis...
Après votre départ, les ennemis de l'Eglise viendront peut-être à
Rome 3. » Cette tristesse n'était pas du découragement. « Je ne
veux pas mourir, disait il à l'ambassadeur d'Espagne, sans avoir
De moins en fait tout mon possible pour remplir mon devoir de conscience *. » Il
moins confîant
en la ne cro}ait pas d'ailleurs que ce devoir de conscience consistât à
politique, négocier avec des puissances dont se méfiait, mais à multiplier
il les
affirme
il
de plus en plus affirmations de ses droits. Louis Veuillot traduisait bien la pensée du
ta souveraine pontife en écrivant : « Pie IX dédaigne les menées de la politique^. .,
autorité.
11 n'est pas chargé de faire triompher la vérité, il est chargé de
confesser cette vérité jusqu'à la mort. A toutes les suggestions, il
du
7 décembre, une convention était signée par les représentants de
l4 décembre
1866, l'Italie et de la France pour le règlement de la dette pontificale ®.
Convention du La France
Ces manifestations n'étaient pas dues seulement à la
retire
7 décembre, mais aussi au retrait des troupes ffança'se» de Rome, ses troupes
de Rome
lequel s'éta'il opéré le 11 décembre. L'empereur Napoléon avait, il
(11 décotnbr»
est vrai, essayé d'atténuer l'impression produite par cette mesure en 1866).
Trois mois plus tard, un autre meeting se réunissait pour aviser aux
moyens de supprimer, dans le culte, tout ce qui n'était pas conforme
(( aux principes de la Réforme ^ ». Le Parlement lui-même croyait
devoir sévir contre les rites jugés trop empreints de catholicisme, et,
IV
. .
pnncipes naturels
, ,
sans lesquels
1 «i
il n
»
est pas de
i -ri
nation libre et
i.
luiionnaire.
prospère, menaçait l'Europe civilisée.
a. Jbid.^ p. 673.
3. Ibid., p. 486.
4. Ibid.^ p. 622.
5 /6t(i,, p 55 1.
6. Ibid.^ p. 55o et s.
DE l'encyclique Quafita cura au concile du Vatican 607
Sh principales Portant d'abord tout spécialement son attention sur les classes
œuvre». ouvrières, dont les conditions de vie l'avaient préoccupé dès sa pre-
mière enfance *, il avait publié en i855, sous ce titre : les Ouvriers
européens, des monographies de familles ouvrières observées dans les
milieux les plus divers. Peu de temps après, il fondait la Société
cTéconomie sociale, appelée à continuer son immense tâche. Lui-
même, par la publication de plusieurs autres ouvrages, entre autres
de la Paix sociale en 187 1, de la Ré/orme en Europe en 1876, de
la Question sociale en 1879 et de la Constitution essentielle de l' hu-
manité en 1881, devait exprimer la synthèse philosophique de ses
travaux. Mais sa doctrine se trouvait déjà exposée, en ses éléments
fondamentaux, dans la Réforme sociale. L'apparition de l'ouvrage
attira l'attention des esprits réfléchis. Sainte-Beuve salua en Frédéric
Le Play, « un Bonald rajeuni, progressif et scientifique ». Monta-
lembert écrivit : « Je n'hésite pas à dire que Le Play a fait le livre
le plus original, le plus courageux et, sous tous les rapports, le plus
fort de ce siècle ^. » Courageux, Fréd^ic Le Play l'était certes, non Sa méthode
et sa
•eulement en se plaçant hardiment sur le terrain de l'observation doclriDe.
scientifique, choisi par les nouveaux théoriciens du socialisme, mais
encore eu dénonçant, au nom de cette métliode, les principes les plus
universellement admis depuis la Révolution de 1789, les idées ré] an-
dues par Jean- Jacques Rousseau sous l'ancien régime, les « faux
dogmes », comme il les appelait, de « la perfection originelle »,
de (( l'égalité providentielle » et du « droit perpétuel à la révolte »,
en proclamant la nécessité du respect de la famille, des autorité!
sociales, politiques et religieuses, en un mot du « Décalogue éter-
nel ^ »
Certes, dans cette immerise exhibition des produits du monde en» GetU
lier et dans ce va-et-vient des habitants de toutes les nations, les eiposition
offre comme
tares de la société moderne apparurent. Si les entretiens que un tableau
purent avoir entre eux les souverains de l'Europe, réunis dans la raccourci
de la
capitale de la France, servirent à éviter certains conflits, plus d'un civilisation
moderne.
RiuOT, Exposé critique des doclrines de M Le Play, Paris, 1882 . Delaire, Le Play ;
et la science sociale, dans \i l^o ave lie Revue du. i5 février 1896 H. IUmière, S J., ;
ZON, Frédéric Le
Play, sa méthode, sa doctrine, son œuvre^un vol in-12, Paris, i8uQ.
3. Sur l'Exposition de 1807, voir La Gorck, op. cit., t. V,
p Ug, 341.
5io HISTOIRE GÉNÉRALE DE L'ÉGLIsiB
sortie des usines Krupp, qui, par ses dimensions, attira si vivement
les regards des curieux spectateurs. Les esprits réfléchis y virent, à
bon droit, l'insolent défi d'un peuple qui, en restaurant le culte
nique »
il
2.
n'v avait pas de
Au iv* siècle,
. ...
meilleur remède qu'un
en pleine crise arienne, le
concile
concile de Nicee
.
œcumé-
. ,
po
*e
.
Jit ^^tr»
futur
concile.
Cependant la Révolution, justifiant par ses actes les alarmes des Menées ré \o-
jutïonnaircs
catholiques, dirio;eait
^ contrepape ses plus
^ violentes attaques,
le
/* .
^ . y
^, .
dans les Elnts
Dans le courant du mois de juin 1867, le « Comité insurrection- pontificaux.
nel » de Rome faisait circuler la proclamation suivante : « Romains,
la révolution qu'accomplira l'Italie ne peut avoir son complet déve-
était d'attirer l'armée pontificale hors de la ville de Rome, qui res- Lalùicaaes.
général de Failly.
C'était le salut. Le général Kanzler, commandant en chef de» PUn
troupes pontificales, dans un entretien avec Failly, fit prévaloir son du géD^al
Kanzler,
j)ian stratégique, aussi hardi que prudent : aller aux bandes garibal- général en ohef
(hennes et les écraser promptement. C'était le moyen le plus sûr de des troupes
pooUâcalee.
localiser la lutte, d'empêcher un conflit dans lequel quatre armées,
animées de vues diverses et mal définies, pouvaient se trouver élran-
gciiicut impliquées : l'armée de Garibaldi, celle de Victor-Em-
manuel, celle de Napoléon III et celle de Pie IX. L'armée papale,
appuyée par une partie de l'armée française, se dirigea vers les
troupes révolutionnaires, qu'elle rencontra, le Snoveuibre, campée»
son jamais. »
sentiment.
I. Nom donné à des fusils d'invention récente^ ainsi appelés du nonoi de leur in-
venteur.
a. Chantrel, Annales, p. 7^8,
3. Ihid.y p. 74 1.
DE LfîîiCTCLiQUE Quanta cura \v conctt.e du vatihvv 5i5
Univen du 3o mars 1868, cité par GfiiWiiTRBL, p. 836, 837. Cf. p. ^b'j.
1.
8a6, 837.
a. Ibid., p.
3 Voir l'exposé des griefs des catholiques irlandais dans une déclaration du
.
LE CONCILE DU VATICAN.
(1869-1870).
trois phases
^®^ graves périls que pouvaient faire courir à la papauté et à
d'un concile l'Eglise la sourde hostilité des puissances, les menées des sectes
antichrétiennes et les vives controverses soulevées entre catho-
f?eTx.
liques, n'avaient pas échappé à la sollicitude du souverain pon-
tife. « Dans un concile, disait Pie IX, il y a d'ordinaire trois
périodes : celle du diable, celle des hommes et celle de Dieu. » On
était en pleine période du diable ; celle des hommes allait arri-
ver bientôt ; celle de Dieu devait triompher la dernière, mais elle
se préparait déjà.
1. Sur les diverses condamnations portées contrôles sociétés secrètes par Clé-
ment XIII, Pie VI, Pie VII, Léon XII, Pie VIII et Grégoire XVI, voir rallocution
%îulLiplices de Pie IX, prononcée le 25 septembre i865 {Acta Pu IX, t. IV, p. a3
et s,), et Dict. apol. de lajoi cathol., an mol franc-maçonnerie^ t. II, col. 127.
2. Bref Ex epislola adressé à Mgr Darboj à l'occatiou des obsèques 4u maré-
chal Majj,nan.
LE CONCILE DU VAlICAIf ÔlQ
I
.
T\' r» *• 1 il"»' •
1 vers l'athéisme
Dieu, Providence, ame, immorlaJite, que la
i
Ijuiis Vieux mots :
etl'an»rchie
philosophie interpréterait dans des sens de plus en plus raffinés ».
II voulait dire : de plus en plus favorables à l'athéisme. Peu de temps
avant lui, un écrivain qui s'adressait plus spécialement au monde
des travailleuis, mais qui-, par l'originalité paradoxale de sa pensée
et la rigueur apparente de sa dialectique, devait s'imposer aux
classes cultivées, Pierre Joseph Proudhon, s'était brutalement
déclaré non seulement athée, mais anliihéiste. « Dieu, c'est le II se solidarise
ta! des autres avaient lak leur œuvre 3. En i866, Mgr Dupanloup Dupanloup
avait jetéun cri d'alarme dans une éloquente brochure, l'Athéisme «• P"
et le pérU social. Deux ans plus tard, Montalcmbert, dans un de
toire du parti républicain. Gambelta est reçu franc- maçon en 1869 (Tournier,
Gambetta franc-maçon, p. i43). C'est tous le patronage de la franc- maçonnerie que
se fonde la Ligue de l enseignement^ présidée par Jean Macé.
2. Voir F. Buisson, V Enseignement de l'histoire sainte, Genève, 1869.
3. E. QoinET, le Livre de l'exilé p. 538, 568, etc. y
cule ^.
rite oriental, pour les inviter à venir assister au concile *. <l Puis- au concile
le» évêques
siez-vous vous y rendre, disait le pontife, comme vos prédécesseurs schismatiquos
se sont rendus au second concile de Lyon et au concile de Florence, orientaux
(8 septembre
pour que cesse enfin le schisme '. » Quelques jours après, le i3 sep- 18C8}.
tembre, Pie IX adressa une lettre aux protestants, ou plutôt, d'une
manière plus générale, à tous ceux qui, portant le nom de chrétiens,
Il adresse n'étaient pas en communion avec l'Eglise romaine. «Un père, disait
aux prolestants
une lettre
le pape, n'abandonne jamais ses enfants, lors même que ceux-ci
«pccialc l'ont abandonné. » Puis, rappelant les signes de la vraie Eglise, il
(i3 septembre
i8()8).
opposait à la stabilité de l'Eglise de Rome l'instabilité des autres
sociétés clirétiennes. Il adjurait enfin tous les cbrétiens de profiter
de l'occasion que leur offrait le futur concile « pour revenir dans le
sein de cette Eglise dont leurs aïeux avaient jadis fait partie. » ^
Refus si notre patriarche y consent jo. Mais le patriarche n'y consentit pas. a Si
des évêques
«chismatiques le pape veut un concile, dit-il, qu'il vienne le tenir ici » .
' L'autocratie
d'Orient. jalouse des patriarches, qui craignaient de voir diminuer leur autorité,
le caractère trop strictement national donné à la religion dans les
pays orientaux, lespréjugés traditionnels contre Rome, et, pour ce qui
concerne plus spécialement l'Eglise russe, le despotisme césaiien qui
pesait sur elle comme un cauchemar tels furent les obstacles que :
libilitc des conciles œcuiiicDiques, mais qu'à leurs yeux de tels con-
ciles étaient viciés par le fait seul que le pape n'y prenait pas rang
comme un simple patriarche, égal aux autres ». C'était, par un
simple sophisme facile à réfuter, préjuger précisément la question à
résoudre. En somme, les fins denon-recevoir opposées à l'invitation
de Pie IX par les Eglises orientales non unies, doivent être attri-
buées au despotisme de leurs chefs religieux et civils.
du pape a suscité les articles les plus violents dans la presse protes-
I. Gba.ndera.th,t. 1, p. 395,
Pour la Une autre question, non moins délicate, était celle de la représen-
prerniere fois,
lation, à l'assemblée œcuménique, des princes catholiques. Depuis
lesprinces
-i i at- ' ^ t
catholiques le concile de Nicée, ou 1 empereur Constantin avait occupé une
ne sont point place d'honneur, les empereurs et les rois chrétiens avaient pris part,
convoq
>nvoques . .
ir r »
^
au concile soit par eux-mêmes, soit par un ambassadeur, à tous les conciles
3. Feria 4^, die 17a noverabris 1869, EE. DD. decreverunt quod^ ptr médium
Rev. P. Generalis Socielatis Jesu, sub secreio Sancti Ofjicii, scribatur opportune P,
de Buck, ut ab incœpto conciliationis tractatu cum nonnullis heterodoxis caiglicanis
omnino désistât (Gecconi, t. II, i. 298, note 3). Gecconi [ibid , p. 294, 296) conjec-
ture que le motif de rinterdiction prononcée par le Saint-Office aurait été le sui-
vant on aurait craint que les négociations entreprises avec le parti unionite^ parti
:
peu nombreux, puisque, sur 18 000 ecclésiastiques anglicans, il n'en comptait pas
plus de 4oo, et parti détesté par l'Eglise établie, ne compromissent le mouvement
général de l'Eglise d'Angleterre vers 1 Eglise romaine. Les raisons ci-dessus exposées,
d'après la correspondance inédite du P. de Buck avec Mgr Dupanloup, nous parais-
sent plus vraisemblables. Les membres du Saint-Office furent sans doute guides
par le peu d'espoir qu'ils avaient en la réussite des négociations et peut-être aussi
parle peu de confiance que leur inspirait le négociateur proposé. Mgr Dupanloup
venait en effet de publier, le 11 novembre, à propos du concile et de l'infaillibilité
pontificale, une lettre dont à Rome on s'était beaucoup ému,
4. Granderath, op.cit ,11, 398-419.
LE CONCILE DU VATICAPf b'2'J
veux agir en dehors de vous et sans vous. J'ai une vie propre, que
je tiens de mon origine divine. Cette vie me suffit je ne vous
;
E. Olliviér, l'Eglise et l'Etat au concile du Vatican, 2 vol. in- 12. Paris 18-0
1.
t. 5o8.
T, p.
187a, t. I, n. LXV-LIVI.
b'jS HISTOIRE Gé.'lÉRA^LE DB l'ÉGLISB
Le» gouverne- résolu à défendre avec énergie, s'il en était malheureusement besoin,
ments les droits dont la confiance de la nation française l'avait rendu dé-
se décident
pour positaire.
une attitude Cette attitude d' « expectative menaçante » fut à peu près celle de
d' «<\pcctative
meuaçanlc ».
tous les cabinets européens *.
sion m*a invité à Rome pour prendre part aux travaux préparatoires. Je répond*
que non... Depuis quelques années, je suis tombé en disgrâce... On me regarde à
Rome comme un homme trop peu ultramontain, et vous savez que cela ne se par-
donne pas » Cette lettre se terminait par cette phrase, qui pouvait déjà faire
craindre une défection « Ce n'est pas sans un -sentiment d'admiration mé/^ d'envie
:
que je vous contemple... résolu de défendre tout ce qui sera décidé à Rome. » (Lettre
inédite, Arch. du séminaire de Saint-Sulpice.)
3. Ces incidents diplomatiques ont été largement
exposés par Emile Ollivib»
au concile
VEgliseet l'Etat du Vatican, ch. v, t. I, p. /io3 536. D<»
dans son ouvrage
curieux documents ont été publiés par Emile Ollivibr dans ce chapitre ; mais lu»
appréciations de l'auteur donnent lieu à bien des réserves.
LE CONCILE DU YATIGA.ÎI 529
II
«
1^"
D III
mnombrables
f A
evcques de tous
11 catholique
d abord excite ^ l'annoncce
n'avaient pas disparu sans laisser, dans les esprits des combattants,
tles irritations prêtes à se trajisforuier en nouvelles controverses.
Les encycliques Mirari vos et Quanta cura avaient pu faire l'unité Présages
de
daus la foi et dans la discipline ; elles avaient laissé subsister
controversi^
la diversité des tendances. Un Veuillot, un Manniug n'envisageaient doctrinales,
avec un égal désir de servir l'Eglise, une ardeur dans la lutte, une
impétuosité dans l'attaque et dans la riposte, que de récents combats
contre l'incrédulité avaient avivées, et qui allaient malheureusement
se dépenser en querelles intestines. Toutes les questions controversées,
d'ailleurs, n'avaient pas été résolues par les dernières décisions pon-
lilicales. Le programme du concile allait en soulever de nouvelles,
de plus brûlantes encore. Ce que Pie IX avait appelé la période de
lutte contre les puissances infernales était à peu près fini ; mais la
période des luttes suscitées par les passions, les malentendus et les
I. Lettre sur le futur concile œcuménique, brochure de 6/j pages in-8, Paris,
1SO8.
a. Gra.kdekath. Hist. du conc. du
\'atican, t. I, p. 169 « Celle lellre, écrivait le
P. de Duck, est [)roljablomcnt le meilleur écrit qui ait paru dans ce siècle.
\ iclor
Voilà comment il laut parler de Tb^glise »-. (Lettre inédite du P. V. do Buck, du
aS novembre iStîy, Archives du Séminaire de Saint Sulpice.)
Hisl -en. (lelEj^liw». - VIII 34
530 HISTOIRE GÉXKRALE DE l/f.GLISE
par cet^articl ncieot et SOU le va les protestations les plus vives. « De quel droit, disait-
I. CoUectio lacensis, t. VII, col. ii55-ii57. Voir le texte italien ibid., col. ii58-
1163.
2 Lettre inédite du P. Victor de Buck à Mgr Dupanloup, du 9 mars 18G9,
(Archives du Séminaire de Saint-Sulpice.)
LE CONCILE DU VATICAN 53 1
tant que le concile fût a fort court », et même que les votes se fis-
Dieu, qui mène tout, devait vouloir que quelque chose fût défini
debent rem ipsam quœrere, id est^ conclusiones investigare, diaputando, legendo^ <'''>gi-
tando. Unde Actor. î 5 legimus in primo concilio niagnam. conqaisitionem fuisse faclam.
Idem tcstalur de Nicœno concilio RuJJinus, lib. X,cap. 5 Hist. Eccles., quocirca Actor.
15 dlcunl Patres concilii : Visum est Spiritui Sancto et nobis, id est Spirilu Sancto
nostrani industriani et diligentiam adjuvante. At Scriptores sacri soli Deo tribuunt ea
quae scribunt^ ac propterea tam sxpe repetebant prophctœ illud : dicit Dominus. a
(Bellaumin, Controversia generalis de conciliis, lib. II, cap. xii.) On ne pouvait s'at-
tendre à de pareilles précisions de la part d'un laïque, Louis Veuillol, confondant
la révtla'hn, V inspiration ei Vassistance, écrivait ironiquement « Le Correspondant :
veut que l'on discute et que le Saint-Esprit prenne le temps de se former une
opinion. » [Univers du"] novembre 1869). « Il est à remarquer qu'au cénacle aucune
discussion ne précéda l'invasion de l'Esprit-Saint {Univers dn 21 novembre 18(19).
t\. m Ne vale il dire che avendo ammessa nel nostro periodico la corrisponden:af
avevamo con ciô fatto nostro proprio tutto ciôche quivi si scrive. » Coll. lac.. VII, 1170.
532 HISTOIRE GÉMÉRALE DE l'ÉGMSE
zèle ardent d'un converti ». (Gra.]ndekath, I, 2ii.) Friedrich n'est donc pas excusable
lorsqu'il prétend que la curie romaine a soulevé délibérément une polémique sur
l'infaillibilité « parce qu'elle avait besoin qu'on attaquât cette doctrine pour pou-
voir dire qu'elle était contrainte d en proposer la définition >k (Friedrich, Gescldchle
des Vatikan Konzil, t. II, p. 3). Tout ce qu'on peut dire, avec le P. Grauderath,
c'est que, « sans aucun doute, la correspondance française de la Revue romaine a
notablement accentué le mouvement hostile au concfle » (Granuerath, I, 2i3.)
Qiu-l était l'auteur de la fameuse correspondance ? Ni Granderath, ni Cecconi, ni
Emile OUivier, ni aucun historien, à notre connaissance, ne l'a nommé. Dans une
lettre inédite, adressée le 20 juillet 1869 à Mgr Dupduloup, le P. Victor de Buck.
écrit le nom de l'abbé Darras, l'auteur d'une Histoire de l'Eglise alors très répan-
due, mais très critiquée par les Bollandistes. Le P. de Buck, en relation au moins
indirecte avec le P. Piccirillo, directeur de la Civiltà (lettre du i5 avril 1869/ et
avec plusieurs autres jésuites de Rome, était à même d'être bien renseigné. —
Sur les origines de cette lettre et sa publication dans la Revue des Pères Jésuites,
voir Gra>derath, Ï, 199-212 Cegconi, II, 354 374.
;
leuses, que chacun pourra (les) vérifier tout de suite. Si on peut persuader à un .
curie, qui redoutent les entraves que Rome peut apporter à l'exer-
cice de leurs fonctions* ? »
L*Anii Janus. Un docteur d'une érudition égale à celle de Dœllinger, et d'une
science théologique de meilleur aloi, le futur cardinal Hei^enrœther,
prit la plume, et, dans un ouvrage qu'il appela YAnti-Janus, sou-
mit le pamphlet à une critique sévère, convainquit son auteur
d'avoir plus d'une fois altéré les textes, de les avoir pkis souvent
arbitrairement choisis et systématiquement groupés, enfin d'en avoir
tiré des conclusions fantaisistes par des procédés où la logique était
terriblement malmenée. Un prêtre allemand déjà révolté, et qui devait
plus tard se séparer de l'Eglise par une complète apostasie,
La critique
Frohschammer, fit suLir à l'œuvre de DoeMinger i*ne critique en un
de
Frahscham sens pkis terrible. Il démontra sans peine que Janus, s'il voulait
mer. être conséquent avec ses principes, devait aller plus loin, nier non
seulement l'infaillibilité du pape, mais celle de l'EgHse, par suite se
séparer d'elle et abandonner la foi chrétienne.
Troisième Pendant que les diverses phases de cette discussion se déroulaient
iacident :
en Allemagne, une controverse avait siwrgi en France, à propos d'un
l'apparition
de l'ouvrage ouvrage publié en septembre 1869 par le doyen de la Faculté do
deMgr Maret: théologie de Paris, Mgr Maret, évêque in partibus de Su«a. Le livre
Du Concile
général avait pour titre Du Concile général et de h paix religieuse *.
:
berté.
L'ouvrage « Mgr Maret jette son livre dans le public : c'est sans doute pour
qu'on le lise ; il doit vouloir qu'on Tapprécie, il doit souffrir qu'on
•stvnem^nt^
critiqué l'accuse Mgr Pie, évêque de Poitiers, Mgr Doney, évêque de
! ))
par usïeurs
p Montauban, Mgr Plantier, évêque de Nîmes, Mgr Delalle, évêque de
Piodez, et Mgr Manning, archevêque de Westminster, se croyant
visés dans les opinions combattues par Mgr Maret, critiquèrent vive-
ment son œuvre. La presse religieuse s'en mêla. Le Correspondant
et le Français ripostèrent à VUnivers.
« En ayant l'air de n'attaquer que l'infaillibilité personnelle et
séparée du pape, disaient les uns, c'està son magistère suprême qu'on
en veut. >> — « Singulière façon, répliquaient les autres, d'honorer
la tête de l'Eglise, que de la séparer de son corps ^ » !
ce qui pouvait, au pied de la lettre, s'entendre de deux laçons sans les évoques, :
sans leur concours direct ou bien contre les évèques, en opposition possible avec
;
les évêques ; et c'était dans ce dernier sens que VUnivers avait paru interpréter
l'expression anglaise.
rr coHCTLf; du vattca"^ 537
r^mWr.s n'était pas Mgr Maret ; aux yeux de tous, partisans et l'article dû
Sicge lui avaient valu les pins chaudes félicitations de Pie ÏX.
« D'extraordinaires rpialités d'intelligence, dit le P. Granderath,
un savoir singulièrement profond, n'étaient pas les seules raisons do
sa prééminence ; ce qui dominait en lui et le caractérisait, c'était une
activité sans relâche *., » Après avoir été l'inspirateur de VAmi de la
religion et du Journal des Villes et des Campagnes, il avait fondé, au
commencement de l'année 1868, le journal le Français^', et les
• • • •
K T-. ,
de cet article.
1869. le Correspondant on , vit son ins[)iration ^. En un langage très
a. Ibid. , 1376 et s.
col.
3. Les principaux journaux religieux de France étalent alors l'Univers^ dirigé :
lay. On peut y ajouter le Moniteur universel, de Paul Dalloz, à qui Rouher venait
de retirer, à la fin de 1868, le caractère de journal officiel Les principales publica-
tions périodiques des catholiques italiens étaient la Civiltà cattolica de Rome et
VUnità cattolica de Milan. En Allemagne, le journal catholique le plus important
en 1869 était le Volkszeilung de Cologne, dont le ton répondait à celui du Français
et du Correspondant, tandis que la Doxau Zeilung de Munich se rattachait aux idées
de ï Univers. Deux journaux catholiques de Vienne, le Wolksfreund et\e Vaterland,
avaient peu d'abonnés. En Angleterre, le principal journal catholique était le
Tablet, organe du cardinal Manning. Le Weekly Register, plus modéré, était ins-
piré par MgrCapel.
Lagrange, op. cft , t. ni, p. i44.
4.
5 Lettre de Falloux à Montalembert, du 3i octobre 1869. {Areh. de Saint-Sul-
pice.) Le prince Albert de Broglie écrit à l'évêque d'Orléans : a Je garderais de
l'écritce qui est pacifique j'enlèverais ce qui est militant. » (Lettre du 5 no-
;
Mgr Maret. Complication des plus fâcheuses peut être calamité. Je m'étais fait un
;
eldorado d'un concile de charité, de zèle, d'amour. Et voilà que tout à coup, par
cette imprudence absolument aveugle, en apparaît un de querelles affreuses. » En
novembre, les « querelles affreuses » étant ouvertes, l'évêque d Orléans crut qu'il
était de son devoir d'y prendre paît.
LE CONCirE DU VATICAN BSq
cialeur si habile et si lieureux, ne put pas jouer le même rôle dans ras-
semblée des évêques. « MgrDupanloup s'est noyé », disait à M. Icard,
lettre d'adieux qu'il adressait à ses fidèles, le prélat avait écrit que,
« obéissant, et obéissant jusqu'à la mort, il adhérerait fidèlement
aux décisions du chef de l'Eglise et du concile, quelles que fussent
ces décisions, conformes ou contraires à sa pensée particulière ^ »,
risquer do perdre tous les avantages que nous fait un adversaire troj) irrité. »
5. Lettre pastorale du 10 décembre 1869. La IcUre pastorale aux fidèles, datée
du 10, et la kltre pastorale au clergé, datée du 11, parurent en même temps.
Ho HISTOTRE GliMiRAT-E DE L lîGTJSE
Les esprits étaient encore trop excités pour conclure une trêve du-
rable. D'ailleurs, comme à Trente, comme à Nicée, de nouveaux
sujets de divergences allaient surgir du sein même des débats cou-
ciliaires. Mais désormais, au milieu des agitations hommes,des
l'Esprit Saint, planant au-dessus de l'assemblée œcuménique par sa
divine assistance, allait réaliser l'œuvre de Dieu.
m
L'ouverture Le 8 décembre 1869, après une journée d'abstinence et dejei^ne,
du concile q^e \q Saint-Père avait prescrite à l'univers catholique, le XIX*^ con- '
t.
(8 déceinîiie . , , , . , .
fin au schisme d'Occident par l'élection d'un pape [Hist. Gén. de l'Eglise, t. V,
p. iSî) Les huit premiers conciles avaient été tenus en Orient ce sont tes conciles ;
de 23 mètres sur t\'] mètres de long, toutes les nations étaient repré-
sentées : les jeunes Eglises d'Amérique à côté de celles de la vieille Les l^gllaes
du monde
Europe ; l'Eglise latine avec ses pasteurs revêtus de la chape blauche
entier
et portant, suivant les prescriptions liturgiques, une mitre de >'j. tr-.juvcnl
repréiealées.
simple lin, et l'Eglise orientale, avec ses prélats habillés de somptueuses
tuniques et coillcs de riches tiares. Les évoques missionnaires aux
vêlements simples et pauvres, les évêques réguliers, unissant aux
insignes de leur prélature les livrées de leur profession religieuse,
lanlinople III, 170; à Nicée 11, 367 ; au Lalran I, de 600 à 4oo au Lalran II, ;
1000 au Latrau III, plus de 3oo au Latrau IV, environ i3oo à Lyon I, envi-
; ; ;
lao à Trente, ai3. (îcs calculs sont conjecturaux. Trois conciles ont été plus
;
de Lalran. Mais il faut remarquer que ces trois cùnciles avaient admis à leurs déli-
bérations un grand nombre de personnages qui n'étaient point évêques
I. On vit arriver au temps lixé, les év»^(pies de la Calift)rnie, du Mexique, du
Brésil, du Pérou, du Chili, de la Nouvelle-Cjrenade, des Phili{)pines et de T Vui-
Iralie ; les vicaires aposUiliqucs des Inde» Orientales, de Siam, du loukin, de U
Chiui^ et du Japon ». (Fesslkr, du V'a/ioan, Irad. Gosqlih, 1 vol. in-12,
ie Coticile
Paris, 1877, p. 21).
542 IIISTOIHE GENERALE ÏVE L EGLISE
1. C^tCCONI, t. 1, p. 227.
3.IciRD, p. 34.
3,Les prélats ainsi appelés protestèrent toujours contre cette dénomination. Ils
qualifièrent à leur tour leurs adversaires d'« opposants à répiscopat », et se don-
nèrent le nom de u modérés ». Mais ces qualifications ne prévalurent pas. Finale-
ment ils acceptèrent celle de « membres de la Minorité ».
4. C'est dans ï Univ§rs du la janvier 18G9 que Louis Veuillot emplova pour 1»
que celles que nous venons d'énumérer. Vers la fin de janvier 1870, Mgr Spal-
ding, archevêque de Baltimore, essaya, dans un dessein d'union, d organiser un
tiers parti, dont le programme serait la définition équivalente de l'infaillibilité,
sans employer ce mot même. (Icard, Journal, p. i52-i53 ) D'autre part, Mgr Du-
panloup et Mgr Darboy tentèrent d'organiser une « commission internationale »
ayant pour but de régulariser l'action des divers groupes opposants. Mais le car-
dinal Mathieu et le cardinal de Bonnechose ayant refusé d'entrer dans celte voie,
ce projet n'eut pas le succès qu'on s'était promis. (Icard, Journal, p 76, Ollivier,
op. cit., t. II. p, 7.) Ces deux derniers cardinaux auraient patronné un autre
projet : un seul groupe les évêques français. Le cardinal Anto-
celui de réunir en
nclii, au nom du
pape, s'y opposa et, en présence de cette opposition, le projet
;
IV
^es principaux
Parmi les prélats éminentsque nous venons d*6numérer, plusieurs
DOiis sont connus déjà : Mgr Dupanloup, par le rôle décisif qu'il dégroupe,
avait rempli dans la campagne pour la liberté de l'enseignement et
par plusieurs des œuvres de son apostolat ; Mgr Manning, par l'éclat
dans les controverses religieuses, les idées les plus favorables au papo
par rapport aux évêques, à l'Eglise par rapport à la société civile, à la
<r Mffr Héfélé. écrivait Emile Ollivier, est un esprit vigoureux, qui ^^g^ Héfélé,
T\' • CTéque de
1: ippesur les faits comme un forgeron sur son enclume.
1
D un savoir Ronibour».
prodigieux, à la fois naïf et fin, il a, sous son extérieur plein de ron-
deur et plutôt rude, un liant fort propre à la conciliation *. m Bien
avant la réunion du concile, le pape avait eu recours à st science
inépuisable, particulièrement informée sur les questions conci-
liaires ^.
3 GRA^uERVTH, I. SS, ga, 468 48i «t s., 490 et s , 494. 49C) ets., 5oa eî s.
Le chef (l'œuvre d'IIélelé est son Histoire des concilet^ traduite en français par
l'abbé Pe arc, puis par Dom Leclercq.
4. Correspondant du 2.5 avril iqo.t, p. a68 et s.
55o HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
1, « y avait une raison, disait-il avec esprit en 1906, pour que je ne m'enten-
Il
disse pas, au concile, avec la majorité des évêques ils parlaient an si mauvais :
LE CONCILE DU VATICAN 55
mayer. Les deux cardinaux français avaieut donné au Saint- Sioge des
preuves éclatantes de leur dévouement :1e cardinal deBonnechose, en
défendant courageusenaent au Sénat le pouvoir temporel du pape le ;
Par ce seul fait, que le classement des partis s'était effectué sur la Leprograuim*
soumis à l'assemblée était très vaste. L'Index schenialarn qui fut dis-
tribué aux Pères du concile ^ comprenait une double série de questions
dogmatiques et de questions disciplinaires. Les questions dogma-
tiques avaient trait, soit aux erreurs modernes dérivant du matéria-
lisme, du rationalisme et du panthéisme, soit aux attaques dirigées
contre l'Eglise, son organisation et ses droits. Les questions disci-
plinaires se rapportaient soit aux personnes ecclésiastiques : évêques,
chanoines, curés, religieux, etc. ; soit aux institutions et aux œuvres
ecclésiastiques : séminaires, cérémonies liturgiques, administration
des sacrements, catéchisme, prédication, missions, rites orien-
taux, etc. L'article 7 du règlement prescrivait aux Pères de commen-
cer par des questions dogmatiques ; ils pourraient, dans la suite,
délibérer, à leur gré, sur le dogme ou sur la discipline. Les Pères Ordre
^^ ravtux
choisirent, pour servir d'objet à leurs premières discussions, le projet
ou schéma sur la Doctrine catholique contre les erreurs multiples dé- par le concile^
I. Ces trois périodes, nettement distinctes dans leur ensemble, ne sont pas stric-
tement séparées dans l'ordre chronologique. Les débats sur les constitutions disci-
plinaires ont commencé alors que les délibérations sur la première constitution
dogmatique n'étaient pas achevées et les délibérations sur la deuxième constitu-
;
tion dogmatique se sont ouvertes avant la fin des débats sur les constitutions dis-
ciplinaires. Pour la commodité de l'exposition, nous traiterons séparément de»
trois phases.
Le coup de sonnette fut donné parle président de Luca, et l'observation fut
a.
par le président Capalti. « De Luca, dit Granderath, était un homme réservé,
faite
un peu timide. Capalti prit la parole à sa place ». Hist, du concile du Vatican^
t. Il, p. 124, n. a.
LE CONCILE DU VATICAN 553
œuvre des jésnitcs ayant pour but de faire adopter par le concile les
idées de la Civil/à catlolica ^ D'autres, parmi lesquels se trouvaient
I « Mgr
Vecchiotti pense que ce sont les jésuites qui ont arrangé ce schéma
pour dans le concile les idées qu ils soutiennentdans la Civiltàcatlolia. 9
faire passer
(IcAUD, Journa/, p. 03.) iMgr Vecchiotti, conseiller d'Etat à Rome, était l'auteur
d'un traité fort connu de droit canonique, les Instituliones canonicae, publiées à
Turin en 1869 Ce traité avait étévivement attaqué par un jésuite, le P. Bouix.
Mgr Vecchiotti avait aussi été chargé de plusieurs missions diplomatiques par te
Saint Siège.
a. «Le P. Matignon n'est pas plus satisfait du schéma que nous, écrit M. Icard.
Il convient que ce sont des Pères de la Compagnie qui ont travaillé à sa rédac-
tion..., mais il ajoute que c'est leur œuvre personnelle, œuvre « trop germa-
nique ». [Ibid.^ p. 77.)
3. Sur Franzelin, voir Hurtbr, Nomenclalor litterariuSf t. V. p. i5o7-i5io; Dict.
de théol. de Vacawt, t. VI, col. 760 767 Louis Teste, Préface au conclave, un
;
les Pères devaient voter en choisissant L'une des deux formules, pla-
cet ou non placet. Toute explication était interdite. Le 24, le projet de
La fide, depuis connu sous le nom de Constitution de fide catholica ou de
Constitution
De Fide ou Constitution Dei Filins, fut voté, en séance publique, à l'unanimité
Constitution des voix. Tous les Pères, depuis le cardinal le plus élevé en dignité
Dei Fitiui est
votée jusqu'au dernier des supérieurs d'ordre, vinrent, à l'appel de leur
à l'unanimité, nom, émettre n'y eut pas un seul non placel. «
leur vote. Il Ce fut,
le
a 4 avril 1870. dit l'un d'entre eux, comme un défilédu monde entier venant rendre
témoignage de la foi de l'univers catholique ^ »
Importance « L'importance de la Constitution Dei Filius, a écrit le cardinal
de cette
Constitution. Manning, ne peut être exagérée. C'est l'affirmation la plus large et la
plus hardie de l'ordre surnaturel et spirituel qui ait jamais été jus-
qu'à présent jetée à la face du monde, de ce monde qui est maintenant
plus que jamais plongé dans les sens et alourdi par le mat'ria-
lisme ^ ». Elle vise à la fois, ainsi que le déclare son préambule, « le
Analyse grand nombre de ceux qui se sont jetés dans les abîmes du panthéisme,
de celte
Constitution. du matérialisme et de l'athéisme », et les croyants dont « le sens
catholique s'est amoindri ». A l'incrédulité contemporaine, confon-
dant Dieu avec le monde quand elle ne le nie pas tout à fait, refu-
sant en tout cas de croire à toute intervention divine dans l'humanité
et en particulier à la révélation, niant enfin la possibilité de la foi
I.
ir
Voir
. 1 -1 r.
savant commentaire de cette Constitution dans Vacatit, Eludes ihéolo-
le
• • 1 tr
disciplinaires.
giques sur les Consiitulions du Concile du Vatican^ 3 vol. in 8®, Paris, i8y5.
556 HISTOIRE CÉNKRALE DE l'^:GLIS1
aux deux préopinants. C'était, selon lai, faire une injure gra-
tion,
aux cardinaux actuels, si dignes, si austères dans leur vie,
tuite
princes
si assidus à leurs travaux, que de les comparer aux fastueux
l'Eglise du xvi" siècle. Avoir l'air de rééditer la parole de
Bar-
de
thélémy des Martyrs, demander « pour les illustrissimes cardinaux
vénient de déranger des conceptions toutes faites, des idées sim- Fruit
(le CCi
plistes, de donner même comme une impression d'inconsistance ou
diâcu6&ions«
d'illogisme dans la discipline ecclésiastique; mais elles eurent l'inap-
préciable avantage de faire connaître à Rome ces nécessités locales,
1. Mgr Audu acceptera toutes les décisions du concile du Vatican. Dans la suite,
de nouvelles difficultés surgiront entre le Saint-Siège et lui; mais il n'ira jamais
jusqu'au schisme ; il résistera même avec énergie à des tentatives de schisme qui
se produiront dans son Eglise, et, après sa mort, Léon XIII louera son zèle et sa
piété (S. S Leonis XIII, Acta, t. I, p. 199.)
s
LE CONCILE DU VATICA.X 559
I. C'est la prière que fait souvent M. Icard et qu'il mentionne à plusieurs re-
prises dans son Journal.
a. Ces querelles avaient souvent pour point de départ, dans la presse anti-
catholique, la méconnaissance absolue du dogme discuté. Et cette méconnaissance
a malheureusement persisté, même après la définition du dogme On croit rêver en
lisant de France populaire d'Henri Ma.rti:< (t. VU, p. i3y)
dAnsV Histoire « L'in- :
tation gagnait le peuple romain. Toutes les fois que Pie IX parais-
Les ovations sait en public, une foule l'accueillait par les cris de : m Vive le Pape
au « pape infaillible I » A la porte d'entrée du concile, des curieux se tenaient,
infaillible ».
parmi lesquels on remarquait la sœur et les filles d'un journaliste
français, épiant le passage des prélats, et donnant à chacun sa note*.
au plus baut degré. Pie IX se la fit lire jusqu'à trois fois de suite, l'écoutant les
yeux fermés puis il la relut lui-même.
;
4 Sur les indications de la tante, les petites- nièces adressaient un sourire aux
tt bons » et faisaient une grimace aux « méchants ».
LE CO?(CILE DU VATlCA.Îf 56l
i\u(i souvent il a vu des ministres des divers Etats (et il me cita entre autres Odo
lïussel), qui lui ont raconté à lui, dans tous les détails, ce qui se passait et se di-
sait dans les congrégations ». (Icàrd, Journal, p. 188.) Sir Odo Russel, plus tard
l.jrd Amplhill, chargé d'affaires à Rome pour l'Angleterre, était d'ailleurs, quoi-
<;ue anglican, favorable à la cause de la majorité. Il était très lié d'amitié avec
Ml,'!' Manning. On «ut, dan» la suite, que Pie IX avait délié l'archevêque de
^vostminstcr de son serment de secret relativement à sir Russel, afin que celui-ci
put rectifier, auprès du corps diplomatique, les informations tendancieuses
\cnucs d'autre part. Plusieurs autres prélats de la majorité furent, paraît il, égale-
iu(jut relevés de leur serment pour des motifs analogues. \ oir, à ce sujet, Uemmer,
Vie du cardinal Manning, un vol. in-S», Paris, 181)8, p. ai3-ai5 ; Grauderath,
Cl), cit., t. II, ae partie, p. 367 et s.
VI
la discussion d'étudier.
sur
Dès mois de janvier 1870, Mgr Spalding, archevêque de Balti-
le
rinfaillibilité
pontificale. more, rédigea et fit signer par cinq évêques américains une molion
demandant, non point la définition directe de l'infaillibilité, qui effa-
p. 179.
3. « On assure le cardinal Manning {The true
n eu comptait pas plus de cinq »,
story of Valican coincU^ p. 99). Voir, sur ce point, Gra^dërath, op. cit., t. II,
l'e partie, p. 333-34i.
LE CONCILE DU VATICAW 563
VII
Le projet Cette décision fut des plus heureuses. Si elle n'eût pas été prise
de
Constitution en temps opportun, les Pères, bientôt obligés de se disperser par
De romano suite d'événements que nous aurons à raconter, se fussent trouvés
potUiJice.
dans cette alternative : ou de laisser irrésolue une question qui agi-
tait profondément l'assemblée, l'opinion publique et les Etats ; ou
dé la résoudre précipitamment, dans des conditions qui n'eussent
pas suffisamment garanti l'autorité morale, peut-être même la
valeur dogmatique de leiir définition.
Liberté La discussion et le vote du schéma De romano pontifice se firent,
de la
discussion. âu contraire, dans les conditions de la liberté la plus large. « On y
entendit, écrit un des membres de l'assemblée, quatre-vingts évêques ;
nelli, qui jusqu'à présent s'était peu mêlé des affaires du concile, a arrêté, comme
fort imprudent, le projet que patronnait l'évêque de Moulins. 11 a insisté sur la né-
cessité de ne procéder qu'avec une grande circonspection ».
3 Voir ces divers arguments dans Makiiimg, Hist. du concile du Vatican^ trad.
Chantrel, un vol. in-S», Paris, 1871, p. 6a-65,
4. Manhihc, Hist. du conc. du Vaticariy p. 38.
LE CONCILE DU VATTCA.Tf 565
elles étaient admises, soit pour modifier soit pour réformer le schéma
primitif. Le texte ainsi amendé était soumis à la discussion géné-
rale, dans laquelle chaque évêque du concile avait le droit de parler
librement, et les débats duraient aussi longtemps qu'il plaisait à un
évêque de s'inscrire pour parler. La seule limite à cette discussion
consistait dans le pouvoir qu'avaient les présidents, sur la demande
de dix évêques, de consulter le concile sur la clôture de la discus-
•ion ^ »
Les débats s'ouvrirent le i3 mai par un rapport de Mgr Pie *. Ce Remarquable
rapport
rapport, tantôt lu, tantôt improvisé, exposait les raisons qui avaient de Mgr Pie.
fait placer en tête de la Constitution de l'Eglise la doctrine de la
de son corps ^ I »
Les débats généraux sur le schéma se prolongèrent pendant près D^aU
semaines. La doctrine générdiix
de trois y fut de l'infaillibilité pontificale
sur le
attaquée principalement par Mgr Héfélé, qui s'appuya surtout, pour schéma.
la contester, sur la condamnation du pape Honorius par le
D'autre part, si elle peut être dite séparée parce qu'elle n'a pas
parce qu'elle est unie au corps qu'el.e fait tout cela séparée, ; eHe
serait De ces considérations et de quelques autres
sans vie *. »
(IcARD. Journal^ p. 70.) Sans doute, dans l'esprit du vénérable prélat, ce mot avait
un sens très avouable Mais de telles paroles, rapportées à l'évêque d'Orléans,
excitaient en lui un sentiment de susceptibilité hiérarchique dont le principe était
également fort respectable.
568 HISTOIRE GÉNÉRALE DE ï/ÉGKTSE
VIII
le clergé français, les éloges que lui avaient décernés kinocent III,
I. Dans son Journal, M. Icard revient souvent sur celte question de la juridic-
tion immédiate du pape, soit pour raconter ses discussions arec Mgr Vecchiotti,
soit pour rappeler les efforts tentes par lui pour convertir à sa thèse Mgr Darboj
(Icard, Jo»rna/, p. i44, 163,207-208 eipassim.)
a. Grandkrath, t. III, ir« partie, p. 894 Sgg.
3. « 27 mars 1870. Ce malin, M. Combes m'a rapporté ce que lui avait dit,
avant hier, le secrétaire de l'Académie impériale, comme le lenant du cardinal di
Pielro. Le cardinal Antonelli, sérieusement préoccupé des conséquences que peut
avoir une définition dans les circonstances présentes, a réuni un certain nombre
de cardinaux qu'il consulte souvent pour les affaires politiques. Il a été convenu
entre eux qu'ils iraient voir le Saint-Père pour le prier instamment d'écarter du
concile la question fameuse. Le pape n'a pas du tout accueilli leurs observations.
Il leur a dit « J'ai la Sainte Vierge pour moi j'irai en avant *. (Icard, Journal^
: ;
p. 298 )
4. Voir la lettre de Mgr Darbov, dans Ollivirr, op. cit., l. FF,». 236-238.
5. Ibid., p. a38.
670 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
La plus grande Cent dix-huit orateurs s'étaient fait inscrire pour prendre la paro'e
liberté
est laissée
sur le quatrième chapitre 2. Mais, au cours des discussions précé-
à la dentes, la lumière s'était faite peu
Pour moi, écrit le car-
à peu. «
discussion.
dinal Manning, je puis déclarer en conscience que tous les argu-
ments généraux avaient été épuisés depuis longtemps. On avait, en
outre, tellement anticipé sur la discussion spéciale des détails,
que
pendant plusieurs jours on n'entendit rien de nouveau. La répétition
devenait fastidieuse 3. » De plus, les chaleurs étaient accablantes.
Soixante et un Pères renoncèrent à leur droit de parler.
1. Voir la lettre de Mgr Darboy, dans Oluvier, op. cit., t. II, p. a36-a38.
a. Granderath, t. III, 2^ partie, p. 89.
3. Manning, Hist. duconc. du Vatican, p. Sg.
4 C'est celle qu'emploie couramment Bellarmin dans son traité De Romano
Pontifice.
&. Le rapport de Mgr Gasser occupe, dans la Collectio lacensis^S^ colonnes entières
{Coll. lac, col. 388 423). Le P. Granderath en donne un résumé dans son
Hist. du concile du Vatican, t. HI, 2<i partie, p. 92-116.
LE CONCILE DU VATICATf 67!
juxta modwn ^.
habere lanlum potiores partes, non vero iolam pUnitudineni hujus supremae potestatis.
Par là on coupait court à certains subterfuges du gallicanisme, dont on a> ait
trouvé des traces dans l'ouvrage He Mgr Maret. Voir Cornut, Mgr Freppel d aprèj
des documents authentiques et inédits, un vol, in-80, Paris, 1893, p. iC6.
672 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
du iS juillet
président de l'assemblée lut ensuite un monitum du Saint-Père
ï87o. déclarant que les Pères qui auraient des raisons de s'absenter, soit
pour des motifs de santé, soit pour des motifs d'affaires, pourraient
retourner dans leur diocèse jusqu'au 1 1 novembre, fête de saint
Martin, à la seule condition de prévenir de leur départ le secrétaire
du concile *.
pas assister lution prise, il nous dit qu il ne pouvait se rendre a notre manière
a la séance
^q yoir : que
^ nous ne pouvions pas dire placet, on ne nous croirait
pour ne pas .
f. / i 1 1 ,.
attrister P^s ;
quc nous ne pouvions pas dire non placet, le monde catholique
leSaint-Père ^g qous comprendrait pas peut-être se scandaliserait qu'il fallait
et ;
par un , . . . ,
non placet. s'abstenir. Son avis prévalut *. » Une lettre au Saint Père fut aussitôt
rédigée et signée par les cinquante-cinq évêques adhérant à la déci-
sion. La lettre, conçue en termes respectueux, annonçait au pape
que, pour ne pas avoir la douleur de dire, « en face de leur Père,
dans une question qui le touchait de si près : non placet », ils
soir même.
Le lendemain, 18 juillet, à neuf heures du matin, la session pu-
blique eut lieu, suivant le cérémonial ordinaire, dans la grande salle
dans les Deux-Siciles, et de Mgr Fitzgerald, évêque de Little-Rock, par 533 voix
sur 535.
dans les Etats-Unis. Ces deux prélats n'avaient pas assisté à la Les deux
réunion des évoques de la minorité, et on avait oublié de leur faire opposants se
soumettent
connaître la décision prise. Ils se soumirent l'un et l'autre aussitôt aussitôt.
venait de s'ouvrir réclamant toutes les forces de la France, il était (19 juillet
1870).
disposé à retirer ses troupes de Rome.
Or, déclare l'historien allemand du concile du Vatican, « c'est Les troupes
grâce à la protection armée de France que françaises
la le concile avait pu
quittent
durer jusque-là ^. » On avait désormais tout à craindre de la vio- RoQoa.
lence des troupes révolutionnaires et de la complicité de la cour de
Florence.
On espéra un moment, à Rome, que l'Autriche prendrait dans la L'Autriche
Ville sainte le poste d'honneur abandonné par Napoléon etla Prusse
III ; mais on
se montrent
apprit bientôt qu'au contraire le comte de Beust, premier ministre de favorables
l'empire austro-hongrois, proposait à l'empereur des Français de à une
intervention
faire l'abandon de Rome à la monarchie de Savoie*. Le roi de Prusse, de Victor-
sur qui quelques catholiques italiens avaient aussi compté ^, informait Emmanuel
à Rome.
Victor-Emmanuel que « les sympathies de la Prusse pour la personne
du Saint-Père avaient leurs bornes naturelles dans les bons rapports
de Victor-Emmanuel. »
IX
impartiale des textes adoptés. Mais les agitations des peuples et des
Etats avaient été si grandes, tant de préjugés, tant d'interprétations
tendancieuses avaient été mis en circulation, qu'on pouvait craindre
devoir le vrai sens des décisions conciliaires obscurci par la passion
ou par la mauvaise foi.
Pour éclairer l'opinion, le secrétaire général du concile, Mgr Fessier, Mgr Fe«;sleij
secrétaire
évêque de Saint Hippolyte, en Autriche, publia, sous ce titre : la
général
Vraie et la Fausse Infaillibilité des Papes, une brochure, aussilôl ho- du concile,
Analyse bilité du pape défiaie par le concile n'est attachée qu'à sa fonction
de celte
brochure. de docteur suprême de l'Eglise universelle, et non à celles de prôtre
suprême, déjuge suprême et de suprême législateur *
; S*" que, même
dans les décrets dogmatiques, tout n'est pas article dejoi, et qu'il ne
faut pas considérer comme tel ce qui n'est mentionné qu'en passant
ou ce qui ne sert que d'introduction ou de considérants ^
;
4° qu'en
disant que les définitions promulguées par le pape c< sont irréfor-
mables par elles-mêmes, et non en vertu du consentement de
l'Eglise », on ne veut dire en aucune façon que le pape puisse
jamais décider quelque chose de contraire à la tradition ou qu'il
puisse se mettre en opposition avec tous les autres évêques ^
;
des Etats. senter l'infaillibilité comme renfermant le droit de déposer les sou-
verains...La mauvaise foi seule peut confondre des objets si divers,
comme si un jugement infaillible porté sur une vérité révélée avait
quelque analogie avec un droit que les papes, sollicités oar le voeu
tement mis en révolte avant le concile, ne furent suivis par aucun L\'\-Père
Hyacinliie
disciple de marque. M. Loyson essaya de fonder à Paris une essaie
« Eglise française », qui se discrédita de plus en plus. Dœllinger, d'organiser
« l'Église
qui paraît avoir, un moment, rêvé de jouer le rôle d'un Luther, frani^aise ».
1. Alloculiou du 20 juillet 1871, citée par E. Olliviek, op. cit., II, 874
Gk\ndi;katii, t. III, ac partie, p. 3Ga Voce délia Verità du 23 juillet 1871.
;
—;
Pic IX explique ici le pouvoir indirect des papes du rno}en âge sur les souverains,
suivant une théorie exposée par i\I. Gosseun, prêtre de Saint Sulpice, dans son
ouvrage Pouvoirs des papes sur les souverains au moyen âge, un vol. iu-8^, Paris,
1839 et 1845. Cette théorie a été parfois contestée. Le pape Pie IX lui donne ici
Pappui de son autorité.
Geccom, llist. duconcile du Vatican, t. II, 1. Ill, ch. vi, n. i5, n. 487.
2.
3. Dans une lettre inédite à Mgr Dupanloup, Dœllinger énumère plusieurs de
ces démarches. Il le fait avec une sécheresse oiî perce quelque amertume, mais
qui reste correcte. La lettre se termine bru6ij[ueuieut, sans aucune formule de
salulaliou. [Archices de Saint Sulnice.)
Hist. gén. de rE-iiso. - Via 37
578 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
jamais occupée de l'un et de l'autre que pour les dédaigner ou les ridi
enliser.
Aucune Cette grande agitation s'apaisa. Elle n'eut jamais de prise sur la
de ces
tentatives
masse des catholiques. Elle ne pouvait en avoir. « Personne, a écrit
d'hostilité un homme d'Etat non croyant, personne n'admettra que des hommes
n'a de prise
qui croient à la révélation, à la divinité de Jésus-Christ, à l'infaillibi-
sur la masse
des lité de l'Eglise, qui n'ont contesté aucune des décisions doctrinales
catholiques.
rendues par les papes depuis dix-huit siècles, se séparent de la com-
munion dans laquelle ils ont vécu, parce qu'une infaillibilité dont ils
ser, dans le vote sur l'infaillibilité, donné le 18 juillet 1870, une una-
doivent à VElat.
a. E. Ollivihr, op. cit., t. II, p. 3^6.
3. Ihid.
.
que le concile du Vatican a déclaré qu'il est. II se peut que la réunion j^ dogme de
des conciles œcuméniques soit rendue temporairement impossible, l'infaillibilité
(1870-1878).
1.Les négociations qui eurent lieu à cette occasion entre le cardinal AntoncUi
et le baron Blanc portèrent sur bien d'autres points. On y parla d'un modus
viveiuli temporaire entre les deux pouvoirs résidant à Rome. Les détails de ces
pourparlers «w trouvent dans une collection de documents diplomatiques éditée en
1895 par le baron Blanc, tirée à un petit nombre d'exemplaires et ne se rencon-
trant point dans le commerce. Ces documents ont été reproduits en grande parlic
et complètement analysés par M. François Carry, dans un article du Corresr'On-
daii paru le 19 novembre 1896 et intitulé Le Vatican et le Quirinal d'après des
:
duciimenls nouveaux.
2. Correspondant du 10 décembre 1896, t. CLXXXI, p. 783.
582 HISTOIRE GÉXKRALE DE l'ÉGLISE
Décret royal
du 4 octobre
« Art. I*'. — Rome et les provinces romaines font partie intégrante
1870,
du royaume d'Italie. — Art. 2. Le souverain pontife conserve
annexant la dignité, l'inviolabilité et toutes les prérogatives du souverain. »
Rome et les
provincei Le 18 octobre, le ministre des affaires étrangères, Visconti-Venosta,
romaines adressa aux gouvernements une circulaire ayant pour but de les
au royaume
d'Italie. rassurer sur le sort fait à la papauté par la suppression de son pou-
voir temporel *, "
Protestation Dans une lettre du 8 novembre 1870, le cardinal Antonelli pro-
du cardinal
Àntonelli testa vivement contre les affirmations de cette circulaire. Il rappe-
(8 novembre lait aux représentants du Saint-Siège auprès des cours étrangères,
1870).
pour qu'ils en informassent les gouvernements auprès desquels il»
gnement des doctrines les plus impies dans les chaires universitaires,
la liberté laissée à la diffusion de journaux, de gravures, d'écrits de
lirjue ^ »
Ce n'était pas, dit-on, sans une appréhension visible que le roi
par les Chambres^ ». Son émotion fut surtout poignante loisqu'il Pie IX
eut sous les yeux la fameuse encyclique du i^' novembre, par laquelle l'excommuni-
Pie IX prononçait, contre tous ceux qui avaient perpétré l'inva- cation
siou,
,,
I usurpation,
. ,,
l
«
occupation
'11
du domaine
• • '^
canons ^ ». lÔT^;-
Mais, une fois déplus, il dut céder. Le 5 novembre, une foule tumul-
tueuse, convoquée par des meneurs révolutionnaires, parcourut les
On
influences avaient triomphé des hésitations au prince per- ^. » lui dos sectes
1
guada qu en quittant
lA . •
p. 206.
4 Corate GoNESTABiuB, dans le Correspondant ^ t. GX, p. 206.
5. Ibid.
''84 HISTOIRE Oi^M'RArR DE l'ÉGUSE
Etals.
absorbée par sa lutte contre la Prusse. Parmi les autres Etats, les uns
invoquèrent le principe de non- intervention pour rester inactifs et
muets devant le fait accompli ; d'autres prirent une attitude expec-
tante, qui parut inspirée par la peur des sectes antichrétiennes, sinon
Pioicstaiion par une complicité secrète avec elles. Un seul Etat fit entendre une
àc Ici . .
.
naiionnte 1ère fut si marqué que des écrivains tendancieux ont pu dire, dans
' '
un esprit de malveillance à l'égard des catholiques français, qu'au
1. Chantkel p. 438-^39.
LE COtClTE DU VATICAN A LA MORT DE PIE IX 585
Chambres, fit voter et sanctionna, le i3 mai 1871, la loi dite des (13*^8^1871)
garanties^ par laquelle l'Etat italien reconnaissait l'inviolabilité de la
personne du pape et sa qualité de souverain, lui concédait la jouis-
sance des palais du Vatican, du Latran, de la chancellerie et de la
villa de Gastel-Gandolfo, garantissait la liberté des conclaves et des
conciles, renonçait à tout contrôle sur les affaires ecclésiastiques et
assurait à la cour pontificale une dotation annuelle de 3. 226.000 fr.
La loi était muette sur les débris de souveraineté promis parla capi*
tulation de Rome sur la Cité léonine *.
mais il est inutile de la publier ». (Ernest D.\udet, Hist. diplom. de V alliance franco^
russe p. 53 )
3 Voir l'opinion très nette de Thiers au 3/om/^iir dans le compte rendu des
•éances des i^el 16 avril i865.
4. Voirie lexle intégral de la Loi des Garanties dans Ciiamtrel, p. ôoa-5o4.
586 HISTOIRE GKNFRM.E pE 1, CGMSE
Le roi Victor- En même temps, sous prétexte que les catholiques de France pré-
Emmanuel paraient l'avènement du comte de Chambord, et que celui-ci annon-
M tourne
vers çait qu'un de ses premiers soins serait de restaurer le pouvoir tem-
rAilemagn».
trop long de les énumérer ^. » A la fin du mois de novembre 1872, Projet de loi
contre
à l'occasion de la présentation d'un nouveau projet de loi contre les
les ordres
ordres religieux et de l'érection d'un temple protestant à Rome, le religieux
(novembre
pontife renouvela ses plaintes*. De 1878 à 1876, de nouveaux
1872).
année de Pie IX est une merveille, qui en annonce une autre, celle de sa délivrance
par le Roi très chrétien ».
a Voir les curieuses correspondances de l'Univers à ce sujet (fin février 187a).
Cf. Lecanuet, op cit.^ t. I, p. 109
3 Chamtrel, p. G32 633. C'est dans cotte allocution que se trouvait ce passage,
si commenté par la presse « Je prie pour que certains partis, exagérés de part et
:
une bénédiction qui entre en cassant les vitres j» Et il écrivit dans son journal1 :
a Notre aflf ire à nous est d'obéir... Si donc le Juge estime que notre œuvre ne
peut plus lecevoir de nous le caractère que réclame l'intérêt de l'Eglise, nous dis-
paraîtrons ». Quelques semaines plus tard, répondant à une lettre du rédacteur en
chef de l'Univers, Pie IX lui déclara que, « tout en regrettant chez lui quelques
excès de zèle, il l'engageait à continuer le combat ». (Voir François Veuillot, Lout»
Veuillot, un vol., Paris, igiS, p i3i-i3a.)
4. Ghanthel, p. 714-718
•^^8 HISTOIRE GKNKRALE DE l/Ér.MSE
^%^armi^°"
nécessaire, tant que nous sommes sous joug des dominateurs...
le
les fil'Mes Que les fidèles se servent des moyens que les lois de chaque pays
^^ '''* mettent à leur disposition, pour agir avec empressement auprès de
ceux qui gouvernent ^. » Ces paroles provoquèrent, dans le monde
entier, un mouvement de pétitions, d'adresses, de motions dont plu-
sieurs gouvernements s'émurent 2. Le ministre italien, Mancini,
auteur du projet de loi, essaya de le justifier par une circulaire ^.
dernier ministre de
Crispi,
la mo-
^°'J°)' narchie italienne, celui qui avait voué à la papauté une haine impla-
cable, était chargé d'annoncer au peuple italien que le roi d'Italie
3. Ibid., p. 589-590.
4. Sur les moments et la mort de Victor-Emmanuel, voir Guanthel,
derniers
Annales ecclêsiasliqups^ au 9 janvier 1878, p. 691-698.
LE CONCILE DU VATICAN A LA MOUl DE PIE IX 58r)
II
Dans toutes ces épreuves de la papauté, quelle avait été la part L'Eglise
caliioliuae
de responsabilité des gouvernements de la France P
en L raace.
Le gouvernement autrichien ayant, le 20 juillet 1870, suggéré au
gouvernement français l'idée d'une entente qui aurait pour bul délivrer
Rome aux Italiens S le garde des sceaux du gouvernement impérial,
Emile Ollivier, avait aussitôt déclaré cette idée « pitoyable et impra-
ticable )) 2, et Napoléon III s'était pleinement rangé à l'appréciation
de son ministre ^. Le gouvernement pontifical fut néanmoins informé
que, la France ayant besoin de toutes ses forces dans la guerre qu'elle
avait à soutenir contre la Prusse, l'empereur se voyait dans la néces- Le gouverne-
sité de retirer ses troupes de Givita-Vecchia. Etait-ce là le vrai ment fraiirals
manifeslc
motif P Dans une dépêche adressée le 3i juillet par le ministre fran- l'intention
çais des affaires étrangères à son ambassadeur à Rome, M. de Banne- de retirer ses
troupes
ville, un autre motif était invoqué. « Assurément, disait la dépêche, ae (] ivita-
ce n'est pas par une nécessité stratégique que nous évacuons TEtat Vecchia.
De cette politique de Napoléon III on pouvait dire, une fois de Vrai motif
plus, qu'elle était au moins équivoque. Beaucoup de catholiques la de
celle mesure*
jugèrent avec plus de sévérité, quelques-uns murmurèrent les mots de
lâcheté et de sacrilège. Louis Veuillol, envisageant les éventualités de
la guerre, écrivit Nous avons une belle armée et de belles forte-
: «
présente sans cesse à mon esprit '. » Le pontife suivait avec anxi(5té
les terribles péripéties d'une guerre qui venait de mettre aux prises le
pays qui s'était toujours montré le plus ardent défenseur de l'hérésie
et la nation qui restait, makré tout, la Fille aînée de l'Eglise : les
défaites de Wissembourg, de Forbach, de ReiscliofTen et de Sedan ;
^
décret des otages, publié le 5 avril, ordonnant l'arrestation de toute
la terrible
1
exécution de
cet odieux décret ; le massacre de Mgr Darboy de ses compagnons je» massacres
et
£glises de Paris sous la Commune, un vol., Paris, 1873 ; Leganuet, op. cit , p. ioo«
lo5.
G. Peu de temps après, capitaine de cuirassiers.
7, A. DE Mus, Ma vocation sociale.
592 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
a. CnvNTHEL, 6G9-670.
p.
3. François Veuillot, Louis Veuillol, p. i43.
LE CONCILE nu VATICAN A LA MORT DE PIE IX SqS
les communes
11-,
diocèses pourraient
et les
. •
Ti
ouvrir librement des cours
I
(ï2 juillet
18-5).
et des Facultés. Pour la collation des grades, on avait fini par s'en-
tendre sur une transaction: les étudiants des universités libres auraient
le choix de se présenter, pour leurs examens, devant les Facultés de
l'Etat, ou devant un jury mixte, composé par moitié de professeurs
de l'Etat et de professeurs des Universités libres. Les jurys mixtes
devaient cire plus lard supprimés.
Au cours des débats sur cette importante question, de très vives
attaques avaient été dirigées par la gauche contre le catholicisme.
L'opposition anticléricale, en effet, n'était point morte, et profitait
blesse de ce rtiouvement était dans k persistance des deux tendances, Origine* dua
libérale et autoritaire, dont nous venons de parler. La seconde fai- anliciérical.
blesse des catholiques était dans leur division en plusieurs partis po-
litiques. De diverses tentatives de restauration monarchique, faites
de 1871 à 1874, ils étaient sortis plus divisée que jamais en légiti-
I. G. \\ EiLL, Ilisl. du cath. lib. en France^ p. 196. Les deux principaux organes
des catholiques qui so plaçaient sur le même terrain que Mgr Dupanloi-\ élaiont
le Correspondanl et lo Bidlelinde la Société générale d'éducation,
élue les des i^-aS octobre 1877 donnèrent elles une fort
Aussi les élections
14-28 octobre . . , , , a r\ ? •
i^ 1 i /-.i i
est majorité a la gauche. On put prévoir des lorsque la Chambre triom
plus inclinée
encore
vers la gauche,
plierait tôt
*
écrivait le
ou tard du Sénat
iii du
Rappel, pour aborder
et
les
Président.
i^ror
grandes reformes
« Tout sera prêt alors
2. » Les grande
réformes, c'était la lutte ouverte contre le catholicisme sous ladircc
tion d'un homme dont l'influence ne cessait de grandir, Léon Gam
betta.
Ili
L'Eglise
Pendant la dernière des crises que nous venons de raconter, vers
catholique
le milieu du mois de septembre 1877, Pie IX, recevant des pèlerins en Allemagne.
français, avait terminé son allocution paternelle par cette prière :
catholicisme.
c'était de le poursuivre partout, même chez les nations germaniques.
On le poursuivit en Allemagne. La tactique employée pendant
la guerre franco-allemande fut très captieuse. « Si l'on parvenait
à faire croire que les prêtres catholiques souhaitaient la défaite de
TAIlemagne, puis à établir d'autre part que les victoires allemandes PnHcxlct
invoqués.
étaient des victoires du protestantisme, ce serait l'affaire de quelques
votes, ensuite, pour mettre les catholio' es hors la loi. On épia donc
les propos des curés ; et les espions, laligués, finirent par en inven-
ter : on disait qu'ils faisaient prier pour les victoires des Français » ^.
22 juin 1871. On sut, plus tard, que Bismarck avait fourni les idées
de l'article, en avait même corrigé les épreuves 3.
Pr^nT res
Les actes suivirent de près les paroles. Le 8 juillet 1871, fut sup-
hos>ùIités.
primée, par voie administrative, la section catholique au ministère
de taille. Avec son crâne énorme, ses petits yeux foui Heurs et sa
figure coupée en deux par une large bouche, que le moindre accès
de rire écarquillait encore, on cûtdit une caricature vivante détachée
de quelque dessin deCallot. Né, le 17 janvier 1812, en terre saxonne,
d'un paysan-avocat, qui se livrait à la fois au travail des champs
et à la jurisprudence, Louis Windthorst avait d'abord exercé. Ses onginea
I. ^'oi^ la loi dans Chantrel, p. 696 Gotau, op ; cit., p. aog. Cette loi e«l
connue en Allemagne sous le nom de « paragraphe de la chaire »,
2 CiuriTREL, p. 6i5-6i8.
598 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
au Reichsia".
prussien, les députés catholiques du Ueichslag, parlement de l'em-
pire, s'étaient réunis en un groupe dénommé Centre, et le député do ^^^
__
Hanovre y avait
.
'l'Ai
conquis bientôt la
•»
première place.
1 TT -II-
Un piojet de loi
,
d'expulsion
contre
.
demandait que les jésuites fussent expulsés de toute l'Allemagne. ^«^ jésuites
ses frères 2. >) Tout indique que le ministre Falk, principal maçonnerie
auteur des Lois de Mai, fut, dans sa campagne, le porte-voix des loges
et l'exécuteur de leurs desseins. D'ailleurs la presse maçonnique
d'Allemagne n'a pas craint de s'en faire gloire. ^ Nous croyons, écri-
vait, à la date du 26 octobre 1878, le Hérault Rhénan, pouvoir
légitimement affirmer que c'est l'esprit de la franc-maçonnerie qui,
dans le dernier procès qui s'instruit contre l'ultramontanisme, a
prononcé sa sentence 3. «Quelques jours après, la Freimaurer Zeitung,
1. Chantrel, p. 649-658.
2. G. CÎOYA.U, Di^inarck el l'Eglise^ l, p. ii6 Cf. Kohut, Die Hohenzollern und
t.
comble à la pcrséculion.
Au cours des discussions de ces diverses lois, les chefs du Centre,
Windthorst en particulier, quoique certains du vote final, avaient
défendu pied à pied les droits de l'Ej^dise. « Je le sais, s'écriait
Windthorst, au milieu des débats des lois de mai 1873, plusieurs Dérbration»
d'entre vous désireraient bien nous voir, nous, catholiques, employer windthorst
des moyens illégaux de résistance. Eh bien ! nous ne les emploierons ba résistance
nous devons la pro tiquer, nous le voulons ; et, contre elle, tôt ou
tard, se briseront tous vos projets ^. y) — « Vous voulez nous enlever"
.ios prêtres, disait-il en 1874, et vous croyez pouvoir nous en envoyer
de faux. Quelle erreur est la vôtre ! Voulez-vous contrarier nos sen-
timents ? Soit 1 Mais vous n'arracherez pas la foi de nos âmes. Pre-
nez nos églises ; nous prierons chez nous 1 Chassez nos prêtres ; nous
prierons tout seuls ! »
Le prince chancelier s'avisa que son ministre des cultes avait fait
l'Etat-Dicu »... Chrétien, Bismarck l'était à sa manière, qui ne voulait pas être
gênée par Dieu, mais fortifiée par lui pour le service de l'Etat Autant dire que
le christianisme prenait, chez le chancelier, la forme du germanisme. )) (Paul
Gaultier, le Germanisme contre le Christianisme ^ dans le Correspondant du 25 mai
1917, p. 788.
2. Chantrel, p. 798-799,
LE CONCILE DU VATICAN A LA MORT DE PIE IX 6o3
IV
S'il est un fait aujourd'hui prouvé avec évidence par l'histoire, L'Eglise
catholique
c'est que Bismarck, en poursuivant Kulturkampf en Allemagne,
le en Suibse.
ne perdit jamais de vue l'œuvre d'un Kulturkampf international. « Ce
fut lui, écrit l'historien de VAlteniag/ie religieuse, ce fut lui seul
qui fit effort, à certaines heures, pour acclimater dans l'Europe en-
tière l'idée d'une guerre universelle contre Rome, et pour imposer Le
Kulturkampf
cette idée aux diverses souverainetés^. » Nulle part, le plan du chan- international.
celier ne se réalisa plus complètement qu'en Suisse. « Il y a, en effet,
prochain dépôt d'un projet de loi sur les fabriques, « lequel aurait
pour résultat, disait-il, de démocratiser l'Eglise catholique ^ ». Ce fut
à cette occasion que Carteret, président du Conseil d'Etat, autrement Le président
chef du pouvoir exécutif, prononça Carie ret.
dit, la fameuse phrase : u Ce qu'il
nous faut, c'est que l'Eglise catholique s'en aille avec le bâton et la
étudie ses formules, on conclut avec certitude qu'il les tenait de l'Al-
lemagne.
Premières lois Les premiers coups furent portés contre les congrégations rcli-
contre les • •
conoTé''ations gîeuses. Une loi du 3 février 1872 les astreignit à demander Fautori-
religiciises sation de l'Etat. Quelques mois après, le 29 juin 1872, le gouver-
nement prenait un arrêté d'expulsion contre les Frères des Ecoles
clitcliennes, interdisait l'enseignement aux Filles de la Cbarité, et
Mgr Marilley allez vers cette Genève qui n'a pas craint de s'appeler la Rome pio-
^^^ '864)™''^^ testante, et convertissez- la K »
Une pareille exhortation avait causé une vive émotion parmi les
Vive émotion Berlin, Londres, Genève, déjà mis en péril à Londres par le mouve*
^
ïï^^nt d'Oxford, allait il subir un nouvel assaut à Genève ? Le nou-
d^e^Genève"
veau prélat n'était pas seulement un orateur éloquent ; c'était un
Œuvres homme d'action, un militant, ses ennemis disaient : un combatif.
hteTueT" ^^^ le début de son ministère, pendant la péaode de soû vicaiiat à
millod.
I. CuAKTnBL, p. G81,
LE CONCILE DU VAT4CAIf A LA MORT DE PIE IX 6o5
défense du Saint-Siège.
Le nouveau prélat ne dissimulait pas, du reste, ses grands projets. Il
évêque auxiliaire... Je suis sans traitement, sans évêché ; mais quand (i864).
je n'aurai plus rien à donner, je prendrai le bâton de pèlerin, j'irai
Exil du prélat sommer, une seconde fois, Mgr Mermillod de renoncer à toute fonc-
(11 février
tion ecclésiastique, et, sur le refus de l'évêque, le 11 février 1878, il
1873).
le fait arrêter par la police, qui le saisit dans son appartement, le
Prise de
Pour u l'Eglise catholique nationale », il fallait des édifices reli-
possession gieux. La loi nouvelle avait déclaré que tout édifice religieux appar-
par le
gouvernement tiendrait de droit « au culte salarié par l'Etat ». En conséquence,
de toutes le gouvernement mit la main sur toutes les églises, chapelles et pres-
les églises
et chapelles bytères catholiques. En plusieurs endroits, les fidèles spoliés pro-
catl\olic]ues. testèrent. Beaucoup d'entre eux furent condamnés à l'amende ou à
la prison.
taiue qui faisait prévoir les pires violences. « L'attitude prise par
une minorité imposante, disait-il, — le lo février 1871, dans une
dépêche au comte de Trauttmansdorff, — minorité parmi laquelle nous
voyons avec une vive satisfaction figurer les noms les plus illustres
de l'épiscopat austro-hongrois, nous permettait de croire à un résul-
tat final ptus conforme à nos vœux... Le gouvernement impérial et
royal se réserve la faculté d'interdire la publication de tout acte
lésarht la majesté de la loi, et toute personne enfreignant une pareille
défense serait responsable de sa conduite devant la justice du pays..
Veuillez rappeler à Mgr le cardinal secrétaire d'Etat les principes de
l'application desquels Sa Majesté impériale, royale et apostolique ne
saurait déviera »
Cette lettre n'était pas une vaine menace. Après la définition de Dénonciation,
par ^empereur
rinfaillibililé, les ministres de Sa Majesté déclarèrent que u le pape
infaillible n'était pas le pape avec lequel l'Autriche avait conclu un Joseph,
auxquels le
,.
concordat, et que les évêques ne seraient plus désormais
ir-i-
concordat avait accorde certains droits ».
les
T-.
En consé-
prélats ^" concordat
autrichien
(3o juillet
quence de cette déclaration, qui fut insérée dans la Gazette officielle ^8701.
1. CuA.riTREL, p. a8i-fl6j,
llist gén do l'Eglise. - ^ 111 3j
6 10 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
...
favorise
le culte de»
chevêque de Vienne, adressa une réclamation au ministre des cultes
{( Vieux
catholiques » Jirecek. Celui-ci répondit, une première fois, que la concession faite
(i°70- par la municipalité viennoise de la chapelle Saint-Sauveur n'était pas
contraire aux lois fondamentales de l'empire ;
puis, sur les instances
du cardinal, que, le conflit dont il s'agissait étant de nature pure-
ment ecclésiastique, le gouvernement n'avait pas qualité pour pren-
dre une décision. Le cardinal déjoua aussitôt ce sophisme. « Je n'a-
vais point prié Votre Excellence, répliqua-t-il, de décider la question,
I. Chantrel. p. 588-58f).
LE CONCILE DU VATICA.\ A LA MOHT DE l'IE IX GlI
dre à ces raisons ; mais un interdit, jeté par l'archevêque sur la cha-
pelle Saint-Sauveur, fut obéi par les fidèles et mit fin au scandale.
Sebenico lente
La suppression de deux évêchés de Dalmatie, ceux de I!
de supprimer
et de Cattaro, demandée par le Reichsrath vers la fin de l'année 1871, deux évêchés
un nouvel attentat contre les droits évidents de Taulorité ecclé- en Dtlmatie
fut
(1871-1873).
siastique. L'archevêque de Zara, dans un long mémoire publié le
Les coups les plus funestes que l'Eglise eut à subir dans l'empire
d'Autriche lui furent portés par les lois et les règlements sco-
laires. La simple énumération de ces dispositions légales suffira à Les lois
scolaires.
faire comprendre la gravité du mal.
Le 16 janvier 1869,1e ministre de l'instruction publique, Hosner,
considérant que « l'éducation du clergé n'est pas une chose indiffé-
rente pour l'Etat >^, avait soumis au contrôle du gouvernement les
I. Ch.vntrkl, p. 007,
a. Ibld., p. aC.
3. Ibid., p. 7a.
12 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
gretta que le corps enseignant fût dans une situation déplorable par
suite de la révolution qui avait chassé les professeurs allemands ; il
I. Ghantrel, p. 79,
a. Ibid., p. m.
3. Ibid., p. 1 13.
4. Ibid., p. 147.
5. Ibid.f p. 7^4.
LÉ CONCILE DU VATICAN A LA MORT DE PIE IX 6l3
Vf
de violences, qui se produisirent anx cris de : Mort au pape 1 Mort cultes 6 juin
ai>x prêtres 1 et qui faillirent amener l'incendie du palais de la non- 1869).
1. CîTANTREL, p. l3d»
a. Ibid., p. 33.
â. ;6{(i., p. 37,
.
(novembre les Cortès, prit le nom d'Amédée Dans une circulaire adressée
I*^.
I. Chantrel, p. 601,
9. Ibid., p 697.
3. Itnd., p. 345.
4. Ibid , p. 399.
5. luid.^ p. 3Jo.
6. ibid., p. 609.
.
YIÎ
moins défavorable.
Irritation L'irritation produite dans la Haute-Eglise d'Angleterre par la défi-
produite dans
la Haute-
nition du dogme de l'infaillibilité se manifesta d'abord par le titre de
Eglise par la docteur de l'Université d'Oxford conféré à Dœllinger, puis par la
définition
du dogme de participation de deux évêques anglicans et d'un certain nombre de
l'infaillibilité clergymen au congrès tenu en 1872 à Cologne parles Vieux-catho-
pontificale.
liques -. Dans les sphères gouvernementales, le mécontentement dé-
terminé par le mouvement de renaissance de l'Eglise catholique s'était
traduit, le 29 mars 1870, par l'adoption au Parlement d'une motion
invitant les pouvoirs publics à faire une enquête sur l'organisation
intérieure des institutions monastiques et sur l'origine de leurs pro-
Une motion priétés. Sur la proposition de Gladstone, les Chambres britanniques
du Parlrmiii
demande atténuèrent, par un vote du 2 mai, cette décision trop dure, et sta-
une enquête tuèrent que l'enquête serait faite exclusivement sur les sources des
-ur les biens
des
biens monastiques, et non sur leur discipline intérieure mais même ;
1. Chamtrbl, p. 4oi.
2 Thureau- Dawgiw, la Renaissance catholique en Anyleleire, i. lU^ ^. i49-i5o.
3. Chatstrel^ Annales ecclésiastiques^ p. 3 10.
4. Ibid.
LE CONCTLE DU VATICAN A LA MORT DE PIE IK 617
nisèrent alors des agitations légales. En novembre 187 1, tous les Agitation
catholique
évêques irlandais, qui avaient beaucoup h souffrir de l'ingérence des en Irlande.
agents du gouvernement dans leurs écoles, réclamèrent, dans une
lettre pastorale commune : i° l'indépendance absolue de l'enseigne-
ment religieux dans les écoles primaires catholiques, Q° la participa-
tion des écoles secondaires aux allocations gouvernementales, jusque-
là réservées aux écoles protestantes ou neutres, et S'' l'ai^torisation
l'Angleterre ment religieux dans le cœur et dans la conduite que beaucoup qui
au
catholicisme.
se disent catholiques. Lorsque, quelque jour, il reviendra au bercail^
avec quelle joie nous souhaiterons la bienvenue à ce troupeau, qui
est égaré, mais non perdu * I » Pie IX avait inauguré son pontificat
en rétablissant la hiérarchie catholique en Angleterre ; il voulut, en
Il rétablit
la hiérarchie
l'année 1878, qui fut la dernière de son règne, rendre les mêmes
catholique honneurs au royaume d'Ecosse. Il signa, le 28 janvier, un décret de
en Ecosse
(a8 janvier
la Congrégation de la Propagande, rétablissant les deux anciens arche-
1878). vêchés de Glasgow et d'Edimbourg et les quatre évêchés d'Aberdeen,
de Dunkeld, de Galloway et d'Argyll. Mais la mort empêcha Pie IX
de consacrer et de proclamer ces créations. Cette tâche était réservée
par les grands événements qui l'avaieikt rempli, il en avait été l'un
des plus mémorables.
En racontant, dans leur ordre chronoloi<ique, les principaux évé- ^**® générale
,. . .
SOT les œuvres
nements religieux qui se sont accomplis sous le pontificat de Pie IX, de piété,
de charité
nous avons été amenés à parler plus d'une fois des œuvres que l'ao-
et de zèle sou«
tivitc du clergé et des fidèles suscita pendant cette période. Il nous le pontificat
de Pie IX.
reste à donner une vue d'ensemble de ces œuvres. La charité, la
piété et le zèle furent des traits dominants dans la physionomie de ce
Œuvre»
La plupart des œuvres de pit'té que le pontificat de Pie IX vit
de piété.
éclore, peuvent se ranger autour de trois grandes dévotions : la
Théodelinde adoré tour à tour, dans le cours de l'année, par chacune des paroisses
Dubouché ou communautés En i848, durant les-journées de juin, au bruit du
Mère Marie-
Thérèse). canon de l'émeute sanglante, Théodelinde Dubouché a l'inspiration
d'une œuvre, puis d'une congrégaliou religieuse, qui unira dans son
double bul l'adoration du Saint-Sacrement au culte du Sacré-Cœur.
L'institut des religieuses de l'Adoration réparatrice, fondé par elle, a,
doux, son sourire est si bon, que l'humble enfant en est ravie et
réconfortée. « Je suis, dit-elle, l'Immaculée Conception. » C'est la
Grotte ;
nombreux, au passage du Saint Sacrement,
d'autres, plus
es aceui5 français.
II
Le prêtre qui est, en Italie, le principal promoteur des œuvres Les œuvres
d'assistance corporelle et spirituelle, le fondateur de Vlnslitut de la de charité
en Italie.
Charité et des Sœurs de la Providence, Antonio Rosmini Serbati, se
dislingue entre tous par sa dévotion à l'Eucharistie, au Sacré-Coeur
I. Voir Henri Lassbrrb, Notre- Dume de Lourdes, un vol. in- 12, Paris,
a. \'oir G. Bertrin, Histoire critique des événements de Lourdes, un vol. in -80,
Paris.
3. DuBosG DE Pesquidoux,l' Inimaculéc-Conçcption, tiiitoirc d'au dogme, a vol,
\n-8i>, Paris, 1892, t. igj, 202.
II, p,
4. Taine, le Régime modemey t. II. p. iiô.
^
pour but de diminuer chez les pauvres gens les habitudes d'ivro-
gnerie. Devenu catholique, prêtre et archevêque, il continue à pro-
pager les sociétés de tempérance mais il étend le champ de ses ;
rcpond-il, si, pour vous, c'est du socialisme; mais, pour moi, c'est
du pur christianisme ^ »
(Je que Mgr Mauning est pour l'Angleterre, Mgr Ketteler, évêque
de Mayence, l'est pour l'Allemagne. On l'appelle « i'évêque social >;. Los œuvrea
(Je charité
Gomme son frère de Londres, il déclare puiser dans l'amour de Dieu, en Allemagne.
tel que le christianisme l'enseigne, la solution de tous les problèmes
redoutables soulevés par l'organisation actuelle du travail et de la
propriété. « Depuis que le Fils de Dieu est descendu sur la terre, Mgr Ketteler
(1811-1877).
dit-il, l'esprit créateur du christianisme a résolu, dans la limite du
possible, toutes les grandes questions, même celles qui ont rapport
aux misères et à la nourriture des hommes Dans l'ordre de la
2. »
théorie, Ketteler expose sa doctrine dans un grand nombre de dis-
cours, de brochures, de grands ouvrages, dont le plus célèbre a pour
titre : La question ouvrière et Le christianisme. y décrit, avec une
Il
vigueur que peu d'écrivains ont atteinte, le malaise profond créé dans
la société par le développement de l'industrie d'une part, et, d'autre
part, par le progrès de doctrines dignes du paganisme. Il examine
ensuite et critique avec une rare compétence les solutions proposées
par les socialistes Lassalle, Karl Marx et Engels. Il reconnaît que
la fondation de sociétés coopératives de production, solidement orga-
aux. hommes ^ ».
du maître et en
a mis fin à la servitude antique en brisant l'orgueil
relevant l'esclave de son avilissement, saura, dans la mesure où la
condition humaine le permet, vaincre l'égoïsme du capitaliste mo-
derne et modérer la convoitise du travailleur *. Dans l'ordre de la Lei
continuateurs
pratique, Ketteler fonde à Mayence des caisses de secours, des cercles
de Ketteler
eu AUemagne.
époque : les lois sur les logements insalubres, sur les contrats d'ap-
prentissage, sur les monts de piété, et il prend une part très impor-
tante à la rédaction de la loi sur la liberté d'enseignement K
"'^
Léon Lefébure, fidèle disciple d'Armand de Melun dès sa première ^'^«'ij'*'^'
Nous avons eu l'occasion de dire plus haut comment le jeune lieu- .viberide Mu»
tenant Albert de Mun d'état-major René de Tour du (^^^i- 1914).
et le capitaine la
Sous la pression des événements, et sous la haute direction de leur Les Frèr^
Supérieur général, le Frère Philippe, les Frères des Ecoles chrétiennes ?®' Ecoles
., .
1
chretiennasw
élargissent aussi leurs moyens d action.
Leur point de départ, leur œuvre première, c'est l'école primaire.
Mais, lorsque la famille offre si peu de secours chrétiens à l'enfant
sorti de l'école, n'est il pas naturel que ses anciens maîtres songent
à s'occuper de lui ? Le Frère Philippe pense que les cercle» déjeunes
gens, les maisons de famille, les classes d'adultes, les colonies agri-
coles, les orphelinats, l'enseignement professionnel, industriel, agri-
III
1^9 tBiivre* Est-ce une œuvre d'art ou une œuvre d'apostolat que poursui-
:J"-'Jîfication.
vent, au temps de Pie IX, le peintre Hippolyte Flandrin en France,
les disciples d'Overbeck en Allemagne, les « préraphaélites » d'An-
gleterre qui ont Ruskin pour législateur et pour héraut? La prédo-
minance de l'idée d'apostolat est incontestable chez le peintre des
églises de Saint-Vincent-de-Paul et de Saint-Germain-des-Prés de
La peinture Paris, de l'église Saint-Paul de Nîmes. On a dit, des admirables
clirétienne.
figures où sou âme si pure transparaît, qu'on y trouve plutôt « un
llippolyle reflet attendri dupasse » que la clarté rayonnante d'une « aube nou-
Flandrin
velle ^ ». Mais sa peinture exprime une piété si douce et si recueillie,
(1809 i864).
qu'une voix compétente a pu le comparer à la un néophyte
fois « à
XV® siècle décorant les chapelles et les monastères avec une inépui-
sable ferveur • ».
L'architecture Dans le renouveau religieux de l'architecture qui s'opère pendant
chrétionne.
la même période, l'inspiration est purement chrétienne chez Monta-
lembert, qui, dès i833, dans sa lettre sur le Vandalisme en France^
écrit : « J'ai pour l'art du moyen âge une passion ancienne et pro-
fonde ; passion avant tout religieuse, parce que cet art est, à mes
yeux, catholique avant tout » ^. Mais chez Victor Hugo, chez Mi-
chelet, chez Mérimée, chez Vitet, comme chez les disciples alle-
mands de Wackenroder, l'inspiration est surtout artistique. Didron,
dans ses Annales archéologiques, fondées en i844, et Arcisse de
Caumont, dans son Abécédaire d'archéologie, paru en i85o, en pré-
parent la réalisation. Un architecte de grand talent, Viollet-le-Duc,
dont les écrits et l'œuvre monumentale dominent l'époque, la réalise.
Ses restaurations de Notre-Dame de Paris et d'un grand nombre de
monuments à Vézelay, à Autun, à Beaune, à Toulouse, à Carcas-
Bonne, ne sont pas à l'abri de toute critique. Mais son œuvre a def
parties admirables, et l'ardeur de son prosélytisme est infatigable.
L'ouvrage est aussi neuf aujouid'hui qu'au premier jour ; s'il peut,
à certains égards, être complété, on n'y trouve rien à reprendre » 3.
La théologie
La théologie rationnelle et la théologie positive n'absorbent pas,
mystique.
d'ailleurs, l'activité du clergé catholique. La théologie mystique a,
I. Denzinoer-Bahswart,n. i652.
Bref du i5 juin 1857. Eximiam tnam.
a
3. Pour avoir une idée complète du mouvement théologique à cette époqu», voir
Bellamt, la Théologie catholique au XIX^ siècle, un\o\. in-8<», Paris, 1904, et Hurter,
Nomenolator UUerarius, t. V. On trouvera dans ce* deux ouvrages les éléments d'une
étude sur le mouvement biblique et sur le mouvement apologétique pendant la
même période,
4 Plus tard Mgr Gaj, évêque d'Anthédon, auxiliaire de Mgr Pic, éréque d«
Poitiers.
5. Vie et lettres da R. P. Faber, par le R P. Bowdbn, trad. Philpin de Riviires,
un vol. in la, Paris, 1872, p, 7 ; Léon Gàutibh, Eisprit du P. Faber, un vol. in-
la, Paris, 1878.
0*34 HISTOIRE GÉINÉRALE DE l'ÉGLISE
mille tortures et mille obstacles, parce qu'il a senti son âme « mou-
rir de faim et de soif" dans le protestantisme », parce qu'il n'y a
trouve ni les anges, ni les saints, ni la Vierge-Mère, ni Jésus pré-
sent dans l'Eucharistie, ni l'Esprit Saint lui parlant par une Eglise
sainte, une, catholique et apostolique. Le jour de sa confirmation, il
s'est senti, comme les apôtres, tout envahi par la présence sensible
du Saint-Esprit *. Et depuis, il chante son bonheur. Ses traités de
spiritualité sont des poèmes. Moins profond psychologue que
Newman, moins ferme logicien que Manning, moins érudit que
Wiseman, il est plus souple, plus varié, plus captivant. Ses livres
m'ont pas cette ordonnance méthodique qui plaît au lecteur français,
mais ils abondent en traits frûppants, pittoresques, originaux, inat-
tendus 2. 11 excelle à donner une forme poétique aux thèses les plus
austères, à exprimer en métaphores très modernes les dogmes les
L'abbé Charles Gay, épris dès l'enfance des beautés de l'art, musicien
Charles Gay
(1816-1893). habile, ami de Charles Gounod, est converti à dix-huit ans par
Lacordaire. Ordonné prêtre, il s'attache de préférence à l'abbé Gaston
de Ségur, à Mgr Pie, collabore à l'œuvre de l'évêque de Poitiers, et
I. Ibid., p. 370.
3 de ce qu'on appelle l'école romantique n'est pas étranger
« L'esprit littéraire
au P. Faber. . Il de mœurs et la moquerie même aux idées les ()lu8
mêle le trait
gi-andioses. 11 dit tout ce qu'il pense, et il le dit à coups de pinceau. » (Ernest
IIello, dans la /?eu. du Monde caih. du 38 mars 1875.)
3. Léon Gautier, Portraits littéraires, p. 81.
4 Les œuvres du P. Faber se composent des ouvrages suivants le Précieux :
piélé a constitué sa vie intime. Elevé dans une famille étrangère aux
croyances chrétiennes, il est venu au catholicisme paisiblement, sans
secousse, en suivant les inspirations les plus profondes de sa raison
et de son cœur. Parvenu à la vérité totale, il a converti tous les
membres de sa famille par le seul rayonnement de sa vie intérieure,
par ce qu'il a été plutôt que par ce qu'il a dit ; et c'est sans doute
la difficulté qu'il a éprouvée à traduire en formules intellectuelles ce
qu il a senti comme une vie, qui donne parfois une telle tension à son
style. « Les livres, écrit il, ne vont au fond de rien^. » « La formule
est une maison que notre condition terrestre rend précieuse, peut-être
indispensable. Que de gens tendent à transformer cette demeure en
prison ^ ! » Mais la lecture attentive d'un livre aussi profond que le
mule, chez ce mystique qui est un théologien, est sortie de son âme
et garde encore comme un écho de l'émotion dont elle a vibré. C'est
ainsi que ses dix-sept traités sur la vie chrétienne en général, sur les
vertus qui en sont le fruit, sur la vie religieuse, sur les obstacles que
la vie et les vertus chrétiennes rencontrent ici bas, deviennent des ali-
ments pour la pensée comme pour le cœur. Le mystique est-il autre
chose qu'une âme qui, par une grâce toute spéciale de Dieu, sent ce
que le simple fidèle croit, ou plutôt qui sent par le cœur ce qu'il sait
par l'esprit, où [lôvov (xadcùv, aXkd kolï nuôùiv ta Qûol , «uivaat
l'expression célèbre de l'Arcopagite * ?
IV
Lc8 œiivre* C'est donc bien à tort qu'on a souvent représenté le xi\* siècle
de zèle.
comme caractérisé par l'élimination de toute métaphysique, à plus
forte raison de toute spéculation théologique e* de toute tendance
mystique L'immense succès des ouvrages du P. Faber et de l'abbé
*.
parée.
L'Eglise, au cours des siècles, a compté trois grands mouvements
d'expansion évangélisatrice. kux premiers siècles, elle a suivi et par-
I.Dents l'Aréopagitb, Des noms divins, ch. ii, S IX-, Mighb, P. Gr., t. III,
col. 647. « Ce que nous croyons par la foi, dit sainte Thérèse en parlant des états
mystiques, l'âme le perçoit ici par la vue. » [Château intérieur, VII* demeure,
ch. ler.)
a. On connaît la vogue de la théorie dite des « trois états » d'Auguste Gomt*.
Voir Fagubt, Politique» et moraUstes du XIX* siècle, 35â-358,
ŒUVRES ET MISSIONS CATHOLIQUES SOUS LE PONTIFICAT DE PIE iX 63'J
E. Lamt, la France du Levant, un vol. in-S», Paris, 1900. p. 57-62, i64 336.
2.
3. Voir le récit détaillé de ces faits dans la vie de son frère, le R, P. Marie"
Théodore Ratisbonne, 2 vol. in-8°, Paris, 1906, t. I, p. 186 246,
OEUVRES ET MISSIONS CATHOLIQUES SOUS LE PONTIFICAT DE PIE IX 689
Ces derniers préludaient à leurs célèbres pèlerinages de Terre Sainte. Les Pèrat
Blancs.
En 1878, Mgr Lavigerie installa, à son tour, les Pères Blancs au
monastère de Sainte- Anne de Jérusalem, misa sa disposition par le
en Orient.
la dignité de la femme, de l'épouse, de la mère leur était apparue. Leur
importance.
« C'est sur la dégradation de la femme que l'Islam a été fondé... Le
jour où la femme, dans la dignité du foyer rétabli, aura transmis
sa conscience aux fils élevés par elle, la femme aura vaincu l'Is-
lam *. »
4. Ibid.^ p. 35o. 35 1.
64o HISTOIRE GENEUAr.E DE I, ÉGLISB
I. Voir Silvestre DE Sact, Exposé de la religion des Druses, a vol. in-8o, Paris,
i838.
a. E. Lamt, op. cit.^ p. 20a.
3. Baumard, Un siècle de VEglise de France, p. 438,
ŒUVRES ET MISSIONS CATHOLIQUES SOUS LE PONTIFICAT DE PIE IX 6^1
ncufévoqiies. Une lettre que lui écrivit Pie IX, le i6 septembre 1876,
fut regardée par lui comme non avenue, parce qu'il la considéra
comme inspirée au pape par la jalousie des dominicains. Mais
Soumission 1-orsque, en 1877, ^^ souverain pontife le mit en demeure d'oblem-
du patriarche, j^.j.gj, i^ g^g ordres OU de se séparer de l'Eglise, le vénérable prélat,
qu'animait un profond sentiment de piété et de dévouement à l'Eglise^,
n'hésita pas à se soumettre. Il eut alors la douleur de voir plusieurs
de ses fidèles et de ses prêtresse soulever contre lui. Son successeur,
Mgr Abolian, élu le 28 février 1879, acheva de rétablir la paix dans
l'Eglise chaldéenne. On sait d'ailleurs avec quel soin le pape Léon XÏII
prit à cœur d'accorder aux Eglises orientales tous les privilèges fondés
sur des traditions respectables et compatibles avec les droits essentiels
du Saint-Siège.
Bien autrement grave fut la crise qui éclata en Arménie.
Les missions Les catholiques d'Arménie avaient passé par des fortunes diverses.
en Arménie.
Ceux qui, pour échapper aux persécutions desTurcs, s'étaient réfugiés
i. Dans son allocution consistoriale du 28 février 1879, Léon XIII l'appelle i4a-
tistes (jaemexiniias pietatis et religionis sensus ornabat. [Acta SS. Leonis XIll, t. I,
rend, avec Mgr Pluym, puis avec Mgr Franchi, délégués du pape ;
schisme a disparu ^.
Ce n'était pas, hélas ! le seul fléau que l'Eglise eût à combattre en L'intluence
proiesianie
Arménie. De toutes les nations orientales, il n'en était pas de plus
travaillée par la propagande protestante. «
.,,,..
Les sociétés américaines
®" Arménie,
seraient très prochainement étendues à tous les palriarchals orientaux. Mais les
troubles soulevés en Arménie par cette bulle et ceux que provoqua en Chaldée
l'ex tension des mômes mesures, décidèrent le pape à ne pas donner suite à son
projet. Voir, sur ce point, De Angelip, Priclectiones Juris canonici, t. I, pars prima,
p. i3i-i3a.
644 HISTOIRE GÉNÉRALE DE LÉGLISB
Les missions Si, des pays d'Orient, aous passons aux régions communément
d'Extrême-
Orioot.
désignées sous le nom d'Extrême-Orient, nous rencontrons encore,
à côté de l'infidélité, païenne ou musulmane, la redoutable concur-
rence du protestantisme.
Les missions Dans l'Hiudoustan, à l'avènement de Pie IX, le mal était double.
des Indes.
D'une part la substitution de l'influence anglaise à l'influence por-
tugaise favorisait le développement du protestantisme ; d'autre part,
les manœuvres de la cour de Lisbonne, qui se vengeait de ses échecs
politiques en empiétant sur le domaine religieux, et en soutenant le
clergé schismatique de Goa, entravaient l'action du Saint-Siège et,
par là même, de l'apostolat catholique ^. Le 9 mai i853, Pie IX, en
Le schisme un langage sévère, rappela les schismatiques à l'obéissance mais la ;
de Goa.
Chambre des députés de Lisbonne, par un vote du 20 juillet, déclara
que l'acte du pape était invalide, parce qu'il était dépourvu du
placet royal, et que les ecclésiastiques rebelles avaient bien mérité de
la patrie. Le traité conclu, le 20 février 1857, entre le cardinal pro-
nonce di Pietro et le ministre Fonseca- Magalhaes, porta que les
et leur permettait d'en élever a suivant leur bon plaisir » 2. Les mis-
sioimaires avaient lieu de se réjouir de ces résultats. Toutefois l'èrg
I. R. l^. Piolet, les Missions françaises au XI X'^ siècle, t. Il, p. 2Ô\. On trouvera
des épisodes pleins d'intérêt de ce mouvement de conversion dans les Annales de la
propagation de la foi de 187a, t. XLV, p. 194-198.
a. Noir Annales de la propagation de la foi, t XXI, p. aS, a4, 23.
3. Annales, t. XXI, p. 28- ag.
^ Hue. Souvenirs d'un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine, 2 vol. in 80,
Paris, i85o.
^
Ceux-ci finirent par se procurer le texte des fameux édits, car, écri-
vait le P. Delaplace, missionnaire lazariste, « en Chine, il n'est pas
dévoile si épais qui ne devienne transparent au reflet des sapèques » 2.
paralysait les faibles, les âmes nobles, à la vue des vertus surhu-
maines, du désintéressement absolu témoignés par les martyrs catho- Courage
des
liques, se prenaient à aimer une religion qui produisait de tels missionnaires.
héroïsmes. Au milieu même des persécutions, les missionnaires con-
servaient l'espoir de voir le christianisme se propager dans ce vaste
empire. Ils n'abandonnaient ni leurs missions, ni leurs orphelinats,
ni leurs collèges, qui ne cessaient de prospérer; si bien qu au lende-
main de la mort de Pie IX, Léon XIHput ériger plusieurs nouveaux
vicariats ou préfectures apostoliques *.
VI
De toutes les missions, c'est celle du Japon qui réser\'ait au Saint- Missions
du Japon.
Père les consolations les plus grandes. C'est au Japon que les chré-
tiens avaient jadis subi les persécutions les plus violentes ; et les chefs
peu après, le roi de Nafa porta une loi punissant de mort quiconque
embrasserait le christianisme. L'expédition de la flotte franco-anglaise
en Chine, de 1867 à 1860, eut une influence sur les relations de
l'Europe avec le Japon. Un traité de i858 ouvrit au commerce cer-
tains ports de l'empire et admit la présence d'un consul général de
France à Yedo. Dans ces ports ouverts au commerce, quelques
missionnaires s'établirent ; et l'on toléra même la construction de
plusieurs églises à l'usage des catholiques européens ; mais l'entrée
en fut sévèrement inteidite aux Japonais. Le gouvernement fit arrêter
cinquante-cinq indigènes qui s'étaient permis de les visiter. Ja .lais
toïsme, qui n'était plus guètc qu'une liturgie nationale. Pendant que
les missionnaires notaient tous ces détails, la population et les auto-
a
Découverte
^^ ^''oi^
chrétientés
hommes et femmes, dont l'attitude religieuse les frappa. Une femme secrètes
. , , ,
. , •. •
1 i-i « • *u Japon
âgée s avança vers eux, et, lamain sur la poitrine, leur dit a voix ,'mar8i865).
basse : « Notre cœur est le même que le vôtre ». Elle ajouta : u Où
est l'image de sainte Marie ? » On conduisit les visiteurs devant l'au-
tel de la Sainte Vierge. Ils tombèrent à genoux. Il n'y avait pas à s'y
tromper ; c'étaient des chrétiens. Dans des entretiens secrets avec
eux, les missionnaires apprirent que, depuis deux cents ans, dépour-
vus de prêtres, privés de tous les sacrements, excepté du baptême,
dont le rite et la formule s'étaient religieusement conservés, ils
persécution rien eût fait prévoir un pareil événement, toutes les chapelles de la
(i4 juillet vallée d'Urakami furent pillées par des émissaires du gouvernement,
1867).
et soixante-quatre des principaux chrétiens furent arrêtés. D'où
venait ce brusque attentat? On sut bientôt que la politique était pour
une bonne part, sinon dans l'attentat lui-même, du moins dans la
soudaineté de son exécution. Dans le conflit qui mettait aux prises les
partisans du mikado et ceux du shogoun, les premiers reprochaient,
aux seconds d'ou>Tir trop facilement l'empire aux étrangers, et fai-
de l'empire.
Les tortures commencèrent. Elles, furent d'une cruauté inouïe. Oa
tordait les membres des victimes, on leur serrait progressivement la
gorge jusqu'à les étouffer, et, ce faisant, on leur promettait leur dé-
livrance immédiate s'ils consentaient à abandonner « la religion des
étrangers » pour revenir au culte de leur pays. Dès le premier jour,
un chef ayant cédé, beaucoup suivirent son exemple. Mais un jeune
homme, d'apparence timide, de tempérament maladif, Zen-Yémon,
Courageuse par sa constance inébranlable, releva le courage de ses frères. Sept
conduite
des chrétiens. fois, on le fit comparaître et torturer ; sept fois, il refusa de renier
(( la religion de Jésus ». Par crainte, sans doute, d'une répression
des puissances européennes, on n'osa pas le mettre à mort. Son
exemple fit rougir les apostats, qui se rétractèrent en foule. Depuis
lors, le courage des chrétiens d'Urakami ne se démentit plus. Celui
des chrétiens d'Omura, poursuivis peu de temps après, fut également
admirable.
La révolution Mais, sur ces entrefaites, le 3 janvier 1868, une révolution poli-
japonaise
de 1868. tique s'effectuait au profit d\i ']eune mikado Montzu-Hito ; \e shogou-
nal était aboli, le parti de la noblesse écrasé. A la première heure, oa
put croire que ce triomphe du parti qui témoignait particulièrement
son hostilité envers les étrangers allait être funeste aux chrétiens. 11
n'en fut rien. Les troupes du ^/zZ/tWo n'avaient vaincu que par l'appui
ŒUVRES ET MISSIONS CATHOLIQUES SOUS LE POîSTIFICAT DE PIE IX 653
des nations de l'Europe et de l' Amérique, qui leur avaient fourni des
munitions et des engins de guerre; la puissance guerrière, indus-
trielle et commerciale de ces nations s'était révélée aux yeux de ces
Japonais, esprits curieux, ambitieux de gloire et de procès. D'autre
part, l'abolilion d'un parti rival rendait plus franches les coudées du
nouveau gouvernement. Ce fut le point de départ de cet élan pro-
digieux du peuple japonais vers la civilisation européenne, qui
devait, en peu de temps, l'élever au niveau des peuples les plus avan-
cés.
devait peu à peu amener l'empire du Dans
Cette révolution politique
l'ensemble,
Japon à la tolérance du christianisme. Une nouvelle persécution cette
de mauvais traitements.
Cependant, la révolution de 1868 avait eu sa répercussion sur la
situation rehgieuse du Japon. Le mikado^ chef de la religion natio-
nale, prétexta que les bonzes bouddhistes avaient favorisé son rival,
vallée d'Urakami ^.
f.a mission L'Eglise de Corée, longtemps privée de pasteurs, avait été confiée,
de Corée.
eu 1827, à la Société des Missions étrangères, qui, achevant à peine
de réorganiser ses cadres brisés par la Révolution, put néanrhoins y
envoyer, en 1882, Mgr Brugnière, précédemment coadjuteur du
Son premier vicaire apostolique de Siam. Pourvu du titre de vicaire apostolique
vicaire
apostolique,
de la Corée, Mgr Brugnière mit plus de trois ans à traverser la Chine,
Mgr Bru- du Sud au Nord ; épuisé de fatigue, le vénérable prélat mourut, le
gnicre.
mon-
•
d'André Kim, le premier prêtre coréen, qui donna lui aussi sa vie
persécution.
Mgr Ridel. Ce fut à Rome, en plein concile, le 5 juin 1870, jour de la Pen-
VII
des maristes.
En Nouvelle-Zélande, les missionnaires eurent aussi à lutter contre En Nouvelle»
Zélaudo.
les protestants. Non contents d'évangéliser les indigènes dans les vil-
lages, et d'organiser de grands centres religieux dans les villes, ils
Les Maristes C'est a juste titre qu'on a pu appeler les maristes les missionnaires
sont
de rOcéanie. Aux îles des Wallis, de Foutouna et de Tonga, qui
lesprincipaux
missionnaires constituent le vicariat de TOcéanie centrale ; aux îles des Samoa, des
de rOcéanie. Fidji, de la Nouvelle-Zélande, de la Nouvelle-Calédonie, des Nou-
velles Hébrides, des Salomon, ils ont déployé un zèle apostolique con-
sacré par le sacrifice de la vie. Les Pères de Picpus ont, de leur côté,
évangélisé les îles Saudw^ich et les îles Marquises ; et les missionnaires
du Sacré-Cœur d'Issoudun, les Gilbert, les Ellice et la Nouvelle-
Guinée. En lisant les annales de leurs missions, on croit lire celles
Mgr Bataillon. des premiers temps du christianisme. Quand Mgr Bataillon, mariste,
Sa mort.
se sent près de mourir, il convoque les chrétiens dans son église, se
moi m' endormir à cette musique, elle m'est déjà une joie du
ciel '^. »
religieuse, la Société des Pères des Sacrés-Cœurs de Picpus ; et son ^ç.^ lépreux,
héroïque dévouement honore l'Eglise et l'humanité tout entière. La
lèpre ravageait les îles Sandwich. Tous les malheureux atteints du
iléau étaient relégués dans l'île de Molokaï. Abandonnes à eux-
mêmes, sans secours d'aucune sorte, ils se livraient, pour oublier
leur mal, à l'ivresse et aux plus épouvantables excès. Emu jusqu'au
fond de l'âme, le saint religieux demande à son évêque de le laisser
aller à Molokaï. Pendant treize ans, il est le compagnon des lépreux,
leur ami, leur médecin, aussi bien que leur pasteur et leur père.
Le i5 avril, rongea son tour par la maladie qui décime son trou-
peau, il expire en disant : « Oh commeI il est doux de mourir
enfant du Sacré-Cœur *
!... »
VIII
En même temps, la Providence ouvrait une ère nouvelle sur le Les miision»
graud continent noir. « Tandis que les puissances de l'Europe d.'ifriqu*,
mais la mort les empêcha l'un et l'autre de s'y étabhr. C'est alors,
en i85o, que la mission fut remise aux Pères de la Compagnie de
Jésus. On sait le grand bien qu'ils y ont fait. Sans eux, Madagascar
serait aujourd'hui protestant el anglais.
Le Brésil. Brésil, où l'empereur Dom Pedro avait beaucoup favorisé son déve-
loppement. C'est à la franc- maçonnerie qu'il faut faire remonter la
responsabilité de la loi expulsant les communautés religieuses et
col. 543-546.
OEUVRES ET MISSIONS CATHOLIQUES SOUS LE PONTIFICAT DE PIE IX 669
00
la coni'ré''ation naissantcdes missionnaires salésiens de don Bosco ', j. ly
QC 1
^
/v tu c
•
n '.i I
; 'j
Aux Etats-Unis, d'immenses efforts furent couronnés par les plus Les missions
brillants résultats. Tout d'abord, u la pénurie de prêtres et le manque ^^^
1
de ressources
r •
Il
matérielles lorcerent
IIplupart des
r If»y
eveques a la
y M- •
solliciter
,
Etats-Uoi».
col. Fo5o-io6i.
ŒUVRES ET AÎTSPTOXS CATTTOT.TQrES SOUS LE PO^TTFTCAT DE PTE TX RHl
Bourbon 657.
(île), Buoncornpagni, 489. Carteret 6o3. 606, 607.
Bourdier-Delpuits , 47, Burg, k5o. Cartilage, 828,
48. Buss, 343. Cas de coni'cirnce à propos
Bourbaki, 090. Butcux (R P.), 828. des libertés..., 288.
Bourdon. 072. B)ron, 112. Castelfidardo, 471-173.
Bourget Mgr). 829. Caslel-Gandolfo, 585.
,
Gastelli (R. P.), Dao. 349, 352, 357, 358, Coelius, 167.
Gasliglloni (Pie Mil), 396, 398, 399. Coercioii bill, 233.
63, 64, 119. 12p. Charles Félix, 36. Cœur (Mgr., 375.
Catena Salentina, i54. Gharleslown, 327. Coffîn Charles, 377, 378.
Catholique (/''), 91. Chartres, Sga. 623. Cognât, 486.
Gallaro, 611. Gharvaz iMgr\ 4oo. Colfavru, 5ao.
Caucliv (Auguste-Louis), GhasUn (R. P.), 33i, Colin (R P.), 65o
48. 654. Colin (Jean Claude), 44.
Cauniont (Arcisse de), Chasiel (R P. 390.
, Collège romain, 189.
63o. Chateaubriand, 29, 70, Colmar, 3^7.
Gauchy A^ugustin, i33. 83, 85, io3, 112, 119, Cologne, 65, i5i, 33o,
Gavaignac. 35o, 356. 346. 23i, 233, 337, 238,
Gavour, 348, 355, 402- Chaudordj, 585. 339, 417, 638.
407, 445, 446, 447. Ghelm, 48i. Comacchio, 344.
448, 449, 45o, 45i, Chemin de Bassano, 316. Comarque, 186, 187.
453, 456, 457, 458, Ghevigné, 468. Combes (abbé;, 569.
459, 463, 464, 469, Chicago, 338. Combes (colonel) 1 79-
,
(leissel, cardinal, 417. Gratry, 269, 390, 391, Hassoun (Mgr), 64a-643.
(ieiictles (abbé des), i23. 559, 56o, 569, 632. Haut-Rhin pro^ince ec-
(iènes, an, 2i3, 225. Grèce, ao, na, 3i4. clésiastique du), 149
Genève, 207, 428, 607, Grégoire XVI, m,
iSg- Havin. 453.
5 12, 6o3-6o8. 333, 337, 338, 340. Havre (duc d'), laS.
Genga DeUa),(LéoûXIl),
! Gregorio (cardinal di), Haynald(Mgrj, 546, 569.
64-66. 1 iQ. a64. Hccker (R. P.), 609.
Geuoude, 3o7-3o8. GreiUi (Mgr), 566. Hédé, II 3.
G70 INDEX DES NOMS PROPRES
Héfélé (Mgr), a42, a43, Illusion libérale [l), 498- Jérusalem, 3i3, Saa,
546, 547, 549, 559, 499. 638. 639.
565, 633. Imbert tMgr), 32i, 654. Jeune Allemagne, 2o5.
Hegel, 3o, 3i, 485, 487, Imola, 170, 336. Jeune Espagne, 2o5.
519. Indépendance belge (T), Jeune Europe, 160, 2o5.
Heidelberg, 4i7- 536. Jeune France, 2o5.
Heine Henri, i48, 483. Indes, 644, 646. Jeune Italie, i54, 160,
Henze, 3i3. Indo Chine, 319. ao5, 21i, 2ii
Herder, 485. Institutions liturgiques ,
Jeune Pologne, 2o5.
Hergenroetber, 23o, 534. 276, 278. Jeune Suisse, 20 5.
Herraann ^R. P.), 619, Inde, i56, 3i5, 3i6- Joacbine, 194, 195.
620. 319. Joseph II, empereur, 65,
Hermès (Georges), 3a, Ineffabilis, bulle, 443- Jouffroy, 53, 283.
234, ^35 236. 444. Journal des Débats^ 84,
Hermesdorff, 63 1. Institutions liturgiques , i34, 246, 295, 398,
Hesses les deux), i49. 63i. 371, 489.
Hesse-Gassel, i48. Intérêts catholiques au Jugan Jeanne, 3o3.
Hesse Darmstadt , 4ai- XIX& siècle, 385. Juggernauth, 3i5.
433, 424, 426, Inter multipliées, bulle, Juif-Errant, 295.
Hettinger, 633. 388.
Hejkamp, ^37. Irlande, 94-98, i43-i46,
Hien Fong, empereur d« 221-225, 466, 5i6,
Chine, 648. 634.
Hilgers, 577. Isabelle, reine d'Espa-
Hindoustan, 644. gne, 478.
Hirscber, a 43. Isar, 4i4. Kabylie, 658.
Hitze, 626. Islam, 3 II. Kant. 3o, 484-485, 486,
Hoffmann de Follersle- Ispahan, 64a. 487, 519.
ben, 34a. Issoudun, 656. Kanzler, 5i3, 58o,
Hobenlobe (Mgr de), 577. Italie, ao, 35, 54-56, Karlsruhe, 4a5.
Hobenlohe (prince de), io5 107, i52-i54,i6o- Keble, 59-60, 99, 100.
123, 528. i65, 178, aii-aao, i47, 225, 336.
HobenzoUern, a4o, 477, 334 - 365 , 394 - 407, Keller, évêque, 242.
5o5. 445 - 477, 5oa-5o5, Keller Emile, 474, 5oo.
Hollande, 20, 3i5, 437. 587. Kenrick (Mgr), 660.
Hongrie, ao, 4o8, 409, Italinskî, 73. Keogh John, 96.
4io. Introduction à la théologie Kersten (R. P.), 438.
Hopsten, 421, 42a. spéculative de Gunther, Kertanguy (M""* de), 369.
Hortcnse, reine, i53,i70. 90. Ketteler (Mgr), 4i3, 417,
Hue, 647. 421 423. 424, 559,
Hugo (Victor),
39, 53, 571, 635, 626.
324, 246,364. 365, Kiang-Nan, 648.
38o-38i, 389, 5ao. Kildard, i46.
Huist (Mgr d'), 497. Kim, 3ai.
Hurter, 2 44. Kingston, 329.
Hussein, dey d'Alger, Jacctrd (R. P ), 819. Kirchenlexikon^ a 43»
i3o. Jacobis (R. P. de), 3a5, Ki-Ying, 320.
Hyacinthe (R. P.), 517, 3a6. "
Kleutgen (R. P.), 63a.
6od. Janicot, 538, 559, 56o. Ko, 3aa.
Janicule, 36a. Kœnisberg, 486.
Janriszewsk.! (Mgr), 601. Kolping. 6a6.
Jansion (Dom), 63i. Kreuz-Zeitung, 596.
Janus, 534. Krupp, 5io.
Japon, 3ai-3aa, 649- Kulturcampf, a4a, 4ao.
654. Kurdistan; 64 1.
Jean VI, roi de Portu-
laroslav, 483. gal. 194, 195.
Icard, 539, 559, 563, Jean XXII, pape, 194.
568, 569. Jean Laurent, 339.
.
Louis XVllI, 37, 44, 5i, Mans (le), 276, 590. Mazloum (Mgr), 3ia.
67, 70» 7*. 7^-76, io3. ManteulTel, 4ao. Mazzini, 55, i54 160,
Louis (baron), 38, Mantoue, 357. 457. 193, 211, 212-213,
Louis Philippe, i32, 187, Manzoni, 55 56, 4o6. 343, 344. 349 352,
162, 173,' 174, 175, Marchand (R. P.), 319, 353, 358, 359, 36i,
176, a45, 267, 286, 320, 395, 398, 399, 4oo,
296, 344, 35i. March'S, i63, i64, 170, 4oi, 448, 449, 45o,
Louis de Bavière, roi, 91. 175, 186, 188, 446, 5o5, 507, 5i2, 58i,
Lourdes, 592,622-623. 468, 469. 470, 473. 588.
Luca (cardinal de), 54a, Maret (Mgr). 3o4, 875, Mecklembourg (grand-
552. 534 537, 538, 559, duc de), 590.
Lucerne, 65, 2o4, 206, 56o, 571. Meilleur, 329.
207, 208, 210, 426. Maria da Gloria, 194, Mélanges catholiques^ 253.
Lucques, 394. 195, 197. Melchers (Mgri, 601.
Liitzow, 118, i65, aôi. Marianistes, 43. Méliapour, i56, 644.
LjroD, 4o, 281, 297. Marie- Christine , reine Melkites, 3i3, 3i4.
d'Espagne, 197, 198. Mélodies grégorienties^QSi.
Marie-Madeleine de i 'In- Melun (Armand de , 626.
carnation, 217. Mémoire à consulter, 83-
M Marie-Thérèse,
trice, 4ii.
impéra- 85.
Mémoire pour le rétablis-
Mariiley (Mgr), 426, sement des Frères Prê-
Mabilleau (R. P.), 649. 429, 479, 6o4, 606. cheurs, 274
Macao, i56, 644. Marion de Brésillac Mémoires de Metternich,
Maccala, 644- (Mgr), 658. 162.
Mac-Garthy, 268. Marongini, 4o5. Mémorandum de i83i,
Macé Jean, 020, 594. Maronites 3i4, 640. 173-174. 175, 176,
Macédoine, 48o. Marquises (îles), 656. 177, 187, 23i, 348.
Macerata, 36, 186, 446. Marsala, 468. Mémorandum du 6 avril
Mac-Mahon, 457, 594. Marseille, 4o, an, a86, 1870, 56i,
Madagascar, 657. . 356. Mémorial catholique, 80,
Madiat, 64o. Martin (Mgr), 545, 553, 83,84,123,249,250,
Madras, 3-15, 3 18. 558. 276.
Madrid, 439, 6i3, 6i4, Martin Henri, 269. Menabrea, 397.
6i5. Martin de Dunin, 24o. Ménard Alphonse, 472
Maduré, 3i8. Martinez de la Rosa, 198. Menotti Giro, i54, i63.
Magenta, 457. Martinique, 327. Mentana, 5i4.
Maguan, maréchal, 478. Marx Karl, 507, 620. Mermillod (Mgr), 5i6,
Mahmoud pacha, 643, Massabielle, 622. 545, 578, 6o4, 607.
Mahmoud, sultan, i55. Massaia (Mgr). 326. Mérode (Mgr Xavier de],
Mai, cardinal, 191. Massaouah, 3a5, 326. 466, 467,
5o3.
Maine de Biran, 3o. Mastaï-Ferretti (Pie IX), Mésopotamie, 3i3, 64o,
Maison, général, 180. 335, 336-337 64i.
Maistre, i56. Mathieu (cardinal), 128, Metternich, 20, 21, 22,
Maistre (Joseph de), ai, 497, 546, 547, 550- 73, 88-89, 98, io3.
36, 62, 77. 551, 558, 569. 116, 121, 182, i38,
Malines, '08, 489-491, Mathieu-Galvat Mélanie, i43, 149, i54, 161,
5i2, 548, 584- 622. i65, 168, 173, 175,
Malou (Mgr), 633. Matignon (R. P.), 553. 176, 180, 181, 182,
Mamiani, 177, 349, 35o, Maubant (R. P.), 3ai, 216, 24o, 261, 271,
353, 354. 654. 342, 344, 348, 398,
Mancini, 588. Maux [leSi de l'Eglise et 4o8, 427, 447.
Mandchourie, 65o. de la Société^ 260. Metz, 590.
Manuing, cardinal, 43 1, Max de Bavière, 4i4- Mexique, 659.
433-435. 526, 532, Mayence, i5o, 243, 4i3, Meyer, 206, 209, 210.
536, 54o, 545, 547, 421, 422, 625. Mezzûfanti, 191.
554, 56i, 562, 563, Mazenod (Mgr de), 44, Michaud, i3i.
566, 570, 579, 6a4- 3o8. Michel de Serbie (prin-
6a5. Mazio^ 108. ce). 55o.
1>DEX DliS NOMS PROPRES 673
Miclielel, 393, 294, 295, Monlesquiou abbé de^, Naples, 44, 74, ïo5, i53,
3«9. 38. i6o, 397, 469, 470,
^ ^
Ponciations d'Ems, a/ia, Quinet, 293, 294, 295, Revel (M. de\ 4o5.
Pondichéry, 11 3, .^16, 298, 389, 485 520. Reversurus, bulle, 643,
317 3i8, 645. Quirinal, 343, 346, 353, 643.
Ponte-Gorvo, 16/». 588. Revue de Dublin, 228,
Pontmain, 690, ^ujl Quod a nobis, 276. 229.
Popof (Mgr), 48o. Quotidienne, 8(> ~ ?o, 335. Revue des Deux-Mondes^
Portici, 399, Aoo. 295,371, 378, 489.
Porto (i'Anzio, 68. Rfvue Suisse, 295.
Portugal, 194-197, 3i8- Ricaroli, 469.
319. 479. 578. Riccadonna, 3i2, 3i3.
Port-Vcndres, 344- Ricciardi, 52o.
Posen, 2I10, 24 1. Ridel (Mgr), 654-655.
Pothier (Dom), 63 1. Raban Ormez, 6^.. Rieti, III, 30o, 446.
Poujoulat François, 383, Radetzky, 178, 347, ^^9» Riccio (Mgr), 573.
462. 396. Rinnovamentu d Italia, 4o6
Pradt (abbé de), 38. Raillon (Mgr), 87. Rio, 93.
Prœlectiones theologicœ, de Ramorino, 21 3. Rio-de-Janeiro, 658, 659.
Carrière, 3o5. Ramière (R. P.), 621. Riom, 42.
Prague, 5o5. Ranc, 519. Riou-Kiou, 321, 649,
Presse [la], 388, 453. Ranke, a35. 65o.
Pressensé (Edmond de), Raspail, 373, 374. Rivarola, 106.
524. Ratisbonne Alphonse (R. Rivet (Mgr), 566, 571.
Primato d'italia, 335. P.), 3o4, 638-639. Robert Macaire, 247.
Progrès de la Révolution, Ratisbonne Théodore (R, Robert Peel, 97.
126, 25o. P ), 638-639. Rœss iMgr), 545. ,
Soubirous Bernadette ,
3oo. Chine, 647.
622. Talleyrand (baron Char- Turin, 312, 316, 317,
Soumet, 53. les), 464. 399, 4oo, 4oi, 4o3,
Spalding (Mgr), 545 660. , Tambuchetti, 647. 4o5, 408.
Spaur (comtesse de), 353. Tara, 2 34. Turquie, 30, i54-i55,
Spencer Ignace, 328. Tar tarie, 647. 3io, 3ii, 637-638.
Spiogel arch. de Colo- Tchcou-tien tsio, 648. Tyr, 65.
gne, i5r, 333, 233. Temps [le], i33, i65,
Spolèle, 211, 336, 35^, 346, 489, 607.
3Go, 4^»5, 446. Terracine, iQO, 36o.
Staël (Mniti de), 34. Teysseyrre, 73, 368. u
Stalinsky, ii3. Théologie morale de Gous-
Staonéli, i3o, 335. set, 3o4.
Stas, 438. Thibet, 647- Union [V], 538, 5^.
Stein (baron de), 33. Thiers Adolphe, 89, i33, Unità cattolira, 5o'i, 538.
Stendhal, 169, 364, 378, 38o, 38i, Univers^ 239, 382, 389,
Sterbini, 353. 383, 463, 463, 585. 391, 292, 3oo, 334,
Slimmcn an Maria Laach^ Thomas Emile, 372, 374. 368, 370, 38o, 383,
5i6. Thouvenel, 473, 474.470. 383, 385, 387, 389,
Stolz, 243, f\25. Thrace, 48o. 447, 454, 455, 463,
Strasbourg, 596. Thureau-Dangin Paul 466, 490, 5i5, 5i^,
Strauss, 208. 559. 537, 536, 538, 539,
Stremayr, 609. Tiberi, io4. 545, 559, 56o, 567,
Strossmayer (Mgr), 54 1, Tickell, 432. 587.
546, 547, 549-550, Tien Tsin. 648, 6^9. Univers et le Monde (T),
552, 554, 556, 5-58, Timrs, ^33, 435. 563.
565. 5G7. Tisserand, 326. Université grégorienne,
Stuart John, 525. Tivoli, 189. 191.
Suc Eugène, 295. Tokio, 65o, 653, Unterwald , 207, 210,
Suisse, 34-35, i54, 2o4- Tondini, 549- 436.
210, 426-431, 479, Tonga, 656. Urbino, 446.
6o3 608. Toukin, 1 13, i56, Urakami, 65i, 653, 653,
Su-tchuen, 649. Torlonia, T90. 654.
Swetchine (M™*), 278. Toronto, 329. Uri, 307, 436.
Sybel (Henri de), 4 '4. Toscane, 160, 170, 3ii, Urc[uhart, 534.
Sydney, 655. 39 ^i. Utrccht, lO", 437.
SyUah'.is, 19^, 34 1, /191, Toulon, 3'i4.
493. 496, 5oo, 501, Toulouse, 37, 26 1, 63o.
5i6, 520, 524, 541. Tournai. 108.
678 INDEX DES NOMS PROPRES
Vézela}, 63o.
Viale-Prelà , nonce à
W
Vienne, 4 17.
Vacquerie, 09^. Viannejr (le Bienheureux Walcwski, 446,
\'aillant, maréchal, 36i. J.-B.), 391-393. Wallis (îlesi, 33i, 655,
Valais (le), 210, ^26. Viard (Mgr), 657. 656.
"Valcntini (villa), 862. Vicari (Hermann de), Ward William-George»,
Valerga (Mgr), 622, 687, 423, 424. 229, 280.
638, 643. Victor -Emmanuel II ,
Weeldy Register, 538.
Valroger (R. P. de), 891. 395-398, 499, 4o3, Wellington, 97, 657.
\argas, io5. 4o4, 4o6, 447, 449. Welte, 243.
Varin de Solmon .Joseph), 457, 459, 463, 468, Westminster, 482, 433,
/.6, 47. 477, 5o3, 5o4, 5i4, 435, 466.
Varlet, 46. 573, 574, 5^5, 58i, Westphalie, i5i, 288,
Varsovie, m, i43, 48i> 583, 585, 587, 588, 289, 241, 417.
482. 611. Wettzer, 248.
Vatican, 191, 675, 58o, Victoria, reine d'Angle- Wicart (Mgr), 56 1, 590.
585. terre, i44. Wilberforce, 100.
Valimesnil, 291, 292, Vie de Jésus, 484, 487- Wimpffen, 611.
367, 38i. Windthorst, 597-598,
VauJ (canton de), 210, Vie de saint Julien, 275. 599, 601, 602,
428. Vienne (Autriche), 90, Wirchow, 519, 598.
Vaughan (Mgr), 617. 173, 409, 584, 609. Wiseman, cardinal, 67,
Vecchiotti (Mgr), 553, Vienne (traités de), 20- 92, 190, 194, 308,
56i, 568, 569. 22. 63. 63, 73, 89, 228, 229, 43i, 432,
Veit, 244. 161, 163, 211, 337, 483, 435; 465.
Velletri, 36o, 446. 344, 396, 4i3, 477. Wissembourg, 590.
Vénétie, 161, 453, 458, Vieusse, 261. Withfield (Mgr), 157.
5o5, 5o6. Vigny (Alfred de), .29, 53, Worms, 528.
Venezuela, 659 124, 126. VS'^rintz, 46.
Venise, 166, 167, 217, Villafranca, 458, 459. Wurtemberg, i49, 434,
457. Villefranche d'Aveyron, 426
Ventura (Si. P.), 385, 43. V/urzbourg, 280.
4o6. Villèle, 71, 128.
Vérone, io3, 11 5, 217, Villemain, 287, 288, 291,
347, 457. a93, 387, 462.
Vérot iMgr), 558. Vilna, 483.
Ver rongeur (ie), 386- Vincennes (Etats-Unis),
387. 328.
Vet, 107. Vinet Alexandre, 43o-
Veuillot Elise, 466. 43i. Yedo, 322, 65o.
Veuillot Eugène, 270, Visconti-Venosta, 5oa,
390, 462, 498, 562. 574, 58o, 587.
Veuillot Louis, 270, 289- Viterbe, 63. 446.
Z
290, 391, 393, 3oo, Vitet, 391,
324, 337, 339, 343, Vitrolles (baron de), 205,
368, 370, 371, 377, Vitte (Mgr), 656.
379, 38o, 382, 383, Viviers, 3o6.
385, 387, 389, 390. Vogelsang, 4 18, 626, Zamoyski, 202.
44o, 453, 454, 455, Vogt, 519. Zanzibar, 658.
462, 466, 488, 498- Vogué (marquis Léonce Zara, 611.
499, 5o4, 5i6, 527, de), 123. Zen-Yémon, 652, 654.
53i, 536, 538, 539, Voix de la Vérité, 807. Zi-Ka-Wei, 648.
543, 545, 56o, 56i, Volkszeitung de Cologne, Zumalacarreguy, 199.
563, 567, 587, 589, 538. Zurich, ao4, 206, 439,
593. 458.
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
CHAPITRE PREMIER
(1828).
riennes p. 5o à 53
X. Le mouvement religieux ei> Italie. — Réveil du patriotisme italien. — Le
Risorgimento. — Au point de vue religieux, les patriotes italiens se divisent. —
!.e parti révolutionnaire de la « Jeune Italie. » — Le parti catholique des « néo-
gaelfes ». — Manzoni (1785-1878). — Silvio Pellico (1789-185/1). p. 54 à 55
TAKLE DES MATIKBES 68l
CHAPITRE II
LÉo:» XII
(1823-1829).
cien secrétaire d'Etat de Pie A II communique au pape ses vues sur le gouverne-
ment de l'Eglise — Léon XII fait de ces vues son programme. — Mort de Gon-
salvi (182^^ — Modification des partis. Le parti des Zelanti se recrute surtout
bilfl. ... p. 72 à 70
682 TABLE DES MATIERES
sier cherche à montrer les jésuites comme des ennemis des rois et de la société.
CHAPITRE ni
PIE VIll
VI. Rôle des sociétés secrètes dans la Révolution de Juillet. — Attitude méfiante
d nouveau gouvcTnement à l'égard de l'Eglise catholique. — Attitude ferme
et digne de l'épiscopat. — Le mouvement irréligieux parmi la jeunesse de la
de départ dune vive controverse entre les catholiques. — Premiers débats swr
la question du catholicisme libéral. — Le Correspondant et l'Ami de la relifjion.
— Sens et portée de ces premiers débats p. 1 33 à 1 38
VII. Relation de la révolution fran(,aise de Juillet avec les autres révolutions
européennes de i83o. — Vue générale sur ces révolutions. La révolution de -
Litterisde Pie VIII, donnant une solution à controverse (27 mars i83o\ — la
Rôle des sociétés secrètes dans les agitations politiques et religieuses de l'Alle-
magne p. i/j8 à i5a
XI. Les mouvements révolutionnaires en Italie. — Ils sont presque tous provoqués
par les sociétés secrètes. Les carbonari à Rome. — Rôle de la famille Bona-
parte et du duc de Modène dans les événements de cette époque en Italie. —
L'action de Mazzini dans l'Italie méridionale. — Les révolutions cantonales de
la Suisse. — L'ullranchissemcnt des catholitjues arméniens. — Intervention de
Pie VIII [»ar sa bulle Quod jamdiu (G juillet i83o) p loa à i55
686 TABLE DES MATIEHES
CHAPITRE IV
tiative, ri fait appel aux Autrichiens. — Grâce à eux, l'autorité pontificale est
rétablie dans toutes les provinces (fin janvier iSSa). — Irritation du gouverne-
mefll français. — Le cabinet de Paris se décide à intervenir en Italie. — Expé-
dition d'Ancône (février 1882). — Le commandant de l'expédition viole le droit
public international par la brutalité de ses procédés, — Emotion des chancelleries
euroj)éennes. — Protestation du pape. — Le gouvernement français donne des
explications et fait des excuses. — Le pape reconnaît l'occupation d'Ancône
comme un « fait temporaire ». — Le cardinal Bernelli, au fond, n'est point
fâché d'une intervention qui a contrebalancé en Italie 1 influence de l'Au-
triche p. 175 à 181
VII. Grégoire XVI, administrateur des Etats p»Btificaux. — Jugement sévère porté
sur Grégoire XVI administrateur par le prince de Melternich. — Injustice de
ce jugement. — Réformes administratives de Grégoire XVI. — Admini&tratiou
des provinces. — Le prolégal (préfet). - La eongiégalion governative. — Le
district. — Le gouverneur (sous-préfet). — Le conseil provincial. — Ses attribu-
tions. — L'administration des communes. — Le conseil municipal. — Le gon-
falonier (maire). — Réformes — Abolition
judiciaires. des tribunaux d'excep-
tion, — L'Uditore Sanllssimo. — Degrés de juridiction. — Le tribunal du
gouverneur (justice de paix) — Les tribunaux de chefs-lieux des délégations. —
Les tribunaux d'appel. — L'organisation judiciaire à Rome. — Le tribunal du
Capitolo. — Le tribunal de VAuditor camerac. — Le tribunal de la Rote. — Le
tribunal de la Signature. — Réforme de la procédure civile. — Réforme de la
CHAPITRE V
(i83i-i846.)
règne de Marie II, fille de dom Pedro. — Grégoire négocie avec elle un concor-
dat. — Il lui envoie la « rose d'or )> (12 mars 1842]. ... p. 198 à 197
II. Vffaires d'Espagne. - Conflit dynastique entre Marie -Christine et don Carlos.
— Les absolutistes soutiennent don Carlos ; les libéraux, Marie-Christine. —
Les grandes puissances se divisent à l'occasion de ce conflit. — Gouvernement
de Marie- Christine. ~ Persécution religieuse. — Protestations du pape. — Il
CHAPITRE VI
tance de l'agitation. — L'évéque de Langres, Mgr Parisis, donne une méthode lui
Villemain (i844). — Ce projet ne fait que resserrer les liens de l'union entre leg
catholiques. — Fondation du Comité pour la défense de la liberté religieuse (iS\5).
— Le « parti catholique ». — Sens de ce mot en i845. — « La liberté comme
en Belgique » p. 287 à 292
XVII. Diversion tentée par les ennemis de l'Eglise catholique. — La question 'les
disparaît, sans que les jésuites disparaissent eux-mêmes ... 298 à 297 p.
CHAPITRE VII
Vue générale p. 3 10
diocèse d'Alger. —
Fondations diverses réalisées par le zèle de Mgr Dupuch. —
La Trappe de Staouéli (i845). —
Les missions d'Abyssinie. Mgr de Jacobis. —
— L'évangélisation du centre de l'Afrique. —
Le Vénérable P. Libermann et
la Congrégation du Saint-Esprit p322à32 7
V. Les missions de l'Amérique du Nord. —
Persécutions soulevées contre les catho-
liques. — Organisation de l'Eglise des Etats-Unis — par réunion de con- : 1** la
Enfance (1843). —
Dernières années de Grégoire XVI. — Son testament. — Sa
mort (lei' juin i846). —
Appréciation de son pontificat ... p. 327 à 333
CHAPITRE VII
(1846-1849).
de les réaliser dans une large mesure. — Le décret d'amnistie 1^17 juillet i846).
— Joie universelle avec laquelle il est accueilli. — Autre» mesures libérales prises
par Pie IX. — Il choisit le cardinal Gizzi pour secrétaire d'Etat {i^^ août itSliG}.
CHAPITRE IX
(i846-i854).
ment (1847). — Il refait l'union entre les catholiques, mais ne provoque pas une
campagne très active p. 367 à 368
II. La Révolution de i848 : ses causes lointaines et prochaines. Accueil fait par
les catholiques à la nouvelle République. — L'Ami de la religion. — Le Corres-
pondant. — L'Univers. — Attitude respectueuse du peuple à l'égard de la reli-
CHAPITRE X
(i846-i855).
épîscopat —
Pour répondre à la coalition des Etats de la province rhénane, ii
propose une fédéralion des évcqties de cette province. p. 4ai à 4a3 . . .
CHAPITRE XI
tien du parti mazzinien avec Cavour l'incline vers l'hostilité envers a», daini»
Siège. —
Cavour s'abouche avec Garibaldi (1857). Portrait dv "î?? — 'haldâ
(1807-1882). —
Difficultés que rencontre Cavour dans son entreprise. — Ce»
difficultés lui viennent : 10 du côté de la France, dont la politique conservatrice
est favorable au pouvoir temporel du pape ;
— -, 20 du côté de Mazzini, mécontent
d'avoir été écarté de toute combinaison politique ; — 3» de l'ensemble des
catholiques, que les plaintes de Pie IX ont émus. — Le ministre de Victor-
Emmanuel cherche à parer à ces difficultés p. 448 à 45i
IV. L'attentat d'Orsini (i4 janvier i858j. — Courte biographie d'Orsini. — Le»
dernières « déclarations d'Orsini ». — Ce mystérieux attentat devient le point de
départ d'un changement de politique intérieure et extérieure pour Napoléon III,
cal. — L'enirevue de Chambéry ^28 août 1860). — Prétexte invoqué par Cavour
pour envahir le domaine du Saint-Siège. — Anxiétés de Lamoricière. — Anto-
nelli le renseigne inexactement sur les dispositions du gouvernement français.
702 TABLE DES MATIERES
« Lave tes mains, ô Pilate ! » (aa février i86i). — Discours d'Emile Keller, à
la Chambre, sur la question romaine (i3 mars 186 1). — Napoléon essaie de
négocier un accord entre Rome et le Piémont sur les bases du statu quo. —
Echec de ces négociations. — Convention du i5 septembre i864 entre la France
et l'Italie p. 469 à 475
VIII. Portée de la Convention du i5 septembre. Altitude de l'Autriche. — —
L'empereur François-Joseph se prononce pour la non-intervention dans la ques-
tion romaine. — Inaction des puissances signataires des traités de i8i5. —
Vexations diverses dont l'Eglise est l'objet de la part des différents Etats de l'Eu-
rope. — Le gouvernement italien s'ingère abusivement dans l'organisation de la
rance et d'appréhension. —
Mouvement de conTersions en Bulgarie en 1860. —
Ralentissement de ce mouvement en 1861. —
Le gouvernement russe persécute
les non orthodoxes. —
Plaintes de Pie IX. —
Persécution des catholiques polo-
nais. — Soulèvement de la Pologne. —
Le mouvement insurrectionnel éclate
en janvier i863. — Caractère de cette insurrection. — En quoi elle diffère Je
celle de i83i. — Bismarck aide le gouTernement russe à écraser la Pologne. —
Le général Mouraviev « bourreau de Vilna ». — Protestation énergique de
Pie IX (a4 avril i864) p. 475 à 484
IX. Le mouvement intellectuel antichrétien. — Ses origines en Allemagne. —
Un avertissement d'Henri Heine en i835. — Les idées religieuses de Kant, de
Hegel et de leurs disciples. — Première» vulgarisations des idées allemandes par
Victor Cousin et Edgar Quinet. — Ernest Renan (1828-1892). — Son esprit se
pervertit sous l'influence de la philosophie allemande. —
Renan commence par
attaquer violemment l'Eglise et ses dogmes. — Ses premiers blasphèmes. — En
i863, il modifie sa manière sans modifier le radicalisme de son incrédulité. —
La Vie de Jésus. — Les deux principes pseudo-philosophiques sur lesquels repose
l'exégèse d'Ernest Renan. — Inconsistance de ses doctrines et de ses méthodes.
— Scandale produit par l'apparition de la Vie de Jésus (i863). — Vive protesta-
tion de Mgr Pie. — Le premier Congrès de Malines (18-3 a août i863). —
Les deux discours de Montalemberl. — En quoi ces discours deviennent aussitôt
suspects de libéralisme. — Discours du P. Félix. — Pie IX fait témoigner son
mécontentement à Montalemberl. — Publication de l'encyclique Quanta cura el
du Syllabus (8 décembre i864) P» 484 à 49'
—
CHAPITRE XII
de diplomatie pour
la résoudre. — Pie IX semble renoncer désormais à
la te us
pourparlers avec les princes au sujet de son autorité temporelle et n'attendre
plus que de Dieu la défense de ses droits. — Pie IX est assailli par de tristes
Rome (11 décembre 1866). — Mais organise Légion d Antibes qui elle la « »,
estmise au du pape. — Le gouvernement espagnol approuve
service Conven- la
CHAPITRE Xm
LB COMCILE DU VATICAN
(1869.1870).
de cet article. —
Cinquième incident la publication des Observations de :
Porta Pia (30 septembre 1870). — Le Patrimoine de saint Pierre déclaré est
tentative. — Les Etats manifestent leur hostilité à l'égard des décisions promul-
guées au concile. — Aucune de ces tentatfves d'hostilité n'a de prise sur la
CHAPITRE XIV
la franc- maçonnerie. — Analyse des Lois de mai. — Elles constituent une viola-
tion flagrante de la Constitution. — Déclarations de Windthorst La résistance
passive. — Courageuse attitude des catholiques. — Persécution violente. —
Puissance dn Centre. — Progrès de la foi en Allemagne. — Recul de Bismarck
(1879) p. 696 à 602
IV. L'Eglise catholique en Suisse. —
Le Kulturkampf international. Que —
faut-il entendre par le libéralisme de la Suisse i* —
Le président Carteret. —
L'influence de la franc-maçonnerie et de l'Allemagne. — Premières lois contre
les congrégations religieuses (1872). — Mgr Mermillod. — Il est nommé
auxiliaire de Mgr Marilley (26 septembre i864). — Vive émotion des protestants
de Genève. — Œuvres de zèle de Mgr Mermillod. — Il flétrit l'entrée à Rome
des armées piémontaises. — Il se propose de travailler au relèvement de l'ancien
diocèse de Genève (i864). — Irritation des autorités protestantes de la Suisse.
— Premier conflit entre le gouvernement et Mgr Mermillod (juin 1872). —
Destitution de Mgr Mermi41od, par le Conseil d'Etat (septembre 1872). —
Mgr Mermillod, vicaire apostolique de Genève (16 janvier 187.3). — Exil du
prélat (11 février 1873). — Installé sur les frontières de la Suisse, il continue son
apostolat. — La Loi de mai 1878).
réorganisation de l'Eglise catholique (3o —
Organisation d'une « Eglise catholique nationale ». L'ex-Père Hyacinthe à —
Genève (1878-1874). —
Prise de possession par le gouvernement de toutes les
églises et chapelles catholiques. —
Constance admirable des catholiques. —
Décadence de l'Eglise schismatique p, 6o3 à 608
V. L'Eglise catholique en Autriche. — La politique religieuse du chancelier de
Beust. — Dénonciation, par l'empereur François-Joseph, du concordat autri-
chien (3o juillet 1870). — Il repousse une supplique de l'épiscopat au.Crichien,
lui demandant son intervention en faveur du Saint-Siège. Le gou^rnemont —
autrichien favorise le culte des « Vieux catholiques » (1871). Il tente de —
supprimer deux évêchés en Dalmatie (1871-Ï872). La cour de Vienne se —
rapproche de la cour du Quirinal (1872). — Les lois scolaires. — Protestations
de l'épiscopat. — L'éducation de la jeunesse est mise aux mains de l'Etat
(avril 1869). — Emprisonnement de l'évêque de Linz (juin 1869). — Sécula-
risation des Universités (27 juillet 1873). — Les « Lois confessionnelles » do
1874. — Eloquentes protestations de Pie IX 609 à 6x3 p.
CHAPITRE XV
Vue générale sur les œuvres de piété, de charité et de zèle sous le pontificat dô
Pie IX p. 619
I. Œuvres — La dévotion au Saint Sacrement. — Le P. Ilermann Cohen.
de piété.
— Le P. Eymard. — Mgr de Ségur Mgr de Bouillerie. — Théodelinde
et la
II. Les œuvres de charité. — Comment elles se relient aux œuvres de pieté. —
Les œuvres de charité en Italie. — Antonio Rosmini (1797-1855^ — Les œuvres
de charité en Angleterre. — Le cardinal Manning (1808-1892). — Les œuvres
de charité en Allemagne. — Mgr Ketteler (1811-18771. — Les continuateurs
de Ketteler en Allemagne. — Les œuvres de charité eu Autriche en Belgique et