Le Monopole.2022

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LE MONOPOLE

La concurrence pure et parfaite est un concept microéconomique qui décrit une structure
de marché entièrement contrôlée par les forces du marché. Alors qu’au niveau de la
concurrence imparfaite qui englobe ; le monopole, la concurrence monopoliste et l’oligopole ;
les conditions de la concurrence pure et parfaite ne sont plus réalisables, et plus
particulièrement les conditions du grand nombre des intervenants et leur atomicité.

§1. Qu'est-ce qu’un monopole?

1. Définition

Le monopole est une situation de marché dominée par un seul producteur qui fait face
à une multitude d'acheteurs. Le bien produit ne doit pas comporter de substituts proches.
Une entreprise est en situation de monopole si l'élasticité croisée entre la demande du bien
qu'elle produit et le prix de tous les autres produits est faible.

Le monopole peut fixer soit le prix de son offre, soit la quantité offerte mais pas les
deux à la fois; parce qu’il ne peut pas contrôler la demande. S’il décide de déterminer le prix
de son offre, la courbe de demande déterminera la quantité vendue à ce prix. S’il est
déterminé à vendre une quantité donnée, la courbe de demande déterminera le prix auquel
cette quantité peut être écoulée. De ce fait, la courbe de demande d’un bien est aussi la
courbe de demande du marché

Le pouvoir du monopole peut être défini par la capacité de réaliser des surprofits à long
terme sans attraction de la concurrence. Si l’entrée de nouvelles firmes est restrictive, le
pouvoir du monopole augmente. Le pouvoir du monopole pour influencer les prix dépend de
deux facteurs : la disponibilité de substituts proches et le pouvoir de limiter l’entrée de
nouvelles firmes par des barrières à l'entrée.

2. Les types de monopole

D’une manière générale, le monopole peut apparaître sous différentes formes.

a. Il peut s’agir d’un monopole technologique qui commercialise un nouveau produit


jusqu’alors inexistant ou maîtrise un procédé de production innovant qui lui confère
une position temporaire de monopole. Cette situation est protégée par un brevet.

b. Il peut également s’agir d’un monopole légal protégé par le législateur qui instaure
des barrières réglementaires à l’entrée. L’Etat peut lui même gérer des monopoles en
cherchant à assurer le bien-être de la société dans son ensemble.

c. Il peut s’agir enfin d’un monopole naturel lorsque le coût unitaire de production
diminue avec le volume de production. C’est le cas des activités de réseau comme la
gestion d’infrastructures ferroviaires, électriques…

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- Le monopole produit toujours à un coût inférieur à l'entreprise concurrentielle. Il peut
donc fixer un prix plus faible qui empêche d'autres entreprises d'entrer sur le marché. La
production et la distribution de gaz, d'électricité, l'eau potable ou le secteur des
communications téléphoniques entrent dans cette catégorie.

- Les pouvoirs publics peuvent aussi être à l'origine de monopoles. Par exemple, pour
protéger la recherche, la législation sur les brevets permet à une entreprise qui invente un
nouveau procédé de fabrication ou un nouveau médicament d'être la seule à pouvoir exploiter
cette découverte pendant un certain nombre d'années. Par ailleurs, dans certains secteurs
d'activité, les pouvoirs publics, pour limiter les excès possibles d'un monopole privé,
notamment des prix trop élevés, peuvent transférer l'activité du monopole au secteur public.
La distribution du courrier au niveau national par La Poste obéit à ce motif.

- Un monopole peut mettre en œuvre des stratégies de marché pour empêcher l'arrivée
de nouvelles entreprises. Si le monopole se sent menacé par l'arrivée de nouveaux
concurrents, il peut vendre à un prix inférieur au coût moyen, quitte à faire momentanément
des pertes, ou fixer un prix inférieur à celui qui maximiserait son profit, ou encore disposer
de capacités de production excédentaires lui permettant d'accroître rapidement son volume de
production et de réduire le prix de vente.

- Le monopole exclu nécessairement la concurrence sur le marché mais celle-ci peut


provenir d’autres marchés, producteurs de biens de substitutions. Par exemple : chemins de
fer et transport routier, électricité et charbon ou pétrole, phosphates et autres engrais. Mais, la
concurrence entre les marchés est moins forte qu’au sein de chaque marché, et pour
simplifier, la théorie des prix considère le monopole comme un régime sans concurrence.

§2. L'équilibre du monopole

Le monopole est en situation d’équilibre s’il n’a plus intérêt à modifier le prix et la
quantité du bien offert. Cette position d’équilibre dépend donc du critère retenu ainsi que du
mode de gestion privilégié par le monopole.

1. La maximisation du profit par le monopole : Le monopole est seul sur le marché et


doit satisfaire la totalité de la demande. Comme la demande est une fonction décroissante du
prix, le monopole doit donc déterminer le niveau de production qui maximise son profit. Il
est price-maker, et ne peut cependant pas vendre à n'importe quel prix. S'il vend trop cher, il
risque de ne trouver aucun acheteur. Le monopole est contraint par la demande.

Le monopoleur fixe simultanément les prix et les quantités pour maximiser son profit
au point où sa recette marginale (Rm) égale son coût marginal (Cm). Mais la courbe de
recette marginale ne s’identifie plus à la droite horizontale des prix comme dans le cas de la
concurrence. C’est une courbe décroissante au-dessous de la courbe de demande (Recette
moyenne). Pourquoi ? Parce qu’en concurrence pure et parfaite, la recette marginale pour
une unité supplémentaire du bien était le prix du bien. Là elle est inférieure car en produisant
une unité de plus, le monopoleur fait baisser son prix.

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Prix, Recette, Coût

Cm CM

P B

CM A

D = RM = P

Rm

O Q Quantité

Graphique 1. La détermination de l'équilibre du monopole en courte période

Points à noter : 1. Le monopole maximise son profit en produisant la quantité optimale Q qui est
déterminée lorsque Cm = Rm ; 2. le prix (OP) auquel cette quantité peut être vendue est déterminé
par la courbe de demande ; 3. Si la quantité produite est égale à OQ, le coût moyen (CM) par unité est
QA ; 4. Puisque chaque unité est vendue pour QB (=OP), le surprofit par unité est AB ;
5. le profit total est égal (OP x OQ) – (OCM x OQ) = P x Q – CM x Q ; donc Π = RT - CT.

Une situation de monopole peut se justifier dans trois cas : la présence de


rendements croissants, l'innovation, des motifs d'ordre public.

La présence de rendements croissants ne permet pas à la petite entreprise d'être


rentable. Si les coûts fixes sont élevés, le niveau de production pour lequel le coût moyen
augmente est très élevé. Le coût marginal est alors inférieur au coût moyen. Si le prix de
vente est égal au coût marginal, l'entreprise fait une perte. Dans certains secteurs d'activité, le
coût moyen peut être toujours décroissant. C'est notamment le cas dans la production de
logiciels. Les coûts de recherche et de mise au point du logiciel sont très élevés mais le coût
marginal est quasi nul. Le monopole peut dégager un profit même si le coût marginal est
inférieur au coût moyen puisque le prix de vente est supérieur au coût marginal (à condition
que le coût moyen ne soit pas supérieur au prix auquel les consommateurs sont prêts à
acheter le bien).

L'innovation, la découverte de nouveaux procédés technologiques crée pour


l'entreprise qui en est l'auteur une situation provisoire de monopole, justifiée par la prise de
risque et les dépenses engagées. Cette situation de monopole va disparaître au fur et à mesure
que l'innovation ou la découverte seront imitées par d'autres entreprises.

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L'État peut créer des monopoles publics s'il estime que certains biens ou services
(Exemple l'eau potable, l'électricité, le gaz...) doivent être fournis à la collectivité à des prix
inférieurs à ceux pratiqués par un monopole privé. Dans ce cas, l'État dispose d'une marge de
manœuvre pour fixer le prix de vente et le monopole public ne maximise pas son profit.

2. La formalisation de la maximisation du profit par le monopole :


a. Le cas du monopole à un seul établissement

La tarification au coût marginal permet au monopoleur de vendre à un prix qui couvre juste
son coût marginal (P = Cm = Rm). Le profit du monopole est donc maximum si la recette
marginale est égale au coût marginal: Rm = Cm.

La demande adressée au monopole est telle que : P = f (QD) ave P: prix de vente et QD :
quantités demandées.
La fonction de coût total du monopole est telle que : CT = f(QO) avec QO : quantités
produites.
La recette totale : RT = P.QD = f(QD).QD. Recette marginale : Rm = ∂RT / ∂QD
Coût marginal : Cm = ∂f(Qo) / ∂Qo
L’égalité entre recette marginale et coût marginal permet de déterminer Q tel que QO = QD.
Le prix de vente se déduit de la fonction : P = f (Q).
Le profit est égale à la recette totale (RT) moins le coût total (CT = f(Q) :

Π = RT – CT = PQ - f (Q)

Les deux conditions donc de maximisation du profit sont les suivantes :

∂Π / ∂Q = 0 => ∂RT / ∂Q = ∂CT / ∂Q (1)


∂2Π / ∂Q2 ˂ 0 => ∂2RT / ∂Q2 ˂ ∂2CT / ∂Q2 (2)

Le profit sera donc maximum lorsque le supplément de recette dû à la vente d’une


unité supplémentaire est égal au supplément de coût occasionné par la production de cette
même unité supplémentaire.

Exemple 1

Soit un monopole dont la fonction de coût total est : C(Q) = - 2Qo + Qo2, avec QO :
volume de production. La demande adressée au monopole est telle que :
P = - QD + 18, avec P : prix de vente et QD : quantités demandées.

Déterminer les quantités produites par le monopole, le prix de vente et le profit.


RT = P.Q = (-QD + 18) QD = - Qd2 + 18Qd.
Rm = ∂RT(QD) /∂QD = -2Qd + 18.
Cm = ∂CT(QO) / ∂QO = -2 + 2Qo.
Rm = Cm => -2Qd + 18 = -2 + 2Qo, avec QD = QO. On trouve Q = 5.
Le prix de vente se déduit de la fonction : P = -QD + 18 => P = 13.
Le profit : Π = P x Q - f(Q) = PQ – f(5) =13 x 5 – (-2 x 5 + 52) = 50, Π = 50.
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Exemple 2

Soit la fonction de coût total d’un monopole : CT = 0,01.Q2 + 10.Q + 36000 (Q : est la
quantité produite).
La fonction de demande est exprimée par la relation : Q = - 5.P + 10500
Pour déterminer l’équilibre du monopole, on vérifie la relation (1), à savoir Cm = Rm. Par
ailleurs la fonction de demande est :
Q = - 5.P + 10500 => P = - 0,2.Q + 2100
=> RT = P.Q = - 0,2.Q2 + 2100.Q
=> Rm = - 0,4 .Q + 2100
Cm = Rm => - 0,4 .Q + 2100 = 0,02.Q + 10
On trouve donc le prix et la quantité d’équilibre : P = 1104 et Q = 4980.
Le profit est : Π = RT – CT = 4 840 116. Π = 4 840 116

b. Le cas du monopole à deux établissements

La fonction de profit du monopole produisant dans deux établissements est la suivante :

Π = RT(Q) – C1(Q1) – C2(Q2)

Avec : C1(Q1) le coût total pour produire la quantité Q 1 dans l’établissement 1.


C2(Q2) le coût total pour produire la quantité Q2 dans l’établissement 2.

Dans ce cas, la maximisation du profit exige la satisfaction des deux conditions suivantes :

Conditions de premier ordre : ∂Π / ∂Q1 = 0 => ∂RT / ∂Q = ∂C1 / ∂Q1 (3)

∂Π / ∂Q2 = 0 => ∂RT / ∂Q = ∂C2 / ∂Q2 (4)

Les relations (5) et (6) signifient qu’à l’équilibre optimal, le monopole doit répartir la
production entre les établissements 1 et 2 de telle sorte que :
Rm du monopole = Cm dans l’établissement 1 = Cm dans l’établissement 2

Enfin, les relations (5) et (6) nous permettent de dégager un système à deux équations et
deux inconnues Q1 et Q2. La résolution de ce système permet de trouver les valeurs d’équilibre.

Conditions de second ordre : ∂2Π / ∂Q21 ˂ 0 => ∂2RT / ∂Q2 ˂ ∂2C1 / ∂Q21 (5)

∂2Π / ∂Q22 ˂ 0 => ∂2RT / ∂Q2 ˂ ∂2C2 / ∂Q22 (6)

Les relations (7) et (8) signifient que les pentes des courbes des coûts marginaux dans
les deux établissements doivent être supérieures à la pente de la recette marginale du
monopole. On peut enfin généraliser ces résultats et dire que lorsque le monopole possède
plusieurs établissements, sa fonction de profit est :

Π(Q) = RT(Q) – ∑Ci(Qi) (i = 1,2,3,…,n), avec Q = ∑Qi

Les conditions de maximisations sont alors :


- les n conditions de premier ordre : ∂RT / ∂Q = ∂Ci / ∂Qi (7)
- les n conditions de second ordre : ∂2RT / ∂Q2 ˂ ∂2Ci / ∂Q2i (8)
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Exemple

Une entreprise détient le monopole de la production du bien Q dont la demande est


exprimée par la fonction : Q = -3/5.P + 36.
Le monopole utilise trois usines différentes pour produire le bien Q et les coûts totaux
varient dans chacune d’elles comme cela ressort dans le tableau suivant :

Tableau 1

Coût total
Q
CT1 CT2 CT3
1 10 23 15
2 26 53 38
3 48 91 68
4 78 133 102
5 118 178 138
6 170 233 176
7 236 301 216
8 314 376 260
9 404 464 308
10 504 554 360

On peut déterminer le coût total, le coût moyen et la recette marginale du monopole. Pour ce
faire, on a : Q = - 3/5.P + 36 => P = - 5/3.Q + 60 => RT = - 5/3.Q2 + 60.Q
=> Rm = -10/3.Q + 60

Tableau 2

Q Coût marginal Coût marginal Coût total Recette marginale


Cm1 Cm2 Cm3 du monopole du monopole du monopole
1 10 23 15 10 10 56,6
2 16 30 23 15 25 53,3
3 22 38 30 16 41 50
4 30 42 34 22 63 46,6
5 40 45 36 23 86 43,3
6 52 55 38 23 109 40
7 66 68 40 30 139 36,6
8 78 75 44 30 169 33,3
9 90 88 48 30 199 30
10 100 90 52 34 233 26,6

On remarque que l’égalité Rm = Cm nous donne la production du monopole, à savoir Q = 9.


Quant à l’égalité Rm = Cm1 = Cm2 = Cm3, elle nous donne la répartition de la production
entre les trois usines, à savoir : - Usine 1 : Q1 = 4
- Usine 2 : Q2 = 2
- Usine 3 : Q3 = 3

Le prix est : P = - 5/3 (Q1 + Q2 + Q3) + 60 => P = 45


Les profits sont : - Usine 1 : Π1 = 102
- Usine 2 : Π2 = 37 => Π = Π1 + Π2 + Π3, donc Π = 206
- Usine 3 : Π3 = 67

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3. Le degré de monopole

En situation d’équilibre du monopole : Cm < Prix, car Cm = Rm et Rm < Prix. La


différence entre le coût marginal (Cm) et le prix (P) est souvent utilisée pour mesurer le
degré de monopole (M) dont dispose l’entreprise sur un marché, selon la formule suivante :

M = (𝐏 – 𝐂𝐦) / 𝐏

Le degré de monopole (M) mesure l’intensité du pouvoir de monopole de l’entreprise.


Deux situations extrêmes peuvent théoriquement exister :

- M = 1 :  Cm = 0 : Monopole le plus absolu ;


- M = 0 :  Cm = P : Concurrence pure et parfaite.

Mais, en fait, ce sont les situations intermédiaires qui renseignent sur le degré de
monopole de l’entreprise : 0 < M < 1.

Plus ce degré de monopole est proche de l’unité, plus l’intensité du pouvoir de


monopole de l’entreprise est grande. Et plus il est proche de zéro, plus cette intensité est
faible ; on se rapproche, dans ce cas, de la situation de concurrence pure et parfaite.

Il faut noter que la valeur du degré de monopole (M) est en relation inverse avec
l’élasticité-prix de la demande au point d’équilibre. En effet :

- Lorsque l’élasticité-prix de la demande à l’entreprise est infinie, on est en situation de


CPP ; le degré de monopole est nul (M = 0) ;

- Si la demande est, au contraire, rigide au point d’équilibre, l’entreprise peut élargir la


différence entre son prix et son coût marginal, le degré de monopole (M) devient alors plus
grand (monopole plus intense).

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Récapitulation

En situation de monopole pur:

- Il y a un offreur face à un grand nombre de demandeurs sur le marché;


- Le prix (P) n’est pas imposé par le marché, c’est le monopole qui le détermine (price
maker);
- La demande à la firme et la demande du marché sont confondues;
- RM = Prix = Courbe de demande;
- RM différente de Rm;
- Rm < Prix;
- Le profit est maximum si: Rm = Cm;
𝐏 − 𝐂𝐦
- L’intensité du monopole est donnée par l’expression: M = 𝐏

- En mode de gestion à l’équilibre: P = CM = RM;


- En tarification au coût marginal: P = Cm = Rm.

Le monopole discriminant est une pratique qui consiste, pour le monopoleur, à vendre son
produit sur des marchés différents et à des prix différents: Discrimination par les prix.
- En cas de monopole discriminant, le profit du monopoleur est maximum quand la recette
marginale (Rm) sur chaque marché est égale au coût marginale (Cm): Rm = Cm.

En situation de monopsone:

- Il y a un demandeur face à un grand nombre d’offreurs sur le marché;


- Le profit du monopsone est maximum quand le bénéfice marginal qu’il retire de son achat
Rm est égal à sa dépense marginale Cm et à son coût moyen CM qui représente également
l’offre des fournisseurs.

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