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Etude expérimentale et théorique des mécanismes

d’adsorption/désorption de l’antimoine sur une surface


de silicium (111)
Hazar Guesmi

To cite this version:


Hazar Guesmi. Etude expérimentale et théorique des mécanismes d’adsorption/désorption de
l’antimoine sur une surface de silicium (111). Matière Condensée [cond-mat]. Université de droit,
d’économie et des sciences - Aix-Marseille III, 2005. Français. �tel-00010751�

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abroad, or from public or private research centers. publics ou privés.
UNIVERSITÉ PAUL CEZANNE AIX-MARSEILLE

TITRE
Étude Expérimentale et Théorique des mécanismes
d’adsorption/désorption de
l’Antimoine sur une surface de Silicium (111)

THÈSE DE DOCTORAT
en vue d’obtenir le grade de

DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ Paul CÉZANNE


Faculté des Sciences et Techniques

Discipline : Matériaux, microélectronique et nanosciences

Présentée et soutenue publiquement par

Hazar GUESMI
le 11 juillet 2005

Les Directeurs de thèse :


Pierre MÜLLER & Guy TRÉGLIA
Tuteur :
Laurent LAPENA
Ecole Doctorale :
Physique et Sciences de la Matière

JURY
Mme. Marie-José CASANOVE (présidente)
Mme. Sylvie ROUSSET (examinatrice)
M. Stéphane ANDRIEU (rapporteur)
M. Bernard LEGRAND (rapporteur)
M. Pierre MÜLLER
M. Guy TRÉGLIA
2
3

Avant-propos et remerciements

Le 11 juillet 2005, j’ai eu le plaisir de présenter mes travaux de thèse devant un


jury dont je tiens à remercier chaleureusement tous les membres. En particulier,
j’exprime toute ma gratitude à mes rapporteurs Stéphane Andrieu et Bernard
Legrand et à mes examinatrices Marie-José Casanove et Sylvie Rousset, pour
l’honneur qu’ils m’ont fait en acceptant de juger mon travail. Merci à tous ceux qui
étaient présents : mes familles Tunisienne et Bretonne, mes amis Marseillais et
Montpelliérains, mes collègues … Merci enfin, à tous ceux qui ont eu une pensée pour
moi ce jour là.
Ce fût un des plus beaux jours de ma vie … merci à tous, merci pour tout.

Le travail présenté dans ce manuscrit est le fruit d’une belle collaboration


entre deux groupes de chercheurs passionnés du Centre de Recherche en Matière
Condensée et Nanosciences (CRMCN-CNRS) : les groupes "Morphologie et Croissance"
et "Théorie et Simulation Numérique".
Qu’il s’agisse d’expérimentateurs fascinés par des atomes qui bougent sur un
écran et des cartes aux couleurs de l’arc en ciel qui parlent le langage des
interactions, ou de théoriciens impressionnés par le foisonnement de câbles qui
pendent devant des engins métalliques enrobés de papier aluminium, tous ont en
commun curiosité et respect du travail des autres.
Je suis très heureuse aujourd’hui, de témoigner de ma profonde estime à tous
les membres de ces deux équipes. Avec eux j’ai passé des années merveilleuses,
durant lesquelles j’ai beaucoup appris.
J’aimais beaucoup ces réunions du groupe des théoriciens, où l’on parlait de
tout : budget, projets, résultats ... tout le monde s’intéressant à l’avis de tout le
monde. Je les revois tous : Andrés stressé quand tout le monde parle en même temps,
Guy la main sur le visage calant ses lunettes avec son index, Christine et Javier
calmes et attentifs, Thomas qui n’arrête pas d’enrouler sa mèche de cheveux, Roland
qui parle fort et avec ses mains, Christophe qui prend des notes sur son cahier bien
soigné …
Pendant les poses du déjeuner je me réjouissais des discussions sur la
politique, la religion, la culture … tout était amusant, même les taquineries à Michel
qui mange lentement.
Avec mon groupe d’expérimentateurs, j’ai partagé les repas succulents
préparés par Gilbert : des gens qui apprécient "la bonne bouffe“ et le bon vin sont des
gens qui savent vivre … n’est ce pas monsieur Kern ?... Lui m’a toujours
impressionné, c’est un grand homme et j’ai eu beaucoup d’honneur à discuter avec
lui de mon travail.
Lors des réunions de travail, nous passions des heures et des heures à
discuter, mes directeurs de thèse, mon tuteur et moi. Ils ne se sont jamais lassés, ils
étaient toujours disponibles, attentifs et encourageant.
Je ne saurais jamais vous remercier…, Pierre et Guy mes chers directeurs et toi
Laurent mon tuteur adoré.
4

Rigueur et ingéniosité, sagesse et optimisme, doigté et humanisme, …, vous


étiez un trio d’harmonie et de complémentarité. Je vous dois beaucoup et je remercie
le ciel d’avoir eu une chance que peu de doctorants ont pu avoir.
Je n’oublierai jamais les heures de manips, tantôt passionnantes et tantôt
ardues. Merci à Jean-Jacques pour sa gentillesse et son enthousiasme matinal ("alors
Hazar, ça marche comme tu veux ?“), à Gilbert qui m’a généreusement prêté son bureau
pendant trois ans, à Alain pour sa disponibilité, son dynamisme et sa patience …
malgré les multiples dommages infligés au malheureux filament de la cellule
d’évaporation !
Je tiens à remercier vivement Javier et Andrés, les "ab initio-nistes" par
excellence dont l’aide m’a été indispensable, Christine qui a su m’écouter et
m’encourager, Roland pour ses conseils et sa bonne humeur, Christophe pour ses
critiques, malgré tout, constructives et enfin “grand Ali“ pour son éternel sourire.
Un grand merci à Bernard Legrand qui m’a fait le plaisir d’accepter de juger ce
travail et de participer au jury. L’intérêt scientifique qu’il a témoigné à nos résultats
m’est une belle reconnaissance dont je suis très fière.
Merci à Isabelle pour son soutien et sa tendre amitié.
Merci à Thomas, mon ami et mon complice du poisson d’avril “raté“, dont la
présence me rassurait lorsque le travail se prolongeait trop tard le soir.
Je ne saurais oublier les autres thésards, avec qui j’aimais bien discuter :
Pascal, Hélène, Stéphane, Morgane, Marion, Julie, Kim, Stéphanie, …. et Fabrice le
petit papa.
Merci à Roger Morin, à Bernard Aufray, Alain Baronnet et à Philippe Dumas
avec qui les discussions sont toujours enrichissantes. Merci à Zoubida pour son
sourire affectueux, à Alain “Didjo“ qui m’a confié une belle expérience
d’enseignements et à Brice enfin pour ces blagues “ à ….“
Il faut noter toutefois que si la vie est si agréable au CRMCN, c’est aussi dû en
grande partie à son personnel administratif et technique. Je les remercie tous pour
leur compétence et leur sympathie, avec une pensée particulière à Véro pour son
amitié, à Fred pour son talent à dépanner tous les problèmes informatiques, à Francis
pour sa disponibilité, à Michelle et Françoise enfin pour leur gentillesse.
Enfin, à mes parents pour les précieuses larmes de joie versées au moment où
je devenais (enfin) Docteur, à mes adorables frangines Haïfa et Lobna, à papa gâteau
Yves et “mamy blue“ Jojo,… à Véro qui a fait l’aller retour (Bretagne –Marseille) pour
me soutenir dans mes heures les plus difficiles … et à toi mon cher Eric …. le plus
tendre des “merci“.
5

Nous sommes ce que nous pensons.


Tout ce que nous sommes résulte de nos pensées.
Avec nos pensées, nous bâtissons notre monde.
(Bouddha)
6
Table des matières 7

TABLE DES MATIERES

TABLE DES MATIERES ____________________________________________________ 7

INTRODUCTION _________________________________________________________ 11

I-ADSORPTION/DESORPTION : Concepts généraux____________________________ 13

I-A. Croissance en phase vapeur ______________________________________________ 13

I-A.1. Considérations macroscopiques ________________________________________________ 13


I-A.2. Considérations microscopiques _________________________________________________ 16
I-A.3. Modes de croissance hétérogène _______________________________________________ 16

I-B. Caractéristiques générales du processus d’adsorption/désorption __________ 17

I-B.1. Description de l’adsorption/désorption ___________________________________________ 17


I-B.2. Cinétique de désorption _______________________________________________________ 17
I-B.3. Isothermes___________________________________________________________________ 19
I-B.4. Mécanismes élémentaires de l’adsorption/désorption ______________________________ 21

I-C. Caractéristiques générales de Sb et Si_____________________________________ 23

II-INSTRUMENTATION ET MESURES ______________________________________ 25

II-A. Dispositif expérimental __________________________________________________ 25

II-A.1. Bâti de thermodésorption______________________________________________________ 25


II-A.2. Techniques expérimentales____________________________________________________ 27

II-B. Préparation du substrat et de la source d’évaporation______________________ 30

II-B.1. Préparation de l’échantillon ____________________________________________________ 30


II-B.2. Préparation de la cellule d’évaporation __________________________________________ 31

II-C. Etalonnages ____________________________________________________________ 31

II-C.1. Etalonnage des températures __________________________________________________ 31


II-C.2. Etalonnage du flux ___________________________________________________________ 32
II-C.3. Etalonnage du Spectromètre de Masse _________________________________________ 33
Table des matières 8

III-ETUDE EXPERIMENTALE PREALABLE DES MECANISMES D’ADSORPTION


ET DE DESORPTION DE Sb/Si(111) _________________________________________ 35

III-A. Sb adsorbé sur la surface Si(111) ________________________________________ 35

III-A.1. Coefficient d’accommodation thermique ________________________________________ 35


III-A.2. Coefficient de collage ________________________________________________________ 35

III-B. Nature des espèces détectées ___________________________________________ 37

III-B.1. Caractéristiques du détecteur _________________________________________________ 37


III-B.2. Nature des espèces émises par la surface ______________________________________ 38

IV-ETUDE CINETIQUE DE L’ADSORPTION ET DE LA DESORPTION __________ 41

IV-A. Description des courbes d’adsorption/désorption : mise en évidence de trois


domaines de température ____________________________________________________ 41

IV-A.1. Description des courbes cinétiques ____________________________________________ 41


IV-A.2. Scénarii envisagés __________________________________________________________ 43
IV-A.3. Modélisation de la cinétique___________________________________________________ 44

IV-B. Apparition d’un état transitoire à fort flux : origine physique _______________ 49

IV-B.1. Tests préliminaires __________________________________________________________ 50


IV-B.2. Origine physique et essai de simulation de l’état transitoire ________________________ 51

V-CARACTERISATION STRUCTURALE ET ATOMIQUE _______________________ 55

V-A. Etat de l’art _____________________________________________________________ 55

V-B. Identification structurale et caractérisation atomique ______________________ 57

V-B.1. Surface Si(111) propre________________________________________________________ 58


V-B.2. Sb/Si(111) : Structures à l’équilibre thermodynamique_____________________________ 61
V-B.3. Structures hors d’équilibre : 7x7d et 1x1d________________________________________ 67

V-C. Conclusion _____________________________________________________________ 69


Table des matières 9

VI-ETUDE THERMODYNAMIQUE __________________________________________ 71

VI-A. Isothermes d’adsorption/désorption _____________________________________ 71

VI-A.1. Grandeurs énergétiques______________________________________________________ 72


VI-A.2. Grandeurs thermodynamiques ________________________________________________ 73

VI-B. Contradiction entre résultats cinétiques et les résultats thermodynamiques 74

VI-C. Analyse des résultats ___________________________________________________ 75

VI-D. Que nous apprennent les Spectres de thermodésorption ? ________________ 77

CONCLUSIONS GENERALES SUR LA PARTIE EXPERIMENTALE _____________ 81

VII-ETUDE THEORIQUE __________________________________________________ 85

VII-A. Simulation numérique __________________________________________________ 85

VII-A.1. Les méthodes sur réseau rigide (champ moyen, Monte Carlo) ____________________ 85
VII-A.2. Les méthodes de relaxation (dynamique moléculaire) ____________________________ 86

VII-B. Détermination des potentiels d’interaction _______________________________ 87

VII-B.1. Approximation des liaisons fortes _____________________________________________ 87


VII-B.2. Méthodes ab initio __________________________________________________________ 90

VII-C. Application préalable aux éléments Sb et Si : limites et artefacts __________ 95

VII-C.1. Etude de Si et Sb massifs et optimisation des calculs ____________________________ 95


VII-C.2. Etude de la surface _________________________________________________________ 99
VII.C.3. Etude de l’alliage Sb-Si _____________________________________________________ 101

VIII-Sb/Si(111) : calculs ab-initio _________________________________________ 103

VIII-A. Modes d’adsorption __________________________________________________ 103

VIII-A.1. Protocole_________________________________________________________________ 103


VIII-A.2. Résultats et interprétations _________________________________________________ 104
VIII-A.3. Evolution de l’énergie d’adsorption avec le recouvrement _______________________ 110
Table des matières 10

VIII-B. Modes de substitution ________________________________________________ 112

CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES _______________________________________ 117

APPENDICE A __________________________________________________________ 119

APPENDICE B __________________________________________________________ 121

APPENDICE C __________________________________________________________ 123

APPENDICE D __________________________________________________________ 127

REFERENCES __________________________________________________________ 129


Introduction 11

INTRODUCTION

L’étude au laboratoire du système Sb/Si(111) remonte aux années 1995 et plus


particulièrement à la thèse de M. Ladevèze [1] consacrée à l’étude des propriétés de dopage
du silicium par l’antimoine. La problématique consistait à augmenter la quantité d’antimoine
incorporée dans le silicium afin d’obtenir un dopage de type n conséquent. Il avait été
cependant rapidement remarqué qu’à cause de ses propriétés de surfactant, une partie
importante des atomes de Sb s’accumulait en surface, limitant par là-même le dopage. L’idée
de base du travail de M. Ladevèze fut alors d’utiliser des surfaces vicinales du silicium, afin
de faciliter l’incorporation des atomes d’antimoine dans le volume via leur adsorption
préférentielle en bord de marche. Malheureusement les résultats expérimentaux obtenus ainsi
allaient à l’encontre de cette idée simple, l’antimoine se révélant en fait être moins lié en bord
de marche que sur les terrasses (où le nombre de liaisons proches voisins est cependant plus
faible !). Pour tenter d’élucider l’origine de ce résultat non-intuitif, M. Ladevèze avait
ébauché une modélisation préliminaire du phénomène, basée sur des potentiels semi-
empiriques très simplifiés. Cette approche lui fut cependant suffisante pour proposer, à l’issue
de sa thèse, une explication possible à cette anomalie : il existerait à la surface du Si deux
types d’espèces différentes à savoir des monomères Sb adsorbés sur les terrasses et des
dimères adsorbés verticalement en bord de marches [2]. Ainsi la physique de l’adsorption
Sb/Si(111) se montrait bien plus riche que celle qui avait été imaginée initialement. Il fut alors
décidé de démarrer une étude complète des mécanismes d’adsorption/désorption de
l’antimoine sur la surface nominale Si(111) pour laquelle n’existe que quelques travaux
anciens mais très peu nombreux [1-6].
Notre contribution à l’étude du système Sb/Si(111) est donc consacrée à la description,
l’analyse et la compréhension des mécanismes d’adsorption/désorption tant du point de vue
expérimental que théorique. A cette fin, nous avons souhaité aborder le problème en plusieurs
étapes :
Dans un premier temps nous souhaitions essentiellement déterminer la chimie de
surface. Nous entendons par là l’identification des différentes espèces Sb1, Sb2, Sb3 et Sb4
susceptibles d’exister sur la surface.
Dans un deuxième temps nous voulions étudier les cinétiques d’adsorption/désorption
dans différents régimes de température et de pression et proposer des scénarii qualitativement
et quantitativement compatibles avec les résultats expérimentaux.
Dans un troisième temps, nous voulions aborder l’étude structurale des phases 2D
d’équilibre par une étude couplée de diffraction d’électrons (approche moyenne) et de
microscopie à effet tunnel (approche locale).
La quatrième étape devait être consacrée à l’étude des propriétés thermodynamiques
du système Sb/Si(111). À cette fin, nous souhaitions construire le réseau d’isothermes
correspondant et en déduire la plupart des caractéristiques énergétiques et/ou
thermodynamiques du système.
La dernière étape (mais pas la moins importante) devait être consacrée à l’étude
théorique du système. Plus particulièrement nous voulions utiliser les méthodes ab-initio, et
Monte Carlo, afin d’analyser nos résultats expérimentaux.
Introduction 12

Nous avons pu au cours de ces quelques années de thèse respecter ce plan de travail♣
et ainsi améliorer nos connaissances sur les mécanismes d’adsorption/désorption du système
Sb/Si(111). Cependant, plutôt que de présenter dans ce mémoire une synthèse ré-ordonnée de
nos résultats, nous avons préféré suivre un chemin linéaire conforme à notre démarche avec
nos errements et questionnements. Nous verrons ainsi comment certaines contradictions entre
résultats expérimentaux ont pu être partiellement levées par notre approche théorique. Nous
essaierons dans une courte conclusion de proposer, à l’aune de nos résultats, un scénario
possible décrivant les mécanismes d’adsorption/désorption sans cacher aucune des difficultés
ainsi rencontrées. Enfin nous donnerons quelques perspectives.


Si ce n’est peut être pour l’étude STM qui faute de temps n’est pas aussi aboutie que ce que nous l’espérions en commençant ce travail.
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 13

I-ADSORPTION/DESORPTION : Concepts généraux

Nous commençons ce mémoire par ce chapitre bibliographique dans le but de définir


quelques concepts généraux classiques utilisés dans notre étude. Nous évoquerons de manière
succincte les notions d’équilibre, de croissance ainsi que les caractéristiques générales des
processus d’adsorption et de désorption. Nous terminerons par quelques spécificités générales
des matériaux utilisés dans le cadre de cette thèse, à savoir, le silicium et l’antimoine.

I-A. Croissance en phase vapeur

I-A.1. Considérations macroscopiques

I-A.1.a. Equilibre entre phases infinies

L’équilibre entre deux phases infinies A et B se traduit par l’égalité de leur potentiels
chimiques µA et µB. Ces derniers représentent à température (T) et pression (P) constantes, les
dérivés de l’enthalpie libre (G) par rapport au nombre de particules (n) dans le système,
µ= (∂G / ∂n) T , P [7].
Dans le cas simple d’un système faisant intervenir la même espèce chimique, on écrit :

µ (T, P) = µ (T, P)
(1)
A B

Les deux phases restent en équilibre quand P et T changent de façon infinitésimale, soit :

dµ A (T, P) = dµB (T, P) . (2)


⇒ dGA (T, P) = dGB (T, P) . (3)

A partir de la relation de Gibbs-Duhem ( dG = − SdT + VdP ), l’équation (2) s’écrit :

⇒ V A dP − S A dT = V B dP − S B dT . (4)

avec VA et VB les volumes molaires et SA et SB les entropies molaires des deux phases en
équilibre. L’équation (4) donne alors, l’équation dite de Clapeyron.

dP ∆S ∆H
= = , (5)
dT ∆V T∆V

avec ∆S = S A − S B , ∆V =V A − VB et ∆H = T∆S = H A − H B la variation de l’enthalpie.


Soit maintenant le cas où B est la phase solide de A (A est la phase vapeur du même corps), si
on considère que la vapeur se comporte comme un gaz parfait (P=RT/V) et si on néglige le
volume molaire du cristal devant le volume molaire de la phase vapeur (ce qui est en général
le cas), l’équation (5) prend la forme :
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 14

d ln P ∆H
= , (6)
dT RT 2

où ∆H = ∆H sub est l’enthalpie de sublimation toujours positive.


Pour la transition entre phases vapeur/liquide, l’équation (6) reste valable avec cette fois-ci
∆H = ∆H ev l’enthalpie d’évaporation.
Si on suppose que ∆H sub (ou ∆H ev ) ne dépend pas de la température, l’intégration de
l’équation (6) entre l’états initial (T0, P0) et l’état final (T, P) conduit à :

P  ∆H sub 1 1  .
= exp  −  −   (7)
P0  R  T T0  

Pour l’équilibre solide/liquide, la fusion s’accompagne d’une enthalpie ∆H f , toujours


positive, et se produit à une température de fusion Tf. L’équation représentant la frontière
entre les deux phases solide-liquide s’écrit :

∆H f T
P ≈ P0 + ( ) ln( ), (8)
∆V f T0

où ∆V f est la variation du volume molaire, petite et positive, au moment de la fusion.


Pression

Solide
Liquide

X' Figure I.1 : Représentation schématique d’un


diagramme de phases obtenu à partir de l’équation
P0 X (7) établie pour les équilibres solide/vapeur,
O
vapeur/liquide et solide/liquide.
Vapeur

T0 Température

Deux phases sont en équilibre le long d’une ligne et les trois phases sont en équilibre au point
O, appelé point triple.

I-A.1.b. Notion de saturation

Lorsqu’on se déplace le long de la ligne sur le diagramme de phases (figure I.1), les
phases délimitées par cette ligne sont en équilibre. Si on s’écarte de l’une de ces lignes, l’une
ou l’autre des phases devient la plus stable. Cela veut dire qu’une phase croît au détriment de
l’autre jusqu’à la disparition totale de la phase la moins stable.
Soit le point X sur la figure I.1 correspondant à la position d’un cristal en équilibre
avec sa vapeur dans les conditions de pression (P0) et de température (T0). La variation du
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 15

potentiel chimique du cristal et de la vapeur en fonction de la pression décrivant la trajectoire


XX’ sur la figure I.1 est représentée schématiquement sur la figure I.2.

Figure I.2 : Représentation schématique de la variation


des potentiels chimiques du cristal µc et de la vapeur µv
d’un élément en fonction de la pression à température
constante.

A température constante T0, le potentiel chimique de la vapeur augmente avec la


pression de façon logarithmique tandis que le potentiel chimique du cristal varie linéairement
avec la pression suivant une pente définie par le volume molaire du cristal. Ces deux courbes
se rencontrent à la pression d’équilibre P0. Quand P < P0 le potentiel chimique du cristal est
supérieur à celui de la vapeur, par conséquent le cristal se sublime. Quand P > P0 le cas
inverse se produit et c’est la vapeur qui se cristallise (qui se condense sur le cristal).
Cet écart à l’équilibre entre la vapeur et le cristal peut être exprimé en terme de ∆µ défini
comme la différence de potentiel chimique entre la phase première et la nouvelle phase en
croissance :

∆µ = µv (P) − µc (P) . (9)

Comme à l’équilibre µv (P0) = µc (P0) , l’équation (9) se réécrit :

∆µ = [µv (P) − µv(P0)]− [µc (P) − µc(P0)] . (10)

Enfin pour de petites déviations par rapport à l’équilibre cette égalité prend la forme :

P
∂µ v P
∂µ c P P
∆µ ≅ ∫ dP − ∫ dP = ∫ (Vv − Vc ) dP ≅ ∫ vv dP , (11)
P0
∂P P0
∂P P0 P0

d’où, toujours on considérant la vapeur comme un gaz parfait :

∆µ = kT ln P , (12)
P0

où k est la constante de Boltzmann et T la température du système.


Lorsque ∆µ > 0 la vapeur est sursaturée, ∆µ < 0 la vapeur est sous-saturée et lorsque
∆µ = 0 le cristal est en équilibre avec sa vapeur.
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 16

I-A.2. Considérations microscopiques

A l’échelle microscopique, on considère les interactions entre les molécules de vapeur


et la surface du cristal. Quand des atomes de la vapeur arrivent sur la surface, plusieurs
phénomènes peuvent se produire : soit ils sont réfléchis élastiquement et repartent directement

en phase vapeur, soit ils se collent sur la surface. Une fois collés, les atomes peuvent
s’adsorber, diffuser sur la surface, désorber ou s’incorporer et devenir définitivement liés au
cristal.
Du phénomène d’adsorption et de désorption découle la notion du temps de séjour (τ)
de l’atome entre le moment où il arrive et se colle sur la surface et le moment où il la quitte.
C’est pendant cet intervalle de temps que l’atome peut diffuser et a une chance de
s’incorporer. τ dépend de la température, de la sursaturation et de la nature des interactions.
I-A.2.a. L’adsorption
Soit la situation où un atome incident est piégé par le potentiel de la surface (il est
alors appelé adatome). Selon le type d’interaction, il existe deux cas d’adsorption. Quand
l’interaction adatome/adsorbant est une simple attraction de Van der Waals (il n’existe pas de
transfert électronique) on parle de physisorption. Lorsque l’attraction s’accompagne d’un
transfert électronique elle provoque une liaison forte entre l’adatome et l’adsorbant, on parle
alors de chimisorption.
I-A.2.b. La diffusion
La diffusion des atomes sur la surface traduit leur tendance à se mouvoir d’un site de
surface à l’autre. Un des moteurs du déplacement selon une direction donnée est la différence
de potentiel chimique de l’atome lorsqu’il occupe différents sites du réseau atomique.
I-A.2.c. L’incorporation
Lorsque l’atome est chimisorbé sur la surface son incorporation peut se faire de deux
façons : soit l’atome se lie à une structure déjà existante sur la surface (marches, îlots..), soit il
contribue à la germination d’une nouvelle structure (îlots..).

I-A.3. Modes de croissance hétérogène

Depuis les travaux de Bauer [8], les modes de croissance d’un cristal A (adsorbat) sur
un cristal B (substrat) ont été classés de façon effective en trois modes suivant la valeur du
coefficient de mouillage Φ. Ce coefficient traduit la variation de l’énergie libre du système
quand la surface de B entre en contact avec l’adsorbat A. A l’équilibre il est donné par
l’équation de Dupré :

Φ = γ A + γ AB − γ B = 2γ A − β , (13)

où β est l’énergie d’adhésion par unité d’aire du matériau A sur le matériau B, γAB est
l’énergie libre d’interface A-B et γA et γB sont respectivement les énergies libres de surface de
A et de B.
Si le coefficient Φ est négatif, la couche A mouille le substrat B induisant une croissance de
type bidimensionnelle (2D) dite mode de croissance Frank-Van der Merwe (FM). Si par
contre Φ est positif, la création de l’interface A/B coûte de l’énergie et la croissance est de
type tridimensionnelle (3D) appelée mode de croissance Volmer-Weber (VW). Le troisième
mode appelé mode de croissance Stranski-Krastanov (SK) correspond à une croissance 2D
suivie d’une croissance 3D [9].
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 17

I-B. Caractéristiques générales du processus d’adsorption/désorption

I-B.1. Description de l’adsorption/désorption

S’il existe une probabilité non nulle pour qu’une particule de la vapeur soit piégée
dans un puits de potentiel de la surface (adsorption), il existe de la même manière une
probabilité non nulle pour que cette particule franchisse la barrière d’énergie de désorption et
reparte dans la vapeur. On parle alors de processus d’adsorption/désorption. Ce processus est
caractéristique de la nature chimique des espèces mises en jeu et dépend beaucoup de l’état de
la surface.

I-B.2. Cinétique de désorption

Le flux désorbé dépend de la quantité de matière en surface susceptible de désorber. Il


existe cependant différents cas de désorption, selon qu’on examine le cas de l’évaporation
d’un cristal 3D (cinétique d’ordre zéro), le cas de la désorption d’un atome isolé A depuis la
surface d’un matériau B (cinétique d’ordre un), ou le cas de la désorption d’une molécule An
de cette même surface (cinétique d’ordre n). La désorption à partir d’une phase dense de la
surface décrit, elle, une cinétique comprise entre 0 et 1.

I-B.2.a. Cinétique d’ordre zéro

L’évaporation d’un cristal 3D ne dépend pas du nombre d’atomes contenus dans le


cristal ou à la surface du cristal. On dit que la cinétique de désorption est d’ordre zéro. Ceci
est le cas par exemple pour l’évaporation confinée de type Knudsen. Le flux de particules
s’évaporant J = P (où P est la pression de vapeur dans la phase gazeuse) est
2πmkT
simplement une fonction du nombre de sites en surface (par unité de surface) et du temps
caractéristique d’évaporation ( τ évap ).

Ns
J évap = . (14)
τ évap

Dans ce cas, la désorption se traduit par une décroissance linéaire du recouvrement de la


surface θ en fonction du temps (figure I.3)
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 18

Figure I.3 : Cinétique de


désorption d’ordre zéro : courbe
θ=f(t), système Au/Si(111) [10].
Les différentes pentes sont liées
à différentes surstructures sur la
surface.

I-B.2.b. Cinétique d’ordre 1

Dans le cas d’une cinétique d’ordre 1, le flux désorbé est proportionnel au nombre
d’atomes de surface (par unité de surface).
N
J des = ads , (15)
τ des
où τ des est le temps caractéristique de désorption.
La cinétique de désorption θ(t) est alors décrite par une exponentielle décroissante dont
l’allure est similaire à la décharge d’un condensateur. Nous aurons l’occasion de revenir sur
ce point dans le chapitre IV.

I-B.2.c. Cinétique d’ordre n

Le processus de désorption ne se fait pas toujours sous forme atomique. Les atomes
adsorbés sur la surface peuvent se combiner et se désorber sous forme de molécules "n-
mères". Soit à l’équilibre thermodynamique, une concentration CA de molécules An. Le flux
de molécules désorbées peut s’écrire :

J des = Q(T)(CA)n , (16)

où Q(T) est une variable dépendante de plusieurs paramètres (le mode de vibration de la
molécule désorbée, son énergie d’adsorption et l’énergie de liaison entre atomes la
constituant).

I-B.2.d. Cinétique de désorption d’une phase dense

L’ordre cinétique de désorption peut aussi être compris entre 0 et 1. Ce cas de


désorption est caractéristique de la désorption à partir d’une phase condensée [10] de surface.
Le formalisme d’une telle cinétique qui suppose des conditions d’équilibre interne entre la
phase 2D condensée et le gaz 2D adsorbé est complexe. Le phénomène de la condensation
bidimensionnelle de la surface rencontré dans le cas de l’antimoine sur Si(111) fera l’objet
d’une modélisation détaillée.
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 19

I-B.3. Isothermes

Tracer les isothermes d’adsorption d’un système donné est un moyen permettant de
caractériser toutes les propriétés thermodynamiques de la couche 2D sur la surface.
Considérons maintenant l’équilibre entre une couche d’épaisseur atomique déposée sur un
substrat inerte et une vapeur (gaz parfait) en écrivant l’égalité des potentiels chimiques entre
les deux phases. Nous sommes ainsi conduits à déterminer la fonction de partition et le
potentiel chimique de la phase adsorbée. Dans un modèle énergétique simple en interactions
de paires la méthode de champ moyen (Bragg Williams) distingue deux cas selon que les
atomes de la couche adsorbée interagissent entre eux ou pas.

I-B.3.a. Cas sans interactions latérales : isothermes de type Langmuir

La fonction de partition d’un atome A (parmi N atomes de la phase 2D) adsorbé sur un
substrat B (ayant Ns sites de la surface) s’écrit :

φ AB
f = f ad exp(− ) (17)
kT

2πmkTa 2
avec fad =qz qxy où qz = kT et q xy = .
hν z h2
Dans l’approximation des hautes températures, qz est la fonction de partition de vibration d’un
cristal d’Einstein tridimensionnel (A) suivant la seule direction z (νz est la fréquence de
vibration). φAB, valeur négative, est l’énergie d’interaction entre l’atome A et le substrat B. qxy
est la fonction de partition décrivant le mouvement libre de l’atome de masse m dans une
boîte bidimensionnelle d’aire a2.
L’équation (16) devient alors :

2πmk 2T 2 φ AB
f= a 2 exp(− ). (18)
h νz
3
kT

Par la suite nous poserons θ = N Ns le taux de recouvrement de la surface (Ns sites) par N
atomes adsorbés.
La fonction de partition de ces N atomes adsorbés (tous les sites de la surface sont supposés
équivalents) s’écrit alors sous la forme générale :

N
couche Ns !  φ AB 
f =  f ad exp(− ) , (19)
N !( N s − N )!  kT 

où (Ns-N) représente le nombre de sites d’adsorption non occupés. (Notons que nous
utiliserons l’approximation de Stirling pour les grand nombres : ln N!≈ N ln N − N ).
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 20

∂ ln f couche
Le potentiel chimique d’une particule adsorbée à la surface µ surf = − kT T devient
∂N
alors :
 θ 1 φ 
µ surf = kT ln  exp( AB ) . (20)
1 − θ f ad kT 

Rappelons que le potentiel chimique de la vapeur (considérée comme gaz parfait) s’écrit

V 2πmkT 3/ 2 
µ gaz = − kT ln  ( ) , (21)
 N h2 

où V est le volume molaire de la vapeur.


A l’équilibre entre la phase adsorbée et la vapeur, l’égalité entre le potentiel chimique de la
particule adsorbée sur la surface (19) et son potentiel dans la vapeur (20) donne la pression
partielle :

φ
P = P0 θ exp( AB ) , (22)
1−θ kT

νz
avec P0 = 2
(2πmkT )1 / 2 .
a
Cette expression est connue sous le nom d’isotherme de Langmuir [11]. Une isotherme
d’adsorption θ = f(P) est simplement obtenue en relevant la variation du taux de recouvrement
de la surface en fonction de la pression. Pour obtenir un réseau d’isothermes il suffit alors de
changer la température de la surface. Sur la figure I.4, on montre un exemple d’une série de
courbes de type Langmuir.

1 ,0
T 1

0 ,8 T 2
T 3

0 ,6 T 4
Figure I.4 : Isothermes de
theta

Langmuir d’après [12] :


0 ,4
T1 <T2 <T3 <T4
0 ,2

0 ,0
0 1 2 3 4

I-B.3.b. Cas avec interactions latérales : isothermes de type Fowler Guggenheim

Nous considérons maintenant que l’interaction entre atomes adsorbés est non
négligeable. Dans un modèle de champ moyen, où tous les sites de la surface sont équivalents,
l’énergie de chaque particule adsorbée est une énergie d’interaction moyenne dépendant du
nombre moyen de premiers voisins. On écrit :
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 21

φ = φAB + zθφAA , (23)

φAA est l’énergie d’interaction latérale entre deux atomes de l’adsorbat et zθ est le nombre
moyen de proches voisins dépendant du taux de recouvrement de la surface. Dans ce cas
l’expression de l’isotherme devient du type Fowler Guggenheim :

φ + zθφ AA
P = P0 θ exp( AB ). (24)
1−θ kT

L’allure générale de ces isothermes est présentée sur la figure I.5.

Figure I.5 : Isothermes de Fowler


Guggenheim d’après [12] :
T 1< T 2< T 3< T 4

A très faible taux de recouvrement (le long de O Φ 1A ), les interactions latérales dans la
phase diluée sont négligeables et toutes les isothermes sont tangentes aux isothermes de
Langmuir♣. A partir d’une certaine pression le recouvrement θ varie brutalement et décrit une
boucle de Van der Waals. Cette boucle caractérise une instabilité et n’a pas de signification
physique, le système subit plutôt une transition verticale (apparition d’un palier vertical
Φ 1A Φ 2A ) attestant une condensation bidimensionnelle d’une phase 2D sur la surface. La phase
ainsi condensée ( Φ 2A ) coexiste en équilibre avec la phase diluée ( Φ 1A ). Enfin au voisinage de
la monocouche (au delà de Φ 2A ) la phase bidimensionnelle se complète.
Lorsque la température du substrat augmente, la transition verticale ( Φ 1A Φ 2A ) se déplace vers
les pressions élevées et son amplitude diminue et s’annule pour T=Tc. En d’autres termes, si
on calcule la dérivée dθ dP de l’isotherme en θ =1 2 , celle-ci devient infinie pour une
température critique Tc = zφ AA 4k . Lorsque la température du substrat est supérieure à cette
température critique, les isothermes ne présentent plus de transition verticale brutale et la
concentration de surface augmente de manière continue avec la pression : on dit alors que la
couche bidimensionnelle est dans un état supercritique.

I-B.4. Mécanismes élémentaires de l’adsorption/désorption

Dans des conditions d’équilibre local, le flux émis par une surface a les mêmes
caractéristiques que le flux de particules incidentes venant frapper la surface. Il ne faut
cependant pas confondre le flux désorbé et le flux émis par la surface. Ce dernier peut en effet
être constitué d’une fraction désorbée et d’une fraction réfléchie.


Ce qui n'est pas apparent sur les figures en raison des échelles de pression très différentes
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 22

I-B.4.a. Lois générales et écart aux lois

De façon générale, un flux (J) adsorbé ou désorbé par une surface portée à une
température Ts peut être écrit sous la forme :

4
∂J
J =∫ dϕdθi dϑdε (25)
∂ϕ∂θi ∂ϑ∂ε

où ϕ est l’angle azimutal, θi l’angle que fait le flux avec la normale à la surface, ε l’énergie
interne (potentielle) des particules et ϑ la vitesse des particules dans le flux émis. Selon la
théorie cinétique des gaz, le flux incident obéit aux lois suivantes :

ϑ
2
−m
∂J . (Loi de Maxwell) (26)
∝ϑ e
3
2 kTs
∂ϑ
∂J ∝ cos(θ i ) . (Loi de Knudsen) (27)
∂θ i
−ε
∂J ∝e kTs . (Loi de Boltzmann) (28)
∂ε

Il pourrait paraître naturel de penser que le flux adsorbé et le flux désorbé obéissent aux
mêmes lois. Il n’en est rien pour au moins deux raisons.
D’une part les particules incidentes n’ont aucune raison (a priori) d’être à la même
température que les particules désorbées, d’autre part le flux émis par la surface peut être
formé à la fois de particules réfléchies et de particules désorbées dont les caractéristiques sont
très différentes.

I-B.4.b. Coefficient d’accommodation thermique et écart aux lois de Maxwell et de Boltzmann

Considérons dans un premier temps le problème de l’accommodation thermique des


particules incidentes. Soit une molécule de gaz à une température Ti s’adsorbant sur une
surface de température Ts, la molécule adsorbée peut avant désorption échanger de l’énergie
avec le substrat, et ainsi s’accommoder ou pas thermiquement. On définit le coefficient
d’accommodation thermique Γ :

Γ = (T-Ti)/(Ts-Ti), (29)

où T la température de la molécule désorbée est comprise entre Ti et Ts.


Lorsque Γ = 1, les molécules sont après désorption à la température Ts du substrat, on dit alors
qu’il y a eu accommodation thermique totale entre la molécule et le substrat.
Lorsque Γ = 0, T = Ti, les molécules de gaz émises par la surface n’ont échangé aucune
quantité de chaleur avec la surface et, de ce fait, sont émises avec une énergie cinétique
correspondant à la température du flux incident.
Dans le cas intermédiaire 0 < Γ < 1, les particules sont dites partiellement accommodées et
ont après désorption une température comprise entre celle du flux incident et celle de la
surface.
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 23

I-B.4.c. Coefficient de collage et écart à la loi de Knudsen

Du point de vue de l’émission angulaire du flux, la loi de Knudsen suppose qu’à


l’équilibre thermodynamique le flux incident, envoyé sous un angle i par rapport à la surface,
suit une loi en cos (θi). plus précisément nous noterons

Jémis (θi) = K cos(θi), (30)

où K est une constante d’étalonnage ne dépendant que de l’appareil de mesure.

De façon générale, le flux émis par une surface peut être composé de deux parties :
• Une fraction réfléchie (1-α(θi)), où α est le coefficient de collage (voir chapitre III)
éventuellement fonction de l’angle d’incidence (θi) : ce flux réfléchi correspond à des
particules qui subissent un choc élastique avec la surface et retournent immédiatement
dans la phase vapeur. On notera ce flux

Jréfléchi (θi) = K (1-α(θi)) cos(θi). (31)

• Une fraction désorbée correspondant aux particules qui ont été capturées dans un puits
de potentiel de la surface et qui s’adsorbent selon une loi angulaire à priori inconnue
notée D(θi). On a de ce fait

Jdésorbé = K D(θi). (32)

Si on considère maintenant que l’équilibre local entre le flux adsorbé et le flux émis existe,
(Jémis = Jdésorbé + Jréfléchi ), on obtient alors :

cos(θi) = D(θi) + [1-α(θi)] cos(θi), (33)


et donc,
D(θi) = α(θi) cos(θi), (34)

définit la loi angulaire de désorption.


Il est ainsi clair que pour avoir un flux désorbé obéissant à une loi en cos(θi), il faudrait avoir
un coefficient de collage α(θi) égal à l’unité. Notons que le coefficient de collage dépend de
l’état de la surface (structure, propreté..), de sa température et de plusieurs autres facteurs, tel
que l’existence des marches sur la surface [13] et/ou le processus d’adsorption/désorption
dissociative [14] etc…

I-C. Caractéristiques générales de Sb et Si

Si et Sb♣ ont des structures cristallines très différentes. Si est un semi-conducteur de


structure cubique diamant et Sb un semi-métal du groupe V, qui cristallise dans un système
rhomboédrique formé de parallélépipèdes.


Le nom "antimoine" dérive vraisemblablement de l’arabe al-uthmud, qui signifie "brillant". Le symbole Sb trouve son origine dans son
nom latin stibium.
CHAPITRE I : Adsorption/désorption : Concepts généraux 24

Sur la surface de Si(111) l’antimoine croît couche par couche [4, 15, 16]. Dans le cas
d’un alliage Sb-Si, le diagramme de phases (figure I.6) montre que ces deux éléments sont
très peu miscibles.

Figure I.6 : Diagramme de


phase Si-Sb selon [17]

Dans le tableau I.1 sont reportées quelques caractéristiques des éléments Si et Sb.

Si Sb
Structure Cubique diamant rhomboédrique
Rayon atomique (Å) 1.17 1.45
Masse volumique (g/cm3) 2.329 6.68
Température de fusion (°C) 1410 631
Energie de cohésion -4.2 -2.7
(eV/atome)
Energie de surface (erg/cm2) 1240 535
(0.9eV/atome) (0.4eV/atome)
Nombre de sites de surface 7.84.1014
(111) (atome/cm2)
Tableau I.1 : Grandeurs physiques relative à Si et à Sb
CHAPITRE II : Instrumentation et mesures 25

II-INSTRUMENTATION ET MESURES

II-A. Dispositif expérimental

II-A.1. Bâti de thermodésorption

Le bâti de thermodésorption est constitué de deux enceintes (figure II.1) maintenues


sous ultra-vide (UHV) possédant chacune sa propre pompe ionique. Le système de pompage
est complété par l’adjonction d’un sublimateur de titane refroidi à l’eau et d’un piège
cryogénique. L’ensemble permet d’obtenir une pression résiduelle de 10-10 Torr pendant un
dépôt.

Figure II.1 : Bâti de thermodésorption.

-L’enceinte principale, reliée à une pompe ionique de 200 l/s, contient l’échantillon.
Selon le type d’analyse, un ou plusieurs appareillages peuvent être connectés sur différentes
brides (sorties 1, 2 et 3). Dans la configuration utilisée pour les expériences de
thermodésorption, un Spectromètre de Masse (SM) (voir II-A.2.1) est positionné sur la sortie
1 et un hublot transparent ferme la sortie 2. Dans la configuration dédiée à l’analyse
structurale de la surface (voir paragraphe II-A.2.2) on remplace le SM par un canon à
électrons et on installe sur la sortie 2 un écran fluorescent permettant de visualiser le cliché de
diffraction de l’échantillon. Dans les deux configurations, la sortie 3 équipée d’un hublot est
utilisée pour mesurer la température de l’échantillon à l’aide d’un pyromètre optique.
-L’enceinte secondaire, connectée à une pompe ionique de 25 l/s, contient la cellule
d’évaporation devant laquelle peut être positionné un cristal de quartz permettant la
calibration du flux émis par la cellule (voir paragraphe II-C).
CHAPITRE II : Instrumentation et mesures 26

II-A.1.a. Manipulateur, porte-échantillon et échantillon

Le manipulateur installé sur l’enceinte principale permet d’effectuer des mouvements


de translation (verticale et horizontale) et de rotation de l’échantillon. Le porte-échantillon en
molybdène assure les contacts électriques et le maintien mécanique de l’échantillon.
L’échantillon est maintenu par des mors en molybdène entre lesquels on intercale des
feuilles de tantale (25 µm d’épaisseur) permettant la dilatation thermique de l’échantillon.
L’échantillon de Si(111) utilisé, dont la taille est d’environ 25x5x0.35 mm3, est obtenu
par clivage à partir de plaquettes commerciales de silicium (obtenu par tirage Czochralski). Il
est dopé p et a une résistivité de l’ordre de 0.85 / 1.15 Ω.cm-1.

II-A.1.b. Evaporateur d’antimoine

L’évaporateur installé dans l’enceinte secondaire est une cellule à effusion de type
Knudsen. Cette cellule (figure II.2) est constituée d’un creuset en molybdène surmonté d’un
couvercle. Elle est chauffée par l’intermédiaire d’un filament de tungstène enroulé autour du
creuset. Trois écrans thermiques (réflecteurs) concentriques permettent d’éviter les
déperditions de chaleur. Le réservoir peut contenir environ 10 g de pastilles d’antimoine pur à
99.999 %. Un orifice de 1 mm de diamètre permet d’obtenir un flux de Sb dirigé vers
l’échantillon.

Figure II.2 : Cellule d’évaporation


(réalisation : A. Ranguis)

Notons qu’afin d’éviter l’obturation accidentelle du trou (orifice) par lequel est émis le flux
d’antimoine, un filament traversé par un courant (3.5A, 10V) est positionné autour de l’orifice
évitant une éventuelle condensation indésirable.

II-A.1.c. Obturateur et microbalance à quartz

L’obturateur et la microbalance à quartz sont situés entre les enceintes secondaire et


primaire (Fig II.1). L’obturateur manuel (temps de réponse de 0.1s) assure l’ouverture et la
fermeture de la cellule et donc le passage et l’arrêt du flux d’antimoine vers l’échantillon. La
CHAPITRE II : Instrumentation et mesures 27

microbalance à quartz munie de son résonateur (le cristal de quartz) permet, en la positionnant
en face de l’évaporateur, de mesurer l’épaisseur du dépôt par unité de surface et de temps et
donc d’accéder à la valeur du flux émis par la cellule.
II-A.2. Techniques expérimentales

II-A.2.a. La Spectrométrie de Masse (SM)

La spectrométrie de masse est une méthode précise de mesure des masses atomiques et
moléculaires par séparation des atomes ou des molécules ionisés contenus dans un faisceau
[18].

Le Spectromètre de Masse SM (Balzers QMG 420) est de type quadripolaire (figure


II.3). Il est constitué d’une chambre d’ionisation, d’un filtre de masse à barres quadripolaires,
d’un collecteur d’ions avec déviation électrostatique et d’un photomultiplicateur. L’appareil
est connecté à l’enceinte principale (sortie 1 figure II.1) et est placé suivant la normale à la
surface de l’échantillon. La tête d’ionisation est située à proximité du substrat (3 cm) pour une
sensibilité de mesure optimale.

Figure II.3 : Spectromètre de


Masse.

Dans la chambre d’ionisation, des électrons sont produits par simple chauffage d’un
filament de tungstène (figure II.3). Les électrons sont accélérés par une différence de potentiel
afin d’acquérir une énergie suffisante pour ioniser les atomes de la vapeur vus par le SM. Les
ions formés sont extraits de la chambre d’ionisation grâce à une électrode d’extraction. Avant
d’entrer dans le filtre, le flux d’ions est focalisé à l’aide de deux diaphragmes.
Le filtre de masse, composé de quatre électrodes (barres cylindriques parallèles) auxquelles
est appliquée une combinaison de tension continue (U) et alternative (V cosωt) permet alors
de sélectionner les masses des différents ions qui les traversent. Des spectres de masse sont
enregistrés en faisant varier U et V tout en gardant constante la fréquence ν =ω/2π. Quand le
rapport U/V est constant, seuls les ions d’un même rapport m/e sont collectés et envoyés vers
un photomultiplicateur suivi d’un convertisseur courant-tension. Le signal en tension est alors
enregistré sur table traçante en fonction du temps.
CHAPITRE II : Instrumentation et mesures 28

II-A.2.b. La diffraction des électrons de haute énergie (RHEED)

La diffraction des électrons de haute énergie connue sous l’acronyme RHEED


provenant de l’anglais Reflection High Energy Electron Diffraction est une technique de
caractérisation structurale de surface.
L’ensemble de l’appareillage est constitué d’un canon à électrons connecté à l’entrée 1
de l’enceinte principale (figure II.1) et d’un écran fluorescent suivi d’une caméra CCD
installé sur l’entrée 2 (en face de l’entrée 1). A partir du canon à électrons, un faisceau
électronique quasi-monocinétique de haute énergie (dans notre cas, 20 keV) vient sonder sous
incidence rasante (~ 1°) un ou deux plans atomiques de la surface. L’interaction des électrons
avec le réseau atomique périodique de surface entraîne la formation d’un diagramme de
diffraction visualisé sur l’écran fluorescent et enregistré à l’aide d’une caméra numérique.

Figure II.4 : Principe d’une mesure RHEED d’après I. Hernandez-Calderon [19]. Sur les figures de gauche et
de droite sont respectivement présentées les vues de dessus et de côté de l’intersection de la sphère d’EWALD
avec le réseau réciproque.

Les figures de diffraction observées sur l’écran fluorescent (figure II.4) représentent
l’intersection du réseau réciproque de la surface et de la sphère d’Ewald de rayon k, où k est
le module du vecteur d’onde des électrons du faisceau incident (k=2π/λ). Compte tenu d’une
part de la faible dispersion de l’énergie des électrons (épaisseur non nulle de la sphère
d’Ewald) et d’autre part de la taille finie des domaines de diffraction (réseau réciproque
constitué de bâtonnets), l’intersection de la sphère d’Ewald et du réseau réciproque
bidimensionnel donne un cliché de diffraction formé de tiges parallèles. La distance entre
deux tiges est inversement proportionnelle au paramètre de maille de surface dans la direction
perpendiculaire au faisceau incident. Notons que pour obtenir le réseau réciproque complet, il
est nécessaire d’enregistrer plusieurs clichés obtenus dans différents azimuts.

II-A.2.c. La diffraction des électrons lents (LEED)

La diffraction des électrons lents, en anglais Low Energy Electron Diffraction (LEED)
est aussi une technique d’analyse structurale de surface dans laquelle, contrairement au
RHEED, le faisceau incident est normal à la surface et l’énergie des électrons est faible
(quelques dizaines voir une centaine eV). Comme la technique du RHEED mais pour des
raisons différentes (ici liées à l’énergie des électrons), les électrons du LEED ne sondent que
quelques monocouches de la surface. Un des avantages majeurs du LEED est d’obtenir
CHAPITRE II : Instrumentation et mesures 29

directement une image complète du réseau réciproque : il n’est donc pas nécessaire de
changer d’azimut. Le LEED installé dans le bâti STM permet de vérifier la qualité structurale
de surface.

II-A.2.d. La microscopie à effet tunnel (STM)

La microscopie à effet tunnel (Scanning Tunnelling Microscopy) est une méthode


d’étude des surfaces à l’échelle atomique. Elle permet d’imager des surfaces métalliques ou
semi-conductrices. Le principe du STM est basé sur le phénomène de franchissement par effet
tunnel d’une barrière de potentiel par des électrons. Une pointe métallique et une surface
conductrice, séparées par un espace vide (quelques dizaines d’Angstrom), constituent deux
milieux où les électrons circulent librement, séparés par une barrière de potentiel. Le
rapprochement des deux objets (pointe-surface) à quelques distances atomiques crée un
recouvrement des fonctions d’ondes de leurs états électroniques. Attirés par la différence de
potentiel, les électrons transitent par effet tunnel entre la pointe-sonde et la surface. Enfin, en
balayant la surface par la pointe, ajustée en permanence de manière à ce que l’intensité du
courant tunnel soit constante, ou que la hauteur par rapport à la surface soit constante, on
obtient une répartition spatiale des états électroniques permettant la visualisation, dans
l’espace direct, de l’arrangement atomique de la surface.
A l’aide d’un STM, on peut aussi faire de la spectroscopie à effet tunnel (STS). Dans
ce cas la pointe est immobile au dessus d’une position (xyz) donnée et on enregistre le
courrant tunnel I en fonction de la tension appliquée V. Le courant tunnel est fonction de la
densité locale qui dépend de la géométrie de la surface.

Le bâti expérimental dévolu au STM est totalement indépendant du bâti de


thermodésorption. Il est constitué de 2 modules maintenus sous ultra-vide (pression comprise
entre 10-10 et 10-11 Torr), séparés par des vannes et possédant chacun un système de pompage
(pompe ionique et sublimateur de titane) : lorsqu’un module est remis à l’air, l’autre peut
rester sous UHV.

Les deux modules constituant le bâti STM sont une chambre de préparation et une
chambre d’analyse.
-La chambre de préparation (préparation de l’échantillon) est constituée d’un porte-
échantillon, d’un évaporateur et d’un four à chauffage par courant direct ou par rayonnement.
Le porte-échantillon est conçu pour être à la fois facilement transférable et bien adapté aux
deux modes de chauffage. Dans cette chambre a été installée une cellule d’évaporation
d’antimoine qui reproduit les mêmes conditions de dépôt que dans l’expérience de
thermodésorption.
-La chambre d’analyse comporte, elle, une zone de nettoyage de pointe, un LEED et
une zone d’analyse. Dans la zone d’analyse se trouve la tête STM positionnée
perpendiculairement au support porte-échantillon et composée d’une fine pointe métallique
dont le déplacement est contrôlé par un système piézoélectrique lui permettant de balayer
l’espace dans les trois directions. Le LEED permet la caractérisation de la structure de
l’échantillon après la préparation et avant l’analyse.
Le transfert de l’échantillon d’une chambre à l’autre se fait par l’intermédiaire de
plusieurs cannes de transfert.
CHAPITRE II : Instrumentation et mesures 30

II-B. Préparation du substrat et de la source d’évaporation

II-B.1. Préparation de l’échantillon

II-B.1.a. Le silicium (111)

Notre étude concerne spécifiquement la surface plane (nominale) du silicium Si(111).


Nous rappellerons donc quelques éléments concernant la structure de volume et de surface du
silicium.
Le silicium est un semi conducteur de structure diamant et de paramètre de maille égal
à 5.43 Å. Le réseau est CFC (figure II.5.a) avec un motif constitué de deux atomes de
coordonnées (0 ; 0 ; 0) et (1/4 ; 1/4 ; 1/4). La surface coupée selon la direction <111> (figure
II.5.b) a un paramètre de réseau de 3.84 Å et est constituée d’un empilement de bicouches
hexagonales mettant en jeu des liaisons intra-plans entre seconds voisins.

Figure II.5.a : Structure cubique diamant de Si : Figure II.5.b : Surface Si(111) : paramètre de réseau
a= 5.43 Å a=3.84 Å

L’arrangement des atomes en surface dépend de la température. Pour une température


supérieure à 830°C (± 20°C selon les auteurs) la surface (111) présente une périodicité 1x1.
En dessous de cette température la surface propre se reconstruit de manière à minimiser son
énergie libre en une structure 7x7 (c’est-à-dire un paramètre de maille sept fois plus grand que
celui de la maille nominale 1x1). La température de transition 7x7→1x1 (830°C) peut
éventuellement servir de référence pour vérifier l’étalonnage de la température.

II.B.1.b. Nettoyage de l’échantillon

La propreté de la surface du substrat est une condition nécessaire préalable à toute


étude de surface. Dans notre cas on procède au nettoyage de l’échantillon en deux étapes.
La première étape consiste en un nettoyage chimique ex-situ qui permet de minimiser
le nombre d’impuretés présentes sur la surface. L’échantillon est ainsi plongé successivement
dans des bains d’alcool pour le dégraissage, de trichloro-éthane pour le désoxyder et enfin
d’acétone pour enlever les contaminants organiques, le tout sous agitation par ultrasons.
La deuxième étape du nettoyage est faite in situ. Après l’introduction de l’échantillon
dans l’enceinte ultravide (enceinte primaire) il est flashé thermiquement pendant quelques
secondes à 1250°C, température à laquelle les impuretés de carbone désorbent.
CHAPITRE II : Instrumentation et mesures 31

Afin de favoriser l’apparition de larges terrasses, l’échantillon est ensuite maintenu à


1100°C pendant quelques dizaines de minutes [20, 21]. L’obtention d’un cliché de diffraction
de la 7x7 est une garantie de l’état de propreté de la surface.

II-B.2. Préparation de la cellule d’évaporation

Avant d’introduire l’antimoine dans la cellule d’évaporation, celle-ci est nettoyée ex-
situ de la même façon que l’échantillon de silicium, puis elle est dégazée dans le vide pendant
quelques heures dans une petite enceinte UV dévolue à cette tâche. Après dégazage, la cellule
est sortie de l’enceinte, remplie de pastilles d’antimoine et installée dans l’enceinte secondaire
de notre bâti expérimental.

II-C. Etalonnages

II-C.1. Etalonnage des températures

On mesure la température de notre échantillon à l’aide d’un pyromètre infra-rouge


bichromatique qui fonctionne dans une gamme de température comprise entre 350 et 1350 °C.
Afin d’étalonner le pyromètre bichromatique, il est nécessaire de connaître le rapport
d’émissivité du silicium ε1/ε2 pour les deux longueurs d’onde λ1 et λ2 utilisées (soit
respectivement 0.8 µm et 1.05 µm). Ce rapport est obtenu par un autre étalonnage pour les
températures entre 800 à 1350 °C à l’aide d’un pyromètre à disparition de filament dont les
écarts entre les valeurs de la température de luminance et les valeurs vraies sont connues [22].
La valeur du rapport ε1/ε2 obtenu est de 0.989.
Afin de vérifier l’exactitude de l’étalonnage dans le domaine des basses températures
(inaccessible avec le pyromètre à disparition de filament), ces mesures thermiques sont
comparées à celles déjà réalisées à l’aide d’un thermocouple Platine/Platine-Rhodié (Pt/Pt-
Rh) appliqué à l’arrière de l’échantillon. Dans la figure II.6 sont présentés les résultats de
calibration du pyromètre dans les deux modes mono et bichromatique et ceux du
thermocouple.

Tem pérature du therm ocouple


800 Tem pérature en m ode m onochrom atique
Tem pérature en m ode bichrom atique
750

700

650
Figure II.6 : Courbes de calibration :
600
T (°C ) pyromètre en mode bichromatique,
550 en mode monochromatique et
500 thermocouple
450

400

350

2,5 3,0 3,5 4,0 4,5 5,0 5,5 6,0 6,5 7,0

Puissan ce d e chauffage (U A)
CHAPITRE II : Instrumentation et mesures 32

Les courbes de calibration du pyromètre bichromatique-thermocouple sont des droites


quasi-parallèles avec un écart moyen d’à peu près 20°C pour le thermocouple. Les
températures en mode monochromatique coïncident avec les températures du thermocouple
pour la gamme supérieure à 600°C. Ainsi dans nos expériences les températures de
l’échantillon mesurées en mode monochromatique sont obtenues avec une incertitude de ±
5°C dans la gamme de température comprise entre 600 °C et 900 °C et une incertitude de ±
20°C dans la gamme des températures inférieures à 600 °C

II-C.2. Etalonnage du flux

L’étalonnage du flux avant toute nouvelle expérience est une étape déterminante qui
demande un soin particulier. En effet une mesure fiable et précise de la quantité déposée sur la
surface implique non seulement l’obtention d’un flux incident stable au cours du temps mais
de plus, l’assurance d’un bon alignement de l’ensemble source-obturateur-échantillon de
façon à obtenir un dépôt homogène centré sur l’échantillon. Afin de limiter l’amplitude des
fluctuations initiales du flux, la température de la cellule est initialement augmentée par
paliers jusqu'à une température suffisamment supérieure à la température de sublimation de
l’antimoine. Notons que par la méthode de torsion-effusion, Niwa et Yoshiyama [23] ont
mesuré la pression et la masse moléculaire de la vapeur à partir de l’antimoine solide et ont
montré que celui-ci s’évapore à T=530°C et se compose de 100% de tétramères Sb4 dans la
limite des erreurs expérimentales.
Afin de vérifier que le flux arrivant sur la surface de l’échantillon est parfaitement
centré, on effectue un dépôt de quelques minutes (dépôt épais) sur le substrat maintenu à
température ambiante (pas de désorption). Le dépôt épais ainsi obtenu est visible à l’œil nu,
on peut alors, modifier les positions relatives de l’évaporateur et du substrat de silicium, si le
dépôt n’est pas centré.
Une fois le flux stabilisé, sa mesure est obtenu à l’aide d’un cristal de quartz. Celui-ci
délivre un signal tension en fonction du temps dont la pente est proportionnelle à la vitesse de
dépôt (e). Le flux réel déposé sur la surface du silicium est alors donné par la relation

ρ 1
J (t ) = e atomes/s/cm2 (1)
m 6.25

avec ρ = 6.68 g/cm3 : densité de l’antimoine


m = M/N : masse de Sb1
M = 121 g/mol : masse molaire de Sb1
N = 6.022.10-23 : nombre d’Avogadro

et 6.25 est le facteur géométrique correctif dû au rapport du carré des distances source-quartz
et source-cristal.

Dans l’ensemble de notre étude on utilise des flux de l’ordre de 4.8.1011-1.6.1013


atomes/s/cm2 (pour mémoire il y a environ 7.84.1014 atomes/cm2 sur la surface de Si(111)).
CHAPITRE II : Instrumentation et mesures 33

II-C.3. Etalonnage du Spectromètre de Masse

Rappelons que le signal détecté par le Spectromètre de Masse est le résultat des
molécules ou atomes ionisés, filtrés selon leur masse puis convertis en un signal électrique.

Ce signal V(t)spectro est directement proportionnel au flux des atomes de Sb provenant de la


surface et est inversement proportionnel à la racine carrée de leur température.
On écrit :
V(t)spectro = KJ(t)RT −1 2 , (2)

où T est la température des atomes, J(t) le flux incident, R la résistance du convertisseur


courant-tension et K une constante de calibration. La mesure de V(t)spectro pour un flux connu
(mesuré par le cristal de quartz) permet, connaissant la résistance R et la température des
molécules, de remonter à la valeur de la constante de calibration K.
Dans la pratique, lors de la procédure de calibration, le flux émis par la cellule est totalement
réfléchi par la surface de l’échantillon lorsque celui-ci est porté à très haute température (1100
°C). On montrera dans le chapitre III que les atomes d’antimoine entrant dans la chambre
d’ionisation du SM ont la même température que celle du substrat. On écrit alors :

12
Vmesuré Tsubstrat
K= . (3)
J mesuré R
CHAPITRE III : Étude expérimentale préalable des mécanismes d’adsorption et de 35
désorption de Sb/Si(111)

III-ETUDE EXPERIMENTALE PREALABLE DES MECANISMES


D’ADSORPTION ET DE DESORPTION DE Sb/Si(111)

III-A. Sb adsorbé sur la surface Si(111)

III-A.1. Coefficient d’accommodation thermique

La connaissance du coefficient d’accommodation thermique et donc de la température


du flux désorbé est un paramètre nécessaire à notre description. Rappelons que le signal
V(t)spectro délivré par le Spectromètre de Masse (équation 2 Chapitre II) est inversement
proportionnel à la racine carrée de la température T des molécules entrant dans la chambre
d’ionisation. Pour déterminer le coefficient d’accommodation thermique, on mesure le signal
du SM pour un flux donné d’antimoine en fonction de la température du substrat Si. Les
résultats reportés dans la figure III.1 montrent une droite de pente proportionnelle à l’inverse
de la racine carrée de la température de l’échantillon. Ainsi, dans le cas de l’antimoine
s’adsorbant sur une surface de Si(111), le coefficient d’accommodation thermique est égal à
l’unité dans la limite des erreurs expérimentales.
SM (unité arbitraire)

Figure III.1 : Signal SM


proportionnel à (1/T)1/2 , T est la
température du substrat Si(111)

3 ,0 3 ,2 3 ,4

1 / ( √ Τ S * 1 0 -2 ) (k -1 /2 )

III-A.2. Coefficient de collage

Soit une quantité d’atomes envoyés sur la surface, deux processus peuvent alors se
produire : une proportion du flux est réfléchie et une proportion est collée sur la surface puis
adsorbée. On définit alors le coefficient de collage α comme le rapport du flux adsorbé sur le
flux incident.

α = Jads /Ji (1)

Pour déterminer le coefficient de collage α, on mesure à l’équilibre la fraction d’atomes


adsorbés par une surface portée à une température constante. A cette fin, un flux Ji est envoyé
sur la surface maintenue à une température Ts. On enregistre le signal délivré par le
Spectromètre de Masse en fonction du temps durant l’adsorption (obturateur ouvert) puis la
désorption (obturateur fermé).
CHAPITRE III : Étude expérimentale préalable des mécanismes d’adsorption et de 36
désorption de Sb/Si(111)

Typiquement, l’allure du signal enregistré (figure III.2) comporte trois parties [24] :

Jémis = Ji = Jéq

t0 t1 t2 t3

Figure III.2 : représentation schématique du signal du SM [24].

Dès l’ouverture de l’obturateur à t= t0, l’échantillon est soumis à un flux de particules. Une
fraction (1-α0) des atomes incidents est réfléchie entraînant une augmentation brutale du
signal de 0 à I(t0)= K (1-α0) Ji. Rappelons que K est la constante d’étalonnage du SM. Après
une période transitoire, le signal atteint à t= t1 une valeur constante Ieq correspondant à
l’équilibre entre le flux incident Ji et le flux émis Jémis. On note (Ieq= K Ji= K Jémis ).
Quand on coupe le faisceau incident (un certain recouvrement d’équilibre θéq étant atteint), on
enregistre à t= t2 une chute brutale du signal jusqu’à I(t2)=K (1-α1) Jeq correspondant à une
fraction réfléchie (1-α1). Ensuite le signal continue à s’atténuer progressivement pour
redevenir nul lorsque tous les atomes déjà adsorbés sont désorbés (t= t3).
Le graphe I(t) permet donc de déterminer d’une part les coefficients de collage α0 et
α1, correspondant respectivement à un recouvrement initial nul et au recouvrement final, et
d’autre part les quantités d’atomes adsorbés θads et désorbés θdes correspondant respectivement
aux deux aires hachurées à gauche et à droite sur la figure. Plus précisément nous avons
donc :

α0 = 1-I(t0)/Ieq (2)

α1 = 1-I(t2)/Ieq (3)
t1
θads = ∫ ( J − J )dt (4)
eq i
t0
t3
θdes = ∫J
t2
émis
dt (5)

Dans le cas du système Sb/Si(111) nous verrons que le signal SM dépend fortement de
la température. Plus précisément, nous définirons trois domaines de température dans lesquels
les courbes cinétiques I(t) sont totalement différentes. La description détaillée de ces courbes
est intégrée dans le chapitre de l’étude cinétique de l’adsorption/désorption. Nous nous
contenterons ici de présenter sur la figure III.3 l’évolution du coefficient de collage α(θ) de
Sb/Si(111) à une température Ts = 400 °C [5]. Le procédé expérimental est détaillé dans
l’appendice A.
CHAPITRE III : Étude expérimentale préalable des mécanismes d’adsorption et de 37
désorption de Sb/Si(111)

1 ,0

0 ,8

0 ,6
Figure III.3 : Variation du
α

0 ,4 coefficient de collage avec le


recouvrement à Ts = 400°C selon [5]
0 ,2

0 ,0
0,0 0,2 0 ,4 0,6 0 ,8 1,0 1 ,2

R ecou vrem en t

Pour de faibles et moyens recouvrements (θ < 0.7 MC♠), on remarque que le coefficient de
collage a pour valeur 1 et ne varie quasiment pas avec le recouvrement. Pour de forts
recouvrements (θ > 0.7 MC), α décroît rapidement jusqu’à s’annuler à la saturation de la
monocouche (1MC). Signalons qu’un même comportement a été rapporté par Barnett et al [6]
dans le cas de l’adsorption de Sb4/Si(100).
Notons que l’énergie de liaison de Sb4 sur une couche de Sb1 chimisorbés est beaucoup plus
petite que l’énergie de liaison de Sb1 sur la surface de Si [4], c’est pourquoi la saturation de la
couche n’excède pas 1MC, sauf dans la limite de très forts flux.

III-B. Nature des espèces détectées

III-B.1. Caractéristiques du détecteur

L’utilisation de la technique de Spectrométrie de Masse est un moyen efficace pour


mesurer précisément les espèces composant le flux émis par la surface. Cependant,
l’ambiguïté majeure de cette technique réside dans le fait de la dissociation des espèces
détectées dans la chambre d’ionisation, ce qui complique beaucoup la distinction entre
espèces désorbées et espèces réfléchies. Il faut alors, avant d’effectuer les mesures, s’assurer
que l’énergie d’ionisation du SM n’est pas de nature à modifier l’équilibre entre les espèces
Sbn existant dans le flux.
Barnett et al. [6] ont mesuré la quantité relative des espèces Sbn détectées par un SM
en fonction de l’énergie d’ionisation Ei. Les résultats montrent que l’intensité des quatre pics
Sb1, Sb2, Sb3 et Sb4 varie avec l’énergie d’ionisation. Pour une faible énergie (Ei < 20 eV), la
sensibilité n’est pas suffisante pour détecter les espèces les moins lourdes. Pour une forte
énergie, les espèces Sb4 sont dissociées en espèces plus légères Sbn avec n < 4. Il est donc
nécessaire, pour pouvoir étudier les proportions relatives des différentes espèces, de bien
choisir l’énergie d’ionisation du SM. Malheureusement, nous ne pouvons pas éviter la
dissociation des espèces avec notre appareillage. Le SM utilisé est donc configuré de manière
à dissocier (Ei =100eV) toutes les espèces détectées en molécules légères telles que des
monomères Sb1 et des dimères Sb2.
La tête du SM est placée directement en face de l’évaporateur qui ne délivre que des
Sb4 dans les conditions de fonctionnement utilisées. La figure III.4 présente un histogramme


Monocouche (MC) : un atome d’antimoine pour un atome de silicium.
CHAPITRE III : Étude expérimentale préalable des mécanismes d’adsorption et de 38
désorption de Sb/Si(111)

de la quantité des espèces détectées. On remarque ainsi que tous les tétramères Sb4 entrant
dans la chambre d’ionisation sont uniquement dissociés en monomères Sb1 et dimères Sb2. Le
rapport Sb1/Sb2 est égal à 1.5 ± 10% et est alors caractéristique du flux de tétramères Sb4. La
valeur de ce rapport implique qu’une molécule Sb4 se dissocie en moyenne dans la chambre
d’ionisation du SM en 3,44 atomes sous forme de monomère et de 0,56 dimère (voir
appendice B).

100

80
Qua ntité (UA)

60
Figure III.4 : histogramme
représentant les différentes espèces
40
détectées par le SM

20

0
Sb Sb2 Sb3 Sb4

Notons que ce rapport, propre aux paramètres expérimentaux du SM utilisé (tels que la
tension d’ionisation, la tension d’extraction….), dépend légèrement du flux incident
(fluctuation de 10% pour des flux de l’ordre de 4,78.1011- 1,53.1013 atomes/s/cm2). Ceci peut
facilement s’expliquer par l’influence de « l’inertie du SM » dans les conditions de quasi
saturation de la chambre d’ionisation. Ajoutons par ailleur, que les espèces Sb3 n’ont jamais
été détectées.

III-B.2. Nature des espèces émises par la surface

Ayant caractérisé le coefficient de dissociation du SM, il est maintenant possible


d’identifier les différentes espèces désorbées et/ou réfléchies en fonction de la valeur du flux
d’antimoine et de la température du substrat. En se positionnant sur le canal 1 du SM (masse
molaire 121 g)♠ et dès l’ouverture de l’obturateur, nous enregistrons le signal des espèces Sb1.
Celui-ci augmente progressivement jusqu’à atteindre une valeur d’équilibre (voir figure III.2).
On refait la même expérience en se positionnant sur l’autre canal du SM, le canal 2,
correspondant à la détection des dimères Sb2 (masse molaire = 242 g). On atteint un nouveau
régime stationnaire propre à cette dernière espèce. On rapporte ensuite les différentes hauteurs
de palier, correspondant au flux d’équilibre, ainsi obtenus pour les monomères Sb1 et dimères
Sb2 en unités arbitraires. On répète la procédure pour des températures variables pour un flux
de 4.78*1011 atomes/s/cm2 puis pour un flux de 5.8.1012 atomes/s/cm2. On obtient ainsi les
graphes portés sur la figure III.5. a et b.


La masse molaire du monomère Sb1 est égale à 121g. Le centre de masse est 121.76 et la plage de détection imposée au SM comprend les
isotopes allant de 121 (isotope naturel à 57.36%) à 123 (isotope naturel à 42.64%)
CHAPITRE III : Étude expérimentale préalable des mécanismes d’adsorption et de 39
désorption de Sb/Si(111)

110 110
Sb1 (UA) & Sb2 (7.5xUA) Sb1 (UA) & Sb2 (7.5xUA)
100 100
90 90

80 11 2 80
Sb1(4.78.10 at/cm /s) 12 2
70
11 2
70 Sb1(5.80.10 at/cm /s)
60
Sb2(4.78.10 at/cm /s) 12 2
60 Sb2(5.80.10 at/cm /s)
50 50

40 40
30 30

20 20

10 10

0 0
400 450 500 550 600 650 700 750 800 850 900 950 400 450 500 550 600 650 700 750 800 850 900 950

Température (°C) Température (°C)

Figure III.5.a : courbes d’intensité des espèces Sb1 et Figure III.5.b : courbes d’intensité des espèces Sb1 et Sb2
Sb2 en fonction de la température pour un flux 4,78.1011 en fonction de la température pour un flux 5,8.1012
atomes/s/cm2 atomes/s/cm2

On remarque que le signal enregistré pour les dimères Sb2 est maximum à basse température
(T<600°C) et minimum à haute température alors que celui des espèces Sb1 présente un
comportement inverse.
Sur la figure III. 6 nous représentons de façon différente ces résultats en traçant sur le
même graphique le rapport Sb1/Sb2 en fonction de la température Ts de l’échantillon. Nous
reportons également la valeur Sb1/Sb2 = 1,5 ± 10% caractéristique d’un flux ne contenant que
des molécules Sb4.

100
Sb 1/Sb2(4,78.10 11at/cm /s)
Sb 1/Sb2réel
12 2
Sb 1/Sb2(5,8.10 at/cm /s)
80

60
Sb 1 /Sb 2 Figure III.6 : rapport Sb1/Sb2
40 mesuré en fonction de la
température de l’échantillon
20

350 400 450 500 550 600 650 700 750 800 850 900 950

Température °C

Sur les deux courbes le rapport Sb1/Sb2 croît fortement à partir d’une certaine valeur de
température du substrat. Les deux courbes, qui augmentent à partir d’une température T =
600°C, montrent que la proportion de Sb2 détectée augmente avec le flux. A basse
température et indépendamment du recouvrement, ce rapport est de Sb1/Sb2 = 1,5 ± 10%
caractéristique de la seule présence de tétramères Sb4.
De tous ces résultats, on peut déduire que pour un gamme de flux incident entre 4,78.1011
atomes/s/cm2 et 5.8.1012 atomes/s/cm2 (utilisée par la suite) :
• A basse température (T<600°C), seuls les tétramères Sb4 sont désorbés et/ ou réfléchis
par la surface. Ceci est confirmé par le fait que la couche de monomères Sb1 ne peut
désorber qu’à partir de T= 600 °C.
CHAPITRE III : Étude expérimentale préalable des mécanismes d’adsorption et de 40
désorption de Sb/Si(111)

• Pour les hautes températures (T> 800 °C) seules les espèces Sb1 désorbent de la
surface de Si (111). Notons toutefois que pour de très forts flux une légère proportion
d’espèces Sb4 peut être détectée.
• Enfin dans une gamme de température intermédiaire (600 °C<T<800 °C), les deux
espèces coexistent.
Notons qu’il a été observé que pour une surface vicinale de Si, le rapport Sb1/Sb2 augmente
avec la densité de marches. Ce rapport bien inférieur à 1.5 atteste de la présence de dimères
Sb2 en bord de marche [5]
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 41

IV-ETUDE CINETIQUE DE L’ADSORPTION ET DE LA DESORPTION

Dans cette partie nous allons analyser les processus d’adsorption et de désorption de
l’antimoine sur la surface de Si(111). A cette fin nous décrirons, au cours d’une expérience
d’adsorption/désorption, l’allure des courbes I(t) enregistrées par le SM. Nous tenterons alors,
à l’aide de l’allure des courbes, de proposer un scénario plausible décrivant les mécanismes
d’adsorption/désorption. Enfin nous terminerons par une approche plus quantitative consistant
en une description phénoménologique analytique des courbes cinétiques.

IV-A. Description des courbes d’adsorption/désorption : mise en évidence de


trois domaines de température

Avant d’entrer dans les détails de cette étude rappelons quelques acquis expérimentaux
issus du chapitre précédent :

• La quantité totale d’antimoine émise par la surface est la somme des espèces Sb1 et
Sb2 enregistrées respectivement sur les canaux 1 et 2 du SM.
• La détection de tétramères Sb4 se traduit par un rapport Sb1/Sb2 = 1.5 ±10%.
• Dans le cas d’une surface de silicium parfaitement plane (pas de marches), tous les
dimères Sb2 détectés par le SM proviennent d’une dissociation des tétramères Sb4 dans
la chambre d’ionisation alors que les monomères Sb1 proviennent à la fois de la
dissociation et des monomères Sb1 désorbés.

Le principe d’obtention des courbes d’adsorption/désorption consiste à mesurer, dans le


domaine de la sous mono-couche, la quantité d’antimoine adsorbée puis désorbée par une
surface portée à une température TS constante. À cette fin, un flux de Sb connu
(préalablement étalonné) est envoyé sur la surface Si maintenue à une température constante.
Le signal détecté par le SM est enregistré en fonction du temps pour l’espèce Sb1 puis Sb2 (il
suffit pour cela de changer de canal sur le SM) avec et sans flux incident.

Nous avons ainsi mis en évidence trois gammes de températures (T<600 °C, T> 800°C
et 600°C< T< 800°C) caractérisées par des courbes cinétiques I(t) d’allures différentes. Les
figures IV.1, 2 et 3 montrent respectivement les résultats obtenus pour les températures 550
°C, 810 °C et 720 °C représentatives de chaque domaine.
Dans les domaines des hautes et moyennes températures, nous séparerons le cas des courbes
obtenues dans des conditions de fort flux. Celles-ci présentent une signature particulière et
seront longuement développées dans un deuxième temps.

IV-A.1. Description des courbes cinétiques

IV-A.1.a. Description des courbes I(t) obtenues à basse température (T< 600°C)

Deux caractéristiques essentielles sont observées sur les courbes obtenues à basse
température :
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 42

• L’allure du signal est identique pour les espèces Sb1 et Sb2. Malgré le fait que leurs
intensités respectives varient en fonction du flux, le rapport Sb1/Sb2 = 1.5 ±10% reste
constant, indiquant que dans ce domaine de température seule l’espèce Sb4 est émise
par la surface.
• Lors de l’ouverture de l’obturateur (figure IV. 1), apparaît un temps de latence de
quelques secondes, où aucune émission n’est détectée, puis l’intensité du signal
augmente décrivant une forme en "S" jusqu’à ce qu’un état stationnaire soit atteint.
Lorsqu’on referme l’obturateur, le signal chute de façon abrupte et on retrouve quasi-
instantanément le bruit de fond de départ.

Figure IV.1 : Signal délivré par le SM pour


l’espèce Sb1 et Sb2 lors de l’adsorption/désorption
de Sb/Si(111), les flèches correspondent
respectivement à l’ouverture et à la fermeture du
diaphragme. L’échantillon de Si est porté à une
température de 550 °C et la valeur du flux utilisés
est de 2.29.1011 atomes/s/cm2

IV-A.1.b. Description des courbes I(t) obtenues à haute température (T> 800°C)

Sur la figure IV.2 sont présentés les deux signaux enregistrés pour Sb1 et Sb2. On
remarque que le rapport Sb2/Sb1 est quasiment nul. Cela indique que, dans cette gamme de
température, seuls des monomères Sb1 sont désorbés par la surface.
L’allure de la courbe adsorption/désorption de l’espèce Sb1 rappelle celle de la
charge/décharge d’un condensateur. Dès l’ouverture du diaphragme le signal augmente de
façon continue. Une fois l’équilibre atteint, on ferme l’obturateur et la désorption se fait
progressivement (cinétique d’ordre 1) jusqu’au bruit de fond de départ.

Figure IV. 2 : Signal délivré par le SM pour


l’espèce Sb1 et Sb2 lors de l’adsorption/désorption
de Sb/Si(111), les flèches correspondent
respectivement à l’ouverture et à la fermeture du
diaphragme. L’échantillon de Si est porté à une
température de 810 °C et la valeur du flux utilisés
est de 8.42.1011 atomes/s/cm2
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 43

IV-A.1.c. Description des courbes I(t) obtenues à température intermédiaire(600°C


<T<800°C) et à faible flux

On a vu dans le chapitre précédent que dans la gamme de température


600°C<T<800°C la proportion de molécules Sb2 augmente avec la valeur du flux incident.
Dans ce régime, la température est au-dessus de la température de désorption des monomères
Sb1 et en dessous de la température pour la quelle la durée de vie des précurseurs Sb4 est
nulle. On est donc dans un régime où les deux espèces Sb1 et Sb2 (Sb4) coexistent. L’allure
des deux signaux enregistrés pour Sb1 et Sb2 (figure IV.3) est relativement semblable. On
retrouve d’une part à l’adsorption la forme en "S" caractéristique du régime des faibles
températures, et d’autre part à la désorption, la forme en exponentielle décroissante après une
chute brutale partielle dont la hauteur dépend de la température et du flux.

Figure IV.3 : Signal délivré par le SM pour


l’espèce Sb1 et Sb2 lors de l’adsorption/désorption
de Sb/Si(111), les flèches correspondent
respectivement à l’ouverture et à la fermeture du
diaphragme. L’échantillon de Si est porté à une
température de 720 °C et la valeur du flux utilisés
est de 7.61.1011 atomes/s/cm2

IV-A.2. Scénarii envisagés

IV-A.2.a. Scénario à basse température

Sur la surface propre de Si, arrive un flux composé de tétramères Sb4 (ouverture de
l’obturateur). Une fois physisorbés sur la surface chaude, ces tétramères se dissocient avant de
se chimisorber sous forme de monomères dans les sites vacants de la surface. A T < 600 °C
les espèces Sb1 ne peuvent pas désorber♥. Les tétramères arrivant sur des sites déjà occupés
sont simplement réfléchis par la surface. Ainsi des Sb4 ne peuvent être détectés par le SM
qu’une fois que la surface est partiellement recouverte de Sb1 (retard au démarrage). Plus les
sites de la surface sont occupés, plus les tétramères sont réfléchis (croissance du signal).
Quand l’état stationnaire est établi, c’est-à-dire qu’il y a égalité entre le flux incident et le flux
réfléchi, le système est à l’équilibre. Lorsqu’on ferme la cellule, les Sb4 ne peuvent plus être
réfléchis (plus de flux incident), les monomères ne peuvent pas être désorbés (température
faible) et donc le signal du SM devient brutalement nul. Cette description suppose donc que le
coefficient de collage des molécules Sb4 sur la surface est une fonction du nombre de sites
occupés par des monomères Sb1. Pour une surface complètement recouverte (θ=1), tous les
Sb4 sont réfléchis et le coefficient de collage α est égal à zéro (la chute brutale 1-α1(θeq)=1 sur
la Figure III.2).


A 600°C, le temps de désorption de l’Antimoine sur le Silicium est de l’ordre de plusieurs milliers de secondes [4, 21].
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 44

IV-A.2.b. Scénario à haute température

Vu la température du substrat (T>800°C), les tétramères Sb4 sont dissociés avant


même de physisorber et on a une simple chimisorption de monomères Sb1. La physisorption
des molécules Sb4 n’étant pas nécessaire (contrairement au cas des basses températures), on
est donc dans un régime usuel sans précurseur dans lequel il n’y a qu’adsorption et désorption
de monomères Sb1. L’état stationnaire correspond à l’égalité entre le flux de tétramères Sb4
incidents et le flux de monomères Sb1 désorbés (état d’équilibre). Lorsqu’on ferme
l’obturateur, la désorption est de premier ordre et l’absence de toute chute brutale du signal 1-
α1 (θéq) atteste d’un coefficient de collage α unité.

IV-A.2.c. Scénario à température intermédiaire

Le scénario envisagé dans ce domaine de température est complexe car il réunit les
caractéristiques des basses et des hautes températures. On y retrouve la physisorption et la
dissociation partielles des Sb4, la chimisorption et la désorption des Sb1 et la réflexion des Sb4
non physisorbés.

IV-A.3. Modélisation de la cinétique

Afin de vérifier les scénarii proposés et en tirer des informations quantitatives


décrivant correctement la physique de l’adsorption de Sb sur Si(111), notre attention s’est vite
portée sur la modélisation des cinétiques dans les trois domaines de température à l’aide
d’équations analytiques. La résolution de ces équations se fait à l’aide du logiciel
"MATHCAD".

IV-A.3.a. A basse température

Pour expliquer les caractéristiques de ce régime nous avons testé deux modèles dont
un proposé par Barnett et al. pour décrire les mécanismes d’adsorption/désorption de
Sb/Si(100) [6]. Différents dans le principe, les deux modèles se basent sur le fait qu’à basse
température une couche de monomères Sb1 est adsorbée sur la surface de façon irréversible
(pas de désorption de monomères) et que la probabilité de désorption et/ou de réflexion des
précurseurs Sb4 augmente avec le recouvrement en Sb1.

Modèle de Barnett et al.

Dans ce modèle les auteurs supposent que les molécules Sb4 qui arrivent sur la surface
sont des précurseurs physisorbés dont la probabilité de dissociation et de chimisorption ne
dépend que de la probabilité de trouver quatre sites vacants sur la surface. Dans un modèle de
champ moyen, cette probabilité est proportionnelle à (1-θ)4 où θ = nSb1 est le recouvrement.
Ns
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 45

nSb1 étant le nombre d’atome Sb1 adsorbés et Ns est le nombre de sites de surface Si(111). Les
équations cinétiques décrivant l’évolution des espèces Sb1 et Sb4 à la surface s’écrivent donc :

dn Sb1
= 4 J (1 − θ ) + 4n Sb4 K m (1 − θ ) ,
4 4
(1)
dt
dn Sb4
dt
[ 4
]
= J 1 − (1 − θ ) − n Sb4 K m (1 − θ ) − n Sb4 K 4 ,
4
(2)

où Km est le coefficient de migration et K4 est le coefficient de désorption d’une molécule


Sb4.
Dans l’équation (1) la variation de la quantité Sb1 sur la surface correspond à la
somme des monomères instantanément chimisorbés 4J (1−θ ) et des tétramères Sb4 qui ont
4

migré à la surface avec une probabilité Km et se sont dissociés avec une probabilité (1 − θ ) .
4

[
Dans l’équation (2) décrivant le bilan des espèces Sb4 sur la surface, J 1−(1−θ ) est le
4
]
nombre de tétramères non réfléchis et donc physisorbés, nSb4 K m(1−θ ) est le nombre de
4

tétramères dissociés en Sb1 (avec une probabilité en (1−θ ) ) et le dernier terme nSb4 K 4
4

correspond à la probabilité de désorption de tétramères Sb4.


Les deux équations différentielles couplées (1) et (2) sont résolues et les intensités
enregistrées par le SM (espèces émises par la surface) s’écrivent :

ISb1 = 0 (pas de désorption à T<600°C), (3)


I Sb4 = C te nSb4 K 4 . (4)

Le coefficient de proportionnalité C te dépend de la constante d’étalonnage.


L’ajustement de la courbe expérimentale (Fig IV.4) par ce modèle à deux paramètres
ajustables Km et K4 (voir appendice C) décrit bien l’adsorption mais mal la désorption. En
particulier, on ne retrouve pas la chute brutale du signal de désorption.

Modèle développé dans ce travail

Dans ce modèle, on considère que toute molécule entrant en contact avec la surface
chaude est soit dissociée soit réfléchie. La probabilité de dissociation des tétramères Sb4
dépend seulement du coefficient de collage α(θ). Sachant que dans cette gamme de
température il n’y a pas de désorption de monomères Sb1, les seules espèces présentes sur la
surface sont des monomères Sb1 chimisorbés :
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 46

dnSb1 = 4Jα(θ) , (5)


dt
dnSb4 = 0 . (6)
dt
Le coefficient de collage α(θ) peut être exprimé à partir de calculs de physique statistique
(voir appendice C). Il s’écrit :

(1 − θ ) n
α (θ ) = , (7)
(1 − θ ) n + P

où (1-θ)n est la probabilité de dissociation et de chimisorption de la molécule Sb4 sur la


surface de Si ayant n sites vacants et P est le rapport des probabilités de désorption et de
chimisorption de la molécule Sb4.
Après résolution des deux équations différentielles non couplées (5 et 6), les intensités
détectées par le SM s’écrivent :

I Sb1 = 0 (Pas de désorption à T<600°C), (8)


ISb4 = C te J [1−α(θ)] . (9)

Si on considère comme Barnett et al. que la probabilité de dissociation des tétramères


Sb4 dépend de la disponibilité de quatre sites vacants sur la surface, alors n = 4, l’ajustement
des données expérimentales par notre modèle, avec cette fois un seul paramètre ajustable P,
qui est de l’ordre de 10-3, rend aussi bien compte de la forme de l’adsorption que de la
désorption (figure IV.4). La faible valeur de P vérifie notre hypothèse concernant la quasi-
absence de désorption sous forme de tétramères.
Enfin, il est possible d’améliorer l’ajustement pour des valeurs de n plus petites. Selon
les conditions expérimentales de flux, les meilleurs ajustements sont obtenus pour 2.25<n<4.
Nous montrerons dans l’appendice C que ceci est parfaitement compatible avec une analyse
statistique plus détaillée des mécanismes de collage.
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 47

Figure IV.4 : Ajustement de la courbe


cinétique des basses températures
(T= 550°C J= 4.8.1011 atomes/s/cm2). Modèle
de Barnett et al. (trait pointillé), notre modèle
(trait plein).
La figure in set montre un meilleur ajustement
avec notre modèle pour une valeur de n=3.2

IV-A.3.b. A haute température

La présence d’une seule espèce Sb1 rend la modélisation du régime haute température
simple. La cinétique d’adsorption/désorption peut être décrite par une seule équation
différentielle :
dnSb1 = 4J − K1nSb1 , (10)
dt

où K1 est le coefficient de désorption de l’espèce Sb1 et 4J la quantité de monomères


incidents.
L’équation (10) traduit le fait que toute molécule Sb4 arrivant sur la surface chaude est
instantanément dissociée, chimisorbée puis désorbée. La résolution de cette équation donne
donc :
4J
n Sb1 = (1 − e − K1t ) à l’adsorption, (11)
K1

4 J − K1t
n Sb1 = e . à la désorption (12)
K1

Les intensités Iads et Idés enregistrées par le SM respectivement pendant l’adsorption et la


désorption sont alors

4J
I ads (t ) = C te ( )(1 − e − K1t ) , (13)
K1
4 J − K1t
I dés (t ) = C te ( )e . (14)
K1
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 48

L’ajustement des courbes cinétiques avec les expressions analytiques précédentes (13 et 14)
(figure IV.5) nous permet de déterminer les paramètres physiques caractéristiques du mode
d’adsorption.

ISM

Figure IV.5 : Ajustement de la


courbe cinétique obtenue à haute
température (T=850 °C, J= 1.8.1012
atomes/s/cm2) avec les expressions
analytiques (13) et (14)

t(s)

Sachant qu’à une température donnée, la valeur du coefficient de désorption K1 est


inversement proportionnelle au temps de séjour τ de l’espèce Sb1 sur la surface, on écrit :

1 − E ads
K1 = = ν z exp( ) (15)
τ kT

où νz est la fréquence de saut du monomère Sb1, Eads l’énergie d’adsorption et k la constante


de Boltzmann.
Après ajustement des courbes obtenues à plusieurs températures entre 780 °C et 880 °C, nous
relevons les valeurs τ=f(T) et traçons dans un diagramme d’Arrhenius lnτ=f(1/T) (fig IV.6).
On obtient l’énergie d’adsorption Eads = 2.85 ± 0.1eV et la fréquence de saut νz =1.627.1012 ±
5.104 vibrations/s. Ce résultat est en bon accord avec celui obtenu par désorption Auger (Eads
=2.7 ± 0.1eV) [1] et spectrométrie de masse par la méthode du vidage fractionné (Eads =2.9 ±
0.1eV) [5].
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 49

4,0

3,5

3,0

2,5
lnτ (s)

2,0

1,5
Figure IV.6 : Diagramme d’Arrhenius
lnτ=f(1/T) pour 780°C <T< 880°C.
1,0

0,5

0,0
8,6 8,8 9,0 9,2 9,4 9,6

10-4 /T(K)

Notons que pour de très forts flux apparaît une phase transitoire sur laquelle nous reviendrons
au paragraphe suivant.

IV-A.3.c. A température intermédiaire

Dans ce domaine de température, les choses sont plus complexes. On peut considérer
dans un premier temps que de façon analogue à la description des modèles à basse
température, la probabilité de chimisorption des atomes Sb1 dépend de la probabilité de
physisorption puis de dissociation des tétramères Sb4. Cependant dans le domaine de
températures considéré (T > 600 °C) les adatomes Sb1 peuvent se désorber. De ce fait, il est
possible de décrire partiellement la cinétique I(t) en introduisant simplement un terme
supplémentaire décrivant la désorption de Sb1 dans les équations cinétiques utilisées à basse
température.

IV-B. Apparition d’un état transitoire à fort flux : origine physique

Il faut noter par ailleurs que cette description des courbes cinétiques n’est valable que
pour des faibles flux. En effet pour des forts flux, l’allure des courbes cinétiques pour les
régimes de moyennes et de hautes températures présente, en plus des caractéristiques propres
à chaque domaine, une signature particulière. Plus précisément, à un recouvrement supérieur à
la moitié de la monocouche, les courbes I(t) enregistrées à T >700 °C présentent un état quasi-
stationnaire avant l’état d’équilibre. Cet état transitoire présent dans les deux signaux
enregistrés Sb1 et Sb2 (si Sb2 détecté) existe à l’adsorption comme à la désorption (figure IV.
7).
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 50

a) b)

Figure IV.7 : Apparition de l’état quasi-stationnaire (flèches rouges). a) Signal Sb1 enregistré à T=750°C et J=
9.5.1011 atomes/s/cm2. b) Signal Sb1 enregistré à T=820 °C ; J= 1.9*1012 atomes/s/cm2.

IV-B.1. Tests préliminaires

L’observation d’un état quasi-stationnaire avant qu’un vrai état d’équilibre ne soit
atteint a suscité beaucoup d’interrogations sur les causes et les conditions de son apparition.
Notons par ailleurs qu’un tel état transitoire n’est pas observé lors de l’adsorption de
l’antimoine sur Si (100) et Si (110) [6, 25, 26]. Il n’a pas non plus été signalé par les autres
auteurs travaillant sur le système Sb/Si(111) [3,4].
Dans un premier temps nous avons suspecté l’existence d’une éventuelle source de
contamination ou la présence de défauts sur la surface qui auraient comme conséquence la
modification de la cinétique du système. Après plusieurs vérifications concernant les
conditions de vide, les étalonnages et la propreté des échantillons utilisés, le phénomène
s’avère reproductible pour les températures T>700 °C sous des conditions de fort flux utilisé.
L’étape suivante a été de vérifier une éventuelle liaison entre la formation de plusieurs
paliers (pseudo-palier et palier d’équilibre) et l’apparition de cristallites sur la surface. L’état
transitoire serait alors en réalité le vrai état d’équilibre 2D, et ce qu’on appelle état
stationnaire ne serait que la formation d’îlots tridimensionnels sur la surface. Pour cela, il
existe une procédure expérimentale permettant de s’assurer de l’état d’équilibre du système.
Lorsqu’on suppose qu’une situation d’équilibre est atteinte, on coupe durant quelques
secondes le chauffage de l’échantillon. Le signal délivré par le spectromètre de masse chute et
donc le nombre de particules désorbées de la surface de silicium diminue. On rétablit ensuite
instantanément le chauffage de l’échantillon : l’échantillon est alors à la température Ts. Le
signal délivré par le SM croît : le nombre de particules désorbées par la surface augmente puis
le signal se stabilise. Trois cas peuvent se produire :
• le signal se stabilise rapidement à une valeur d’équilibre correspondante à celle
obtenue avant l’arrêt brutal du chauffage de l’échantillon (Fig IV.8.a.). Ce cas indique
que l’équilibre du système est atteint.
• Les niveaux du signal avant et après impulsion thermique diffèrent (Fig IV.8.b). Dans
ce cas l’équilibre n’était pas encore atteint.
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 51

• Le signal chute brutalement puis augmente pour retrouver un niveau supérieur au


niveau précédent (Fig IV.8.c). Ce cas traduit un phénomène irréversible caractéristique
de la formation de cristallites [27].

a) b)

c)

Figure IV. 8 : test sur l’état du système. a) L’équilibre thermodynamique est atteint. b) L’équilibre
thermodynamique n’est pas encore atteint. c) Croissance de cristallites sur la surface d’après [27].

Le résultat de ces tests montre que l’état stationnaire correspond bien à l’état d’équilibre du
système et que l’état quasi-stationnaire n’est réellement qu’un état transitoire.
Enfin la dernière étape a été d’identifier le recouvrement critique à partir duquel le pseudo-
palier se manifeste. Le résultat est qu’à partir d’un recouvrement supérieur à la demi
monocouche (selon la température du substrat), commence à apparaître une légère
déformation sur la courbe de l’adsorption et de la désorption qui devient un état quasi-
stationnaire nettement visible pour un recouvrement θc≥0.7 monocouche.

IV-B.2. Origine physique et essai de simulation de l’état transitoire

La forme de ce pseudo-palier correspond à une cinétique d’ordre n avec 0<n<1. Elle


peut être caractéristique de la formation (condensation) d’une phase bidimensionnelle de
surface [28]. Cette condensation étant également observée pour des températures élevées
(T=830 °C) où les tétramères Sb4 sont supposés se dissocier avant même d’entrer en contact
avec la surface, l’apparition de ce palier est indépendante de la présence de plusieurs espèces
(Sb1, Sb4) à la surface et est probablement un phénomène très général ayant lieu dès que les
adatomes se condensent en une phase 2D dense sur la surface.
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 52

Un scénario possible serait donc qu’au delà d’une certaine densité critique θc les
adatomes de la phase diluée de surface se condensent et forment une phase 2D dense. Nous
avons, dans un premier temps, fait un modèle ne faisant intervenir qu’une seule espèce Sb1
susceptible de se condenser au-delà d’une certaine densité critique. La surface est supposée
recouverte par une phase diluée et des îlots denses.
Le processus d’adsorption et de désorption de la phase condensée se fait par les
lisières vers ou à partir de la phase diluée. Les équations ainsi obtenues sont :

dn Sb1  N 
= 4 J 1 −  − K 12 nSb1 N + K 21 N − K 1 nSb1 . (16)
dt  Ns 
dN = K12nSb1 N −K21 N −K2 N . (17)
dt
dn1 4 JN
= − K 1P n1 . (18)
dt Ns

où nSb1 est la quantité d’adatomes Sb1 présents sur la surface Si(111) nue, et n1 celle sur les
îlots de la phase 2D ; N et Ns sont respectivement le nombre d’atomes dans les îlots et le
nombre de sites Si sur la surface de sorte que (N/Ns) est le recouvrement de la surface par les
îlots 2D exprimé en fraction de monocouche. Ainsi, nous avons séparé le flux d’adatomes en
deux espèces : les adatomes situés sur la couche de Si ( J[1-N/Ns] ) et les adatomes situés sur
les îlots 2D soit (J.N/Ns ). K12 présente la probabilité de pompage du gaz 2D vers la lisière des
îlots (le nombre de sites de lisière étant proportionnel à N ), K21 la probabilité de pompage
de la lisière des îlots vers le gaz 2D et enfin, K1 et K2 les probabilités de désorption des
adatomes et des atomes situés respectivement sur la surface et en lisière.
Notons cependant qu’un bon ajustement des courbes expérimentales n’a pu être obtenu qu’en
ajoutant une troisième espèce d’adatomes situés en deuxième couche (n1), et qui par définition
n’ont pas un contact direct avec la surface. Ces adatomes n1, qui n’excèdent pas le dixième de
la monocouche, se désorbent avec un coefficient de désorption K1p différent de K1.
Les équations différentielles couplées (16,17 et 18) sont résolues pour une densité
d’adsorption θ ≥ θc. L’intensité du signal enregistrée par le SM s’écrit

I = C te ( K 1 n Sb1 + K 1 p n1 + K 2 N ) . (19)

Sur la figure IV.9 sont reportés les ajustements ainsi obtenus pour une température de 750°C.
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 53

ISM

Figure IV.9 : Ajustement de


l’apparition de la phase (trait en
pointillés) à partir de θc =0.77.

t(s)

Ces résultats permettent de retrouver les paliers (état quasi stationnaire) à l’adsorption et à la
désorption. Notons que les paliers ne sont pas au même niveau conformément à l’expérience.
Pour θ < θc les équations différentielles doivent être résolues d’une part, en annulant tous les
termes en N et √N (plus de phase 2D) ce qui permettrait de décrire le mode
d’adsorption/désorption des régimes hautes températures, et d’autre part, en intégrant le
processus d’équilibre entre les espèces Sb1 et Sb4 pour rendre compte de la forme des
cinétiques dans le régime des températures intermédiaires.
Soulignons tout de même que si le mécanisme de condensation 2D ainsi imaginé
permet de retrouver les courbes cinétiques, d’autres processus pourraient peut-être permettre
d’aboutir au même résultat expérimental. On pourrait en particulier imaginer qu’une simple
adsorption en deuxième couche donne le même résultat. Les quelques essais de simulation
effectués dans ce sens ne nous ont cependant pas permis de restituer le palier correspondant à
l’état transitoire. Leur présence semble toutefois nécessaire pour simuler complètement les
courbes d’adsorption/désorption ( K1p ≠0 dans l’équation (18)).
Notons par ailleurs, qu’il nous faut distinguer le recouvrement critique θc auquel
apparaît la signature cinétique de l’état transitoire, du recouvrement d’équilibre θc eq pour
lequel la phase existe à l’équilibre. Compte tenu du nombre de paramètres ajustables nous
n’avons pas envisagé l’étude systématique de l’évolution avec la température des multiples
paramètres issus de la simulation. Nous pouvons cependant remarquer qu’il est possible
d’obtenir certaines conditions expérimentales pour lesquelles les deux paliers (état quasi-
stationnaire révélateur de la formation de la phase 2D et de l’état d’équilibre) coïncident, c’est
à dire pour lesquelles θc=θc eq. On trouve ainsi que la valeur minimale de θc est de
0.6±0.1MC.
CHAPITRE IV : Étude cinétique de l’adsorption et de la désorption 54
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 55

V-CARACTERISATION STRUCTURALE ET ATOMIQUE

V-A. Etat de l’art

Depuis deux décennies la surface (111) de Si en présence de Sb a fait l’objet de


nombreuses études. Dans la littérature l’antimoine adsorbé sur la surface Si(111) est qualifié
comme étant l’élément du groupe V ayant le comportement structural le plus complexe. Les
avis sur l’existence ou la coexistence de différentes surstructures ou sur les positions
atomiques de Sb sont très variés et parfois contradictoires. Le tableau ci-dessous retrace par
ordre chronologique quelques résultats référencés de la littérature.

Auteurs Techniques et Résultats


procédés
expérimentaux
Tabe et RHEED : Le cliché RHEED de la 7x7 de la surface propre se
Kajiyama.1983 observation en transforme en une 1x1.
[29] cours de dépôt
de Sb
Metzger et LEED : Pendant le premier stade de l’adsorption, la structure 7x7
Allen 1984 [4] observation en de la surface Si devient diffuse. Elle disparaît au profil de
cours de dépôt la 1x1 pour θ=1MC.
C. Park et al. LEED et XPS : Plusieurs surstructures générées en fonction de T et de θ :
1988 [15] analyse pendant diagramme T=f(θ) (figure V. 1).
la désorption
S. Andrieu Ellipsométrie et Les surstructures pendant l’adsorption sont différentes de
1991 [30] LEED : celles générées pendant la désorption : diagrammes de
analyse pendant phases T=f(θ) (figure V. 2).
l’adsorption et
la désorption
H. B. Elswijk STM et STS : Des modèles atomiques des différentes structures
et al. 1991 [21] après le dépôt à observées sont proposés :
une température • θ=1/10MC : Sb se substitue aux adatomes de la
donnée, les structure 7x7 de la surface de Si propre.
structures sont • θ=1/3MC : les atomes Sb adsorbés sur des site T4
figées et induisent des structures 7x7 distordues et
analysées. 3 x 3 − R30° .
• θ=1MC : des domaines 2x1 (chaînes en zigzag),
3x 3 (trimère de Sb) et 1x1 (en îlots) coexistent.
R. G. Ryland STM : La transition de la structure 7x7 en une 7x7-d (diffuse)
et al. observation à induit la formation d’îlots de Si. La formation de trous
1996 [31] RT après dépôt générés lors de la transition 7x7d- 3x 3 conduit à une
de Sb à 600°C interface rugueuse.
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 56

Y. Kusumi et STM : La séquence dynamique des différentes surstructures est


al. observation identifiée : ( 3x 3 →2x1→ 5 3 x5 3 →5x5).
1997 [32] pendant la
La résolution atomique de la 5 3 x5 3 est observée pour
désorption de la
monocouche de la première fois et un modèle est proposé.
Sb
V. Paliwal et AES, LEED et

5√3x5√3
al. EELS :

√3x√3
7x7 5x5 d(2x1) 1x1
2002 [16] désorption de la
monocouche
0,0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0 1,1
structurée 1x1
recouvrement

Un nouveau diagramme de phases est établi. En désorbant


la monocouche structurée 1x1, deux nouvelles phases
apparaissent : 5x5 à 0.5MC et la 5 3 x5 3 à 0.2MC.
S.M. XPS et LEED : La structure 7x7 de l’interface Sb-Si reste intacte jusqu’à
Shivaprasad et dépôt et analyse un recouvrement d’une monocouche de Sb. Elle se
al. 2004 [33] à température transforme par la suite en une 1x1.
ambiante.

On remarque à travers ce tableau l’évolution dans la compréhension du système


Sb/Si(111). Cependant, et malgré les diverses techniques utilisées, le comportement structural
du système demeure partiellement flou. La divergence des résultats est due au fait que la
plupart des auteurs utilisent des procédés qui conduisent à l’obtention de structures hors
équilibre.

C. Y. Park et al [15] sont les premiers à avoir observé par LEED les domaines
d’existence des structures Sb/Si en fonction du recouvrement de Sb et de la température du
substrat. La procédure utilisée est la suivante : après le dépôt de quelques monocouches (MC)
de Sb sur la surface propre de Si(111), le substrat est chauffé et les différentes structures
générées par la désorption sont enregistrées et forment le diagramme T=f(θ) illustré dans la
figure V.1.

Figure V.1 : Domaine d’existence


des surstructures de Sb en fonction
du recouvrement et de la
température de la surface de Si.
[15].
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 57

S. Andrieu [30] est allé plus loin, en distinguant les structures apparaissant pendant
l’adsorption puis pendant la désorption. Il montre que les surstructures générées pendant
l’adsorption sont différentes de celles observées pendant la désorption (du moins en ce qui
concerne la température et le recouvrement lors de leur apparition). Les deux diagrammes de
phases proposés (figures V.2) montrent que pendant l’adsorption la structure 5 3 x5 3 est
observée pour une température de substrat supérieure à 725 °C dans un petit domaine autour
de θ= 0.7MC alors que pendant la désorption celle ci est observée pour 0.5<θ<0.8 et
600°C<T<800°C. Les structures 3x 3 et 2x1 présentent aussi la même caractéristique.

Figure V.2 : Diagramme de phase pendant l’adsorption et la désorption de Sb sur Si(111) [30].

V-B. Identification structurale et caractérisation atomique

Dans le cadre de cette étude nous avons décidé de nous intéresser essentiellement aux
structures de Sb sur Si(111) dans des conditions d’équilibre thermodynamique. On pourrait
définir un diagramme d’équilibre (θ, T) comme l’intersection des diagrammes d’adsorption et
de désorption proposés par S. Andrieu. A ce stade de travail nous avons cependant tenté une
autre approche en identifiant d’abord les différentes phases à l’équilibre, en calculant ensuite
leurs sursaturations respectives pour finir enfin par la caractérisation de l’arrangement
atomique associé à chacune d’elles. A cette fin nous avons utilisé deux techniques.
La première technique est celle de la diffraction des électrons de haute énergie
(RHEED). Nous avons installé dans le bâti de thermodésorption un canon RHEED (voir
chapitre II). Celui-ci envoie sur la surface de Si, exposée ou non au flux d’antimoine, un
faisceau d’électrons monochromatique sous une incidence rasante de 1°. Les intensités
diffractées par la surface sont "collectées" sur un écran fluorescent. Cette technique nous
permet d’observer, en présence d’un flux de Sb donné, les différentes transitions structurales
et d’identifier la structure d’équilibre à température fixée. Les expériences précédentes de
Spectrométrie de Masse nous servent comme référence pour prévoir à flux et température
donnés le temps nécessaire pour établir l’équilibre du système. La netteté du cliché RHEED et
sa constance en cours de dépôt sont aussi des signatures de l’équilibre.
La deuxième technique est la microscopie par effet tunnel (STM). Elle nous permet
d’observer le réarrangement atomique des structures identifiées en équilibre. L’observation de
la formation des surstructures en temps réel est une tâche rendue difficile par les problèmes de
contamination de la pointe par l’antimoine (Sb est un agent très polluant à cause de sa très
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 58

forte pression de vapeur). De ce fait, nous avons procédé différemment, à savoir nous avons
commencé par déposer sur la surface chaude une quantité connue de Sb (dans des conditions
d’équilibre) sans la pointe STM, puis nous avons figé les structures de surface (en baissant de
façon brutale la température de l’échantillon). Nous avons ensuite vérifié par LEED que la
structure de surface obtenue correspondait bien à celle observée par RHEED dans les mêmes
conditions d’équilibre, et enfin nous avons imagé la surface.

Dans ce qui suit nous commençons par l’analyse de la structure de la surface propre de
Si(111). En ce qui concerne le Sb déposé sur la surface Si, n’ayant pas accès directement aux
valeurs du recouvrement, les différentes structures à l’équilibre (en cours de dépôt) sont
présentées sous forme d’un diagramme ∆µ. Chaque structure d’équilibre est ensuite analysée
en détail. Dans chaque cas nous présentons les clichés RHEED obtenus dans deux azimuts
différents selon que les électrons incidents sont selon les directions [21̅1] (azimut 0°) ou [10̅1]
(azimut 30°). Notons que le substrat Si utilisé est formé de larges terrasses de l’ordre de 100
nm.

V-B.1. Surface Si(111) propre

V-B.1.a. Observation de la 7x7

Depuis son observation en diffraction d’électrons lents (LEED) en 1959 [34], la


surface de silicium (111) reconstruite 7x7 a été beaucoup étudiée. La figure V.3 présente les
clichés RHEED obtenus sur une surface de Si(111) propre dans le domaine des températures
inférieures à 830 °C (température de transition 7x7→1x1) dans les deux azimuts 0° et 30°.

a) b)

Figure V.3 : a) Cliché RHEED de la reconstruction (7x7) de Si(111) obtenu selon l’azimut 0°. b) : Cliché RHEED
de la reconstruction (7x7) de Si(111) obtenu selon l’azimut 30°.

Selon les deux azimuts et en jouant sur l’incidence, on peut voir nettement les taches entières
(10, 00 et 10) de la 7x7, les six taches fractionnaires ainsi que les six zones de Laüe. Lorsque
les électrons sont envoyés selon la direction [21̅1] (azimut 0°), c’est la diagonale de la 7x7 qui
est sondée. Lorsqu’on fait une rotation de 30° (électrons selon la direction [10̅1]), on sonde le
côté de la 7x7. On vérifie sur nos clichés que la distance [̅10, 10] dans l’azimut 30° est √3 fois
plus grande que la distance [̅10, 10] dans l’azimut 0°.
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 59

Sur la figure V.4 sont représentées des reconstructions schématiques de la 7x7 et de la


cellule unité 1x1 déduites du cliché RHEED ainsi que les directions cristallographiques de la
surface de Si(111).

Figure V.4 : Représentation schématique des


reconstructions (1x1) et (7x7) de la surface du silicium
(111).
L’hexagone est le motif élémentaire de la bicouche (6
atomes de Si sur 2 couches).

V-B.1.b. Le modèle atomique DAS de la 7x7

En étudiant la reconstruction 7x7 de la surface Si(111) sous ultravide en diffraction


d’électrons par transmission (TED) [35], Takayanagi et al. ont proposé en 1985 un modèle
atomique nommé "Dimer-Adatom-Stacking-fault (DAS)", maintenant unanimement accepté
et en accord avec les premières images tunnel de la 7x7 obtenues par Binnig et al. [36]. Le
modèle DAS de la 7x7 (figure V.5.a) est caractérisé par 12 adatomes (atomes saturant les
liaisons pendantes de la première couche) arrangés en deux demi-cellules reconstruites 2x2, 6
"rest-atomes" (atomes de la première couche non saturés par un adatome) et 1 "corner-hole"
(lacune).

a) b)

Figure V.5 : a) Le modèle de Dimer-Adatom-Stacking-fault de la 7x7 [36]. b) Mesure des amplitudes atomiques
selon la direction [11̅2] : les pics correspondent aux positions des adatomes et des rest-atomes.
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 60

Cette reconstruction complexe contient 102 atomes :


• 48 atomes au dessus de la 1x1 du Si(111) (comprenant les dimères),
• 42 atomes ("rest-atomes" compris) dans la couche supérieure. Cette couche de 42 atomes,
due à une dimérisation en bord de cellule, correspond à une diminution du nombre
d’atomes par rapport à la 1x1 qui en contient 49 atomes,
• 12 adatomes.

Notons que les reconstructions de surface apparaissent de manière à minimiser l’énergie


libre de surface ; ainsi, la surface 7x7 apporte une réduction du nombre de liaisons pendantes
de 49 à 19 ce qui est énergiquement plus favorable (12 liaisons pendantes sur les adatomes, 6
sur les "rest-atomes" et 1 sur le "corner-hole").

Signalons de plus que la reconstruction 7x7 est dissymétrique. La couche d’atomes


notée a (première couche au dessus du plan 1x1 noté A) n’est pas parfaite et présente une
faute d’empilement. La figure V.5. a. (bas) décrit la séquence d’empilement Aac et Aab dans
les deux demi-cellules. Sur cette figure sont également représentées les distances entre les
adatomes et les "rest-atomes" mesurées à partir de nos images STM (Figure V.5. b).
Lorsqu’on effectue un profil selon la diagonale de la structure 7x7 (7√3 fois plus grande que
la cellule unité 1x1), on détecte bien la position haute des adatomes et la position basse des
"rest-atomes" (dédoublement des deux pics extrêmes).

V-B.1.c. Propriétés électronique de la 7x7

Les images STM de la 7x7 (figure V.6) dépendent fortement de la valeur de la


différence de potentiel V entre pointe et échantillon et de la polarité. En particulier, l’image de
gauche en polarité négative montre bien la dissymétrie de la cellule et les différents adatomes.
La demi-cellule contenant la faute d’empilement apparaît plus haute que l’autre, et le
contraste des adatomes proches des "corner-holes" est plus intense que celui des trois autres
adatomes. Ces contrastes sont absents sur l’image en polarité positive (image de droite).

a) b)

Figure V.6 : a) Surface Si(111) : structure de la 7x7 en polarité négative (-1.9V). b) Structure de la 7x7 en
polarité positive (1.9V).
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 61

R. J. Hamers et al. [37] ont expliqué ces observations en comparant leurs résultats en
spectroscopie tunnel (courbes It(V) : mesure locale de l’intensité du courant tunnel en
fonction de la tension) avec des résultats en photoémission UPS et IPS (Ultraviolet/Inverse
Photoemission Spectroscopy) [38].

Rest atome Adatome


Conductance tunnel I/V

Figure V.7 : Conductance I/V pour


divers points de la 7x7 : les points noirs
correspondent à la détection des "rest-
atomes" et les carrés vides correspondent
à la détection des adatomes [37].

2 -1.5 -1 -0.5 0 0.5 1 1.5 2


Energie relative à EF

La figure V. 7 montre bien qu’en polarité négative, la contribution au courant tunnel


est essentiellement due aux "rest-atomes" ; on est donc sensible au défaut d’empilement. Cette
dissymétrie est observée quelle que soit la tension en polarité négative, en dessous de -0,6 V.
Pour des tensions entre -0,15 V et -0,6 V, le courant tunnel provient essentiellement d’états
occupés près du niveau de Fermi situés sur les adatomes. C’est cet état de surface (lié aux
adatomes) qui est responsable du caractère métallique de la surface. En revanche, en polarité
positive, la contribution la plus importante provient des adatomes. Ils apparaissent de manière
uniforme sur l’image STM (figure V.6.b). Cependant, d’après la figure V.7 on remarque que
la dissymétrie peut être observée à partir d’une polarité de 1,4 V lorsque l’intensité due aux
"rest-atomes" est plus importante. Pour notre part nous n’avons pas observé de telle
dissymétrie jusqu'à une différence de potentiel en polarité positive de 2V.

V-B.2. Sb/Si(111) : Structures à l’équilibre thermodynamique

Afin de construire un vrai diagramme de phases d’équilibre, la surface propre de Si


maintenue à une température constante est exposée à un flux d’antimoine préalablement
étalonné. Pour suivre lentement l’évolution structurale de la surface nous avons choisi
d’utiliser un faible flux de l’ordre de 5.1011 atomes/s/cm2. Il se trouve alors que dans le
domaine de pression associé à ces flux (de l’ordre de 10-9 torr), l’antimoine se comporte
comme un gaz parfait. Il est alors possible d’associer à chaque flux d’équilibre
( P = J 2πmkT ) une sursaturation ∆µ = kT ln P où P∞ est la pression saturante de
P∞
l’antimoine dans un cristal 3D [39] (voir Appendice D). Nous pouvons ainsi tracer un
diagramme unidimensionnel dans lequel les structures 2D déterminées à l’équilibre par
RHEED sont associées aux différentes valeurs de ∆µ. Notons que nous avons exclu de l’étude
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 62

le domaine de température T<600°C où le phénomène d’adsorption est irréversible et


T>830°C où l’équilibre est très long (voire impossible) à atteindre.

Figure V.8 : Diagramme de phase


unidimensionnel : structures observées en
équilibre pendant le dépôt et ∆µ associées.

La figure V.8 représente trois diagrammes 1D (un pour chaque surstructure),


arbitrairement décalés verticalement. Le diagramme ainsi construit est extrêmement simple. Il
permet de remarquer que :
(1) à l’équilibre thermodynamique seules trois structures sont observées :
5√3x5√3R30° (notée5√3x5√3), √3x√3R30° (notée √3x√3) et la 2x1.
(2) toutes les phases 2D d’équilibre croissent à ∆µ<0, comme il se doit pour une
croissance de type Frank-Van der Merwe
(3) les structures √3x√3 et 2x1 coexistent dans un large domaine de ∆µ<0. Ceci est en
bon accord avec plusieurs résultats de la littérature notamment ceux de S. Andrieu [30].
(4) La structure 5√3x5√3 ne peut être formée que dans un domaine de sous-saturation
étroit.

V-B.2.a. Les structures √3x√3 et 2x1

Observation par RHEED

Soit la surface Si maintenue à une température constante de 650 °C. A cette


température les adatomes de Sb désorbent. Dès l’ouverture du flux et à l’azimut 0° on
remarque que la structure 7x7-Si commence à devenir diffuse (7x7d) et s’atténue
progressivement pour disparaître totalement après quelques secondes au profit de taches
entières d’une 1x1 diffuse (1x1d). Cette "structure" disparaît au bout de quelques minutes et
une structure de type √3x√3R30° s’établit. On observe un allongement des taches entières qui
s’accompagne de l’apparition de taches fractionnaires situées à ± 1/3 et ± 2/3 par rapport à la
tache entière (00) (voir figure V.9). La √3x√3R30° reste visible tout au long de la durée du
dépôt (structure d’équilibre). À la fermeture du flux, elle disparaît progressivement au profit
de la 1x1d puis de la 7x7 de la surface propre Si. Sur la figure V.9 est présentée la
reconstruction √3x√3 de surface pour T=650 °C selon l’azimut 0° et l’azimut 30°.
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 63

a) b)

Figure V.9 : Cliché de la (√3x√3) R30° obtenu après environ 2 min de dépôt. T= 650 °C et J= 1.81.1011
atomes/s/cm2. a) selon l’azimut 0°. b) selon l’azimut 30°.

La représentation schématique de la figure V.10 montre que lorsqu’on envoie les


électrons selon la direction [21̅1] (azimut 0°) on sonde le côté de la √3x√3 (nœuds
triangulaires). Par contre lorsqu’on envoie les électrons selon la direction [10̅1]) (azimut 30°),
on sonde une distance √3 fois plus grande, d’où la présence de taches fractionnaires situées à
±1/3 et ±2/3 de la réflexion spéculaire.

Figure V.10 : Représentation schématique des


reconstructions 7x7 (symboles ronds) et √3x√3-R30°
(symboles triangulaires) de la surface (111) du
silicium. La maille élémentaire 1x1 est présentée par
des symboles hexagonaux.

Il arrive souvent que les structures à l’équilibre consistent en une coexistence de la 2x1
et de la √3x√3, les clichés RHEED montrent une structure √3x√3 selon l’azimut 0° et une
structure 2x1 selon l’azimut 30°. La périodicité de la 2x1 se traduit par des taches entières
(10, 00 et 0̅1) et des fractionnaires ±1/2.

Réarrangement atomique

Il est possible d’imager le réarrangement atomique des structures d’équilibre en


effectuant des expériences par STM dans les mêmes conditions expérimentales que
précédemment. À cette fin un dépôt d’une monocouche est réalisé sur une surface maintenue
à une température de 650°C. L’alimentation de l’échantillon est ensuite brutalement coupée et
les reconstructions de la surface sont figées et imagées.
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 64

Figure V.11 : Image STM (V= -2.9V) de la surface pour un recouvrement voisin de la monocouche. Les flèches
en jaune montrent les structures 2x1. La figure in set montre la structure √3x√3.

La figure V. 11 montre que la surface correspond essentiellement à une structure


√3x√3. La structure 2x1 se traduit par des "bâtons" qui apparaissent selon les trois directions
symétriques de la surface, soit la [112̅ ] plus des rotations de 120°. Lorsqu’on enregistre un
profil sur chaque nœud de la structure √3x√3 on détecte trois pics. Le motif de la √3x√3 est
donc un trimère (figure V.12). La distance entre les pics est d’environ 3Å. Cette distance est
très proche de la distance entre premiers voisins dans le cristal d’antimoine (2.91 Å).

Figure V.12 : détection


des pics correspondant au
trimère : la distance entre
les pics est de 3Å

L’identification d’une √3x√3 à un réseau de trimères est supportée par plusieurs


résultats antérieurs. Des études théoriques [40] prédisent que les trimères de la colonne V
stabilisent les structures, des résultats de diffraction de photoélectrons [41] mettent en
évidence des trimères et les modèles de Elswijk et al. [21] présentent la structure √3x√3 sous
forme de trimères Sb et la structure 2x1 sous forme de chaîne en zigzag (figure V.13).
Rappelons cependant que l’analyse par SM nous a montré que la désorption sous forme de
trimère n’existe pas. Les trimères doivent donc se dissocier avant désorption.
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 65

Figure V.13.a : La structure √3x√3 de la monocouche Figure V.13.b : La reconstruction 2x2 est constitué
complète est constituée de trimères Sb. Chaque atome de de trois domaines de 2x1. Sur la Figure une seule
Sb possède deux liaisons avec deux Sb et une liaison avec configuration 2x1 est représentée, on obtient les
un atome Si du plan (111). Cette reconstruction deux autres par rotation de 120°. Dans cette
correspond ainsi à un ensemble de pseudo-molécules Sb3 reconstruction de chaîne en zigzag chaque atome de
centrées sur des sites T4 de la surface Si(111). La distance Sb possède trois liaisons : deux avec Sb et une avec
Sb-Sb est égale à 3.1 ± 0.2Å [21]. Si. [21].

V-B.2.b. Obtention de la structure 5√3x5√3

Observation par RHEED

Soit l’échantillon de Si maintenu à une température de 810 °C, au bout d’une dizaine
de secondes de dépôt (9.26.1011 atomes/s/cm2), et après les disparitions successives de la 7x7
et de la 1x1d, la structure de type 5√3x5√3 devient nettement visible. Cette structure est
observée dans les deux azimuts (figure V.14) : selon l’azimut 0°, les taches entières plus
quatre fractionnaires sont accompagnées de quinze zones de Laüe (seules douze sont visibles
dans le cliché présenté) et selon l’azimut 30°, les taches entières plus quatorze fractionnaires
sont accompagnées de cinq zones de Laüe. Après la fermeture de l’obturateur, la structure
5√3x5√3 s’atténue petit à petit. Au bout de 10 mn elle disparaît au profit de la 1x1d puis se
reconstruit en 7x7.

a) b)

Figure V.14 : Cliché obtenu après 1.30 mn de dépôt sur un substrat maintenu à T= 810 °C. a) reconstruction
(5√3x5√3) selon l’azimut 0°. b) reconstruction (5√3x5√3) selon l’azimut 30°.

On présente dans la figure V.15 les reconstructions de la surface de silicium (111) en cours de
croissance selon l’azimut 0° et l’azimut 30°.
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 66

[ ]
Quand on envoie les électrons selon la direction 211 (azimut 0°), on sonde le côté de la
(5√3x5√3) (nœuds étoilés) qui présente une distance cinq fois plus grande que la diagonale de
[ ]
la (1x1). Alors que si on envoie les électrons selon la direction 101 (azimut 30°), on sonde
une distance √3 fois plus grande que celle du côté de la (5√3x5√3).

Figure V. 15 : Représentation des reconstructions


(1x1), (7x7) et (5√3x5√3) de la surface (111) du
silicium.

Réarrangement atomique

Nos essais d’observation par STM de la surface dans les mêmes conditions de
température et flux n’ont pas été fructueux. La désorption instantanée des atomes de Sb dans
ce domaine de température (dépôt à T ≅ 800 °C) conduit à des surfaces très mal structurées.
Les seules images de la 5√3x5√3 qu’on a pu obtenir présentent donc des structures hors
équilibre avec un recouvrement de la surface inférieur à celui d’équilibre.

a) b)

4.3nm
Figure V. 16 : Surface Sb/Si(111) imagée (V= -2.9V) (a) après quelques minutes de dépôt de Sb à T=650°C. b)
après un dépôt de Sb d’une dizaine de minutes à T=750°C .

La figure V.16.a montre l’état de la surface après le dépôt de Sb pendant quelques


minutes à T= 650°C. On remarque sur la surface des domaines de la 1x2 et de la √3x√3. La
structure 5√3x5√3 est aussi présente sur cette figure et elle est caractérisée par des îlots
hexagonaux. La figure V.16.b montre la structure 5√3x5√3 après un dépôt à 750°C d’une
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 67

dizaine de minutes. Les hexagones de la structure 5√3x5√3 sont mal définis, ce qui est
probablement dû à la désorption de Sb.

La structure 5√3x5√3 est une structure très complexe. Le premier modèle a été
proposé en 1997 par K. H. Park et al. [42]. La structure de base est une "5x5 DAS" et la
cellule unité est formée de six régions triangulaires dont trois moitiés fautées (FH) et trois non
fautées (UH) (figure V. 17). Les trois (FH) ne comportent pas d’adatomes et les atomes de Sb
remplacent les "rest-atomes" de Si. Parmi les trois (UH) deux comportent chacune trois
adatomes (TAUH) et une a un seul adatome (SAUH). L’arrangement périodique de ces sous-
unités forme la structure 5√3x5√3.

(c)

Figure V.17 : (a,b) Le réarrangement atomique de la 5√3x5√3 vus par STM [44]. c) Modèle proposé par Park et
al. [42]. Les lignes en pointilles rouges indiquent la maille 5√3x5√3.

Si la structure de base de la 5√3x5√3 est communément admise, la composition


chimique, elle, est encore sujet à interrogations. K. H. Park et al. [42, 43] ont montré par des
études en STM et ensuite par calculs ab initio que la majorité des adatomes au dessus des (UH)
sont des atomes de Sb. Y. Kusumi et al. [32] les ont identifiés comme étant des atomes de Si.
Récemment, A. Saranin et al. reportent [44] que la structure 5√3x5√3 n’a pas de composition
stœchiométrique définie mais préserve sa structure de base dans un domaine relativement large
par la substitution des dimères de Si par des atomes Sb.

V-B.3. Structures hors d’équilibre : 7x7d et 1x1d

La 7x7 diffuse

Dès les premières secondes de dépôt et quelle que soit la température de l’échantillon
(T<830°C), la structure 7x7 de la surface propre devient diffuse. L’identification de
l’arrangement atomique de cette surstructure a été effectuée sur un échantillon maintenu à une
température de 480°C où on a réalisé un dépôt de 1/5MC (figure V.18).
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 68

Figure V.18 : Deux portions de la surface imagée après un dépôt de 1/5MC à 480°C. V=-2.88V

Sur cette figure on remarque qu’à faible recouvrement la structure 7x7 du substrat reste
visible bien que couverte de quelques îlots. Les taches brillantes supposées être des adatomes
de Sb ne forment pas de structure ordonnée. Elles se trouvent essentiellement autour des
"corner-holes" et sur la position des adatomes de la partie fautée de la structure DAS 7x7. Sur
la figure V.19 on a superposé à cette image la structure de la 7x7.

Figure V.19 : Image STM de la surface à 1/5


MC : structure de la 7x7 diffuse par rapport à
7x7 idéale : les atomes de Sb se trouvent en
majorité sur la partie fautée de la 7x7. Exemple
d’un îlot sur la surface entouré en bleu.

La surface imagée ci-dessus ressemble beaucoup à celles publiées et analysées par


plusieurs auteurs dans la littérature. En utilisant la méthode d’inversion de polarité, H. B.
Elswijik et al. [21], ont montré que pendant les premiers stades de l’adsorption les atomes Sb
se substituent à des adatomes de Si qui résident essentiellement dans les parties fautées de la
DAS 7x7. Les îlots observés sur la surface (cercle bleu sur la figure V.19), probablement à
l’origine de la structure diffuse donnée par la méthode de diffraction des électrons, peuvent
être formés soit par des atomes de Si qui ont diffusé suite à cette substitution soit par des
atomes de Sb.
R. G. Ryland et al [31] montrent, à partir de mesures qualitatives, le phénomène de
substitution ainsi que l’origine de la diffusion des atomes de Si dans la formation des îlots.
Selon eux, plus le recouvrement augmente, plus le nombre d’atomes Si diffusés augmente et
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 69

donc plus la surface se recouvre d’îlots de Si. La conversion de la 7x7 en une 7x7 diffuse
implique qu’un atome de Sb remplace un adatome de Si jusqu’à ce que tous les douze
adatomes des cellules unités 7x7 soient remplacés. La 7x7 diffuse doit donc être observée
jusqu’à un recouvrement de 0.245MC (12 adatomes/49 atomes de Si(111)). Les îlots étant
formés de bicouches de Si doivent donc couvrir 12% de la surface.
Pour identifier la nature chimique des îlots observés sur la surface, nous avons utilisé
l’effet de désorption de Sb. En fait, on a chauffé la surface à une température supérieure à la
température de désorption de Sb (T>600°C) et inférieure à la température de désorption de Si
(T<1100°C). La surface ainsi imagée comportait les mêmes îlots indiquant qu’ils sont
composés d’atomes de Si. La hauteur des îlots mesure à peu près 0.25 nm, ce qui correspond à
la hauteur d’une bicouche Si.

La 1x1 diffuse

A un recouvrement de quelques dixièmes de la monocouche sur un substrat maintenu


à 480°C, on a observé par LEED la même structure 1x1d que celle identifiée
systématiquement avant l’établissement de l’équilibre. La structure atomique de la surface
(figure V.20) montre qu’aucune structure ordonnée n’existe. La périodicité 7x7 du substrat est
à peine visible et les taches brillantes correspondant aux atomes Sb isolés semblent se mettre
autour des "corner-holes" et d’une façon complètement aléatoire sur la surface. La distance la
plus proche entre deux atomes est de 9Å.

Figure V.20 : Image STM de la surface après un


dépôt d’environ 1/3MC à T=480°C.

V-C. Conclusion

Les structures d’équilibre du système Sb/Si(111) identifiées dans le cadre de ce travail se


résument ainsi :

• La √3x√3 et la 2x1 coexistent dans le même domaine de sous-saturation. La structure


√3x√3 est formée de trimères de Sb centrés sur des sites T4. Chaque atome de Sb
forme deux liaisons avec ses voisins Sb et sature une liaison pendante de l’atome Si en
dessous. Les atomes de Sb dans la structure 2x1 sont liés de la même façon, mais
forment une configuration différente (chaîne en zigzag).
CHAPITRE V : Caractérisation structurale et atomique 70

• Dans un domaine étroit de la sous-saturation de la monocouche de Sb, la structure


5√3x5√3 peut être obtenue. Nous avons remarqué que cette structure s’établit au bout
de quelques minutes en adsorption et disparaît beaucoup plus lentement lors de la
désorption. Ceci peut être lié avec la formation de la phase bidimensionnelle mise en
évidence dans notre étude cinétique. Pour mémoire, dans le régime des moyennes et
hautes températures et pour des recouvrements supérieurs à 0.5MC, les paliers quasi-
stationnaires sur les courbes cinétiques sont étroits et proches du palier d’équilibre
pendant l’adsorption et larges et en position plus basse lors de la désorption. Le
réarrangement atomique de la structure 5√3x5√3 est complexe et demeure flou.

• Enfin notons pour terminer, que n’ayant eu accès au STM que pendant un mois, les
résultats restent partiels. D’autres expériences de STM doivent donc être effectuées si
possible dans des conditions d’équilibre thermodynamique. A l’issue de ces
expériences, des études complémentaires par STS afin de résoudre complètement les
problèmes posés par ce système devront être envisagées.
CHAPITRE VI : Étude thermodynamique 71

VI-ETUDE THERMODYNAMIQUE

Après l’étude cinétique et structurale nous nous intéressons maintenant à l’étude des
propriétés thermodynamiques du système Sb/Si(111). À cette fin nous établirons les
isothermes d’adsorption/désorption puis les interpréterons à partir d’une théorie de champ
moyen.

VI-A. Isothermes d’adsorption/désorption

La détermination du recouvrement θ et de la pression P (rappelons que P= J 2πmkT


où J est le flux à l’équilibre et m est la masse de Sb) à partir des courbes cinétiques (voir
chapitre III : figure 2) permet de tracer les isothermes θ=f(P) pour différentes températures du
substrat. Notons cependant que nous ne pouvons tracer un réseau d’isothermes que dans la
gamme de température 600°C<T<850°C, c’est-à-dire dans une gamme où il y a désorption de
Sb (T>600°C) et où il est possible, dans nos conditions expérimentales, d’équilibrer le flux
désorbé (T<850°C).
Compte tenu de la complexité du système dans le domaine des températures
intermédiaires où coexistent sur la surface les espèces Sb1 et Sb4, nous avons choisi de
construire le réseau d’isothermes dans le domaine de température 780°C<T<830°C, de façon
à n’avoir sur la surface que des espèces Sb1. Dans ces conditions les mécanismes
d’adsorption/désorption sont simples (voir chapitre IV) et toutes les espèces détectées par le
SM sont des monomères désorbés.
Forts de la constatation selon laquelle, à l’équilibre, le recouvrement des espèces
adsorbées est égal au recouvrement des espèces désorbées (aux erreurs expérimentales près),
nous pourrons exclure l’hypothèse d’une incorporation des atomes d’antimoine dans le
volume.

Nous présentons sur la figure VI.1.a le réseau d’isothermes obtenu pour


780°C<T<830°C. Chaque point expérimental correspond à la moyenne du taux de
recouvrement θ pour une pression P donnée et les barres d’erreurs reproduisent la dispersion
des résultats obtenus dans les mêmes conditions expérimentales de flux et de température.
On remarque que le recouvrement augmente de façon continue avec la pression de
vapeur de Sb jusqu'à la saturation de la monocouche. Par définition♦, θ=1 correspond à une
quantité d’atomes de Sb égale au nombre de sites de la surface Si(111) structurée 1x1 soit
7.85.1014 sites/cm2.


Ceci lève une polémique ancienne relevée par S. Andrieu [3]. La stœchiométrie à saturation est bien de θ=1MC, soit un atome de Sb pour
un atome de Si, et non pas 0.7MC comme le prétendaient certains auteurs [4, 28] travaillant dans des conditions thermodynamiques mal
définies.
CHAPITRE VI : Étude thermodynamique 72

a) b)

1 1

coverage
coverage

780°C 0.5 780°C


0.5
790°C 790°C
800°C 800°C
815°C 815°C
830°C 830°C

0 0
0 20 40 60 80 0 20 40 60 80
-8 -8
Pressure (10 Torr) Pressure (10 Torr)

Figure VI. 1 : Isothermes d’adsorption : a) points expérimentaux, b) ajustement des points expérimentaux avec
le modèle de Bragg-Williams

VI-A.1. Grandeurs énergétiques

La forme monotone continue des isothermes peut être caractéristique d’une adsorption
localisée sans interactions latérales (isothermes de Langmuir). De façon quantitative on peut
ajuster les points expérimentaux par un modèle de champ moyen de type Bragg-Williams. Ce
modèle, introduit dans le chapitre I, suppose que l’énergie φ (appelée par la suite énergie
d’adsorption) de chaque particule A d’antimoine adsorbée sur un site B de la surface de
silicium (tous les sites de la surface sont équivalents) s’écrit comme la somme de l’énergie
d’interaction verticale avec le substrat φAB et de l’énergie d’interaction latérale φAA dépendant
du nombre moyen de ses premiers voisins (ici Z = 6 compte tenu de la symétrie de la surface
Si(111)).
φ = φAB + zθφAA . (Chapitre I. équation 23) (1)

La pression d’équilibre s’écrit en fonction du recouvrement (Chapitre I. équation 24)

φ + zθφ AA
P = P0 θ exp( AB ) (2)
1−θ kT

Les points expérimentaux s’ajustent avec le modèle proposé (figure VI.1.b) pour des valeurs
de φAB = -2.95 eV ± 0.03 eV et de φAA = -0.02 eV ± 0.006 eV.

La valeur ainsi obtenue de φ est en complet accord avec la valeur obtenue en ajustant
les courbes cinétiques obtenues à haute température (-2.85 ± 0.1 eV). La valeur de φAA très
faible montre qu’il n’y a quasiment pas d’interactions latérales entre les adatomes de Sb. φ se
trouve donc quasi-indépendante du recouvrement, ce qui est la caractéristique principale des
isothermes de Langmuir.
CHAPITRE VI : Étude thermodynamique 73

VI-A.2. Grandeurs thermodynamiques

L’expression théorique du modèle des isothermes de Bragg-Williams se simplifie pour


θ = ½. La pression bidimensionnelle P2D définie à θ = ½ s’écrit alors :

∆H 2 D
P2 D = K 2 D exp(− ), (3)
kT
∆S2D
avec K 2D = exp( ).
k
K2D traduit le terme entropique de la sublimation de la phase 2D (∆S2D) et ∆H2D est son
enthalpie.
Pour chaque isotherme nous relevons P2D mesuré à θ = ½. Sur la figure VI.2 nous
traçons ln P2D en fonction de 1/T.

-8 ,0 ln P
-8 ,2
y= A + B x

-8 ,4
ln (P(pascal))

-8 ,6

-8 ,8
Figure VI. 2 : Graphe lnP2D=f(1/T).
-9 ,0 Points expérimentaux (points noirs)
-9 ,2
ajustement (trait rouge).
-9 ,4

-9 ,6
0 ,0 0 0 9 0 0 ,0 0 0 9 1 0 ,0 0 0 9 2 0 ,0 0 0 9 3 0 ,0 0 0 9 4 0 ,0 0 0 9 5
-1
1/T (K )

Nous obtenons une droite d’Arrhenius dont l’ordonnée à l’origine ln P2D=ln K2D donne la
valeur du terme entropique

ln K2D= 20.70 ± 2.55.

Soit K2D= 9.8.108 et l’entropie de sublimation ∆S2D= 1.78.10-3 eV.K-1.


ν
K2D, qui s’écrit aussi dans un modèle simple (voir chapitre I) K 2 D = 2
2πmkT où a2, pour
a
un gaz de réseau, est l’aire qu’occuperait un atome de Sb sur la surface Si(111). Connaissant
la valeur de la fréquence de vibration ν pour la gamme de température explorée (T≅ 1078K),
on trouve :

a2 = 2.28.10-19 m2 ≅ π(r0(Sb))2

Notons que dans ce modèle la variation de ν avec T reste inférieure à 10% dans la gamme de
température considérée.
A partir du graphe on peut relever aussi la valeur de l’enthalpie de sublimation

∆H2D= 2.94 ± 0.2 eV


CHAPITRE VI : Étude thermodynamique 74

VI-B. Contradiction entre résultats cinétiques et les résultats


thermodynamiques

Les résultats ainsi obtenus sont en complet accord avec certains résultats concernant le
comportement thermodynamique de l’antimoine sur la surface Si(111). En se basant sur des
expériences de thermodésorption par spectroscopie, Metzger et Allen [4] ont en effet montré
que la désorption de Sb est quasi-indépendante du recouvrement entre 0 et 1MC. S. Andrieu
en 1990 [45] rapporte également que l’adsorption de Sb sur Si(111) est de type Langmuir.
Néanmoins, l’allure des isothermes caractérisée par l’absence (ou presque) de toute
interaction latérale est en complète contradiction avec notre interprétation des courbes
cinétiques. Rappelons en effet que notre interprétation de l’observation d’un état quasi
stationnaire sur les courbes cinétiques d’adsorption et de désorption s’appuie sur l’existence
d’une condensation bidimensionnelle de surface. L’apparition d’une telle phase dense ne peut
avoir lieu que s’il existe une interaction attractive significative entre les atomes de Sb et se
traduit normalement par un saut (transition de premier ordre) sur les isothermes d’adsorption
(voir chapitre I). Ce phénomène n’est cependant pas visible sur le réseau d’isothermes
enregistré ! Trois hypothèses sont possibles pour expliquer cette contradiction. Soit les barres
d’erreur, importantes, relevées sur les isothermes "cachent" une petite marche, soit la
transition de phase est partiellement masquée par un mécanismes d’adsorption/désorption
particulier et à imaginer, soit enfin l’interprétation de nos courbes cinétiques n’est pas bonne.
Les deux premières raisons nous ont encouragés à regarder d’un peu plus près nos isothermes.
En particulier il est aisé de voir (malgré les barres d’erreur) que les isothermes calculés à
partir de l’ajustement précédent s’écartent des points expérimentaux pour des fortes valeurs
de θ. Plus exactement, alors que pour les faibles recouvrements, le modèle de champ moyen
reproduit bien les points expérimentaux, pour de fortes valeurs de θ le meilleur ajustement
passe par l’extrémité inférieure des barres d’erreur. Ainsi malgré le fait que le meilleur
ajustement passe par toutes les barres d’erreur on peut suspecter un comportement différent à
bas et haut θ.
Cette différence de comportement peut être mise en évidence plus clairement en dérivant les
valeurs de l’énergie d’adsorption φ à partir de l’expression 2 et en traçant à partir des valeurs
de φ de chaque point expérimental θ=f(P) le diagramme φ=f(θ).

φ = kT (ln P − ln θ ) . (3)
P0 1−θ

A fort recouvrement la figure VI.3.a. met en évidence un écart entre les points ainsi obtenus et
la variation de type quasi-Langmuir♦ de l’énergie d’adsorption φ = φAB + zθφAA avec φAB = -
2.95 eV et φAA = -0.02 eV.


Stricto sensu l’existence d’un terme zθφAA ne permet pas de considérer l’isotherme comme une isotherme de Langmuir. Cependant,
compte tenu de la faible valeur zθφAA (variant entre 0 et 0.1eV pour θ variant entre 0 et 1MC) nous qualifierons cette isotherme de quasi-
Langmuir.
CHAPITRE VI : Étude thermodynamique 75

-2.9 -2.9

-3.0 -3.0
∆Ε (eV)

∆Ε (eV)
-3.1 -3.1

-3.2 -3.2

-3.3 -3.3
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 0.2 0.4 0.6 0.8 1
0
Coverage Coverage

Figure VI.3.a : Variation de l’énergie d’adsorption Figure VI.3.b : Variation de l’énergie d’adsorption
avec le recouvrement (points noir) comparée avec la avec le recouvrement (points noir) décrites par deux
valeur issue de l’ajustement de l’ensemble des données régimes (traits pleins rouges).
expérimentales avec le modèle de Bragg-Williams
(trait pointillé).

Sur cette figure, et indépendamment des barres d’erreurs, on remarque que si l’énergie
d’adsorption augmente (en valeur absolue) avec le recouvrement, sa variation peut être mieux
décrite en distinguant deux régimes d’adsorption (figure VI.3.b). Un premier régime (i), à bas
recouvrement θ ≤ 0.7MC pour lequel l’énergie d’adsorption est une constante indépendante
du recouvrement et un deuxième régime (ii) pour 0.7≤ θ ≤1MC, où l’énergie d’adsorption
augmente en valeur absolue avec le recouvrement [46].

(i) θ ≤ 0.7MC : φAB’ = -3.00 eV et φAA’ = 0 eV


(ii) θ ≥ 0.7MC : φAB’’ = -2.65 eV et φAA’’ = -0.08 eV

La valeur constante de l’énergie d’adsorption à bas recouvrement (régime (i)) correspond


cette fois-ci à un vrai comportement de type Langmuir (c’est-à-dire sans aucune interaction
latérale). Ce comportement peut être relié à l’absence de structures 2D d’équilibre pour les
faibles recouvrements. Le deuxième régime met en évidence une interaction attractive entre
atomes d’antimoine compatible avec la formation de phases 2D denses pour θ ≥ 0.7MC.
La séparation en deux domaines d’adsorption suggère donc fortement que se forme en
début d’adsorption un gaz 2D de Sb qui, au delà d’un certain recouvrement critique, se
transforme en une phase dense. Ceci est en accord qualitatif avec notre interprétation des
données cinétiques.

VI-C. Analyse des résultats

Rappelons maintenant que pour les systèmes caractérisés par une condensation
bidimensionnelle sur la surface d’une phase 2D, la dérivée dθ/dP de l’isotherme devient
infinie pour la température critique Tc = Tccm ( Tccm = -ZφAA’’/4k en champ moyen), au delà de
laquelle le gaz se comporte comme un fluide supercritique.
Connaissant la valeur de l’interaction φAA’’, on déduit Tccm =1177 °C. Pour obtenir la
température critique exacte, il faut corriger Tccm par un facteur correctif Tccm = α Tc qui pour
CHAPITRE VI : Étude thermodynamique 76

le réseau hexagonal vaut α =5/3 [47]. La température critique du système Sb/Si(111) est égale
à : Tc ≅ 600°C.

Ainsi d’un point de vue thermodynamique nos isothermes sont dans le domaine
supercritique où le recouvrement de la surface augmente de manière continue avec la pression
malgré la formation possible d’une phase condensée sur la surface. Nous reviendrons sur ce
point dans la conclusion générale.

On trace maintenant l’isotherme théorique pour T= 800°C obtenue à partir des valeurs
de l’ajustement précédent (les deux régimes (i) et (ii)). On superpose cette isotherme♦ à
l’isotherme expérimentale obtenue à T=800°C. Sur le graphe de la figure VI.4 on peut voir
que l’isotherme théorique obtenue par ajustement avec les deux régimes (i) et (ii) décrit mieux
l’expérience que celle obtenue par un seul régime (quasi-Langmuir). Ceci veut
vraisemblablement dire que l’énergie d’adsorption de la phase diluée (θ≤ 0.7MC) est
différente de celle de la phase dense (θ≥ 0.7MC).

0 .8
Recouvrement

0 .6
Figure VI.4 : isotherme issue du modèle
de Bragg Williams (trait en pointillé
0 .4 bleu), isotherme calculé à partir des deux
régimes (i) et (ii) (trait plein rouge) et
0 .2 M o d è le a v e c d e u x ré g im e s isotherme expérimentale à 800°C (points
M o d è le q u a i-L a n g m u ir noirs)
E x p e rie n c e à 8 0 0 °C

2 4 6 8

K *P /P 0 (10 -14 )

Nous avons au chapitre V étudié les structures d’équilibre du système. Nous avons
notamment donné un diagramme de phase unidimensionnel (figure V. 8) où les structures
d’équilibre sont données en fonction de la sous-saturation ∆µ = kT ln P . Il est maintenant
P∞
tentant, via nos connaissances expérimentales des isothermes et donc de la relation θ (P), de
transformer ce diagramme 1D en un vrai diagramme de phase θ (T). Cependant compte tenu
d’une part de l’inadéquation partielle du modèle de champ moyen utilisé (présence évidente
de deux régimes) et d’autre part des barres d’erreurs assez élevées (notamment sur la valeur
de K2D) il est quasiment impossible de retrouver un diagramme θ (T) cohérent (Plus
précisément, on peut à peu près trouver ce que l’on veut). Ainsi, l’idée du diagramme de
phase a été abandonnée mais une analyse plus généralieste, faisant apparaître le lien entre les
cinétiques d’adsorption/désorption et l’apparition des différentes structures, sera proposée
dans la conclusion générale de la partie expérimentale.


Compte tenu de la surestimation de la température critique calculée par le modèle théorique, les isothermes sont recalculées en introduisant
un facteur correctif, soit T / T cm = T / T =1.23. Notons que pour la même raison la pression (axe des abscisses) à été décalée d’un
c ( 800 ° C ) c

facteur (α −1 )φ .
K = exp( AB
)
kT
CHAPITRE VI : Étude thermodynamique 77

VI-D. Que nous apprennent les Spectres de thermodésorption ?

Le principe des expériences de thermodésorption consiste à déposer l’antimoine à une


température où il y a condensation totale. Après avoir coupé le flux, l’échantillon de Si est
soumis à une rampe linéaire de température pendant laquelle les espèces Sb désorbent. Le
spectre I(t) ainsi enregistré est composé de pics. La position d’un pic est une image de
l’énergie de liaison. S’il existe plusieurs états de liaisons à la surface dont les énergies sont
suffisamment éloignées les unes des autres, on peut observer plusieurs pics distincts.
Metzger et Allen [4] ont conduit une série d’expériences de thermodésorption
Sb/Si(111) pour différents recouvrement initiaux allant de 0.05 à 1 MC. Ils ont ainsi montré
que l’énergie de désorption ne dépend pas du recouvrement. Par ajustement des pics de
désorption par des expressions théoriques, ils ont également pu obtenir les valeurs de
l’énergie d’adsorption et de la fréquence de vibration. Nous reportons dans le tableau suivant
(tableau VI.1) leur valeurs obtenues de φ et ν ainsi que celles relevées par d’autres auteurs.
Notons que compte tenu des méthodes utilisées parfois indirectes nous accordons un crédit
plus important aux valeurs de S. Andrieu [30] et de ce présent travail en raison des conditions
d’équilibre thermodynamique.

Auteurs φ (ev/atome) ν (s-1)


Metzeger et al. [4] -2.46 ± 0.1 1.5 109
S. Andrieu [30] -2.65 ± 0.15 4.1011
M. Ladevèze et al. [2] -2.7 ± 0.05 (4.1011)♦ -
P. Müller et al. [5] -2.9 ± 0.1eV et -3.0 ± 0.1eV -♦♦-
(voir ci dessous)
Ce travail (ajustement courbes -2.85 ± 0.1 1.62.1012
cinétiques de haute température)
Tableau VI.1 : Valeurs de l’énergie d’adsorption φ et la fréquence de vibration ν rapportées par plusieurs
auteurs.

P. Müller et al [5] ont également effectué des expériences de thermodésorption. Les


spectres de désorption qu’ils rapportent sur la surface nominale Si(111) obtenus après la
désorption de 0.7MC et 1MC de Sb sont reportés sur la figure VI.5.


Pour calculer la valeur de l’énergie d’adsorption M. Ladevèze et al [2] ont utilisé la valeur de la fréquence de vibration relevée par S.
Andrieu [3].
♦♦
La méthode de vidage fractionné ne fait pas appel au paramètre dépendant de la fréquence de vibration
CHAPITRE VI : Étude thermodynamique 78

a) b)

Figure VI.5 : Spectres de thermodésorption par spectrométrie de masse obtenus en désorbant 0.7MC (a) et
1MC (b) d’antimoine déposées à température ambiante sur la surface plane de Si(111). Les petits spectres (x10)
correspondent à la désorption de Sb2. les deux spectres sont enregistrés dans les mêmes conditions
expérimentales [5].

A faible recouvrement (θ≤ 0.7MC) le spectre de thermodésorption est formé d’un pic γ centré
autour de 775 °C. A fort recouvrement (θ=1MC) le pic se dédouble en deux composantes γ’ et
γ’’. Notons que le dédoublement commence à apparaître sur le pic γ puis devient nettement
visible pour θ=1MC.
Nous reportons sur la figure VI.6 l’évolution du pic γ en fonction du recouvrement ainsi que
sa transformation en deux pics γ’ et γ’’ à partir de θ=0.7MC. Notons que les spectres
représentés ont été obtenus sur une surface vicinale, mais les résultats sont qualitativement les
mêmes pour une surface nominale.

Figure VI.6 : Dépendance des


intensités des pics γ’et γ’’ en fonction
du recouvrement. Ces résultas
concernent la surface vicinale [5]

Il apparaît ainsi clairement que deux régimes de désorption coexistent dès que le
recouvrement est supérieur à un recouvrement critique θc=0.7MC. Les énergies d’adsorption
CHAPITRE VI : Étude thermodynamique 79

correspondant aux pics γ’ et γ’’ ont été mesurées par la méthode du vidage fractionné et sont
reportées dans le tableau VI.2.

Pic γ’ (T=740°C) -2.9 ± 0.1eV Pic γ’’ (T=775°C) -3 ± 0.1eV

Tableau VI.2 : Valeurs de l’énergie d’adsorption φ pour les pics γ’ et γ’’ extraites du spectre de
thermodésorption à θ = 1MC [5]

Il est tentant de relier l’apparition d’un nouveau régime de désorption au changement de pente
observé sur la figure VI.3.b. Quelques réserves viennent cependant limiter la portée de ce
résultat :

• Le simple changement de pente φ=f(θ) devrait donner un simple déplacement


d’environ 0.1 eV du pic γ et non pas son dédoublement (avec cependant γ’ et γ’’
séparés de 0.1eV !).
• Les spectres de désorption, enregistrés sur le canal 2 du SM et centrés sur les dimères
Sb2, montrent clairement que le spectre ISb2 se décompose lui aussi en deux pics γ’ et
γ’’. L’évolution de Iγ’/Iγ’’ avec θ est difficile à comprendre. Il en résulterait qu’une
partie des espèces désorbées le soit sous forme de Sb2, une autre sous forme de Sb1 et
que ce rapport évolue avec le taux de recouvrement. Dans tous les cas cependant, le
nombre de molécule Sb2 qui désorbent reste faible par rapport au nombre de
monomères Sb1 (le rapport ISb2/ISb1 varie d’environ 1/50 à 1/15 pour les
recouvrements entre 0.7MC et 1MC).
• Soulignons à ce niveau qu’il ne nous est pas possible d’exclure qu’une partie au moins
du pic γ’’ ait pour origine la désorption, sous forme de dimères Sb2, d’espèces
adsorbées en deuxième couche.
CHAPITRE VI : Étude thermodynamique 80
Conclusions générales sur la partie expérimentale 81

CONCLUSIONS GENERALES SUR LA PARTIE EXPERIMENTALE

Nous souhaitons à ce niveau de la rédaction dégager les acquis et les questions


soulevés par l’ensemble de nos expériences.

Les acquis expérimentaux

Nous distinguerons plusieurs types de résultats :

• i) Influence de l’état de surface sur la nature des espèces :


Notre étude par SM nous a permis de montrer que la nature des espèces présentes sur la
surface dépend de l’état de la surface. Pour une surface nominale et dans le domaine de la
monocouche, seuls des monomères Sb sont adsorbés♣.

• ii) Mise en évidence de trois types de comportements en fonction de la température :


Nous avons mis en évidence trois domaines de température où les mécanismes
d’adsorption/désorption sont différents :
1. Pour T< 600°C, les tétramères Sb4 incidents sont physisorbés, dissociés puis
chimisorbés sous forme de monomères Sb1. Le coefficient de collage varie
avec le recouvrement de la monocouche de sorte que tout tétramère arrivant
sur un site occupé est simplement réfléchi.
2. Pour T> 800°C, les tétramères Sb4 sont dissociés dès leur arrivée sur la
surface. On a donc une chimisorption sans précurseurs.
3. Dans le domaine de température intermédiaire 600°C< T < 800°C on assiste à
une compétition entre les deux mécanismes.

• iii) Description des courbes cinétiques :


Dans les trois domaines de température prédéfinis, nous avons pu proposer un modèle
analytique permettant de décrire les mécanismes d’adsorption/désorption.
1. À basse température cela nous a conduit à nous interroger sur l’évolution du
coefficient de collage avec le recouvrement. Nous avons aussi montré qu’il
n’existe pas de désorption de l’espèce Sb4.
2. À haute température cela nous a permis, à partir d’un modèle simple analogue
à la charge/décharge d’un condensateur, de déterminer les paramètres
énergétiques décrivant l’adsorption/désorption.
3. Dans le domaine de température et de recouvrement où apparaît un état quasi-
stationnaire, nous avons pu simuler les courbes cinétiques en considérant que,
à partir d’un recouvrement critique (θc eq> 0.7MC), se forme une phase 2D
dense par condensation d’un gaz dilué d’adatomes. Cette phase est
vraisemblablement à mettre en relation avec l’apparition de la structure
5√3x5√3. Notons cependant que nous avons été conduits, pour rendre compte
des résultats expérimentaux, à considérer que certains adatomes (moins d’un
dixième de monocouche) pouvaient se mettre en deuxième couche.


Notons cependant que pour des forts flux quelques tétramères Sb4 semblent se désorber et/ou être réfléchis.
Conclusions générales sur la partie expérimentale 82

• iv) Mise en évidence des phases d’équilibre :


Généralement ont trouve dans la littérature des diagrammes de phases
"bidimensionnelles" hors équilibre ! Nous avons donc pris soin de déterminer un
diagramme de phase dans des conditions d’équilibre thermodynamique. Le diagramme de
phases unidimensionnel en fonction de ∆µ ainsi construit contient un faible nombre de
phase. Plus précisément seules les structures √3x√3, 2x1 et 5√3x5√3 existent à l’équilibre,
les phases rapportées par ailleurs étant donc des phases hors équilibre : (5√3x5√3 pour
θ=0.2MC [48], √3x√3 pour θ=0.3MC [21], 5x5 pour θ=0.41MC, 7√3x7√3 à 0.5MC [49]
etc…).

Par ailleurs nous avons pu faire un lien entre les cinétiques d’adsorption/désorption et
l’apparition/disparition des différentes structures. Les résultats sont synthétisés dans le
récapitulatif suivant :

A faible température T<600°C : saturation de la À forte température (T> 800°C) et faible


monocouche. recouvrement.

Apparition de la phase 2D T> 750°C et θceq> 0.7MC.

Nous avons essayé d’étudier par STM l’arrangement atomique de chacune des phases.
Malheureusement, faute de temps, cette étude partielle et très incomplète mérite d’être reprise.
Nous pensons notamment à des études par STM sous flux.
Conclusions générales sur la partie expérimentale 83

• v) Propriétés d’équilibre de Sb/Si : la construction d’un réseau d’isothermes nous a


permis de mettre en évidence les résultats suivants :
1. Dans le domaine de température considéré, la complétion de la monocouche
Sb/Si(111) est de 1MC, c’est-à-dire un atome de Si pour un atome de Sb.
2. Les isothermes se comportent à première vue comme des isothermes de
Langmuir. Plus précisément, compte tenu de la faible valeur de l’énergie
latérale entre les atomes Sb, nous avons qualifié ces isothermes de quasi-
Langmuir.
3. Malgré les barres d’erreurs expérimentales, les isothermes semblent cependant
être mieux décrites en considérant qu’il existe deux régimes d’adsorption : le
premier, à bas recouvrement (θ< 0.7MC), où les isothermes révèlent un vrai
comportement de type Langmuir (φ = -3.00 eV) ; le second régime à haut
recouvrement (θ> 0.7MC), où l’énergie d’adsorption varie linéairement avec le
recouvrement. Il apparaît ainsi autour de θ =0.7MC une transition entre une
adsorption sans interaction latérale et une adsorption avec interaction latérale
attractive.

Un élément commun à tous nos résultats ressort clairement. Autour de θ=0.7MC existe :

9 Une signature cinétique spécifique à la formation d’une phase dense (palier quasi-
stationnaire)
9 La structure cristallographique 5√3x5√3.
9 Une interaction attractive entre les atomes de Sb.
9 Le dédoublement du pic de thermodésorption γ en γ’ et γ’’ [5].

Les questions soulevées par ce travail

Au-delà des petites questions de détail, deux interrogations demeurent essentielles à


nos yeux :

ƒ i) Les barres d’erreur expérimentales obtenues sur les isothermes sont bien plus
importantes que celles que nous avons relevées pour d’autres systèmes étudiés avec le
même appareillage. Quelle est l’origine de cette incertitude ? Est-elle liée à la présence
possible d’espèces Sb4 réfléchies à haute température et à fort flux comme le laisse
suggérer la figure III.6 et la présence des pics γ’ et γ’’ sur les spectres de
thermodésorption ? Ces barres d’erreur sont-elles susceptibles de masquer
l’observation de la transition 2D sur les isothermes ou sommes-nous plutôt en
présence d’un mécanisme particulier permettant à la fois une condensation 2D et une
isotherme de Langmuir ?

En tout état de cause, en ce qui concerne les barres d’erreur, une réponse pourrait peut-être
être apportée par une étude des isothermes d’adsorption/désorption dans des conditions
expérimentales permettant de distinguer les différentes espèces ( n-mères) impliquées dans le
mécanisme. Mais fondamentalement, l’origine de telles incertitudes reste pour nous
mystérieuse.
Conclusions générales sur la partie expérimentale 84

ƒ ii) Quelle est l’origine de l’apparent changement de régime d’adsorption autour de θ


=0.7MC, en d’autres termes, par quel mécanisme passe-t-on d’une adsorption sans
interaction latérale à une adsorption avec interaction attractive ?

Une réponse à cette question peut éventuellement être obtenue par une étude atomistique et
électronique des mécanismes d’adsorption/désorption. C’est l’objet de la partie théorique qui
suit.
CHAPITRE VII : Étude théorique 85

VII-ETUDE THEORIQUE

L’étude expérimentale qui précède a clairement mis en évidence deux phénomènes à


l’interprétation à priori contradictoire. Ainsi, l’étude cinétique suggère qu’au delà du
recouvrement critique θ = 0.7MC, une phase 2D dense se forme par condensation d’un gaz
dilué d’adatomes, alors que la construction du réseau d’isothermes met en évidence un
comportement de type Langmuir, donc un régime d’interactions entre adatomes négligeables
peu cohérent avec la formation de cette phase. Il a été possible de lever partiellement cette
contradiction en remarquant que, malgré les barres d’erreurs expérimentales, les isothermes
sont mieux décrites en supposant qu’il existe deux régimes d’adsorption : le premier
(θ< 0.7MC) où l’énergie d’adsorption ne dépend (quasiment) pas du recouvrement
(Langmuir) et le second (θ> 0.7MC), où elle en dépend de façon linéaire. Il apparaît ainsi
autour de θ = 0.7MC une transition entre une adsorption sans interactions latérales et une
adsorption avec interactions latérales attractives. Mais encore faut-il comprendre quelle peut
bien être l’origine d’un tel changement de régime, en d’autres termes, par quel mécanisme
passe-t-on d’une adsorption sans interaction latérale à une adsorption avec interactions
attractives.
C’est à cette question que peut répondre une modélisation atomistique des mécanismes
d’adsorption/désorption. Une telle modélisation nécessite la mise en œuvre de techniques
permettant de décrire (prévoir) les structures atomique (morphologie) et chimique (ordre), à la
fois à l’équilibre et en dehors de celui-ci (évolution cinétique). Il faut donc mettre en œuvre
des algorithmes de simulations permettant de déplacer et/ou échanger des atomes qui
interagissent les uns avec les autres via un potentiel déterminé de façon aussi réaliste que
possible. D’où les deux types d’outils utilisés que nous allons décrire ci-dessous : méthodes
de mécaniques statistique puis de structure électronique (potentiels interatomiques).

VII-A. Simulation numérique

C’est dans le registre de la physique statistique qu’on trouve les techniques de


simulation numérique à l’échelle atomique qui permettent de déterminer les propriétés
physiques d’un système de particules en interaction. Qu’il s’agisse de méthodes sur réseau
rigide (champ moyen, Monte Carlo) lorsqu’on ne se préoccupe que d’ordre chimique (entre
deux espèces, voire une espèce et des lacunes dans le cas de l’adsorption) ou hors réseau dans
lesquelles on relaxe les positions atomiques (dynamique moléculaire) pour caractériser les
structures d’équilibre d’un système ainsi que son évolution.

VII-A.1. Les méthodes sur réseau rigide (champ moyen, Monte Carlo)

Si l’on se préoccupe principalement d’ordre entre atomes d’espèce différente ou entre


adatomes et lacunes sur un substrat, il est suffisant de supposer que ces atomes (lacunes)
occupent des sites définis d’un réseau rigide (structure cristallographique, maillage). Les
méthodes statistiques permettant de définir la configuration d’un tel système à l’équilibre ou
lors de son évolution vers l’équilibre sont alors plus ou moins complexes selon le degré
d’approximation choisi pour décrire l’ordre entre les particules. Au plus bas ordre, on trouve
la méthode de champ moyen dite "à un site" (du type Bragg Williams, introduit d’une façon
CHAPITRE VII : Étude théorique 86

généralisée dans le chapitre I), dans laquelle l’occupation du site dépend uniquement de la
probabilité (concentration, recouvrement) de l’espèce concernée, sans se préoccuper de son
environnement. On peut ainsi rendre compte de l’ordre à longue distance mais on néglige tout
ordre local, l’interaction d’un atome avec les autres étant remplacée par ce qu’on appelle un
champ moyen, le plus souvent déterminé de façon autocohérente ou par minimisation de
l’énergie libre du système. Si l’on veut prendre en compte ces effets d’environnement local
(microstructure) sur la cinétique et la thermodynamique du système, on peut faire appel à des
approximations de champ moyen à plusieurs sites (CVM), voire à des simulations "exactes"
de type Monte Carlo.
Ces dernières décrivent l’évolution du système de manière stochastique dans un
espace échantillonné constitué de tous les états possibles. Plus précisément, rappelons que
pour un système dynamique à température constante tout observable physique, outre ceux
moyennés dans le temps, peut s’écrire comme une moyenne d’ensemble sur toutes les valeurs
possibles des coordonnées (ri, i=1, 2,..,N).

<M > = ∫ dr1 ...∫ drN M(r1 .....rN ) exp( − β E pot (r1 ....,rN )) / Z , (1)

où le terme exponentiel comprend le terme de Boltzmann (β=1/kBT) et l’énergie potentielle


du système. Z est la fonction de partition.
Pour les valeurs d’énergie potentielle élevée le terme en exponentielle contribue peu à
cette moyenne. Le nombre d’états étant très grand seule une partie limitée contribue de façon
significative à l’expression (1). L’idée centrale est donc de ne garder que les configurations de
plus basse énergie. A cette fin l’espace est échantillonné autour de la région où les intégrants
de l’équation (1) ont un poids substantiel grâce à une méthode sélective. Un algorithme
particulièrement efficace pour échantillonner l’espace selon une distribution de Boltzmann est
celui proposé par Métropolis et al. [50]. Celui-ci part d’une configuration initiale d’énergie
E0, que l’on modifie de façon infinitésimale de façon à obtenir une configuration voisine
d’énergie E’, que l’on accepte systématiquement si E’< E0, et selon une probabilité exp -(E’-
E0)/kT sinon. On itère ensuite la procédure jusqu’à ce que le système fluctue régulièrement
autour de son équilibre. Les observables sont alors obtenus en prenant la moyenne de ces
valeurs instantanées.
Dans ce travail, ces méthodes peuvent être utilisées pour décrire les isothermes
d’équilibre d’adsorption. On a déjà eu l’illustration dans le chapitre expérimental de la façon
dont la méthode de champ moyen (Bragg-Williams) appliquée à un modèle énergétique en
interactions de paires (Ising) conduit à des isothermes de Langmuir ou de Fowler selon la
valeur du paramètre d’interaction. L’utilisation d’un Monte Carlo adatome-lacune nous
permettrait de mettre en évidence l’effet de microstructures (phase 2D) sur ces isothermes.
Notons que ces méthodes ne sont pas limitées à des modèles énergétiques en interaction de
paires, même si c’est essentiellement l’usage que nous en ferons ici.

VII-A.2. Les méthodes de relaxation (dynamique moléculaire)

Basée sur les équations de Newton, la dynamique moléculaire permet de suivre la


trajectoire temporelle d’une collection d’atomes de position ri en intégrant la relation
fondamentale de la dynamique :
d 2 ri
Fi = m , (2)
dt 2
où Fi est la force s’exerçant sur l’atome d’indice i.
CHAPITRE VII : Étude théorique 87

Cet algorithme d’intégration de l’équation de Newton (2) permet de suivre la dynamique


(position atomique à chaque instant t) d’un système constitué de N atomes, à partir de la
connaissance de leurs conditions initiales (positions et vitesses).

VII-B. Détermination des potentiels d’interaction

Nous venons de voir que toutes les simulations, décrites brièvement ici, requièrent la
connaissance de l’énergie du système. La définition d’un potentiel interatomique réaliste est
donc l’ingrédient nécessaire à toute simulation numérique. Il existe en théorie plusieurs
modèles qui traitent de manière plus ou moins approchée l’énergie potentielle entre atomes,
depuis les méthodes complètement empiriques (par exemple de type Lennard-Jones), où
l’énergie potentielle d’un système est calculée comme la somme sur toutes les paires des
interactions entre atomes définie en fonction de la distance qui les séparent, en passant par des
potentiels empiriques à N corps, puis à des descriptions plus précises mais paramétrées de la
structure électronique (en Liaisons Fortes par exemple), jusqu’à sa description par des
méthodes ab-initio qui ne requièrent aucun paramètre empirique.
L’étude théorique du processus de l’adsorption de l’antimoine sur une surface (111) du
silicium nécessite de choisir l’un ou l’autre de ces niveaux d’approximation. Il convient
toutefois de remarquer que les méthodes semi-empiriques (paires, N corps) ont généralement
été développées d’une façon spécifique pour un seul type de liaison chimique (gaz rare,
ionique, covalent, métallique) et qu’il existe peu de façon de dériver une forme analytique de
potentiel dans les cas mixtes du type métal/semi-conducteur ou métal/isolant. La solution
adoptée est alors de faire appel aux méthodes ab initio, soit pour répondre directement aux
questions quand il s’agit de comparer les stabilités relatives de systèmes pas trop complexes,
soit en les utilisant comme référence pour en dériver des potentiels analytiques quand l’objet
de l’étude met en jeu des simulations plus compliquées (cinétiques, grandes mailles). C’est le
choix adopté ici, après quelques tentatives semi-empiriques que nous allons rappeler tout
d’abord car, cohérentes ou pas avec le système étudié, elles ont largement contribué à
résoudre certaines énigmes.

VII-B.1. Approximation des liaisons fortes

La bande de valence du silicium est à moitié remplie puisqu’elle contient quatre


électrons dans des orbitales sp3. Elle présente un caractère covalent bien mis en évidence par
l’approximation des Liaisons Fortes dont l’hamiltonien s’écrit :

H =∑ i,λ ε λ0 i,λ + ∑ i,λ β iλ, j, µ j,µ . (3)


i, λ λµ,ij

Ce hamiltonien contient deux paramètres : un terme diagonal ε λ0 qui représente l’énergie du


niveau atomique de l’orbitale λ, et un terme de saut β iλ, j, µ qui représente l’intégrale de saut
entre l’orbitale λ au site i et l’orbitale µ au site j. L’intégrale de saut s’exprime en fonction de
quatre paramètres : ssσ, spσ, ppσ et ppπ, qui sont obtenus en ajustant la structure de bande du
silicium [51].
- intégrales de saut : ssσ=-2.36eV, spσ=1.86eV, ppσ=2.86eV, ppπ=-0.95eV
- niveaux atomiques : ε0s=-5.19eV, ε0p=1.06eV.
CHAPITRE VII : Étude théorique 88

Un avantage de cette méthode est de donner simplement accès à la densité d’états


électroniques locale au site i pour l’orbitale λ sans avoir à passer dans l’espace réciproque, en
l’écrivant sous la forme :

niλ (E )= − Im limε →0 iλ G(E −iε ) iλ , (4)


π
où G(E)=[E-H]-1 est la fonction de Green, que l’on peut calculer sous forme d’une fraction
continue dont les coefficients sont directement reliés aux premiers moments de la densité
d’états. Lors du calcul sur des sites de défauts (surface, marche), il faut toutefois prendre en
compte la modification de l’environnement par rapport au volume ce qui implique une
redistribution de la charge qui entraîne une modification du potentiel qu’il faut traiter de façon
auto-cohérente. Cela se traduit par un décalage du niveau atomique de l’orbitale λ au site i
δεiλ spécifique de chaque site inéquivalent. Dans le cas des métaux, la règle d’auto-cohérence
se réduit à une condition de neutralité par orbitale [52]. Les choses sont moins simples à la
surface des semi-conducteurs où des transferts de charges peuvent se produire, sur lesquels
nous reviendrons dans le cadre de notre étude ab initio. Toutefois, dans un contexte qualitatif,
la même règle de neutralité (nombre d’électrons : Ni(EF)=Nvolume (EF)=4) a été appliquée pour
décrire l’effet de la coupure de liaisons sur la densité locale à la surface (111) de Si [51]. On
voit sur la figure qu’il apparaît alors un état de surface en plein milieu du gap de la densité
d’états de volume correspondant à la création d’une liaison pendante.

Figure VII.1 : densité d’états ni(E) de Si volume (en pointillé) et Si surface (111) (en plein) en Liaisons Fortes
[51].

Une fois la densité locale déterminée, on peut calculer l’énergie au site i, qui se décompose en
deux termes : un terme de bande attractif et un terme répulsif.

Ei = Eib + Eir . (5)

Le terme de bande Eib est issu de l’élargissement du niveau atomique en une bande continue
d’états. Il s’obtient en sommant toutes les énergies jusqu’au niveau de Fermi EF (intégration
sur la densité d’états) :

EF
Eib =∑ ∫(E −ε λ0 )niλ (E,δε iλ )dE − Niλ (EF )δε iλ , (6)
λ ∞

avec Niλ le remplissage de la bande λ au site i :


CHAPITRE VII : Étude théorique 89

EF
Niλ (EF )= ∫ niλ (E,δε iλ )dE . (7)
−∞

Le terme répulsif Eri quant à lui est mal traité par le formalisme des Liaisons Fortes. Il est
remplacé par une contribution empirique de type Born-Mayer qui s’écrit comme une somme
d’interactions de paires entre atomes i et j distants de rij :

  rij 
Eri = ∑ A exp − p r − 1 . (8)
j , rij   0 

Malgré la simplicité du calcul de la densité locale, le calcul de l’énergie de bande (6)


demeure encore trop compliqué pour être introduit dans les simulations numériques du type
de celles développées dans le paragraphe précédent. Il faut donc avoir recours à des
approximations supplémentaires.
La première idée est d’utiliser la même approximation que dans le cas des systèmes à
base de métaux de transition, à savoir remplacer la vraie densité d’états par une densité d’états
schématique ayant le même second moment (approximation du second moment : SMA). On
obtient ainsi un potentiel à N corps qui s’écrit sous la forme d’une racine carrée de somme
d’interactions de paires, qui permet une description correcte des relaxations et des
reconstructions de surface :

1
   rij   2
E i = − ∑ ξ exp − 2q − 1  .
b 2
(9)
 j ,rij   r0  

C’est un tel potentiel qu’a utilisé Marielle Ladevèze [51] pour analyser l’influence de
l’état de surface (nominale, puis vicinale) sur l’adsorption de Sb/Si(111) en relaxant le
système par simulation numérique en dynamique moléculaire. Les quatre paramètres (ξ, A, p,
q) caractérisant les interactions Sb-Sb et Si-Si étaient ajustés sur les valeurs expérimentales de
l’énergie de cohésion, du paramètre du réseau, du module de compressibilité ainsi que sur
l’équation d’état "universelle" entre potentiel et distance [53]. Les paramètres mixtes Sb-Si
étaient choisis comme la moyenne des paramètres des éléments purs.
M. Ladevèze a ainsi étudié les modes d’adsorption des molécules de Sb, Sb2, Sb3, Sb4
sur les deux types de surface. Son résultat essentiel est que l’adsorption de molécules Sb2 sur
la surface désorientée doit conduire à l’existence simultanée de monomères (molécules
dissociées spontanément) sur la terrasse (surface nominale), et de dimères non dissociés
debout contre les marches. En ce qui concerne l’adsorption d’un monomère isolé sur une
terrasse, le site de symétrie ternaire est préféré au site apical, comme dans une adsorption de
type "métal/métal". Au niveau de la marche (surface vicinale), les molécules non dissociées et
adsorbées verticalement présentent une légère élongation.
Malheureusement, en dépit du bon accord avec les expériences concernant les deux
types de mode d’adsorption (dissociative sur les terrasses, moléculaire en bord de marche),
certains résultats comme la stabilité du site ternaire pour l’atome isolé pourrait être des
artefacts dus à l’utilisation d’une approximation (SMA) qui, si elle est bien justifiée pour les
métaux, l’est sensiblement moins pour les covalents, dans la mesure où elle ne prend en
compte que les distances entre proches voisins et pas les effets orientationnels. Cela apparaît
clairement sur les densités d’états schématisées ci-dessous (figure VII.2), où l’on voit que
CHAPITRE VII : Étude théorique 90

l’approximation rectangulaire est mal adaptée à une densité présentant un gap ! Pour en
rendre compte, il faudrait aller au moins jusqu’au 4ième moment [54] mais au détriment du
caractère analytique du potentiel. Ainsi le SMA privilégie les structures compactes, ce qui est
correct pour les métaux de transition (exemple cfc : 12 atomes voisins), mais pas les
structures plus ouvertes de type diamant. Ceci rend délicat l’usage de ce potentiel au-delà
d’une étude préliminaire comme celle que nous venons de citer qu’il faut considérer comme
essentiellement qualitative.

Figure VII.2 : Présentation schématique de la densité détats pour le cas des métaux de transition et les semi
conducteurs. Non compatibilité de la méthode SMA dans le cas des semi-conducteurs.

Pour remédier à ce problème la description des surfaces nominales et vicinales de Si


(111) a tout d’abord été améliorée. Ainsi D. Becquet [55] a choisi un potentiel interatomique
mieux adapté, du type potentiel de Tersoff [56], qui traite correctement la corrélation entre la
liaison chimique et l’environnement local, mais donne comme état fondamental la phase cc
plutôt que la phase diamant. Ce potentiel a été corrigé par Dodson pour retrouver la structure
diamant comme état fondamental tout en gardant une très bonne description de la surface,
avec en particulier Εsurf(terrasse) =0.806eV/atome (1.01J/m2) par rapport a une valeur
expérimentale Εsurf(nominale) =0.899eV/atome (1.24J/m2) [57]. Avec cette méthode, D. Becquet
a été capable de rendre compte de façon satisfaisante des phénomènes de relaxation atomique
mis en jeu sur les surfaces, nominale et vicinale, de Si (111). Ce potentiel est certes mieux
adapté pour traiter la surface de silicium, mais malheureusement tout a fait inadapté pour
décrire la liaison Sb-Si.

VII-B.2. Méthodes ab initio

Il apparaît donc nécessaire de mettre en œuvre une description de la structure


électronique qui rende compte de la différence de nature chimique des liaisons dans Sb et Si,
ainsi qu’à leur interface. Il sera ainsi possible de calculer la variation de l’énergie d’adsorption
avec le site d’adsorption et le taux de recouvrement, et de dresser une carte d’énergie
potentielle permettant la définition d’un potentiel analytique Sb-Si. Il nous faut donc une
CHAPITRE VII : Étude théorique 91

méthode qui donne accès à la distribution de charge électronique, à la structure de bande et


aux densité d’états locales (LDOS) dont sont dérivées les énergies mises en jeu, une méthode
utilisable quel que soit l’élément chimique considéré et qui ne dépende pas de paramètres à
ajuster sur des données expérimentales … bref une méthode ab initio !!

VII-B.2.a. Principe et problématique

Les méthodes ab initio sont des méthodes de résolution de l’équation de Schrödinger


pour des systèmes à N corps (phases condensées d’atomes à plusieurs électrons). La
particularité de ces méthodes est qu’elles ne nécessitent aucune paramétrisation. Elles
demeurent toutefois basées sur des hypothèses astucieuses qui, en ramenant le problème de N
électrons en interaction à un système de N équations couplées "à un électron", traitent plus ou
moins bien les interactions entre électrons induites par leur forte répulsion coulombienne,
qu’il s’agisse de la théorie de la fonctionnelle de la densité (DFT), ou de l’approximation de
Hartree-Fock (HF).
L’équation de Schrödinger d’un système à N électrons, supposés appariés (sans spin)
et interagissent avec le champs électrostatique créé par M noyaux, s’écrit :

HΩ = EΩ, (10)
r r
( ) r r
avec Ω ≡ φ R1,...., RM ψ (r1,....,rN )
H est l’opérateur hamiltonien et Ω représente la fonction d’onde totale du système, qui dans
l’approximation de Born-Oppenheimer est le produit de la fonction d’onde ψ des électrons de
position r avec celle φ des noyaux de position R. La fonction d’onde électronique, et par
conséquent l’hamiltonien électronique, met en jeu, outre les énergies cinétiques et les charges
électroniques, des interactions mutuelles d’électrons qui représentent un problème à N corps
délicat a résoudre.

VII-B.2.b. Approximation de Hartree-Fock (HF)

L’approximation HF consiste à modéliser cette fonction d’onde multi-électronique ψ par un


produit antisymétrisé de fonctions d’ondes "à un électron". Pour bien prendre en compte les
interactions coulombiennes et d’échange, chaque atome se trouve entouré d’une région dans
l’espace appelée "trou d’échange", qui est fortement appauvrie en électrons de même spin,
mais en aucun cas en électrons de spin opposé. C’est ce dernier cas de figure (répulsion de
Coulomb entre électrons de spin opposé) qu’on appelle effet de corrélation et qui est mal
traité par cette approximation.

VII-B.2.c. Méthode de la fonctionnelle de la densité (DFT)

Le concept fondamental de la DFT est que l’énergie d’un système électronique est une
fonctionnelle unique de sa densité de charge n(r ) . La valeur minimale de cette énergie est
obtenue pour la densité n0 (r ) de l'état fondamental [58]. Ainsi pour N électrons évoluant dans
le potentiel v(r ) dû aux noyaux, il existe une fonctionnelle F [n(r )], indépendante de v(r ) ,
telle que l'énergie E 0 de l'état fondamental est donnée par :
CHAPITRE VII : Étude théorique 92

{
E 0 = min ∫ v(r )n(r )dr + F [n(r )] }, (11)

avec
1 n(r )n(r ')
F [n ] = E cin [n] + drdr '+ E xc [n] . (12)
2 ∫∫ r − r '
0

0
E cin : énergie cinétique pour un gaz d'électrons de densité [n(r)] sans interaction.
E xc [n ] : terme d'échange et de corrélation.
Le calcul des variations de E [n] conduit à :

 δE cin
0
[n] + v(r ) + n(r ') dr '+ δE xc [n] − µ  = 0 , (13)
∫ δndr 
 δn
∫ r − r' δn 

où µ est le potentiel chimique associé à la contrainte sur le nombre d'électrons ∫ n(r )dr = N .
Par analogie avec le cas du problème "à un électron", ce principe variationnel se ramène à
résoudre N équations de Schrödinger effectives "à un électron" (ou équation de Kohn-Sham
[59])

 1 2 
 − ∇ + veff (r )ψ i (r ) = µ iψ i (r ) , (14)
 2 

décrivant son mouvement dans le potentiel effectif : veff (r ) = v(r ) + v H + v xc (r ) , où v(r ) est le
potentiel d’interaction électron-noyau et les deux autres termes sont les potentiels
n(r ')
d’interaction électron-électron (Hartree : v H = ∫ dr ' ) ; et d’échange-corrélation :
r − r'
δE xc[n ]
v xc (r ) = .
δn
En pratique, ces équations couplées autocohérentes sont résolues par itération. On part d'une
fonction n(r ) d'essai, on en déduit veff (r ) , puis on résout l'équation de Schrödinger, ce qui
donne les nouveaux ψ i (r ) et une nouvelle densité n(r ) = ∑ ψ i (r ) . Il reste toutefois à
2

expliciter E xc [n ], ce qu’on ne sait pas faire de façon exacte, de sorte qu’on a recours à des
approximations.

VII-B.2.d. Approximation LDA et amélioration

Pour remédier à ce problème l’approximation la plus usitée est de supposer que E xc [n ]


est purement locale (LDA : approximation de la densité locale), ce qui revient à l’assimiler
pour chaque r à la contribution d'échange-corrélation d'un gaz uniforme d'électrons ( ξ xc0 ) de
même densité, que l’on sait calculer par ailleurs :

E xc = ∫ n(r )ξ xc0 (n(r ))dr . (15)


CHAPITRE VII : Étude théorique 93

Cette approximation locale (LDA) peut entraîner un certain nombre d’artefacts dans les
systèmes où la densité de charge varie vite. Il est possible de les corriger partiellement par des
fonctionnelles dites "Approximation du Gradient Généralisé" (GGA), qui introduisent des
termes qui dépendent du gradient de la charge n(r) dans l’énergie d’échange-corrélation ou
dans le potentiel correspondant. Ces corrections améliorent sensiblement les valeurs calculées
de l’énergie totale, de celle de l’atome et des différences d’énergie structurale.

VII-B.2.e. Méthode d’ondes planes augmentées linéarisées (LAPW)

Pour résoudre l’équation de Kohn-Sham (14), la méthode (LAPW) traite, via la


géométrie "muffin-tin", les fonctions d’onde des électrons dans des bases orbitalaire de la
façon la plus efficace possible. En effet la résolution consiste à diviser la cellule unité en deux
régions, des sphères (de rayon Rt) non jointives centrées sur les noyaux (I) et une région
interstitielle (II) (voir figure VII.3), dans lesquelles les bases de fonctions d’onde sont
différentes.

I
I
II

Figure VII.3 : Présentation schématique du partage de la cellule unité en sphères atomiques (I) et région
interstitielle (II).

A l’intérieur des sphères atomiques (I) (r<Rt), on utilise une combinaison linéaire de
produits de fonctions radiales et d’harmoniques sphériques.

φ k = ∑  Alm ,k u l (r , El ) + Blm ,k u (r , El ) y lm (r ) ,


. ^
(16)
n
lm  n n

où ul (r, El ) est la solution radiale à l’intérieur de la sphère Rt de l’équation de Schrödinger


.
linéarisée autour de l’énergie El (choisie normalement au centre de la bande l) et u l (r,El ) est
la dérivée par rapport à l’énergie de ul (r, El ) . Les paramètres Alm et Blm, fonctions de kn (voir
ci-dessous), sont déterminés de façon à ce que cette fonction de base augmente chaque onde
plane correspondant à la fonction de base dans la région interstitielle, les fonctions étant
raccordées continûment à la frontière des deux régions.

L’onde plane développée dans la région interstitielle (II) s’écrit :

1
φk = e ikn .r , (17)
n
ω

où kn =k+Kn ; Kn sont les vecteurs du réseau réciproque et k est le vecteur d’onde à l’intérieur
de la zone de Brillouin. Chaque onde plane de la région interstitielle est ainsi "augmentée" par
une fonction quasi-atomique dans chaque sphère.
CHAPITRE VII : Étude théorique 94

Les solutions des équations de Kohn-Sham sont développées dans cette base combinée, dont
la convergence est contrôlée par un paramètre de coupure, Rmt.Kmax, où Rmt est le plus petit
rayon de sphère de la cellule unité et Kmax la valeur maximale de vecteur d’onde du
développement. On prend en général : 6 < Rmt.Kmax < 9.

VII. B.2.f. Mode de calcul

Pour nos calculs, on utilise la version Wien 97, du code Full-Potentiel LAPW
développé par P. Balha et al. [60].

Figure VII.4 : Organigramme du programme FP.LAPW utilisé dans le code Wien 97 [60].

La figure (VII.4) ci dessus illustre l’organisation de l’algorithme de calcul en Wien 97


pour une structure atomique donnée.

Basé sur le concept de la DFT, l’ensemble du programme Wien 97 est constitué de


plusieurs "petits" programmes indépendants reliés par des ‘C-SHELL SCRIPTS’ qu’on décrit
CHAPITRE VII : Étude théorique 95

ci-dessous : Une fois la structure atomique de l’élément étudié définie, on exécute de manière
successive les ‘C-SHELL’ suivants :

ƒ NN : liste les distances entre proches voisins jusqu’à un certain ordre spécifié à partir
du rayon de coupure Rmt qu’on propose (Rmt =2 u.a). Cette procédure aide à la
détermination du rayon des sphères atomiques qui ne doivent pas être jointives.
ƒ LSTART : génère la densité d’atomes libres et détermine comment les différentes
orbitales sont traitées dans le calcul de structure de bande.
ƒ SYMMETRY : génère à partir de la structure donnée les opérations de symétrie du
groupe d’espace, détermine le groupe ponctuel pour les sites atomiques individuels,
génère l’expansion du réseau harmonique contrôlé par le rayon de coupure Rmt.Kmax
(en général entre 6 et 9) et détermine la matrice locale de rotation.
ƒ KGEN : génère le nombre de points K qui divise la zone de Brillouin
ƒ DSTART : génère une densité initiale à partir de toutes les densités atomiques déjà
générées par LSTART.

C’est ainsi qu’un cycle auto-cohérent est initié et se répète jusqu'à la convergence (densité
quasiment constante d’une itération à l’autre). Ce cycle est constitué des différentes étapes
suivantes.

LAPW0 : génère le potentiel à partir de la densité.


LAPW1 : calcule la bande de valence (valeurs propres et vecteurs propres).
LAPW2 : compte les densités de valence à partir valeurs propres.
LCORE : compte les états de cœur et les densités.
MIXER : mixe toutes les densités.

VII-C. Application préalable aux éléments Sb et Si : limites et artefacts

VII-C.1. Etude de Si et Sb massifs et optimisation des calculs

Comme étape préliminaire, pour optimiser les conditions de calculs citées ci-dessus, et
l’adaptation du code Wien à traiter un atome lourd comme Sb, nous avons commencé par
étudier le silicium et l’antimoine massifs. Toutefois, avant d’aborder ces étapes il n’est pas
inutile de rappeler la structure cristallographique de ces deux éléments.
Le silicium s’hybride en sp3 ce qui le conduit à adopter une structure diamant, typique
de la liaison covalente. Dans cette structure, chaque atome a quatre liaisons très
directionnelles avec 4 premiers voisins à 2.35 Å, 12 seconds voisins à 3.84 Å, 12 troisièmes à
4.50 Å et 6 quatrièmes à 5.43 Å (distance caractéristique du paramètre du réseau) [51].
L’antimoine, atome lourd du groupe V, a une structure très complexe. Il cristallise
dans le système rhomboédrique formé de parallélépipèdes dont les arrêtes mesurent 2.92 Å,
3.37 Å, 6.20 Å, et forment un angle de 87° [61]. D’après BRAGG, les atomes d’antimoine
sont arrangés comme ceux du diamant, mais cette structure est étirée le long d’un axe ternaire.
Ce réseau peut aussi être analysé comme un réseau cubique simple de paramètre 2.96 Å [51],
ayant subi une distorsion de Peierls, conduisant à la formation de 3 distances courtes et 3
longues en proches voisins. Ici, nous considèrerons pour simplifier que ce réseau cubique
simple n’est pas distordu, chaque atome de Sb à 6 atomes premiers voisins à 2.96 Å, 12
atomes seconds voisins à 4.19 Å, 8 atomes troisièmes voisins à 5.13 Å et 6 atomes quatrièmes
voisins à 5.92 Å. Nous verrons dans ce qui suit que le choix de cette structure n’a guère
CHAPITRE VII : Étude théorique 96

d’importance dans la mesure où notre étude sur l’adsorption ne requiert que l’énergie de
l’atome isolé de Sb.

VII-C.1.a. Paramètres de calcul

Rappelons que dans le principe de la FP-LAPW chaque onde plane est augmentée par
la fonction quasi atomique de chaque sphère. C’est dans cette base de fonctions d’onde qu’on
cherche les solutions des équations de Kohn-Sham (ou Schrödinger), dont la convergence est
contrôlée par le paramètres de coupure : Kmax qui contrôle le nombre d’ondes planes utilisées
dans le calcul. On peut ensuite remonter aux densités d’états par intégration dans la zone de
Brillouin, ce que l’on fait ici de façon discrète par une somme sur un certain nombre de points
K. Il est donc crucial de bien déterminer :
• Le rayon de coupure Kmax, qui doit être assez grand pour que le développement
converge mais pas trop pour ne pas alourdir les calculs.
• Le nombre de points K, qui lui aussi doit être assez grand pour bien rendre compte de
l’évolution de la densité d’état mais pas trop afin d’éviter au programme de faire des
opérations inutiles.

Dans la mesure où notre critère de stabilité de mode d’adsorption sera de type


énergétique, c’est sur la convergence de l’énergie du volume que nous baserons notre choix
pour optimiser les paramètres de calcul.

a) b)
Ebulk (Sb) - E at.rel (Sb)

4
R.k =6
8 max

2
EcohSi (eV/atome)

0
4
R.k =7
max

2 R.k max = 8 -2
coh

0
-4
R.k max = 9

-2
-6

4 6 8 10 12 14 16 d(Sb) log(10) log(100) log(1000)

log(K)

Figure VII.5 : La sensibilité de l’énergie aux différentes valeurs des paramètres RmtKmax et K. a) Dans un ordre
croissant : la stabilité de l’énergie de cohésion de Sb (calculée à partir de l’énergie de l’atome isolé traité par Wien)
pour K=100 et RmtKmax =6, 7, 8 et 9. b) La stabilité de l’énergie totale de Si pour RmtKmax =7 et K= 1, 10, 100,
1000 et 2000.

La figure VII.5 illustre la sensibilité du calcul de la variation de l’énergie d’un atome


de volume par rapport à une dilatation du paramètre de réseau, pour différentes valeurs des
paramètres RmtKmax et K. Sur cette figure on soustrait l’énergie de l’atome isolé donnée par le
même programme (qui ne varie pas en fonction des paramètres). On remarque que si on dilate
le volume jusqu’à ce que les atomes n’interagissent plus, cette différence d’énergie ne tend
pas vers 0 à l’infini. En effet, le code WIEN calcule la valeur d’énergie de l’atome libre (Εatom
libre) avec un traitement des effets relativistes différent de celui appliqué en volume. Ainsi,
pour garder un maximum de cohérence dans les calculs, la véritable référence de l’atome isolé
CHAPITRE VII : Étude théorique 97

doit être prise comme la valeur asymptotique quand les atomes sont infiniment éloignés. C’est
ce que nous ferons par la suite pour définir l’énergie de cohésion.
En ce qui concerne le dilemme entre une valeur suffisamment élevée du paramètre
RmtKmax mais pas trop pour ne pas alourdir les temps de calcul, notre choix s’est porté sur la
valeur RmtKmax=7. Le choix du nombre de points K qui divise la zone de Brillouin est
beaucoup plus clair, nous prendrons K=100. Tous les calculs qui suivent seront effectués à
partir de ce choix de paramètres.

VII-C.1.b. Structure électronique du volume

Le calcul des densités d’états (LDOS) de volume, dans une structure cfc avec deux
atomes par maille pour Si et en cubique simple pour Sb, nous a permis de retrouver les
caractéristiques de chaque élément : Si semi-conducteur, Sb métallique (figure VII.6). Sur la
même figure (en bas) nous présentons le remplissage respectif des bandes de valence en
prenant comme origine le niveau de Fermi (Si : 3s23p2, Sb : 4d105s25p3). Une fraction
d’environ 10% pour Si et plus de 25% pour Sb part dans les régions interstitielles.
La faible valeur de la largeur du gap (0.5 eV au lieu de 1.17 eV pour Si) est un des
artefacts usuels en DFT puisqu’elle est développée pour étudier l’état fondamental alors que
la mesure expérimentale du gap fait appel à des spectroscopies d’états excités. Notons qu’il
est possible de traiter mieux ces excitations [62] mais ce ne sera pas nécessaire ici.

a)

b)

Figure :VII.6: Densités d’états de volume et remplissage des électrons pour Si (a) et Sb (b). Les échelles
d’énergie (E-EF) sont en Rhy.
CHAPITRE VII : Étude théorique 98

VII-C.1.c. Paramètres énergétiques

Les propriétés de l’état fondamental d’un système sont déterminées par la variation de
son énergie totale avec le paramètre de maille (a) comme détaillé dans la figure VII.7 pour Si
et Sb. Le paramètre d’équilibre d0 est celui qui correspond au minimum d’énergie. Pour a très
grand (tend vers l’infini), on tend vers l’énergie de l’atome isolé, de sorte que l’énergie de
cohésion (Ecoh) est obtenue en retranchant cette énergie à celle correspondant au minimum.

1
E volume (a ) - E atome libre
0

Ecoh(Sb)
-1

Ecoh(Si)
-2

-3

-4

Sb
-5
Si
-6

2 3 4 5 6 7 8 a (Å)
Figure VII.7 : Energie de cohésion de Sb et Si.

Sur le tableau VII.1 nous présentons les résultats pour les deux éléments Si et Sb.

Energie de cohésion (eV/at) d0 (Å)


Expérimentale Calculée Expérimental Calculé
Si -4.2 -5.67 2.35 2.35
Sb -2.7 -4.97 2.92-3.37 2.96
Tableau VII.1 : Calcul de Ecoh et d0 pour Si et Sb. Comparaison avec les valeurs expérimentales.

Si la comparaison des valeurs des paramètres d’équilibre d0 avec l’expérience est très
satisfaisante, celle des énergies de cohésion est moins probante. On trouve ainsi, pour Si une
sur évaluation de l’énergie de cohésion d’à peu près 20%, ce qui est tout à fait standard en
LDA (connue pour surestimer l’énergie de cohésion d’environ 30% et de sous-estimer le
paramètre de réseau d’environ 3% [52]) et qui pourrait être corrigé en GGA.
Malheureusement, cette augmentation est de 84% pour Sb, ce qui nous empêchera de faire des
règles de trois dans ce qui suit pour comparer les énergies d’adsorption à l’expérience.
La forte valeur de l’énergie de cohésion de Sb nous a fait interroger sur la pertinence
du choix de la structure cristallographique simplifiée (cs), d’autant qu’une étude de la
distribution électronique met en évidence une grande perte d’électrons dans les interstices.
Dans le but d’analyser l’effet du choix de la structure sur la distribution spatiale des électrons,
nous avons testé celui-ci en fonction de la compacité. A cette fin l’antimoine a été calculé
dans d’autres structures plus et moins ouvertes. Le tableau VII.2 montre les énergies de
cohésion et les paramètres d’équilibre d0 qui correspondent à la stabilité de Sb dans les
structures diamant, cubique simple (cs) et cubique à faces centrées (cfc). Pour chaque
structure est représentée également la population électronique au niveau de Fermi, à
l’intérieur des sphères et dans les interstices. On vérifie que cette distribution dépend peu de
CHAPITRE VII : Étude théorique 99

la structure et que, si la structure compacte cfc est aussi stable que la cs, elle l’est pour un
paramètre de maille peu compatible avec la réalité.

Structure Energie de d0 Remplissage Remplissage dans les Remplissage dans les


cohésion (Å) total sphères interstices
(eV/at)
diamant -4.62 2.97 15 11.17 3.83
cs -4.97 2.96 15 11.19 3.81
cfc -4.98 3.25 15 11.19 3.81
Tableau VII.2 : Comparaison du traitement de Sb dans les structures diamant, cubique simple et cubique à faces
centrées.

VII-C.2. Etude de la surface

VII-C.2.a. Préparation de la surface Si(111)

Dans une structure périodique de réseau 2D hexagonal et de paramètre de maille


3.84Å, nous avons construit un système semi-infini (supercellule) formé par une succession
de couches minces (slabs) composées d’un nombre fini de plans de Si et séparées de façon
périodique par des espaces vides (présentation schématique sur la figure VII.8).

surface
vide

Cellule
3 bicouches Si élémentaire
(slab)

Figure VII.8 : Présentation schématique de la super-cellule de Si(111).

La première étape consiste à déterminer d’une part le plus petit nombre de couches de
Si permettant de retrouver des paramètres de volume au centre, et d’autre part l’épaisseur
minimale de la région vide pour que les films n’interagissent pas entre eux. Le tableau VII.3
illustre les différentes valeurs de l’énergie de la couche mince construite selon plusieurs
modèles (voir légende).

E Si 134 (Rhy) -3468.268 E Si 164 (Rhy) -6936.726 E Si 134 (Rhy) -3468.268


E Si 136 (Rhy) -3468.264 E Si 166 (Rhy) -6936.722 E Si 434 (Rhy)/4 -3468.267
Tableau VII.3 : Valeurs de l’énergie totale d’une couche mince Si mnp ; m : nombre d’atomes de Si par maille,
n : nombre de bicouches de Si, p : nombre de bicouches de vide.
CHAPITRE VII : Étude théorique 100

Nous constatons ainsi que quelle que soit l’épaisseur de la couche mince (trois ou six
bicouches de Si), une épaisseur de quatre bicouches de vide est suffisante. Sur ce tableau
figure aussi l’effet négligeable de l’extension latérale de la couche mince pour une même
épaisseur de la couche de vide (E Si 434 =4x E Si 134), qui sera utile dans le cas de surstructures
de surface à grande maille. On estime alors (effet de taille (temps de calcul) et de symétrie
inclus) que pour une dimension de vide équivalente à quatre bicouches de Si, il n’existe plus
d’interaction entre les surfaces et leurs images. Ainsi pour nos calculs nous choisirons
respectivement la couche mince Si134 et Si434 (un atome par maille et deux atomes par maille)
comme référence de la surface unité 1x1 et de la surface 2x2.

VII-C.2.b. Structure électronique de la surface

En ce qui concerne les propriétés du volume au centre de la couche mince nous


reportons sur la figure VII.9.a les densités d’états de volume dans la couche mince en
comparaison avec le "vrai" volume de la structure diamant (deux cfc imbriqués). Nous
pouvons remarquer la légère influence de la surface ressentie encore dans les plans profonds
de la couche mince, artefact qui ne pose pas de problème au niveau du calcul d’énergie
d’adsorption où nous ferons à chaque fois la différence d’énergie entre une même couche
mince de Si avec ou sans Sb.

Figure VII.9.a : LDOS de Si en volume dans la Figure VII.9.b : LDOS de Si en volume dans la
structure diamant (en rouge) et LDOS de Si en volume structure diamant (en rouge) et LDOS du premier plan
dans la couche mince (en vert). Si de la couche mince (en vert).

De la même façon on superpose dans la figure VII.9.b les LDOS du plan de la surface de la
couche mince et du volume. On retrouve l’effet remarquable de la coupure de liaison, déjà
mis en évidence par le calcul en liaisons fortes (figure VII.1) avec l’apparition d’un état de
surface au plein milieu du gap du volume, signature de la liaison pendante.

VII-C.2.c. Energie de la surface Si(111)

L’énergie de la surface γ d’un solide est l’énergie nécessaire pour cliver le cristal selon
une direction donnée. Connaissant l’énergie du silicium volumique et l’énergie du film mince
Si(111), cette énergie s’écrit :
CHAPITRE VII : Étude théorique 101

γ = 1 (ESi(111) − NEvolume) (18)


2

où N est le nombre d’atome de Si dans le film mince et le facteur 1/2 est dû à la création de
deux surfaces. La valeur de l’énergie de la surface Si(111) calculée ici est illustrée dans le
tableau VII.4 où elle est comparée à la valeur expérimentale ainsi qu’à la valeur trouvée en
utilisant le potentiel de Tersoff-Dodson. Comme pour l’énergie de cohésion, la LDA
surestime systématiquement l’énergie de surface.

Méthode Calculé par Wien (ici) Expérimentale [57] Dodson + relaxation [55]
γ (ev/at) 1.12 0.99 (77°K) 0.67
Tableau VII.4 : Valeurs de l’énergie de surface calculée par Wien 97 comparées à d’autres valeurs de la
littérature ainsi qu’aux données expérimentales.

VII-C.2.d. Sb plan

Afin de pouvoir par la suite séparer dans le calcul de l’énergie d’adsorption les
contributions dues au fait de fabriquer une couche 2D hexagonale de Sb à partir de la vapeur,
puis de la déposer sur le substrat de Si, nous avons calculé l’énergie totale d’une couche libre
de Sb dans un réseau hexagonal. La relaxation de la couche de Sb (ayant le même nombre de
voisins (6) que dans le volume), conduit à une énergie "de cohésion" moins élevée qu’en
volume (E=-4.17eV/atome), pour une distance d’équilibre équivalente (a=3.08Å au lieu de
2.96Å). La dilatation au paramètre de Si (111) (3.84 Å) déstabilisera donc profondément la
couche (E=-2.81eV/atome).

VII.C.3. Etude de l’alliage Sb-Si

Une fois testée l’adaptation du Code Wien à rendre compte de façon satisfaisante des
propriétés essentielles (énergie de cohésion, de surface, paramètre de réseau) des deux
éléments purs Si et Sb, il restait à vérifier son aptitude à rendre compte de la
thermodynamique de l’alliage Sb-Si, à savoir l’existence d’une lacune de miscibilité dans le
diagramme de phases (cf. chapitre 1). En d’autres termes, il fallait d’abord vérifier
qualitativement la tendance du système à préférer la séparation de phases plutôt que la
formation de phases ordonnées, puis de façon plus quantitative calculer l’ordre de grandeur
des énergies d’alliage mises en jeu.
Dans un premier temps, nous avons donc considéré une phase hypothétique
parfaitement ordonnée à l’équiconcentration (Sb0.5Si0.5), construite sur le réseau diamant de Si
(puisque dans le système Sb/Si, c’est le substrat de Si qui impose son réseau). Notons que la
structure diamant est non frustrée à l’équiconcentration et permet donc de construire un
composé dans lequel toutes les paires de premiers voisins sont mixtes. L’énergie d’alliage
ordonné du système s’écrit alors :

∆Eal.ord =Ecoh(SbSi) – Ecoh(Sb) – Ecoh(Si) (19)

où les énergies de cohésion des éléments purs Sb et Si sont calculées dans leurs structures
"d’origine" (cs pour Sb et diamant pour Si).
CHAPITRE VII : Étude théorique 102

Les résultats donnés dans le tableau ci-dessous (tableau VII.5) mettent bien en évidence la
tendance à la démixtion du système puisque ∆Eal.ord> 0. Par ailleurs, le paramètre d’équilibre
d0 adopté par l’alliage (2.57 Å) suit à peu près une loi de Végard : d0 (Si0.5-Sb0.5)= 0.5.
(d0(Si)+0.5 d0(Sb)).

Ecoh(Sb) Sb : Ecoh(Si) Si : Ecoh(SbSi) Si0.5-Sb0.5 : ∆Eal.ord


(eV/atome) d0 (Å) (eV/atome) d0 (Å) (eV/2 atomes) d0 (Å) eV/at
-4.97 2.96 -5.67 2.35 -10.06 2.57 0.29
Tableau VII.5 : Valeurs des énergies de cohésion de Sb dans la structure (cs), de Si dans la structure
(diamant) et du mélange ordonné Sb0.5-Si0.5 dans la structure (diamant).

D’un point de vue plus quantitatif on sait que, si les énergies de cohésion ne peuvent
pas s’écrire sous forme d’interactions de paires, la partie de cette énergie qui dans un alliage
dépend de la configuration chimique (énergies d’ordre, de démixtion, de mélange, de
solution) se ramène (sur un seul et même réseau) à un modèle d’Ising [63] mettant en jeu
l’unique paramètre :

V = 1 (V SbSb + V SiSi −2V SbSi) , (20)


2

où VSbSb, VSiSi, et VSbSi sont les interactions entre les diverses espèces chimiques restreintes
aux premiers voisins dans les éléments purs et dans l’alliage. Ainsi, dans notre cas :

∆Eal.ord = -Z (V/2) avec Z=4 (diamant). (21)

Il est donc tentant de déduire de nos calculs l’interaction de paire d’alliage pour le
système Sb-Si. Malheureusement, ce modèle d’Ising n’est justifié que si on compare des
énergies calculées sur le même réseau cristallographique. Nous avons donc refait le calcul de
∆Eal.ord en considérant que Sb dans son état initial adopte une structure diamant (Ecoh=-4.62
eV/at, d0=2.97). On trouve alors une valeur deux fois plus faible que l’énergie de l’alliage
ordonné, mais toujours de même signe (∆Eal.ord =0.11 eV/at). Ce qui conduit à V=-0.055
eV/at.
Il reste à comparer cette valeur à celle tirée du diagramme de phases expérimental. En
l’absence de données exploitables♣ dans ce système, nous ne pouvons pas aller plus loin dans
notre analyse.


La seule donnée (fonction de V) qu’ont peut dériver du diagramme de phase Sb-Si est la valeur de la limite de solubilité cs =10-3 pour T=
1300°C [16], mais il est difficile d’en tirer une valeur de V pour un diagramme de phase incohérent tel que celui de Sb-Si (effet de taille et de
structure).
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 103

VIII-Sb/Si(111) : calculs ab-initio

VIII-A. Modes d’adsorption

VIII-A.1. Protocole

Dans ce chapitre, nous allons comparer les différents modes d’adsorption d’atomes
d’antimoine sur une surface Si(111), à divers recouvrements, pour tenter de déterminer quel
est le plus stable. Il nous faut donc un critère pour comparer les stabilités respectives de ces
divers modes. Nous avons choisi la minimisation de l’énergie d’adsorption, calculée comme
la différence d’énergie entre un état initial où les atomes d’antimoine sont dans leur vapeur et
les atomes de Si cristallisés dans un substrat semi-infini terminé par une surface (111) et un
état final relaxé où ce substrat est recouvert par les adatomes de Sb :

E tot ( Sb / Si ) − Etot ( Si (111))


E ads = − E vap ( Sb ) , (1)
N Sb

où Etot(Si111)et Etot(Sb/Si) sont respectivement les énergies totales de la supercellule de Si


propre et de la supercellule dont les surfaces sont recouvertes de Sb. Evap(Sb) est l’énergie de
l’atome Sb libre (calculée par dilatation du volume vers l’infini) et NSb est le nombre
d’atomes Sb déposés sur les deux surfaces.
Dans ce qui suit, nous adopterons une maille de surface 1x1 (un atome par maille)
pour le calcul de l’énergie d’adsorption de la monocouche complète (θ = 1MC : un atome de
Sb pour un atome de Si) et une maille 2x2 pour celui des recouvrements inférieurs, dans
lesquels la maille de surface contiendra successivement 1 atome de Sb (θ = 1/4), 2 atomes de
Sb (θ = 1/2), et 3 atomes de Sb (θ = 3/4). L’étude de l’évolution des caractéristiques de
l’adsorption en fonction du recouvrement nous permettra d’analyser les contributions
respectives des liaisons Sb-Si et Sb-Sb au comportement global du système. Notons que
remplir cette maille 2x2 complètement par 4 atomes nous permet de retrouver 4 mailles 1x1
donc θ=1. Nous avons donc pris soin de vérifier leur concordance énergétique et électronique,
malgré la perte des symétries de la surface "génératrice" 1x1 dans le code utilisé, qui rend les
calculs plus lourds. En effet la surface 1x1 du silicium est de symétrie 3m (axes d’ordre 3 plus
les miroirs perpendiculaires). Quand on agrandit cette surface à une 2x2, et vu que les
symétries mises en jeux ne sont que sphériques, des atomes équivalents d’un même plan ne se
retrouvent plus (e.g. les atomes équivalents sur les positions (0, 0, z) de la cellule 1x1 se
positionnent en (0,0,z) et (0.5,0,z) dans la cellule 2x2, ces derniers ne se générant que par
symétrie de translation). Ainsi la disparition des symétries de la supercellule qui n’a aucune
influence sur les énergies, coûte considérablement en temps de calcul. Inversement, comme le
réseau réciproque de la surface 2x2 est quatre fois plus petit que celui de la 1x1, on utilise un
nombre de points K égal au quart du précédent soit 25 (nombre de points qui divise la zone de
Brillouin (voir chapitre VII)).
Quand on examine la géométrie de la surface Si(111), celle-ci révèle trois sites
d’adsorption de haute symétrie pouvant loger un atome d’antimoine : un site apical ("Top")
au-dessus d’un atome de Si, un site ternaire hcp "T4" au-dessus d’un atome de Si de sous
couche, et un site ternaire cfc "H3" au-dessus d’un creux (figure VIII.1). Le site "en pont"
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 104

entre deux Si de la surface est trop défavorable pour entrer en compétition avec les autres
sites.

Sb (H3) Sb (T4)

Sb (Top)

Figure VIII.1 : Présentation schématique des différents sites d’adsorption sur la surface Si (111).

Ces trois sites inéquivalents ont des coordinences très différentes (voir tableau VIII.1), de
sorte que la comparaison de leurs caractéristiques d’adsorption nous permettra d’analyser
l’influence du nombre de liaisons Sb-Si sur le processus d’adsorption.

Site d’adsorption / θ 1MC 0.75MC 0.5MC 0.25MC


Top (1Si, 6Sb, 3Si, 6Si) (1Si, 4Sb, 3Si, 6Si) (1Si, 2Sb, 3Si, 6Si) (1Si, 3Si, 6Si, 3Si)
(1ers voisins, 2èmes voisins, 3èmes voisins, 4èmes voisins)
T4 (1Si, 3Si, 6Sb, 6Si) (1Si, 3Si, 4Sb, 6Si) (1Si, 3Si, 2Sb, 6Si) (1Si, 3Si, 6Si, 3Si)
(1ers voisins, 2èmes voisins, 3èmes voisins, 4èmes voisins)
H3 (3Si, 3Si, 6Sb,3Si) (3Si, 3Si, 4Sb, 3Si) (3Si, 3Si, 2Sb, 3Si) (3Si, 3Si, 3Si, 3Si)
(1ers voisins, 2èmes voisins, 3èmes voisins, 4èmes voisins)
Tableau VIII.1 : Evolution du nombre de voisins de l’adatome de Sb ainsi que leur nature en fonction du
recouvrement quand celui-ci est positionné sur un des 3 sites de la surface.

VIII-A.2. Résultats et interprétations

VIII-A.2.a. Energie d’adsorption et sites préférentiels

Dans ce qui suit nous présentons les résultats de l’adsorption de 1, 3/4, 1/2, et 1/4 de la
monocouches d’atomes de Sb déposés à chaque fois sur un des trois sites Top, T4 et H3.
Notons que seule la distance verticale entre l’atome de Sb et le plan de la surface est relaxée,
la valeur de l’énergie d’adsorption correspondant à celle du minimum. Il convient toutefois de
noter que puisque les géométries d’adsorption ne sont pas équivalentes, la distance verticale
entre Sb et la surface ne varie pas proportionnellement à celle de la liaison Sb-Si. En fait, plus
le nombre de coordination de Sb augmente, plus l’adatome s’approche de la surface mais plus
la liaison Sb-Si est longue.
La figure VIII.2 illustre la variation de l’énergie d’adsorption en fonction de la
distance entre Sb et ses premiers voisins Si. Nous présentons sur les tableaux VIII.2, 3, 4et 5
un récapitulatif des différentes valeurs de l’énergies d’adsorption de Sb ainsi que les distances
entre ses proches voisins pour les différents recouvrements étudiés.
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 105

θ = 1MC θ = 3/4MC

θ = 1/2MC θ = 1/4MC

Figure VIII.2 : Evolution de l’énergie d’adsorption en fonction de la distance Sb-Si premiers voisins dans les
trois sites d’adsorption (top, T4 et H3) pour les différents recouvrements (1MC, 3/4MC, 1/2MC et 1/4MC).

Les résultats pour le recouvrement d’une monocouche indiquent que le site apical est
de loin le plus stable. Bien que l’énergie d’adsorption correspondante (–5.62 eV/atome) soit
trop élevée par rapport à la valeur expérimentale (–2.85 ±0.1eV/atome), artefact de la LDA
déjà évoqué précédemment, ce résultat est sans ambiguïté et correspond au fait que
l’antimoine vient saturer la liaison pendante du Si (comme l’aurait fait un atome de Si) avec
une distance très proche de la somme des deux rayons atomiques (rSb+ rSi). La valeur de cette
distance concorde bien avec celle rapportée par J. C. Woicik et al. [64] mesurée par la
méthode des rayons X (2.53Å).
La préférence de Sb à minimiser son nombre de voisins Si en choisissant le site apical
semble persister pour le recouvrement 0.75MC, mais l’écart énergétique avec les sites
ternaires diminue, signalant sa déstabilisation progressive en faveur des sites H3 et T4. Une
tendance très prononcée apparaît aussi dans l’évolution de la longueur des liaisons Sb-Si des
atomes adsorbés sur les sites ternaires. Ainsi, par rapport aux résultats sur la monocouche,
l’énergie des sites H3 et T4 augmente en valeur absolue d’à peu près 0.15eV/atome pendant
que la longueur des liaisons Sb-Si premiers voisins diminue d’environ 0.1Å.
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 106

Site Ead (eV/atome) Distance 1ers voisins (Å) Distance 2émes voisins Distance 3émes voisins (Å) Distance 4émes voisins (Å)
(Å)
-5.62 2.51 (1.Si) 3.84 (6.Sb) 3.97 (3.Si) 4.58 (6.Si)
‘Top’
-4.83 2.98 (3.Si) 3.56 (3.Si) 3.84 (6.Sb) 4.86 (3.Si)
‘H3’

-4.56 2.9 (1.Si) 3.06 (3.Si) 3.84 (6.Sb) 4.81 (6.Si)


‘T4’
Tableau VIII.2 : Sb/Si(111) 1MC : Energies d’adsorption, distances, nombre et nature de proches voisins Sb-Si
pour chaque site d’adsorption

Site Ead (eV/atome) Distance 1ers voisins (Å) Distance 2émes voisins Distance 3émes voisins (Å) Distance 4émes voisins (Å)
(Å)
-5.25 2.52 (1.Si) 3.84 (4.Sb) 3.98 (3.Si) 4.59 (6.Si)
‘Top’
-4.98 2.89 (3.Si) 3.44 (3.Si) 3.84 (4.Sb) 4.80 (3.Si)
‘H3’

-4.77 2.81 (1.Si) 3.00 (3.Si) 3.84 (4.Sb) 4.76 (6.Si)


‘T4’
Tableau VIII.3 : Sb/Si(111) 0.75MC : Energies d’adsorption, distances, nombre et nature de proches voisins
Sb-Si pour chaque site d’adsorption

Site Ead (eV/atome) Distance 1ers voisins (Å) Distance 2émes voisins Distance 3émes voisins (Å) Distance 4émes voisins (Å)
(Å)
-4.79 2.49 (1.Si) 3.84 (2.Sb) 3.95 (3.Si) 4.5 (6.Si)
‘Top’

-5.20 2.87 (3.Si) 3.42 (3.Si) 3.84 (2.Sb) 4.79 (3.Si)


‘H3’

-5.05 2.76 (1.Si) 2.97 (3.Si) 3.84 (2.Sb) 4.73 (6.Si)


‘T4’
Tableau VIII.4 : Sb/Si(111) 0.5MC : Energies d’adsorption, distances, nombre et nature de proches voisins Sb-
Si pour chaque site d’adsorption

Site Ead (eV/atome) Distance 1ers voisins (Å) Distance 2émes voisins Distance 3émes voisins (Å) Distance 4émes voisins (Å)
(Å)
-4.17 2.44 (1.Si) 3.91 (3.Si) 4.55 (6.Si) 5.48 (3.Si)
‘Top’
-5.77 2.78 (3.Si) 3.35 (3.Si) 4.76 (3.Si) 5.10 (3.Si)
‘H3’

-5.67 2.63 (1.Si) 2.88 (3.Si) 4.66 (6.Si) 4.81 (3.Si)


‘T4’

Tableau VIII.5 : Sb/Si(111) 0.25MC : Energies d’adsorption, distances, nombre et nature de proches voisins
Sb-Si pour chaque site d’adsorption

En ce qui concerne les faibles recouvrements (θ=1/2MC et θ=1/4MC) le


comportement de l’antimoine sur la surface s’inverse complètement. En effet la stabilité des
sites de haute coordinence (H3 et T4) continue à évoluer progressivement au détriment de la
stabilité du site en Top. L’écart entre les deux positions devient très grand (1.6 eV/atome)
pour θ=1/4MC (pris comme référence de l’adsorption de l’atome de Sb isolé) avec une
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 107

énergie d’adsorption de -5.77 eV/atome pour le site en cfc (H3) et -4.17 eV/atome pour le site
en Top. Les liaisons Sb-Si sur le site H3 continuent aussi à s’écourter pour donner dans le cas
de Sb isolé trois liaisons avec Si premiers voisins à 2.78Å et trois autres avec Si seconds
voisins à 3.35 Å. La préférence, ici, du site H3 peut être interprétée différemment suivant
qu’on la considère comme la meilleure façon de maximiser le nombre de voisins de Sb et
d’adopter le caractère métallique ou de retrouver un nombre de voisins proche de celui dans
son propre volume (6 voisins (modèle théorique) ou 3 voisins à 2.91 Å et 3 autres à 3.35 Å
(expérience)). Toutefois, il faut garder à l’esprit que la position réelle de l’atome de Sb dans
son volume (Sb formant le sommet de deux pyramides) n’a rien à voir avec sa position
adsorbé sur la surface Si(111).

VIII-A.2.b. Densités d’états

Afin de relier les différentes stabilités énergétiques à la structure électronique du


système, on commence par reporter dans la figure VIII.3, pour chaque site d’adsorption, les
différentes densités d’états pour θ=1MC dans le plan de Sb et le plan de Si d’en dessous
(premier plan de Si(111) recouvert). Notons que dans tous les cas traités ici, les LDOS sont
déplacées pour aligner les niveaux de Fermi correspondants.

a) b)
20 20

15 15
DOS

DOS

10 10

5 5

0 0
-0,5 0,0 0,5 -0,5 0,0 0,5
E-Ef E-Ef

c)
20

15
DOS

10

0
-0,5 0,0 0,5

E-Ef
Figure VIII.3 : LDOS de la monocouche de Sb (trait noir) et de la surface de Si (111) (trait en couleurs) pour
un recouvrement d’une monocouche : a) site en Top ; b) site en (T4) ; c) site en (H3).

La stabilité de la position apicale de l’antimoine vient de la disparition de l’état de


surface de la densité locale du Si de surface, consécutive à la saturation de toutes les liaisons
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 108

pendantes. Il s’en suit une réapparition du gap du volume, qui implique une redistribution des
états électroniques vers des états plus liants. Ainsi, Sb passive totalement la surface Si(111).
On peut remarquer que cette passivation supprime aussi l’effet de surface ressenti dans les
plans profonds de la couche (trop) mince. Les densités d’états des sites H3 et T4 indiquent
plutôt un caractère métallique vu l’absence du gap et le fait du simple élargissement de l’état
de surface.
En ce qui concerne l’évolution de la structure électronique en fonction du
recouvrement, l’interprétation des LDOS n’est pas évidente. Plus précisément, pour apporter
une explication via la densité d’états à la tendance du système à préférer le site H3 quand le
recouvrement diminue, il faut comparer les différentes LDOS de surface pour θ=3/4, 1/2 et
1/4 MC, ce qui veut dire dans chaque cas la densité moyenne de tous les atomes Si
(inéquivalents) de la surface. On observe que, plus le recouvrement diminue, plus le nombre
de liaisons pendantes augmente sur la surface (sites Si vacants) ce qui induit une grande
perturbation sur les densités au voisinage du niveau de Fermi.

a) b)
20
20

15
15
DOS

10
DOS

10

5
5

0
-0,5 0,0 0,5 0
-0,5 0,0 0,5
E-Ef E-Ef

c)
20

15
DOS

10

0
-0,5 0,0 0,5

E-Ef
Figure VIII.4 : LDOS de la surface propre (trait noir) comparé à LDOS moyenne de la surface après le dépôt
de Sb isolé (trait en couleurs) : a) site en Top ; b) site en (T4) ; c) site en (H3).

Sur la figure VIII.4 nous présentons la LDOS de la surface avant (trait noir) et après
(trait en couleur) l’adsorption d’un atome isolé sur chacun des trois sites. Une interprétation
rigoureuse de ces états devrait se faire en augmentant dans nos calculs le nombre de points K
afin d’éviter les nombreux pics observés dans la bande de valence. Toutefois, étant donnée la
taille de la supercellule (26 atomes), un tel investissement coûterait un très gros temps de
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 109

calcul pour un effet dont l’interprétation ne serait pas forcément possible. Nous n’avons pas
analysé ici les LDOS de Sb qui ne présentent pas d’évolution très claire de leurs structures
avec la nature du site.
Bien que les LDOS de Sb ne nous donnent pas d’information particulière, on note une
signature du type de site sur les niveaux électroniques plus profonds, qui pourraient être
analysés expérimentalement par la technique de photoémission de niveaux de cœur. Ainsi, on
peut comparer sur la figure VIII.5, aux deux recouvrements extrêmes (θ=1/4, et θ=1), les
positions des niveaux de cœur 4d de Sb pour les trois sites d’adsorption considérés avec celle
de Sb en volume. On remarque que pour l’atome de Sb isolé sur la surface (figure VIII.5.a) le
niveau de cœur de Sb adsorbé en site H3 coïncide exactement avec celui de l’atome de Sb du
volume. Si le spectre de l’atome adsorbé en site T4 indique un léger décalage vers les hautes
énergies (ε=0.01eV), celui de l’atome Sb adsorbé en Top est considérablement déplacé
(ε=0.08eV). La coïncidence des états de cœur des sites ternaires avec celui du volume est
cohérente avec le fait que l’antimoine isolé maximise son nombre de voisins Si pour tendre
vers sa coordinence du volume. En ce qui concerne le recouvrement d’une monocouche, le
déplacement des spectres (figure VIII.5.b) est moins significatif. Les états de cœur des
différentes géométries d’adsorption sont tous autour de l’état de cœur du volume.
L’information à retenir de cette analyse en vue d’expériences futures est donc la possibilité
d’infirmer l’existence d’un mode d’adsorption apical aux faibles recouvrements par
spectroscopie de niveaux de cœur, et de vérifier ainsi les prévisions de nos calculs théoriques.

a) b)

Figure VIII.5 : LDOS du niveau de cœur pour l’atome Sb volumique (violet) Sb en site H3 (bleu), Sb en site T4
(vert) et Sb en Top (rouge). a) θ=0.25MC et b) θ=1MC.

VIII-A.2.c. Transferts de charges

Une dernière donnée issue de nos calculs concerne la redistribution de charge induite
par l’adsorption, qui peut être expérimentalement observable et surtout servir de base à tout
modèle semi-empirique prenant le relais des calculs ab initio. Rappelons que toute
approximation doit traiter de façon auto-cohérente la charge, et que la conservation de celle-ci
aux sites de défauts dans les métaux n’a aucune raison d’être généralisable aux semi-
conducteurs. Nous présentons dans le tableau VIII.6 le nombre d’électrons au niveau de
Fermi à l’intérieur des sphères atomique et dans les interstices pour le silicium et l’antimoine
dans différentes configurations.
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 110

Sb volume Si volume

Sphères Rt interstices Sphères Rt interstices

11.2 3.8 ⇒ 3.6 0.4 ⇒


fraction : 26% fraction : 11%

Surface 1x1 θ=1MC (Sb en Top) Surface 2x2 θ=0.25MC (Sb en H3)
Sphères Rt interstices Sphères Rt interstices Sphères Rt interstices Sphères Rt interstices
Si1 : 3.445 ⇒fraction Si1 : 3.020 ⇒fraction Si1 : 3.445 ⇒fraction Si1 : 3.147 ⇒fraction
Si2 : 3.560 de Si2 : 3.554 de Si2 : 3.554 de Si2 : 3.474 de
Si3 : 3.574 11.78% Si3 : 3.568 38.80% Si3 : 3.568 11.92% Si3 : 3.563 48.76%
Si4 : 3.580 Si4 : 3.578 Si4 : 3.571 Si4 : 3.578
Sb : 11.771 Sb : 11.371
Tableau VIII.6 : Remplissage au niveau de Fermi dans les sphères Rt et les interstices pour Sb et Si de la
surface mince avant et après le dépôt de Sb : SiX est équivalent au Si du plan X. Dans le cas de la surface 2x2 est
présenté le remplissage moyen de tous les Si du plan X (X=4 équivaut au Si du centre de la couche mince). Les
fractions représentent le pourcentage des électrons dans la région interstitielle calculé par rapport au nombre total
d’électrons dans Si et Sb. Les caractères gras réfèrent aux atomes subissant un transfert de charge important.

Le premier résultat concerne la surface de Si pure (comparée au remplissage du


volume). On constate qu’il n’y a pratiquement pas de transfert (un léger déficit de 4%),
indiquant que l’hypothèse de neutralité utilisée par M. Ladevèze [51] (cf. chapitre précédent)
n’était somme toute pas si mauvaise.
Lors de l’adsorption, on constate que le transfert de charge s’effectue de Si vers Sb.
L’antimoine gagne des électrons, en bon accord avec le critère thermochimique que Sb est
plus électronégatif que Si. Ce résultat est aussi en bon accord avec des résultats
expérimentaux de spectroscopie haute résolution [65].

VIII-A.3. Evolution de l’énergie d’adsorption avec le recouvrement

La figure VIII.6 récapitule les résultats des tableaux VIII-2/5 pour illustrer la variation
de l’énergie d’adsorption en fonction du recouvrement.

-4,0
Top
H3
T4
-4,4
Eads (eV/atome)

-4,8

-5,2

-5,6

0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0


Recouvrement
Figure VIII.6 : Evolution de l’énergie d’adsorption en fonction du recouvrement pour les sites Top, T4 et H3.
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 111

On retrouve bien sûr le résultat spectaculaire déjà annoncé, à savoir la transition du


mode d’adsorption entre site ternaire à faible recouvrement et site apical à fort recouvrement.
En ce qui concerne les stabilités respectives du site H3 et T4, les choses ne sont pas très
claires : le site H3 est plus stable que le site T4 quelque soit le recouvrement mais de si peu
qu’une contribution entropique ou/et une relaxation locale peut parfaitement renverser leur
ordre de stabilité. La transition de site ternaire/apical se traduit sur la figure par le fait que les
courbes Eads(θ) des deux types de sites se croisent aux environs de θ= 0.7MC. Mais ce qui est
encore plus surprenant, c’est que ces deux courbes varient avec des pentes de signe opposé !
En effet quand l’énergie d’adsorption de l’atome adsorbé en site H3 et T4 diminue (en valeur
absolue) avec le recouvrement, celle du site en top augmente. Ces évolutions traduisent des
natures d’interaction entre adatomes Sb, en partie via le substrat de Si, qui sont
fondamentalement différentes puisque la pente positive (H3, T4) indique des interactions
répulsives entre les atomes de Sb en site ternaire alors que la pente négative (Top) signifie que
ces mêmes adatomes interagissent entre eux de façon attractive lorsqu’ils sont en position
apicale !
Si l’on ne s’intéresse maintenant qu’aux valeurs les plus stables de l’énergie
d’adsorption (figure VIII.7.a), nous distinguons deux régimes de variation de l’énergie avec le
recouvrement. Dans le premier régime (j), θ<0.7MC, l’énergie d’adsorption augmente avec le
recouvrement mettant en évidence une interaction effective de nature répulsive entre
adatomes Sb. Au contraire, dans le deuxième régime (jj), 0.7<θ<1MC, l’énergie d’adsorption
décroît avec le recouvrement, signature d’une interaction effective de nature attractive qui
stabilise le système au delà de θ= 0.7MC.
Une conséquence importante du fait que ce croisement a lieu entre deux courbes de
pentes de signe opposées et non pas de même signe (en général négative) comme c’est
souvent le cas, est que la transition se fait à énergie à peu près constante, entre les deux
valeurs sensiblement égales des deux recouvrements extrêmes : Eads(θ=0.25)= -5.77eV/atome
et Eads(θ=1)= –5.62eV/atome. On aboutit donc en première approximation à une énergie
d’adsorption quasi-constante avec le recouvrement qui nous rappelle le comportement quasi-
Langmuir de nos isothermes expérimentales. Si l’on regarde les choses plus en détail, on
constate que les deux régimes révélés par le calcul permettent d’interpréter ceux qui avaient
été mis en évidence expérimentalement pour rendre compte des déviations des isothermes par
rapport au comportement de type Langmuir et que nous rappelons dans la figure VIII.7.b. La
transition, entre un régime d’interactions répulsives (théorie : (j)) ou nulles (expérience : (i))
en dessous de 0.7 ML et un régime d’interactions attractives ((ii) et (jj)) conduisant à la
formation d’une phase 2D au-dessus, est donc la conséquence d’une transition de mode
d’adsorption !
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 112

-4,0
Top
-2.9
H3
T4

Eads (eV/atome)
-4,4
-3.0
Eads (eV/atome)

-4,8
-3.1

-5,2
-3.2
(i) (ii)
-5,6
(j) (jj)
-3.3
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
Recouvrement Recouvrement

Figure VIII.7.a : Evolution de l’énergie d’adsorption la Figure VIII.7.b : Evolution de l’énergie d’adsorption en
plus stable en fonction du recouvrement (trait plein rouge). fonction du recouvrement calculé à partir des isothermes
Le régime (j) correspond à la stabilité du site H3 et le expérimentales.
régime (jj) correspond à la stabilité du site en Top.

Quant à ce changement de site, son origine est à relier à la mémoire qu’a Sb de sa


coordinence volumique. Il choisit ainsi quand il est isolé de s’adsorber sur le site H3 où il
maximise son nombre de voisins Si. Puis, plus le recouvrement augmente, plus le système est
déstabilisé par l’interaction répulsive entre les atomes Sb. A partir de θ= 0.7MC où le nombre
de voisins Sb-Sb augmente considérablement, il bascule en site apical afin de minimiser son
nombre de voisins Si, saturant ainsi toutes les liaisons pendantes et passivant la surface. Ce
scénario est cohérent avec nos résultats expérimentaux ainsi qu’avec d’autres résultats
rapportés dans la littérature [50]. L’apparition d’une phase bidimensionnelle à partir d’un
recouvrement critique (θc eq> 0.7MC) va bien dans le sens du changement d’une interaction
répulsive à une interaction attractive. La position des atomes dans les structures (√3x√3 et
2x1) rapportée pour le recouvrements d’une monocouche correspond bien au site apical, au-
dessus de l’atome de Si du premier plan de la surface (légèrement décalé). Le site préférentiel
des atomes de Sb pour les faibles recouvrements rapporté par H. B. Elswijik et al. [21]
correspond bien lui aussi, comme prédit ici, au site de symétrie ternaire (T4).

VIII-B. Modes de substitution

Pour compléter notre étude du comportement de Sb sur la surface nominale Si (111),


nous avons aussi testé un éventuel processus de substitution, malgré la tendance à la
séparation de phase volumique de l’alliage SbSi. A cette fin nous analysons deux cas
extrêmes susceptibles de se produire, soit la substitution partielle (un seul atome Si substitué
sur quatre) soit la substitution totale de la couche de silicium. Rappelons cependant que si la
première a été évoquée par quelques auteurs comme étant un processus possible pendant les
premiers stades de l’adsorption [21, 31], la dernière n’existe pas dans le cas de l’antimoine
(c’est plutôt le cas de As/Si(111) [50]).
Nous utilisons les mêmes surfaces que celles utilisées pour l’adsorption c’est à dire la
surface 1x1 pour la substitution totale du premier plan de Si et la surface 2x2 pour la
substitution partielle. L’énergie de substitution est calculée comme la différence entre le
système final subissant la substitution de NSb atomes de Si par Sb et le système initial formé
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 113

de la couche mince Si (111) pourvue de N atomes de Si et les atomes de Sb dans leur phase
vapeur :

Etot ( Sb / Si ) − ( E tot ( Si (111)) − N Sb Etot ( Si ( volume )) )


E sub = − E vap ( Sb ) . (2)
N Sb

Les atomes Si substitués sont supposés se retrouver dans des crans, donc à leur énergie de
volume. Pour désigner les sites de la surface pouvant accueillir l’atome Sb substitué à l’atome
Si de surface, on se permettra par analogie avec les notations en adsorption de continuer de
parler de site "Top" pour la substitution de réseau (Sb prend la place de Si substitué voir
figure VIII.8) et de site "H3" pour la substitution de réseau inversé (Sb se met sur le grand
creux et inverse la structure hexagonale du substrat). Nous ne considérerons pas ici le site
"T4", qui correspond à la substitution en faute d’empilement (Sb se met au-dessus de Si du
second plan) et qui est particulièrement défavorable. Comme pour le cas de l’adsorption nous
relaxons la distance verticale qui sépare l’atome de Sb de la surface Si pour chacun des sites
de substitution.

Sb/Si(111): substitution

Figure VIII.8 : Modèle schématique de substitution


complète en réseau (Top) (Sb (symboles pleins),
Si(symbole vide), les deux traits représentent le plan
virtuel des Si substitués).

Les résultats de la substitution totale et partielle illustrés par les courbes de la figure
VIII.9. montrent que la substitution totale du plan Si et l’incorporation en site de réseau et en
réseau inversé stabilisent le système autant que l’adsorption, avec des valeurs d’énergie de
substitution respectives de -5.87 eV/atome et –5.79 eV/atome. En ce qui concerne la
substitution partielle, le scénario d’un atome de Sb substituant un atome de Si de la surface et
se logeant en réseau inversé (H3) est très improbable. Cependant son incorporation à la place
du Si substitué (substitution partielle (Top)) donne une énergie à peine moins stable que la
substitution totale en site de réseau.
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 114

Esubst (eV/atome)

-3

-4

-5

-1 0 1 distance par rapport à la surface

Figure VIII.9 : Substitution de Si par Sb : Energie de substitution totale (symbole plein) et partielle (symbole
vide) en fonction de la distance par rapport au premier plan Si de la surface Si(111). Les symboles en rouge
représentent la substitution en site de réseau et les symboles en bleu représentent la substitution en réseau
inversé.

Dans les trois cas les plus stables de la substitution (soit la substitution complète et partielle
en site de réseau soit la substitution totale en site de réseau inversé), on remarque que la
tendance de l’antimoine à maximiser son nombre de voisins contrôle fortement sa stabilité
(tableau VIII.7).

Site de substitution Nature de Esub Distance, Distance, Distance, Distance,


substitution (eV/atome) nombre et nombre et nombre et nombre et
nature des 1ers nature des 2èmes nature des 3èmes nature des 4èmes
voisins voisins voisins voisins
Site de substitution Substitution -5.87 2.56 (3.Si) 3.84 (6.Sb) 4.25 (3.Si) 4.61 (3.Si)
en réseau totale
(Top) Substitution -5.67 2.54 (3.Si) 3.86 (6.Si) 4.23 (3.Si) 4.60 (3.Si)
partielle
Site de substitution Substitution -5.79 2.56 (3.Si) 3.84 (6.Sb) 4.25 (3.Si) 4.41 (1.Si)
en réseau inversé totale
(H3) Substitution -3.97 2.65 (2.Si) 3.15 (3.Si) 4.66 (3.Si) 4.96 (3.Si)
partielle
Tableau VIII.7 : Substitution partielle et totale selon les sites : énergie de substitution, distance, nombre et
nature des proches voisins.

Il est tentant maintenant de tracer, comme pour les énergies d’adsorption (Fig. VIII.6),
les courbes représentant l’évolution de l’énergie de substitution en fonction de la
concentration d’atomes incorporés. C’est illustré sur la figure VIII.10. La comparaison de ces
deux figures appelle un certain nombre de commentaires :

- Le site Top est favorable sur toute la gamme de concentration. Contrairement au cas
de l’adsorption, on n’observe pas de changement de site préférentiel avec la
concentration, même si on n’en est pas loin pour la couche complète.
- Les énergies d’incorporation sont très similaires à celles de l’adsorption. Il faut
rappeler cependant que les références énergétiques ne sont pas équivalentes dans les deux
cas, ce qui nous empêche de faire une comparaison trop quantitative. Nos résultats
suggèrent seulement une compétition possible entre les deux mécanismes. Le fait
CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 115

d’observer l’incorporation du point de vue expérimental est donc probablement dû à des


effets d’origine cinétique.

- Contrairement au cas de l’adsorption, les deux pentes ont ici le même signe, ce qui
reflète une tendance à la démixtion dans le plan de surface (interactions effectives de
nature attractive entre atomes Sb). L’incorporation peut donc se produire sans changement
de tendance chimique entre volume et surface.

substitution en réseau (Top)


-4,0
substitution en réseau inversé (H3)

-4,5
Eads (eV/atome)

-5,0

-5,5

-6,0
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
C

Figure VIII.10 : Evolution de l’énergie de substitution en fonction de la concentration d’atomes incorporés.


CHAPITRE VIII : Sb/Si(111) : calculs ab-inito 116
Conclusion générale de l’étude 117

CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES

La physique de l’adsorption de Sb sur Si(111) s’est révélée extrêmement riche, les


études expérimentales et théoriques conjointes que nous avons pu mener nous ayant conduits
sur des chemins insoupçonnés. C’est notamment le cas de la mise en évidence d’une
évolution de l’énergie d’interaction entre espèces adsorbées permettant de passer, au delà d’un
certain recouvrement critique, d’un système à interaction effective de nature répulsive
(théorie) ou nulle (expérience) à un système à interaction effective de nature attractive
(théorie et expérience). C’est la transition entre un site d’adsorption de symétrie ternaire et un
site d’adsorption apical qui est à l’origine du changement de nature de l’interaction latérale
entre atomes d’antimoine.
Plus précisément, l’étude théorique (à 0K) permet d’imaginer un scénario lié à la
tendance de l’antimoine de retrouver sa coordinence volumique. Ainsi, en début d’adsorption,
les adatomes d’antimoine s’adsorbent sur des sites H3 où ils maximisent leur nombre de
voisins Si. Lorsque le recouvrement augmente, le système est déstabilisé par les interactions
répulsives entre atomes Sb. Ainsi, au-delà d’un certain recouvrement critique où le nombre de
voisins Sb-Sb augmente considérablement, les sites préférentiels d’adsorption deviennent les
sites apicaux permettant de minimiser le nombre de voisins Si. Au vu de cette argumentation,
on peut s’attendre à retrouver ce type de transition de façon assez générale dès lors que
l’espèce adsorbée présente une structure cristallographique de volume de faible compacité (ce
qui est rarement le cas des métaux).
Ce scénario permet d’expliquer en grande partie les résultats expérimentaux, bien
qu’ils soient obtenus à plus haute température (aux alentours de 1000 K). En effet la
différence en énergie entre les deux sites préférentiels aux deux recouvrements extrêmes
(atomes isolés et couche complète) est suffisante pour que les effets entropiques ne puissent
pas inverser la tendance. Ainsi le scénario proposé est-il compatible avec les isothermes
expérimentales d’adsorption/désorption qui, bien que présentant une allure continue, semblent
receler une transition entre deux domaines d’adsorption.
Les isothermes ainsi construites décrivent, au premier ordre, une situation d’adsorption d’un
fluide supercritique avec transition continue entre une phase diluée et une phase dense. Ce
comportement est un peu contradictoire avec notre interprétation des cinétiques
d’adsorption/désorption qui mettent en évidence une condensation 2D brutale pour un
recouvrement de l’ordre de 0.7 monocouche. Cependant, divers faits nous permettent de
penser qu’il existe réellement une condensation 2D autour de 0.7 monocouche. Il s’agit (1) de
l’existence de la phase d’équilibre 5√3x5√3, une structure assez complexe reportée pour
θ>0.7MC, par la plupart des auteurs, (2) de l’apparition d’un régime attractif au delà de
θ>0.7MC, (3) de la modélisation phénoménologique des courbes cinétiques qui a permis
d’ajuster l’état stationnaire à l’aide d’une condensation 2D augmentée de la présence de
quelques atomes en seconde couche. Ces atomes de seconde couche peuvent éventuellement
se désorber sous forme de monomères ou de dimères mais leur énergie de désorption, plus
faible que celle des atomes de Sb de la première couche (à cause de l’interaction
supplémentaire Sb/Si), ne peut en aucun cas donner lieu à l’apparition d’une augmentation de
l’énergie d’adsorption telle que celle relevée expérimentalement et théoriquement.
Conclusion générale de l’étude 118

Ainsi reste ouverte la question de l’absence de marche correspondant à la


condensation sur les isothermes. Deux explications peuvent être avancées. La première
consiste simplement à supposer que, compte tenu des barres d’erreur, il nous est impossible
d’observer une telle marche et dans ce cas, l’utilisation d’autres techniques expérimentales qui
mesurent directement les quantités adsorbées sur la surface nous permettra de diminuer la
taille des barres d’erreurs. La seconde explication pourrait être liée à la nature supercritique
du fluide adsorbé dans le domaine de température étudié. Ainsi pourraient exister dans le
fluide supercritique des fluctuations de densité permettant d’atteindre localement des
recouvrements suffisants pour amorcer la condensation 2D. La signature cinétique
(généralement meilleure que la signature à l’équilibre) pourrait alors être plutôt liée à la
coalescence des îlots 2D. Il nous semble que dans l’état actuel de nos résultats nous avons
tous les ingrédients nécessaires pour développer une simulation Monte Carlo qui pourrait
permettre à court terme de répondre à certaines des questions ainsi posées.
Enfin, notre travail ouvre plusieurs perspectives à long terme. Il s’agit par exemple de
vérifier expérimentalement l’effet de la transition de site sur les niveaux de cœur de
l’antimoine, ou de suivre par diffraction des rayons X la dynamique d’apparition puis de
complétion des différentes phases 2D identifiées. Dans les deux cas l’utilisation du
rayonnement synchrotron est nécessaire pour des raisons de brillance, d’intensité, de
dynamique et donc de sensibilité à la surface.
Par ailleurs, si la condensation 2D supposée semble n’avoir qu’un faible effet sur
l’énergétique ou la thermodynamique du système, il pourrait en être autrement en terme de
contraintes induites à la surface. En effet, de façon intuitive, la condensation bidimensionnelle
d’un gaz en une phase dense doit donner naissance à des variations de contraintes de surface
importantes. Ce sont ces variations qui peuvent être mesurées et/ou calculées, sachant que
nous disposons au laboratoire d’un bâti de mesure de la variation de contrainte de surface
basé sur la méthode de la courbure (interféromètre optique). Ces mesures pourraient être
éventuellement couplées à une modélisation atomistique de l’adsorption avec un potentiel
effectif dépendant de la distance qui, outre l’analyse de la structuration de surface, permettra
d’étudier la relaxation des contraintes.
Appendice A 119

APPENDICE A

A. Coefficient de collage

Afin de calculer la variation du coefficient de collage avec le recouvrement Müller et al. [5]
ont procédé de la manière suivante :
L’échantillon de Si est maintenu à une température constante de 400 °C et est exposé à un
flux préalablement étalonné. La première étape consiste à envoyer une quantité d’antimoine
connue de façon à obtenir une surface de Si initialement recouverte (θi ). Rappelons qu’à cette
température rien ne désorbe. L’étape suivante consiste à enregistrer la cinétique de
l’adsorption sur ce substrat déjà recouvert. On ouvre le diaphragme à t=t0, une fraction (1-α0)
est alors réfléchie (surface partiellement recouverte pour θi> 0MC), puis le signal augmente
progressivement jusqu’à atteindre l’équilibre à t=t1.
L’expérience est ainsi refaite pour plusieurs recouvrements initiaux. Les différentes valeurs de
α0 sont mesurées comme illustré dans la figure schématique suivant.

i) ii) iii)

Figure A.1 : représentation schématique pour différentes valeurs de α0 mesurées. i) θi ≅ 0 MC. ii) θi ≅ 0.8 MC. iii) θi ≅ 1 MC. le trait rouge
représente l’ouverture du diaphragme.
Appendice A 120
Appendice B 121

APPENDICE B

B. Caractéristique du détecteur

Les tétramères Sb4 entrants dans le SM subissent plusieurs chocs avec les électrons
accélérés de la chambre d’ionisation. Ils sont ionisés et aussi dissociés quand l’énergie des
électrons est assez forte.
Pour mesurer les différentes espèces détectées par le SM on se met sur un des canaux
configurés de la façon suivante :
Le canal 1 de sensibilité K1 correspond à la détection de monomères Sb1 de masse molaire
121g. Le centre de masse est 121.76 et la plage de détection comprend les isotopes allant de
121 (isotope naturel en 57.36%) à 123 (isotope naturel à 42.64%).
Le canal 2 de sensibilité K2 correspond à la détection de dimères Sb2 de masse molaire 242g.
Et ainsi de suite pour les molécules Sb3 et Sb4.
Dans le cas de l’énergie d’ionisation utilisée (100 eV), les tétramères Sb4 sont uniquement
dissociés en Sb1 et Sb2 avec un rapport Sb1/Sb2=1.5 ± 10%.
Soit le signal des monomères I1 et le signal de dimères I2 détectés respectivement sur le canal
1 et le canal 2. Le signal total de tétramères Sb4 en résultant est :

I = I1+I2 , (1)

avec I1=K1nSb1, I2=K2nSb2 et ni le nombre de molécules i détectées. On note

I1/ I2=χτ ≈1.5. (2)

Avec χ=K1/K2 et τ=nSb1/nSb2. On peut de même écrire l’équation (1) sous la forme

I = K1[nSb1+1/χ.nSb2]. (3)

I doit être une constante à l’équilibre. On doit donc en traçant la quantité [nSb1+1/χ.nSb2]
trouver une variable χ telle que cette quantité soit une constante.
La figure présentée ci dessous illustre ce résultat. Dans cette figure les signaux ISb1 et ISb2
sont enregistrés pour une valeur de flux incident de 3.24 atomes/s/cm2.

1,1

1,0

0,9

0,8

0,7

0,6

Figure A.1 : Somme totale des signaux enregistrés I en utilisant la


Volts

0,5

0,4 ISb1
ISb2
valeur de χ = 4.10.
0,3
I=(ISb1+4,1*ISb2)
0,2

0,1

0,0

400 500 600 700 800 900


Température (°C)
Appendice B 122

Le coefficient χ ne variant quasiment pas avec le flux est calculé à partir de la différence des
signaux ISb1 et ISb2 mesurés dans les températures limites de 900°C et 400°C.

900°C − I 400°C
ISb
χ= 1 Sb1
≈ 4.10 .
ISb
400°C
2

On calcule alors la somme des deux signaux comme indiqué dans l’expression (3) et on a une
valeur constante de I à peu prés égale à 1.033 ± 0.034.
En utilisant la relation (2) avec la valeur χ obtenue, on trouve τ=nSb1/nSb2=6.15. On en déduit
alors, que quand une molécule d’antimoine est émise de la surface de silicium, on a après
dissociation dans la chambre d’ionisation du SM une moyenne de 3.44 atomes sous forme de
monomère et 0.56 atomes sous forme de dimère.
Appendice C 123

APPENDICE C

C.1. Estimation des paramètres Km et K4

Nous avons essayé d’ajuster les courbes des cinétiques d’adsorption avec le modèle de
Barnett [6] en fonction des deux paramètres K m et K 4 dans un intervalle de température
compris entre 500°C et 600°C. Les résultats obtenus sont présentés ci dessous :

Figure C.1 : courbe de variation du coefficient Km en fonction de la Figure C.2 : courbe de variation du coefficient K4 en fonction de la
température (la barre d’erreur est de ±0.005). température (la barre d’erreur est de ±0.001).

On remarque que le coefficient de désorption K 4 est quasiment indépendant de T (dans le


domaine de température considéré). Le coefficient de migration des espèces Sb4, K m diminue
d’un facteur 3.5 entre T=500°C et T=580°C. Le rapport Km/K4 varie entre 2.3.104 et 0.6.104,
valeur un peu plus importante que celle trouvée dans le cas du silicium (100) soit Km/K4 =103
[6]. Ceci est probablement à mettre en relation avec la différence d’orientation du substrat.

C.2. Coefficient de collage

On présente dans ce qui suit un modèle inspiré de celui proposé par P. Kisliuk [26]
pour calculer le coefficient de collage α(θ).
Soit un système où toutes les molécules de gaz incidentes sont physisorbées et
accommodées sur la surface. Si le coefficient de collage est différent de l’unité, il existe alors
une probabilité 1-α(θ) pour que ces molécules puissent se chimisorber et désorber.
Modèle :
Les molécules Xi incidentes sont considérées comme des précurseurs physisorbés formant
un réservoir pour la chimisorption. La molécule Xi est considérée assez petits pour qu’un seul
atome parmi les i atomes la constituant soit en contact avec un site de surface. Ainsi la
chimisorption ne peut avoir lieu que si (et seulement si) il existe autour de ce site (i-1) sites
proches voisins vacants.
Appendice C 124

Hypothèses de base :
• La probabilité de migration et de désorption de la molécule physisorbée ne
dépend que de l’état d’occupation (pour la chimisorption) du site sur lequel la
molécule est adsorbée.
• Quand la molécule est physisorbée sur un site vacant, sa probabilité de
chimisorption est proportionnelle au nombre de sites proches voisins vides.
• La distribution des sites occupés est aléatoire.

Soit θ la fraction des sites occupés de surface. La probabilité pour qu’un site sur lequel la
molécule est physisorbée soit vide est (1-θ), pour que les n sites autour soient vacants est (1-
θ)n, pour que tous les sites soient vacants sauf un est nθ(1-θ)n-1, etc…
Soit Pa la probabilité pour qu’une molécule soit chimisorbée dans un site avant de désorber ou
migrer vers un autre site. Cette probabilité devient (n-1/n)Pa quand un site proche voisin est
plein et (n-2/n) Pa quand deux sites proches voisins sont pleins, etc..

La probabilité de chimisorption s’écrit alors :

n (n−1) n(n−1) 2
Pa1 = Pa (1−θ) (1−θ) + nθ (1−θ) + n−2 θ +...+ 1 n! θ (1−θ)
n −1 n− 2
θ ( 1− )
n −1

 n n 2 n (n−1)! 

Essayons maintenant d’appliquer le même schéma au cas du tétramère de Sb4. En effet


il est possible d’étudier statistiquement plusieurs configurations pour la molécule Sb4 se
physisorbant sur la surface afin de se chimisorber.

i) ii) iii)

Présentation schématique des trois cas d’adsorption : les points noirs désignent les atomes cherchant un site vacant, les carré rouges
désignent les n sites vacants de la surface.

i) Si on imagine que le tétramère Sb4 se physisorbe sur la surface par la base (3


atomes) et se contente de trouver un seul site parmi les 9 sites de Si(111)
autour pour se chimisorber (figure i), la probabilité de chimisorption s’écrit
alors :

Pa1 = Pa (1−θ) (1−θ) +8θ (1−θ) +......+θ (1−θ)  = Pa (1−θ) (1−θ) +θ  = Pa (1−θ) .
8
3 9 8 8 4 4

   

ii) Soit le tétramère Sb4 se physisorbe sur la surface par le côté (dimère). La
probabilité de chimisorption dépendrait alors que de l’existence de deux sites
premiers voisins libres parmi les 8 sites possibles (figure ii).
Appendice C 125

3 7
7 3.
Pa1 = Pa (1−θ) (1−θ) +7θ (1−θ) +......+7θ (1−θ)  = Pa (1−θ)  (1−θ) +θ  −θ  = Pa (1−θ)
2 8 7 6
   
 
 

iii) Enfin le tétramère Sb4 se physisorbe sur la surface par "la tête" (un seul atome)
et se chimisorbe que s’il existe trois sites vides parmi les 6 premiers voisins
(figure iii).

6 5 3 3 2 5
5 4 
Pa1 = Pa (1−θ) (1−θ) +5θ (1−θ) +......+10θ (1−θ)  = Pa (1−θ)  (1−θ) +θ  − θ − 5θ (1−θ) 
1 .
   
 
2
[
= Pa (1−θ) 1+ 4θ − 5θ ≅ Pa (1−θ)
5 4
] 2.5± 0.1
.

Sachant que ces différentes configurations existent ensemble, on écrit d’une façon générale la
probabilité de chimisorption de la molécule Sb4 :

Pa1 = Pa (1−θ)
n
avec 2.5 ≤ n ≤4.

Soit maintenant Pb la probabilité que la molécule physisorbée, séjournant sur un site


vacant (le site vacant est supposé loger une des configurations précédentes), se désorbe. Pb’ la
probabilité que la molécule physisorbée, séjournant sur un site occupé, se désorbe. Les
probabilités pour qu’une molécule physisorbée soit chimisorbée, désorbée, ou qu’elle migre
sur un autre premier site visité sont respectivement :

Pa1 = Pa (1−θ)
n
.
Pb1 = (1−θ) Pb + θPb'' .

Pc1 =1− Pa1 − Pb1 =1−(Pa + Pb ) +θ (2Pa + Pb − Pb') −θ 2 Pa .

Pour le second site visité, les probabilités correspondantes deviennent :

Pa2 = Pc1Pa1 .
Pb2 = Pc1 Pb1 .
Pc2 = Pc21 etc.…, pour Pa3 et Pa4.

La probabilité de collage est alors la somme des probabilités d’être chimisorbé sur le premier,
le second, le troisième, etc.., site visité.

Pa (1−θ ) n Pa (1 − θ ) n
α (θ ) = Pa1 + Pa 2 + .... = Pa (1 −θ ) [1 + Pc1 + P + ...] =
n 2
c1 = .
1− Pc1 Pa (1 −θ ) n + Pb1

Le coefficient de collage s’écrit alors :

(1 −θ ) n
α (θ ) = , avec P = Pb1/Pa.
(1−θ ) n + P
Appendice C 126

Le tableau ci dessous illustre les différentes valeurs des paramètres n et P obtenues par
ajustement avec le modèle proposé pour plusieurs courbes cinétiques à basse température

Température (°C) Flux (Å/s) n P


550 0.0445 3.4 ± 0.05 0.005 ± 3.10-4
580 0.047 3.2 ± 0.2 0.009 ± 7.10-4
550 0.039 2.25 ± 0.2 0.008 ± 5.10-4
650 0.039 2.55 ± 0.3 0.009 ± 1.10-3
550 0.071 4 ± 0.3 0.006 ± 1.10-4

Ce tableau montre que les paramètres ajustables n et P dépendent de la température et du flux


utilisé. Les meilleurs ajustements sont obtenus pour 2.25<n<4.
Soulignons qu’il ne faudrait pas déduire du fait que n varie avec le flux que la "configuration
d’arrivée" des molécules Sb4 sur la surface varie avec le flux ! Le petit modèle statistique
ainsi développé a simplement pour but de montrer que trouver 2.5 ≤ n ≤4 est concevable.
Appendice D 127

APPENDICE D

D. Calcul de la pression saturante de l’antimoine


Appendice D 128

En conclusion, pour une température donnée, la pression tridimensionnelle de l’antimoine


s’écrit :
log P = − 3,85.10 4 xT −1 + 8.102 x log T − 0.038 xT + 7.195.10 −6 xT 2 + 41.157
Références 129

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