Légiférer en Matiére Linguistique
Légiférer en Matiére Linguistique
Légiférer en Matiére Linguistique
Titres parus
Les dynamismes de la recherche au Québec, sous la direction de Jacques Mathieu
Le Québec et les francophones de la Nouvelle-Angleterre, sous la direction de Dean Louder
Les métaphores de la culture, sous la direction de Joseph Melançon
La construction d’une culture. Le Québec et l’Amérique française, sous la direction de Gérard
Bouchard, avec la collaboration de Serge Courville
La question identitaire au Canada francophone. Récits, parcours, enjeux, hors-lieux, sous la direc-
tion de Jocelyn Létourneau, avec la collaboration de Roger Bernard
Langue, espace, société. Les variétés du français en Amérique du Nord, sous la direction de Claude
Poirier, avec la collaboration d’Aurélien Boivin, de Cécyle Trépanier et de Claude Verreault
Identité et cultures nationales. L’Amérique française en mutation, sous la direction de Simon
Langlois
La mémoire dans la culture, sous la direction de Jacques Mathieu
Religion, sécularisation, modernité. Les expériences francophones en Amérique du Nord, sous la
direction de Brigitte Caulier
Érudition, humanisme et savoir. Actes du colloque en l’honneur de Jean Hamelin, sous la direction
d’Yves Roby et de Nive Voisine
Culture, institution et savoirs, sous la direction d’André Turmel
Littérature et dialogue interculturel, sous la direction de Françoise Tétu de Labsade
Le dialogue avec les cultures minoritaires, sous la direction d'Éric Waddell
Échanges culturels entre les Deux solitudes, sous la direction de Marie-Andrée Beaudet
Variations sur l'influence culturelle américaine, sous la direction de Florian Sauvageau
Produire la culture, produire l'identité ?, sous la direction d'Andrée Fortin
Les parcours de l'histoire. Hommage à Yves Roby, sous la direction de Yves Frenette, Martin Pâquet
et Jean Lamarre
Les cultures du monde au miroir de l’Amérique française, sous la direction de Monique Moser-
Verrey
Aspects de la nouvelle francophonie canadienne, sous la direction de Simon Langlois et Jocelyn
Létourneau
Médiations et francophonie interculturelle, sous la direction de Lucille Guilbert
Discours et constructions identitaires, sous la direction de Denise Deshaies et Diane Vincent
Médias et milieux francophones, sous la direction de Michel Beauchamps et Thierry Watine
Envoyer et recevoir. Lettres et correspondances dans les diasporas francophones, sous la direction
d’Yves Frenette, Marcel Martel et John Willis
Traduction et enjeux identitaires dans le contexte des Amériques, sous la direction de Louis
Jolicoeur
Balises et références. Acadies, francophonies, sous la direction de Martin Pâquet et
Stéphane Savard
Légiférer en matière linguistique
sous la direction
de Marcel Martel et Martin Pâquet
Maquette de couverture
Hélène Saillant
Révision linguistique et lecture d’épreuves
Jeanne Valois
Infographie
Hélène Saillant
ISBN 978-2-7637-8816-6
les grandes lignes d’un pronostic sur son évolution subséquente et,
enfin, pour élaborer des stratégies thérapeutiques visant à gérer la
situation suivant l’obédience au principe de précaution. Ce dispositif
scientifique se conçoit et s’exprime fonctionnellement par le biais
de discours et de pratiques se réclamant de la démographie, de la
linguistique ainsi que des autres sciences sociales et humaines.
Enfin, cet usage d’un savoir scientifique n’est pas particulier à la
question linguistique. Au XXe siècle, l’État fait appel aux ressources
de l’expertise et, plus généralement, à celles de la pensée scienti-
fique dans sa gestion de multiples dossiers tels que l’aménagement
urbain (Nelson, 2008), la consommation des drogues (Martel, 2006)
et la gestion de la diversité culturelle (Pâquet, 2005).
En aval de l’acte de légiférer, nous entrons de plain-pied dans
le domaine du droit. Dans l’espace politique canadien et québécois,
depuis la Loi constitutionnelle de 1982 et l’enchâssement de la
Charte des droits et libertés, les experts proviennent de plus en plus
du champ juridique et se constituent comme les interprètes habilités
du droit des minorités linguistiques. Passant des assises des commis-
sions d’enquête, des locaux de centres de recherche et des bureaux
ministériels, l’enjeu linguistique occupe dorénavant le devant d’une
scène aux règles nouvelles : celle du tribunal.
Concevoir un problème n’implique pas les mêmes procédés et
ne mobilise pas les mêmes ressources lorsque l’on se trouve dans
le contexte de l’analyse d’un phénomène social ou dans le cadre
d’un procès en cour de justice. En effet, les procès selon le philo-
sophe du droit Ronald Dworkin (1994 [1986] : 3-4) posent trois
sortes de problèmes : ceux de fait – l’établissement de la preuve –,
de droit – les références aux règles de droit, à la jurisprudence et
aux lois afférentes au règlement du litige – et ceux relatifs à la
double question de la moralité et de la fidélité politique – les réfé-
rences aux principes du bien et du mal, de justice et de légitimité
politique. Se substituant dans une certaine mesure à la pensée
scientifique, le juridique se glisse et remplit alors l’espace du
pensable. Dans ce cadre de pensée, la langue n’est plus seulement
un problème pour lequel on mobilise un savoir aux fins de la prise
de décision politique. Elle devient désormais l’objet d’un litige entre
des parties, un litige qui demande à être réglé suivant les normes
6 Marcel Martel et Martin Pâquet
* * *
Marcel Martel,
Chaire Avie-Bennett-Historica en histoire canadienne
History Department, York University.
Martin Pâquet,
Département d’histoire, Université Laval.
Références
Circonscrire
le lieu politique
Page laissée blanche intentionnellement
Laurendeau-Dunton,
quarante ans plus tard
Graham Fraser
Commissariat aux langues officielles
Ottawa
art, Canadian artists, Canadian writers and Canadian life. He was deeply
committed as well to the quality of our public life.1
Comme Bob Rae, je passais une partie de mon enfance dans
une maison tout près de celle des Dunton et je partage ses senti-
ments, et les assume moi-même.
Par contre, Laurendeau représentait une nomination plus
risquée. Il avait passé sa vie profondément engagé dans la politique,
alimentant la polémique du nationalisme québécois. Un leader du
mouvement Jeune Canada dans les années 1930, il fit un séjour à
Paris et, influencé par le politologue français André Siegfried, il
perdit pour toujours toute foi en l’idéologie séparatiste. De retour
au Québec, il devint un chef de file dans le mouvement anti-
conscription au Québec, député du Bloc populaire et un éditorialiste
influent au Devoir.
Laurendeau fut le premier qui, dans un éditorial publié en
1962, a demandé de mener une enquête. Répondant à sa demande,
le premier ministre Pearson forme la Commission et lui offre de la
coprésider. Laurendeau hésita longuement et, en juin 1963, fit une
large consultation sur la décision qu’il avait à prendre. Plusieurs
amis, fatigués des années de bon-ententisme, lui ont conseillé de
refuser. René Lévesque, alors ministre libéral, avait une longue liste
de raisons justifiant un refus, la principale étant l’impact significatif
qu’aurait une éventuelle démission de Laurendeau (Laurendeau,
1990 : 294-295).
Maintes fois, André Laurendeau et Frank Scott se sont trouvés
au cœur des débats de la Commission. Ils étaient tous les deux
québécois : l’un francophone, l’autre anglophone – Scott (1977 : 379)
a prétendu plus tard que le mot anglophone avait été inventé par
la Commission –, et les travaux de la Commission les ont forcés à
faire face aux questions primordiales concernant l’identité et la
nature du pays. Ils ont, tous deux, rédigé un journal personnel durant
la Commission : ce sont des témoignages fascinants. Laurendeau,
par exemple, disait le 4 mai 1964 que la coexistence entre franco-
phones et anglophones serait plus difficile encore qu’il ne l’imaginait.
« Mais pour l’instant il est vrai que, laissé à moi-même, j’éprouve
Législation linguistique
2. « Basically, I bluffed into existence the whole idea of the right to work in French,
as well as English, by staking out the ground with quiet precedents. » (Spicer, 2004 :
106.)
24 Graham Fraser
3. Il est intéressant de noter que le concept de droit et de protection des droits faisait
partie des questions étudiées par la Commission.
4. Selon Djwa (1987 : 319), Trudeau a fait siens plusieurs des points de vue de Scott
sur le Canada et la Constitution comme composante d’une philosophie socialiste :
« C’est grâce à mes contacts avec Frank et en raison de son action que ma pensée
en matière constitutionnelle a pris forme, » Trudeau lui a-t-il expliqué. (dans Fraser,
2007 : 108).
26 Graham Fraser
* * *
langue dans les régions où ils sont les plus nombreux. Les anglo-
phones peuvent travailler en anglais au Québec et partout dans le
reste du Canada. La proportion des anglophones et des franco-
phones dans des institutions fédérales est à peu près là même que
celle de la population canadienne, même si les anglophones au
Québec y sont peu présents. Par ailleurs, on assiste à des amélio-
rations significatives dans la livraison des services provinciaux dans
la langue officielle de la minorité. Et, de plus en plus, la dualité
linguistique devient une composante essentielle de l’identité que le
Canada projette de lui-même.
Un des recherchistes pour la Commission était un jeune
homme, Charles Barker, qui, par la suite, est venu travailler pour le
Commissariat aux langues officielles. Dans un texte qu’il a écrit en
2007, juste avant sa retraite, il a noté que, pendant qu’il travaillait
à la Commission, il a vu l’unifolié être hissé sur la Colline parle-
mentaire pour la première fois. Comme la politique linguistique, le
drapeau est issu d’un débat acrimonieux, polarisant et passionné.
Depuis lors, le drapeau est devenu un élément fondamental de
l’identité canadienne.
Like the Flag, the Official Languages too have shaped the country, and
ourselves […] This is the lasting gift of Laurendeau and Dunton, and these
are the elements that enable us to know who we are and how we can
make our contribution to humanity (Barker, 2007).
En effet, notre vision reflète ce dialogue intense qui s’est
déroulé entre les commissaires il y a une quarantaine d’années ;
c’est une vision que Dunton a nommé plus tard l’équilinguisme : un
pays démocratique avec deux langues officielles, favorisant l’équité
et le respect, reconnaissant l’égalité des droits et créant de réelles
opportunités pour tous. La politique linguistique canadienne est une
politique de respect. C’est une formule qui est fidèle à notre histoire,
et qui nous servira bien à l’avenir : on doit une grande partie de
cette vision au travail remarquable des commissaires.
Références
des frontières de sa patrie, un être ouvert sur le monde (p. 17). Bref,
un homme qui a une solide compréhension du monde et des
manières de l’amender et qui, par sa maîtrise de la parole et de la
plume, parvient à rassembler les citoyens autour de ses idées afin
de les concrétiser. Tel est l’intellectuel, tel fut Frank R. Scott.
5. Bien que ses affinités avec la CCF étaient clairement établies, la LSR ne fut jamais
officiellement liée à un parti politique ; elle constituait plutôt une association qui,
comme elle le définit dans son manifeste, réunissait hommes et femmes « who are
convinced that the present economic order is unjust, cruel, wasteful and inefficient ;
who want to work for the establishment in Canada of a social order in which
production, distribution and service will be organized for the common good rather
than for private profit » (Scott dans LSR, 1975 [1935] : XVI).
Jeter un pont entre les deux solitudes : le rôle de Frank R. Scott 35
6. Cette grève, qui a eu lieu en 1949, marque un tournant important dans l’histoire
sociale du Québec. Elle servit à consolider le mouvement syndical et parvint à
réunir les opposants de Duplessis (Djwa, 2001 : 443).
Jeter un pont entre les deux solitudes : le rôle de Frank R. Scott 41
11. C’est en grande partie en raison de l’influence de la pensée de Scott que Trudeau
flirta au début de sa carrière avec les cercles socialistes ; il s’impliqua dans le CCF
puis, au début des années 1960, il supporta brièvement le NPD avant de se tourner
définitivement vers le Parti libéral (Horn, dans Scott, 1986 : XI).
50 Valérie Lapointe-Gagnon
12. Trudeau, qui est avocat de formation, enseigna le droit à l’Université de Montréal
de 1961 à 1965 ce qui permet d’expliquer son intérêt marqué pour l’œuvre
juridique de Scott.
Jeter un pont entre les deux solitudes : le rôle de Frank R. Scott 51
13. À propos des droits collectifs, Trudeau écrivit : « Si les droits collectifs du Québec
peuvent prédominer, cela veut dire que les Québecois peuvent se ficher pas mal
des Amérindiens [...] qui ont dit que si le Québec se sépare, ils ne partiraient pas
nécessairement avec le Québec, ce que le Québec n’aime pas. Et c’est pour cela
que les droits collectifs sont une théorie dangereuse : des collectivités plus grandes
et plus petites s’affrontent dans le sein d’un même pays, et cela engendre des
guerres civiles. C’est ça des droits collectifs » (Trudeau dans Burelle, 2005 : 52).
52 Valérie Lapointe-Gagnon
14. Les effets de cette approche étant certes bénéfiques pour les communautés
minoritaires, mais plutôt négatifs pour la communauté francophone majoritaire du
Québec.
Jeter un pont entre les deux solitudes : le rôle de Frank R. Scott 53
* * *
Mills, Allen (1997), « Of Charters and Silver, A. I. (1997), The French-Canadian
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Nadeau, Jean-François (1993), « D’un Culture and Modernism in Montreal,
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Sarra-Bournet, Michel (1986), L’affaire
Roncarelli, Duplessis devant les Témoins
de Jéhovah, Québec, IQRC.
Page laissée blanche intentionnellement
The 1960s in Canada : An Era of
Lobbying. Ukrainian Canadians
and the Issue of Bilingualism*
Julia Lalande
Research officer
Faculty of Education, York University
Loomis and Cigler (2007 : 6-7) argue that the political and
social climate of a country is important for the development of its
lobby groups. In the case of the United States, increased immigration
during the postwar era, coupled with constitutional rights of free
speech and redress as well as a power vacuum in the decision
making process led to favorable conditions for the activities of
special interest groups. In Canada, the 1960s also offered an
increasingly positive environment for these types of groups. The
economic upswing of the decade had virtually eradicated unem-
ployment, presenting Canadians with a high level of opportunity
and affluence. Further bolstered by the emerging civil rights,
women’s and protest movements that swept across the border from
the south, the baby-boomer generation was in the privileged position
of being able and willing to question pre-existing norms and tradi-
tions (Owram, 1996 : 159-184, 216-247). And in the case of Canada,
the government in fact formally initiated a nation-wide discussion
that initially centered on questions of bilingualism and biculturalism
and that eventually developed into a discussion on multiculturalism.
In response to the Quiet Revolution in Quebec and the threat of
secession, the Pearson government established the Royal Commis-
sion on Bilingualism and Biculturalism (hereafter B&B Commission)
in 1963 (Temelini, 2003). The B&B Commission was meant to study
the state of bilingualism and biculturalism in Canada by examining
the federal administration, public and private organizations as well
as opportunities for bilingualism in the country (Taylor, 1993 : 2-33;
Government of Canada, 1965 : 143-144). In order to get an impres-
sion of the discourse in the country, the B&B Commission held
pan-Canadian hearings where they met with Premiers, journalists,
and community representatives. As more and more groups became
involved in the discussion, the agenda began to change.
The 1960s in Canada : An Era of Lobbying. Ukrainian Canadians 61
1. LAC, MG 28 V 103, Vol. 24, File 32, John H. Syrnick, The Ukrainian Canadian
Committee : Its Significance in the Canadian Society (Winnipeg, UCC, n.d.).
The 1960s in Canada : An Era of Lobbying. Ukrainian Canadians 63
4. LAC, MG 28 V 119, Vol. 21, File 49, National Executive, Canadian Ukrainian Youth
Association, Resource Material, President’s Thinker’s [sic] Conference,
19 December 1969, p. 1-3.
5. In 1951, 348 boys and 322 girls were enrolled in the organization, by 1962, 567
boys and 612 girls were PLAST members, and in 1969 the numbers had stabilized
at 702 boys and 670 girls (age 7-11, 12-18, 19-25, plus an additional 218 alumni)
(LAC, MG 28 V 103, Vol. 21, File 32, Submission to the Joint Parliamentary
Committee of the Senate and the House of Commons on the Constitution of Canada
by Plast, Ukrainian Youth Association of Canada, March 31, 1971, p. 14-16,
Appendix : Background information on Plast). Waschuk points out that PLAST
experienced a deterioration of its activities starting in the late 1960s due to the
declining birth rate and the decision only to accept Ukrainian speaking children
into the organization (Waschuk, 1988 : 174).
6. LAC, MG 28 V 103, Vol. 11, File 12, UCC, Zvidomlennia ekzekutyvnoho Dyrektora
Komitetu Ukraintsiv Kanady, D-ra S.Ia. Kal’by, 1968-1971 (for the 10th UCC
Congress in October 1971) : Brief submitted to the Government of Alberta by the
Ukrainian Professional & Businessmen’s Club of Edmonton on “The Ukrainian, the
New Canadian Constitution, The Laws of Alberta and the Policies of the Government
of Alberta,” 14 April 1971, p. 10.
The 1960s in Canada : An Era of Lobbying. Ukrainian Canadians 65
mostly rural settling experience of the first wave that had settled in
the prairie regions, where they had turned an inhospitable environ-
ment into valuable farmland. The search for freedom of these first
settlers, coupled with the hardship and discrimination that they had
faced were perpetuated in submissions, speeches and publications
and served as an underlying argument to demand participation,
recognition and equality. Clearly the community attempted to jump
on the bandwagon of the ‘founding nations’, a term that was
reserved for the British and French Canadians during the discussion
(Government, 1967 : XXII). However, as the pioneering argument
was not enough to make a case in the discussion, the importance
of the situation in the homeland became another argument. None
of the waves had ever been able to look back on a free Ukraine,
and even worse, all Ukrainian territories were part of the Soviet
Union since 1945. Community members argued that Ukraine was
being russified and that hence the language and culture had to be
preserved in the diaspora. This task was complicated by the fact that
there had been no new wave of immigrants since the early 1950s
and that Ukrainians could not visit home like other groups, such as
Italians or Germans. Indeed, even among the groups from behind
the Iron Curtain, many Ukrainian Canadians saw their situation as
special, as a quote from Manoly Lupul, a community activist, scholar
and active participant of the discussion, illustrates: “In Canada, the
Baltic peoples are not numerous, and so it is to Canadians of Ukrai-
nian descent that a phrase made popular by French Canadians in
recent years best applies: ‘We are not a people like the other(s)’.
For truly we are not” (quoted in Lalande, 2006 : 54). Therefore
community representatives demanded more support – both financial
and moral – for their language and culture from the Canadian
government.
The year 1971 turned out to be important for Canada and for
Ukrainians in particular, but not all developments were of a positive
nature. One event in particular illustrated the fundamental challenge
that the group faced in the diaspora : Trudeau’s visit to the Soviet
Union in May. Not only had the Prime Minister ignored Ukrainian-
68 Julia Lalande
call the government’s attention not only to the human rights situation
in the Soviet Union, but also to the requests and wishes of Ukrainians
within Canada. Apart from demanding constitutional guarantees for
the Ukrainian language and culture in Canada, the UCC requested
sufficient Government personnel that could be advised on
Ukrainian-Canadian matters and more bilingual Ukrainian Canadians
in senior advisory positions. In order to be able to counsel the
government “on the complex and sensitive problems relative to the
Ukrainian community in Canada and their interests abroad,” it was
suggested that these people would spend some time at the UCC
head office and attend some Ukrainian national conferences.13
Although the community did not receive a direct apology as
originally demanded, the issue was laid to rest rather amicably. The
Prime Minister met with community representatives, and Manoly
Lupul later reminisced : “Trudeau read extracts form his earlier
remarks and yielded nothing in substance on the comparisons he
had drawn. He appeared genuinely concerned, however, that the
Ukrainian-Canadian community was, as the memorandum put it,
‘deeply hurt’ by his recent statements” (Lupul, 2005 : 165). And at
the ensuing press conference, the UCC representative Iaremovych
was rather reserved, and – trying to avoid probing questions by the
journalists – stated that “perhaps some of his [Trudeau’s] statement
was distorted.”14 This incident had shown once more that despite
the community’s repeated efforts, Ukrainian Canadians remained
incapable to effectively influence Canada’s foreign policy. Referring
to Trudeau’s intervention on behalf of prospective Jewish immigrants,
Nesdoly mused in 1981: “Ukrainian Canadians might begin to
wonder if their able efforts in the cultural and human rights fields
were doomed to failure, as their campaign for Ukraine’s indepen-
dence had been. They might also wonder, despite status gains made
as a result of the government’s adoption of the policy of multi
13. LAC, MG 28 V 103, Vol. 23, File 57, Letter from Kushnir to Trudeau, 7 June 1971.
Attachment : Memorandum of the UCC, Ottawa, 7 June 1971, pages 1-2, quote
from p. 1.
14. LAC, MG 28 V 103, Vol. 49, File 12, Press Conference held in Ottawa on Monday,
June 7th, 1971, following meeting of representatives of Ukrainian Canadain [sic]
Committee and Prime Minister Pierre Trudeau, p. 1.
70 Julia Lalande
15. “This legislation also created the commissioner of official languages to oversee the
implementation of the law, promoted the bilingualization of federal civil service,
and, most importantly, ensured that the institutions of the federal government would
provide services in either French or English, depending on the consumer’s
preference” (Tanguay, 2002 : 150f).
16. LAC MG 31 E 55 Vol. 10, File : Secretary of State, Statement by the Prime Minister,
House of Commons, 8 October 1971, p. 1-6.
The 1960s in Canada : An Era of Lobbying. Ukrainian Canadians 71
This was especially true for school curricula, textbooks, the media,
and research that dealt with the contribution of ethnic groups to the
development of the country.17 However, the new multiculturalism
policy saw the preservation of culture as a private task. Groups had
the opportunity to maintain their heritage through government
programs, but they had to apply for – mostly short-term – grants
and all the endeavors to mobilize their members had to come from
within the community itself. The multiculturalism policy did not
guarantee survival for the ‘other ethnic groups’, but focused more
on inter-group relationships. And this led, eventually, to some disap-
pointment within the Ukrainian-Canadian community. Manoly Lupul
can serve as an example for the reaction to the new policy, stating
in retrospection that he had been much exited once the policy was
released because there finally was an answer and an answer that
affirmed multiculturalism.18 However, in his memoir, Lupul takes a
more cautionary stand on his reaction to the multiculturalism policy
(Lupul, 2005: 168f). Only a few years after the announcement of
the policy, many Ukrainian-Canadian organizations were disap-
pointed that funds originally diverted towards multiculturalism
projects and festivals had either dried up or were directed towards
projects that helped fight racism and accommodate immigrants in
a Canadian society that mostly dealt with an influx of visible mino-
rities (Burnet and Palmer, 1988 : 226-227; Avery, 1995 : 213-218).
* * *
17. The B&B Commission supported and financed a variety of research projects (for
examples see : Findlay et al., 1974). Ukrainian was introduced as an accredited
subject in high schools, for example in Ontario in 1972 (Gregorovich, 1991:
44).
18. LAC, MG 31 D 58, Vol. 8, File 17, Lupul : The Federal Government, Multiculturalism,
and Education in Canada, p. 1f.
72 Julia Lalande
reassurances for the many” (quoted in Loomis and Cigler, 2007: 6).
The multiculturalism policy clearly falls into the latter category, and
one could argue that it was not a success for Ukrainian Canadians
because their group never managed to influence the government in
regards to foreign affairs. However, from an internal, Canadian
perspective, the multiculturalism discussion, the policy and
Ukrainian-Canadian involvement in it can be interpreted as a
success.
The multiculturalism discussion and the ensuing policy were a
success because the concept of Canada as a multicultural society
became part of an overall Canadian identity. The debate had offered
Canadians a forum to voice their hopes and fears, and through the
1971 policy and through sections 15 and 27 of the Canadian Charter
of 1982,19 all Canadians received a legal and political framework
to stand up for their ideas (Burnet and Palmer, 1988 : 227-228). And
Ukrainian-Canadian lobbying efforts of the 1960s can also be inter-
preted as a success for a variety of reasons. First, they allowed the
nationalist community to outwardly present a united front and be
seen as one community that actively contributed to a pan-Canadian
discussion. Although Ukrainians did not organize in response to the
multiculturalism discussion itself, they did change their lobbying
tactics and approach due to the emerging debate. The focus shifted
from the situation of displaced persons and Ukraine that had domi-
nated the community’s attention during the 1940s and 50s to issues
of bilingualism and biculturalism. And these issues were understood
beyond the limited framework set up by the B&B Commission.
Naturally, internal disputes continued to surface, for example
surrounding topics such as bilingualism and trilingualism (Lupul,
2005 : 51), and more research needs to be done to determine the
full scope of these internal divisions. Outwardly, however, the
submissions to the B&B Commission and the active participation in
19. Section 15 stressed the “equality before and under the law […] without
discrimination based on race, national or ethnic origin, colour, religion, sex, age
or mental or physical disabilities” and section 27 affirmed : “This Charter will be
interpreted in a manner consistent with the preservation and enhancement of the
multicultural heritage of Canadians” (Constitution Act 1982, <http://laws.justice.
gc.ca/en/const/annex_e.html>, Stand January 22, 2006). For an implementation of
the Charter, see Tanguay, 2002 : 155.
The 1960s in Canada : An Era of Lobbying. Ukrainian Canadians 73
Loomis, Burdett A., and Allan J. Cigler Tanguay, Brian (2002), “The Politics of
(2007), “Introduction. The Changing Language in Québec : Keeping the
Nature of Interest Group Politics”, in Conflict Alive”, in Stephen Brooks
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Routledge.
Page laissée blanche intentionnellement
Politique linguistique provinciale
et groupe de pression : le cas
de la SANB, 1973-19871
1. Je tiens à remercier le CRSH pour son soutien financier ainsi que Marcel Martel,
Martin Pâquet, Mélissa S.-Morin et Jeanne Valois pour leurs commentaires critiques
et leur soutien moral. Il va sans dire que cette étude n’aurait pu voir le jour sans
leur aide.
78 Patrick-Michel Noël
faire valoir les intérêts collectifs des Acadiens du N.-B. – la commu-
nauté linguistique et ethnique minoritaire provinciale la plus
importante au Canada – en exprimant leurs aspirations collectives
et en canalisant leurs revendications. La SANB est financée princi-
palement par le Secrétariat d’État fédéral qui encourage, au moyen
de subventions, le maintien et l’épanouissement d’associations
provinciales pour défendre les droits de la minorité linguistique
officielle de chacune des provinces canadiennes. Se donnant notam-
ment pour tâche « d’intervenir auprès des pouvoirs publics dans
l’élaboration et la mise en œuvre de mesures législatives et politi-
ques visant à assurer le bien-être des Acadiens du Nouveau-Brunswick »
(SANB, 1979 : 3), la SANB veille notamment à ce que le régime
linguistique provincial respecte leurs droits.
Cette étude de cas a pour objectif d’approfondir les connais-
sances sur le rapport dialogique et dialectique entre les groupes de
pression et l’État dans l’élaboration des politiques linguistiques.
Nous soutenons que le gouvernement Hatfield a élaboré et mis en
œuvre une politique linguistique de bilinguisme visant à atténuer
les tensions entre les deux communautés linguistiques de sa province
pour assurer la paix sociale et bâtir une nouvelle identité
néobrunswickoise. Cette politique se fonde sur un dispositif juridico-
constitutionnel dont les principes ont été débattus par la SANB afin
qu’ils répondent aux besoins des Acadiens. Elle a renforcé ce qui
détermine, en dernière instance, l’efficacité d’une politique linguis-
tique : la volonté gouvernementale de l’appliquer (Lapierre et Roy,
1983). Nous analyserons dans un premier temps la genèse de la
politique linguistique, c’est-à-dire l’ensemble des dispositions légis-
latives et juridico-constitutionnelles régissant le statut et l’usage des
langues ainsi que leurs rapports dans la province (Calvet, 1996 :
3-9). Dans un deuxième temps, nous examinerons les revendications
de la SANB par rapport à la mise en œuvre de cette politique dans
quatre secteurs névralgiques d’application : la fonction publique,
l’éducation, la justice et les municipalités.
80 Patrick-Michel Noël
5. Cette commission est aussi connue sous les noms de Commission Laurendeau-
Dunton ou Commission BB.
Politique linguistique provinciale et groupe de pression : le cas de la SANB 81
régime fort centralisé […] n’[avait] pas permis d’attirer dans la capitale
le nombre suffisant de fonctionnaires pour pouvoir rendre la fonction
publique effectivement bilingue » (SANB, 1979 : 8). Bref, le rapport
propose une redéfinition de la politique linguistique pour que l’égalité
de jure entre les langues devienne une égalité de facto entre les commu-
nautés linguistiques.
Soulignant la lenteur du développement du bilinguisme et préco-
nisant la généralisation de la dualité linguistique à l’ensemble des
ministères ainsi que la régionalisation administrative, le rapport
Bastarache-Poirier sera mal reçu par le gouvernement qui n’était pas
sans savoir que la logique de la dualité administrative pouvait conduire
à la dualité politique (P. Doucet et al., 1999 : 346). De plus, la victoire
massive de Hatfield aux élections de 1982 avait donné le coup de
grâce au Parti acadien et avait réduit les pressions exercées sur le
gouvernement pour qu’il intervienne dans la question linguistique. Or,
au lendemain des élections, le président et le directeur général de la
SANB, tout en reconnaissant l’ouverture et la compréhension du
premier ministre envers la communauté acadienne, soulignent néan-
moins qu’il est « important que les recommandations du rapport
Bastarache “Vers l’égalité des communautés linguistiques” soient mises
en application aussitôt que possible » (Losier et Thériault, 1982). Ce
n’est que le 23 mars 1984 que le gouvernement réagit au rapport en
formant le Comité consultatif sur les langues officielles. L’établissement
de ce second comité témoigne des appréhensions du gouvernement à
l’égard d’une réforme de sa politique linguistique. Estimant qu’un
rapport d’experts ne constitue pas une base suffisamment légitime pour
entreprendre une telle tâche, il décide de sonder directement l’opinion
publique. Bien que la SANB (1986 : 2) considère que le « gouvernement
aurait pu agir en 1982, en s’inspirant des conclusions et recommanda-
tions du […] rapport Bastarache-Poirier », elle appuie cette initiative
gouvernementale parce qu’elle considère « que cette consultation popu-
laire est une démarche très démocratique et essentielle à la réalisation
d’une société néobrunswickoise où les droits des deux communautés
linguistiques seront dûment assurés et respectés » (Losier et Thériault,
1984).
C’est ainsi que, entre les mois de mars et de mai 1985, le comité
a tenu une série d’audiences publiques dans les quatre coins de la
province. En fait, ces audiences, bien qu’elles témoignent d’une volonté
88 Patrick-Michel Noël
* * *
Allain, Greg, et Maurice Basque (2003), Bastarache, Michel (1986), « A propos du
Une présence qui s’affirme : la commu- rapport Guérette-Smith sur les langues
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104 Patrick-Michel Noël
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Québec, CSLF. line (12 juin), p. 3, fonds SANB, CEA.
Le commissariat aux langues
officielles : un acteur
institutionnel au cœur
de l’administration publique
fédérale (1969-2006)
1. Bien qu’un texte retrace déjà l’historique du Commissariat aux langues officielles
(Héroux, 1990), cette rétrospective ne traite que les années 1970 à 1989. Il nous
semble donc nécessaire de revoir brièvement le parcours de l’organisme en
considérant en plus les années 1989 à 2006.
110 Sabrina Dumoulin
connaître l’organisme qui était alors peu sollicité par les Canadiens.
Il n’en demeure pas moins que ce lent processus de mise en place
permit à Spicer de « [réfléchir] et [de] définir son rôle ainsi que la
portée de la Loi » (Héroux, 1990 : 2). Par ailleurs, s’il est possible
de nommer parmi les objectifs de Spicer ceux de traquer les infrac-
tions à la Loi, de renforcer la dualité linguistique au sein de
l’appareil gouvernemental, de mettre l’accent sur la formation des
fonctionnaires de l’État et, du coup, sur la langue de travail, il reste
que son leitmotiv demeura l’importance de la communication. Ainsi,
outre la diffusion de trousses d’information, la prononciation de
discours et le lancement d’initiatives promotionnelles et publi
citaires, Spicer voulut « aider les cultures à se comprendre en
permettant un dialogue entre les jeunes »4. Lors de son entrée en
poste, il n’étudia toutefois aucunement les questions du « recrute-
ment et [de la] promotion au sein de l’appareil fédéral au sujet
[desquels] la Commission d’enquête avait formulé 41 recommanda-
tions [ni la question du] bilinguisme de la Capitale fédérale auquel
la Commission avait consacré 17 recommandations » (Héroux,
1990 : 3). Notons par ailleurs que le commissaire et son équipe
connurent une période creuse en 1975, en raison, entre autres, de
l’impasse du programme des districts bilingues, du peu d’efforts
manifestés par le gouvernement et du manque d’influence du
Commissariat lors des médiations portant sur la crise du français
chez les contrôleurs aériens (Héroux, 1990 : 5-6).
Lorsque Keith Spicer passa le flambeau à Maxwell Yalden en
1977, le CLO était néanmoins un organisme bien établi, comptant
quelque 85 employés et bénéficiant d’un budget annuel de près 4
millions de dollars (Héroux, 1990 : 7). Malgré cela le nouveau
commissaire, un Torontois anglophone « à l’aise avec le français »
(Héroux, 1990 : 8), connut son lot de difficultés. Outre la situation
sociale et politique agitée coïncidant avec son mandat – premier
référendum au Québec, rapatriement de la Constitution et enchâs-
sement de la Charte des droits et libertés –, l’interrègne de quelques
mois précédant son arrivée engendra un climat morose au sein de
tableau 1
organigramme du commissariat
TABLEAU 2
Besoin en ressources financières du commissariat
2005-2006
Direction générale Total en milliers de dollars
9. Parmi ces suggestions figure celle de placer le CLO sous le contrôle direct du
Parlement afin de mieux refléter l’indépendance et le statut de l’organisme (Office
of the Federal Commissioner…, 1980 : 261).
122 Sabrina Dumoulin
TABLEAU 3
nombre de plaintes, Commissariat aux langues officielles,
de 1970 à 2005
10. Fortier déclara en 1990 : « Le français n’a toujours pas la place qui lui est due dans
l’administration fédérale. » (McRoberts, 1999 : 125.)
11. Pour sa part, Goldbloom affirmait en 1994 que « les années [passaient], mais le
dossier de la langue du travail dans l’administration publique fédérale [restait] au
même point : [c’était] la langue au bois dormant » (McRoberts, 1999 : 125).
124 Sabrina Dumoulin
* * *
Stacy Churchill
OISE
Université de Toronto
5. Les liens étroits entre différentes personnes agissant dans le domaine de la dualité
linguistique sont illustrés par le fait que, en 1977, l’épouse de M. Webster, Pat
Webster, a été élue présidente-fondatrice d’une organisation qui vise à promouvoir
l’accès pour les non-francophones à l’enseignement du français langue seconde,
le Canadian Parents for French. L’organisation a souvent appuyé les francophones
du pays dans leurs luttes scolaires.
6. Le brouillon de la version anglaise de 1978 a servi pour la préparation d’un plan
d’action dont les grandes lignes furent soumises au Cabinet en octobre 1977 (voir
l’évaluation des résultats du plan dans Ministère de l’Éducation et Ministère des
Collèges et Universités, 1983).
138 Stacy Churchill
7. Saeed Quazi, un des membres de l’équipe des chercheurs des années 1960-1970,
avait fourni les données utilisées pour décider du réseau des collèges
communautaires anglophones de l’Ontario. Nous lui sommes en grande partie
redevables de la valeur de notre rapport pour convaincre les décideurs. Lors des
discussions publiques, nous avons pu prétendre, de façon humoristique, à une
objectivité totale relativement aux anciennes divisions religieuses en faisant valoir
que notre équipe était composée d’un catholique, d’un protestant et d’un
musulman !
Les confessions d’un fabricant d’armes : les experts au service de l’éducation 139
13. La décision de la Cour d’appel fondait le droit des minorités à la gestion de leurs
établissements sur deux faits : 1) les Franco-Ontariens souffraient d’inégalités
flagrantes en matière d’éducation ; 2) les conseils scolaires gérés par des
anglophones refusaient, de façon répétée, de prendre des mesures nécessaires pour
fournir aux francophones des établissements scolaires et autres services qui leur
144 Stacy Churchill
auraient garanti une égalité de traitement. L’autorité citée pour ces deux faits était
un article que j’ai rédigé, déposé en annexe à une soumission de l’ACFO, qui
résumait les conclusions de Churchill et al., 1978 et 1979. Ces conclusions étaient
appuyées par une autre partie de la soumission de l’ACFO, laquelle résumait une
deuxième analyse que j’avais faite. Celle-ci examinait des différends scolaires
déférés devant la Commission des langues d’enseignement de l’Ontario, dont j’étais
le vice-président, et concluait à un refus systématique des majorités anglophones
aux conseils scolaires concernés qui demandaient l’égalité des services pour les
francophones (V. Reference re Education Act &c 1984 p. 40 (g-h) et 41 (a – h).
Cette dernière analyse fut préparée à la demande de l’Association française des
Conseils scolaires de l’Ontario.
14. Marchand v. Simcoe County Board of Education (1984), 10 C.R.R. 169.
Les confessions d’un fabricant d’armes : les experts au service de l’éducation 145
Dès le début des années 2000, les questions les plus impor-
tantes pour l’avenir de l’éducation des francophones en milieu
minoritaire n’étaient plus du type qu’on peut espérer résoudre faci-
lement par recours aux tribunaux. La totalité des provinces et des
territoires ont bien accepté le principe de la décision en Mahé v.
Regina, mais la mise en œuvre de la gestion des écoles franco-
phones par les minoritaires eux-mêmes a longtemps été un sujet de
débat et une source de conflit judiciaire (Martel, 1991). Si certains
auteurs concluent que la législation de toutes les provinces respecte
les critères de l’article 23 de la Charte (Behiels, 2004, cité dans
Bourgeois, 2007), d’autres affirment qu’il existe toujours des besoins
essentiels qui ne sont encore pas satisfaits et qu’il n’est pas fondé
d’affirmer qu’il y a eu mise en œuvre effective des droits constitu-
tionnels (Bourgeois, 2007).
Bien sûr, l’état actuel de la législation scolaire dans les
provinces et territoires laisse toujours des possibilités d’entamer des
procès judiciaires pour corriger certains problèmes : la mise en
œuvre incomplète des lois et des règlements peut bien créer des
lacunes qui devront être comblées par des décisions des tribunaux
et tout retard dans ce processus est déplorable15. Pourtant, une
15. Le recours aux tribunaux par des parents francophones est très onéreux
financièrement. La plupart des litiges depuis l’adoption de la Charte ont été financés
par le Programme de contestation judiciaire administré par Patrimoine Canada. Ce
programme, aboli une première fois par le gouvernement de Brian Mulroney, puis
rétabli sous le gouvernement de Jean Chrétien, a été aboli une deuxième fois en
146 Stacy Churchill
16. Voir la recension de la littérature française dans : Florin, 1991 ; aussi Consortium
for Longitudinal Studies, 1983.
Les confessions d’un fabricant d’armes : les experts au service de l’éducation 149
17. Les études actuellement disponibles sont soit limitées à un échantillon réduit, par
exemple une ou deux classes, soit basées sur l’autoévaluation par les enseignants
au lieu de l’être sur des données provenant d’une panoplie d’instruments fiables
administrés par des tierces personnes à partir d’échantillons représentatifs.
150 Stacy Churchill
* * *
Hébert, Raymond et al.(1976), Rendement Martel, Angéline (1991), Les droits scolaires
académique et langue d’enseignement des minorités de langue officielle au
chez les élèves franco-manitobains, Canada : de l’instruction à la gestion,
Winnipeg, Centre de recherches, Ottawa, CLO.
Collège universitaire de Saint- Ministère de l’Éducation et Ministère des
Boniface. Collèges et Universités (1983), « L’édu-
Lamoureux, Sylvie Anna (2007), « La tran- cation en français en Ontario aux
sition de l’école secondaire de langue paliers élémentaire et secondaire :
française à l’université en Ontario : examen des répercussions de la propo-
perspectives étudiantes », thèse de sition sur le français langue minoritaire
Ph.D. (Sociolinguistique de l’éduca- en Ontario présentée au Conseil des
tion), Université de Toronto. ministres le 20 octobre 1977 », Bulle-
Landry, Rodrigue et Réal Allard (1997), tins d’études et d’évaluations, 4, 1,
« L’exogamie et le maintien de deux Toronto.
langues et de deux cultures : le rôle de Yalden, Max (1980), « Language Policy in
la francité familioscolaire », Revue des Ontario’s Secondary Schools. Notes for
sciences de l’éducation, 23, 3, a speech by Max Yalden, Commissioner
p. 561-592. of Official Languages, to the Secondary
Le Devoir (1986), Jean-Pierre Proulx, Education Review Project Sympo-
« Diagnostic d’un système d’éducation. sium », Toronto, September 16 1980 »,
I. Les Franco-Ontariens et les études (ronéo).
supérieures. II. L’école anglicise carré-
ment les Franco-Ontariens du sud. III.
Les Franco-Ontariens et la représenta-
tion garantie » Le Devoir (3, 4 et
6 janvier), p. 1 et 8 (chaque jour) avec
encadré « Les Franco-Ontariens possè-
dent maintenant leur rapport Parent »,
(3 janvier), p. 8.
Propos et confidences
d’un planificateur juridico-
linguistique québécois
Joseph-G. Turi
Professeur et avocat
Secrétaire général
Académie internationale de droit linguistique
Commission Laurendeau-Dunton
1. Loi du ministère des Affaires culturelles, L.Q. 1961, c. 23, art. 14.
160 Joseph-G. Turi
2. Loi constitutionnelle de 1982, Loi sur le Canada, annexe B, 1982 (R.U.), C. 11.
3. Loi sur le multiculturalisme canadien, L.R.C. (1988), ch. 24 (4e suppl.).
4. Loi sur les langues officielles, L.R.C. (1988), ch. 31 (4e suppl.).
162 Joseph-G. Turi
10. Loi modifiant le Code civil, L.Q. 1979, c. 29, art. 14. La modification apportée
alors au Code civil du Bas Canada ne se retrouve plus dans le Code civil du
Québec de 1994 parce que la loi 101 est désormais de moins en moins contestée.
L’article 57 s’applique donc de nouveau tel quel.
168 Joseph-G. Turi
23. Loi n° 482, du 1er décembre 1999 (Norme in Materia di Tutela delle Minoranze
Linguistiche Storiche).
24. Voir le Projet de Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples
autochtones, du 23 août 1993.
25. En vertu de la Modification constitutionnelle de 1993 (Nouveau-Brunswick), qui a
ajouté à cet effet l’article 16.1 à la Charte canadienne des droits et libertés.
Propos et confidences d’un planificateur juridico-linguistique québécois 177
* * *
* * *
Don Stevenson*
Former Deputy Minister
Intergovernmental Affairs of Ontario
*
Marcel Martel invited me participate in this seminar because I was the first secretary
of the Advisory Committee (Ian Macdonald was the chairman) which existed from
1965 to 1971, and I had been the first head of the federal-provincial affairs
secretariat in the Department of Economics and Development which provided
backup to the Advisory Committee. In 1968 when our department merged with
Treasury to form the Department of Treasury and Economics with Ian Macdonald
as Deputy Minister, I headed the policy planning division which had responsibility
for tax, fiscal, economic and regional development policy as well as inter-
governmental affairs.
184 Don Stevenson
he spent with his feet up and a glass in his hand listening to and
participating in debates about the future of Canada with several of
Canada’s most distinguished academics and other authorities on
Canadian federalism.
The Advisory Committee was deliberately composed of experts
with divergent views on the main issues of Canadian federalism so
it was never assumed that it would come up with unanimous recom-
mendations to the government. These divergent views became quite
apparent to anyone reading the individual papers published in the
Committee’s background papers and reports published in two
volumes in 1967 and 1970. Two of the most high profile members,
for example, Donald Creighton and Eugene Forsey, both opposed
any possible devolution of power from the federal to the provincial
governments or any recognition of a distinct society in Quebec.
Forsey was in favour of an extension of French language rights ;
Creighton was opposed. Forsey shared the view of Frank Scott and
Pierre E. Trudeau – all of whom had been prolific opponents of
many of Duplessis’ actions – that the most appropriate response to
Quebec nationalism was to make the federal government and insti-
tutions in the rest of Canada more welcoming and accessible to
Francophones. Creighton argued that the Confederation agreement
enshrined in the British North America Act contemplated a strong
central government with French-language rights confined to Quebec
and the federal parliament.
As a means of increasing the potential for constructive
proposals and getting around the strongly held, conflicting, and
published views of some of the Committee’s most vocal members,
three subcommittees were created : on constitutional matters, on
fiscal and economic matters and on cultural and educational matters
including language. Again, no court stenographers found their way
into the subcommittee’s deliberations.
The cultural and educational subcommittee members were all
convinced of the necessity for progress on French language rights
in Ontario. Its major product was a well-argued report in 1967
urging the province to enact legislation for public French language
secondary schools. I am sure I was reflecting the subcommittee’s
rationale in the following excerpt from a talk I gave to the Carnegie
Endowment Fellows in June 1967 :
John Robarts’ Advisory Committee on Confederation and its Impact 185
mobiliser
un savoir
Page laissée blanche intentionnellement
La nouvelle économie
statistique*
13. La variable origine ethnique a en fait longtemps été désignée comme l’origine
raciale (jusqu’en 1941). Pour une analyse de cette évolution, voir Beaud et Prévost
(1996) et Kralt (1980).
14. La loi définit les minorités visibles comme « les personnes, autres que les
autochtones, qui ne sont pas de race blanche ou qui n’ont pas la peau blanche ».
La nouvelle économie statistique 209
a, elle aussi, connu une croissance très forte en 2006 par rapport
aux recensements précédents15. Cette évolution est décelable égale-
ment dans les questions d’autoperception adressées aux aborigènes,
dont l’objectif manifeste est de parvenir à saisir l’écart entre le
nombre des personnes dont le statut aborigène est fixé par des lois
et le nombre de celles qui, nonobstant ces catégories légales, se
considèrent comme telles. La très forte augmentation du nombre de
personnes déclarant une identité autochtone (progression de 45 %
de 1996 à 2006 contre 8 % pour la population non autochtone)16
tiendrait, en partie au moins, à un phénomène de mobilité ethnique
intragénérationnelle, c’est-à-dire au changement de l’appartenance
ethnique d’une personne au fil du temps (Guimond et al., 2007).
Cette évolution est enfin décelable dans la question sur les minorités
visibles, pour laquelle on pourrait dire qu’elle cherche, à la limite,
à mesurer moins la perception qu’ont les répondants d’eux-mêmes
que la perception qu’ils ont de la perception que les autres ont
d’eux.
Sur la question de l’autoperception ou de la subjectivité dans
le recensement, on peut évoquer les questions relatives à l’ethnicité
dans d’autres recensements17 – Australie, Royaume-Uni, États-Unis,
15. Sur un total de réponses de 4 501 551 correspondant à un nombre d’individus de
4 027 947, 429 429 réponses concernaient la catégorie New Zealander (et 2 381
076 la catégorie New Zealand European), (Internet : <http://www.stats.govt.nz/
census/2006-census-data/national-highlights/2006-census-quickstats-national-
highlights-revised.htm?page=para004Master>, 21 janvier 2007). Pour une tentative
d’explication fort convaincante des raisons de la forte croissance, voir Kukutai and
Didham (2007).
16. « Sont incluses dans la population ayant une identité autochtone les personnes
ayant déclaré appartenir à au moins un groupe autochtone, c’est-à-dire Indien de
l’Amérique du Nord, Métis, ou Inuit, et / ou les personnes ayant déclaré être des
Indiens des traités ou des Indiens inscrits tels que défini par la Loi sur les Indiens
du Canada, et / ou les personnes ayant déclaré appartenir à une bande indienne
ou à une Première nation. » (Internet : <http://www12.statcan.ca/english/census06/
data/highlights/aboriginal/index.cfm?Lang=F>, 21 janvier 2008).
17. Statistics New Zealand définit clairement l’ethnicité comme relevant d’une
perception, d’une auto-identification : « Ethnicity is the ethnic group or groups that
people identify with or feel they belong to. Ethnicity is a measure of cultural
affiliation, as opposed to race, ancestry, nationality or citizenship. Ethnicity is self-
perceived and people can belong to more than one ethnic group. » Bien sûr, cela
conduit à s’interroger sur la pertinence de mesurer une telle chose. Pour Statistique
Canada, « [é]tant donné la difficulté, non seulement d’élaborer des notions et des
210 Jean-Pierre Beaud et Jean-Guy Prévost
Un exceptionnalisme canadien ?
19. La question était ainsi formulée lors du recensement de 2001 : « Existe en este
hogar alguna persona que se reconozca descendiente o perteneciente a un pueblo
indigena ? ». On notera la forme également très subjective de la question.
214 Jean-Pierre Beaud et Jean-Guy Prévost
20. Cette subjectivité semble même être prise en compte par les médias quand ils font
référence aux statistiques ethniques officielles. Ainsi peut-on lire dans le journal
La Presse du 24 janvier 2008 que « selon le journal Folha de São Paulo, sur
1 128 mannequins participant à [la semaine de la mode de São Paulo], 28 étaient
de couleur, soit 2,5 %. Selon des chiffres officiels, 7 % de la population se dit
noire, 43 % métissée, tandis que 50 % se considère comme blanche » (Actuel,
2). Les termes « se dit » et « se considère » traduisent bien la subjectivité derrière
le chiffre.
21. Comment interpréter les termes « connaître assez bien une langue pour soutenir
une conversation » ?
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La linguistique et la construction de la langue française 227
La mondialisation, le néolibéralisme
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Page laissée blanche intentionnellement
Élaboration d’un cadre normatif
au Québec (1957-1965) : le rôle
des linguistes et des littéraires
12. Marty Laforest (2000 : 82) constate que, en ce qui a trait à la langue parlée, ce
qui est jugé dégénérescent est « très souvent attribuable à la conservation de traits
anciens aujourd’hui sortis de l’usage », ce qui est étonnant puisque ces archaïsmes
constituent des témoins de notre passé tout aussi respectables que des morceaux
de poterie ou des pointes de flèches.
13. À ce propos, il use d’une allégorie savoureuse, en comparant l’évolution des
langues écrite et parlée à la formation d’une couche de glace à la surface d’une
rivière, le cours d’eau impétueux étant la langue parlée et la glace la langue écrite
(Laurence, 1959 : 43).
244 Anne-Sophie Fournier-Plamondon
14. « Dès que j’ai essayé d’écrire, je me suis rendu compte que j’étais un barbare,
c’est-à-dire, selon l’acceptation étymologique, un étranger. Ma langue maternelle
n’était pas le français, mais le franglais. Il me fallait apprendre le français presque
comme une langue étrangère » (Ouellette, 1970 [1964] : 192). Il est intéressant de
noter que la langue standard, conforme à la norme, n’est la langue maternelle de
personne : elle doit nécessairement être apprise (Laforest, 2000 : 90).
Élaboration d’un cadre normatif au Québec (1957-1965) 245
Pourquoi stigmatiser ?
15. C’est pourquoi le parler des ouvriers et des paysans n’a pratiquement aucune
chance de s’imposer, de la même manière que les variétés métropolitaines de
langue sont toujours perçues comme étant plus prestigieuses que celles des colonies
(Laforest, 2000 : 86).
Élaboration d’un cadre normatif au Québec (1957-1965) 247
16. En effet, les Canadiens français ont formé pendant moult années la majeure partie
de la population rurale du Québec (Bouchard, 1998 : 203).
17. Effectivement, le monde des affaires et du travail est anglais, ce qui incommode
de plus en plus les locuteurs francophones qui sont majoritaires (Robert, 2000 :
240). Selon Bélanger (1977 : 153), même l’architecture témoigne du rapport de
domination entre les deux groupes linguistiques. Par exemple, les quartiers
francophones de Montréal sont refoulés dans l’est de la ville et caractérisés par
des maisons identiques, dépersonnalisées, contrairement aux quartiers anglais.
18. « […] le problème de la langue chez nous est étroitement lié au problème du
Canada français tout court » (Léger, 1959 : 57).
248 Anne-Sophie Fournier-Plamondon
19. De fait, ils soulignent qu’il est impossible qu’un peuple de haute culture parle une
langue inférieure (Laurence, 1959 : 10).
20. En effet, « privée [l’élite canadienne-française] du prestige économique et politique
par la domination anglophone et du prestige linguistique et culturel par l’existence
d’une norme extérieure, elle n’en imposait à personne, surtout pas à elle-même »
(Bouchard, 1988 : 8).
Élaboration d’un cadre normatif au Québec (1957-1965) 249
L’anglais
21. Ils vivent « dans des cadres inspirés par d’autres et conçus pour d’autres, selon des
formules et des méthodes animées d’une mentalité étrangère » (Léger, 1959 : 57).
22. En outre, les Canadiens français reçoivent toutes les nouveautés de la vie moderne
par le biais de l’Angleterre et des États-Unis ; ils subissent donc intensément la
culture anglo-saxonne (Bouchard, 2001 : 12).
250 Anne-Sophie Fournier-Plamondon
23. En effet, Laurence (1959 : 52) note trois périls principaux menaçant l’intégrité de
la langue française, l’anglicisme sous toutes ses formes étant le plus grave d’entre
tous « puisqu’il sape à la fois la prononciation, le vocabulaire et la syntaxe » du
français.
24. « Le bilinguisme met en présence deux styles de civilisation et de culture, deux
formes de pensées. L’individu ne peut intégrer parfaitement ces deux formes »
(Laurence, 1959 : 52).
Élaboration d’un cadre normatif au Québec (1957-1965) 251
25. La vie courante se passant en anglais, puisque le français est fréquemment relégué
à la sphère privée, les mots anglais sont trop souvent utilisés (Daviault, 1958 :
19).
26. En somme, il croit que la langue transforme l’être du locuteur et le touche dans
la profondeur insondable de son existence (Larose, 2004 : 171).
252 Anne-Sophie Fournier-Plamondon
L’enseignement
30. Ce n’est que durant la Seconde Guerre mondiale que l’instruction devient
obligatoire de 6 à 14 ans ; toutefois, la loi n’est pas toujours respectée.
31. En fait, il vient au troisième rang des priorités après l’enseignement de la religion
et de l’hygiène (Cajolet-Laganière et Martel, 1995 : 44). Léon Dion cite l’exemple
du Ô Canada, rapporté par le Frère Untel. Des élèves avaient eu en dictée l’hymne
national, qui en était ressorti passablement meurtri. Ainsi, « ton front est ceint de
fleurons glorieux » était devenu « ton front est sein de flocons » (Dion, 1987 :
340).
32. « Il est plutôt rare de voir un instituteur attacher une importance quelconque aussi
bien à son propre langage qu’à celui de ses élèves » (Léger, 1957 : 24). « Chez
combien d’entre eux, le souci de la langue se manifeste-t-il constamment dans
leur façon de s’exprimer en classe […] ? » (Léger, 1957 : 26).
254 Anne-Sophie Fournier-Plamondon
33. « On ne donne plus en pâture aux écoliers que des phrases composées pour la
circonstance par les auteurs des manuels. Et quelles phrases innommables ! » (Léger,
1957 : 23).
34. « C’est une erreur d’enseigner exclusivement des termes savants ou littéraires
comme oligarchie, diaphane, aposiopèse, etc. à des adolescents qui disent coat
pour veston, switch pour interrupteur et lapel pour revers. Comment éviter le mot
anglais si l’on ne possède pas un fonds de vocabulaire français ? » (Laurence, 1959 :
52).
256 Anne-Sophie Fournier-Plamondon
35. « Nous, les fils d’ouvriers ou de cols-blancs, avons été particulièrement frustrés.
Notre faim de mots, au stade du réalisme nominal, n’a pas été assouvie » par
l’ignorance (Ouellette, 1970 [1964] : 192).
Élaboration d’un cadre normatif au Québec (1957-1965) 257
Interventions de l’État
36. « […] l’unilinguisme français au Québec est une question de vie ou de mort pour
le Canada français » (Léger, 1963 : 4). En fait, le bilinguisme peut se réaliser sur le
plan institutionnel, mais pas individuel (Larose, 2004 : 62).
258 Anne-Sophie Fournier-Plamondon
37. Il croit plutôt à la persuasion qu’à la coercition dans ces domaines, bien que cette
dernière s’avère nécessaire (Larose, 2004 : 62).
Élaboration d’un cadre normatif au Québec (1957-1965) 259
38. L’Office de la langue française est créé par la Loi instituant le ministère des Affaires
culturelles qui est sanctionnée le 24 mars 1961. Il a pignon sur rue l’année suivante
avec comme directeur Jean-Marc Léger.
39. En privilégiant ce champ d’action, on avait l’impression de s’attaquer directement
à une des racines du mal (Cholette, 1993 : 33).
260 Anne-Sophie Fournier-Plamondon
41. Cela entraîne les Canadiens français dans un dilemme : ils veulent qu’on cesse de
dénigrer leur parler, mais ils ne veulent pas être identifiés à une langue inférieure
et ils tiennent à conserver leurs liens avec une culture prestigieuse (Bouchard,
1998 : 226).
42. Puriste, il se distingue des censeurs « trop à cheval sur la lettre et sans égard pour
l’esprit de la langue » (Larose, 2004 : 45).
262 Anne-Sophie Fournier-Plamondon
43. De fait, écrire en français de France, c’est emprunter des mots qui ne sont pas
nôtres et qui ne pourront l’être tant que la population ne sera pas en mesure de
l’assumer (Bélanger, 1977 : 157).
44. Le joual s’avère le seul véhicule capable d’assumer le rôle de révélateur de la
condition de domination culturelle des Québécois (Bélanger, 1977 : 158). Utiliser
le joual, soit une langue considérée comme étant déstructurée et appauvrie,
consiste à « dénoncer la situation de domination et d’aliénation dans laquelle vivent
les Québécois » (Bouchard, 1998 : 250).
45. De fait, ils sont conscients des dangers qu’il y a à parler joual, à faire comme s’il
s’agissait d’une langue littéraire (Bélanger, 1977 : 158).
Élaboration d’un cadre normatif au Québec (1957-1965) 263
* * *
Daniel Bourgeois
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268 Daniel Bourgeois
Un modèle heuristique
5. Voir Herder, 1966 ; Whorf, 1956 ; von Humbolt, 1971 ; Sapir, 1966 ; Fishman, 1988 ;
Slobin, 1971 ; Haas et Shafir, 1978 ; Edwards, 1985.
6. Voir Weinstein, 1983 ; Pinker, 1994 ; Chomsky 1957.
7. Voir Puig, 1983 ; Ninyoles, 1972.
8. Voir Hagège, 1983 ; Fishman, 1987.
9. Voir Edwards, 1985 ; Mackey, 1989.
10. Voir Aracil, 1982.
11. Kymlicka (1995 : 111) illustre bien la distinction entre les minorités linguistiques
et les autres genres de minorités. Par exemple, en ce qui concerne la prestation
de services publics à une minorité ethnique, il écrit : « It is quite possible for a
state not to have an established church. But the state cannot help but give at least
partial establishment to a culture when it decides which language is to be used in
public schooling, or in the provision of state services. The state can (and should)
replace religious oaths in courts with secular oaths, but it cannot replace the use
of English in courts with no language. »
12. Voir Campbell, 1994.
13. Voir Ylvisaker, 1959 ; Bourdieu, 1980 ; Horowitz, 1985 ; MacMillan, 1998.
14. Voir Horowitz, 1985 ; Pourtier, 1991 ; Herb, 1999 ; Laponce, 1991 ; Gurr, 1994 ;
Bell et Tepperman 1979 ; Bourgeois et Bourgeois, 2005.
270 Daniel Bourgeois
Le genre de conflit
Tableau 2
Modèle de (dé)centralisation
administrative, municipalités et sociétés d’État
Tableau 3
Typologie des minorités linguistiques
selon leur masse critique
Le modèle normatif
Tableau 4
Modèle normatif de l’aménagement linguistique
Le genre de conflit
17. Les données de 2001 indiquent peu de changements depuis 1961 en ce qui
concerne la concentration des minorités linguistiques : plus de 90 % vivent au
Québec, en Ontario et au Nouveau-Brunswick. Voir entre autres Composition
linguistique du Canada : Faits saillants en tableaux, Recensement de 2001 <http://
www12.statcan.ca/francais/census01/products/highlight/LanguageComposition/
Index.cfm?LANG=F>.
282 Daniel Bourgeois
18. Règlement sur les langues officielles – communications avec le public et prestation
des services, décembre 1991 (DORS/92-48) <http://lois.justice.gc.ca/fr/showtdm/cr/
DORS-92-48>.
19. Voir, entre autres, le Plan d’action axé sur les résultats – 1er avril 2006 au 31 mars
2009 : Mise en œuvre de l’article 41 de la Loi sur les langues officielles de l’Agence
de promotion économique du Canada atlantique (mai 2006) <http://www.
acoa-apeca.gc.ca/f/cd/Plan_détaillé_2006-2009.pdf>.
20. Analysis and Recommendations for Changes in Organizational Culture with respect
to Official Languages within the Public Health Agency of Canada (Atlantic),
Moncton, ICRPAP, juin 2006.
284 Daniel Bourgeois
La districtisation de la prestation
des services publics au Canada25
25. Pour plus de détails sur la districtisation administrative au Canada, voir Bourgeois,
2006.
26. Loi modifiant la Loi du service civil. 2 George VI (1938), ch. 7, article 1.
286 Daniel Bourgeois
27. Règlement sur les langues officielles – communications avec le public et prestation
des services décembre 1991 (DORS/92-48) <http://lois.justice.gc.ca/fr/showtdm/cr/
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La diversité linguistique au
Canada et au Cameroun : deux
gestions opposées ?
Nathalie Courcy
Department of Modern Languages and Cultural Studies
University of Alberta
1. http://www.cric.ca/fr_html/guide/confederation/confederation.html#dates. Consulté
le 19 octobre 2004.
320 Nathalie Courcy
7. Tabi-Manga fait cette remarque à propos du français, mais elle s’applique aussi à
l’anglais (Tabi-Manga, 2000 : 133).
8. Le terme langue est utilisé au sens large, comme « système de communication »
(Larousse 2004).
330 Nathalie Courcy
* * *
Énoncer
le droit
Page laissée blanche intentionnellement
La place des droits linguistiques
dans l’ordre juridique
au Canada
Michel Bastarache
Ancien juge à la Cour suprême du Canada*
* C’est avec regret que nous avons appris que le juge Michel Bastarache quittait son
poste à la Cour suprême du Canada le 30 juin 2008. C’est une lourde perte pour
tous les Canadiens qui ont à cœur l’épanouissement des deux langues officielles
du pays. (NDLR.)
340 Michel Bastarache
La loi linguistique n’est pas une camisole de force qui a pour objet
de restreindre les populations qui vivent des tensions sociales impor-
tantes. Elle a nécessairement pour but de diminuer les tensions
sociales en minimisant les occasions de discorde, mais elle visera
le plus souvent un objectif plus grand, soit la création de conditions
propices au développement harmonieux des différents groupes
linguistiques et l’encouragement de ceux-ci à contribuer pleinement
au développement économique, social et culturel de l’ensemble de
la population. Les études qui ont été réalisées au Canada dans les
années 1980 et 1990 n’ont pas toujours abouti, mais elles ont
probablement contribué à la sensibilisation de la population à l’im-
portance de la diversité linguistique et à la difficulté de trouver des
mécanismes favorisant non seulement la paix sociale et la tolérance,
mais aussi l’égalité et l’inclusion.
Il est certain que bon nombre de gens ont compris que l’amé-
nagement linguistique a un côté pratique aussi bien qu’un côté
théorique ou symbolique. Dans tous les cas, la diversité linguistique
varie selon les phénomènes sociaux et économiques et s’accom-
mode d’un certain nombre de phénomènes historiques. Mais, dans
une démocratie moderne, le régime linguistique n’est pas tributaire
de la loi du plus fort ou du plus grand nombre ; il reflète plutôt
l’idée que l’on se fait des valeurs fondamentales et des exigences
d’une société hétérogène. Il est parfois difficile d’accepter que les
divisions linguistiques ne doivent pas être considérées simplement
comme des problèmes d’instabilité politique. Pourtant, c’est quand
on identifie les différences linguistiques comme des manifestations
importantes des divergences culturelles légitimes qu’il est possible
d’examiner la législation linguistique sous l’angle de la liberté d’ex-
pression et du besoin d’assurer une pleine participation de tous les
citoyens aux affaires publiques. Vu sous l’empire des divisions
fondamentales entre groupes linguistiques, le phénomène social se
transformera rapidement en clivages politiques qui trouveront une
résonance dans toutes les institutions publiques. En toute logique,
ceci mènera rapidement à des divisions politiques et aux différentes
conditions de partage du pouvoir. En un sens, on a la possibilité,
dans une société complexe, de reconnaître un certain nombre de
clivages et de les institutionnaliser. Mais ce n’est pas le seul choix
La place des droits linguistiques dans l’ordre juridique au Canada 341
it. This might be seen to be the goal of some of the measures of federal
bilingualism over the last twenty years, but it also invokes making sure
that there is a community of people here in the future that will want to
avail itself of the opportunity to use the French language. Policies aimed
at survival activity seek to create members of the community, for instance
in their assuring that future generations continue to identify as French
speakers. There is no way that these policies could be seen as just provi-
ding a facility to already existing people. One has to distinguish the
fundamental liberties, those that should never be infringed and therefore
ought to be unassailably entrenched, on the one hand, from privileges
and immunities that are important but that can be revoked or restricted
for reasons of public policy, although one would need a strong reason
to do this, on the other.
Il s’agit aujourd’hui de définir la communauté de valeurs
auxquelles adhèrent les gens. Il s’agit de reconnaître quelles sont
les réalités culturelles fondamentales et l’héritage que l’on veut
préserver pour soi-même. Le message de la Charte des droits et
libertés c’est que la valeur fondamentale est celle de l’égalité. La
loi actuelle parle de l’égalité de statut et d’usage des langues offi-
cielles. La Cour suprême affirme dans Renvoi relatif aux droits
linguistiques au Manitoba que l’accès égal des minorités aux légis-
latures, aux lois et aux tribunaux est l’objectif fondamental de
l’article 23 de la Loi du Manitoba et de l’article 133 de la Loi
constitutionnelle de 1867. Dans l’arrêt Blaikie10, la Cour suprême
affirme que la garantie implicite de l’article 133 est une protection
efficace de la minorité. Ce message a été réaffirmé récemment dans
les affaires Beaulac et Arsenault-Cameron. Dans ces deux causes,
la Cour tente de montrer comment une interprétation généreuse se
traduira par des mesures concrètes. La tendance est de s’inspirer de
cela maintenant. La loi fédérale de 1988 reconnaît aussi que les
communautés linguistiques sont la raison d’être de la politique des
langues officielles du Canada. Plus concrètement, la loi prévoit des
mesures qui visent à l’avancement du français et de l’anglais, des
mesures pour garantir que la composition de la fonction publique
fédérale reflète la présence des communautés linguistiques de façon
équitable. Un problème de taille subsiste cependant dans la mesure
où le régime linguistique constitutionnel et le régime linguistique
législatif fédéral sont quelques fois en conflit avec le régime linguis-
sion violaient la Loi sur les services en français27. Cette loi qui,
comme l’indique son titre, porte sur le droit de recevoir des services
en français, constitue un exemple de l’application du paragraphe
16(3) de la Charte canadienne des droits et libertés qui permet
d’enrichir les droits linguistiques garantis par la Loi constitutionnelle
de 1867 et la Charte. Discutant des buts et des objectifs sous-jacents
de la Loi sur les services en français, la Cour d’appel dit ceci : «L’un
des objectifs sous-jacents de la loi était de protéger la minorité
francophone en Ontario ; un autre était de faire progresser le fran-
çais et de favoriser son égalité avec l’anglais. Ces objectifs coïncident
avec les principes sous-jacents non écrits de la Constitution du
Canada»28. C’est en s’inspirant du Renvoi sur la sécession du
Québec29 et de l’affaire Beaulac qu’une Cour d’appel unanime a
ainsi affirmé vouloir rendre effective la Loi sur les services en fran-
çais de l’Ontario. Si la Cour d’appel fait remarquer que la
Commission (aujourd’hui le ministre de la Santé) peut modifier et
limiter de façon discrétionnaire les services offerts en français par
1’hôpital Montfort, elle ajoute néanmoins, s’inspirant toujours de
l’affaire Beaulac, qu’une telle décision «ne peut pas reposer sur de
simples arguments de commodité administrative et de vagues préoc-
cupations de financement».
J’attire aussi votre attention sur la décision de la Cour d’appel
relativement à une autre question en litige dans l’affaire Montfort,
celle de savoir si les directives de la Commission pouvaient faire
l’objet d’une révision fondée sur le principe constitutionnel non écrit
du respect et de la protection des minorités. C’est en gardant à
l’esprit les motifs de la Cour suprême dans Arsenault-Cameron que
la Cour d’appel a abordé la question du vaste pouvoir discrétion-
naire permettant à la Commission de prendre les mesures qu’elle
considérait justifiées dans l’intérêt public. Bien qu’aucune disposi-
tion constitutionnelle n’était invoquée dans l’affaire Montfort, l’issue
du litige allait, selon la Cour d’appel, avoir de lourdes conséquences
pour la minorité franco-ontarienne, au point de faire intervenir le
principe constitutionnel du respect et de protection des minorités30.
La Cour d’appel a donc annulé les directives de la Commission,
27. L.R.O. 1990, c. F-32.
28. Lalonde au para. 143.
29. [1998] 2 R.C.S. 217.
30. Lalonde aux paras. 170-87.
354 Michel Bastarache
31. R. c. Koruz, (1992), 125 A.R. 161 (C.A.) ; conf. par [1993] 1 R.C.S. 1134 (sur un
autre point de droit).
32. Harvey c. Law Society of Newfoundland (1992), 88 D.L.R. (4e) 487 (Nfld.
S.C.T.D.)
33. Lewis c. Burnaby School District No. 41 (1992), 71 B.C.L.R. (2e) 183 (S.C.).
34. Clark c. Peterborough Utilities Commission (1995), 24 O.R. (3e) 7 (Gen. Div.).
35. Eldridge c. Colombie-Britannique (Procureur général), [1997] 3 R.C.S. 624.
36. Blencoe c. Columbie-Britannique (Human Rights Commission), [2000] 2 R.C.S.
307.
37. Etienne c. Canada (1992),54 F.T.R. 253 ; conf. par (1993),165 N.R. 315 (C.F.A.);
Lavigne c. Canada (Développement des ressources humaines), [1997] 1 C.F. 305
(Ire inst.); conf. par (1998),228 N.R. 124 (C.F.A.) ; Duguay c. Canada (1999),175
F.T.R. 161 (Ire inst) ; Schreiber c. Canada, [1999] F.C.J. No. 1576 (Ire inst.) (QL) ;
conf. par [2000] F.C,J. No. 2053 (C.A.) (QL).
38. R. c. Bastarache, supra, note Il ; R. c. Bertrand (1992), 131 R.N.-B. (2e) 91 (B.R.) ;
R. c. Haché, supra, note Il ; R. c. Mahaney (2000),226 R.N.-B. (2e) 54 (B.R.).
39 Cormier c. Fournier (1986), 69 R.N.-B. (2e) 155 (B.R.).
40. LeBlanc c. Canada, [1998] F.C.J. No. 1900 (Ire inst.) (QL) ; Boudreau c. Nouveau-
Brunswick (1990), 107 R.N.-B. (2e) 298 (C.A.).
La place des droits linguistiques dans l’ordre juridique au Canada 355
* * *
Eugénie Brouillet
Faculté de droit
Université Laval
Fédéralisme et charte
3. Nous partageons ici l’opinion des professeurs Francis Delpérée et Marc Verdussen
(2005 : 199) qui se référaient à J.E. Trent qui s’exprimait en ces termes : « le principe
fédéral qui sous-tend tous les autres est la notion d’équilibre », qui « ne représente
pas une position arrêtée, mais plutôt une attitude de base » (Trent, 1999 : 136).
362 Eugénie Brouillet
4. Les professeurs Francis Delpérée et Marc Verdussen (2005 : 193) parlent quant à
eux du principe d’égalité entre les ordres de gouvernement fédéral et fédéré.
5. La Cour suprême du Canada a d’ailleurs jugé que les disparités de traitement créées
par le fait que les provinces exercent de façons diverses les pouvoirs que leur
confère la Constitution ne sauraient être considérées comme contraires au droit à
l’égalité garanti par l’article 15 de la Charte canadienne. Autrement, il faudrait
purement et simplement abolir l’autonomie provinciale et remplacer le système
fédératif par un système unitaire. La Cour s’exprime en ces termes : « Non seulement
le partage des compétences permet un traitement différent selon la province de
résidence, mais il autorise et encourage les distinctions d’ordre géographique. Il
ne fait donc aucun doute que le traitement inégal qui résulte uniquement de
l’exercice par les législateurs provinciaux de leurs compétences légitimes ne saurait,
du seul fait qu’il crée des distinctions fondées sur la province de résidence, être
attaqué sur le fondement du par 15(1) » (R. c. Sheldom, [1990] 2 R.C.S. 254, à la
p. 288).
6. Georges-Étienne Cartier joua un rôle de premier plan dans l’élaboration de la
nouvelle Constitution, en développant une théorie fédérative proprement
canadienne, c’est-à-dire une vision qui en a rendu l’existence possible. Pour lui,
le Canada serait une nation dans laquelle les identités et les allégeances multiples
La Charte de la langue française et la Charte canadienne des droits et libertés 363
8. Supra, note 5.
9. Loi constitutionnelle de 1867, L.R.C. 1985, app. II, no. 5, articles 96 et 101 ; Loi
sur la Cour suprême, L.R.C. 1985, c. S-26.
La Charte de la langue française et la Charte canadienne des droits et libertés 365
13. Voir notamment : Andrews c. Law Society of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 143 ;
Weatherall c. Canada (Procureur général), [1993] 2 R.C.S. 872 ; Arsenault-Cameron
c. Île-du-Prince-Édouard, [2000] 1 R.C.S. 3.
La Charte de la langue française et la Charte canadienne des droits et libertés 367
15. Jones c. P.G. du Nouveau-Brunswick, [1975] 2 R.C.S. 182, à la p. 195. Par exemple,
le pouvoir de légiférer relativement à la langue de l’éducation et celle du commerce
La Charte de la langue française et la Charte canadienne des droits et libertés 369
local relève des parlements provinciaux (article 93 et par. 92(13)), alors que celui
de légiférer relativement à la langue de la procédure criminelle relève du Parlement
fédéral (articles 91(27) et 101).
16. Supra, note 2.
370 Eugénie Brouillet
17. R. c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103. Le test développé par la Cour suprême et nuancé
dans des décisions ultérieures est essentiellement le suivant : pour pouvoir conclure
qu’une atteinte à un droit est raisonnable au sens de l’article premier, le
gouvernement doit démontrer que la mesure attentatoire au droit poursuit un
objectif important et légitime ; que cet objectif est poursuivi par un moyen
proportionnel, c’est-à-dire qu’il est rationnellement lié à l’objectif, qu’il porte
atteinte aussi peu que cela est raisonnablement possible au droit et que ses effets
positifs quant à l’atteinte de l’objectif sont proportionnels à ses effets négatifs sur
le droit touché.
18. Par exemple, dans l’affaire R. c. Advance Cutting & Coring Ltd., [2001] 3 R.C.S.
209 en ce qui a trait à la liberté de ne pas s’associer. Il s’agissait cependant d’un
long obiter dictum de quatre juges.
19. Ford c. P.G. du Québec, [1988] 2 R.C.S. 712.
20. Voir, notamment, Woehrling, José, « La réglementation linguistique de l’affichage
public et la liberté d’expression : P.G. du Québec c. Chaussure Brown’s Inc. »,
(1987) McGill L.J. 878.
21. Charte canadienne des droits et libertés, supra, note 1, al. 2b) ; Charte des droits
et libertés de la personne, L.R.Q., c. C-12, articles 3 et 10.
La Charte de la langue française et la Charte canadienne des droits et libertés 371
22. La Cour considère que la liberté d’expression protège la liberté de s’exprimer dans
la langue de son choix et l’expression commerciale (Ford, supra, note 19). Voir
également Devine c. P.G. du Québec, [1988] 2 R.C.S. 790.
23. Une remarque s’impose relativement aux clauses de limitation des chartes
canadienne et québécoise. Bien que le libellé de l’article 9.1 de la Charte
québécoise appelle davantage à un équilibrage des divers intérêts dans la société
que ne le fait l’article premier de la Charte canadienne, les tribunaux y ont appliqué
le même test de raisonnabilité : Ford, supra, note 19 ; Godbout c. Longueil, [1997]
3 R.C.S. 844. Ils sont respectivement libellés comme suit : Article 9.1 : « Les libertés
et droits fondamentaux s’exercent dans le respect des valeurs démocratiques, de
l’ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec. La loi peut, à cet
égard, en aménager l’exercice. » ; Article 1 : « La Charte canadienne des droits et
libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints
que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la
justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique. »
Notons également que l’on retrouve dans le préambule de la Charte québécoise,
contrairement à celui de la Charte canadienne, une autre référence explicite à
cette notion d’équilibre : « Considérant que les droits et libertés de la personne
humaine sont inséparables des droits et libertés d’autrui et du bien-être général ;
[…].»
24. R. c. Edward Books and Art Ltd., [1986] 2 R.C.S. 713, p. 781. Il est aujourd’hui
clairement établi en jurisprudence que l’autorité gouvernementale n’a qu’à faire la
preuve qu’elle a opté pour un moyen qui porte atteinte au droit aussi peu que
cela est raisonnablement possible : Ramsden c. Peterborough (Ville), [1993] 2 R.C.S.
1084 ; Rodriguez c. P.G. de la C.-B., [1993] 3 R.C.S. 519 ; R.J.R.-Macdonald c.
P.G. du Canada, [1995] 3 R.C.S. 199.
372 Eugénie Brouillet
25. La discrimination indirecte (ou par effet préjudiciable) découle d’une règle de droit
neutre (applicable à tous les justiciables), mais qui produit des effets préjudiciables
à l’égard d’une catégorie de personnes définie par un motif prohibé de
distinction.
26. En ce qui a trait au droit à l’égalité protégé par la Charte québécoise, il n’y a pas
lieu de se poser la question de la raisonnabilité de l’atteinte, puisque la clause de
limitation, l’article 9.1, n’est applicable qu’aux droits protégés aux articles 1 à 9.
27. Charte canadienne, voir note 1, article 33 ; Charte québécoise, voir note 21, article
52. Le Parlement québécois modifia cependant sa loi de façon à permettre, à
l’intérieur des établissements, l’affichage et la publicité dans une autre langue dans
la mesure où le français y apparaissait de façon nettement prédominante : Loi
modifiant la Charte de la langue française, L.Q. 1988, c. 54 (Loi 178).
28. Loi modifiant la Charte de la langue française, L.Q. 1993, c. 40.
29. Entreprises W.F.H. Ltée c. P.G. du Québec, (2001) R.J.Q. 2557 (C.A.) ; permission
d’en appeler à la Cour suprême refusée, 12 décembre 2002.
La Charte de la langue française et la Charte canadienne des droits et libertés 373
33. L’alinéa 23(1)a) qui confère également ce droit aux parents dont la première langue
apprise et encore comprise est celle de la minorité de la province, n’est pas
applicable au Québec : Loi constitutionnelle de 1982, supra, note 1, article 59.
Nous sommes d’accord avec le professeur Réjean Pelletier (2008) pour qui cette
disposition constitue la seule véritable reconnaissance particulière du Québec dans
la Constitution. Les autres dispositions asymétriques constituent plutôt des
obligations supplémentaires imposées au Québec (articles 93 et 133 de la Loi
constitutionnelle de 1867, supra, note 9).
34. Mahe c. Alberta, [1990] 1 R.C.S. 342, aux p. 363, 365, 389 et 393 ; Solski (Tuteur
de) c. P.G. du Québec, [2005] 1 R.C.S. 201, par. 21.
La Charte de la langue française et la Charte canadienne des droits et libertés 375
35. Mahe c. Alberta, voir note 34, à la p. 369 ; Gosselin c. P.G. du Québec, supra,
note 30, par. 21 ; Arsenault-Cameron c. Île-du-Prince-Édouard, supra, note 13, par.
31 ; Renvoi relatif à la Loi sur les écoles publiques (Man.), art. 79(3), (4) et (7),
[1993] 1 R.C.S. 839, à la p. 857.
36. Mahe c. Alberta, supra, note 34, à la p. 369 ; Gosselin c. P.G. du Québec, supra,
note 30, par. 21 ; Solski (Tuteur de) c. P.G. du Québec, voir note 34, par. 20 et
21.
37. Supra, note 2.
38. Procureur général du Québec c. Quebec Association of Protestant School Boards
et al., [1984] 2 R.C.S. 66.
376 Eugénie Brouillet
taires adoptent, tout comme l’avait fait la Cour suprême dans l’affaire
Solski, une conception essentiellement individualiste du droit
enchâssé au paragraphe 23(2). Selon le juge Dalphond, « […] il
n’existe pas une corrélation parfaite entre le droit à la continuation
de la langue d’enseignement et l’appartenance à l’une ou l’autre
des deux communautés culturelles protégées constitutionnelle-
ment »54. Les appelants étant citoyens canadiens, les juges sont d’avis
qu’il n’est pas pertinent de tenir compte de l’endroit où ils sont nés
ou la langue qu’ils parlent à la maison afin de déterminer s’ils sont
titulaires ou non du droit garanti au paragraphe 23(2),
et ce, « however desirable [Quebec government] may view their
integration into Quebec’s Francophone majority »55. Bien qu’ils souli-
gnent la situation linguistique particulière du Québec et sa
responsabilité dans la protection et la promotion de la langue fran-
çaise56, ils excluent toute prise en considération des différences qui
existent entre la situation des francophones et celle des anglophones
au Canada dans l’examen de la portée du droit prévu au paragraphe
23(2), optant ainsi pour une approche essentiellement symétrique
du droit linguistique.
Ainsi, après avoir conclu que la disposition québécoise
excluant la prise en compte de la fréquentation scolaire en milieu
privé non financé aux fins de l’application du critère de la « majeure
partie de l’enseignement reçu » limitait le droit enchâssé au para-
graphe 23(2), les juges majoritaires ont jugé que cette limitation
n’était pas raisonnable dans le cadre d’une société libre et démo-
cratique au sens de l’article premier de la Charte. Selon eux, le
législateur québécois aurait pu légiférer d’une façon moins attenta-
toire au droit qui lui aurait tout de même permis d’atteindre son
objectif, soit la protection du fait français au Québec57. En réalité,
la disposition visait plus précisément à éliminer la « passerelle »58
permettant à des parents, dont les enfants n’ont aucun lien avec la
minorité anglophone québécoise, d’acquérir ce droit pour tous leurs
63. Cette décision a été portée en appel par le gouvernement du Québec, de même
que celle rendue dans T.B. c. Québec (Ministre de l’Éducation) : requête pour
autorisation de pourvoi à la Cour suprême, 2007-09-07 (C.S. Can.), 32229.
64. À notre avis, le seul énoncé de la Cour suprême à l’effet que l’article 23(2) vise
à faire en sorte que « l’enfant qui est légalement inscrit à un programme
d’enseignement reconnu et qui le suit régulièrement doit être en mesure de
poursuivre ses études dans la même langue » (nous soulignons) ne peut guère être
interprété comme signifiant que la Cour pourrait être encline à juger valide
l’exclusion de la fréquentation scolaire en milieu privé non subventionné, les
conditions légales d’une telle inscription devant toujours être compatibles avec les
prescriptions constitutionnelles. Or, c’est précisément ce qui est en cause ici.
65. Supra, note 48.
66. Pour une étude détaillée des arguments en faveur et en défaveur de la
constitutionnalité des dispositions faisant disparaître la possibilité d’acquérir
l’admissibilité à l’école publique anglaise à partir de la fréquentation d’une école
anglaise privée non subventionnée, voir Woehrling (2005b : 285-288).
La Charte de la langue française et la Charte canadienne des droits et libertés 383
* * *
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Langues, lois et droits.
Pour qui ? Pourquoi ?
L’action de l’État et des acteurs
sociaux dans le domaine
juridique en matière de langues
officielles au Canada
Pierre Foucher
Faculté de droit
Université de Moncton
13. Viola, supra ; mais voir Charlebois c Saint-John [2005] 3 R.C.S. 563.
14. Desrochers c Canada 2006 CAF 1777, en appel à la Cour suprême du Canada ;
Société des Acadiens du Nouveau-Brunswick c association of Parents for fairness
in education [1986] 1 R.C.S. 549, jugement majoritaire du juge Beetz ; Charlebois
c saint-John, supra, jugement majoritaire de la juge Charron.
396 Pierre Foucher
exemple. Qui plus est, le concept de vitalité est pour lui plus inté-
ressant que celui de territorialité ou de seuils.
Chose certaine, le domaine de l’éducation a beaucoup évolué :
on compte maintenant des conseils scolaires minoritaires dans toutes
les provinces, et les écoles de langue française connaissent des
accroissements de population dans bien des régions au pays. Tout
cela ne serait pas advenu sans l’article 23 de la Charte et sans les
jugements qui ont forcé la main des gouvernements. De plus, ce
n’est pas qu’une question de nombres : c’est une question de fonde-
ment national, de respect de l’histoire et de la mémoire, de
réparation pour le traitement honteux qu’a dû subir cette minorité
nationale. Et c’est une question de vitalité, de justice sociale et
d’avenir collectif, car au rang des éléments qui distinguent le Canada
des autres pays on trouve, en bonne place, la dualité linguistique
avec tout ce qu’elle comporte de diversité culturelle. Sans un
Québec résolument francophone, la langue française aurait proba-
blement virtuellement disparu du Canada. Il est cependant aussi
indéniable que cette francophonie hors Québec contribue à l’édifi-
cation d’un Canada différent, aux côtés du Québec. Les deux
francophonies sont inextricablement liées au plan politique et
constitutionnel, même si l’Acadie se prétend une Nation en elle-
même29 et que la francophonie ontarienne, de l’Ouest et du Nord
construit sa propre identité (Martel 1997). La Cour suprême du
Canada reconnaît l’importance nationale des droits linguistiques et
intègre des remarques à ce propos dans sa jurisprudence ; c’est ainsi
que le juge Dickson dit :
La question de la dualité linguistique est une préoccupation de vieille
date au Canada, un pays dans l’histoire duquel les langues française et
anglaise sont solidement enracinées. Les garanties constitutionnelles en
matière linguistique traduisent des efforts continus et renouvelés en vue
de réaliser le bilinguisme. Selon moi, nous devons nous efforcer particu-
lièrement de rester fidèles à l’esprit et à l’objet des droits linguistiques
enchâssés dans la Charte30.
29. C’est une Nation sans État, mais qui a son drapeau, sa fête nationale, son hymne
national et sa société nationale, la Société Nationale de l’Acadie. L’Acadie n’est
pas une diaspora québécoise.
30. Société des Acadiens du Nouveau-Brunswick c Association of Parents for Fairness
in Education [1986] 1 R.C.S. 549 paragraphe 19. Dissident quant au résultat, le
juge en chef Dickson n’a pas été contredit par le reste de la Cour sur ce point.
404 Pierre Foucher
33. Arrêt Amax Potash Ltd. c. Gouvernement de la Saskatchewan, [1977] 2 R.C.S. 576,
à la p. 590. Voir également Renvoi : Résolution pour modifier la Constitution,
[1981] 1 R.C.S. 753 (Renvoi sur le rapatriement), aux p. 841, 848 et 877.
406 Pierre Foucher
il n’est pas rare qu’un procès en droits linguistiques attire des inter-
venants qui présentent une opinion et une interprétation différentes
de celles des parties elles-mêmes, ce qui permet à la Cour de
mesurer l’étendue des points de vue et des solutions potentielles. Il
est vrai que la Cour, en tant qu’institution, n’est pas toujours le
forum le plus approprié pour régler tous les détails. Ainsi, on ne
peut lui demander de légiférer : tout au plus peut-elle ordonner au
législateur d’agir38. On ne peut lui demander d’administrer : elle peut
par contre ordonner au gouvernement de prendre ses responsabilités
et contrôler l’exécution39. Mieux équipée pour trancher un litige
entre deux parties, la Cour s’avère moins efficace, sur le plan des
remèdes, quand il s’agit de régler un problème systémique. Mais ce
n’est pas une raison pour abandonner complètement le recours
judiciaire. Combiné à d’autres stratégies de revendication politique,
le recours judiciaire reste un moyen puissant de rétablir l’équilibre
entre une minorité et le pouvoir (Foucher, 1986).
40. Une opinion confortée par l’arrêt Ottawa Roman Catholic Separate School Trustees
v Mackell [1913] AC 63.
41. Article 23(6) de la Loi constitutionnelle de 1867.
Langues, lois et droits. pour qui ? Pourquoi ? L’action de l’État et des acteurs 409
47. Ballantyne et als c Canada Comité des droits de l’homme des Nations-Unies
communication 385/1989, décision 05/05/1993, CCPR/C/47/D/385/1989 : en droit
international la notion de minorité s’apprécie selon le pays, non selon l’État fédéré,
ce qui est d’ailleurs plus conforme à la réalité sociodémographique.
48. Arsenault-Cameron, supra.
412 Pierre Foucher
Mon allusion à la culture est importante, car il est de fait que toute
garantie générale de droits linguistiques, surtout dans le domaine de
l’éducation, est indissociable d’une préoccupation à l’égard de la culture
véhiculée par la langue en question. Une langue est plus qu’un simple
moyen de communication ; elle fait partie intégrante de l’identité et de
la culture du peuple qui la parle. C’est le moyen par lequel les individus
se comprennent eux-mêmes et comprennent le milieu dans lequel ils
vivent. L’importance culturelle du langage a été reconnue par notre Cour
dans l’arrêt Ford c. Québec (Procureur général), [1988] 2 R.C.S. 712,
aux p. 748 et 749 :
Le langage n’est pas seulement un moyen ou un mode d’expression. Il
colore le contenu et le sens de l’expression. Comme le dit le préambule
de la Charte de la langue française elle-même, c’est aussi pour un peuple
un moyen d’exprimer son identité culturelle (je souligne)49.
La Cour, dans cet extrait, fait aussi un lien avec l’identité
personnelle qu’elle ne dissocie pas de l’identité culturelle du peuple.
Elle avait déjà rappelé ce fondement à au moins deux reprises50.
Dans Mercure, le juge La Forest associe les droits linguistiques à
des droits fondamentaux de la personne, mais dans Société des
Acadiens puis dans Beaulac, la Cour rappelle que le fondement de
ces droits diffère de celui des droits fondamentaux classiques. Les
droits linguistiques n’ont pas pour but de favoriser la communica-
tion, ni de permettre un procès juste et équitable : ils ont pour but
de garantir le maintien et le développement d’une communauté.
L’égalité représente un fondement juridique fort des droits
linguistiques. Il est réitéré dans presque toutes les décisions de la
Cour suprême du Canada. Dans Beaulac, la Cour mentionne, dans
un obiter éloquent, que l’égalité linguistique ne laisse aucune place
à la notion d’accommodements raisonnables :
Comme je l’ai dit plus tôt, dans un cadre de bilinguisme institutionnel,
une demande de service dans la langue de la minorité de langue officielle
ne doit pas être traitée comme s’il y avait une langue officielle principale
et une obligation d’accommodement en ce qui concerne l’emploi de
l’autre langue officielle. Le principe directeur est celui de l’égalité des
deux langues officielles51.
52. Reference re : Minority language education rights (Ontario) 1984), 10 DLR (4d)
491 p. 530-531 ; Mahe, supra.
Langues, lois et droits. pour qui ? Pourquoi ? L’action de l’État et des acteurs 415
* * *
55. Les exemples abondent ; citons les séquelles de Montfort : améliorations à l’hôpital ;
celles de Arsenault-Cameron : choix de site, construction d’un centre scolaire
communautaire ; Mahe : mise sur pied de cinq conseils scolaires en Alberta ; Affaire
des contraventions : plan fédéral de services en français en matière d’accès à la
justice ; Société des Acadiens : modifications à la loi pour avoir des juges qui
comprennent les accusés ; etc.
Langues, lois et droits. pour qui ? Pourquoi ? L’action de l’État et des acteurs 417
Reference re : Minority language education Boudreau, Annette, Lise Dubois, Jacques
rights (Ontario) 1984), 10 DLR (4d) Maurais, Grant McConnell (dir.) (2002),
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422 Pierre Foucher
Michel Seymour
Département de philosophie
Université de Montréal
1. Il va sans dire que je conçois la langue publique commune comme une notion
normative et non comme une notion descriptive. Je ne prétends pas que la notion
fait l’objet d’un consensus au Québec. Pour une discussion, voir Lockerbie et al.,
2005.
Le Canada reconnaît-il l’existence des droits collectifs linguistiques 425
L’affichage commercial
8. Pour un examen détaillé des politiques linguistiques dans le monde entier qui
s’appliquent à l’affichage, voir Leclerc, 1989.
Le Canada reconnaît-il l’existence des droits collectifs linguistiques 433
10. Je cite encore Jacques Gosselin (2003) : « l’approche fédérale cherche à établir une
fausse symétrie entre les francophones majoritaires au Québec, mais minoritaires
dans les neuf autres provinces du Canada et les anglophones minoritaires au
Québec, mais majoritaires dans le reste du Canada, dans le contexte nord-
américain où l’anglais est la langue dominante. Cette symétrie est fausse parce que
Le Canada reconnaît-il l’existence des droits collectifs linguistiques 437
les groupes en présence ne sont pas numériquement les mêmes et que les forces
d’attraction de l’anglais et du français ne sont pas les mêmes dans les contextes
canadien et nord-américain. Si bien que les francophones au Québec, même s’ils
y sont majoritaires, constituent une minorité aux plans canadien et continental, ce
que néglige toujours de prendre en compte la politique fédérale parce qu’elle ne
tient curieusement compte que des minorités au plan provincial, à savoir les
francophones dans les provinces hors Québec et les anglophones au Québec,
comme si leurs situations étaient identiques. Cette symétrie est également fausse
parce que la plupart des provinces canadiennes n’ont même pas à respecter les
exigences de bilinguisme législatif et judiciaire français anglais auxquelles le
Québec est astreint ».
438 Michel Seymour
11. Je ne songe pas ici seulement aux irritants particuliers mentionnés tout au long de
cet article. Je songe d’abord et avant tout à l’envahissement des compétences
québécoises, à l’usage abusif d’un soi-disant pouvoir de dépenser et au déséquilibre
fiscal. Ces politiques nationalistes ébranlent l’autonomie politique et fiscale des
provinces. Le Québec, en tant que peuple, ne peut accepter ces instabilités
politiques et fiscales aussi facilement que les provinces canadiennes. Il en va de
son droit à l’autodétermination en tant que peuple.
Le Canada reconnaît-il l’existence des droits collectifs linguistiques 439
12. Le Rapport Larose faisait les recommandations suivantes : « (1) Que la politique
linguistique du Québec rompe définitivement avec l’approche historique
canadienne qui divise l’identité québécoise suivant une ligne de partage ethnique,
la canadienne-française et la canadienne-anglaise, pour lui substituer une approche
civique qui fonde l’identité du peuple du Québec sur l’accueil et l’inclusion grâce
à une langue commune, le français, et à une culture commune formée des apports
de toutes ses composantes. (2) Que soit officiellement et formellement instituée
une citoyenneté québécoise pour traduire l’attachement des Québécoises et des
Québécois à l’ensemble des institutions et des valeurs patrimoniales et
démocratiques qu’ils ont en commun. (3) Que soient reconnus tous les éléments
constitutifs de la culture québécoise, notamment ses composantes historiques,
communauté québécoise d’expression anglaise, nations amérindiennes et inuite et
que l’État [...] favorise la multiplication de passerelles entre les différentes
composantes de cet héritage [...]. (4) Que la langue française soit déclarée langue
par laquelle s’exerce la citoyenneté québécoise. (5) Qu’apprendre le français au
Québec soit reconnu comme un droit fondamental. » (État généraux…, 2001)
Le Canada reconnaît-il l’existence des droits collectifs linguistiques 441
* * *
13. Bien entendu, pour que cet équilibre soit correctement maintenu, il faudrait aussi
que la nomination des juges à la Cour suprême ne soit pas entièrement sous la
responsabilité du gouvernement fédéral. Mais cela soulève un ensemble d’autres
problèmes que je ne veux pas discuter dans le cadre de ce texte.
444 Michel Seymour
Introduction
Légiférer en matière linguistique.................................................... 1
Marcel Martel et Martin Pâquet
Première partie
Circonscrire le lieu politique
deuxième partie
Mobiliser un savoir
Troisième partie
Énoncer le droit