Séquence Poésie 2nde
Séquence Poésie 2nde
Séquence Poésie 2nde
1
Pierre de PASCHAL fut historiographe du Roi Henri II ainsi que l’ami et le confident, le dédicataire parfois, de
plusieurs membres de la Pléiade, dont RONSARD.
2
Mascarades et bombances.
3
Dans la mythologie grecque, Ganymède le berger, est repéré par Zeus qui en fait son serviteur et son favori.
4
Brève papale.
5
Dérogation spéciale accordée par le Pape à quelques privilégiés.
Voilà de cette cour la plus grande vertu,
Dont souvent mal monté, malsain, et mal vêtu,
Sans barbe et sans argent on s'en retourne en France.
1
Singe savant.
2
Palais royal.
Il se fût bien passé de faire cette mine,
Sa grimace déplut. Le Monarque irrité
L'envoya chez Pluton1 faire le dégoûté.
Le Singe approuva fort cette sévérité,
Et flatteur excessif, il loua la colère
Et la griffe du Prince, et l'Antre, et cette odeur :
Il n'était ambre, il n'était fleur,
Qui ne fût ail au prix. Sa sotte flatterie
Eut un mauvais succès, et fut encor punie.
Ce Monseigneur du Lion-là
Fut parent de Caligula2.
Le Renard étant proche : Or çà, lui dit le Sire,
Que sens-tu ? dis-le-moi : parle sans déguiser.
L’autre aussitôt de s’excuser,
Alléguant3 un grand rhume : il ne pouvait que dire
Sans odorat ; bref il s’en tire.
Ceci vous sert d’enseignement.
Ne soyez à la cour, si vous voulez y plaire,
Ni fade adulateur4, ni parleur trop sincère ;
Et tâchez quelquefois de répondre en Normand5.
1
Dieu des Enfers chez les Romains.
2
Empereur romain réputé pour sa cruauté et sa folie.
3
Prétextant.
4
Adorateur.
5
Répondre de façon ambiguë, en « jouant sur les deux tableaux », fam. « en ménageant la chèvre et le choux ».
6
Dauber : moquer, railler.
Mais j'étais en pèlerinage ;
Et m'acquittais d'un vœu fait pour votre santé.
Même j'ai vu dans mon voyage
Gens experts et savants ; leur ai dit la langueur
Dont votre Majesté craint à bon droit la suite.
Vous ne manquez que de chaleur :
Le long âge en vous l'a détruite :
D'un Loup écorché vif appliquez-vous la peau
Toute chaude et toute fumante ;
Le secret sans doute en est beau
Pour la nature défaillante.
Messire Loup vous servira,
S'il vous plaît, de robe de chambre.
Le Roi goûte cet avis-là :
On écorche, on taille, on démembre
Messire Loup. Le Monarque en soupa,
Et de sa peau s'enveloppa ;
Messieurs les courtisans, cessez de vous détruire :
Faites si vous pouvez votre cour sans vous nuire.
Le mal se rend chez vous au quadruple du bien.
Les daubeurs1 ont leur tour d'une ou d'autre manière :
Vous êtes dans une carrière
Où l'on ne se pardonne rien.
TEXTE 6. J.-Pierre CLARIS de FLORIAN, « Le courtisan et le dieu Protée », Fables III (1793)
1
Esprits moqueurs.
Celui-ci, surpris, irrité,
Se change en noir serpent ; sa gueule empoisonnée
Lance et retire un dard messager du trépas,
Tandis que, dans sa marche oblique et détournée,
Il glisse sur lui-même et d’un pli fait un pas.
Le courtisan sourit : je connais cette allure,
Dit-il, et mieux que toi je sais mordre et ramper.
Il court alors pour l’attraper :
Mais le dieu change de figure ;
Il devient tour-à-tour loup, singe, lynx, renard.
Tu veux me vaincre dans mon art,
Disait le courtisan : mais, depuis mon enfance,
Plus que ces animaux avide, adroit, rusé,
Chacun de ces tours-là pour moi se trouve usé.
Changer d’habit, de mœurs, même de conscience ;
Je ne vois rien là que d’aisé.
Lors il saisit le dieu, le lie,
Arrache son oracle, et retourne vainqueur.
Ce trait nous prouve, ami lecteur,
Combien un courtisan peut servir la patrie.
TEXTES COMPLEMENTAIRES
Ne croirait-on pas de Cimon et de Clitandre qu’ils sont seuls chargés des détails de tout l’État,
et que seuls aussi ils en doivent répondre ? L’un a du moins les affaires de terre, et l’autre les
maritimes. Qui pourrait les représenter exprimerait l’empressement, l’inquiétude, la curiosité,
l’activité, saurait peindre le mouvement. On ne les a jamais vus assis, jamais fixes et arrêtés :
qui même les a vus marcher ? on les voit courir, parler en courant, et vous interroger sans
attendre de réponse. Ils ne viennent d’aucun endroit, ils ne vont nulle part : ils passent et ils
repassent. Ne les retardez pas dans leur course précipitée, vous démonteriez leur machine ;
ne leur faites pas de questions, ou donnez-leur du moins le temps de respirer et de se
ressouvenir qu’ils n’ont nulle affaire, qu’ils peuvent demeurer avec vous et longtemps, vous
suivre même où il vous plaira de les emmener. Ils ne sont pas les Satellites de Jupiter, je veux
dire ceux qui pressent et qui entourent le prince, mais ils l’annoncent et le précèdent ; ils se
lancent impétueusement dans la foule des courtisans ; tout ce qui se trouve sur leur passage
est en péril. Leur profession est d’être vus et revus, et ils ne se couchent jamais sans s’être
acquittés d’un emploi si sérieux et si utile à la république. Ils sont au reste instruits à fond de
toutes les nouvelles indifférentes, et ils savent à la cour tout ce que l’on peut y ignorer ; il ne
leur manque aucun des talents nécessaires pour s’avancer médiocrement. Gens néanmoins
éveillés et alertes sur tout ce qu’ils croient leur convenir, un peu entreprenants, légers et
précipités. Le dirai-je ? ils portent au vent, attelés tous deux au char de la Fortune, et tous deux
fort éloignés de s’y voir assis.
TEXTE B. Paul Thiry d’HOLBACH, Essai sur l’art de ramper, à l’usage des courtisans (1790).
Il faut avouer qu’un animal si étrange est difficile à définir ; loin d’être connu des autres, il peut
à peine se connaître lui-même ; cependant il paraît que, tout bien considéré, on peut le ranger
dans la classe des hommes, avec cette différence néanmoins que les hommes ordinaires n’ont
qu’une âme, au lieu que l’homme de cour paraît sensiblement en avoir plusieurs. En effet, un
courtisan est tantôt insolent et tantôt bas ; tantôt de l’avarice la plus sordide et de l’avidité la
plus insatiable, tantôt de la plus extrême prodigalité1, tantôt de l’audace la plus décidée, tantôt
de la plus honteuse lâcheté, tantôt de l’arrogance la plus impertinente, et tantôt de la politesse
la plus étudiée ; en un mot c’est un Protée2, un Janus3, ou plutôt un dieu de l’Inde qu’on
représente avec sept faces différentes.
LECTURE CURSIVE
1
Aptitude à la dépense.
2
Dans la mythologie grecque, divinité marine au service de Poséidon et qui avait le pouvoir de se
métamorphoser.
3
Dans la mythologie romaine, divinité qui présentait deux visages, l’un tourné vers le passé, l’autre vers l’avenir.