IVERMECTINE: Menace Sur La Faune Sauvage
IVERMECTINE: Menace Sur La Faune Sauvage
IVERMECTINE: Menace Sur La Faune Sauvage
Bouse et insectes
On a tous en mémoire les dégâts causés par le DDT, insecticide à large spectre
des années 70 dont l'interdiction, sous la pression de l'opinion publique et des
médias, marqua le début de la conscience environnementale en Europe. Bien
des produits à usage agricole se sont relayés depuis. L'un d'entre eux,
l'ivermectine (un vermifuge massivement utilisé pour traiter le bétail), menace
aujourd'hui de transformer nos campagnes en désert biologique.
Réglementation déficiente
Ce n'est pas un hasard si la législation européenne interdit d'administrer cette
molécule au bétail gestant ; et que dans le cas spécifique du " bolus " ingérable
d'ivermectine (une capsule à diffusion lente qui, rappelons le, se fixe pendant 4 mois
dans la panse), la viande ne doit pas être commercialisée pendant une durée de 6
mois !
Mais aucune réglementation ne régit les modalités d'utilisation et le calendrier
d'administration du produit, ce qui est étonnant au vu de ses effets toxiques
secondaires sur le long terme. Pourtant, une étude récente menée en collaboration
avec le Ministère de l'Environnement a prouvé que 143 jours après un traitement par
" bolus " d'ivermectine, le bétail continuait à rejeter des déjections à effets
significativement mortels pour les insectes coprophages.
En Grande Bretagne, l'effondrement spectaculaire des populations d'alouettes
semble étroitement corrélé à la généralisation de l'ivermectine. Même son de cloche
des chiroptèrologues anglais (spécialistes des chauves-souris) qui établissent un lien
direct entre la raréfaction des rhinolophes (une chauve-souris insectivore dont le
régime alimentaire est largement tributaire des bousiers du genre Aphodius) et les
traitements à l'ivermectine dans les régions d'élevage. Quand on sait qu'une seule
bouse peut contenir en temps normal jusqu'à 100 larves d'Aphodius, on imagine
aisément la pénurie alimentaire qui guette les populations de chauves-souris du
Royaume Uni.
Il est peu probable qu'à pratiques identiques, les effets diffèrent en France, même si
nous ne disposons pas de données aussi étoffées que celles collectées par les
naturalistes d'outre-Manche. En définitive, ce sont des pans entiers des pyramides
alimentaires de l'écosystème prairial et du bocage qui pâtissent sans doute d'un état
de fait auquel on n'a pas prêté la moindre attention jusqu'ici.
S'il est un maillon important dans la chaîne alimentaire des milieux herbeux, c'est
bien celui des lombricidés. Mais l'on ignore à ce jour si les vers de terre supportent
les effets négatifs de la présence de bouses et crottins toxiques à la surface de leur
domaine. Si tel est le cas, de nombreux consommateurs secondaires (comme les
grives et plusieurs limicoles liés aux herbages) pourraient faire les frais des
traitements à l'ivermectine.