Diversite
Diversite
Diversite
Comme nous le dit Henry Corbin, le monde islamique n'est pas un monolithe; son concept
religieux ne s'identifie pas avec le concept politique du monde arabe. Il y a un Islam iranien,
comme il y a un Islam turc, indien, indonésien, malais, etc. À l'image de cette remarque, nous
pouvons ajouter qu'il n'y a pas une approche uniforme de l'islamité en Islam. Nous avons
plusieurs types d’Islam et plusieurs manières de considérer la religiosité en son sein.
Il existe un Islam universel par lequel chaque tradition religieuse se manifeste. Cet Islam
universel se symbolise par le Coran, la Parole de Dieu et son insistance sur l'Unicité divine.
Chaque approche religieuse légitime son champ d'action, en se référant à cette Parole, selon
sa disposition et dans un espace-temps propre. De plus, la vision coranique est totalisante et a
la conviction qu'elle réunit en elle l'essence de toute réalité et de toute connaissance, tant
spirituelle que temporelle. Cette affirmation permet ainsi à chaque démarche religieuse de
justifier son discours à partir des fragments coraniques, de déployer à l'intérieur de l'Islam
différentes opinions et de conférer à l'Islam civilisationnel son aspect pluriel.
Le dogme fondamental et intangible dans l'Islam est l'Unité de Dieu. L'essentiel du culte
musulman consiste à affirmer, à proclamer, à témoigner que Dieu est unique et que
Mohammad est son envoyé. Cette profession de foi (tawhîd) introduit le croyant dans la
Communauté musulmane . Mais il est nécessaire de dire que cet acte de foi n'est pas un acte
sans précédent, car affirmer l'Unicité de Dieu n'est que sortir de l'oubli et de l'erreur et
confirmer le Pacte originel qui est, selon le Coran, intrinsèque à chaque être humain et la
base de son engagement envers la Vérité. Avec ce Pacte, l'homme s'est déjà lié à Dieu et à sa
Parole dans la pré-éternité. Accepter l'Islam est donc avant tout se soumettre à ce Pacte
initial qui est perpétuellement rappelé à l'homme par les prophètes, les envoyés de Dieu. Par
ce Pacte, l'homme a fait un contrat avec le Dieu pour affirmer qu'il n'y a « Point de divinité -
si ce n'est Dieu ». L'homme, en attestant ce Pacte, renouvelle son Islam, redevient musulman
et obéit aux prescriptions coraniques concernant les relations des hommes entre eux et les
relations de l'homme avec son seigneur Vrai pour faire régner sur terre « les droits de Dieu et
des hommes » définis par le Coran .
L'Islam est de droit, et fut, historiquement parlant et d'une même venue, religion, culture et
civilisation. L'histoire des peuples musulmans se déroule selon une dialectique unité -
diversité, où la diversité, sans s'abolir, se nourrit de l'unité.
Beaucoup de ces courants ou d'écoles ont disparu mais beaucoup aussi, et souvent les plus
anciennes, ont subsisté jusqu'à nos jours, avec une remarquable vitalité. La meilleure façon de
chercher à définir l’Islam est non point de partir d'une école déterminée (majoritaire ou non)
dont on ferait en quelque sorte l'expression d'une orthodoxie qui n’a aucun pouvoir
interprétatif, en définitive, et qualité pour imposer, mais de s'attacher à mieux connaître cette
profonde diversité de la logique islamique.
En se référant à tout ce qui vient d'être dit, nous pouvons entamer notre étude sur la diversité
religieuse au sein de l'Islam.
Pour la compréhension de l'exposé, j'ai parlé auparavant de courants ou d'écoles dans l'Islam
plutôt que comme on le fait le plus souvent, de "sectes", de "schisme" ou d'"hérésie". À vrai
dire, ces termes ne recoupent pas vraiment les notions musulmanes en jeu. Le mot que l'on
traduit par "secte" ou "schisme" est firqa, pluriel firaq. Il n'est aucunement porteur du sens
quelque peu péjoratif accolé à "secte" dans les langues européennes. La racine frq connote la
séparation, la distinction : d'où (même racine) al-furqân , "la Distinction" du bien et du mal,
qui est l'un des noms du Coran. Firqa ne signifie pas d'abord la "secte" que constitue une
hérésie ou un schisme, mais un groupe d'hommes qui se distinguent des autres, et par là s'en
séparent. Une firqa est aussi une "fraction" appartenant à un clan ou à une tribu.
Après sa mort, les conflits virtuels de son époque se concrétisent dans la réponse à donner à la
question de la pérennité de la communauté - société musulmane et de la qualité de son chef.
Qui pourrait lui succéder ? Faut-il donner la préférence à l'éthique islamique, à ses valeurs
universelles et à une personnalité pieuse pour les conduire ou faut-il insister sur l'opportunité
politique, sur la préférence tribale et sur une personnalité influente ? les réponses ont
engendrés les premiers jalons de différence vers l'interprétation juridique et religieuse du
pouvoir à partir du Coran, les paroles et les actes du prophète qui était également le chef de
l’état. Mais les différences restent à ce moment là au niveau de discours et ne dévient pas vers
une opposition armée et des intrigues politiques. Mais après presque 14 ans, les oppositions
prennent un tournure plus radicale et plus agressive avec l'assassinat du deuxième calife et
puis avec l'assassinat des troisième et quatrième calife. La société musulmane, devenue riche
suite aux conquêtes, développe d’une part en son sein le discours égalitaire d'une
"muslimcratie" et, d'autre part, le discours d'un Islam discriminateur fondé sur la différence et
la prédominance de l’arabité.
Avec la califat du troisième calife (644-656), la famille Omeyyades qui avait commencé ,
sous le califat d'Abû Bakr et d'Umar, à s'implanter en Syrie et à reconquérir une partie de sa
puissance, allait bénéficier sous ‘Uthmân qui lui était apparenté, d'une prépondérance
croissante dont pouvaient difficilement s'accommoder les autres familles de l'aristocratie
arabe et les âmes pieuses. Le népotisme du nouveau calife acheva de dresser contre lui un
nombre grandissant d'adversaires et aboutit à son assassinat.
Six mois à peine après la proclamation de d'Ali , une bataille éclate avec beaucoup de gravité
au sein de l'État de Médine. Cette guerre, dénommée "la bataille du Chameau", a été menée
par 'Ali contre 'Aïcha une des épouse du Prophète et contre deux des compagnons de premier
rang de celui-ci.
La grande faiblesse de la coalition des forces d’Ali était de compter également en son sein
tous ceux qui, à des titres divers, avaient trempé dans le meurtre du calife 'Uthman. Mu'âwiya,
de la famille Omeyade et le gouverneur de la Syrie profita l'assassinat de 'Uthman pour
conquérir le pouvoir. Ce fut une guerre de dévolution, dont le titre califal était l'enjeu. Siffin
fut la bataille où s'affrontèrent les troupes califales d'Ali et l'armée de Mu'âwiya, tardivement
rallié à l'Islam. C'est l'ère de la grande séparation des musulmans: l'issue de la lutte était
indécise, et penchait en faveur d'Ali. Les cavaliers de Mu'âwiya accrochèrent à leurs lances
des feuillets du Coran. Le combat dès lors dut cesser. Ce fut le première acte
d'instrumentalisation du Coran et de l'Islam comme religion. Des pourparlers s'engagèrent, et
l'habileté manœuvrière des représentants de Mu'âwiya emporta la décision. Peu après,
Mu'awiya s'empara du titre de Calife, transporta la capitale de Médine à Damas et fonda la
première dynastie arabe musulmane.
1- Une partie des partisans d'Ali , indignés de son acceptation d'arbitrage, "sortirent" des
rangs, récusant aussi bien 'Ali que Mu'âwiya. Parmi les quatre Califes de Médine, les deux
premiers seuls furent considérés par eux comme légitimes. Un chef qui commet une faute
cesse par là même d'être un Imam ou calife; et la charge suprême ne requiert pas
l'appartenance à la tribu de Quraysh ou à la tribu Mekkoise, elle est accessible à tout
musulman juste, pieux et intègre. Les hommes de ce groupe furent appelés "les sortants", ou
Khârijites. Ils constituent le premier courant opposé officiellement au pouvoir du chef de
l’Umma par une interprétation théopolitique des principes islamiques, en utilisant la lutte
armée comme moyen de conquête du pouvoir.
2- Le second groupe des opposants de l'arbitrage du Siffin fut celui des partisans d’Ali, restés
fidèle à leur chef. C'est le parti ou "Shïia" d'Ali, d'où shîisme. Ce courant deviendra une
opposition déclarée et constituée à partir de la mort en martyre du petit fils du Prophète et du
fils d’Ali par le pouvoir d’Omeyad.
Après ces deux batailles où les musulmans se sont battus contre les musulmans et Arabes
contre les Arabes, une troisième bataille s'est produite entre les partisans d’Ali et les kharijites
à Nahravan (entre deux courants d’opposition au pouvoir de Mu’awiya). Cette guerre a été
déclenchée en juillet 658 où la sédition fut écrasée dans le sang et où les chefs rebelles furent
tués. En février 661 Ali était poignardé dans la mosquée de Kûfa, en Iraq actuel, par un
Khârijite.
Après la mort d’Ali, et pendant toute l’histoire de l'Islam, trois tendances majeures se
distinguent du point de vue juridique et politique:
* La tendance Murujite qui deviendra dans son évolution ce que nous appelons
actuellement le Sunisme. Le Sunisme est orienté vers une attitude juridique, dynastique et
officielle. Les "gens de la Tradition" ou Sunnites, sont devenus plus en plus majoritaires dans
les pays musulmans au cours des siècles. Ils sont les descendants de ceux qui, à Siffin,
s'inclinèrent devant le fait accompli et acceptèrent l'arbitrage. Pour les Sunnites, les quatre
premiers Califes sont légitimes à titre égal. Face aux autres courants, le Sunnisme se présente
en effet comme délibérément réaliste et respectueux des faits, car tout événement est le signe
de la Volonté de Dieu.
A l'époque Omeyyade, le pouvoir politique s'appuie sur les juristes murujites pour légitimer
religieusement ses actes faces à l'opposition shiite et kharijite soutenue par les nouveaux
convertis d'origine mésopotamienne et persane. L'idéologie politique de l'opposition se base
sur l'universalité islamique et la muslimcratie contre la différence et l'arabité.
En 747, une insurrection générale, organisé par les partisans d'Ali, se déclenche sous le
commandement d'un persan dénommé Abu Muslim, contre les Omeyyades, à partir de l'est de
l'Iran. L'appel à la révolte est lancé au nom des Hachémites, c'est-à-dire de toute la famille du
Prophète.
Après le succès des insurgés, Abu Muslem se rapproche des descendants d'Abbas et offre le
pouvoir aux abbassides, proches des shiites modérés. Dans le prône (khotba) qu'il prononce
après sa proclamation comme calife, Al Saffâh, célébre la gloire du Prophète et de tous ceux
qui avaient travaillé au triomphe de l'Islam. Il attaque violemment les partisans extrémistes
d'Ali ainsi que les Omeyyades, se présentant lui-même comme le véritable défenseur de la
Famille du Prophète et comme l'artisan de la réconciliation communautaire.
La dynastie des Abbassides, par la réalité politique, et par la coalition qu'ils établissent avec
les milieu modérés shiites, les tribus arabes qui se trouvaient dans l’aire de la culture
politique persane et une partie de l'aristocratie persane convertie nouvellement à l'Islam,
consolide son pouvoir contre les shiites radicaux et les kharijite. Les murujites, fidèles à leur
doctrine, soutiennent le nouveau pouvoir. C'est ainsi que, par une synergie doctrinale entre les
murujites et shiites modérés le sunnisme se constitue comme le courant officiel du pouvoir
islamique.
C'est dans le siècle qui a précédé la fin des Omeyyades et qui a suivi l'avènement des
Abbassides, de 724 jusqu'à 813, que commence véritablement à prendre corps la littérature
doctrinale du sunnisme qui devient authentiquement la doctrine officielle du pouvoir après la
reconnaissance de quatre écoles juridiques par l'état abbasside comme les références
interprétatives de la communauté islamique. En supprimant les autres écoles juridiques et en
empêchant l'Idjtihad, l'effort intellectuel jurisprudentiel, le pouvoir abbasside fige l'Islam
juridique et aide à la disparition de la pensée apologétique et de la philosophique.
C’est sur le plan de la sensibilité religieuse et spirituelle que le shïisme trouva son expression
la plus durable. Le culte des martyres oriente la dévotion des shïite vers un sens rédempteur
de la souffrance ignoré de la piété sunnites.
L'autre pôle de la sensibilité religieuse shïite qui joue un rôle important dans son éthique
d'action politique est d'ordre eschatologique. La croyance musulmane en générale croit à la
venue d'un Guide ultime de la Communauté - société musulmane qui la mènera dans la "voie
droite", dont le règne de justice préparera l'anéantissement, la résurrection et le Jugement.
Le shïisme personnifie en quelque sorte cette attente en la centrant sur le culte d'un "guide
caché", un chef juste et son retour en gloire pour les Derniers Temps. Pour les shïite , ce sera
Ali ou quelqu'un de sa descendance.
Le messianisme se présenta plusieurs fois, même dans les temps modernes, comme un élan de
révolte populaire pour la justice sociale, où se mêlent volontiers traditions sunnites et shïites,
un obscur élan d'espoir et de revendications toujours prêt à se concrétiser en un quelconque
type historique.
Les Kharijitses les plus intransigeants firent de la lutte armée contre les musulmans infidèles
une obligation, dès qu'elle est possible. Ils préconisèrent l'assassinat politique. C'est sous le
poignard d'un kharijite que tomba Âli , devant la mosquée de Kûfa, en Iraq, en 660. Le
courant plus modéré, des Ibâdites, la seule actuellement existante, s'écarta de ces outrances.
Mais elle reste fidèle à deux grands principes: la Walâya, "communion spirituelle", qui ne
doit être donnée qu'aux membres de la seule vraie Communauté musulmane, celle des
Ibâdites; et, en conséquence, la barâ'a, l'"excommunication", aussi bien du musulman infidèle
que du non-musulman. C'est un devoir que de nourrir la haine à l’égard de l'infidèle, car il
sera condamné par Dieu à l'enfer, et également de la lui manifester.
Cette école aura une très grande importance dans la pensée musulmane. Elle reste quand
même comme une science étrangère. Ses grands ennemis seront des juristes, mais plus
directement peut-être les apologistes. Maintes questions en effet seront communes aux deux
disciplines. Ainsi, les traités que le kalâm appellera "L'Existence de Dieu et Ses attributs",
deviendront dans les ouvrages de falsafa, la théologie, partie qui traite de la Divinité. Bien
plus, les chapitres "traditionnels" du kalâm, prophétie, fins dernières, etc., ne seront point
passés sous silence par les philosophes qui entendront les intégrer à leur vision générale du
monde.
Les philosophes restent l'une des gloires les plus universellement reconnues de la culture
arabo-irano-musulmane. L'enseignement traditionnel les combattit sans doute et les
stigmatisa. Mais le mouvement de "renouveau islamique et national" contemporain sut les
accueillir et les réhabiliter.
* La tendance mystique : le soufisme. Orienté vers la connaissance du Vrai. Elle
quête l'aspect caché de la parole coranique à travers son aspect littéraire. Elle est une
tendance ésotérique et non exotérique. Cette tendance, vu son attirance vers l'univers spirituel
et mystique du message divin, s'est éloignée plus que d'autres du temporel et de la face
politique de l'Islam. Elle révèle à l'intérieur de l'Islam sociétal son aspect purement religieux.
Une des questions que l'on rencontre au cœur des enseignements soufis est la situation de
l'homme dans l'univers. En effet, c'est forcément à partir de cette situation que l'homme doit
entreprendre le voyage spirituel qui le conduira finalement au-delà du cosmos.
Dans le Coran, Dieu parle de Lui-même comme "vers l'extérieur" et "vers l'intérieur". Dans la
mesure où ce monde et tout ce qu'il contient sont des reflets et des théophanies des Noms et
Qualités de Dieu, toutes les réalités de ce monde possèdent également un aspect "vers
l'extérieur" et un autre "vers l'intérieur". La face extérieure des choses n'est pas pure illusion;
elle possède une réalité à son propre niveau, mais elle implique un mouvement en direction
de la séparation et du retrait hors du Principe qui réside au Centre et que l'on peut identifier
avec le "vers l'intérieur". Vivre dans l'extérieur, c'est déjà jouir du bienfait qu'est l'existence,
être plus que rien. Mais s'en satisfaire exclusivement est trahir la nature même de l'homme,
car la raison la plus profonde de son existence est précisément de passer de l'extérieur à
l'intérieur, de la périphérie du cercle d'existence à son Centre transcendant et ainsi de ramener
la création à son origine.
Le soufisme fournit le moyen d'atteindre ce but suprême. Dieu a rendu possible le passage de
l'extérieur à l'intérieur par la révélation, qui comporte à la fois les dimensions extérieures et
intérieures. Dans l'Islam, la dimension intérieure ou ésotérique de la révélation correspond
pour la plus grande part au Soufisme, bien que l'ésotérisme islamique se soit aussi manifesté
sous d'autres formes dans le contexte du shïisme.
Le soufisme a infusé son esprit dans toute la structure de l'Islam, dans ses manifestation tant
sociales qu'intellectuelles. Les ordres des soufis, qui constituent des corps bien organisés dans
la plus grande matrice de la société musulmane, ont de ce fait exercé des influences durables
et profondes sur toute la structure de la société. Il a aussi exercé une influence de taille dans
le domaine de l'éducation de l'art et des belles lettres.
Les apologétiques ont été mêlés aux politiques. Ils s’intéressaient aux problèmes moraux,
religieux et juridiques dans la société islamique. Ils étaient souvent des grands juges et
juristes. Une des courants importants de cette tendance était le mouvement Mutazilite, qui
défendait le libre arbitre et l'importance de la raison dans l'analyse des problèmes religieux et
juridiques. Il croyait également que le Coran est créé. Si bien qu'on peut l'appeler "parole de
Dieu", mais qu'il ne saurait être un attribut subsistant.
Mais le courant le plus répandu fut sans doute l'ash'arisme. Al Ash'ari fut un transfuge du
mu'tazilisme qui inaugura une "voie moyenne" entre le rationalisme mutazilite et le
littéralisme d'un autre courant, l’hanbalisme, dominant actuellement en Arabie et dans
beaucoup de mouvements islamiques.
Il faut signaler qu’à l'intérieur de chaque tendance existe d'une multiplicités de courants qui
se distinguent les uns des autres en s'appuyant sur le même paradigme fondamental.
Pour conclure mon exposé je dirai qu’il n'y a dans l'Islam ni secte ni hérésie. Chaque
musulman entre en relation directe avec Dieu dans la prière, le pèlerinage à la Mekke,
l'acquittement individuel du jeûne de Ramadan et l'aumône légale. Il est avant tout
responsable devant Dieu et non devant l'autorité religieuse. En même temps une quelconque
intervention interprétative de la parole de dieu au niveau du comportement sociétalechange
les obligations religieuses en une force politique et donne aux juristes et au pouvoir exécutif
son aspect civil et temporel.
Tout les courants islamiques qui adhèrent à l'unicité de Dieu et à la mission de Mohammad
sont musulmans. Dans le cas contraire, ils sont considérés comme non croyants ou non
musulmans. Ils seront assimilés à une des religions reconnue par l'Islam ou aux infidèles
associationnistes.
Quant à la question du clergé, il convient de noter que s'il n'y a pas, en Islam, d'organisation
hiérarchique disposant de pouvoirs spirituels et politiques, il existe un corps de docteurs de la
loi, juristes apologétiques, qui contrôlent l'orthodoxie et l'application de la Loi religieuse en
relation avec le pouvoir étatique. Ils sont les Ulama qui jouent à la fois un rôle religieux et
civil.
Théoriquement , les grands docteurs de la Loi peuvent affirmer leur indépendance vis-à-vis de
l'État. Aujourd’hui, le contrôle de l'État sur ce domaine personnel est plus étroit encore que
dans l'Islam classique. En retour, les Ulama contribuent à légitimer les pouvoirs établis et à
protéger l'État contre les assauts des extrémistes religieux, ou des contestataires laïcs.